Language of document : ECLI:EU:T:2024:130

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

28 février 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative smål – Marques de l’Union européenne figurative et nationale verbale antérieures SUMOL – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Identité des produits – Caractère distinctif accru par l’usage des marques antérieures – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑279/23,

Sumol + Compal Marcas SA, établie à Carnaxide (Portugal), représentée par Me R. Milhões, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. M. Eberl, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Kåska Oy, établie à Helsinki (Finlande),

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. F. Schalin, président, Mme P. Škvařilová‑Pelzl et M. I. Nõmm (rapporteur), juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Sumol + Compal Marcas SA, demande l’annulation et la réformation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 1er mars 2023 (affaire R 2295/2022-5) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 24 mars 2021, Kåska Oy a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait les produits relevant des classes 32 et 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 32 : « Boissons sans alcool » ;

–        classe 33 : « Boissons alcoolisées à l’exception des bières ».

4        Le 12 juillet 2021, la requérante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque portugaise verbale SUMOL, enregistrée sous le numéro 142201 et désignant, notamment, les « boissons sans alcool et jus de fruits » relevant de classe 32 ;

–        la marque de l’Union européenne figurative enregistrée sous le numéro 18289973, désignant, notamment, les « boissons sans alcool » relevant de la classe 32 et les « boissons alcoolisées à l’exception des bières » relevant de la classe 33 et reproduite ci-après :

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6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 23 septembre 2022, la division d’opposition a rejeté l’opposition.

8        Le 23 novembre 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours. Elle a considéré que :

–        le public pertinent était à la fois celui du Portugal s’agissant de la marque portugaise verbale antérieure et celui de l’Union européenne en ce qui concerne la marque de l’Union européenne figurative antérieure et était constitué par le grand public, lequel était réputé disposer d’un degré d’attention moyen ;

–        les produits visés par la marque demandée relevant de la classe 32 étaient identiques à ceux de la même classe désignés à la fois par la marque portugaise verbale antérieure et la marque de l’Union européenne figurative antérieure et ceux relevant de la classe 33 identiques à ceux de la même classe désignés par la marque de l’Union européenne figurative antérieure ;

–        le terme « sumol » constituant tant la marque portugaise verbale antérieure que l’élément verbal de la marque de l’Union européenne figurative antérieure, d’une part, ne revêtait qu’un faible degré de caractère distinctif intrinsèque à l’égard du public lusophone, lequel y verrait une allusion au terme « sumo » (jus) tant pour les produits de la classe 32 que ceux de la classe 33 et, d’autre part, revêtait un degré moyen de caractère distinctif pour le reste du public pertinent ;

–        en substance, même si ses éléments figuratifs occupaient une place importante dans l’impression d’ensemble de la marque de l’Union européenne figurative antérieure, son élément verbal en constituerait l’élément le plus dominant et distinctif ;

–        les éléments verbal et figuratif de la marque demandée étaient également distinctifs et dominants ;

–        il existait un faible degré de similitude entre la marque portugaise verbale antérieure et la marque demandée sur le plan visuel et sur le plan phonétique et aucune similarité sur le plan conceptuel ;

–        le même raisonnement s’appliquait à la comparaison de la marque de l’Union européenne figurative antérieure et de la marque demandée, le degré de similitude étant encore plus faible sur le plan visuel du fait des éléments figuratifs ;

–        il n’était pas nécessaire d’examiner les éléments de preuve avancés par la requérante aux fins de démontrer un caractère distinctif accru par l’usage des marques antérieures s’agissant des produits de la classe 32 et il suffisait de partir du postulat que tel était le cas ;

–        en substance, au regard du faible degré de similitude des signes en conflit, nonobstant l’identité des produits en cause et dans l’éventualité même où les marques antérieures disposeraient d’un caractère distinctif accru à l’égard des produits de la classe 32, aucun risque de confusion pour le public pertinent au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 ne pouvait être constaté.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler la décision de la division d’opposition ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours dans son intégralité ;

–        condamner la requérante aux dépens exposés par lui en cas de convocation des parties à une audience.

 En droit

12      À l’appui de son recours, la requérante avance un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. Elle estime que la chambre de recours a commis plusieurs erreurs à l’occasion de l’appréciation du risque de confusion, en sous-estimant le degré de similitude des signes en conflit, en ne prenant pas en compte le principe d’interdépendance entre les degrés de similitude des produits et des signes, alors que les produits en cause sont identiques, et en ne prenant pas en compte le caractère distinctif élevé et accru du fait de l’usage des marques antérieures.

