Language of document : ECLI:EU:T:2007:285

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU JUGE DES RÉFÉRÉS

14 septembre 2007 (*)

« Marchés publics – Procédure d’appel d’offres communautaire –Procédure de référé – Défaut d’urgence »

Dans l’affaire T‑211/07 R,

AWWW GmbH ArbeitsWelt-Working World, établie à Göttingen (Allemagne), représentée par MB. Schreier, avocat,

partie requérante,

contre

Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (FEACVT), représentée par M. C. Callanan, solicitor,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de sursis à l’exécution de la décision de la FEACVT relative au marché n° 2007/S 13-014125 intitulé « Services d’information et d’analyse relatifs à la qualité du travail et à l’emploi, aux relations industrielles et à la restructuration à l’échelon européen », jusqu’à ce que le Tribunal ait statué sur le recours au principal,

LE JUGE DES RÉFÉRÉS,

remplaçant le président du Tribunal, conformément à l’article 106 du règlement de procédure,

rend la présente

Ordonnance

 Faits à l’origine du litige

1        En février 2006, la requérante, AWWW GmbH ArbeitsWelt-Working World, en sa qualité de chef de file d’un consortium, a conclu avec la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (FEACVT) le contrat n° 06-3030-14, portant sur le projet n° 337, intitulé « Services d’information – Union européenne ». Ce contrat concernait une prestation de services d’information d’une durée initiale de douze mois, à compter du 1er mars 2006, renouvelable chaque année, pour une durée maximale de quatre ans. Ce contrat n’a pas été renouvelé à l’expiration de sa durée initiale, les autres membres du consortium ayant indiqué qu’ils n’étaient pas disposés à poursuivre leur participation.

2        La FEACVT a, ensuite, lancé une procédure accélérée d’appel d’offres restreint pour la passation d’un marché public, portant le n° 2007/S 13‑014125 et intitulé « Services d’information et d’analyse relatifs à la qualité du travail et à l’emploi, aux relations industrielles et à la restructuration à l’échelon européen ». La justification avancée pour le choix d’une procédure accélérée était la dissolution du consortium susvisé, dirigé par la requérante. La procédure de sélection prévoyait une première phase de sélection d’un nombre restreint de candidats parmi lesquels serait choisi, lors d’une seconde phase, le candidat auquel le marché serait attribué.

3        En réponse à cet appel d’offres, publié le 19 janvier 2007 au Journal officiel de l’Union européenne (JO S 13), la requérante a déposé, le 26 janvier 2007, une proposition d’offre pour la première phase de la procédure de sélection. Après avoir été choisie pour participer à la seconde phase, la requérante a déposé une proposition d’offre pour cette phase, le 21 février 2007.

4        Par lettre du 17 avril 2007, la FEACVT a informé la requérante que son offre n’avait pas été retenue, au motif qu’elle ne présentait pas le meilleur rapport qualité-prix. Cette lettre indiquait également à la requérante qu’elle pouvait, sur demande, obtenir des informations supplémentaires sur les motifs de rejet de sa proposition et que la FEACVT s’abstiendrait, pendant une période de deux semaines à partir du 18 avril 2007, de signer le contrat avec le soumissionnaire dont l’offre avait été retenue.

5        Par lettre du 26 avril 2007, la requérante a demandé des informations supplémentaires et a, dans ce contexte, adressé à la FEACVT une série de questions concernant les critères d’attribution du marché.

6        Par lettre du 15 mai 2007, la FEACVT a répondu à la demande d’informations de la requérante.

7        Le 18 mai 2007 la requérante a adressé une nouvelle lettre à la FEACVT, à laquelle cette dernière a répondu par lettre du 31 mai 2007. Le 4 juin 2007, la requérante a adressée à la FEACVT une dernière lettre, à laquelle la FEACVT a répondu par lettre du 13 juin 2007.

 Procédure et conclusions des parties

8        Par requête enregistrée au greffe du Tribunal le 13 juin 2007, la requérante a formé, en vertu de l’article 230, quatrième alinéa, CE, un recours visant à l’annulation de la procédure d’appel d’offres susvisée.

9        Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 18 juin suivant, la requérante a introduit la présente demande en référé en vertu de l’article 104 du règlement de procédure du Tribunal et des articles 242 CE et 243 CE, dans laquelle elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, surseoir à l’exécution de la décision de la FEACVT relative à la procédure accélérée d’appel d’offres susmentionnée, jusqu’à ce que le Tribunal se prononce sur le recours au principal ;

–        à titre subsidiaire, ordonner les mesures nécessaires, aptes à prévenir l’exécution de la décision faisant l’objet du recours au principal, notamment en interdisant à la FEACVT d’attribuer le marché au soumissionnaire retenu.

