Language of document : ECLI:EU:T:2010:538

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

16 décembre 2010 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale RESVEROL – Marque internationale verbale antérieure LESTEROL – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑363/09,

Longevity Health Products, Inc., établie à Nassau (Bahamas), représentée par Me J. Korab, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. D. Botis, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Gruppo Lepetit SpA, établie à Lainate (Italie),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 9 juillet 2009 (affaire R 1204/2008‑2), relative à une procédure d’opposition entre Gruppo Lepetit SpA et Longevity Health Products, Inc.,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas, président, V. Vadapalas (rapporteur) et K. O’Higgins, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 17 septembre 2009,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 21 décembre 2009,

vu la décision du 2 mars 2010, refusant d’autoriser le dépôt d’un mémoire en réplique,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 19 juillet 2006, la requérante, Longevity Health Products, Inc., a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal RESVEROL.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Produits pharmaceutiques et vétérinaires ; produits pour soins de santé ; produits diététiques à usage médical, préparations d’oligo-éléments pour la consommation humaine et animale, compléments alimentaires à usage médical, compléments alimentaires minéraux, préparations vitaminées ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 2/2007, du 15 janvier 2007.

5        Le 16 avril 2007, Gruppo Lepetit SpA a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque internationale verbale LESTEROL, enregistrée le 5 mai 1960 sous le numéro 231327, ayant effet en Autriche, dans les pays du Benelux, en Allemagne, en France, en Hongrie et en Roumanie, désignant le produit relevant de la classe 5 et correspondant à la description suivante : « Produit contre l’artériosclérose ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

8        Le 25 juillet 2008, la division d’opposition a fait droit à l’opposition.

9        Le 19 août 2008, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 9 juillet 2009 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. En substance, elle a considéré que les produits concernés étaient identiques ou similaires, que les marques en conflit présentaient au moins un degré moyen de similitudes visuelle et phonétique et que, sur le plan conceptuel, lesdites marques ne revêtaient aucune signification. Elle a considéré qu’il existait un risque de confusion entre la marque communautaire demandée et la marque antérieure et qu’en tout état de cause, ce risque ne pouvait être exclu au motif que le public pertinent, constitué des professionnels de santé et des consommateurs moyens situés en Autriche, dans les pays du Benelux, en Allemagne, en France, en Hongrie et en Roumanie, faisait preuve d’un niveau d’attention supérieur à la moyenne.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        rejeter l’opposition ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      La requérante invoque un moyen unique, tiré, en substance, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Arguments des parties

14      En premier lieu, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir refusé d’examiner ses arguments visant à démontrer l’absence d’identité ou de similitude entre les signes, en se bornant à considérer que les similitudes manifestes entre les noms des deux marques en conflit suffisaient à justifier la présomption d’existence d’un risque de confusion, en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

15      En deuxième lieu, en ce qui concerne la comparaison des signes, la requérante soutient tout d’abord que, d’un point de vue visuel, les lettres des marques RESVEROL et LESTEROL sont placées dans un ordre différent. En tout état de cause, la première lettre, qui serait la plus déterminante pour l’impression visuelle, serait différente.

16      En outre, d’un point de vue phonétique, les marques en conflit présenteraient de nettes différences. Or, la prononciation d’une marque serait de la plus grande importance pour l’impression que les consommateurs en retiendraient, de sorte que, pour cette seule raison, le risque de confusion ne devrait pas être retenu.

17      En troisième lieu, en ce qui concerne l’existence d’un risque de confusion, la requérante soutient qu’on peut s’attendre à un degré d’attention accru de la part du public concerné, dans la mesure où, en règle générale, une confusion entre des produits de santé entraîne des conséquences particulièrement désagréables.

18      La requérante relève, enfin, que la titulaire de la marque antérieure n’utilise pas ladite marque et qu’elle a même retiré du marché le produit désigné par celle-ci.

19      L’OHMI conteste l’ensemble des arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

20      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), iii), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques qui ont fait l’objet d’un enregistrement international ayant effet dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

21      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

22      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

23      S’agissant, en premier lieu, du public pertinent, aucune des parties ne conteste qu’il est constitué des consommateurs finaux et des professionnels de santé situés en Autriche, dans les pays du Benelux, en Allemagne, en France, en Hongrie et en Roumanie.

24      Par ailleurs, en matière de produits pharmaceutiques, il y a lieu de relever que le niveau d’attention du consommateur moyen sera élevé ou, à tout le moins, plus élevé [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 28 septembre 2010, Market Watch/OHMI – Ares Trading (Seroslim), T‑201/08, non publié au Recueil, points 25 à 29]. Ainsi, eu égard aux produits en cause, le niveau d’attention du public pertinent constitué par les professionnels et les consommateurs finaux de cosmétiques, de produits pharmaceutiques et de matériels imprimés relatifs auxdits produits, sera relativement élevé [arrêt du Tribunal du 28 octobre 2010, Farmeco/OHMI – Allergan (BOTUMAX), T‑131/09, non publié au Recueil, points 25 et 65].

25      S’agissant, en deuxième lieu, de la comparaison des produits en cause, la requérante ne conteste pas le constat de la chambre de recours, figurant au point 23 de la décision attaquée, selon lequel lesdits produits sont identiques ou similaires.

26      S’agissant, en troisième lieu, de la comparaison des signes en conflit, il y a lieu de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [voir arrêt du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips-Van Heusen/OHM – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, Rec. p. II‑4335, point 47, et la jurisprudence citée].