13      L’EUIPO, qui conteste les arguments de la requérante, soutient que le moyen doit être rejeté.

14      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement 2017/1001, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.

15      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

16      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

17      En premier lieu, il y a lieu de souligner que les appréciations de la chambre de recours portant sur la définition du public pertinent et l’identité des produits en cause, non contestées par la requérante, ne revêtent pas un caractère erroné et doivent, dès lors, être avalisées.

18      Ainsi, la chambre de recours a valablement pu définir, aux points 17 à 22 de la décision attaquée, le public pertinent comme étant constitué par le grand public – du Portugal s’agissant de la marque portugaise verbale antérieure et de l’Union en ce qui concerne la marque de l’Union européenne figurative antérieure – disposant d’un degré d’attention moyen.

19      De même, c’est à juste titre qu’elle a constaté, aux points 24 à 27 de la décision attaquée, l’existence d’une identité, d’une part, des produits de la classe 32 visés par la marque demandée avec certains des produits de cette même classe visés par les marques antérieures et, d’autre part, des produits de la classe 33 visés par la marque demandée avec certains de ceux de cette même classe visés par la marque de l’Union européenne figurative antérieure.

20      En deuxième lieu, s’agissant de l’examen du bien-fondé de la conclusion de la chambre de recours tirée de l’absence de risque de confusion en raison de l’enregistrement de la marque demandée pour les « boissons sans alcool » relevant de la classe 32, il convient de relever que, en réponse à la revendication de l’existence d’un caractère distinctif accru du fait de l’usage des marques antérieures s’agissant des produits de classe 32, la chambre de recours a considéré que, dans l’éventualité même où cela serait le cas, l’enregistrement de la marque demandée ne serait pas à l’origine d’un tel risque de confusion.

21      En application d’une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

22      En outre, parmi les facteurs pertinents dont il peut être tenu compte dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, figure également le caractère distinctif de la marque antérieure. L’examen du caractère distinctif de la marque antérieure est particulièrement pertinent dans les cas où il n’existe qu’un faible degré de similitude entre les signes en conflit et où il y a lieu de vérifier si ce faible degré peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les produits en cause [arrêt du 28 septembre 2016, The Art Company B & S/EUIPO – G-Star Raw (THE ART OF RAW), T‑593/15, non publié, EU:T:2016:572, point 39].

23      En effet, ainsi que rappelle le considérant 11 du règlement 2017/1001, l’appréciation du risque de confusion dépend, notamment, de la connaissance qu’a le public de la marque antérieure sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24 ; du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 20).

24      Par voie de conséquence, l’examen du présent moyen dépend du bien-fondé de l’appréciation de la chambre de recours portant sur le degré de similitude des signes en conflit, lequel doit être suffisamment faible pour permettre d’écarter tout risque de confusion, en dépit de l’identité des produits en cause et d’un éventuel caractère distinctif accru des marques antérieures du fait de leur usage pour ces produits.

25      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

26      Aux fins d’apprécier le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’examiner l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée [arrêts du 13 juin 2006, Inex/OHMI – Wiseman (Représentation d’une peau de vache), T‑153/03, EU:T:2006:157, point 35, et du 13 décembre 2007, Cabrera Sánchez/OHMI – Industrias Cárnicas Valle (el charcutero artesano), T‑242/06, non publié, EU:T:2007:391, point 51].

27      En outre, l’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

28      Le Tribunal estime qu’il convient, dans un premier temps, d’analyser l’éventualité d’un risque de confusion sur la base de la marque portugaise verbale antérieure.

29      À son égard, la chambre de recours a, premièrement, considéré, en substance, aux points 36 et 37 de la décision attaquée, que, la marque antérieure étant une marque portugaise, le terme la constituant serait susceptible d’être faiblement distinctif dès lors qu’il serait compris comme une référence au terme « sumo », lequel signifiait « jus » en portugais. S’agissant de la marque demandée, la chambre de recours a souligné, aux points 43 et 44 de la décision attaquée, que l’élément verbal et les éléments figuratifs de la marque demandée étaient également distinctifs et dominants.

30      Les appréciations de la chambre de recours quant à l’impression d’ensemble produite par la marque demandée et par la marque portugaise verbale antérieure apparaissent fondées et, partant, doivent être avalisées.

