Language of document : ECLI:EU:T:2022:437

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

13 juillet 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale Tigercat – Marque de l’Union européenne figurative antérieure CAT – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑251/21,

Tigercat International Inc., établie à Cambridge, Ontario (Canada), représentée par Mes B. Führmeyer et E. Matthes, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme P. Georgieva, MM. D. Gája et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Caterpillar Inc., établie à Peoria, Illinois (États-Unis), représentée par Mes A. Renck et S. Petivlasova, avocats,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes V. Tomljenović (rapporteure), présidente, P. Škvařilová‑Pelzl et M. I. Nõmm, juges,

greffier : Mme A. Juhász-Tóth, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 2 mars 2022,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Tigercat International Inc., demande l’annulation et la réformation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 25 février 2021 (affaire R 16/2020-2), relative à une procédure d’opposition entre l’intervenante, Caterpillar Inc., et elle (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 26 août 2013, la requérante a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’EUIPO, en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)]. La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Tigercat.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 7 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Équipements sylvicoles électriques spéciaux, à savoir groupeuses de bûches à chenilles et à quatre roues à conduite jusqu’aux arbres, chargeuses de bûches, débusqueuses et autres équipements industriels sylvicoles, à savoir scies de groupage, cisailles de groupage et leurs pièces ».

4        Le 17 décembre 2013, l’intervenante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque de l’Union européenne figurative, déposée le 19 avril 2006 et enregistrée le 8 juillet 2010 sous le numéro 5028147, reproduite ci-après :

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–        la marque de l’Union européenne verbale CAT, déposée le 11 décembre 2006 et enregistrée le 13 août 2010 sous le numéro 9344755.

6        Les produits couverts par les marques antérieures relèvent des classes 7 et 12 et incluent notamment les « machines de sylviculture ».

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 [devenus article 8, paragraphe 1, sous b), et article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001].

8        Le 7 novembre 2019, la division d’opposition a entièrement fait droit à l’opposition formée contre la marque demandée, sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

9        Le 3 janvier 2020, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

10      Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours dans son intégralité. En substance, la chambre de recours, tenant compte du caractère identique des produits en cause, de la similitude moyenne des signes en conflit sur les plans visuel et phonétique, de la forte similitude des signes en conflit sur le plan conceptuel et du caractère distinctif accru de la marque antérieure, a conclu, malgré le niveau d’attention élevé du public pertinent, à l’existence d’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.Par ailleurs, la chambre de recours a considéré que la requérante n’avait produit aucun élément de preuve démontrant que les signes en conflit coexistaient sur le même marché sans qu’il existât un risque de confusion entre eux.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

12      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À titre liminaire, il convient de relever que, compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 26 août 2013, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée).

14      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par les parties à l’instance, dans leurs écritures, à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, comme visant l’article 8, paragraphe 1, sous b), et l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, d’une teneur identique.

15      À l’appui du recours, la requérante avance un moyen unique, tiré, en substance, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), et de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009.

16      Lors de l’audience, la requérante a renoncé au grief tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009. Il s’ensuit que seul le grief tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 doit être examiné.

17      Dans le cadre de son moyen unique, la requérante conteste, premièrement, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il existe, en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent en l’espèce. En particulier, elle remet en cause les appréciations de la chambre de recours relatives au niveau d’attention de ce public, aux éléments dominants et distinctifs des signes en conflit, au caractère distinctif de la marque de l’Union européenne figurative antérieure ainsi qu’à la comparaison de ces signes. Deuxièmement, la requérante fait valoir que l’absence de risque de confusion serait renforcée par la coexistence pacifique des signes en conflit et la coexistence de la marque antérieure avec des marques de tiers.

18      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

 Sur la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009

19      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

20      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

21      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

22      Dans ce contexte, il convient de rappeler qu’une opposition peut, comme en l’espèce, être fondée sur plusieurs droits antérieurs. De plus, pour des raisons d’économie de la procédure, la division d’opposition et, en deuxième instance, la chambre de recours sont libres de choisir sur laquelle des différentes marques antérieures invoquées elles fondent leur décision [voir arrêt du 17 novembre 2021, Soapland/EUIPO – Norma (Manòu), T‑504/20, non publié, EU:T:2021:789, point 34 et jurisprudence citée]. Étant donné que la division d’opposition et la chambre de recours ont jugé approprié d’examiner l’opposition par rapport à la marque de l’Union européenne figurative antérieure, décrite au point 5 ci-dessus, c’est sur cette base que le Tribunal opérera son contrôle de la légalité de la décision attaquée.

 Sur le public pertinent

23      Dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

24      Par « consommateur moyen », il n’y a pas lieu d’entendre le seul consommateur faisant partie du « grand public », mais le consommateur faisant partie du public typiquement ciblé par les produits et les services en cause. Ainsi, le « consommateur moyen » peut être un professionnel, si les produits et les services en cause s’adressent typiquement à un tel public [voir, en ce sens, arrêt du 8 novembre 2017, Steiniger/EUIPO – ista Deutschland (IST), T‑80/17, non publié, EU:T:2017:784, point 25].

