Language of document : ECLI:EU:T:2016:697

ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

1er décembre 2016 (*)

« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Rapport de notation – Impartialité du Tribunal de la fonction publique – Demande de récusation des membres de la formation de jugement – Droits de la défense – Droit à une protection juridictionnelle effective »

Dans l’affaire T‑532/15 P,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 30 juin 2015, Z/Cour de justice (F‑64/13, EU:F:2015:72), et tendant à l’annulation de cet arrêt,

Z, demeurant à Luxembourg (Luxembourg), représentée par Me F. Rollinger, avocat,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant

Cour de justice de l’Union européenne, représentée initialement par M. A. Placco, puis par MM. J. Inghelram et Á. Almendros Manzano, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),

composé de MM. M. Jaeger, président, H. Kanninen (rapporteur) et D. Gratsias, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, la requérante, Mme Z, demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 30 juin 2015, Z/Cour de justice (F‑64/13, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:F:2015:72), par lequel celui-ci a rejeté son recours ayant pour objet, d’une part, l’annulation de son rapport de notation pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2008 ainsi que de la décision de rejet de la réclamation introduite contre ledit rapport de notation et, d’autre part, la condamnation de la Cour de justice de l’Union européenne à la réparation du préjudice moral qu’elle estimait avoir subi.

 Faits à l’origine du litige

2        Les faits pertinents à l’origine du litige sont énoncés aux points 3 à 25 de l’arrêt attaqué dans les termes suivants :

« 3      La [...] requérante a été recrutée en tant que fonctionnaire stagiaire le 1er septembre 2005 et a été affectée, à compter de cette date et jusqu’au 31 décembre 2008, à l’une des unités de traduction de la direction générale (DG) “Traduction” de la Cour de justice, en tant que juriste linguiste.

4      Le rapport de notation de la [...] requérante pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2007 a été établi par son chef d’unité, M. A, agissant en qualité de notateur, le 5 mai 2008, puis confirmé et rendu définitif par le notateur d’appel, le directeur adjoint en charge de l’unité d’affectation de la [...] requérante, Mme B, le 17 octobre 2008. À la suite d’une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut [des fonctionnaires de l’Union européenne], introduite le 20 janvier 2009 par la [...] requérante, ledit rapport de notation a été partiellement annulé par décision du 13 mai 2009 du comité chargé des réclamations, au motif que certaines appréciations portées par le notateur n’étaient soutenues par aucune référence à des faits concrets et que les remarques du notateur d’appel, censées corroborer celles du notateur, étaient peu circonstanciées.

5      Le 10 juillet 2008, M. A a pris la décision d’affecter la [...] requérante à une autre équipe au sein de l’unité, au motif que celle‑ci aurait eu des relations conflictuelles avec son chef d’équipe, M. C.

6      Au début du mois de septembre 2008, la [...] requérante a fait appel à l’un des conseillers en matière de harcèlement moral institués par la communication no 18/06 du greffier de la Cour de justice, du 20 novembre 2006, sur le respect de la dignité de la personne, en se plaignant du comportement prétendument hostile de M. A à son égard.

7      Le 9 décembre 2008, la [...] requérante a envoyé à l’ensemble de ses collègues un courriel accusant M. A d’avoir commis des actes de favoritisme au profit d’un agent contractuel recruté dans la même unité de traduction. En outre, la [...] requérante faisait état de sa souffrance personnelle due à l’attitude de M. A et informait ses collègues qu’elle ne serait pas présente au dîner de Noël organisé pour les collaborateurs de son unité, auquel devait participer M. A (ci‑après le “courriel du 9 décembre 2008”).

8      La [...] requérante a adressé le même jour un courriel au directeur nouvellement en charge de son unité de traduction, M. E, avec copie au directeur général de la DG “Traduction”, M. D, sollicitant un entretien au sujet du harcèlement moral dont elle s’estimait victime.

9      Le 10 décembre 2008, M. A a envoyé un courriel à la [...] requérante et à l’ensemble des membres de son unité en rejetant les accusations formulées à son encontre dans le courriel du 9 décembre 2008 et en qualifiant d’“inadmissible” la manière dont la [...] requérante avait présenté les choses et d’“inapproprié” le fait de lancer “des diffamations publiques”. En outre, il informait la [...] requérante qu’il avait transmis le courriel du 9 décembre 2008 à M. E et à M. D.

10      Ce même 10 décembre 2008, la [...] requérante a envoyé un courriel en réponse à M. A ainsi qu’à tous les membres de son unité, en déclarant que les supérieurs hiérarchiques de M. A “[étaient] parfaitement au courant de l’affaire depuis longtemps”, que lui “adresser des menaces ne change[ait] pas les faits” et que M. E avait “[d’ores et] déjà décidé […] de [lui] consacrer tout le temps nécessaire à un entretien concernant [le] comportement inconvenant [de M. A]”, ajoutant que “l’ancien directeur […] a[vait] ignoré ce problème pendant très longtemps et [qu’]il sembl[ait] que cela [allait] désormais changer” (ci‑après le “courriel du 10 décembre 2008”).

11      À la suite de ces courriels, par décision du 18 décembre 2008, le greffier de la Cour de justice, en sa qualité d’autorité investie du pouvoir de nomination (ci‑après l’“AIPN”), a réaffecté la [...] requérante avec son emploi dans un autre service, avec effet au 1er janvier 2009 (ci‑après la “décision de réaffectation”). En outre, par mémorandum du 1er avril 2009, le greffier a informé la [...] requérante qu’il avait décidé d’ouvrir à son égard la procédure disciplinaire prévue à l’article 11 de l’annexe IX du statut [des fonctionnaires de l’Union européenne], “en vue d’imposer la sanction d’avertissement par écrit ou de blâme sans consultation du conseil de discipline”.

12      Le 2 avril 2009, la [...] requérante a introduit une réclamation, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut [des fonctionnaires de l’Union européenne], par laquelle elle demandait l’annulation de la décision de réaffectation, ainsi que la réparation du préjudice moral qu’elle estimait avoir subi et qu’elle évaluait à la somme de 30 000 euros.

13      Par décision du 30 juin 2009, le comité chargé des réclamations a rejeté la réclamation du 2 avril 2009 (ci‑après la “décision de rejet de la réclamation dirigée contre la décision de réaffectation”).

14      Le 10 juillet 2009, l’AIPN, a décidé d’infliger à la [...] requérante la sanction de l’avertissement par écrit. La [...] requérante a introduit un recours contre cette décision, lequel a été rejeté, en même temps que le recours introduit contre la décision de réaffectation, par le Tribunal par son arrêt du 5 décembre 2012, Z/Cour de justice (F‑88/09 et F‑48/10, EU:F:2012:171). Enfin, par arrêt du 19 juin 2015, Z/Cour de justice (T‑88/13 P, [Rec (Extraits),] EU:T:2015:393, ci‑après l’“arrêt sur pourvoi”), le Tribunal de l’Union européenne a partiellement annulé l’arrêt Z/Cour de justice (EU:F:2012:171), en tant que le Tribunal a rejeté comme inopérant le moyen, présenté dans l’affaire F‑48/10, tiré de l’incompétence du comité chargé des réclamations et de l’illégalité de l’article 4 de la décision [de la Cour de justice] du 4 mai 2004 [relative à l’exercice des pouvoirs dévolus par le statut des fonctionnaires de l’Union européenne à l’autorité investie du pouvoir de nomination ainsi que par le régime applicable aux autres agents à l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement], les autres appréciations du Tribunal non entachées par ladite erreur étant devenues définitives (arrêt sur pourvoi, point 165).

