Language of document : ECLI:EU:T:2015:490

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

 15 juillet 2015 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative bambinoLÜK – Marque communautaire figurative antérieure BAMBINO – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑333/13,

Westermann Lernspielverlag GmbH, établie à Braunschweig (Allemagne), représentée par Mes A. Nordemann et M. Maier, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. J. Crespo Carrillo, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Diset, SA, établie à Barcelone (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 3 avril 2013 (affaire R 1323/2012-2), relative à une procédure d’opposition entre Diset, SA et Westermann Lernspielverlag GmbH,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro, président, MM. S. Gervasoni et L. Madise (rapporteur), juges,

greffier : M. I. Dragan, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 17 juin 2013,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 13 août 2013,

vu les décisions du 10 décembre 2014 et du 3 mars 2015 rejetant les demandes de suspension de la procédure introduites par la requérante,

à la suite de l’audience du 7 janvier 2015,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 5 mai 2010, la requérante, Westermann Lernspielverlag GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9, 16 et 28 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Supports d’images, de sons, d’images sonores et de données en tout genre (compris dans la classe 9), en particulier vidéocassettes, disques phonographiques, cassettes musicales, CD, vidéodisques, DVD, CD-ROM, CDI, disquettes, en particulier en tant que produits de l’édition électroniques et destinés à l’instruction et à l’enseignement ainsi que jeux vidéo et jeux d’ordinateurs conçus pour être utilisés seulement avec un récepteur de télévision, en particulier à des fins d’instruction et d’enseignement ; logiciels, en particulier destinés à l’instruction et à l’enseignement ; équipements pour le traitement de l’information, ordinateurs et autre matériel informatique ainsi que leurs pièces et accessoires (compris dans la classe 9), tous les produits n’étant pas en rapport avec des véhicules ou pièces de véhicules en tout genre » ;

–        classe 16 : « Produits de l’imprimerie et de l’édition en tout genre (compris dans la classe 16), notamment livres, livrets, classeurs, revues, journaux, calendriers, posters, feuilles, transparents, films, images, fiches, cartes géographiques et cartes murales, en particulier destinés à l’instruction et l’enseignement ; matériel d’instruction et d’enseignement (à l’exception des appareils), en particulier sous forme de produits de l’imprimerie, jeux, globes, tableaux noirs et appareils pour dessiner sur les tableaux noirs ; photographies (tirages et originaux) ; affiches ; papeterie et instruments à écrire, en particulier porte-plumes à réservoir, stylos à bille, crayons et pastels ; articles de bureau (excepté les meubles), en particulier cachets, tampons encreurs, encre pour cachets, ouvre-lettres, coupe-papier, corbeilles à courrier, classeurs de documents, sous-mains, perforatrices, agrafeuses, cahiers, agrafes et trombones ; décalcomanies, images à gratter, autocollants en papier et en matières plastiques » ;

–        classe 28 : « Jeux, en particulier jeux de table, jeux de dominos, jeux de société, jeux de carte, jeux pédagogiques et jeux de stratégie, sous forme traditionnelle et également électronique (excepté comme appareils périphériques pour téléviseurs) ; jouets et jouets ; jeux vidéo et informatiques électroniques, autres que ceux conçus pour être utilisés avec récepteur de télévision, en particulier destinés à l’instruction et à l’enseignement ». 

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 2010/122, du 6 juillet 2010.

5        Le 14 septembre 2010, Diset, SA a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement de la marque demandée, pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée, notamment, sur la marque communautaire figurative antérieure, enregistrée le 6 juillet 2004 sous le numéro 3915121 pour des produits et services relevant des classes 16, 28 et 41, représentée ci-après :

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7        Les produits et les services couverts par la marque antérieure relevaient des classes 16, 28 et 41 et correspondaient, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 16 : « Publications, magazines, livres et contes pour enfants » ;

–        classe 28 : « Blocs de construction et jeux et jouets éducatifs pour les tout-petits, à l’exception des poupées et figurines » ;

–        classe 41 : « Services d’éducation ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ».