25      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que, la marque antérieure étant une marque de l’Union européenne, le territoire pertinent était celui de l’Union européenne. Toutefois, pour des raisons d’économie de la procédure, elle s’est concentrée sur la partie anglophone de l’Union, à savoir l’Irlande et Malte. En ce qui concerne la composition du public pertinent et son niveau d’attention, la chambre de recours a considéré que les produits en cause s’adressaient à des clients professionnels possédant des connaissances ou une expertise professionnelle spécifique qui, au regard de la nature de ces produits, faisaient preuve d’un niveau d’attention élevé.

26      Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces appréciations, qui au demeurant ne sont pas contestées par les parties. La requérante soutient néanmoins que la chambre de recours n’a pas tenu compte du fait que le public professionnel pertinent serait très attentif aux différences entre les signes en conflit, notamment en raison du prix élevé et du fort caractère technologique des produits concernés. Elle reproche à la chambre de recours d’avoir considéré que, malgré son niveau d’attention élevé, ce public était susceptible de garder en mémoire une image imparfaite de la marque antérieure.

27      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

28      Il convient d’observer, à cet égard, que le public pertinent composé de professionnels du domaine concerné par les produits en cause est susceptible de manifester un degré élevé d’attention lors du choix de ces produits. En outre, quant au degré d’attention du public pertinent lors de l’achat, il convient de prendre en compte le prix élevé et le fort caractère technologique des produits concernés [voir arrêt du 12 septembre 2012, Ertmer/OHMI – Caterpillar (erkat), T‑566/10, non publié, EU:T:2012:419, point 43 et jurisprudence citée]. Ainsi, le choix de tels produits implique un processus de sélection scrupuleux, au cours duquel le consommateur concerné examinera différents produits présents sur le marché, compte tenu du caractère spécialisé des produits concernés et de leur coût important (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2012, erkat, T‑566/10, non publié, EU:T:2012:419, point 44).

29      Cependant, le fait que le public doté d’un degré d’attention élevé sera plus attentif aux différences entre les marques ne signifie pas qu’il examinera dans le moindre détail la marque à laquelle il sera confronté ou qu’il la comparera minutieusement à une autre marque. En effet, même un public faisant preuve d’un niveau d’attention élevé doit se fier à l’image imparfaite qu’il en a gardée en mémoire [arrêt du 31 janvier 2012, Spar/OHMI – Spa Group Europe (SPA GROUP), T‑378/09, non publié, EU:T:2012:34, point 20 ; voir, également, arrêt du 10 novembre 2021, Stada Arzneimittel/EUIPO – Pfizer (RUXYMLA), T‑248/20, non publié, EU:T:2021:772, point 58 et jurisprudence citée].

30      Ainsi, contrairement à ce que soutient en substance la requérante, la circonstance que le public pertinent soit doté d’un niveau d’attention élevée n’est pas de nature à exclure l’existence d’un risque de confusion [voir, en ce sens, arrêt du 13 juillet 2017, Migros-Genossenschafts-Bund/EUIPO – Luigi Lavazza (CReMESPRESSO), T‑189/16, non publié, EU:T:2017:488, point 87].

 Sur la comparaison des produits

31      Au point 31 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que les produits en cause étaient identiques.

32      Une telle conclusion, laquelle n’est au demeurant pas contestée par les parties, doit être entérinée. En effet, selon la jurisprudence, lorsque les produits visés par la marque antérieure incluent les produits visés par la demande de marque, ces produits sont considérés comme identiques [voir arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 34 et jurisprudence citée].

 Sur la comparaison des signes

33      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

34      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

35      En outre, afin d’apprécier le degré de similitude existant entre les marques concernées, il faut déterminer leur degré de similitude visuelle, phonétique et conceptuelle et, le cas échéant, évaluer l’importance qu’il convient d’attacher à ces différents éléments, en tenant compte de la catégorie de produits ou services en cause et des conditions dans lesquelles ils sont commercialisés (arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 27).

36      En l’espèce, avant de traiter la question de la similitude des marques en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, il y a lieu d’examiner l’appréciation des éléments distinctifs et dominants des marques en conflit effectuée par la chambre de recours.

 Sur les éléments distinctifs et dominants des marques en conflit

37      Selon la jurisprudence, pour déterminer le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’apprécier l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée [voir ordonnance du 3 mai 2018, Siberian Vodka/EUIPO – Schwarze und Schlichte (DIAMOND ICE), T‑234/17, non publiée, EU:T:2018:259, point 38 et jurisprudence citée].

38      Quant à l’appréciation du caractère dominant d’un ou plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe [arrêt du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 35].

39      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier l’existence éventuelle d’éléments distinctifs et dominants dans les marques en cause.

–       Marque demandée

40      En ce qui concerne la marque demandée, la chambre de recours a, tout d’abord, considéré que le public pertinent était susceptible de la décomposer en deux éléments, « tiger » et « cat », étant donné que ces deux termes existaient en anglais et avaient une signification claire dans cette langue en ce qu’ils désignaient tous les deux un félin. Plus particulièrement, elle a considéré que l’élément « tiger » désignait un grand félin et possédait un caractère distinctif normal et que l’élément « cat » faisait référence à un chat et serait perçu comme un mot distinct qui jouerait un rôle distinctif indépendant dans le signe demandé.