15      Le rapport de notation de la [...] requérante pour l’année 2008 a été établi le 8 mars 2011 (ci‑après le “rapport de notation litigieux”) par M. A, en sa qualité de notateur de la [...] requérante au titre de la période de référence. Il ressort de ce rapport que le notateur a attribué à la [...] requérante la note “C”, correspondant à la mention “très bien”, pour la rubrique “Compétence”, la note “D”, correspondant à la mention “bien”, pour la rubrique “Rendement”, et la note “F”, correspondant à la mention “insuffisant”, pour la rubrique “Conduite dans le service”.

16      Sous la rubrique “Rendement” du rapport de notation litigieux figurent les observations suivantes :

“Le rendement de [la requérante] a baissé pendant la période de référence tout en restant globalement satisfaisant.

Contrairement à l’objectif qui lui avait été fixé pour 2008, son rendement quantitatif (du 1[er janvier] 2008 au 31 [décembre] 2008, soit dans son cas en 149,75 jours de travail effectif, elle a traduit 669 pages et révisé 369 pages) a baissé de 7,6 % par rapport à celui [de] la période de référence antérieure, déjà bas. L’objectif fixé pour l’année 2008 d’augmenter la productivité n’a pas été atteint.

La qualité du travail a été conforme à cel[le] attendu[e] d’un juriste linguiste de son expérience travaillant de manière autonome.”

17      À la rubrique “Conduite dans le service” du rapport de notation litigieux figurent les remarques suivantes :

“[La requérante] a montré au cours de 2008 une certaine rigidité dans la perception de sa propre charge de travail par rapport aux besoins de son équipe, ainsi qu’une attitude de contestation, non seulement des décisions prises par le responsable de son équipe, M. [C], dans l’exercice de ses fonctions, mais également des compétences et de l’honnêteté de ce dernier. De ce fait, suite à la plainte dudit responsable d’équipe, le chef d’unité a été obligé de réaffecter la [...] [requérante] dans une autre équipe en juillet 2008.

Ainsi, en 2008, au lieu de contribuer de façon constante à un climat de travail favorable, [la requérante] a porté publiquement des accusations graves contre ses supérieurs hiérarchiques ([voir] les [courriels des] 9 et 10 décembre 2008 que [la requérante] a envoyé[s] à tous les collaborateurs de l’unité).”

18      Pour ce qui est de la rubrique “Appréciation d’ordre général”, elle est assortie de ce commentaire :

“Force est de constater que l’objectif d’une augmentation de productivité fixé pour l’année 2008 n’a pas été atteint, la productivité ayant baissé au lieu de progresser. En raison de[s courriels] d[es] 9 et 10 décembre 2008 […] et afin d’assurer le bon fonctionnement de l’unité, qui s’est trouvé compromis à la suite de[s dits courriels], l’[AIPN] a décidé la réaffectation de [la requérante] à un autre service […]”

19      Le 28 mars 2011, la [...] requérante a saisi le notateur d’appel, en contestant, en substance, les notes et les appréciations indiquées sous les rubriques “Rendement” et “Conduite dans le service” ainsi que les commentaires figurant dans la rubrique “Appréciation d’ordre général”.

20      Le 28 mars 2011, la [...] requérante a également demandé au président de la Cour de justice d’exclure de la procédure de notation pour l’année 2008 M. A et M. E, à savoir son notateur et son notateur d’appel, ainsi que ses anciens supérieurs hiérarchiques. Par décision du 4 juillet 2011, le président de la Cour de justice a rejeté cette demande.

21      Le 23 septembre 2011, le notateur d’appel a confirmé la notation attribuée à la [...] requérante dans le rapport de notation pour l’année 2008.

22      Le 3 octobre 2011, la [...] requérante a saisi le comité consultatif de notation (ci‑après le “CCN”), qui a rendu son avis le 14 mai 2012. Dans cet avis, le CCN déclarait ne pas être “en mesure de proposer une revalorisation de la note D au titre du rendement”. Pour ce qui est de la note F relative à la “Conduite dans le service”, le CCN déclarait que “les représentants de l’administration et les représentants du personnel n’[avaie]nt pu que constater leurs divergences d’appréciation” et que, “[a]ucun consensus n’ayant pu se dégager, les parties s[‘étaient] séparées sur un constat d’avis partagé pour la rubrique” en question. Il ressort enfin de l’avis du CCN que celui‑ci a entendu le notateur d’appel de la [...] requérante pour l’interroger sur diverses questions techniques et que ce dernier, après avoir répondu, a quitté la salle sans participer aux délibérations.

23      Le 1er juin 2012, le rapport de notation définitif de la [...] requérante a été arrêté par M. E, le notateur d’appel, et a été transmis à la [...] requérante par mémorandum du 7 juin 2012.

24      Le 7 septembre 2012, la [...] requérante a introduit, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut [des fonctionnaires de l’Union européenne], une réclamation contre le rapport de notation litigieux.

25      Par décision du 21 mars 2013 notifiée à la [...] requérante le lendemain, le comité chargé des réclamations a rejeté la réclamation du 7 septembre 2012 (ci‑après la “décision portant rejet de la réclamation”). »

 Procédure en première instance et arrêt attaqué

3        Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique le 28 juin 2013, la requérante a introduit un recours, qui a été enregistré sous la référence F‑64/13, tendant, d’une part, à l’annulation du rapport de notation pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2008 ainsi que de la décision portant rejet de la réclamation et, d’autre part, à la condamnation de la Cour de justice de l’Union européenne à réparer le préjudice moral qu’elle estimait avoir subi.

4        Par lettre du greffe du Tribunal de la fonction publique du 12 septembre 2014, les parties ont été convoquées à une audience fixée pour le 25 septembre suivant à 11 h 00.

5        Par télécopie reçue au greffe du Tribunal de la fonction publique le 24 septembre 2014, Me Fränk Rollinger, avocat de la requérante, a demandé à ce tribunal de reporter l’audience, au motif qu’il n’avait reçu la convocation que le 17 septembre 2014 et qu’il n’avait pas pu contacter la requérante. Cette télécopie a été suivie d’une autre télécopie reçue par le greffe du Tribunal de la fonction publique le 25 septembre 2014 à 8 h 57, dans laquelle cet avocat expliquait que la requérante était en congé du 15 au 24 septembre 2014 et que, en tout état de cause, il était dans l’incapacité de participer à l’audience du fait qu’il devait plaider, le matin même, une affaire devant le tribunal d’arrondissement de Luxembourg (Luxembourg), informations que l’avocat de la requérante a réitérées par une troisième télécopie parvenue au greffe du Tribunal de la fonction publique le même jour à 10 h 21. Dans la télécopie de 8 h 57, Me Rollinger a informé le Tribunal de la fonction publique qu’un de ses collaborateurs se rendrait à l’audience pour débattre des suites à réserver à la procédure.

6        Le Tribunal de la fonction publique a décidé de maintenir l’audience le 25 septembre 2014 à 11 h 00, afin d’entendre les parties sur la suite à donner à la procédure. À la fin de cette audience, lors de laquelle la requérante a été représentée par un collaborateur de son avocat mandaté à cet effet, le Tribunal de la fonction publique a décidé de suspendre ladite audience et de la reprendre le 30 septembre 2014 à 9 h 00 pour permettre au représentant de la requérante de plaider. Le Tribunal de la fonction publique a demandé au représentant de la requérante de lui transmettre, dans les meilleurs délais, la preuve de la convocation de Me Rollinger à l’audience du 25 septembre 2014 devant le tribunal d’arrondissement de Luxembourg.

7        Par télécopie envoyée le 25 septembre 2014 à 12 h 05, Me Rollinger a transmis au Tribunal de la fonction publique un document intitulé « Ultime injonction », daté du 28 mai 2014, par lequel le tribunal d’arrondissement de Luxembourg l’invitait à se présenter à une audience fixée pour le 25 septembre 2014 à 9 h 30 « pour clôture et plaidoirie péremptoire ».

