Language of document : ECLI:EU:T:2007:225

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

12 juillet 2007 (*)

« Marchés publics de services – Procédure d’appel d’offres communautaire – Prestation de services relatifs à la collecte, à la production et à la diffusion de publications électroniques, notamment du Supplément au Journal officiel de l’Union européenne – Rejet de l’offre d’un soumissionnaire – Égalité de traitement – Obligation de motivation – Absence d’erreur manifeste d’appréciation »

Dans l’affaire T‑250/05,

Evropaïki Dynamiki – Proigmena Systimata Tilepikoinonion Pliroforikis kai Tilematikis AE, établie à Athènes (Grèce), représentée par Me N. Korogiannakis, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. M. Wilderspin et Mme M. Šimerdová, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de l’Office des publications officielles des Communautés européennes du 15 avril 2005 de ne pas retenir l’offre soumise par la requérante dans le cadre de l’appel d’offres émis le 19 novembre 2004 (JO 2004, S 226), portant sur une prestation de services relatifs à la collecte, à la production et à la diffusion de publications électroniques, notamment du Supplément au Journal officiel de l’Union européenne, et d’attribuer le marché au soumissionnaire retenu,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de MM. H. Legal, président, V. Vadapalas et N. Wahl, juges,

greffier : Mme C. Kantza, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1er mars 2007,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        La passation des marchés de services de la Commission est assujettie aux dispositions du titre V de la première partie du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1, ci‑après le « règlement financier »), ainsi qu’aux dispositions du règlement (CE, Euratom) n° 2342/2002 de la Commission, du 23 décembre 2002, établissant les modalités d’exécution du règlement financier (JO L 357, p. 1, ci-après les « modalités d’exécution »). Ces dispositions s’inspirent des directives communautaires en la matière, notamment, pour les marchés de services, de la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services (JO L 209, p. 1), telle que modifiée par la directive 97/52/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 octobre 1997 (JO L 328, p. 1), et remplacée par la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services (JO L 134, p. 114).

2        Selon l’article 89, paragraphe 1, du règlement financier :

« Tous les marchés publics financés totalement ou partiellement par le budget respectent les principes de transparence, de proportionnalité, d’égalité de traitement et de non-discrimination. »

3        Comme l’énonce l’article 97, paragraphe 2, du règlement financier, un marché peut être attribué à l’offre économiquement la plus avantageuse.

4        L’article 100, paragraphe 2, du règlement financier dispose que :

« Le pouvoir adjudicateur communique à tout candidat ou soumissionnaire écarté les motifs du rejet de sa candidature ou de son offre et, à tout soumissionnaire ayant fait une offre recevable et qui en fait la demande par écrit, les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre retenue ainsi que le nom de l’attributaire.

Toutefois la communication de certains éléments peut être omise dans les cas où elle ferait obstacle à l’application des lois, serait contraire à l’intérêt public, porterait préjudice aux intérêts commerciaux légitimes d’entreprises publiques ou privées ou pourrait nuire à une concurrence loyale entre celles-ci. »

5        En vertu de l’article 135, paragraphe 1, des modalités d’exécution :

« Les pouvoirs adjudicateurs établissent des critères de sélection clairs et non discriminatoires. »

6        Enfin, l’article 149, paragraphe 2, des modalités d’exécution, dans sa version applicable aux faits de l’espèce, prévoit ce qui suit :

« Le pouvoir adjudicateur communique, dans un délai maximal de quinze jours calendrier à compter de la réception d’une demande écrite, les informations mentionnées à l’article 100, paragraphe 2, du règlement financier. »

 Faits à l’origine du litige

7        La requérante est une société de droit grec, active dans le domaine de la technologie de l’information et des communications.

8        Par un avis de marché du 19 novembre 2004, publié au Supplément au Journal officiel de l’Union européenne (JO 2004, S 226) sous la référence 2004/S 226 194443, l’Office des publications officielles des Communautés européennes a lancé un appel d’offres portant sur une prestation de services relatifs à la collecte, à la production et à la diffusion de publications électroniques, notamment du Supplément au Journal officiel (ci-après l’« appel d’offres »).

9        L’appel d’offres était destiné à la fourniture de plusieurs services, dont un accès en ligne à la base de données des marchés publics européens TED (Tenders Electronic Daily), pour les avis de marchés publics publiés quotidiennement dans le Supplément au Journal officiel, ainsi qu’un accès audit Supplément par le biais d’un CD-ROM ou d’un DVD-ROM pour les abonnés souhaitant disposer d’un support matériel.

10      L’annexe I du projet de contrat, annexé à l’appel d’offres, précisait quels jours et à quelles heures le CD-ROM devait être remis à l’Office des publications, à Luxembourg (Luxembourg). Ainsi, pour une mise en page disponible à 15 heures le lundi et le jeudi, le contractant devait livrer le CD-ROM respectivement le mardi et le vendredi à 17 heures au plus tard. L’annexe I du projet de contrat prévoyait également que les soumissionnaires devaient présenter une offre incluant, comme alternative à la remise du CD-ROM à l’Office des publications, son envoi direct par la voie postale aux abonnés, respectivement le mardi et le vendredi à 22 heures au plus tard. Aux termes du projet de contrat, le respect de ces délais constituait l’objectif prioritaire.

11      Par télécopie du 24 décembre 2004, la requérante a indiqué à l’Office des publications que, selon ses propres recherches, une seule entreprise, Technicolor Srl, établie à Luxembourg, pouvait respecter les délais mentionnés dans l’appel d’offres pour la livraison du CD-ROM et que ladite entreprise était liée par un contrat d’exclusivité avec le contractant sortant, Euroscript Srl. Elle a demandé à l’Office des publications d’assurer des conditions égales de concurrence pour tous les soumissionnaires.