31      Deuxièmement, les appréciations, figurant aux points 45 à 48 de la décision attaquée, sur la faiblesse du degré de similitude des signes en conflit ne sont entachées d’aucune erreur.

32      La chambre de recours a fondé sa conclusion portant sur l’existence d’une faible similitude des signes sur le plan visuel par la circonstance qu’ils ne coïncidaient que par la présence des lettres « s » « m » et « l » placées dans le même ordre, alors que lesdites lettres disposaient d’un positionnement partiellement différent et se différenciaient par leurs deux autres lettres. Elle a également mis en exergue le fait que les signes étaient composés d’un nombre de lettres différent, que la stylisation de la marque demandée jouait un rôle important dans l’impression d’ensemble de celle-ci et que le public prendrait également en compte le diacritique présent sur la voyelle figurant dans cette seule marque. Aux points 49 et 50 de la décision attaquée, elle a estimé, en substance, que la marque demandée ne disposait que d’une syllabe, alors que la marque antérieure contenait deux syllabes, notamment pour le public lusophone, et en a conclu que les signes en conflit étaient faiblement similaires sur le plan phonétique également. Enfin, au point 53 de la décision attaquée, elle a considéré que les signes en conflit étaient différents sur le plan conceptuel, dès lors que la marque demandée ne disposait d’aucune signification.

33      À cet égard, tout d’abord, s’agissant de la comparaison des signes sur le plan visuel, au vu de l’importance des différences existant entre les signes en conflit – le positionnement partiellement différent des lettres communes, la présence des lettres « u » et « o » dans la seule marque antérieure ainsi que de la lettre « a » dans la seule marque demandée et l’utilisation dans cette dernière d’un diacritique – la seule présence en commun et dans le même ordre des lettres « s », « m » et « l » dans les signes en conflit ne peut impliquer qu’un faible degré de similitude.

34      Partant, la conclusion figurant au point 48 de la décision attaquée doit être avalisée, même si c’est à tort que la chambre de recours a pris en compte, au point 46 de la décision attaquée, la « stylisation accrocheuse » de la marque demandée en tant que facteur de différenciation des signes en conflit. En effet, dès lors que la marque antérieure est une marque verbale, son titulaire est en droit de l’utiliser sous des écritures différentes, par exemple, sous une forme comparable à celle de la marque demandée [voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Alcar Aktiebolag/EUIPO – Alcar Holding (alcar.se), T‑77/19, non publié, EU:T:2020:126, point 65 et jurisprudence citée].

35      Ensuite, s’agissant de la comparaison des signes sur le plan phonétique, c’est à juste titre que la chambre de recours a constaté, comme facteur de différenciation, un nombre de syllabes différent. Par conséquent, la circonstance alléguée par la requérante que les prononciations des marques en conflit ont en commun celle de la lettre « s » en début de marque ainsi que de la lettre « m » en milieu de mot et se rapprochent par celle des deux éléments « mol » et « mal » à la fin desdites marques ne peut occasionner qu’un faible degré de similitude.

36      Enfin, la comparaison des signes en conflit sur le plan conceptuel doit être considérée comme étant neutre dans les circonstances de l’espèce. D’une part, il est constant que la marque demandée ne dispose d’aucun contenu conceptuel. D’autre part, si le terme constituant la marque antérieure peut être compris par le public pertinent comme une référence au terme « sumo », signifiant « jus » en portugais, il convient de relever qu’un tel concept est descriptif des produits en cause et n’impliquera pas, dans leur contexte, d’associations susceptibles de faciliter la mémorisation de ce signe [voir, en ce sens, du 20 octobre 2021, Yadex International/EUIPO – Sütas Süt Ürünleri (PINAR Süzme Peynir), T‑559/20, non publié, EU:T:2021:713, point 103 et jurisprudence citée].

37      Au vu de ce qui précède, il convient de relever que les signes en conflit revêtent un degré de similitude suffisamment faible pour exclure tout risque de confusion en dépit de l’identité des produits de la classe 32 désignés par la marque portugaise verbale antérieure et par la marque demandée et dans l’éventualité même où la marque antérieure disposerait d’un caractère distinctif accru par l’usage à l’égard de ces produits, ainsi que l’a considéré à juste titre la chambre de recours aux points 68 et 69 de la décision attaquée.

38      Le Tribunal estime, en outre, que l’examen de l’éventualité d’un risque de confusion sur la base de la marque de l’Union européenne figurative antérieure aboutit à la même conclusion.