41      La requérante fait valoir que la chambre de recours a erronément considéré que le public pertinent était susceptible de décomposer la marque demandée en deux éléments, à savoir « tiger » et « cat ». Elle estime que la marque demandée sera perçue par le public pertinent comme une unité, compte tenu du fait que l’élément « cat » n’est pas mis en avant sur le plan visuel, par exemple, par une majuscule ou un espace le séparant de l’élément « tiger ». En outre, ce serait l’élément « tiger » qui constituerait l’élément le plus distinctif et dominant de cette marque, le terme « cat » pouvant être perçu comme une simple accentuation de cet élément.

42      Enfin, la requérante soutient, en substance, que c’est à tort que la chambre de recours a conclu que l’élément verbal commun « cat » contenu dans les signes en conflit possédait un caractère distinctif au regard des produits en cause.

43      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

44      À cet égard, s’agissant, premièrement, des éléments distinctifs de la marque demandée, il convient de relever que, comme l’a également constaté la chambre de recours au point 40 de la décision attaquée, les éléments « tiger » et « cat » sont facilement identifiables au sein de cette marque, étant donné que ces deux mots ont une signification claire pour le public pertinent, qui parle l’anglais. En effet, le mot « tiger » désigne un grand félin et le mot « cat » un mammifère carnivore, sauvage ou domestique, au museau court et arrondi. Or, si le consommateur perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’en demeure pas moins que, en percevant un signe verbal, il décomposera celui-ci en des éléments verbaux qui, pour lui, ont une signification concrète ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît [voir arrêt du 6 septembre 2013, Eurocool Logistik/OHMI – Lenger (EUROCOOL), T‑599/10, non publié, EU:T:2013:399, point 104 et jurisprudence citée].

45      Il s’ensuit que, contrairement à ce que soutient la requérante, d’une part, le public pertinent est susceptible de décomposer la marque demandée en « tiger » et « cat » et, d’autre part, l’absence de majuscule à la lettre « c » du signe « Tigercat » ne s’oppose pas à ce que le public pertinent puisse identifier les éléments « tiger » et « cat », qui ont chacun une signification concrète.

46      De surcroît, il convient de constater, en ce qui concerne l’élément « cat », que celui-ci possède un caractère distinctif au regard des produits concernés, puisqu’il renvoie à un animal, le chat, tandis que ces produits désignent des équipements sylvicoles.

47      Il s’ensuit que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’élément « cat » possédait un caractère distinctif dans la marque demandée.

48      S’agissant, deuxièmement, des éléments dominants de la marque demandée, il y a lieu de considérer que l’élément verbal « tiger » ne possède pas un caractère dominant dans celle-ci.

49      Il importe d’observer que, en tant que marque verbale, la marque demandée est constituée exclusivement de lettres, de mots ou d’associations de mots, écrits en caractères d’imprimerie dans une police normale, sans élément graphique spécifique [voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2020, Knaus Tabbert/EUIPO – Carado (CaraTwo), T‑203/19, non publié, EU:T:2020:76, point 59]. Dès lors, l’argument concernant le prétendu caractère dominant du terme « tiger » ne saurait être fondé sur un quelconque aspect graphique ou stylistique particulier que l’élément « tiger » pourrait éventuellement revêtir.

50      En outre, s’il est vrai que le consommateur prête généralement une plus grande attention au début d’une marque qu’à sa fin, une telle considération ne saurait valoir dans tous les cas et ne saurait remettre en cause le principe selon lequel l’examen de la similitude des marques doit prendre en compte l’impression d’ensemble produite par celles-ci [arrêt du 7 mars 2019, Laverana/EUIPO – Agroecopark (VERA GREEN), T‑106/18, non publié, EU:T:2019:143, point 57].

51      En l’espèce, le seul fait que l’élément « tiger » est positionné au début de la marque demandée n’est pas suffisant pour lui conférer un caractère dominant. Rien n’indique que le consommateur moyen du public pertinent accordera plus d’importance à l’élément « tiger », situé au début de la marque demandée. En effet, cet aspect est contrebalancé par le fait que la marque demandée n’est composée que de deux termes relativement courts, qui, s’ils sont directement juxtaposés, possèdent chacun une signification claire pour le public pertinent. Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, l’élément « cat », qui a une signification concrète distincte de l’élément « tiger », n’a pas uniquement une connotation laudative, destinée à mettre en évidence l’élément « tiger ».

52      Dans ces conditions, il est permis de considérer que le public pertinent accordera une attention comparable aux deux éléments composant la marque demandée. C’est donc à juste titre que la chambre de recours n’a pas décelé d’élément dominant dans la marque demandée.

–       Marque antérieure

53      En ce qui concerne la marque antérieure, la chambre de recours a exposé que l’élément verbal de ce signe, à savoir l’élément « cat », produirait une impression plus forte sur le consommateur que ses éléments figuratifs, lesquels ne sauraient détourner l’attention du public pertinent de ce premier élément.