12      Par lettre du 4 janvier 2005, l’Office des publications a répondu que plusieurs entreprises étaient susceptibles de respecter les termes et conditions de l’appel d’offres et que celui-ci ne contenait aucune entrave à la concurrence.

13      Par télécopie du même jour, la requérante a réitéré ses affirmations et demandé à l’Office des publications de lui indiquer les entreprises capables de produire le CD-ROM et de respecter les délais de livraison mentionnés dans l’appel d’offres.

14      Par lettre du 6 janvier 2005, l’Office des publications a fait savoir à la requérante qu’il n’était pas en mesure de fournir d’autres informations concernant les opérateurs économiques susceptibles de respecter les exigences de l’appel d’offres.

15      Le 11 janvier 2005, la requérante, en consortium avec la société Sofware AG, a soumissionné à l’appel d’offres. L’Office des publications a également reçu trois autres offres, dont deux ont été rejetées lors de la phase de sélection.

16      Le 10 février 2005, la requérante a adressé à l’Office des publications des échantillons des supports du CD-ROM.

17      Par lettre et télécopie du 17 février 2005, l’Office des publications a demandé à la requérante, dans le cadre de l’évaluation de son offre, de lui fournir notamment un planning conforme aux délais mentionnés dans l’appel d’offres ainsi qu’un plan d’action détaillé visant à garantir la production, la livraison et/ou l’envoi du CD-ROM dans les délais.

18      Le 21 février 2005, la requérante a adressé à l’Office des publications une télécopie visant à répondre à ces demandes.

19      Par lettre et télécopie du 15 avril 2005, l’Office des publications a informé la requérante que son offre avait été rejetée, lors de la phase d’attribution, au motif qu’elle n’avait pas atteint le niveau de qualité nécessaire et que le contrat serait attribué au consortium Eutis, regroupant les sociétés Euroscript et Intrasoft, dont l’offre avait été considérée comme la plus avantageuse économiquement (ci-après la « décision attaquée »). L’Office des publications a ajouté que la requérante pouvait demander par écrit des informations additionnelles quant aux motifs du rejet de son offre.

20      Le même jour, la requérante a demandé par lettre et télécopie à l’Office des publications de lui communiquer le nom des éventuels partenaires et sous‑contractants du soumissionnaire retenu, les résultats attribués à son offre technique et à celle du soumissionnaire retenu pour chaque critère d’évaluation, une copie du rapport du comité d’évaluation ainsi que la comparaison entre son offre financière et celle du soumissionnaire retenu.

21      Par lettre du 19 avril 2005, l’Office des publications a répondu en indiquant le nom du soumissionnaire retenu et celui de son sous‑contractant, la société DocData, ainsi que les résultats obtenus par son offre technique et par celle du soumissionnaire retenu, sous la forme de tableaux, pour chacun des critères d’évaluation. Il en ressort que la requérante, lors de la phase d’attribution, a obtenu un total de 60,6 points sur 120 alors qu’Eutis a atteint un total de 100,4 points. Le tableau concernant la requérante contenait aussi six « commentaires généraux tenant compte des critères d’attribution et du prix », qui indiquaient notamment que l’offre ne contenait « pas d’information à propos du CD-ROM » et que « la production journalière ne sembl[ait] pas réalisable d’après les informations fournies sur les procédures ». La lettre de l’Office des publications précisait également que l’offre financière d’Eutis s’élevait à 5 784 684,54 euros et celle de la requérante à 4 973 140 euros.

22      Par télécopie du 27 avril 2005, la requérante a énoncé une série de griefs à l’encontre de la décision attaquée, en particulier en ce qui concernait les résultats de l’évaluation technique.

23      Par lettre du 13 mai 2005, l’Office des publications a annoncé à la requérante qu’il prenait en compte certains des griefs soulevés par elle et que, en conséquence, il suspendait la signature du contrat afin d’effectuer un examen complémentaire.

24      Par lettre du 3 juin 2005, l’Office des publications a informé la requérante que l’examen complémentaire avait confirmé le résultat indiqué dans sa lettre du 15 avril 2005 et qu’il avait décidé de procéder à la signature du contrat. Les conclusions de cet examen ont été résumées dans une note interne à l’Office des publications, mais n’ont pas fait l’objet d’un compte rendu formel.

25      Le 3 juin 2005 également, la requérante a demandé à l’Office des publications de lui communiquer les résultats de l’examen complémentaire ainsi que les réponses aux questions figurant dans sa lettre du 27 avril 2005. Elle a également demandé à l’Office des publications de ne pas procéder à la signature du contrat avant que ces demandes ne soient satisfaites.

26      À la date de l’introduction du présent recours, la requérante n’avait pas reçu de réponse audites demandes.

 Procédure et conclusions des parties

27      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 juin 2005, la requérante a introduit le présent recours.

28      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure, a invité la Commission à produire l’annexe II du projet de contrat annexé à l’appel d’offres. Le Tribunal a également invité les parties à répondre à des questions écrites. Il a été déféré à ces demandes dans le délai imparti.

29      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l’audience du 1er mars 2007. Lors de cette audience, la requérante a présenté des commentaires écrits concernant l’extrait du rapport du comité d’évaluation et la note interne à l’Office des publications établie dans le cadre de l’examen complémentaire de son offre, tels qu’annexés au mémoire en duplique de la Commission. Elle y fait valoir, à titre principal, qu’il y avait lieu de retirer du dossier la note interne à l’Office des publications

30      La Commission ayant pris position sur les commentaires de la requérante par écrit, la procédure orale a été close le 21 mars 2007.

31      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’Office des publications aux entiers dépens, même si le recours est rejeté.

