Language of document : ECLI:EU:T:2024:176

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (troisième chambre élargie)

14 mars 2024 (*)

« Recours en annulation – Marché intérieur de l’électricité – Échanges transfrontaliers d’électricité – Litispendance – Irrecevabilité partielle »

Dans l’affaire T‑283/19,

République fédérale d’Allemagne, représentée par MM. J. Möller, R. Kanitz et P.-L. Krüger, en qualité d’agents, assistés de Mes M. Elspas, R. Bierwagen et G. Brucker, avocats,

partie requérante,

contre

Agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie (ACER), représentée par MM. P. Martinet et E. Tremmel, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Commission européenne, représentée par Mme O. Beynet et M. M. Noll-Ehlers, en qualité d’agents,

partie intervenante,

LE TRIBUNAL (troisième chambre élargie),

composé de M. F. Schalin, président, Mme P. Škvařilová‑Pelzl (rapporteure), M. I. Nõmm, Mme G. Steinfatt et M. D. Kukovec, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la République fédérale d’Allemagne demande l’annulation partielle de la décision no 02/2019 de l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie (ACER), du 21 février 2019, concernant les propositions des gestionnaires de réseaux de transport de la région Core (comprenant la Belgique, la République tchèque, l’Allemagne, la France, la Croatie, le Luxembourg, la Hongrie, les Pays-Bas, l’Autriche, la Pologne, la Roumanie, la Slovénie et la Slovaquie) relatives à des méthodologies régionales communes pour le calcul de la capacité journalière et infrajournalière de ladite région (ci-après la « première décision attaquée ») ainsi que, dans le cadre d’une demande d’adaptation de la requête fondée sur l’article 86 du règlement de procédure du Tribunal, l’annulation de la décision A‑003‑2019_R de la commission de recours de l’ACER, du 7 juillet 2023, confirmant les dispositions contestées de la première décision attaquée (ci-après la « seconde décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 23 avril 2019, la Bundesnetzagentur für Elektrizität, Gas, Telekommunikation, Post und Eisenbahn (BNetzA) a, en qualité d’autorité fédérale de régulation compétente notamment dans le secteur de l’énergie en Allemagne, en vertu de l’article 19 du règlement (CE) no 713/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, instituant une agence de coopération des régulateurs de l’énergie (JO 2009, L 211, p. 1), formé un recours devant la commission de recours de l’ACER contre la première décision attaquée.

3        Par la requête déposée au greffe du Tribunal le 2 mai 2019, la République fédérale d’Allemagne a introduit un recours tendant à l’annulation de la première décision attaquée.

4        Par la décision A‑003‑2019 de la commission de recours de l’ACER, du 11 juillet 2019, le recours introduit par BNetzA contre la première décision attaquée a été rejeté comme étant non fondé (ci-après la « décision de la commission de recours »).

5        Le 21 septembre 2019, BNetzA a introduit un recours devant le Tribunal visant, d’une part, l’annulation partielle de la première décision attaquée et, d’autre part, l’annulation de la décision de la commission de recours.

6        Par l’arrêt du 7 septembre 2022, BNetzA/ACER (T‑631/19, EU:T:2022:509), le Tribunal a, d’une part, annulé la décision de la commission de recours et, d’autre part, rejeté pour le surplus le recours introduit par BNetzA comme étant irrecevable.

7        En application de l’arrêt du 7 septembre 2022, BNetzA/ACER (T‑631/19, EU:T:2022:509), la commission de recours de l’ACER a, par la seconde décision attaquée, confirmé la première décision attaquée.

8        Par la requête déposée au greffe du Tribunal le 28 septembre 2023, enregistrée sous le numéro d’affaire T‑612/23, Allemagne/ACER, la République fédérale d’Allemagne a introduit un recours tendant, d’une part, à l’annulation de la seconde décision attaquée et, d’autre part, à l’annulation partielle de la première décision attaquée.

9        Le 28 septembre 2023, seulement 37 minutes après le dépôt de la requête dans l’affaire T‑612/23, la République fédérale d’Allemagne a également déposé, sur le fondement de l’article 86 du règlement de procédure, une demande d’adaptation de la requête dans la présente affaire, par laquelle elle demande, outre l’annulation partielle de la première décision attaquée, l’annulation de la seconde décision attaquée.

 En droit

10      Aux termes de l’article 129 du règlement de procédure, sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal peut, à tout moment, d’office, les parties principales entendues, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée sur les fins de non-recevoir d’ordre public.

11      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de l’article 129 du règlement de procédure, de statuer par ordonnance motivée.

12      À cet égard, ainsi qu’il ressort de ses observations écrites du 5 décembre 2023, faisant suite à une question posée par le Tribunal dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure adoptée le 17 novembre 2023, en vertu des articles 88 à 90 du règlement de procédure, l’ACER excipe de l’irrecevabilité de la demande d’adaptation de la requête, introduite par la République fédérale d’Allemagne, au motif que celle-ci se heurte à l’exception de litispendance, dès lors que, en substance, elle a le même objet que le recours dans l’affaire T‑612/23, Allemagne/ACER.