10      Dans ses observations écrites déposées au greffe du Tribunal le 9 juillet 2007, la FEACVT conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, rejeter la demande comme irrecevable au motif, principalement, que l’exécution de la décision en cause a déjà eu lieu ;

–        à titre subsidiaire, rejeter la demande comme non fondée ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      En vertu des dispositions combinées des articles 242 CE et 243 CE, d’une part, et de l’article 225, paragraphe 1, CE, d’autre part, le Tribunal peut, s’il estime que les circonstances l’exigent, ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant lui ou prescrire les mesures provisoires nécessaires.

12      L’article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure dispose que les demandes de mesures provisoires doivent spécifier l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue (fumus boni juris) l’octroi des mesures provisoires auxquelles elles concluent. Ces conditions sont cumulatives, de sorte que les demandes de mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l’une d’elles fait défaut [ordonnance du président de la Cour du 14 octobre 1996, SCK et FNK/Commission, C‑268/96 P(R), Rec. p. I‑4971, point 30, et ordonnance du président du Tribunal du 2 juin 2005, Umwelt- und Ingenieurtechnik Dresden/Commission, T‑125/05 R, Rec. p. II‑1901, point 17].

13      Eu égard aux éléments du dossier, le juge des référés estime qu’il dispose de tous les éléments nécessaires pour statuer sur la présente demande de mesures provisoires, sans qu’il soit utile d’entendre, au préalable, les parties en leurs explications orales.

 Arguments des parties

14      S’agissant, en premier lieu, du fumus boni juris, la requérante invoque d’abord, l’absence de motivation de la décision qui a rejeté son offre. Seuls des extraits du rapport d’évaluation de son offre lui auraient été transmis. Ces extraits ne fourniraient aucune explication adéquate quant à l’attribution du marché à un autre soumissionnaire.

15      La lettre de la FEACVT du 15 mai 2007, serait, en outre, entachée de vices de forme, en ce qu’elle se référerait à un rapport d’évaluation annexé à celle‑ci, lequel, toutefois, n’aurait pas été signé par les responsables de l’évaluation. De surcroît, la FEACVT aurait omis d’adresser, dans cette même lettre, les questions relatives aux critères d’attribution du marché, que la requérante lui aurait posées dans sa lettre du 26 avril 2007.

16      Ensuite, la requérante conteste l’évaluation de son offre par la FEACVT quant au fond. Cette évaluation ferait apparaître une contradiction, dans la mesure où la FEACVT aurait déclaré, durant la première phase de la procédure, que l’offre de la requérante remplissait les critères de sélection qui prouveraient sa capacité à fournir les services faisant l’objet du marché, alors que, lors de la seconde phase, dans le rapport d’évaluation annexé à la lettre de la FEACVT, du 15 mai 2007, les évaluateurs émettraient des doutes quant à cette même capacité.

17      Ce même rapport démontrerait que l’expérience particulière du soumissionnaire retenu « dans la coordination de projets internationaux » aurait constitué la principale raison justifiant l’attribution du marché à ce soumissionnaire. Or, selon la requérante, l’expérience en question ne figurait pas parmi les critères d’attribution du marché énoncés dans le cahier des charges. La requérante met en exergue sa prétendue expérience dans des travaux analogues et soutient que, en revanche, le soumissionnaire retenu par la FEACVT, qui était membre du consortium précédant dirigé par la requérante (voir point 1 ci‑dessus), aurait une expérience minimale dans ce domaine et serait, par ailleurs, l’un des responsables de la dissolution dudit consortium n’ayant pas été en mesure de fournir, en termes de quantité et de qualité, les services demandés.

18      Enfin, la requérante souligne que le prix qu’elle avait proposé était moins élevé que celui offert par le soumissionnaire retenu, raison pour laquelle la requérante aurait, dans sa lettre du 18 mai 2007, demandé à la FEACVT de revenir sur sa décision et de lui attribuer le marché en question. Cette dernière demande serait restée sans réponse de la part de la FEACVT.

19      S’agissant, en second lieu, de l’urgence et de la balance des intérêts, la requérante relève qu’elle a un intérêt vital à ce que la décision de la FEACVT soit suspendue, faute de quoi elle risquerait de ne plus pouvoir faire valoir sa position juridique.