32      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la demande en annulation

33      Au soutien de sa demande en annulation, la requérante invoque trois moyens. Le premier moyen est pris de l’atteinte au jeu de la libre concurrence et de la violation du principe d’égalité de traitement. Le deuxième moyen est tiré d’erreurs manifestes d’appréciation commises par l’Office des publications dans l’évaluation de l’offre de la requérante. Le troisième moyen est fondé sur la violation de l’obligation de motivation et sur l’absence de transparence.

34      Le Tribunal estime opportun d’examiner d’abord le premier moyen, puis le troisième moyen et, enfin, le deuxième moyen.

 Sur le premier moyen, tiré de l’atteinte au jeu de la libre concurrence et de la violation du principe d’égalité de traitement

–       Arguments des parties

35      La requérante fait valoir qu’elle a informé l’Office des publications de problèmes liés à l’appel d’offres, tenant notamment au fait que seuls les producteurs de CD-ROM situés à deux heures environ de Luxembourg par la route étaient en mesure de fournir la quantité demandée dans le délai imposé et, par conséquent, que les soumissionnaires étaient tenus de produire le CD-ROM dans les locaux des quelques sociétés disposant d’un site de production dans cette zone. Or, l’Office des publications n’aurait pris aucune mesure pour vérifier ces informations, remédier à la situation et avertir ensuite les soumissionnaires intéressés.

36      Ainsi, l’Office des publications aurait pu, d’une part, annuler ou modifier l’appel d’offres en ce qui concerne les délais de livraison du CD-ROM à Luxembourg ou, d’autre part, permettre aux contractants de proposer une production dans des zones plus éloignées et d’envoyer ensuite le CD‑ROM directement aux clients finaux. L’Office des publications aurait ainsi omis de garantir le respect de la libre concurrence au cours de la procédure d’appel d’offres, ce qui l’aurait conduit à considérer qu’une seule offre remplissait les critères de l’évaluation technique, celle du contractant sortant, alors que le projet présentait un niveau moyen de difficulté technique, les seuls éléments notables étant la grande quantité de CD-ROM à fabriquer (environ 8 000) et les délais de livraison très stricts dans les locaux de l’Office des publications.

37      Se référant à la jurisprudence, la requérante affirme également que l’Office des publications n’a pas assuré l’égalité de traitement entre les soumissionnaires à chaque étape de la procédure d’attribution du marché.

38      En outre, l’offre financière du soumissionnaire retenu serait très élevée. La procédure mise en œuvre ne serait donc pas parvenue à obtenir le meilleur rapport entre la qualité et le prix.

39      Dans son mémoire en réplique, la requérante ajoute qu’elle comprend le besoin de délais stricts en ce qui concerne le projet en cause. À cet égard, l’option consistant à envoyer directement le CD-ROM du lieu de production aux destinataires finaux aurait pu aboutir à une concurrence loyale entre les soumissionnaires. Or, l’Office des publications aurait imposé la livraison du CD-ROM dans ses bureaux à Luxembourg.

40      La Commission indique, à titre liminaire, qu’elle dispose d’un pouvoir d’appréciation important quant aux éléments à prendre en considération en vue de la prise d’une décision de passer un marché sur appel d’offres et que le contrôle du Tribunal doit se limiter à vérifier l’absence d’erreur grave et manifeste.

41      Elle souligne, ensuite, que l’Office des publications était tenu de publier les avis de marchés publics envoyés par les pouvoirs adjudicateurs dans les délais fixés par l’article 36, paragraphe 3, et l’annexe VIII de la directive 2004/18. Le CD-ROM constituant la seule version du Supplément au Journal officiel sur support matériel, il aurait été nécessaire de fixer des délais identiques pour la livraison du CD-ROM et la publication des avis sur Internet afin de ne pas désavantager les lecteurs du Supplément au Journal officiel dépourvus d’accès à Internet.

42      Par ailleurs, la requérante reconnaîtrait dans sa requête que plusieurs fabricants pouvaient être choisis comme partenaires. Par conséquent, les conditions posées par l’appel d’offres auraient pu être remplies en tout état de cause. La requérante reconnaîtrait également que l’appel d’offres permettait aux soumissionnaires de présenter des offres alternatives prévoyant l’envoi direct aux utilisateurs finaux.

43      Enfin, d’autres soumissionnaires auraient choisi des entreprises situées dans différents États membres (France, Belgique, Pays-Bas) pour la production du CD-ROM, ce qui démontrerait que les allégations de discrimination sont sans fondement.

–       Appréciation du Tribunal

44      Aux termes de l’article 89, paragraphe 1, du règlement financier, tous les marchés publics financés totalement ou partiellement par le budget respectent les principes de transparence, de proportionnalité, d’égalité de traitement et de non‑discrimination.

45      Ainsi, selon une jurisprudence constante, la Commission est tenue de veiller, à chaque phase d’une procédure d’appel d’offres, au respect du principe d’égalité de traitement et, par voie de conséquence, à l’égalité des chances de tous les soumissionnaires (arrêt de la Cour du 29 avril 2004, Commission/CAS Succhi di Frutta, C‑496/99 P, Rec. p. I‑3801, point 108 ; arrêts du Tribunal du 17 décembre 1998, Embassy Limousines & Services/Parlement, T‑203/96, Rec. p. II‑4239, point 85, et du 17 mars 2005, AFCon Management Consultants e.a./Commission, T‑160/03, Rec. p. II‑981, point 75).

46      En outre, un système de concurrence non faussée, tel que celui prévu par le traité, ne peut être garanti que si l’égalité des chances entre les différents opérateurs économiques est assurée (arrêts de la Cour du 19 mars 1991, France/Commission, C‑202/88, Rec. p. I‑1223, point 51, et du 22 mai 2003, Connect Austria, C‑462/99, Rec. p. I‑5197, point 83).

