Language of document : ECLI:EU:T:2022:445

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

13 juillet 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative Rejeunesse – Marque de l’Union européenne verbale antérieure REVANESSE – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑543/21,

Purasac Co. Ltd, établie à Anyang-si (Corée du Sud), représentée par Me P. Lee, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme E. Sliwinska et M. J. Crespo Carrillo, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Prollenium Medical Technologies, Inc., établie à Aurora, Ontario (Canada), représentée par Me R. Lyxell, avocat,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. G. De Baere (rapporteur), président, V. Kreuschitz et Mme S. Kingston, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Purasac Co. Ltd, demande l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 2 juillet 2021 (affaire R 146/2021-4) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 29 août 2019, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait les produits relevant de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant à la description suivante : « Produits de comblement dermique injectables ; produits pharmaceutiques injectables ».

4        Le 28 octobre 2019, l’intervenante, Prollenium Medical Technologies, Inc., a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée, entre autres, sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure REVANESSE, désignant notamment  les produits relevant de la classe 5 et correspondant  à la description suivante : « Gels pour la chirurgie esthétique et pour soigner les plaies et blessures ainsi que pour des traitements esthétiques médicaux ».

6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 8 décembre 2020, la division d’opposition a fait droit à l’opposition pour tous les produits visés au point 3 ci-dessus au motif qu’il existait un risque de confusion à tout le moins dans l’esprit du public hispanophone.

8        Le 22 janvier 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours. Elle a considéré que, compte tenu de l’identité des produits en cause, de la similitude visuelle et phonétique supérieure à la moyenne des signes et du caractère distinctif intrinsèque normal de la marque antérieure, il existait un risque de confusion, à tout le moins dans l’esprit de la partie hispanophone du public pertinent, même en tenant compte du niveau d’attention plus élevé dont celui-ci ferait preuve.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

12      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        confirmer la décision attaquée ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À titre liminaire, s’agissant du premier chef de conclusions de l’intervenante, étant donné que « confirmer » la décision attaquée équivaut à rejeter le recours, il y a lieu d’interpréter ce chef de conclusions comme tendant, en substance, au rejet du recours [arrêts du 5 février 2016, Kicktipp/OHMI – Italiana Calzature (kicktipp), T‑135/14, EU:T:2016:69, point 19 (non publié), et du 24 septembre 2019, Roxtec/EUIPO – Wallmax (Représentation d’un carré noir contenant sept cercles bleus concentriques), T‑261/18, EU:T:2019:674, point 16].

14      À l’appui du recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

15      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

16      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

17      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

18      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union européenne, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

 Sur les territoire et public pertinents

19      S’agissant du territoire pertinent aux fins de l’analyse du risque de confusion, la chambre de recours a constaté, en substance, au point 11 de la décision attaquée, qu’il était constitué de l’Union étant donné que la marque antérieure était une marque de l’Union européenne.

20      S’agissant du public pertinent, elle a considéré, au point 12 de la décision attaquée, que son examen, à l’instar de celui de la division d’opposition, pouvait se concentrer sur la partie hispanophone de celui-ci. Par ailleurs, au point 27 de la décision attaquée, elle a estimé que les produits visés par les marques en cause, relevant de la classe 5, s’adressaient au grand public et aux professionnels évoluant dans le domaine médical. Le niveau d’attention du public professionnel était élevé et celui du grand public était également plus élevé, étant donné que ces produits concernent la santé.

21      La requérante ne conteste pas ces appréciations de sorte qu’il n’y a pas lieu de les remettre en cause.

 Sur la comparaison des produits

22      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 14 mai 2013, Sanco/OHMI – Marsalman (Représentation d’un poulet), T‑249/11, EU:T:2013:238, point 21 et jurisprudence citée].

23      En outre, il ressort de la jurisprudence que, lorsque les produits pour lesquels une marque antérieure est protégée incluent les produits désignés par une demande d’enregistrement, ces produits sont considérés comme identiques [voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 34 et jurisprudence citée].

24      Au point 14 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que les « [g]els pour la chirurgie esthétique et pour soigner les plaies et blessures ainsi que pour des traitements esthétiques médicaux », relevant de la classe 5 et protégés par la marque antérieure, incluaient des produits ou des préparations pharmaceutiques et dermatologiques sous forme de gels qui pourraient être injectables et coïncidaient donc avec les « produits de comblement dermique injectables ; produits pharmaceutiques injectables », relevant de la classe 5 et visés par la marque demandée. Elle a conclu que les produits en cause étaient identiques.