20      Selon la requérante, ses activités principales portent sur des travaux de recherche en matière de relations industrielles, de conditions de travail, de gestion des ressources humaines et de changement. Si le marché litigieux était attribué à un soumissionnaire concurrent, la requérante serait empêchée de poursuivre ses travaux pendant des années et subirait un préjudice financier important. D’une part, elle aurait loué, pour l’exécution du projet faisant l’objet du marché litigieux, des locaux, dont elle devrait désormais imputer les coûts sur ses propres ressources. D’autre part, il existerait un risque qu’elle ne puisse plus maintenir ses salariés et que, en définitive, son existence même soit menacée.

21      Dans ses observations, la FEACVT fait valoir, en premier lieu, que la demande litigieuse est irrecevable. Premièrement, la FEACVT estime que la requérante n’a pas spécifié les circonstances établissant l’urgence. En réponse aux arguments de la requérante, résumés aux points 19 et 20 ci‑dessus, la FEACVT soutient que celle-ci n’était pas en droit de présumer que le marché lui serait attribué et que, partant, elle n’aurait pas dû agir sur le fondement de cette présomption. Les conséquences négatives d’une telle prémisse erronée se seraient produites indépendamment de toute faute de la FEACVT. Au demeurant, la requérante n’aurait pas apporté la preuve de ce que sa viabilité financière dépendrait de l’obtention du marché. La valeur de l’offre soumise par la requérante était d’environ 70 000 euros et la requérante n’aurait même pas essayé de chiffrer le bénéfice qu’elle aurait tiré du contrat.

22      À supposer que la requérante ait subi un quelconque préjudice financier, il ne saurait, selon la jurisprudence, être considéré comme étant sérieux et irréparable, dès lors qu’il pourrait faire l’objet d’une compensation financière ultérieure, dans le cadre de l’affaire au principal.

23      Deuxièmement, la demande de la requérante devrait être rejetée comme étant tardive. La requérante n’aurait pas contesté la décision d’adjuger le marché à un autre soumissionnaire durant la période de deux semaines, pendant laquelle la FEACVT avait indiqué qu’elle s’abstiendrait de signer le contrat, et n’aurait introduit la demande litigieuse qu’avec un retard de deux mois, après une correspondance prolongée et inutile.

24      Troisièmement, la FEACVT relève que la présente demande vise à lui interdire de conclure un contrat avec le soumissionnaire retenu. Or, ce contrat aurait déjà été signé, le 13 juin 2007. Dès lors, les mesures provisoires demandées par la requérante ne sauraient être octroyées au présent stade et la demande litigieuse serait sans objet, le préjudice invoqué par la requérante s’étant déjà produit.

25      Sans préjudice de sa position quant à la recevabilité, la FEACVT soutient, en second lieu, que la requérante n’a pas démontré l’existence d’un fumus boni juris. À cet égard, la FEACVT fait valoir que la décision de rejeter l’offre de la requérante et d’attribuer le marché à un autre soumissionnaire est dûment motivée. Par ailleurs, la FEACVT aurait fourni à la requérante des précisions supplémentaires, tant dans sa lettre du 15 mai 2007 que dans les deux lettres ultérieures, non évoquées par la requérante, des 31 mai et 13 juin 2007. En particulier, la seconde de ces deux lettres aurait exposé en détail chaque étape de la procédure d’appel d’offres et aurait apporté une réponse adéquate aux affirmations de la requérante, qui auraient toutes été rejetées. La FEACVT précise également que sa lettre du 15 mai 2007 comportait en annexe un simple extrait du rapport d’évaluation, ce qui expliquerait l’absence de signatures évoquée par la requérante.

26      S’agissant de la contestation, quant au fond, de l’évaluation de l’offre de la requérante, la FEACVT estime que cette évaluation ne fait apparaître aucune contradiction, dès lors que la première phase de la procédure d’appel d’offres visait à évaluer la capacité de chaque soumissionnaire à fournir les services faisant l’objet du marché, alors que, lors de la seconde phase, les soumissionnaires devaient fournir des propositions spécifiques sur la manière dont ils exécuteraient le contrat. C’est par rapport à ce dernier critère que, dans le rapport d’évaluation, les évaluateurs auraient, lors de la seconde phase, émis des doutes quant à la capacité de l’équipe proposée par la requérante à fournir les services en question.

27      En outre, l’expérience du soumissionnaire retenu dans la coordination de projets internationaux aurait seulement été l’un des facteurs pris en compte dans le cadre du critère de sélection relatif à la connaissance et à l’expérience. Lors de l’évaluation des offres, la FEACVT se serait, par ailleurs, limitée à apprécier leur contenu et n’aurait pas tenu compte d’autres circonstances et, plus particulièrement, des raisons ayant conduit à la dissolution du consortium antérieur dirigé par la requérante.