47      En l’espèce, il résulte des débats lors de l’audience que le processus aboutissant à diffuser le CD-ROM auprès des abonnés comprend trois phases. La première consiste à préparer l’appel d’offres, à la suite de l’envoi, par les pouvoirs adjudicateurs des États membres et les institutions ou organes communautaires, des documents devant être publiés ; la deuxième, à la validation et à la mise en page de l’appel d’offres et la troisième, à la production proprement dite et à la livraison du CD-ROM à l’Office des publications à Luxembourg ou à son envoi postal aux utilisateurs finaux. Le présent litige concerne uniquement la troisième phase, qui a fait l’objet de l’appel d’offres litigieux. Pour cette troisième phase, le soumissionnaire confie la partie technique de la production du CD-ROM à un fabricant.

48      La requérante fait valoir, en premier lieu, que l’appel d’offres ne permettait pas d’assurer le jeu de la libre concurrence et l’égalité de traitement entre les soumissionnaires en ce que les délais de livraison du CD-ROM à l’Office des publications à Luxembourg étaient trop courts.

49      À cet égard, il y a lieu de constater que l’appel d’offres prévoyait des délais très stricts pour la livraison du CD-ROM. Ainsi, pour une mise en page disponible à 15 heures le lundi et le jeudi, le contractant devait livrer le CD-ROM à l’Office des publications respectivement le mardi et le vendredi à 17 heures au plus tard. Le contractant bénéficiait ainsi, au total, de 26 heures alors que la seule production du CD-ROM requiert 12 à 20 heures selon la requérante, laquelle n’a pas été contredite sur ce point par la Commission lors de l’audience.

50      La requérante ne rapporte cependant pas la preuve que ces délais ont été fixés dans le but d’avantager le contractant sortant au détriment de tous les autres soumissionnaires.

51      En effet, tout d’abord, la requérante ne conteste pas la nécessité de délais courts, tels qu’ils résultent de l’article 36, paragraphe 3, de la directive 2004/18, afin que l’accès au CD-ROM pour les abonnés soit concomitant de la publication des avis de marché sur Internet.

52      Il convient de relever, ensuite, que l’argumentation de la requérante relative au nombre de fabricants susceptibles de respecter les délais prévus par l’appel d’offres est imprécise. Dans sa lettre du 24 décembre 2004, reprise dans sa requête, la requérante prétend qu’une seule société, à savoir Technicolor, établie à Luxembourg et liée par un contrat d’exclusivité à Euroscript, pouvait fabriquer le CD-ROM dans les délais prévus par l’appel d’offres. Puis, la requérante fait référence, dans sa requête, aux fabricants de CD-ROM situés à 2 heures de Luxembourg par la route, ce qui avait pour conséquence, selon elle, que les soumissionnaires étaient tenus de produire le CD-ROM dans les « locaux des quelques sociétés disposant d’un site de production dans cette zone ». Enfin, dans son mémoire en réplique, la requérante soutient que, outre Technicolor, un autre fabricant était susceptible de respecter les délais prévus, à savoir DocData, dont le site de production se situe à Langres (France).

53      Or, il résulte des réponses aux questions écrites posées par le Tribunal, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, qu’Euroscript avait choisi, pour l’appel d’offres, deux sites de production de DocData, à Langres et à Tillburg (Pays-Bas). Euroscript étant le soumissionnaire retenu, il y a lieu de considérer que ces sites répondent aux conditions de délais fixées par l’appel d’offres, ce que n’a pas contesté la requérante lors de l’audience. En outre, les deux autres soumissionnaires ont opté pour des sites encore différents : Wellen (Belgique) et Uden (Pays-Bas).

54      Il résulte de ces constatations que plusieurs fabricants autres que Technicolor étaient susceptibles de remplir les conditions de délais posées par l’appel d’offres.

55      Par ailleurs, la requérante n’apporte aucun élément de fait et de preuve au soutien de son affirmation selon laquelle Technicolor était liée par un contrat d’exclusivité à Euroscript.

56      La requérante affirme, en second lieu, que l’Office des publications a imposé la livraison du CD-ROM à Luxembourg alors que l’appel d’offres prévoyait également une autre option, l’envoi direct du CD-ROM par la voie postale aux abonnés.

57      À cet égard, il suffit de constater que la requérante procède par simple affirmation et demeure incapable d’établir ou, à tout le moins, de présenter des éléments de nature à étayer ses affirmations.

58      Au demeurant, la requérante n’explique pas comment l’Office des publications pouvait, au stade de l’examen des offres, refuser l’option consistant en l’envoi postal alors que celle-ci était prévue explicitement par l’appel d’offres.

59      Enfin, le fait qu’un seul soumissionnaire soit parvenu à offrir une prestation atteignant le niveau de qualité exigé par l’appel d’offres ne signifie pas, par lui-même, que l’appel d’offres présentait un caractère discriminatoire.

60      Il résulte de ce qui précède que la requérante n’a pas démontré que l’Office des publications avait porté atteinte au libre jeu de la concurrence et violé le principe de l’égalité de traitement entre les soumissionnaires.

61      Le premier moyen doit, par conséquent, être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation et de l’absence de transparence

–       Arguments des parties

62      La requérante fait valoir que la décision attaquée est viciée par l’absence d’une motivation adéquate. En s’abstenant de répondre aux questions posées par la requérante dans les délais et de fournir les clarifications réclamées à plusieurs reprises par écrit, l’Office des publications n’aurait pas permis d’évaluer la légalité de ses actes. Ainsi, le comité d’évaluation n’expliquerait pas pourquoi une offre supérieure de 1 600 000 euros à celle présentée par la requérante pourrait être considérée comme plus avantageuse. En outre, l’Office des publications n’aurait donné aucune réponse aux questions posées par la requérante dans sa lettre du 27 avril 2005.