13      La République fédérale d’Allemagne fait valoir, par ses observations du 5 décembre 2023, faisant suite à la mesure d’organisation de la procédure mentionnée au point 12 ci-dessus, qu’elle entendait, en substance, par l’introduction du recours dans l’affaire T‑612/23, s’assurer d’un recours tendant à l’annulation de la seconde décision attaquée pleinement recevable devant le Tribunal, tout en veillant à maintenir son intérêt à agir dans le cadre du présent recours, en adaptant ses conclusions tendant initialement à l’annulation de la première décision attaquée.

14      Selon la jurisprudence, un recours qui oppose les mêmes parties et tend aux mêmes fins, sur le fondement des mêmes moyens qu’un recours introduit antérieurement, doit être rejeté comme étant irrecevable (voir, par analogie, ordonnance du 12 octobre 2022, Saure/Commission, T‑165/22, non publiée, EU:T:2022:667, point 14 et jurisprudence citée).

15      Par ailleurs, aux fins de l’examen d’une situation de litispendance, le dépôt, par acte de procédure devant le greffe du Tribunal, d’une demande d’adaptation des conclusions et des moyens de la requête à l’égard d’un acte modifiant ou remplaçant l’acte initialement attaqué équivaut au dépôt d’un nouveau recours (voir ordonnance du 12 octobre 2022, Saure/Commission, T‑165/22, non publiée, EU:T:2022:667, point 15 et jurisprudence citée).

16      Premièrement, il découle de la jurisprudence que, à la date de son adoption, la seconde décision attaquée s’est substituée à la première. En effet, selon la jurisprudence, c’est la décision de la commission de recours confirmant la décision de l’ACER qui fixe définitivement la position de l’ACER, à la suite d’un examen complet de la situation en cause, en fait et en droit, au regard du droit applicable au moment où elle statue (voir arrêt du 7 septembre 2022, BNetzA/ACER, T‑631/19, EU:T:2022:509, point 82 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt du 28 janvier 2016, Heli-Flight/AESA, C‑61/15 P, non publié, EU:C:2016:59, point 84).

17      Deuxièmement, la demande d’adaptation de la requête et le recours dans l’affaire T‑612/23 ont tous les deux pour objet, d’une part, l’annulation de la seconde décision attaquée et, d’autre part, l’annulation partielle de la première décision attaquée. En outre, les premier, deuxième et troisième chefs de conclusions de ladite demande et dudit recours sont rédigés en des termes quasiment identiques et les demandes de remboursement des dépens y figurant sont également identiques.

18      Troisièmement, certes, formellement, les quatrième, cinquième et sixième chefs de conclusions de la demande d’adaptation de la requête ne figurent pas de manière autonome parmi les chefs de conclusions du recours dans l’affaire T‑612/23. Toutefois, ces quatrième, cinquième et sixième chefs de conclusions, tendant, à titre subsidiaire, à l’annulation des première et seconde décisions attaquées, sont, en substance, inclus dans les premier, deuxième et troisième chefs de conclusions du recours dans l’affaire T‑612/23. En tout état de cause, ces trois chefs de conclusions ne sont que simplement confirmatifs de ceux figurant dans la requête initiale dans le cadre du présent recours.

19      Quatrièmement, il y a lieu de constater que les moyens que la République fédérale d’Allemagne invoque au soutien de la demande d’adaptation de la requête sont identiques à ceux invoqués au soutien du recours dans l’affaire T‑612/23.

20      Dans ces circonstances, il convient de constater que la demande d’adaptation de la requête, qui oppose les mêmes parties que le recours dans l’affaire T‑612/23, tend aux mêmes fins et est fondée sur les mêmes moyens que ledit recours.

21      Il s’ensuit que la demande d’adaptation de la requête, introduite postérieurement au recours dans l’affaire T‑612/23, doit être rejetée comme étant irrecevable, pour cause de litispendance.

 Sur les dépens

22      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

23      L’ACER n’ayant pas conclu sur les dépens relatifs à la procédure ouverte par la demande d’adaptation de la requête, il y a lieu de décider que chaque partie supportera ses propres dépens relatifs à ladite procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre élargie)

ordonne :

1)      La demande d’adaptation de la requête est rejetée comme étant irrecevable.

2)      La République fédérale d’Allemagne et l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie (ACER) supporteront chacune leurs propres dépens relatifs à la procédure ouvertepar la demande d’adaptation de la requête.

Fait à Luxembourg, le 14 mars 2024.

Le greffier

 

Le président

V. Di Bucci

 

F. Schalin


*      Langue de procédure : l’allemand.