39      En effet, les éléments figuratifs des marques en conflit – lesquelles ne revêtent pas un caractère négligeable dans leur impression d’ensemble – contribuent à diminuer plus encore leur degré de similitude sur le plan visuel.

40      S’agissant de la comparaison des signes sur les plans phonétique et conceptuel, les mêmes constats que ceux opérés aux points 35 et 36 ci-dessus sont applicables au public pertinent lusophone, ainsi qu’à toute partie du public pertinent qui ne prononcera pas la lettre « å », figurant dans la marque demandée, d’une manière équivalente à la lettre « o », figurant dans l’élément verbal de la marque antérieure. Par contre, pour la partie du public pertinent, notamment de langue suédoise, pour qui les lettres « å » et « o » disposeront d’une prononciation équivalente, les marques en conflit présentent un degré moyen de similitude phonétique, et non faible comme il est indiqué au point 50 de la décision attaquée. Cependant, cette similitude d’un degré plus élevé que celui constaté par la chambre de recours n’affecte pas le bien-fondé de sa conclusion portant sur l’absence de risque de confusion. D’une part, aucune revendication d’un caractère distinctif accru du fait de l’usage n’a été effectuée par la requérante s’agissant de la partie non lusophone du public pertinent. D’autre part, il convient de relever que, les produits en cause étant surtout vendus dans des magasins en libre-service, l’aspect phonétique des marques en conflit présente généralement une importance réduite par rapport à l’aspect visuel de celles-ci [voir, en ce sens, arrêts du 11 décembre 2013, Eckes-Granini/OHMI – Panini (PANINI), T‑487/12, non publié, EU:T:2013:637, points 65 à 67, et du 25 janvier 2017, Anton Riemerschmid Weinbrennerei und Likörfabrik/EUIPO – Viña y Bodega Botalcura (LITU), T‑187/16, non publié, EU:T:2017:30, point 35]. Il en découlera nécessairement que le très faible degré de similitude sur le plan visuel jouera, en l’espèce, un rôle prépondérant.

41      Sur le plan conceptuel, il convient d’observer que l’ensemble du public pertinent, y compris non lusophone, percevra les éléments figuratifs de la marque de l’Union européenne figurative antérieure – à savoir la représentation d’une orange tranchée ainsi que d’un pétillement sous la forme de petites bulles – comme impliquant que les produits commercialisés sont des boissons pétillantes à base de jus d’orange ou au goût d’orange. Or, une telle signification doit être considérée comme n’étant pas susceptible d’attirer l’attention du public pertinent pour des motifs analogues à ceux exposés au point 36 ci-dessus.

42       Partant, s’agissant de l’enregistrement de la marque demandée pour les « boissons sans alcool » relevant de la classe 32, la chambre de recours a valablement exclu l’éventualité d’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

43      En troisième lieu, en ce qui concerne l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle l’enregistrement de la marque demandée pour les « boissons alcoolisées à l’exception des bières » relevant de la classe 33 n’occasionnerait aucun risque de confusion pour le public pertinent, il convient de prendre en compte la marque de l’Union européenne figurative antérieure, dès lors que celle-ci désigne des produits identiques. En effet, la requérante ne soutient pas, dans ses écritures, qu’un risque de confusion pourrait exister entre la marque portugaise verbale antérieure et la marque demandée du fait de l’enregistrement de cette dernière pour des produits qui ne sont pas identiques à ceux qu’elle désigne.

44      Pour des motifs analogues à ceux exposés aux points 39 à 41 ci-dessus, il y a lieu de conclure que la chambre de recours a constaté à juste titre, dans la décision attaquée, une absence de risque de confusion, nonobstant la circonstance que les produits en cause étaient identiques, au vu du caractère particulièrement faible du degré de similitude des signes en conflit ainsi que du fait que, la requérante n’ayant pas revendiqué un caractère distinctif accru acquis par l’usage de sa marque figurative antérieure pour des produits de la classe 33, cette dernière ne devait, en principe, se voir reconnaître qu’un degré de caractère distinctif intrinsèque variant de faible à moyen, selon la partie du public pertinent concernée.

45      Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter le moyen unique de la requérante et, par voie de conséquence, le recours.

 Sur les dépens

46      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

47      Bien que la requérante ait succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de cette dernière aux dépens qu’en cas de convocation des parties à une audience. En l’absence d’organisation d’une audience, il convient de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Sumol + Compal Marcas SA et l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supporteront chacun leurs propres dépens.

Schalin

Škvařilová-Pelzl

Nõmm

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 février 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.