54      La requérante fait valoir que la chambre de recours aurait commis une erreur d’appréciation en estimant que les éléments figuratifs de la marque antérieure n’étaient pas susceptibles de détourner l’attention du public pertinent de l’élément verbal « cat ». Le triangle jaune posséderait un caractère distinctif et suffirait à exclure le risque de confusion dans l’esprit du public pertinent. En raison de sa couleur jaune vif, de son positionnement au début de la marque antérieure et du fait qu’il recouvrirait partiellement la lettre « a » de l’élément verbal « cat » de cette marque, il attirerait clairement l’attention du public pertinent et ne serait pas un élément figuratif de base.

55      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

56      Lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom de la marque qu’en décrivant l’élément figuratif de celle-ci [voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2005, Wassen International/OHMI – Stroschein Gesundkost (SELENIUM-ACE), T‑312/03, EU:T:2005:289, point 37].

57      En outre, il convient de rappeler que, à la lumière de la jurisprudence citée au point 34 ci-dessus, l’appréciation de la similitude des signes en cause ne pourrait se faire sur la seule base des éléments figuratifs de la marque antérieure que si tous les autres éléments de cette marque étaient négligeables [voir, en ce sens, arrêt du 5 février 2020, Globalia Corporación Empresarial/EUIPO – Touring Club Italiano (TC Touring Club), T‑44/19, non publié, EU:T:2020:31, point 99]. Or, comme le reconnaît d’ailleurs la requérante, tel n’est pas le cas en l’espèce. En effet, l’élément verbal « cat », de par sa taille et sa position, n’est pas négligeable au sein de la marque antérieure et possède un caractère distinctif. Ainsi, l’élément « cat » produit une impression plus forte sur le consommateur que les éléments figuratifs de cette marque, sans pour autant rendre ces derniers négligeables. Les arguments de la requérante selon lesquels les éléments figuratifs seraient fortement distinctifs dans la mesure où les différents enregistrements de l’intervenante contiendraient un triangle jaune, lequel serait décrit par celle-ci comme fameux, ne sont pas de nature à remettre en cause ce constat. En effet, dans le cadre de l’analyse du risque de confusion et ainsi de l’analyse des différentes marques en conflit, seules les qualités intrinsèques des marques sont pertinentes et non les circonstances relatives au comportement de leur titulaire ou à l’usage antérieur d’autres marques [voir, en ce sens, arrêts du 2 septembre 2010, Calvin Klein Trademark Trust/OHMI, C‑254/09 P, EU:C:2010:488, point 46, et du 2 mars 2022, Banco de Investimento Global/EUIPO – Banco BIC Português (EUROBIC), T‑125/21, non publié, EU:T:2022:102, points 21 et 23].

58      De même, contrairement à ce que soutient la requérante, la circonstance que le Tribunal ait considéré au point 37 de l’arrêt du 12 septembre 2012, erkat (T‑566/10, non publié, EU:T:2012:419), que la marque antérieure avait un graphisme original, ne remet pas en cause le constat de la chambre de recours selon lequel l’élément verbal « cat » produit une impression plus forte sur le consommateur que les éléments figuratifs de ladite marque. En effet, dans cet arrêt, le Tribunal n’a pas considéré que les éléments figuratifs de la marque antérieure étaient plus distinctifs que l’élément verbal « cat ». De plus, il convient de relever que les éléments figuratifs de la marque antérieure sont essentiellement décoratifs et n’ont qu’un impact limité sur la perception visuelle que le public pertinent aura de cette marque.

59      Dès lors, c’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que les éléments figuratifs de la marque antérieure ne sauraient détourner l’attention du public pertinent de l’élément verbal « cat ».

60      En tout état de cause, et à cet égard, il convient de constater que, ainsi qu’il ressort du point 60 de la décision attaquée, les éléments figuratifs de la marque antérieure ont bien été pris en compte par la chambre de recours lors de l’appréciation de la similitude des signes sur le plan visuel, de sorte qu’il ne saurait être reproché à la chambre de recours de ne pas avoir procédé à une comparaison des signes en conflit dans leur ensemble.

 Sur la similitude visuelle

61      En ce qui concerne la comparaison des signes en conflit sur le plan visuel, il convient d’abord de rappeler que rien ne s’oppose à ce que soit vérifiée l’existence d’une similitude visuelle entre une marque verbale et une marque figurative, étant donné que ces deux types de marques ont une configuration graphique capable de donner lieu à une impression visuelle [voir arrêt du 4 mai 2005, Chum/OHMI – Star TV (STAR TV), T‑359/02, EU:T:2005:156, point 43 et jurisprudence citée].

62      En l’occurrence, la chambre de recours a relevé que les signes en conflit avaient en commun l’élément « cat », tandis qu’ils se distinguaient par la présence du premier élément de la marque demandée, à savoir l’élément verbal « tiger », et par les éléments figuratifs de la marque antérieure. Elle en a conclu qu’ils présentaient un degré moyen de similitude visuelle.