63      Par ailleurs, en vertu notamment de l’article 253 CE, de l’article 100 du règlement financier et de l’article 148, paragraphe 3, du règlement n° 2342/2002, le pouvoir adjudicateur serait tenu de motiver sa décision de rejeter l’offre d’un soumissionnaire, lorsque ce dernier lui en fait la demande, dans un délai de quinze jours. À cet égard, l’Office des publications n’aurait pas justifié de manière suffisante les caractéristiques et les avantages comparatifs de l’offre du soumissionnaire retenu. La motivation insuffisante de la décision attaquée rendrait dès lors difficile le contrôle juridictionnel.

64      La requérante fait également valoir, dans son mémoire en réplique, que le règlement (CE, Euratom) n° 1261/2005 de la Commission, du 20 juillet 2005, modifiant le règlement n° 2342/2002 (JO L 201, p. 3), a complété l’article 149 du règlement n° 2342/2002 en vue de limiter le pouvoir discrétionnaire des institutions communautaires à propos de la notification des motifs du rejet de l’offre d’un soumissionnaire. L’Office des publications aurait ainsi mal interprété son obligation de motiver ses décisions.

65      La Commission soutient que l’Office des publications s’est pleinement conformé à son obligation de motivation et est même allé au-delà. En effet, par sa lettre du 15 avril 2005, il aurait tout d’abord informé la requérante que son offre n’avait pas été retenue au motif qu’elle n’avait pas atteint le niveau de qualité nécessaire et que, si elle en faisait la demande par écrit, elle serait informée plus en détail des caractéristiques et des avantages relatifs de l’offre retenue ainsi que du nom de l’attributaire.

66      La requérante ayant demandé des informations supplémentaires le même jour, l’Office des publications aurait alors communiqué les tableaux d’évaluation technique dans lesquels figuraient les détails de son offre et ceux de l’offre retenue ainsi que le nom de l’attributaire et de son sous‑contractant. Ainsi, la requérante aurait disposé de tous les éléments pour comprendre les raisons pour lesquelles son offre avait été rejetée.

67      En outre, la motivation n’aurait pas pour finalité de donner au soumissionnaire dont l’offre a été rejetée le droit d’exiger que la procédure d’évaluation soit recommencée ni de créer l’obligation pour la Commission de prouver la légalité de sa décision. La Commission aurait pour seule obligation de motiver ses décisions et il appartiendrait ensuite à la requérante de démontrer qu’une erreur manifeste ressort de ces motifs.

–       Appréciation du Tribunal

68      Conformément à l’article 100, paragraphe 2, du règlement financier et de l’article 149, paragraphe 2, des modalités d’exécution, l’Office des publications devait communiquer à la requérante les motifs du rejet de son offre et, celle-ci ayant fait une offre recevable, les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre retenue ainsi que le nom de l’attributaire, dans un délai maximal de quinze jours calendaires à compter de la réception d’une demande écrite.

69      Cette façon de procéder est conforme à la finalité de l’obligation de motivation inscrite à l’article 253 CE, selon laquelle il convient de faire apparaître d’une façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte, de façon, d’une part, à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de faire valoir leurs droits et, d’autre part, à permettre au juge d’exercer son contrôle (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 14 juillet 1995, Koyo Seiko/Conseil, T‑166/94, Rec. p. II‑2129, point 103, et du 8 mai 1996, Adia interim/Commission, T‑19/95, Rec. p. II‑321, point 32).

70      À titre liminaire, il convient de préciser que l’annexe II du projet de contrat, relative aux « conditions particulières » prévoyait, dans son point 5.3, que le contrat serait attribué au soumissionnaire soumettant l’offre économiquement la plus avantageuse, sur la base de deux critères d’attribution : d’une part, la qualité du processus de production, évaluée selon six critères spécifiques permettant d’atteindre 120 points, et, d’autre part, l’évaluation des conditions financières. Une fois la qualité des offres évaluée, les entreprises ayant obtenu le score minimal de 80 points au total et la moitié des points possibles pour chacun des critères seraient classées en fonction du prix proposé et le contrat serait attribué à l’offre la plus basse.

71      En l’espèce, l’Office des publications a tout d’abord informé la requérante, par lettre en date du 15 avril 2005, que son offre n’avait pas été retenue dans le cadre de l’appel d’offres. Cette lettre contenait deux libellés standard concernant la phase d’évaluation : « l’offre n’a pas atteint le niveau de qualité nécessaire » et « l’offre n’est pas la plus avantageuse économiquement ». L’Office des publications a porté une croix en face du premier libellé. Dans cette lettre, l’Office des publications a ajouté que le contrat serait conclu avec le consortium Eutis, dont l’offre avait été considérée comme la plus avantageuse économiquement, et que la requérante pouvait demander des informations additionnelles quant aux motifs du rejet de son offre.

72      À la suite d’une demande écrite de la requérante, également en date du 15 avril 2005, l’Office des publications, par lettre du 19 avril 2005, lui a communiqué le nom du soumissionnaire retenu et celui de son sous‑contractant, ainsi que les résultats obtenus par son offre technique et celle du soumissionnaire retenu pour chacun des critères d’évaluation, sous forme de tableaux. La lecture du tableau relatif à l’offre de la requérante indique qu’elle a obtenu des notes inférieures à la note moyenne pour deux des critères d’évaluation : 10,9 sur 25 en ce qui concerne le quatrième critère « Qualité des procédures proposées et organisation pour mener à bien le projet (développement et opération) » et 13 sur 30 pour le sixième critère « Qualité de la conception des composants techniques proposés (disque dur, logiciel et logiciel de réseau) pour le site Web TED et ses services afférents ». En outre, il ressort du tableau que la requérante a obtenu un total de 60,6 points sur 120.

