Language of document : ECLI:EU:T:2013:384

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (sixième chambre)

16 juillet 2013 (1)

« Recours en indemnité – Incompétence manifeste – Recours en carence – Absence d’engagement d’une procédure en manquement – Irrecevabilité manifeste »

Dans l’affaire T-247/13,

Boryana Stefanova Yosifova, demeurant à Zlati Voyvoda (Bulgarie), représentée par Me Lyubka Mladenova Tsenova, avocat,

partie requérante,

contre

République de Bulgarie,

et

Commission européenne,

parties défenderesses,

ayant pour objet un recours visant, d’une part, à obtenir la réparation du préjudice que la partie requérante aurait prétendument subi en conséquence d’une absence de question préjudicielle posée à la Cour de justice par les juridictions bulgares relativement à l’interprétation de certaines dispositions du droit fiscal bulgare, ainsi que la constatation de la violation par ces juridictions de l’obligation qui leur incombe à cet égard et, d’autre part, à faire constater que la Commission s’est illégalement abstenue d’engager une procédure au titre de l’article 258 TFUE visant à faire constater que la République de Bulgarie a violé le droit de l’Union et les droits fondamentaux,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. H. Kanninen (rapporteur), président, G. Berardis et C. Wetter, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Procédure et conclusions de la partie requérante

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 3 mai 2013, la partie requérante a introduit le présent recours.

2        Elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater par arrêt que le droit à un procès équitable de la partie requérante a été violé et condamner la République de Bulgarie au paiement d’une satisfaction équitable pour le préjudice patrimonial et moral qu’elle a subi ;

–        constater que la Commission s’est illégalement abstenue d’engager la procédure prévue à l’article 258 TFUE à l’encontre de la République de Bulgarie ;

–        accorder à la partie requérante les dépens exposés au cours de l’instance.

 En droit

3        Aux termes de l’article 111 du règlement de procédure, lorsque le Tribunal est manifestement incompétent pour connaître d’un recours, il peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

4        En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

5        Dans la présente affaire, par sa demande, la partie requérante tend à obtenir réparation du préjudice prétendument occasionné par l’absence de renvoi préjudiciel à la Cour de justice.

6        La compétence du Tribunal en matière de responsabilité non contractuelle est prévue par l’article 268 TFUE et l’article 340, deuxième et troisième alinéas, TFUE ainsi que par l’article 188, deuxième alinéa, EA. Conformément à ces dispositions, le Tribunal est uniquement compétent pour connaître des recours en réparation de dommages causés par les institutions, les organes et les organismes de l’Union ou par leurs agents dans l’exercice de leurs fonctions (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 23 mars 2004, Médiateur/Lamberts, C‑234/02 P, Rec. p. I‑2803, points 49 et 59).

7        En l’espèce, il apparaît que l’auteur du comportement reproché qui a prétendument causé un préjudice à la partie requérante n’est ni une institution, ni un organe ou un organisme de l’Union.

8        La partie requérante demande également que le Tribunal constate par un arrêt que son droit à un procès équitable a été violé. À cet égard, il convient de rappeler que le contentieux de l’Union ne connaît pas de voie de droit permettant au juge de prendre position, par le biais d’une déclaration générale, sur une question dont l’objet dépasse le cadre du litige (ordonnance du Tribunal du 7 juin 2004, Segi e.a./Conseil, T‑338/02, Rec. p. II‑1647, point 48) et que, compte tenu de ses compétences d’attribution, le Tribunal n’est compétent ni pour apprécier le comportement d’une juridiction nationale (voir, en ce sens, ordonnance du 14 juin 2007, Di Pasquale/Italie, T-77/07, non publiée au Recueil), ni pour constater, le cas échéant, une violation de l’article 234, troisième alinéa, CE (devenu article 267, troisième alinéa, TFUE) par celle-ci (ordonnances du Tribunal du 19 mai 2009, Delice/Erlangen et Commission, T-528/08, non publiée au Recueil, et du 12 août 2009, Molter/Allemagne, T-141/09, non publiée au Recueil, point 14).

9        Par ailleurs, la partie requérante tend à obtenir du Tribunal qu’il constate la carence de la Commission en ce qu’elle s’est abstenue d’engager la procédure prévue à l’article 258 TFUE à l’encontre de la République de Bulgarie.

10      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, est irrecevable le recours en carence intenté par une personne physique ou morale et visant à faire constater que, en n’engageant pas contre un État membre une procédure en constatation de manquement, la Commission s’est abstenue de statuer en violation du traité (arrêt de la Cour du 14 février 1989, Star Fruit/Commission, 247/87, Rec. p. 291, et ordonnance du Tribunal du 12 novembre 1996, SDDDA/Commission, T‑47/96, Rec. p. II-1559, point 41). En effet, les personnes physiques ou morales ne peuvent se prévaloir de l’article 265, troisième alinéa, TFUE qu’en vue de faire constater qu’une institution, un organe ou un organisme de l’Union s’est abstenu d’adopter, en violation du traité, des actes, autres que des recommandations ou des avis, dont elles sont les destinataires potentiels ou qui les concerneraient soit de manière directe, soit, selon le cas, de manière directe et individuelle (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 26 novembre 1996, T. Port, C‑68/95, Rec. p. I‑6065, points 58 et 59).

11      Or, dans le cadre de la procédure en constatation de manquement régie par l’article 258 TFUE, les seuls actes que la Commission peut être amenée à prendre sont adressés aux États membres (ordonnances du Tribunal du 29 novembre 1994, Bernardi/Commission, T‑479/93 et T‑559/93, Rec. p. II‑1115, point 31, et du 19 février 1997, Intertronic/Commission, T‑117/96, Rec. p. II‑141, point 32). En outre, il résulte du système prévu par l’article 258 TFUE que ni l’avis motivé, qui ne constitue qu’une phase préalable au dépôt éventuel d’un recours en constatation de manquement devant la Cour, ni la saisine de la Cour par le dépôt effectif d’un tel recours ne sauraient constituer des actes concernant de manière directe les personnes physiques ou morales.

12      Il résulte des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de rejeter le présent recours pour cause d’incompétence manifeste et d’irrecevabilité manifeste, sans qu’il soit nécessaire de le signifier aux parties défenderesses.

 Sur les dépens

13      La présente ordonnance étant adoptée avant la notification de la requête aux parties défenderesses et avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il suffit de décider que la partie requérante supportera ses propres dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La partie requérante supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 16 juillet 2013.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       H. Kanninen


1 Langue de procédure : le bulgare.