63      Cette appréciation est exempte de reproche. En effet, si la requérante estime que les signes en conflit sont différents sur le plan visuel en raison de leur longueur différente, de la présence de lettres majuscules et des éléments figuratifs de la marque antérieure, il n’en demeure pas moins qu’ils coïncident par l’élément « cat », lequel constitue le seul élément verbal de la marque antérieure et dispose d’un caractère distinctif. Or, le fait que la marque antérieure soit entièrement incluse dans la marque demandée est de nature à créer une forte ressemblance tant visuelle que phonétique entre les marques en conflit [voir arrêt du 14 juin 2018, Lion’s Head Global Partners/EUIPO – Lion Capital (LION’S HEAD global partners), T‑310/17, non publié, EU:T:2018:344, point 31 et jurisprudence citée], et ce même lorsque le public pertinent est doté d’un niveau d’attention élevé [voir, en ce sens, arrêt du 20 février 2018, Kwang Yang Motor/EUIPO – Schmidt (CK1), T‑45/17, non publié, EU:T:2018:85, points 45 à 47]. Or, la présence de l’élément « tiger », lequel n’est pas dominant, au début de la marque demandée ne permet pas de conclure à la dissimilitude des signes en conflit.

64      Il en découle que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu que les signes en conflit présentaient au moins un degré moyen de similitude visuelle.

65      Aucun des autres arguments de la requérante n’est de nature à remettre en cause ce constat.

66      Premièrement, contrairement à ce que soutient la requérante, il n’existe pas de règle absolue selon laquelle les signes doivent être considérés comme différents si un groupe de lettre identique est précédé de lettres différentes (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 décembre 2008, Les Éditions Albert René/OHMI, C‑16/06 P, EU:C:2008:739, point 92). Ainsi, dans le cas, où comme en l’espèce, la marque antérieure est intégralement contenue dans la marque demandée, la circonstance qu’un groupe de lettres identiques est précédé de lettres différentes ne suffit pas pour conclure à l’absence de similitude des signes en conflit.

67      Deuxièmement, contrairement à ce que soutient la requérante, la présence du triangle jaune dans la marque antérieure n’est pas de nature à neutraliser la similitude visuelle entre les signes en conflit. En effet, ainsi que constaté au point 59 ci-dessus, les éléments figuratifs de la marque antérieure ne sauraient détourner l’attention du public pertinent de l’élément verbal « cat ».

68      Troisièmement, le fait que le Tribunal ait conclu, dans l’arrêt du 12 septembre 2012, erkat (T‑566/10,  non publié, EU:T:2012:41), que les éléments verbaux « erkat » et « cat » étaient différents, est dépourvu de pertinence. En effet, dans cette affaire, la marque antérieure n’était pas contenue dans la marque demandée et les signes ne coïncidaient que par les lettres « a » et « t ».

 Sur la similitude phonétique

69      Sur le plan phonétique, selon la chambre de recours, les signes en conflit ont en commun la prononciation du mot « cat », ce qui est incontestable. Elle a également relevé que le signe faisant l’objet de la demande de marque était plus long que celui formant la marque antérieure, qu’il existait des différences en termes de rythme et que les signes en conflit commençaient par des syllabes différentes. Elle en a conclu que ces derniers présentaient un degré moyen de similitude phonétique.

70      La requérante remet en cause cette appréciation de la chambre de recours et s’appuie, à cet égard, sur la différence du nombre de syllabes des signes en conflit et la manière dont celles-ci seront accentuées lorsqu’elles seront prononcées, ainsi que sur l’enchaînement différent des voyelles dans ces deux signes.

71      Selon la jurisprudence, le fait que le nombre de syllabes soit différent ne suffit pas pour écarter l’existence d’une similitude phonétique entre les signes [arrêt du 19 mai 2011, PJ Hungary/OHMI – Pepekillo (PEPEQUILLO), T‑580/08, EU:T:2011:227, point 79].

72      S’agissant de l’aspect phonétique, la marque demandée est constituée des trois syllabes « ti », « ger » et « cat », alors que l’élément verbal de la marque antérieure, entièrement inclus dans la marque demandée, peut être prononcé soit comme le sigle composé des lettres « c », « a » et « t », soit en une seule syllabe, « cat » (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2012, erkat, T‑566/10, non publié, EU:T:2012:419, point 38).

73      À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence citée au point 63 ci-dessus, le fait que la marque antérieure soit entièrement incluse dans la marque demandée est de nature à créer une forte ressemblance tant visuelle que phonétique entre les marques en conflit (voir arrêt du 14 juin 2018, LION’S HEAD global partners, T‑310/17, non publié, EU:T:2018:344, point 31 et jurisprudence citée).

74      En l’espèce, il convient d’observer que les signes en conflit diffèrent en ce que la marque demandée comporte, en tant qu’élément placé au début de celle-ci, les deux syllabes « ti » et « ger », tandis que la marque antérieure comporte uniquement l’élément commun « cat ». Pour autant, il n’en reste pas moins que cet élément commun pourra être prononcé, lors de l’achat des produits en cause, justifiant ainsi la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les signes en conflit sont similaires au moins à un degré moyen sur le plan phonétique.

 Sur la similitude conceptuelle

75      La requérante fait valoir que c’est à tort que la chambre de recours a conclu que les signes en conflit étaient similaires sur le plan conceptuel. Plus particulièrement, elle soutient que, dans le cadre de cette appréciation, la chambre de recours a omis de prendre en considération les produits revendiqués par l’intervenante, d’une part, et la perception de la marque antérieure, sur le plan conceptuel, par le public pertinent, d’autre part.