73      Ce tableau était assorti de six commentaires généraux : « la méthodologie n’est pas bien adaptée » ; « certaines spécifications techniques ne sont pas prises en considération » ; « aucune information en ce qui concerne le CD-ROM » ; « la production journalière ne semble pas réalisable d’après les informations fournies sur les procédures » ; « les ressources proposées pour la production ne sont pas conformes » ; « l’offre ne répond pas aux caractéristiques demandées dans les spécifications ».

74      Dans le même temps, le tableau concernant le consortium Eutis indiquait que celui-ci avait obtenu la moyenne pour chacun des critères d’attribution, en particulier 21,4 points pour le quatrième critère et 25,1 points pour le sixième critère. En outre, le consortium Eutis a obtenu un total de 100,4 points.

75      Dès lors, il y a lieu de constater que l’Office des publications a fourni une motivation suffisamment détaillée des raisons pour lesquelles il a rejeté l’offre de la requérante et qu’il a exposé les caractéristiques et avantages relatifs de celle du soumissionnaire retenu (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du Tribunal du 26 février 2002, Esedra/Commission, T‑169/00, Rec. p. II‑609, points 187 à 193 ; du 25 février 2003, Strabag Benelux/Conseil, T‑183/00, Rec. p. II‑135, points 54 à 59, et Renco/Conseil, T‑4/01, Rec. p. II‑171, points 89 à 97). En effet, la requérante pouvait immédiatement identifier les raisons précises du rejet de son offre, à savoir qu’elle n’atteignait pas le niveau de qualité nécessaire pour deux des critères d’attribution ainsi que pour la qualité totale de son offre. Elle pouvait également comparer, pour chacun des critères d’attribution, ses résultats et ceux du soumissionnaire retenu. De surcroît, les commentaires généraux donnaient des précisions sur les éléments de son offre considérés comme non satisfaisants par l’Office des publications.

76      Une telle motivation permet par conséquent à la requérante de faire valoir ses droits et au Tribunal d’exercer son contrôle.

77      S’agissant de l’argument tiré de l’entrée en vigueur du règlement n° 1261/2005 de la Commission, lequel a complété l’article 149 des modalités d’exécution en y ajoutant un paragraphe 3, il suffit de relever que ce règlement n’était pas applicable au moment des faits de l’espèce. En tout état de cause, la requérante se contente de citer le texte du paragraphe 3 dudit article 149, sans préciser en quoi l’Office des publications n’aurait pas respecté ces nouvelles dispositions.

78      Enfin, s’agissant des correspondances échangées au cours de la procédure d’appel d’offres, il y a lieu de constater que l’Office des publications n’a pas répondu de façon détaillée à l’ensemble des lettres de la requérante, notamment à celle du 27 avril 2005. Cependant, il ne saurait en être fait grief à l’Office des publications, dès lors que, ayant motivé la décision attaquée conformément à l’article 100, paragraphe 2, du règlement financier, il n’était pas tenu par une obligation de réponse. En outre, cette circonstance ne saurait remettre en cause, à elle seule, la légalité de la décision attaquée (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du Tribunal du 4 mai 2005, Sena/AESA, T‑30/04, RecFP p. I‑A‑113 et II‑519, point 95).

79      Il résulte de ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’erreurs manifestes d’appréciation commises par l’Office des publications dans l’évaluation de l’offre de la requérante

–       Arguments des parties

80      La requérante fait valoir que le comité d’évaluation a commis plusieurs erreurs manifestes d’appréciation.

81      Tout d’abord, s’agissant du prix proposé par la requérante, le comité d’évaluation se référerait à un montant total de 4 973 140 euros, inférieur à celui de l’offre du soumissionnaire retenu, qui s’élève à 5 784 684,54 euros. Or, selon la requérante, le prix mentionné dans son offre était, en réalité, seulement de 4 177 748 euros.

82      La requérante souligne, ensuite, que le rapport du comité d’évaluation fait référence aux « commentaires généraux tenant compte des critères d’attribution et du prix », ce qui signifie que le prix a bien été pris en considération même si l’Office des publications indique, dans la décision attaquée, que son offre a été rejetée au motif qu’elle n’avait pas atteint le niveau de qualité nécessaire Dans son mémoire en réplique, la requérante ajoute que, l’enveloppe contenant l’offre financière étant ouverte au début de la procédure d’évaluation, l’Office des publications connaissait dès l’origine le prix proposé par chaque soumissionnaire. Elle est donc convaincue que l’offre de prix des soumissionnaires a été prise en compte par l’Office des publications.

83      La requérante affirme également que les arguments avancés par le comité d’évaluation pour rejeter son offre sont vagues et imprécis. Le comité d’évaluation aurait ainsi commis une autre erreur manifeste d’appréciation en estimant que la « production journalière ne sembl[ait] pas réalisable ». En effet, la requérante se serait fondée sur des offres émanant de fabricants professionnels de CD-ROM, dont l’un a travaillé avec le contractant sortant pendant plusieurs années, y compris au moment de l’appel d’offres. L’Office des publications ne pourrait prétendre que ce fabricant est en mesure de réaliser la production journalière, en consortium avec le contractant sortant, mais serait incapable de le faire lorsqu’il travaille avec la requérante.