27      En ce qui concerne, tout d’abord, la comparaison des signes sur le plan visuel, c’est à juste titre que la chambre de recours a, au point 25 de la décision attaquée, retenu que la marque antérieure LESTEROL et la marque demandée RESVEROL étaient toutes les deux composées de huit lettres dont six étaient communes aux deux marques, que ces marques présentaient la même suite de voyelles, « e », « e », « o », et le même suffixe « erol » et que seules les lettres en première position, « l » et « r », et en quatrième position, « t » et « v », différaient. Par ailleurs, s’il est de jurisprudence constante que le consommateur prête généralement une plus grande attention au début d’une marque qu’à sa fin [arrêts du Tribunal du 7 septembre 2006, Meric/OHMI – Arbora & Ausonia (PAM-PIM’S BABY-PROP), T‑133/05, Rec. p. II‑2737, point 51, et du 25 mars 2009, L’Oréal/OHMI – Spa Monopole (SPA THERAPY), T‑109/07, Rec. p. II‑675, point 30], on ne saurait toutefois en conclure qu’en l’espèce la différence entre les lettres « l » et « r » est susceptible d’écarter la similitude entre les signes en conflit, dans la mesure où, d’une part, il s’agit de consonnes dans les deux cas et où, d’autre part, le consommateur ne s’arrêtera pas à la première lettre, mais considérera au moins la première syllabe. Or, les deux lettres suivantes des premières syllabes des signes en conflit sont identiques. Ainsi, les différences entre les marques ne permettent pas de neutraliser les similitudes et il y a lieu de retenir un degré moyen de similitude visuelle.

28      En ce qui concerne, ensuite, la comparaison des signes sur le plan phonétique, il y a lieu de retenir, à l’instar de la chambre de recours au point 26 de la décision attaquée, que les marques en conflit se prononcent comme elles s’écrivent dans les pays concernés. De plus, les marques en conflit sont toutes les deux composées de trois syllabes ayant un même nombre de lettres et une sonorité proche compte tenu de l’identité des voyelles utilisées. Ces marques ont également des suffixes identiques. Les premières syllabes des signes en conflit ont aussi une sonorité également proche dans la mesure où, d’une part, sur les trois lettres qui les composent, deux sont identiques et où, d’autre part, les premières lettres, « l » et « r », sont des consonnes constrictives à la sonorité proche. Or, comme il a été signalé au point 27 ci-dessus, le consommateur a tendance à prêter plus d’attention au début qu’à la fin d’une marque. Au vu de ce qui précède, les différences de lettres en première position ne sont pas assez frappantes pour neutraliser la similitude phonétique des marques. En conséquence, un degré moyen de similitude phonétique doit être retenu.

29      À cet égard, si la requérante soutient que les différences entre les signes en cause sont évidentes du point de vue du consommateur pertinent, elle ne produit aucun élément probant à l’appui de ses allégations. Par ailleurs, compte tenu de ce qui précède, de telles considérations, à les supposer même établies ne sont pas susceptibles de remettre en cause l’appréciation selon laquelle un degré moyen de similitude phonétique doit être retenu.

30      En ce qui concerne, enfin, la comparaison des signes sur le plan conceptuel, il y a lieu de retenir, à l’instar de l’OHMI au point 25 de son mémoire en réponse, qu’aucun lien ne peut être établi entre les signes en cause et une nomenclature chimique et qu’en tout état de cause les signes sont dénués de toute signification.

31      S’agissant, en dernier lieu, du risque de confusion, il y a lieu de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques et inversement [arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 74].

32      Ainsi, il y a lieu de considérer, au vu de ce qui précède, que les signes en conflit étant similaires et les produits couverts étant identiques ou similaires, la chambre de recours a pu constater à bon droit et après avoir effectivement examiné les arguments présentés par la requérante, qu’il existait un risque de confusion.

33      En effet, compte tenu du degré constaté de similitude des marques ainsi que de l’identité des produits concernés, la circonstance que le niveau d’attention du public pertinent soit supérieur à la moyenne dès lors que ledit public est composé de professionnels de santé et de consommateurs finaux de produits de santé, ne suffit pas à exclure que ce public puisse croire que les produits en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement [arrêts du Tribunal du 17 octobre 2006, Armour Pharmaceutical/OHMI – Teva Pharmaceutical Industries (GALZIN), T‑483/04, Rec. p. II‑4109, point 80, et du 21 octobre 2008, Aventis Pharma/OHMI – Nycomed (PRAZOL), T‑95/07, non publié au Recueil, point 56].

34      Quant à l’argument de la requérante tiré d’une prétendue absence de l’usage de la marque antérieure, il est irrecevable dans la mesure où la requérante n’a pas présenté devant l’OHMI, en vertu de l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, une demande de preuve visant à l’établissement de la preuve de l’usage sérieux de la marque. En tout état de cause, l’administration d’une telle preuve ne saurait être exigée dans le cadre d’un recours devant le Tribunal, quand elle ne l’a pas été devant l’OHMI [arrêt du Tribunal du 7 novembre 2007, NV Marly/OHMI – Erdal (Top iX), T‑57/06, non publié au Recueil, point 18].

35      Par conséquent, il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

36      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

37      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Longevity Health Products, Inc., est condamnée aux dépens.

Papasavvas

Vadapalas

O’Higgins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 décembre 2010.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.