28      Enfin, en réponse aux affirmations de la requérante relatives au prix, la FEACVT précise que cette question n’a pas été abordé par la requérante dans sa lettre du 18 mai 2007. En tout état de cause, le marché n’aurait pas été attribué sur la base du seul prix mais en tenant compte du rapport qualité-prix.

 Appréciation du juge des référés

 Sur la recevabilité

29      S’agissant de la recevabilité de la présente demande en référé, contestée par la FEACVT, premièrement, il convient de relever que, aux termes de l’article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure, la demande de sursis à exécution spécifie, notamment, les circonstances établissant l’urgence. En l’espèce, la requérante s’est conformée à cette exigence, en avançant l’argumentation résumée aux points 19 et 20 ci‑dessus. La question de savoir si cette argumentation est suffisante pour établir une urgence justifiant l’octroi des mesures provisoires sollicitées, relève de l’examen au fond de la demande. C’est également lors de l’examen au fond de la demande qu’il convient d’apprécier les arguments contraires avancés par la FEACVT (voir point 21 ci‑dessus).

30      Deuxièmement, il convient de relever que ni le règlement de procédure ni aucune autre disposition ne prévoit un quelconque délai pour introduire une demande en référé. Dès lors, une telle demande ne saurait être rejetée comme irrecevable, quelle que soit la date à laquelle elle a été introduite. La tardivité éventuelle de son introduction peut uniquement être prise en considération lors de son examen au fond, notamment pour apprécier si la condition relative à l’urgence est remplie.

31      Par conséquent, la présente demande ne saurait être rejetée comme irrecevable, au seul motif qu’elle n’a pas été introduite avant l’expiration de la période pendant laquelle la FEACVT avait indiqué qu’elle s’abstiendrait de conclure le contrat avec le soumissionnaire retenu (voir, en ce sens, ordonnance du président Tribunal du 31 janvier 2005, Capgemini Nederland/Commission, T‑447/04 R, Rec. p. II‑257, point 97).

32      Enfin, il y a lieu de relever qu’une demande en référé visant à interdire à la partie défenderesse une action qui a déjà eu lieu avant son introduction est, dès son dépôt, sans objet et, partant, irrecevable (voir, en ce sens, ordonnances du président du Tribunal Umwelt- und Ingenieurtechnik Dresden/Commission, précitée, point 36, et du 20 septembre 2005, Deloitte Business Advisory/Commission, T‑195/05 R, Rec. p. II‑3485, point 81).

33      En l’espèce, la FEACVT relève que, en exécution de sa décision de rejeter l’offre de la requérante et d’attribuer le marché à un autre soumissionnaire, elle a signé un contrat avec cet autre soumissionnaire, le 13 juin 2007, soit avant l’introduction de la demande litigieuse. Cette affirmation n’est pas contredite par les pièces versées au dossier mais est, au contraire, conforme aux indications fournies à la requérante par la FEACVT, selon lesquelles cette dernière s’abstiendrait de signer le contrat uniquement pendant les deux semaines suivant la date du 18 avril 2007.

34      Dès lors, la conclusion subsidiaire de la présente demande, pour autant qu’elle vise l’interdiction de l’attribution du marché au soumissionnaire retenu, était, dès le dépôt de la demande, sans objet et elle est, partant, irrecevable.

35      En revanche, la conclusion principale de la requérante, ainsi que le reste des demandes de sa conclusion subsidiaire, sont recevables. En effet, l’exécution de la décision rejetant l’offre de la requérante et attribuant le marché à un autre soumissionnaire ne s’achève pas avec la signature du contrat en cause, l’exécution dudit contrat constituant également une mesure d’application de la décision en question. C’est ainsi que le juge des référés peut, à la suite d’une demande en référé introduite même postérieurement à la signature du contrat attribuant le marché, ordonner la suspension de l’exécution dudit contrat (ordonnance Capgemini Nederland/Commission, précitée, points 15 et 97).

36      Il ressort de tout ce qui précède que la présente demande est recevable, à l’exception de la conclusion subsidiaire de la requérante, pour autant que celle‑ci vise l’interdiction de l’attribution du marché, qui a déjà eu lieu.