84      Enfin, le comité d’évaluation ne pourrait davantage prétendre que « l’offre ne contient pas d’information à propos du CD-ROM ». En effet, l’offre de la requérante inclurait le même fabricant que celui choisi jusqu’alors par le contractant sortant. En outre, dans son offre technique, sa lettre du 10 février 2005 et sa télécopie du 21 février 2005, la requérante aurait fourni toutes les informations nécessaires en ce qui concerne le CD‑ROM.

85      La Commission expose que, aux termes des conditions particulières prévues par l’appel d’offres, le marché est attribué à l’offre économiquement la plus avantageuse, compte tenu de deux critères : la qualité du processus de production et l’évaluation des conditions financières. Seules les offres ayant obtenu au moins la moitié des points pour chacun des critères d’évaluation concernant la qualité du processus de production et une note totale d’au moins 80 points feraient l’objet d’une évaluation financière. La requérante n’étant pas parvenue à franchir l’étape qualitative, ses arguments concernant le prix seraient hors de propos.

86      La Commission admet que la formulation « commentaires généraux tenant compte des critères d’attribution et du prix », employée dans sa lettre du 19 avril 2005, est imprécise et qu’elle a pu prêter à confusion. Cependant, elle n’étayerait en rien l’allégation de la requérante, son offre n’ayant pas fait l’objet d’une évaluation financière. Les commentaires généraux énoncés dans sa lettre du 19 avril 2005 auraient eu simplement pour but de fournir à la requérante de plus amples informations quant aux motifs pour lesquels son offre ne répondait pas à toutes les exigences du cahier des charges. Ces commentaires devraient être lus en liaison avec le tableau d’évaluation des critères qualitatifs.

87      Dans son mémoire en duplique, la Commission reconnaît que sa lettre du 19 avril 2005 mentionne par erreur le prix de 4 973 140 euros en ce qui concerne l’offre de la requérante, sans que cette erreur ait eu d’incidence sur la procédure d’évaluation. Le prix proposé dans l’offre de la requérante n’apparaîtrait d’ailleurs pas dans le rapport du comité d’évaluation. En outre, l’examen complémentaire de son offre confirmerait la conclusion du comité d’évaluation selon laquelle elle ne satisfaisait pas à tous les critères de qualité.

88      Enfin, la Commission souligne que les offres ont été ouvertes conformément à l’article 145 du règlement n° 2342/2002, par la commission d’ouverture, dont la composition est différente de celle du comité d’évaluation.

–       Appréciation du Tribunal

89      À titre liminaire, il convient de rappeler que la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant aux éléments à prendre en considération en vue de la prise d’une décision de passer un marché sur appel d’offres et que le contrôle du Tribunal doit se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, ainsi que de l’exactitude matérielle des faits, de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (arrêt de la Cour du 23 novembre 1978, Agence européenne d’intérims/Commission, 56/77, Rec. p. 2215, point 20 ; arrêts du Tribunal du 24 février 2000, ADT Projekt/Commission, T‑145/98, Rec. p. II‑387, point 147, et du 6 juillet 2005, TQ3 Travel Solutions Belgium/Commission, T‑148/04, Rec. p. II‑2627, point 47).

90      Il y a également lieu de relever que, selon l’article 97, paragraphe 2, du règlement financier, le marché peut être attribué à l’offre économiquement la plus avantageuse.

91      En l’espèce, la requérante, qui ne conteste pas les deux critères d’attribution ni les critères relatifs à la qualité du processus de production retenus pour l’appel d’offres, prétend que l’Office des publications a commis plusieurs erreurs manifestes d’appréciation dans l’évaluation de son offre.

92      Premièrement, le comité d’évaluation se serait fondé sur un prix total de 4 973 140 euros alors que le prix figurant dans les documents de l’offre de la requérante serait en réalité de 4 177 748 euros. En outre, selon la requérante, le tableau d’évaluation de son offre, annexé à la lettre du 19 avril 2005, contient l’intitulé « Commentaires généraux tenant compte des critères d’attribution et du prix », ce qui indique que le prix a bien été pris en compte dans l’évaluation de son offre.

93      À cet égard, il convient de constater, tout d’abord, que la lettre de l’Office des publications du 19 avril 2005 mentionne de façon erronée le prix de 4 973 140 euros en ce qui concerne l’offre de la requérante, ce qu’admet la Commission dans son mémoire en duplique.

94      Cependant, qu’il s’agisse d’une erreur de plume ou d’une mauvaise évaluation du prix proposé par la requérante, une telle erreur est, en l’espèce, inopérante.

95      En effet, il convient de rappeler que l’offre de la requérante a obtenu un total de 60,6 points et moins de la moitié des points pour deux des critères relatifs à la qualité du processus de production. Par conséquent, en application des règles posées par l’annexe II du projet de contrat, l’offre de la requérante a été écartée au stade de l’examen de la qualité du processus de production. Il n’y a donc pas eu lieu d’examiner son prix, comme le confirme l’extrait du rapport du comité d’évaluation produit par la Commission.

96      Le fait que le tableau concernant la requérante contient l’intitulé « Commentaires généraux tenant compte des critères d’attribution et du prix » ne saurait remettre en cause une telle constatation dès lors que l’Office des publications a suivi la procédure d’évaluation posée par l’appel d’offres.

97      Par conséquent, le prix de l’offre de la requérante, bien qu’indiqué de façon erronée par l’Office des publications, n’a pas eu d’influence sur la décision d’attribuer le marché à un autre soumissionnaire.

98      Par ailleurs, la requérante affirme que l’Office des publications avait connaissance, dès le début de la procédure d’appel d’offres, du prix proposé par chaque soumissionnaire.

99      À cet égard, il suffit de relever que la requérante procède par simple affirmation et n’apporte aucun élément de fait ou de preuve au soutien de son affirmation.