8        L’audience a repris le 30 septembre 2014 à 9 h 00. À l’ouverture des débats, la requérante a déposé une demande écrite de récusation visant les trois membres composant la formation de jugement, aux motifs, premièrement, que ces membres auraient tous exercé une activité professionnelle au sein de la Cour de justice de l’Union européenne, partie défenderesse, avant d’être nommés juges au Tribunal de la fonction publique, deuxièmement, qu’elle n’aurait été convoquée à l’audience du 25 septembre 2014 que le 17 septembre précédent et qu’elle n’aurait reçu le rapport préparatoire d’audience que le 18 septembre, alors que les instructions pratiques aux parties sur la procédure juridictionnelle devant le Tribunal de la fonction publique (ci-après les « instructions pratiques ») prévoiraient la convocation des parties à l’audience quelques semaines avant le déroulement de celle-ci et l’envoi du rapport préparatoire d’audience avec cette convocation, et, troisièmement, que le rapport préparatoire d’audience aurait omis certains éléments qui lui auraient été favorables.

9        Le président de la deuxième chambre du Tribunal de la fonction publique a informé les parties principales que cette demande allait être transmise au président de ce même Tribunal pour décision et a levé l’audience.

10      Par courrier du 3 octobre 2014, le greffe du Tribunal de la fonction publique a transmis, pour observations éventuelles, la demande de récusation à la Cour de justice de l’Union européenne, laquelle, par lettre parvenue au greffe du Tribunal de la fonction publique le 10 octobre 2014, a indiqué ne pas avoir d’observations à présenter et s’en remettre à la sagesse dudit Tribunal.

11      Par décision du 3 décembre 2014, le président du Tribunal de la fonction publique faisant fonction a rejeté la demande de récusation (ci-après la « décision du 3 décembre 2014 »).

12      Par lettre du greffe du Tribunal de la fonction publique du 12 décembre 2014, les parties ont été convoquées à une nouvelle audience qui s’est tenue le 29 janvier 2015 à 14 h 30.

13      Le 30 juin 2015, le Tribunal de la fonction publique (deuxième chambre) a prononcé l’arrêt attaqué.

14      Le Tribunal de la fonction publique a considéré que, à l’appui de ses conclusions en annulation du rapport de notation litigieux, la requérante avait invoqué six moyens, tirés, le premier, de l’établissement tardif dudit rapport, le deuxième, de l’erreur manifeste d’appréciation, le troisième, de la violation du droit à une évaluation objective et équitable, le quatrième, du détournement de pouvoir, le cinquième, de la violation des formes substantielles ou des règles de procédure et, le sixième, de l’erreur de fait. Par l’arrêt attaqué, il a rejeté l’ensemble de ces moyens et, partant, le recours et a condamné la requérante aux dépens.

 Procédure devant le Tribunal et conclusions des parties

15      Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 11 septembre 2015, la requérante a introduit le présent pourvoi.

16      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le même jour, la requérante a introduit une demande visant à obtenir l’anonymat, à laquelle le président de la chambre des pourvois a fait droit par décision du 11 janvier 2016.

17      Le 15 mars 2016, la Cour de justice de l’Union européenne a déposé le mémoire en réponse. La phase écrite de la procédure a été close le 4 avril 2016.

18      Les parties n’ont pas présenté de demande d’audience dans le délai prévu à l’article 207, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

19      Par décision du 19 septembre 2016, le président de la deuxième chambre du Tribunal a rejeté une demande de récusation de la requérante (voir point 67 ci-après).

20      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’arrêt attaqué ;

–        « statuer conformément à la requête introductive d’instance de l’affaire F‑64/13 » ;

–        condamner la Cour de justice de l’Union européenne aux dépens.

21      La Cour de justice de l’Union européenne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le pourvoi comme, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 Sur le pourvoi

22      À l’appui du pourvoi, la requérante invoque six moyens, tirés, le premier, d’une violation des droits de la défense et du droit à un recours effectif au sens de l’article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH ») et de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, le deuxième, d’une violation manifeste du principe de légalité, de l’interprétation textuelle et de la hiérarchie des normes de l’Union européenne, le troisième, d’une violation du droit à un recours effectif, le quatrième, d’une erreur de droit en ce que le Tribunal de la fonction publique n’a pas pris position sur les demandes de mesures d’instruction et de mesures d’organisation de la procédure, le cinquième, de l’omission de vérifier le bien-fondé de ses critiques et des opinions du comité de notation dans le cadre du rejet du moyen tiré du détournement de pouvoir et, le sixième, d’une erreur de droit en ce que le Tribunal de la fonction publique a jugé qu’elle était tenue d’introduire une demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), afin d’être indemnisée pour établissement tardif du rapport de notation litigieux.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation des droits de la défense et du droit à un recours effectif au sens de l’article 6 de la CEDH et de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux

23      Le premier moyen s’articule en trois branches distinctes relatives, respectivement, à la procédure de récusation, à la date de fixation de l’audience et à la rédaction de l’arrêt attaqué. Par ailleurs, estimant que le présent moyen est fondé, la requérante demande au Tribunal de réexaminer sa demande de récusation et les griefs sur lesquels cette demande se fonde.

 Sur la première branche

24      La requérante avance deux griefs. En s’appuyant sur l’article 6 de la CEDH et sur l’article 47 de la charte des droits fondamentaux, elle soutient, d’une part, qu’elle aurait dû pouvoir prendre connaissance des observations des membres du Tribunal de la fonction publique visés par sa demande de récusation et avoir la possibilité de les commenter avant que sa demande ne soit rejetée et, d’autre part, que les décisions prises à la suite de demandes de récusation devraient pouvoir faire l’objet de recours devant un tribunal.

25      La Cour de justice de l’Union européenne conteste l’argumentation de la requérante.

26      Il y a lieu de rappeler que l’exigence d’impartialité des juridictions est consacrée notamment à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux et à l’article 6 de la CEDH. L’existence de garanties en matière de composition du tribunal représente la pierre angulaire du droit à un procès équitable, dont le juge de l’Union européenne doit notamment vérifier le respect lorsqu’une violation de ce droit est invoquée et que la contestation sur ce point n’apparaît pas d’emblée manifestement dépourvue de sérieux [voir, en ce sens, ordonnance du 15 décembre 2011, Altner/Commission, C‑411/11 P, non publiée, EU:C:2011:852, point 14 ; arrêts du 13 décembre 2012, Strack/Commission, T‑199/11 P, EU:T:2012:691, point 68, et du 19 juin 2015, Z/Cour de justice, T‑88/13 P, EU:T:2015:393, point 44 (non publié)].

27      Il importe d’ajouter que l’exigence d’impartialité recouvre deux aspects. En premier lieu, le tribunal doit être subjectivement impartial, c’est‑à‑dire qu’aucun de ses membres ne doit manifester de parti pris ou de préjugé personnel, l’impartialité personnelle se présumant jusqu’à preuve du contraire. En second lieu, le tribunal doit être objectivement impartial, c’est‑à‑dire qu’il doit offrir les garanties suffisantes pour exclure à cet égard tout doute légitime [voir, en ce sens, ordonnance du 15 décembre 2011, Altner/Commission, C‑411/11 P, non publiée, EU:C:2011:852, point 15, et arrêt du 19 juin 2015, Z/Cour de justice, T‑88/13 P, EU:T:2015:393, point 45 (non publié)].