76      La requérante indique que le public pertinent comprendra la marque antérieure « cat » comme une forme abrégée du terme « caterpillar ». En outre, elle soutient que, puisque la chambre de recours a conclu que la marque antérieure jouissait d’une renommée accrue, elle ne pouvait, au stade de la comparaison des signes en conflit sur le plan conceptuel, négliger le fait que le public pertinent pouvait percevoir cette marque comme étant une abréviation du nom de l’intervenante, c’est-à-dire du terme « caterpillar », qui signifie, notamment, « un véhicule doté de chenilles ».

77      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

78      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence du Tribunal, même si le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’en reste pas moins que, en percevant un signe verbal, il décomposera celui-ci en des éléments verbaux qui, pour lui, suggèrent une signification concrète et immédiatement compréhensible ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît [voir arrêt du 15 septembre 2021, Freshly Cosmetics/EUIPO – Misiego Blázquez (IDENTY BEAUTY), T‑688/20, non publié, EU:T:2021:567, point 56 et jurisprudence citée].

79      En l’espèce, il convient de constater que, ainsi que la chambre de recours l’a relevé, le consommateur moyen du public pertinent associera la marque antérieure à un félin, en ce qu’elle contient l’élément verbal « cat », qui revêt, pour ce public, qui est anglophone, une signification concrète directe. Le fait que le public pertinent puisse également associer la marque antérieure à d’autres concepts tels que l’abréviation du terme « caterpillar » n’est pas susceptible de remettre en cause la conclusion selon laquelle, pour au moins une de ses significations concrètes et immédiatement compréhensibles, cette marque évoque, dans l’esprit du public pertinent, un félin.

80      Dès lors que la marque demandée, qui est composée des éléments « tiger » et « cat », renvoie également au concept de « félin », il convient de conclure que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les signes en conflit étaient fortement similaires sur le plan conceptuel.

81      En tout état de cause, il importe de relever que, à supposer même que, compte tenu des produits en cause, le public pertinent perçoive seulement la marque antérieure comme une abréviation du terme « caterpillar », en ce qu’il désigne les machines à chenilles, tel devrait également être le cas en ce qui concerne l’élément « cat » du signe Tigercat. Il en découle que, dans ce cas, les signes en conflit seraient également similaires sur le plan conceptuel, en ce qu’ils renverraient tous les deux au concept de machines à chenilles. Dans cette hypothèse, la circonstance que la marque demandée renvoie également au concept de félin, en raison de l’élément « tiger », ne serait pas de nature à remettre en cause l’existence de toute similitude conceptuelle des marques en conflit, en raison de l’élément commun « cat ».

82      Par ailleurs, la circonstance que, selon la requérante, la marque antérieure serait renommée et que l’élément « cat » serait associé au nom de l’intervenante, Caterpillar, est dénué de pertinence au stade de l’appréciation de la similitude des signes en conflit sur le plan conceptuel, étant donné que seuls les signes tels qu’ils figurent sur les actes d’enregistrement ou dans la demande contestée doivent être pris en considération. En effet, ainsi qu’il découle de la jurisprudence, la renommée et le caractère distinctif de la marque antérieure constituent des facteurs pertinents pour l’appréciation non pas de la similitude des marques en conflit, mais de l’existence d’un lien entre celles-ci dans l’esprit du public concerné (arrêt du 24 mars 2011, Ferrero/OHMI, C‑552/09 P, EU:C:2011:177, point 58).

83      En tout état de cause, même si le public pertinent associait l’élément « cat » au nom de l’intervenante, ce même élément contenu dans la marque demandée serait également associé par ce même public à ce nom, ce qui ne ferait que confirmer la similitude conceptuelle des signes en conflit.

84      Dans ces conditions, il convient de constater que les arguments de la requérante ne permettent pas d’établir que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en considérant que les marques en conflit étaient fortement similaires sur le plan conceptuel dans la mesure où elles faisaient toutes deux référence à un félin.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

85      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

86      En l’espèce, après avoir notamment relevé que le caractère distinctif de la marque antérieure devait être considéré comme accru, la chambre de recours a conclu, au point 87 de la décision attaquée, à l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit de la partie anglophone du public pertinent, dont le niveau d’attention devait être considéré comme élevé. Elle a fondé cette conclusion sur l’identité des produits en cause, le degré moyen de similitude des signes en conflit sur les plans visuel et phonétique ainsi que leur fort degré de similitude sur le plan conceptuel.

87      La requérante soutient que le niveau d’attention élevé du public pertinent exclut tout risque de confusion. Elle affirme également que les signes en conflit sont différents. En particulier, elle soutient que les différences conceptuelles entre les marques en conflit neutralisent leurs similitudes visuelles et phonétiques, de sorte qu’il ne saurait exister de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

88      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

89      Il ressort de l’analyse ci-dessus, d’une part, que les produits en cause sont identiques et, d’autre part, que les signes en conflit, pris dans leur ensemble, sont similaires.