8        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

9        Le 25 mai 2012, la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition. Elle a estimé qu’il existait un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 entre les signes en conflit, sauf en ce qui concernait les produits relevant de la classe 16, visés par la demande de marque communautaire, correspondant à la description suivante : « Papeterie et instruments à écrire, en particulier porte-plumes à réservoir, stylos à bille, crayons et pastels ; articles de bureau (excepté les meubles), en particulier cachets, tampons encreurs, encre pour cachets, ouvre-lettres, coupe-papier, corbeilles à courrier, classeurs de documents, sous-mains, perforatrices, agrafeuses, cahiers, agrafes et trombones ; décalcomanies, images à gratter, autocollants en papier et en matières plastiques ».

10      Le 18 juillet 2012, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 3 avril 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a accueilli partiellement le recours, en autorisant l’enregistrement de la marque demandée pour les « logiciels, en particulier destinés à l’instruction et à l’enseignement (tous les produits n’étant pas en rapport avec des véhicules ou pièces de véhicules en tout genre) » ainsi que les « équipements pour le traitement de l’information, ordinateurs et autre matériel informatique ainsi que leurs pièces et accessoires (compris dans la classe 9) (tous les produits n’étant pas en rapport avec des véhicules ou pièces de véhicules en tout genre) », tous relevant de la classe 9, et a rejeté le recours pour les autres produits relevant des classes 9, 16 et 28. Après avoir considéré que les consommateurs concernés comprenaient les membres du grand public de l’Union européenne (point 16 de la décision attaquée) et que les produits refusés à l’enregistrement et ceux visés par la marque antérieure étaient, en substance, identiques ou similaires (point 28 de la décision attaquée), la chambre de recours a estimé que l’élément verbal commun aux signes en conflit, « bambino », ne pouvait être considéré comme ayant un caractère non distinctif, dans la mesure où, pour une proportion significative des consommateurs du Royaume-Uni et d’Irlande, entre autres États membres, le terme n’avait aucune connotation descriptive précise (point 31 de la décision attaquée). S’agissant de la similitude des signes, la chambre de recours a relevé que, sur le plan visuel, les signes en conflit coïncidaient par l’élément verbal « bambino » (point 32 de la décision attaquée) et que cette similitude se retrouvait sur le plan phonétique, les trois premières syllabes de la marque demandée et les trois syllabes de la marque antérieure étant identiques (point 33 de la décision attaquée). La chambre de recours a enfin relevé que, sur le plan conceptuel, pour une partie importante du public non italophone pertinent, aucune des marques n’avait de signification (point 34 de la décision attaquée). Elle a donc conclu à l’existence d’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b) du règlement n° 207/2009, confirmant en cela la décision de la division d’opposition concernant les produits relevant de la classe 9, à savoir les « supports d’images, de sons, d’images sonores et de données en tout genre (compris dans la classe 9), en particulier vidéocassettes, disques phonographiques, cassettes musicales, CD, vidéodisques, DVD, CD-ROM, CDI, disquettes, en particulier en tant que produits de l’édition électroniques ; jeux vidéo et jeux d’ordinateurs conçus pour être utilisés seulement avec un récepteur de télévision, en particulier à des fins d’instruction et d’enseignement, ainsi que leurs pièces et accessoires (compris dans la classe 9), tous les produits n’étant pas en rapport avec des véhicules ou pièces de véhicules en tout genre », de la classe 16, à savoir les « produits de l’imprimerie et de l’édition en tout genre (compris dans la classe 16), notamment livres, livrets, classeurs, revues, journaux, calendriers, posters, feuilles, transparents, films, images, fiches, cartes géographiques et cartes murales, en particulier destinés à l’instruction et l’enseignement ; matériel d’instruction et d’enseignement (à l’exception des appareils), en particulier sous forme de produits de l’imprimerie, jeux, globes, tableaux noirs et appareils pour dessiner sur les tableaux noirs ; photographies (tirages et originaux) ; affiches », et de la classe 28, à savoir les « jeux, en particulier jeux de table, jeux de dominos, jeux de société, jeux de carte, jeux pédagogiques et jeux de stratégie, sous forme traditionnelle et également électronique (excepté comme appareils périphériques pour téléviseurs) ; jouets et jouets ; jeux vidéo et informatiques électroniques, autres que ceux conçus pour être utilisés avec récepteur de télévision, en particulier destinés à l’instruction et à l’enseignement ».