28      En ce qui concerne le premier grief, il y a d’abord lieu de constater que la procédure de récusation permet à une partie à la procédure d’invoquer un motif d’empêchement à l’encontre d’un membre de la formation de jugement. Il s’agit d’un incident de procédure dont l’objectif est d’assurer que la formation de jugement remplit les exigences d’impartialité au sens de l’article 6 de la CEDH et de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux. La demande de récusation n’ouvre donc pas une procédure entre la partie qui en est l’auteur et le membre de la formation visé par cette demande.

29      En l’espèce, le président du Tribunal de la fonction publique faisant fonction a statué sur la demande de récusation présentée par la requérante, après avoir, d’une part, invité la Cour de justice de l’Union européenne, partie défenderesse, à présenter ses observations et, d’autre part, entendu les membres de la formation de jugement visés par la demande de récusation. La Cour de justice de l’Union européenne a indiqué ne pas avoir d’observations et s’en remettre à la sagesse du Tribunal de la fonction publique. Pour sa part, si l’audition des membres de la formation de jugement n’a pas été retranscrite dans un document versé au dossier de l’affaire, son contenu est exposé dans la décision du 3 décembre 2014.

30      Ainsi, la décision du 3 décembre 2014 a été prise sur le fondement de la demande de récusation, des observations de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’audition des membres visés par la demande. Pour répondre au grief de la requérante présenté devant le Tribunal, il convient de déterminer si, dans le cas d’espèce, la demande de récusation a fait l’objet d’un examen approprié garantissant que la requérante a pu exercer efficacement son droit de demander la récusation des membres de la formation de jugement.

31      À cet égard, il y a lieu de relever que la requérante avait avancé devant le Tribunal de la fonction publique trois motifs au soutien de sa demande de récusation. Tout d’abord, elle avait fait valoir que les membres de la formation de jugement avaient tous exercé une activité professionnelle au sein de la Cour de justice de l’Union européenne, partie défenderesse, avant d’être nommés juges au Tribunal de la fonction publique. Or, cette circonstance, d’ailleurs non litigieuse, n’est pas mentionnée dans la décision du 3 décembre 2014 du président de la fonction publique faisant fonction comme ayant fait l’objet de développements lors de l’audition. Il en est de même du motif tiré des omissions dans le rapport préparatoire d’audience. Il s’ensuit que, à l’égard de ces motifs, la requérante ne saurait soutenir qu’elle n’a pas eu la possibilité de prendre connaissance et de commenter les observations des membres du Tribunal de la fonction publique visés par sa demande de récusation.

32      En tant que troisième motif, la requérante avait tiré argument des faits liés à la fixation de la date de l’audience devant le Tribunal de la fonction publique. Il ressort de la décision du 3 décembre 2014 que les membres auditionnés ont donné des indications sur les circonstances qui ont déterminé la date de l’audience. Eu égard à la nature de ce motif de récusation, le président du Tribunal de la fonction publique faisant fonction a pu établir les faits sans devoir entendre à nouveau la requérante et statuer sur l’incident de procédure. En conséquence, il convient de considérer que la requérante n’a pas été privée de l’exercice effectif de son droit de demander la récusation.

33      Partant, le premier grief doit être rejeté.

34      En ce qui concerne le second grief, il y a lieu de rappeler que, si la décision relative à une demande de récusation ne fait pas partie des décisions qui, en tant que telles, sont susceptibles de pourvoi devant le Tribunal, le rejet d’une telle demande peut être attaqué dans le cadre d’un pourvoi contre la décision mettant fin à l’instance, en invoquant un moyen tiré de l’irrégularité de la procédure devant la juridiction de première instance [voir, en ce sens, arrêt du 19 juin 2015, Z/Cour de justice, T‑88/13 P, EU:T:2015:393, point 82 (non publié)].

35      Or, en l’espèce, dans le cadre de son pourvoi, la requérante a eu la possibilité de contester la régularité de la procédure de récusation, ce qu’elle a d’ailleurs fait en avançant le premier grief de la première branche du premier moyen et la deuxième branche de ce même moyen. Elle ne saurait donc invoquer la violation du droit à un recours effectif.

36      Il s’ensuit que le second grief doit être rejeté ainsi que, partant, la première branche.

 Sur la deuxième branche

37      La requérante soutient, en substance, que la fixation de la date de l’audience par le Tribunal de la fonction publique ferait douter de son impartialité. Premièrement, elle indique qu’elle a reçu la convocation à l’audience le 17 septembre 2014 pour la tenue d’une audience le 25 septembre suivant, ce qui irait à l’encontre des instructions pratiques qui prévoient le respect de « quelques semaines » entre la convocation à l’audience et l’audience. Deuxièmement, la requérante fait observer qu’elle se trouvait en congé annuel à l’étranger à la date de la convocation à l’audience, et ce jusqu’au jour de l’audience, ce qui n’aurait pas permis à son représentant de préparer l’audience. Troisièmement, la requérante prétend que le report de l’audience au 30 septembre 2014 était dû à la présence obligatoire de son représentant à une audience devant une juridiction luxembourgeoise et que, si cette circonstance n’avait pas existé, sa demande de report aurait été rejetée par le Tribunal de la fonction publique. Cette circonstance ne serait pas mentionnée dans la décision du 3 décembre 2014. Quatrièmement, la requérante soutient que, si les membres de la deuxième chambre du Tribunal de la fonction publique ne disposaient pas d’informations quant à son absence aux dates de convocation à l’audience et de l’audience, le greffier, quant à lui, n’aurait ignoré ni le début ni la durée de son congé. Enfin, la requérante souligne la « méfiance » du Tribunal de la fonction publique à l’égard du représentant de la requérante, auquel il a été demandé de justifier son obligation de présence à une audience devant une juridiction luxembourgeoise le 25 septembre 2014, alors que, selon la « coutume », du moins devant les juridictions luxembourgeoises, « l’avocat est cru sur parole ».

38      La Cour de justice de l’Union européenne conteste les arguments de la requérante.

39      En l’espèce, aucun des éléments apportés par la requérante n’est de nature à mettre en cause l’impartialité personnelle des membres de la deuxième chambre du Tribunal de la fonction publique ni à faire naître un doute en ce qui concerne l’impartialité du Tribunal de la fonction publique.

40      En effet, premièrement, en ce qui concerne l’argument selon lequel le Tribunal de la fonction publique aurait méconnu les instructions pratiques, en fixant la date de l’audience au 25 septembre 2014 alors que la convocation à cette audience était datée du 17 septembre 2014, il y a d’abord lieu de relever que cet argument avait déjà été soulevé par la requérante, en des termes identiques, dans sa demande de récusation et qu’il a été rejeté par la décision du 3 décembre 2014. En effet, il ressort de cette décision que « la circonstance que les instructions pratiques aux parties de 2012 n’ont pas été fidèlement appliquées en ce qui concerne le délai de convocation à l’audience – aussi regrettable soit-elle – n’est pas de nature à démontrer à suffisance de droit un défaut d’impartialité [à l’égard] de chacun des membres de la formation de jugement [ ; a]u demeurant, […] la deuxième chambre a également fixé à des dates rapprochées plusieurs audiences concernant d’autres affaires qui étaient en […] état d’être plaidées, ce qui démontre qu’un traitement particulier n’a pas été réservé à la présente affaire et ce qui accrédite l’affirmation des membres de la deuxième chambre selon laquelle la fixation de l’audience dans la présente affaire était basée sur un motif légitime, à savoir éviter un report de l’audience à cause d’un éventuel changement dans la composition de la deuxième chambre et une charge de travail supplémentaire pour les juges qui seraient nouvellement affectés à la deuxième chambre du Tribunal ».