25      La requérante fait valoir qu’un gel peut être injecté mais également faire l’objet d’une application externe sur le corps. Il devrait être tenu compte du mode d’application des produits en cause dans le cadre de leur comparaison. Selon la requérante, seule une partie des produits visés par la marque antérieure pourrait être considérée comme identique aux produits visés par la marque demandée, à savoir les produits qui sont injectables. Or, la liste des produits visés par la marque antérieure ne serait pas limitée aux gels exclusivement injectables de sorte qu’il conviendrait de considérer que l’intervenante a entendu désigner également des gels à usage externe. La requérante en déduit que les produits en cause ne sont pas identiques mais tout au plus similaires.

26      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

27      Ainsi que le relève l’EUIPO, la requérante admet que les produits visés par la marque antérieure, à savoir les « [g]els pour la chirurgie esthétique et pour soigner les plaies et blessures ainsi que pour des traitements esthétiques médicaux », peuvent être injectés au même titre que les produits de comblement dermiques et pharmaceutiques visés par la marque demandée. À cet égard, la requérante ne conteste pas le fait notoire, invoqué par la chambre de recours au point 15 de la décision attaquée, selon lequel les gels pour la chirurgie esthétique et pour des traitements esthétiques médicaux sont généralement injectés.

28      La requérante ne remet donc pas en cause l’existence d’un chevauchement entre les produits en conflit. Elle se borne seulement à faire valoir que les gels visés par la marque antérieure peuvent également être appliqués de manière externe et que, dès lors que les produits visés par la marque demandée sont quant à eux exclusivement injectables, les produits en conflit ne devraient être considérés que comme partiellement identiques ou seulement similaires.

29      Or, il suffit de constater, ainsi que le concède d’ailleurs la requérante, que le mode d’application des produits protégés par la marque antérieure n’est pas spécifié. Il n’y a donc pas lieu de distinguer, au sein de ces produits, entre les gels injectables et les gels appliqués de manière externe. En tout état de cause, étant donné que les produits protégés par la marque antérieure peuvent être injectés ou appliqués de manière externe, ces produits doivent être considérés comme formant une catégorie plus large de produits incluant les produits uniquement injectables visés par la marque demandée de sorte que, en application de la jurisprudence citée au point 23 ci-dessus, les produits en conflit doivent être considérés comme identiques.

30      C’est donc à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’identité des produits en cause.

 Sur la comparaison des signes

31      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

32      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants. Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, points 41 et 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [arrêts du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43, et du 24 octobre 2019, ZPC Flis/EUIPO – Aldi Einkauf (Happy Moreno choco), T‑498/18, EU:T:2019:763, point 71].

33      En l’espèce, après avoir décrit les marques en conflit et déterminé le caractère plus ou moins distinctif ou dominant des éléments composant la marque demandée, la chambre de recours a procédé à la comparaison des signes en prenant en compte, à l’instar de la division d’opposition, leur perception par le public hispanophone. Elle a conclu que, pour ce public, il existait une similitude supérieure à la moyenne entre lesdits signes sur les plans visuel et phonétique et que la comparaison sur le plan conceptuel restait neutre.

34      La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir conclu à l’existence d’une similitude entre les signes en conflit. Si elle souscrit à l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle la comparaison conceptuelle de ces signes est neutre, elle conteste, en revanche, l’appréciation de la chambre de recours relative aux éléments distinctifs et dominants de la marque demandée, à la comparaison visuelle des signes ainsi qu’à la comparaison phonétique de ceux-ci.

35      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

 Sur l’élément distinctif et dominant de la marque demandée

36      Au point 19 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que le mot « rejeunesse » constituait la partie distinctive et dominante de la marque demandée tandis que l’élément figuratif, constitué d’une goutte noire contenant une fleur blanche hautement stylisée, jouait un rôle secondaire. À cet égard, elle a constaté que le mot « rejeunesse » était dépourvu de signification pour le public hispanophone et possédait donc un caractère distinctif normal. Étant donné que, premièrement, les consommateurs ont tendance à se concentrer sur les éléments verbaux d’un signe complexe, deuxièmement, l’élément figuratif est de petite taille et, troisièmement, la représentation d’une fleur n’est pas particulièrement distinctive au regard des produits demandés, elle a constaté que l’élément figuratif serait principalement perçu comme décoratif.