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

13      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

14      La requérante soulève un moyen unique pris de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Au soutien de ce moyen la requérante fait valoir, tout d’abord, l’absence de caractère distinctif de l’élément verbal « bambino » de la marque antérieure, ensuite, l’absence de similitude des signes en conflit et, par conséquent, l’absence de risque de confusion entre lesdits signes.

15      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), i), dudit règlement, il convient d’entendre par marques antérieures les marques communautaires dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

16      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

17      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, il existe un risque de confusion lorsque, cumulativement, le degré de similitude des marques en cause et le degré de similitude des produits ou des services désignés par ces marques sont suffisamment élevés [voir arrêt du 20 janvier 2010, Nokia/OHMI – Medion (LIFE BLOG), T‑460/07, Rec, EU:T:2010:18, point 59 et jurisprudence citée]. Toutefois, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C‑234/06 P, Rec, EU:C:2007:514, point 48, et du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHM – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec, EU:T:2002:261, point 25].

18      C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’examiner l’appréciation par la chambre de recours du risque de confusion entre les signes en conflit.

19      À titre liminaire, il y a lieu d’entériner les constatations de la chambre de recours, par ailleurs non contestées par la requérante, selon lesquelles les produits couverts par les signes en conflit à l’égard desquels l’enregistrement a été refusé, sont identiques ou similaires.

 Sur la similitude des signes

 Sur la similitude visuelle

20      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a relevé au point 32 que, sur le plan visuel, les signes en conflit coïncidaient par le mot « bambino », qui constituait clairement la partie dominante et distinctive des deux signes. La chambre de recours a reconnu que certaines différences existaient entre les signes en conflit en raison de leurs éléments figuratifs et verbaux, à savoir la représentation figurative d’un enfant stylisé dans la marque antérieure et l’élément verbal « lük » dans la marque demandée. Toutefois, elle a jugé que ces différences ne pouvaient compenser la similitude entre les signes tenant à leur élément verbal identique « bambino ».

21      La requérante conteste cette analyse. Elle allègue que les consommateurs prêteront une attention plus grande à l’élément figuratif, qui représente un enfant stylisé, dans la marque antérieure et à l’élément « lük » de la marque demandée. Or, ces deux éléments n’auraient rien en commun, de sorte que leurs différences l’emporteraient sur la similitude visuelle des signes en conflit qui tient à l’élément commun et descriptif « bambino ».

22      Toutefois, il convient de relever que, d’une part, le mot « bambino », qui constitue l’élément dominant de la marque antérieure, est présent dans la marque demandée et que, d’autre part, sept lettres sur les dix que compte la marque demandée se retrouvent dans la marque antérieure et les trois syllabes que compte la marque antérieure sont identiques à trois des quatre syllabes que compte la marque demandée, composant le terme « bambino ».

23      Il s’ensuit qu’il existe nécessairement une similitude visuelle entre les marques en conflit, les consommateurs ne pouvant ignorer cet élément prédominant.

24      Les signes en conflit ne diffèrent que dans la mesure où la marque antérieure possède un élément figuratif sous la forme d’un enfant stylisé, alors que la marque demandée possède un élément verbal stylisé autonome, « lük », placé à la suite du terme « bambino ».

25      Toutefois, d’une part, comme l’a jugé la chambre de recours, la présence d’un élément figuratif distinct n’empêche pas nécessairement l’existence d’une similitude visuelle entre les signes en conflit. À cet égard, la jurisprudence a confirmé à plusieurs reprises que, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [voir arrêt du 22 mai 2008, NewSoft Technology/OHMI – Soft (Presto! Bizcard Reader), T‑205/06, EU:T:2008:163, point 54 et jurisprudence citée ; arrêts du 31 janvier 2012, Cervecería Modelo/OHMI – Plataforma Continental (LA VICTORIA DE MEXICO), T‑205/10, EU:T:2012:36, point 38, et du 18 septembre 2012, Scandic Distilleries/OHMI – Bürgerbräu, Röhm & Söhne (BÜRGER), T‑460/11, EU:T:2012:432, point 35].