41      À cet égard, il ressort clairement de la décision du 3 décembre 2014 que la fixation de l’audience au 25 septembre 2014 était liée à l’expiration, le 30 septembre 2014, du mandat de deux membres du Tribunal de la fonction publique et aux élections prochaines du président et des présidents de chambre dudit Tribunal, avec pour conséquence de probables modifications dans la composition de la deuxième chambre.

42      Or, dans le pourvoi, la requérante ne présente pas d’argument juridique permettant d’établir l’erreur de droit qu’aurait commise le président du Tribunal de la fonction publique faisant fonction par le rejet de sa demande de récusation, tel qu’il a été motivé dans la décision du 3 décembre 2014. Elle se contente d’indiquer que « cette façon de voir les choses est […] extrêmement critiquable ».

43      Deuxièmement, il y a lieu de constater que l’argument selon lequel la coïncidence entre la fixation de la date de l’audience au 25 septembre 2014 et le fait qu’elle était en congé annuel à l’étranger à cette date ferait douter de l’impartialité du Tribunal de la fonction publique avait déjà été présenté par celle-ci dans sa demande de récusation et qu’il a été rejeté par la décision du 3 décembre 2014. À cet égard, le président du Tribunal de la fonction publique faisant fonction a indiqué que les membres de la deuxième chambre ne prenaient nullement part à la gestion de la situation professionnelle de la requérante et n’avaient donc pas accès aux données la concernant figurant dans le système informatique de gestion des ressources humaines utilisé à la Cour de justice de l’Union européenne, de sorte que la convocation à l’audience et l’envoi du rapport préparatoire d’audience à une date à laquelle la requérante était déjà en congé ainsi que la fixation de l’audience le jour où elle reprenait le travail apparaissaient comme étant purement fortuits.

44      Dans la requête en pourvoi, la requérante ne présente pas d’argument juridique de nature à démontrer l’erreur de droit qu’aurait commise le président du Tribunal de la fonction publique faisant fonction en rejetant cet argument. Sans contester que les membres de la deuxième chambre n’avaient pas accès au système informatique de gestion des ressources humaines utilisé à la Cour de justice de l’Union européenne, la requérante se contente d’affirmer que, pour sa part, le greffier ne pouvait ignorer ni le début ni la durée de son congé. En tout état de cause, une telle circonstance ne saurait établir, en tant que telle, un défaut d’impartialité des membres de la deuxième chambre du Tribunal de la fonction publique.

45      Quant à l’argument selon lequel la requérante, qui était en congé à la date de convocation à l’audience et à la date de l’audience du 25 septembre 2014, n’aurait pas pu exercer ses droits de la défense, il suffit de rappeler que le Tribunal de la fonction publique a fixé deux nouvelles audiences les 30 septembre 2014 et 29 janvier 2015, dans le cadre desquelles la requérante a pu défendre ses droits.

46      Troisièmement, ainsi que le soutient la Cour de justice de l’Union européenne, l’allégation selon laquelle le Tribunal de la fonction publique n’aurait pas accepté de reporter l’audience au 30 septembre 2014 si le représentant de la requérante n’avait pas été dans l’obligation de se présenter à une audience devant une juridiction luxembourgeoise ne repose sur aucun élément concret à son soutien.

47      Enfin, à supposer même qu’il existe une « coutume » devant les juridictions luxembourgeoises selon laquelle les avocats seraient « crus sur parole », le fait de demander au représentant de la requérante de justifier de son obligation de participer à une audience devant une juridiction luxembourgeoise ne saurait démontrer, en tant que tel, un défaut d’impartialité des juges de la deuxième chambre du Tribunal de la fonction publique.

48      Dans ces conditions, la requérante ne saurait soutenir que la fixation initiale de la date de l’audience au 25 septembre 2014 établirait le défaut d’impartialité de la deuxième chambre du Tribunal de la fonction publique.

49      La deuxième branche doit donc être rejetée.

 Sur la troisième branche

50      La requérante soutient, en substance, que la rédaction de l’arrêt attaqué confirmerait l’absence d’impartialité de la deuxième chambre du Tribunal de la fonction publique. Premièrement, les juges composant cette chambre auraient rejeté certains moyens « en avançant des éléments qui nécessit[ai]ent pourtant une analyse au fond des faits ». Deuxièmement, l’arrêt attaqué serait entaché de contradictions. Elle cite, à cet égard, la contradiction entre les points 71 et 93 dudit arrêt, de laquelle aucune conclusion logique n’aurait été tirée.

51      La Cour de justice de l’Union européenne conteste les arguments de la requérante.

52      S’agissant du grief selon lequel le Tribunal de la fonction publique aurait rejeté certains de ses moyens sans mener un examen approfondi de certains faits, il y a lieu de rappeler qu’il résulte de l’article 11 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ainsi que de l’article 194, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt ou de l’ordonnance dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du pourvoi ou du moyen concerné (voir, en ce sens, arrêt du 16 décembre 2010, Lebedef/Commission, T‑52/10 P, EU:T:2010:543, point 35, et ordonnance du 2 octobre 2014, Marcuccio/Commission, T‑447/13 P, EU:T:2014:869, point 36).

53      Or, en l’espèce, l’argumentation développée par la requérante au soutien du présent grief, qui ne précise ni les « moyens » ni les « faits » concernés, ne permet pas de discerner avec suffisamment de clarté le raisonnement juridique visant à remettre en cause l’appréciation du Tribunal de la fonction publique, de sorte que ce grief est irrecevable.

54      En outre, s’agissant des prétendues contradictions des motifs de l’arrêt attaqué, lesquelles feraient douter de l’impartialité du Tribunal de la fonction publique, il y a lieu de constater que la requérante invoque l’existence d’une contradiction entre les seuls points 71 et 93 de l’arrêt attaqué. Or, comme le relève la Cour de justice de l’Union européenne, ces deux points de l’arrêt attaqué, qui ne font que rappeler la jurisprudence constante, ne sauraient révéler, en tant que tels, un défaut d’impartialité des membres de la deuxième chambre du Tribunal de la fonction publique, quand bien même il existerait une contradiction entre eux.

55      Il résulte de ce qui précède que la troisième branche doit être rejetée ainsi que, partant, le premier moyen. En conséquence, doit également être rejetée la demande de la requérante de réexaminer sa demande de récusation.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation du principe de légalité, de l’interprétation textuelle et de la hiérarchie des normes de l’Union

56      La requérante soutient que, en rejetant le moyen tiré de l’incompétence du comité chargé des réclamations et de l’illégalité de l’article 4 de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne du 4 mai 2004 relative à l’exercice des pouvoirs dévolus par le statut à l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») ainsi que par le régime applicable aux autres agents à l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci-après l’« AHCC ») (ci‑après la « décision du 4 mai 2004 »), le Tribunal de la fonction publique a manifestement violé le principe de légalité, le principe de l’interprétation textuelle et la hiérarchie des normes de l’Union.

57      Elle prétend qu’il ressort des termes non équivoques des articles 4 et 12 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que les fonctionnaires de la Cour ont la garantie qu’aucune décision individuelle les concernant n’est prise par une autre personne que le greffier et/ou le président de la Cour. Ce serait donc à tort que le Tribunal de la fonction publique lui aurait reproché, au point 121 de l’arrêt attaqué, de ne pas avoir démontré la compatibilité de son interprétation des dispositions des articles 4 et 12 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne avec l’article 2, paragraphe 1, du statut.

58      Selon la requérante, le statut de la Cour de justice de l’Union européenne, qui prévaut sur le statut, n’autoriserait nullement le greffier ou le président de la Cour à déléguer leurs compétences à un comité chargé des réclamations, en ce qui concerne les fonctionnaires et autres agents.