37      La requérante soutient que l’élément figuratif attire particulièrement l’attention du public pertinent de sorte qu’il devrait être considéré comme l’élément distinctif et dominant de la marque demandée. Cet élément jouerait un rôle semblable au point d’un « i » agrandi ou à un point d’exclamation. Il aurait une taille équivalente à l’élément verbal et demeurerait bien visible même de loin. La requérante ajoute qu’il ne ressort pas de la jurisprudence que, dans le cas de marques composées à la fois d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers doivent systématiquement être considérés comme dominants.

38      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments invoqués par la requérante.

39      En premier lieu, il convient de relever que ni la dimension ni la position de l’élément figuratif au sein du signe ne lui confère un caractère dominant.

40      En effet, même s’il peut être admis que cet élément a une taille équivalente à l’élément verbal, il convient néanmoins de relever, à l’instar de l’EUIPO, que ledit élément verbal « rejeunesse » est plus long et occupe plus d’espace au sein du signe. À cet égard, la prétendue visibilité de loin de l’élément figuratif n’a aucune incidence sur sa dimension ni sur la question de savoir lequel des éléments du signe, le cas échéant, domine l’image que le public pertinent garde en mémoire, conformément à la jurisprudence citée au point 32 ci-dessus.

41      En outre, contrairement à ce que fait valoir la requérante, l’élément figuratif n’a pas une position particulière au sein du signe susceptible de le mettre en valeur. À cet égard, il ne saurait être constaté que cet élément fait office de point sur le « i » du mot « rejeunesse » puisque, outre que ce mot ne contient pas de « i », ledit élément se trouve situé au-dessus de la lettre « n ». Il ne peut pas non plus être constaté que cet élément joue un rôle semblable à un point d’exclamation dans la mesure où il n’en a ni la forme ni la fonction classique, à savoir terminer une formule exclamative.

42      En second lieu, c’est à juste titre que la chambre de recours a relevé que les consommateurs ont tendance à se concentrer sur les éléments verbaux d’une marque. En effet, selon la jurisprudence, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [arrêts du 14 juillet 2005, Wassen International/OHMI – Stroschein Gesundkost (SELENIUM-ACE), T‑312/03, EU:T:2005:289, point 37, et du 8 juillet 2020, Pablosky/EUIPO – docPrice (mediFLEX easySTEP), T‑21/19, EU:T:2020:310, point 74 (non publié)].

43      Certes, ainsi que l’invoque la requérante, il ne ressort pas de la jurisprudence que, dans le cas de marques mixtes comportant des éléments à la fois graphiques et verbaux, ces derniers éléments doivent systématiquement être considérés comme dominants (arrêt du 17 juillet 2008, L & D/OHMI, C‑488/06 P, EU:C:2008:420, point 55). Dans certains cas, il arrive ainsi que, dans un signe complexe, l’élément figuratif détienne une place au moins équivalente à l’élément verbal [voir arrêt du 12 mai 2021, Metamorfoza/EUIPO – Tiesios kreivės (MUSEUM OF ILLUSIONS), T‑70/20, non publié, EU:T:2021:253, point 58 et jurisprudence citée].

44      Toutefois, il résulte des points 39 à 41 ci-dessus que ni la position ni la dimension de l’élément figuratif en cause n’est de nature à lui conférer un caractère dominant au sein du signe. En outre, la requérante n’a pas fourni d’arguments de nature à démontrer que l’élément figuratif est plus distinctif que l’élément verbal. En particulier, elle n’a pas contesté l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle la perception d’une fleur n’est pas particulièrement distinctive au regard des produits concernés. Elle n’a pas davantage contesté l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle le mot « rejeunesse » possédait, quant à lui, un caractère distinctif moyen. Il n’y a donc pas lieu de s’écarter de la jurisprudence citée au point 42 ci-dessus en l’espèce.

45      Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreurs en concluant que l’élément verbal « rejeunesse » était l’élément distinctif et dominant de la marque demandée et que l’élément figuratif ne jouait qu’un rôle secondaire et serait principalement perçu comme décoratif.

 Sur la comparaison visuelle

46      Au point 21 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que le mot « revanesse », constituant la marque antérieure, et le mot « rejeunesse », constituant la partie dominante et distinctive de la marque demandée, coïncidaient par leurs premières et leurs dernières lettres et ne différaient que par leurs lettres centrales, à savoir, respectivement, « v » et « a » et « j », « e » et « u ». Les marques en cause différaient également par la présence de l’élément figuratif au sein de la marque demandée, celui-ci ne jouant toutefois qu’un rôle secondaire. Elle a conclu que les signes en conflit présentaient un degré de similitude visuelle supérieur à la moyenne.