26      D’autre part, l’élément « lük » est situé à la fin de la marque demandée. Or, il est de jurisprudence constante que les consommateurs retiennent généralement davantage le début d’un signe que sa fin [arrêts du 16 mars 2005, L’Oréal/OHMI – Revlon (FLEXI AIR), T‑112/03, Rec, EU:T:2005:102, points 64 et 65, et du 7 septembre 2006, Meric/OHMI – Arbora & Ausonia (PAM-PIM’S BABY-PROP), T‑133/05, Rec, EU:T:2006:247, point 51].

27      Par conséquent, à l’instar de ce qu’a observé la chambre de recours dans la décision attaquée, les éléments additionnels susmentionnés ne sont pas de nature à compenser la similitude visuelle entre les marques tirée de leur élément commun « bambino ».

28      Compte tenu de ce qui précède, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré qu’il existait une similitude visuelle entre les signes en conflit.

 Sur la similitude phonétique

29      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré au point 33 que les signes en conflit coïncidaient, du fait que les trois premières syllabes de la marque demandée, qui en comporte quatre, et les trois syllabes composant la marque antérieure étaient identiques, et ne différaient que par la présence de l’élément « lük » dans la marque demandée. La chambre de recours a toutefois observé, à cet égard, que les consommateurs retenaient généralement davantage le début d’un signe que sa fin et qu’il ne pouvait être exclu que l’élément « lük » ne soit pas effectivement prononcé.

30      La requérante fait valoir qu’il n’y a aucune raison de penser que l’élément dominant, « lük », de la marque demandée ne puisse pas être prononcé. Il serait fort probable que le consommateur prononce ce terme, car il connaîtrait la gamme de jeux éducatifs commercialisés par la requérante sous sa marque principale LÜK. Compte tenu du caractère descriptif de l’élément « bambino » et du fait que le consommateur prononcerait clairement l’élément « lük » de la marque demandée, les signes en conflit seraient également différents sur le plan phonétique.

31      Toutefois, comme cela a été indiqué au point 26 ci-dessus, le consommateur prête généralement une plus grande attention au début d’un signe qu’à sa fin (voir, par analogie, arrêts FLEXI AIR, point 26 supra, EU:T:2005:102, points 70 et 71, et PAM-PIM’S BABY-PROP, point 26 supra, EU:T:2006:247, points 51 et 61). Or, l’élément « bambino » est placé au début de la marque demandée et constitue l’élément verbal unique et dominant de la marque antérieure. Il retiendra donc davantage l’attention du public pertinent que les autres éléments des signes en conflit, d’autant qu’il représente la totalité des lettres de la marque antérieure et sept lettres sur dix de la marque demandée, qui seront prononcées dans le même ordre.

32      Compte tenu de ce qui précède, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré qu’il existait une similitude phonétique entre les signes en conflit.

 Sur la similitude conceptuelle

33      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a relevé, au point 34, que pour une partie importante du public non italophone pertinent, aucune des marques n’avait de signification.

34      La requérante avance que le terme « bambino » dans les deux signes renvoyant aux bébés ou aux jeunes enfants et les produits visés par les signes en conflit étant également destinés aux bébés ou aux jeunes enfants, le consommateur moyen tiendrait compte des autres éléments des signes, à savoir, d’une part de l’élément figuratif qui représente un enfant stylisé dans la marque antérieure et, d’autre part, de l’élément « lük » dans la marque demandée. Or, ces deux éléments relèveraient de concepts tout à fait différents. Dès lors, ces différences conceptuelles, ajoutées au caractère descriptif du terme « bambino » dans les deux signes, suffiraient à les distinguer.