59      Par ailleurs, une autorité ne pourrait déléguer ses pouvoirs qu’à condition d’y avoir été préalablement habilitée et d’avoir adopté une décision explicite de délégation (voir, en ce sens, arrêt du 26 mai 2005, Tralli/BCE, C‑301/02 P, EU:C:2005:306, point 43).

60      Enfin, la requérante rappelle que l’arrêt du 19 juin 2015, Z/Cour de justice (T‑88/13 P, EU:T:2015:393, point 169), cité par le Tribunal de la fonction publique au point 123 de l’arrêt attaqué, a été rendu par la chambre des pourvois du Tribunal composée, notamment, de M. le président Marc Jaeger et de M. le vice-président Heikki Kanninen. Or, ces deux membres seraient, en vertu de l’article 8 de la décision du Tribunal du 22 septembre 2014, portant détermination de l’AIPN et de l’AHCC pour les fonctionnaires et agents affectés au Tribunal, membres de la commission chargée de prendre des décisions sur les réclamations dirigées contre des actes des autorités désignées par la présente décision en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut, ce qui les empêcherait d’examiner le présent moyen en toute impartialité.

61      La Cour de justice de l’Union européenne conteste les arguments de la requérante.

62      Il y a d’abord lieu de rappeler que le Tribunal de la fonction publique a rejeté le moyen tiré de l’incompétence du comité chargé des réclamations et de l’illégalité de l’article 4 de la décision du 4 mai 2004 (point 124 de l’arrêt attaqué) pour les motifs suivants :

« 120            […] la [...] requérante se contente de rappeler le contenu de l’article 4, premier alinéa, du statut de la Cour [de justice de l’Union européenne], aux termes duquel “[l]es juges ne peuvent exercer aucune fonction politique ou administrative”, et d’affirmer que, à l’exception du président de la Cour de justice, les autres juges et les avocats généraux ne peuvent exercer aucune fonction administrative et, notamment, agir en qualité d’AIPN dans le cadre d’un comité chargé des réclamations. Aucune argumentation juridique ne vient étayer cette affirmation. Or, le Tribunal [de la fonction publique] rappelle que l’article 4, premier alinéa, du statut de la Cour vise à assurer l’indépendance des juges, tant pendant qu’après l’exercice de leurs fonctions, à l’égard notamment des États membres ou des autres institutions de l’Union. La [...] requérante ne saurait toutefois inférer de l’article 4, premier alinéa, du statut de la Cour [de justice de l’Union européenne] une impossibilité d’exercer des fonctions relatives à l’administration interne de l’institution. En effet, l’exercice par les juges de telles fonctions ne porte pas préjudice à leur indépendance et permet d’assurer l’autonomie administrative de l’institution (voir arrêt [du 19 juin 2015, Z/Cour de justice, T‑88/13 P, Rec (Extraits), EU:T:2015:393], point 167).

121      En outre, la [...] requérante se borne à affirmer que, eu égard à l’article 12 du statut de la Cour [de justice de l’Union européenne], qui dispose que les fonctionnaires et agents attachés à la Cour de justice “relèvent du greffier sous l’autorité du président”, seuls le greffier et le président de la Cour de justice peuvent exercer les pouvoirs dévolus par le statut à l’AIPN. Elle ne démontre pas davantage la compatibilité de son interprétation de l’article 12 du statut de la Cour [de justice de l’Union européenne], comme réservant au greffier et au président de la Cour l’exercice des pouvoirs dévolus à l’AIPN, avec l’article 2, paragraphe 1, du statut, qui prévoit que chaque institution détermine les autorités qui exercent en son sein les pouvoirs dévolus par le statut à l’AIPN. Elle se contente en effet d’affirmer que l’article 2, paragraphe 1, du statut ne peut, en ce qui concerne la Cour de justice, qu’être lu en combinaison avec les articles 4 et 12 du statut de la Cour [de justice de l’Union européenne] (voir arrêt [du 19 juin 2015, Z/Cour de justice, T‑88/13 P, Rec (Extraits), EU:T:2015:393], point 168).

122      Enfin, il y a lieu de rappeler que, lorsqu’ils décident sur un litige porté devant le Tribunal, les membres de cette juridiction agissent en leur qualité de juge et dans la pleine indépendance de l’exercice de leurs fonctions garantie tant par les traités, notamment par le quatrième alinéa de l’article 257 TFUE, que par le statut de la Cour [de justice de l’Union européenne]. Dans ces circonstances, le “risque […] [d’]impact psychologique important sur les juges de la juridiction inférieure” que la [...] requérante prétend voir dans les arrangements pour le traitement des réclamations au sein de la Cour de justice relève de la pure spéculation.

123      Dans ces conditions, la [...] requérante ne saurait valablement soutenir, sans autre démonstration à l’appui, que l’article 4 de la décision du 4 mai 2004, aux termes duquel le comité chargé des réclamations exerce les pouvoirs dévolus par le statut à l’AIPN en ce qui concerne les décisions sur les réclamations, est contraire à l’article 2, paragraphe 1, du statut, lu en combinaison avec les articles 4 et 12 du statut de la Cour [de justice de l’Union européenne] (voir arrêt [du 19 juin 2015, Z/Cour de justice, T‑88/13 P, Rec (Extraits), EU:T:2015:393], point 169). »

63      Dans le pourvoi, la requérante se contente de rappeler le contenu des articles 4 et 12 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de soutenir, comme elle l’a fait en première instance, que ces dispositions garantissent aux fonctionnaires qu’aucune décision individuelle les concernant ne sera prise par une autre personne que le greffier et/ou le président de la Cour. Elle ne présente aucun argument juridique de nature à établir que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit au point 120 de l’arrêt attaqué en affirmant notamment que l’article 4, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne vise à assurer l’indépendance des juges à l’égard notamment des États membres ou des autres institutions de l’Union et qu’il ne saurait en être inféré une impossibilité d’exercer des fonctions relatives à l’administration interne de l’institution, un tel exercice ne portant pas préjudice à leur indépendance, mais permettant d’assurer l’autonomie administrative de l’institution.

64      La requérante n’établit pas davantage que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en affirmant qu’elle n’avait pas démontré que son interprétation des articles 4 et 12 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne était compatible avec l’article 2, paragraphe 1, du statut qui prévoit que chaque institution détermine les autorités qui exercent en son sein les pouvoirs dévolus par ce même statut à l’AIPN. Elle se contente de répéter l’argumentation présentée en première instance selon laquelle le statut de la Cour de justice de l’Union européenne, qui prévaudrait sur le statut, n’autoriserait pas le greffier ou le président de la Cour à déléguer leur compétence, sans établir, comme il a été montré au point 63 ci-dessus, que le Tribunal de la fonction publique aurait commis une erreur de droit en relevant qu’il ne saurait être inféré du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, et en particulier de son article 4, une impossibilité pour les juges d’exercer des fonctions relatives à l’administration interne de l’institution.

65      Or, ainsi qu’il est indiqué au point 52 ci-dessus, un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt ou de l’ordonnance dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du pourvoi ou du moyen concerné. Ne répond pas à cette exigence le pourvoi qui se limite à répéter ou à reproduire textuellement les moyens et les arguments qui ont déjà été présentés devant le Tribunal de la fonction publique. En effet, un tel pourvoi constitue en réalité une demande visant à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal de la fonction publique, ce qui échappe à la compétence du Tribunal (voir, en ce sens, arrêts du 19 septembre 2008, Chassagne/Commission, T‑253/06 P, EU:T:2008:386, point 54, et du 16 septembre 2013, De Nicola/BEI, T‑618/11 P, EU:T:2013:479, point 51).