90      En ce qui concerne le caractère distinctif de la marque antérieure, il convient de relever que, ainsi qu’il découle du considérant 8 du règlement no 207/2009, l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs, et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque concernée sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque concernée s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24 ; du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 20).

91      L’existence d’un caractère distinctif supérieur à la normale, en raison de la connaissance qu’a le public d’une marque sur le marché, suppose nécessairement que cette marque soit connue d’au moins une partie significative du public concerné, sans qu’elle doive nécessairement posséder une renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009. Il ne saurait être indiqué d’une façon générale, par exemple en recourant à des pourcentages déterminés relatifs au degré de connaissance qu’a le public de la marque dans les milieux concernés, qu’une marque a un caractère distinctif élevé. Néanmoins, il y a lieu de reconnaître une certaine interdépendance de la connaissance qu’a le public concerné d’une marque et du caractère distinctif de celle-ci, en ce sens que, plus la marque est connue du public ciblé, plus le caractère distinctif de cette marque est renforcé. Pour examiner si une marque jouit d’un caractère distinctif élevé en raison de la connaissance qu’en a le public, il convient de prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage, l’importance des investissements réalisés par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie les produits ou les services comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque ainsi que les déclarations des chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles [voir arrêt du 12 juillet 2006, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Johnson’s Veterinary Products (VITACOAT), T‑277/04, EU:T:2006:202, points 34 et 35 et jurisprudence citée].

92      En l’occurrence, ainsi que la chambre de recours l’a constaté au point 82 de la décision attaquée, il ressort du dossier devant l’EUIPO que l’intervenante a investi dans des campagnes de marketing et de promotion et qu’elle a exposé ses produits lors de salons pertinents dans l’ensemble de l’Union. La requérante a d’ailleurs elle-même souligné, devant l’EUIPO, que l’intervenante avait participé à de nombreux salons consacrés à la sylviculture. Ainsi, les arguments de la requérante tendant à contester la pertinence de certains éléments de preuve, notamment ceux relatifs au marché allemand, à la participation au salon Bauma et à la publicité en Pologne ne suffisent pas à remettre en cause les constats opérés par la chambre de recours.

93      En outre, ainsi que la chambre de recours l’a souligné, la renommée de la marque antérieure, en ce qui concerne l’Allemagne, l’Irlande, l’Espagne et le Royaume-Uni, a été confirmée par plusieurs décisions de l’EUIPO. Si, ainsi que le relève la requérante, ces décisions ne concernaient pas expressément les machines spécialement destinées à la sylviculture, il n’en reste pas moins qu’elles concernaient des machines pouvant être utilisées dans le domaine de la sylviculture, de sorte que les conclusions qui y sont tirées peuvent être transposées aux produits en cause.

94      Dès lors, il convient de constater que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu au caractère distinctif accru de la marque antérieure pour les produits pertinents relevant de la classe 7, y compris des équipements associés à la sylviculture.

95      Compte tenu de l’identité des produits en cause, du degré de similitude moyen des signes en conflit sur les plans visuel et phonétique, du degré de similitude élevé sur le plan conceptuel ainsi que du caractère distinctif accru de la marque antérieure, il convient de constater que la chambre de recours a correctement conclu à l’existence d’un risque de confusion, et ce même si le niveau d’attention du public pertinent est élevé.  En particulier, il a lieu de relever que, compte tenu, notamment, de l’identité des produits en cause, il n’est pas exclu que les consommateurs, bien que dotés d’un niveau d’attention élevé, puissent considérer que la marque demandée corresponde à une variante de la marque antérieure ou que les produits visés par la marque demandée correspondent à une ligne de produits commercialisés par le titulaire de la marque antérieure [voir, en ce sens, arrêt du 10 mars 2016, LG Developpement/OHMI – Bayerische Motoren Werke (MINICARGO), T‑160/15, non publié, EU:T:2016:137, point 58].

96      Par ailleurs, une telle conclusion ne saurait être remise en cause à supposer même que, ainsi que le soutient la requérante, les marques en conflit n’étaient pas fortement similaires sur le plan conceptuel. En effet, les seules circonstances que les produits soient identiques, que les signes en conflit soient moyennement similaires sur les plans phonétique et visuel et que la marque antérieure bénéficie d’un caractère distinctif accru suffisent à conclure à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit, y compris compte tenu du degré d’attention élevé du public pertinent.

97      Dans ces conditions, il convient de constater que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion.

 Sur la coexistence pacifique

98      À l’appui de son moyen unique, la requérante fait encore valoir que l’absence de risque de confusion serait renforcée par le fait que les marques en conflit auraient coexisté sur le marché de l’Union pendant une longue période. Elle soutient, en substance, que la chambre de recours n’a pas tenu compte des éléments de preuve présentés, qui montreraient qu’il y a eu une coexistence pacifique des signes en conflit pendant près de trois décennies.

99      Par ailleurs, la requérante fait valoir qu’il existe de nombreuses marques similaires à la marque antérieure et comprenant l’élément « cat » qui sont utilisées pour désigner des produits identiques relevant de la classe 7, telles que les marques BOBCAT et ARTIC CAT.