35      Il résulte de la jurisprudence que l’appréciation globale du risque de confusion implique que les différences conceptuelles entre deux signes peuvent neutraliser des similitudes phonétiques et visuelles entre eux, pour autant qu’au moins l’un de ces signes ait, dans la perspective du public pertinent, une signification claire et déterminée, de sorte que ce public est susceptible de la saisir directement (arrêts du 12 janvier 2006, Ruiz-Picasso e.a./OHMI, C‑361/04 P, Rec, EU:C:2006:25, point 20, et du 23 mars 2006, Mülhens/OHMI, C‑206/04 P, Rec, EU:C:2006:194, point 35).

36      Or, d’une part, la requérante n’établit pas dans sa requête quel concept véhiculerait l’élément « lük » pour le grand public de l’Union qui soit « tout à fait différent », comme elle le prétend, de celui véhiculé par la marque antérieure.

37      D’autre part, en tout état de cause, à supposer que le terme « bambino » soit descriptif sur une grande partie du territoire pertinent comme le soutient la requérante, il conviendrait d’en déduire que les signes en conflit renverraient tous deux à un concept identique, à savoir celui de l’enfance, ce qui serait de nature à augmenter le risque de confusion plutôt qu’à le réduire.

38      Au total, c’est à bon droit que l’OHMI a jugé, au point 35 de la décision attaquée, que les signes en conflit étaient globalement similaires.

39      Cette conclusion ne saurait être infirmée par le caractère distinctif prétendument faible de l’élément « bambino » de la marque antérieure.

40      En effet, même à supposer que le terme « bambino » revête un caractère distinctif faible, il convient de considérer qu’un éventuel caractère distinctif faible d’un élément d’une marque complexe n’implique pas nécessairement que celui-ci ne saurait constituer un élément dominant, dès lors que, en raison, notamment, de sa position dans le signe ou de sa dimension, il est susceptible de s’imposer à la perception du consommateur et d’être gardé en mémoire par celui-ci [voir arrêt du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, Rec, EU:T:2007:387, point 54 et jurisprudence citée]. Or, tel est bien le cas en l’espèce, l’élément « bambino » occupant une position dominante dans les deux signes en raison de son positionnement et de sa dimension.

 Sur le risque de confusion

41      La chambre de recours a considéré, au point 37 de la décision attaquée, que les signes en conflit étaient similaires en raison de la présence de l’élément dominant « bambino » dans chacun desdits signes. La chambre de recours en a conclu qu’une partie importante du public pertinent, lorsqu’elle verra la marque demandée apposée sur des produits identiques ou hautement semblables à ceux désignés par la marque antérieure, pensera que les produits procèdent de la même origine commerciale, pour en déduire l’existence d’un risque de confusion.

42      Premièrement, la requérante avance que le terme « bambino » de la marque antérieure, qui signifie « bébé » ou « jeune enfant », est descriptif par rapport aux produits visés par la demande d’enregistrement, dans la mesure où il serait connu des consommateurs au Royaume-Uni et qu’il serait largement utilisé dans toute l’Union pour désigner des jouets et autres produits ou services conçus pour les bébés et jeunes enfants. Deuxièmement, la requérante ajoute que le caractère descriptif de l’élément « bambino » dans la marque antérieure est renforcé par l’élément figuratif, représentant un enfant stylisé, qui l’accompagne. Troisièmement, elle précise que le retrait en 2004, par l’opposante, de la demande de marque communautaire, enregistrée sous le numéro 3913563, présentée pour le terme « bambino », témoigne des réserves émises par l’OHMI quant à l’aptitude intrinsèque de la marque à être enregistrée en raison de son caractère descriptif. Quatrièmement, la requérante en déduit que, en comparant les signes en conflit sur leur impression d’ensemble, en raison de l’élément figuratif qui représente un enfant stylisé dans la marque antérieure et de l’élément « lük » dans la marque demandée, le consommateur moyen serait en mesure de faire clairement la distinction entre lesdits signes, même s’ils sont utilisés pour des produits identiques ou très similaires.