 Sur le fond

37      Dans le cadre de l’examen d’ensemble des conditions d’octroi du sursis à exécution et des autres mesures provisoires, le juge des référés dispose d’un large pouvoir d’appréciation et reste libre de déterminer, au regard des particularités de l’espèce, la manière dont ces différentes conditions doivent être vérifiées ainsi que l’ordre de cet examen, dès lors qu’aucune règle de droit communautaire ne lui impose un schéma d’analyse préétabli pour apprécier la nécessité de statuer provisoirement [ordonnance du président de la Cour du 19 juillet 1995, Commission/Atlantic Container Line e.a., C‑149/95 P(R), Rec. p. I‑2165, point 23].

38      En l’espèce, il convient d’examiner, d’abord, si la condition relative à l’urgence est remplie.

39      La requérante soutient que tel est le cas, dès lors que le fait de ne pas lui attribuer le marché concerné lui cause un préjudice financier d’une étendue telle qu’il met en danger son existence.

40      À cet égard, il y a lieu de relever qu’une procédure d’appel d’offres pour l’attribution d’un marché a pour objet de permettre à l’autorité concernée de choisir, parmi plusieurs offres concurrentes, celle qui lui paraît le plus conforme aux critères de sélection prédéterminés. L’autorité communautaire qui institue une telle procédure dispose, par ailleurs, d’un large pouvoir d’appréciation quant aux éléments à prendre en considération en vue de la prise de la décision de passer le marché (arrêts du Tribunal du 24 février 2000, ADT Projekt/Commission, T‑145/98, Rec. p. II‑387, point 147 ; du 26 février 2002, Esedra/Commission, T‑169/00, Rec. p. II‑609, point 95, et du 14 février 2006, TEA-CEGOS e.a./Commission, T‑376/05 et T‑383/05, Rec. p. II‑205, point 50).

41      Une entreprise qui participe à une telle procédure n’a, dès lors, jamais la garantie absolue que le marché lui sera adjugé, mais doit toujours tenir compte de l’éventualité de son attribution à un autre soumissionnaire. Dans ces conditions, les conséquences financières négatives pour l’entreprise en question, qui découleraient du rejet de son offre, ne sauraient, en elles‑mêmes, justifier une quelconque urgence, mais font partie du risque commercial habituel, auquel chaque entreprise active sur le marché doit faire face.

42      De surcroît, en l’espèce, la requérante semble avoir elle-même amplifié les conséquences négatives d’un éventuel rejet de son offre, puisque, selon ses propres affirmations, elle s’est empressée de louer des locaux pour l’exécution du projet faisant l’objet du marché, avant même que celui‑ci soit adjugé.

43      Il ressort des considérations qui précèdent que le seul fait que l’offre de la requérante pour le marché en cause n’a pas été retenue ne constitue pas une urgence justifiant l’octroi de mesures provisoires.

44      En tout état de cause, il y a lieu de relever également que le sursis à exécution et les mesures provisoires ne peuvent être accordés par le juge des référés que s’il est notamment établi qu’ils sont urgents en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts du requérant, qu’ils soient édictés et sortent leurs effets dès avant la décision au principal (ordonnance du président de la Cour du 21 mars 1997, Pays-Bas/Conseil, C‑110/97 R, Rec. p. I‑1795, point 24).

45      Or, des mesures provisoires qui ne seraient pas aptes à éviter le préjudice grave et irréparable dont fait état le requérant ne sauraient a fortiori être nécessaires à cet effet. En l’absence d’intérêt du requérant à l’obtention des mesures provisoires sollicitées, ces dernières ne sauraient donc satisfaire au critère de l’urgence [ordonnance du président de la Cour du 30 avril 1997, Moccia Irme/Commission, C‑89/97 P(R), Rec. p. I‑2327, point 44].

46      Tel est précisément le cas en l’espèce. En effet, le préjudice invoqué par la requérante découlerait du fait que le marché en cause ne lui a pas été adjugé. Or, le sursis à l’exécution de la décision de la FEACVT relative à l’attribution dudit marché et les éventuelles autres mesures propres à prévenir l’exécution de cette décision, n’auraient nullement pour effet d’adjuger à la requérante, même provisoirement, le marché litigieux. Par conséquent, même si ces mesures provisoires étaient ordonnées, le préjudice allégué par la requérante ne serait pas évité.

47      Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que la condition relative à l’urgence n’est pas remplie en l’espèce et que, partant, la présente demande doit être rejetée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si les autres conditions d’octroi de mesures provisoires sont remplies.

Par ces motifs,

LE JUGE DES RÉFÉRÉS

ordonne :

1)      La demande en référé est rejetée.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 14 septembre 2007.

Le greffier

 

      Le juge

E. Coulon

 

      M. Vilaras


* Langue de procédure : l’anglais.