100    L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

101    À cet égard, il y a lieu d’observer que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a conclu que la requérante n’avait, en substance, produit aucun élément de preuve démontrant que la marque demandée avait été utilisée sur l’ensemble du marché de l’Union et qu’elle avait, en outre, omis de démontrer que les signes en conflit coexistaient sur le même marché sans qu’il existât un risque de confusion entre eux.

102    Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, il ne saurait être exclu que la coexistence sur un marché déterminé de deux marques puisse éventuellement contribuer, conjointement à d’autres éléments, à amoindrir le risque de confusion entre ces marques dans l’esprit du public pertinent [arrêts du 3 septembre 2009, Aceites del Sur-Coosur/Koipe, C‑498/07 P, EU:C:2009:503, point 82, et du 30 juin 2015, La Rioja Alta/OHMI – Aldi Einkauf (VIÑA ALBERDI), T‑489/13, EU:T:2015:446, point 70].

103    Cependant, la coexistence doit être fondée sur l’absence de tout risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, ce qui implique que ce dernier a conscience du fait que les marques appartiennent à des entreprises différentes [voir arrêt du 9 mars 2018, Recordati Orphan Drugs/EUIPO – Laboratorios Normon (NORMOSANG), T‑103/17, non publié, EU:T:2018:126, point 86 et jurisprudence citée].

104    Tout argument tiré d’une coexistence implique au préalable la démonstration, notamment, de l’usage effectif de la marque dont la requérante se prévaut sur le territoire pertinent, à savoir celui où la marque antérieure est protégée (voir arrêt du 9 mars 2018, NORMOSANG, T‑103/17, non publié, EU:T:2018:126, point 87 et jurisprudence citée).

105    Ainsi, lorsque l’opposition à l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne se fonde sur une marque de l’Union européenne antérieure et que la coexistence de ladite marque antérieure avec une marque identique à la marque demandée est invoquée à l’appui de l’absence de risque de confusion entre les marques en cause, il importe à la partie invoquant cette coexistence de la prouver sur l’ensemble du territoire de l’Union. En effet, lorsque la marque antérieure est une marque de l’Union européenne et que, partant, le territoire pertinent pour l’appréciation du risque de confusion est constitué par l’ensemble de l’Union, une prétendue coexistence sur une partie du territoire de l’Union n’aurait pas pour effet d’écarter un risque de confusion sur l’ensemble de l’Union [voir arrêt du 10 mars 2021, Kerry Luxembourg/EUIPO – Ornua (KERRYMAID), T‑693/19, non publié, EU:T:2021:124, point 160 et jurisprudence citée].

106    Il ressort donc de ce qui précède que, d’une part, la charge de la preuve incombe à la partie qui invoque l’existence d’une coexistence pacifique et, d’autre part, lorsque l’opposition à l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne se fonde sur une marque de l’Union européenne antérieure, la coexistence doit être prouvée pour l’ensemble du territoire de l’Union (arrêt du 10 mars 2021, KERRYMAID, T‑693/19, non publié, EU:T:2021:124, point 161).

107    Les éléments de preuve produits par la requérante, à savoir, notamment, des déclarations sous serment, la liste des foires commerciales auxquelles elle a participé entre 2004 et 2014, une publication concernant son acquisition de la compagnie Hemek en Suède en 2000, l’enregistrement de la marque internationale Tigercat no 754834 et la correspondance échangée entre les parties en 1992 et en 1997, ne concernent ni ne couvrent le territoire de l’Union dans son ensemble. Ces éléments de preuve ne permettraient donc aucunement de confirmer son allégation relative à l’absence de risque de confusion sur le territoire pertinent.

108    En outre, même si la requérante est titulaire de l’enregistrement international désignant la Suède, l’Allemagne ou la Finlande de la marque Tigercat, aucune preuve objective d’un usage simultané des marques dans la partie anglophone de l’Union ou sur l’ensemble du territoire de l’Union n’a été produite.

109    C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que, pour contester l’opposition de l’intervenante, la requérante aurait dû – ce qu’elle n’a pas fait – prouver non seulement la coexistence des signes en conflit, mais encore que cette coexistence était fondée sur l’absence de risque de confusion entre ces signes.

110    La requérante n’ayant pas apporté, devant les instances de l’EUIPO, d’autres éléments qui auraient été susceptibles de démontrer la coexistence pacifique sur le marché concerné des marques en conflit, il convient d’écarter cet argument.

111    Finalement, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu que la simple allégation de la coexistence supposée de la marque antérieure avec des marques de tiers n’établissait pas l’inexistence d’un risque de confusion en l’espèce, étant donné que les marques dont la requérante se prévaut ne sont pas identiques à celles examinées dans la présente affaire et qu’elles ne couvrent pas des produits présentant une similitude avec ceux désignés par les marques en conflit.

112    Dans ces conditions, l’argument de la requérante relatif à la coexistence pacifique des signes en conflit et à la coexistence de la marque antérieure avec des marques de tiers doit être rejeté.

113    À la lumière de tout ce qui ce qui précède, il convient de rejeter le moyen unique, et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

114    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

115    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Tigercat International Inc. est condamnée aux dépens.

Tomljenović

Škvařilová-Pelzl

Nõmm

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 juillet 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.