43      En ce qui concerne le risque de confusion, il convient de rappeler qu’aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, il existe un risque de confusion lorsque, cumulativement, le degré de similitude des marques en cause et le degré de similitude des produits ou des services désignés par ces marques sont suffisamment élevés (arrêt LIFE BLOG, point 17 supra, EU:T:2010:18, point 59).

44      Par ailleurs, lorsque, dans une procédure d’opposition formée à l’encontre de l’enregistrement d’une marque communautaire en vertu des articles 42 et suivants du règlement n° 207/2009, la marque antérieure est une marque communautaire, le territoire sur lequel la marque antérieure est protégée est celui de l’Union. Cependant, il résulte du caractère unitaire de la marque communautaire, consacré à l’article 1er, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, qu’une marque communautaire antérieure est protégée de façon identique dans tous les États membres. Les marques communautaires antérieures sont, dès lors, opposables à toute demande de marque ultérieure qui porterait atteinte à leur protection, ne fût-ce que par rapport à la perception des consommateurs d’une partie du territoire de l’Union. Il s’ensuit que le principe consacré à l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, selon lequel il suffit, pour refuser l’enregistrement d’une marque, qu’un motif absolu de refus n’existe que dans une partie de l’Union, s’applique, par analogie, également au cas d’un motif de refus relatif au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 [arrêts du 3 mars 2004, Mülhens/OHMI – Zirh International (ZIRH), T‑355/02, Rec, EU:T:2004:62, points 35 et 36, et du 1er mars 2005, Fusco/OHMI – Fusco International (ENZO FUSCO), T‑185/03, Rec, EU:T:2005:73, point 33].

45      En l’espèce, il ressort des développements qui précèdent que, d’une part, les signes en conflit sont globalement similaires (voir point 38 ci-dessus) et que, d’autre part, les produits visés par lesdits signes sont identiques ou similaires (voir point 19 ci-dessus).

46      Il s’ensuit que, considérés de façon cumulative, le degré de similitude des signes en conflit et le degré de similitude des produits désignés par ceux-ci sont suffisamment élevés pour établir un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

47      Partant, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré qu’il existait un risque de confusion entre les signes en conflit.

48      Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argument de la requérante selon lequel le terme « bambino » serait descriptif sur le territoire pertinent pour les produits en cause et, partant, l’enfant stylisé reproduit sur la marque antérieure, d’une part, et le terme « lük » de la marque demandée, d’autre part, permettraient d’éviter tout risque de confusion entre les signes en conflit.

49      En effet, premièrement, il convient de constater que, pour autant que la requérante soutient que le caractère descriptif de l’élément « bambino » de la marque antérieure est renforcé par l’élément figuratif, représentant un enfant stylisé, qui l’accompagne (voir point 42 ci-dessus), elle remet en cause ne serait-ce qu’indirectement le caractère distinctif de la marque antérieure.

50      À cet égard, d’une part, le fait qu’une marque ait été enregistrée implique qu’elle jouisse d’un minimum de caractère distinctif intrinsèque, puisque l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 exclut l’enregistrement d’une marque qui est dépourvue de caractère distinctif. Or, la contestation de ce minimum de caractère distinctif de la marque antérieure ne peut faire l’objet d’une action en opposition, sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. En effet, ainsi qu’il ressort des articles 41 et 42 du règlement n° 207/2009, il n’y a pas lieu d’examiner les motifs absolus de refus visés à l’article 7 du même règlement dans le cadre d’une procédure d’opposition [arrêt du 16 janvier 2014, Ferienhäuser zum See/OHMI – Sunparks Groep (Sun Park Holidays), T‑383/12, EU:T:2014:12, point 47].

51      D’autre part, il convient de relever que, même si le caractère distinctif de la marque antérieure est faible, cela n’empêche pas de constater l’existence d’un risque de confusion. En effet, si le caractère distinctif de la marque antérieure doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion, il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés [voir arrêt du 11 décembre 2014, Formula One Licensing/OHMI – ESPN Sports Media (F1-LIVE), T‑10/09 RENV, Rec, EU:T:2014:1061, point 49 et jurisprudence citée].