66      En ce qui concerne l’argument selon lequel une autorité ne peut déléguer ses pouvoirs qu’à condition d’y avoir préalablement été habilitée et d’avoir adopté une décision explicite de délégation, il suffit de relever qu’il ressort du point 123 de l’arrêt attaqué que c’est en vertu de la décision du 4 mai 2004, laquelle a été adoptée en conformité avec l’article 2, paragraphe 1, du statut, lu en combinaison avec les articles 4 et 12 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, que la Cour de justice de l’Union européenne a habilité le comité chargé des réclamations à exercer les pouvoirs dévolus par le statut à l’AIPN en ce qui concerne les décisions sur les réclamations.

67      Enfin, s’agissant de l’argument selon lequel l’arrêt du 19 juin 2015, Z/Cour de justice (T‑88/13 P, EU:T:2015:393), ayant été rendu par la chambre des pourvois du Tribunal, composée notamment de M. le président Jaeger et de M. le vice-président Kanninen, qui auraient été membres de la commission chargée d’exercer certaines compétences de l’AIPN et de l’AHCC pour les fonctionnaires et agents affectés au Tribunal, ceux-ci ne seraient pas impartiaux dans le cadre de la présente affaire pour statuer sur le présent moyen, il y a lieu de rappeler qu’il a été interprété comme renfermant une demande de récusation à l’égard de M. le président Jaeger et de M. le vice-président Kanninen, laquelle a été rejetée par décision du président de la deuxième chambre du Tribunal du 19 septembre 2016.

68      Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du droit à un recours effectif

69      La requérante critique la jurisprudence constante, rappelée au point 56 de l’arrêt attaqué, selon laquelle le contrôle du juge de l’Union est limité à celui de la régularité procédurale, de l’exactitude matérielle des faits, de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation ou de détournement de pouvoir et il ne lui appartient pas de contrôler le bien-fondé de l’appréciation portée par l’administration sur les aptitudes professionnelles du fonctionnaire lorsque cette appréciation comporte des jugements complexes de valeur qui, par leur nature, ne sont pas susceptibles d’une vérification objective.

70      Elle estime que cette jurisprudence, qui limite l’étendue du contrôle du juge sur le contenu des rapports de notation, la prive de son droit à un recours effectif, tel que garanti par l’article 6 de la CEDH et par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux.

71      La Cour de justice de l’Union européenne conteste les arguments de la requérante.

72      Ainsi qu’il ressort du point 56 de l’arrêt attaqué, les notateurs disposent d’un très large pouvoir d’appréciation dans les jugements relatifs au travail des personnes qu’ils ont la charge de noter, ce qui interdit au juge de l’Union, sauf en cas d’erreurs de fait manifestes ou de détournement de pouvoir, de contrôler le bien-fondé de l’appréciation portée sur les aptitudes professionnelles d’un fonctionnaire, lorsqu’elle comporte des jugements complexes de valeur qui, par leur nature même, ne sont pas susceptibles d’une vérification objective (voir, en ce sens, arrêts du 7 mai 2003, den Hamer/Commission, T‑278/01, EU:T:2003:135, point 58 ; du 13 juillet 2006, Vounakis/Commission, T‑165/04, EU:T:2006:213, point 61, et du 28 novembre 2007, Vounakis/Commission, T‑214/05, EU:T:2007:360, point 62).

73      Dans la requête en pourvoi, la requérante ne présente aucun argument juridique permettant d’établir l’erreur de droit que le Tribunal de la fonction publique aurait commise par le rappel, au point 56 de l’arrêt attaqué, de la jurisprudence constante portant sur l’étendue du contrôle du juge de l’Union sur le contenu des rapports de notation. Elle se contente d’affirmer que cette jurisprudence n’est pas conforme à l’article 6 de la CEDH et à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux et que le contrôle du juge devrait couvrir la « totalité du litige ».

74      Par ailleurs, comme l’indique la Cour de justice de l’Union européenne dans le mémoire en réponse, il y a lieu d’observer que la requérante n’a pas démontré, par des éléments concrets, que, en l’espèce, son recours devant le Tribunal de la fonction publique n’avait pas été « effectif ». Elle ne soutient pas que les griefs et arguments qu’elle a soulevés en première instance, dans le cadre du deuxième moyen, n’ont pas été examinés par le Tribunal de la fonction publique. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, dans le respect de la jurisprudence citée au point 72 ci‑dessus, le Tribunal de la fonction publique a examiné, ainsi qu’il ressort des points 57 à 61 de l’arrêt attaqué, si le notateur et le notateur d’appel n’avaient pas usé de leur pouvoir d’appréciation de manière manifestement erronée. Or, cet examen n’est pas contesté par la requérante dans la requête en pourvoi.

75      Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter le troisième moyen.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une erreur de droit en ce que le Tribunal de la fonction publique n’a pas pris position sur les demandes de mesures d’instruction et de mesures d’organisation de la procédure

76      La requérante soutient, en substance, que, en refusant, au point 78 de l’arrêt attaqué, de prendre position sur les demandes de mesures d’instruction et de mesures d’organisation de la procédure visant à établir le bien-fondé des accusations qu’elle a portées à l’encontre de la hiérarchie, le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit.

77      Selon la requérante, le Tribunal de la fonction publique n’était pas en droit de qualifier ses propos de graves accusations susceptibles de porter atteinte à la dignité ou à l’honorabilité professionnelle de sa hiérarchie en l’absence d’une vérification du bien-fondé de ses critiques.

78      À cet égard, la requérante cite l’arrêt de la Cour EDH du 18 octobre 2011, Sosinowska c. Pologne (CE:ECHR:2011:1018JUD001024709), qui aurait conclu, en l’absence d’une telle vérification, à la violation du droit fondamental à la liberté d’expression.

79      Outre l’erreur de droit, la requérante prétend que cette absence de vérification « semble privilégier » la partie défenderesse, ce qui est incompatible avec le devoir d’impartialité des juges du Tribunal de la fonction publique.

80      La Cour de justice de l’Union européenne conteste les arguments de la requérante.

81      Il y a d’abord lieu de rappeler que, dans le cadre du troisième moyen invoqué en première instance, la requérante avait demandé au Tribunal de la fonction publique d’ordonner certaines mesures d’instruction et d’adopter des mesures d’organisation de la procédure afin de vérifier le bien-fondé des critiques qu’elle avait émises à l’encontre de sa hiérarchie.

82      Il est vrai qu’il ressort du point 78 de l’arrêt attaqué que le Tribunal de la fonction publique a estimé qu’il n’était pas nécessaire de prendre position sur les demandes de mesures d’instruction et de mesures d’organisation de la procédure de la requérante visant à établir le bien-fondé des accusations que celles-ci a portées à l’encontre de sa hiérarchie.

83      S’il appartient au Tribunal de la fonction publique, au regard de son règlement de procédure, d’apprécier l’utilité de mesures d’instruction ou de mesures d’organisation de la procédure aux fins de la solution du litige qui lui est soumis, il incombe toutefois au Tribunal de vérifier si le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en refusant d’ordonner ou d’adopter lesdites mesures [voir, par analogie, ordonnance du 4 octobre 2007, Olsen/Commission, C‑320/05 P, non publiée, EU:C:2007:573, point 64 ; arrêts du 9 juin 2011, Diputación Foral de Vizcaya e.a./Commission, C‑465/09 P à C‑470/09 P, non publié, EU:C:2011:372, point 108, et du 19 juin 2015, Z/Cour de justice, T‑88/13 P, EU:T:2015:393, point 87 (non publié)].

84      Il y a d’abord lieu de relever que, au point 78 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a décidé de ne pas prendre position sur les mesures d’instruction et les mesures d’organisation de la procédure, au motif que la vérification du bien-fondé des critiques de la requérante à l’encontre de sa hiérarchie « n’[était] pas pertinente s’agissant d’examiner la légalité du rapport de notation litigieux ».