100    En conséquence, la requérante n’a pas démontré que l’Office des publications avait commis une erreur manifeste d’appréciation en ce qui concerne le prix de son offre.

101    Deuxièmement, la requérante fait référence au commentaire général figurant au tableau d’évaluation de l’offre de la requérante selon lequel « la production journalière ne semble pas réalisable d’après les informations fournies sur les procédures ». Selon elle, l’Office des publications ne peut prétendre qu’un des fabricants est en mesure de réaliser la production journalière en consortium avec le contractant sortant mais serait incapable de le faire lorsqu’il travaille avec elle.

102    Cependant, là encore, la requérante n’avance aucun élément concret, de fait ou de preuve, permettant de considérer que l’Office des publications a commis une erreur manifeste d’appréciation de son offre en ce qui concerne la production journalière.

103    Troisièmement, l’Office des publications aurait commis une autre erreur d’appréciation en indiquant également, parmi les commentaires généraux annexés au tableau d’évaluation de son offre, que celle-ci ne comportait « aucune information en ce qui concerne le CD-ROM ». Au soutien de son argumentation, la requérante invoque différents éléments de son offre ainsi que ses lettres des 10 et 21 février 2005. Il résulterait clairement de ces documents qu’elle a fourni à l’Office des publications diverses informations relatives au CD-ROM.

104    Lors de l’audience, la Commission a indiqué que ce commentaire général se rapportait au quatrième critère d’évaluation, relatif à la « qualité des procédures proposées et l’organisation pour mener à bien le projet ».

105    Dès lors, il doit être constaté que le commentaire litigieux est, à tout le moins, imprécis et qu’il portait à confusion quant à l’appréciation effectuée par le comité d’évaluation sur l’offre de la requérante.

106    Cependant, cette imprécision ne saurait suffire à considérer que l’Office des publications a commis une erreur manifeste d’appréciation. En effet, le tableau comprend d’autres commentaires généraux, lesquels ne sont pas contestés de façon argumentée par la requérante. En outre, celle-ci n’a développé aucune argumentation visant à démontrer que les notes attribuées à son offre, pour chacun des critères d’évaluation, étaient erronées.

107    Le deuxième moyen doit par conséquent être rejeté comme non fondé.

 Sur la demande relative à la note interne à l’Office des publications établie dans le cadre de l’examen complémentaire de son offre

108    La Commission produit, en annexe II de son mémoire en duplique, la note interne à l’Office des publications, établie dans le cadre de l’examen complémentaire qui a fait suite à la lettre de la requérante du 27 avril 2005.

109    Dans ses commentaires écrits présentés lors de l’audience, la requérante demande, à titre principal, que cette note ne soit pas prise en compte par le Tribunal aux fins de l’examen de la légalité de la décision attaquée.

110    À cet égard, il y a lieu de relever que ce document, ni daté ni signé, est, selon la Commission, postérieur à la décision attaquée et qu’il ne se substitue pas à l’appréciation opérée préalablement par le comité d’évaluation.

111    Dès lors, le Tribunal estime qu’il y a lieu de faire droit à la demande de la requérante.

 Sur la demande de production du rapport du comité d’évaluation

112    La requérante demande, dans le cadre de son moyen tiré de la violation de l’obligation de motivation et de l’absence de transparence, que l’Office des publications produise une copie complète du rapport du comité d’évaluation. Elle souligne, dans son mémoire en réplique, que, s’agissant d’une demande d’accès aux documents, lorsque l’institution en cause refuse un tel accès, elle doit démontrer dans chaque cas d’espèce, sur la base des informations dont elle dispose, que les documents auxquels l’accès est sollicité relèvent effectivement des exceptions énumérées par le règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43).

113    Il y a lieu de relever, tout d’abord, que l’Office des publications n’était pas tenu de communiquer à la requérante, au titre de la motivation de la décision attaquée, le rapport du comité d’évaluation. En effet, l’article 100, paragraphe 2, du règlement financier prévoit uniquement que le pouvoir adjudicateur communique, à la suite d’une demande écrite, les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre retenue ainsi que le nom de l’attributaire.

114    Ensuite, à supposer que la demande de la requérante doive être comprise comme une demande d’accès aux documents, il y a lieu de constater que la requérante n’a pas satisfait à la procédure prévue aux articles 6 et suivants du règlement n° 1049/2001 pour demander l’accès au rapport du comité d’évaluation avant d’introduire une action devant le Tribunal en cas de refus, ce qui rend une telle demande irrecevable.

115    Enfin, la Commission produit, en annexe à son mémoire en duplique, l’extrait du rapport du comité d’évaluation concernant la requérante, dans une version non confidentielle.

116    Dans ces circonstances, le Tribunal estime qu’il n’y a pas lieu d’ordonner à la Commission de produire le rapport du comité d’évaluation dans son intégralité.

117    Au vu de ce tout qui précède, le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

 Arguments des parties

118    La requérante demande que l’Office des publications soit condamné aux entiers dépens, même si le recours est rejeté. Elle fait valoir que la motivation insuffisante de la décision attaquée ne lui a pas permis d’évaluer pleinement ses chances de contester ladite décision et l’a donc contrainte à introduire le présent recours en vue de préserver ses droits.

119    La Commission considère que les motifs allégués par la requérante sont inexistants.

 Appréciation du Tribunal

120    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

121    En l’espèce, il a été constaté que le troisième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation et de l’absence de transparence, n’était pas fondé. La demande de la requérante doit par conséquent être rejetée.

122    La requérante ayant succombé, il y a donc lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Evropaïki Dynamiki – Proigmena Systimata Tilepikoinonion Pliroforikis kai Tilematikis AE est condamnée aux dépens.

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 juillet 2007.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

      H. Legal


* Langue de procédure : l’anglais.