52      Or, tel est bien le cas en l’espèce (voir point 45 ci-dessus).

53      Compte tenu de ce qui précède, l’argument selon lequel l’opposante aurait retiré une demande de marque pour le terme « bambino » en 2004, en raison de l’absence de caractère distinctif dudit terme, est sans incidence, d’autant plus qu’il y a lieu de constater, comme l’observe l’OHMI, que la demande de marque communautaire a été retirée le jour même où elle a été présentée, à savoir le 5 juillet 2004. L’OHMI n’a donc pas pu prendre position sur le caractère distinctif de la marque verbale concernée.

54      Pour les mêmes raisons, doit être considéré comme sans pertinence l’argument de la requérante selon lequel le rejet de son recours entraînerait une monopolisation du terme « bambino » pour les produits en cause, à rebours des objectifs de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. À cet égard, il y a lieu de rappeler que la constatation par le Tribunal de l’existence d’un risque de confusion aboutit uniquement à la protection d’une certaine combinaison d’éléments sans toutefois protéger en tant que tel un élément descriptif faisant partie de cette combinaison (voir ordonnance du 30 janvier 2014, Industrias Alen/The Clorox Company, C‑422/12 P, Rec, EU:C:2014:57, point 45 et jurisprudence citée).

55      Deuxièmement, même à supposer que le prétendu caractère descriptif du terme « bambino » soit de nature à neutraliser le risque de confusion résultant de la similitude des signes et des produits concernés, ce qui n’est pas établi, force serait de constater que la requérante ne fournit aucun élément de preuve tendant à établir que le grand public de l’Union, dans son ensemble, perçoive ledit terme comme descriptif, alors que sa connaissance par le grand public de l’Union ne peut être présumée [voir, par analogie, arrêt du 24 mai 2011, Space Beach Club/OHMI – Flores Gómez (SpS space of sound), T‑144/10, EU:T:2011:243, point 63 et jurisprudence citée].

56      En effet, comme l’indique l’OHMI, il est constant que le terme « bambino » ne revêt aucune signification pour le grand public, dans une partie de l’Union, à savoir, notamment, les pays d’Europe centrale et orientale, la Scandinavie ou même certains pays d’Europe du Sud comme la Grèce.

57      Il ne peut également être établi que le terme « bambino » serait connu par l’ensemble du public anglophone, contrairement à ce que soutient la requérante. À cet égard, d’une part, les exemples d’utilisation du terme « bambino » par le public anglophone communiqués par la requérante dans sa requête ne font, dans la plupart des cas, pas référence au grand public, mais à un public ciblé, notamment, les célébrités internationales et les communautés d’expatriés, d’autre part, la requérante ne rapporte pas la preuve que le terme « bambino » soit doté d’une fréquence verbale suffisamment importante pour être considéré comme descriptif par le public anglophone. Au contraire, comme le souligne l’OHMI, le terme « bambino » est doté de la fréquence verbale la plus faible, à savoir un sur cinq, des fréquences répertoriées par le dictionnaire Collins. Il s’ensuit d’ailleurs, à titre incident, que, contrairement à ce que soutient la requérante, le caractère descriptif du terme « bambino » ne sera pas, à tout le moins sur les territoires susmentionnés, « souligné » par la représentation stylisée d’un enfant dans la marque antérieure, dans la mesure où il n’est pas établi que ce terme serait compris.

58      Par conséquent, il existe nécessairement une partie du territoire de l’Union où le terme « bambino » revêtira un caractère distinctif, faute de revêtir une quelconque signification pour le public pertinent. Or, il suffit, pour refuser l’enregistrement d’une marque, qu’un motif relatif de refus n’existe que dans une partie de l’Union, compte tenu du caractère unitaire de la marque communautaire (voir point 44 ci-dessus).

59      Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu d’écarter le moyen unique de la requérante comme non fondé et, partant, de rejeter le présent recours.

 Sur les dépens

60      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Westermann Lernspielverlag GmbH est condamnée aux dépens.

Martins Ribeiro

Gervasoni

Madise

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 juillet 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.