85      Ce motif est explicité au point 76 de l’arrêt attaqué, duquel il ressort, premièrement, que la requérante n’avait pas prouvé que les notes et les commentaires qu’elle contestait dans le rapport de notation litigieux avaient un quelconque lien avec les accusations qu’elle avaient portées contre sa hiérarchie et, deuxièmement, que le rapport de notation litigieux s’appuyait sur des faits concrets dont la requérante ne démontrait pas que l’appréciation était affectée par une erreur manifeste. À cet égard, il ressort du point 60 de l’arrêt attaqué que « le notateur n’a[vait] commis aucune erreur manifeste d’appréciation en considérant en termes négatifs l’envoi [par la requérante] des courriels des 9 et 10 décembre 2008 ». Selon le Tribunal de la fonction publique, « d’une part, l’envoi d’un courriel à tous les membres d’une unité ne constitue pas un moyen d’expression approprié, au regard de l’article 12 du statut, pour émettre des critiques constructives à l’encontre de la hiérarchie et, d’autre part, les deux courriels en cause comport[ai]ent, à l’évidence, de graves accusations susceptibles de porter atteinte à la dignité ou à l’honorabilité professionnelle d’autres fonctionnaires ».

86      C’est au regard de ces considérations exposées notamment aux points 60 et 76 de l’arrêt attaqué que le Tribunal de la fonction publique a estimé qu’il n’avait pas besoin de prendre position sur les mesures d’instruction et les mesures d’organisation de la procédure demandées par la requérante.

87      Or, il y a lieu de constater que, dans le cadre de son pourvoi, la requérante n’avance aucun argument susceptible de faire apparaître que, compte tenu des explications exposées notamment aux points 60 et 76 de l’arrêt attaqué, qui sous-tendent le refus du Tribunal de la fonction publique, au point 78 de cet arrêt, d’ordonner les mesures d’instruction et d’adopter les mesures d’organisation de la procédure demandées, le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit.

88      Compte tenu des circonstances exposées notamment aux points 60 et 76 de l’arrêt attaqué, non contestées par la requérante, cette dernière ne saurait utilement se prévaloir de l’arrêt de la Cour EDH du 18 octobre 2011, Sosinowska c. Pologne (CE:ECHR:2011:1018JUD001024709), en tant que tel, pour établir une erreur de droit qui aurait été commise par le Tribunal de la fonction publique.

89      Dans ces conditions, la requérante ne saurait davantage soutenir que le refus d’ordonner les mesures d’instruction et d’adopter les mesures d’organisation de la procédure demandées témoigne du défaut d’impartialité des juges du Tribunal de la fonction publique.

90      Il s’ensuit que le quatrième moyen doit être rejeté.

 Sur le cinquième moyen, tiré de l’omission de vérifier le bien-fondé des critiques de la requérante et des opinions du comité de notation dans le cadre du rejet du moyen tiré du détournement de pouvoir

91      La requérante soutient que, en ayant rejeté le moyen tiré du détournement de pouvoir sans tenir compte des opinions exprimées par le comité de notation, le Tribunal de la fonction publique met en doute son impartialité.

92      La Cour de justice de l’Union européenne soulève l’irrecevabilité du moyen, en ce que la requérante n’indiquerait pas avec précision les points de l’arrêt attaqué concernés. Elle conteste également les arguments de la requérante.

93      D’abord, il ressort expressément du point 84 de l’arrêt attaqué que « les éléments fournis par la [...] requérante ne permettent pas, à eux seuls, de conclure à l’existence d’un détournement de pouvoir ». La requérante ne saurait, dès lors, soutenir que le Tribunal de la fonction publique n’a pas pris en compte les éléments qu’elle a fait valoir, dont, notamment, les observations émises par le comité de notation.

94      Le Tribunal de la fonction publique a, en revanche, estimé que ces éléments fournis par la requérante ne constituaient pas des indices objectifs, pertinents et concordants, au sens de la jurisprudence citée au point 83 de l’arrêt attaqué. À cet égard, il précise, au point 85 dudit arrêt, que ces éléments ne permettent pas d’affirmer que l’objectif de l’AIPN aurait été de « dévaloriser » la requérante.

95      Or, la requérante ne présente aucun argument juridique de nature à établir que, aux points 83 à 85 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit.

96      Dans ces conditions, le cinquième moyen doit être rejeté comme non fondé, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur sa recevabilité, contestée par la Cour de justice de l’Union européenne.

 Sur le sixième moyen, tiré d’une erreur de droit en ce que le Tribunal de la fonction publique a jugé que la requérante était tenue d’introduire une demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut afin d’être indemnisée pour établissement tardif du rapport de notation

97      La requérante soutient, en substance, que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit, au point 130 de l’arrêt attaqué, en jugeant qu’elle était tenue d’introduire une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut afin d’être indemnisée à la suite de l’établissement tardif du rapport de notation.

98      Elle relève, à cet égard, que le Tribunal de la fonction publique a omis de prendre en compte la jurisprudence qu’elle avait invoquée ou d’indiquer que son interprétation de cette jurisprudence était erronée. Elle fait valoir, en particulier, que le Tribunal de la fonction publique n’a pas indiqué en quoi sa situation serait différente de celle de la partie requérante dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 26 octobre 1994, Marcato/Commission (T‑18/93, EU:T:1994:255). À cet égard, la requérante prétend que, comme dans ladite affaire, sa demande d’indemnisation pour établissement tardif de son rapport de notation est liée de façon suffisamment directe au contenu ou aux conditions d’élaboration de ce rapport pour considérer que la recevabilité des conclusions en annulation doive également entraîner la recevabilité des conclusions en indemnité.

99      La Cour de justice de l’Union européenne conteste les arguments de la requérante.

100    Il y a lieu de constater que la requérante porte sa critique sur le point 130 de l’arrêt attaqué, par lequel le Tribunal de la fonction publique a rappelé que, « lorsqu’un fonctionnaire demande à être indemnisé à la suite d’un préjudice qu’il estime avoir subi en l’absence d’acte faisant grief, il doit engager la procédure en introduisant auprès de l’AIPN une demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, dont le rejet éventuel constituera une décision lui faisant grief contre laquelle il pourra introduire une réclamation, laquelle pourra, le cas échéant, faire l’objet d’un recours en annulation ou d’un recours en indemnité ».

101    Or, ainsi qu’il ressort du point 129 de l’arrêt attaqué, il est de jurisprudence constante que le retard dans l’établissement d’un rapport de notation ne constitue pas un acte faisant grief, mais une faute de service.

102    La requérante n’établit pas que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit par le rappel de la jurisprudence constante citée aux points 129 et 130 de l’arrêt attaqué. Elle se contente de rappeler qu’elle a cité, en première instance, d’autres arrêts, comme l’arrêt du 26 octobre 1994, Marcato/Commission (T‑18/93, EU:T:1994:255), dont le Tribunal de la fonction publique n’aurait pas tenu compte. Or, la seule invocation d’un arrêt qui présenterait une solution différente de celle résultant de la jurisprudence pertinente, au demeurant confirmée postérieurement à l’arrêt cité par la requérante, ne saurait établir une erreur de droit qu’aurait commise le Tribunal de la fonction publique.

103    Dans ces conditions, le sixième moyen doit être rejeté ainsi que, partant, le pourvoi dans son ensemble.

 Sur les dépens

104    Conformément à l’article 211, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, le Tribunal statue sur les dépens.

105    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi, en vertu de l’article 211, paragraphe 1, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

106    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Cour de justice de l’Union européenne.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

déclare et arrête :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Mme Z est condamnée aux dépens.

Jaeger

Kanninen

Gratsias

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 1er décembre 2016.

Signatures


* Langue de procédure : le français.