47      Tout d’abord, la requérante avance que la marque antérieure est composée de neuf lettres tandis que l’élément verbal de la marque demandée en compte dix. Les signes n’auraient pas en commun un nombre important de lettres dans la même position. De plus, les deuxièmes syllabes des signes en cause, à savoir « jeu » et « va », seraient différentes. Or, les éléments centraux des signes seraient aussi importants que les éléments de début et de fin.

48      Ensuite, elle soutient que le mot constituant la marque antérieure est écrit en lettres capitales et s’écarte de la graphie normale tandis que seule la première lettre de la marque demandée est écrite en majuscule, conformément aux usages typographiques. L’usage irrégulier des majuscules aurait une incidence sur la manière dont le public pertinent perçoit un signe et, par conséquent, sur l’appréciation de la similitude visuelle.

49      Enfin, selon la requérante, les différences entre les marques en cause, à savoir la syllabe centrale différente, la présence de l’élément figuratif au sein de la marque demandée et la graphie différente des éléments verbaux, sont plus importantes que leurs similitudes de sorte que, sur le plan visuel, les signes ne sont pas similaires.

50      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

51      Il convient de relever que le mot « revanesse », constituant la marque antérieure, et le mot « rejeunesse », constituant l’élément distinctif et dominant de la marque demandée, partagent un nombre important de lettres identiques occupant la même position, en leur début et à leur fin. En effet, ainsi que le souligne l’intervenante, ces mots commencent par les lettres « r » et « e » et se terminent par les lettres « n », « e », « s », « s » et « e ». Ils comprennent donc sept lettres identiques sur les neuf et dix lettres que forment, respectivement, les mots « revanesse » et « rejeunesse ».

52      Il est vrai que ces mots diffèrent par leurs lettres centrales, à savoir, d’une part, les lettres « v » et « a » au sein de la marque antérieure et, d’autre part, les lettres « j », « e » et « u » au sein de la marque demandée. Ce constat n’est cependant pas susceptible de remettre en cause la similitude découlant des séquences de lettres identiques au début et à la fin des signes.

53      À cet égard, la requérante ne saurait utilement invoquer la jurisprudence selon laquelle, s’agissant de signes verbaux relativement brefs, les éléments centraux sont aussi importants que les éléments de début et de fin du signe [arrêt du 20 avril 2005, Krüger/OHMI – Calpis (CALPICO), T‑273/02, EU:T:2005:134, point 39]. En effet, d’une part, les éléments verbaux en cause ne sont pas suffisamment courts pour que leurs parties centrales créent une différence visuelle significative. D’autre part, il suffit de rappeler que la chambre de recours n’a pas considéré que les parties centrales des signes en cause étaient moins importantes que leurs parties initiales et finales mais a constaté, en substance, que, en dépit de leurs lettres centrales différentes, les éléments verbaux en cause produisaient une impression d’ensemble très similaire.

54      S’agissant de l’argument tiré de la graphie différente des éléments verbaux en cause et, en particulier, de l’usage irrégulier des majuscules dans la marque antérieure, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, une marque verbale est une marque constituée exclusivement de lettres, de mots ou d’association de mots, écrits en caractères d’imprimerie dans une police normale, sans élément graphique spécifique. Par conséquent, la protection qui découle de l’enregistrement d’une marque verbale porte sur le mot indiqué dans la demande d’enregistrement et non sur les aspects graphiques ou stylistiques particuliers que cette marque pourrait éventuellement revêtir [arrêts du 3 décembre 2015, TrekStor/OHMI – Scanlab (iDrive), T‑105/14, non publié, EU:T:2015:924, point 59, et du 8 juillet 2020, Pablosky/EUIPO – docPrice (mediFLEX easystep), T‑20/19, EU:T:2020:309, point 69 (non publié)]. Dès lors que la marque antérieure est une marque verbale, il n’y a pas lieu de tenir compte des aspects graphiques ou stylistiques qu’elle pourrait revêtir.

55      Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que, lorsqu’une marque figurative comportant des éléments verbaux est comparée sur le plan visuel à une marque verbale, les marques sont jugées similaires sur le plan visuel si elles ont en commun un nombre significatif de lettres dans la même position et si l’élément verbal du signe figuratif n’est pas hautement stylisé, nonobstant la représentation graphique des lettres dans des polices de caractères différentes, en italiques ou en caractères gras, en minuscules ou en majuscules, ou encore en couleur [voir, en ce sens, arrêt du 24 octobre 2017, Keturi kambariai/EUIPO – Coffee In (coffee inn), T‑202/16, non publié, EU:T:2017:750, point 101 et jurisprudence citée]. En l’espèce, ainsi qu’il ressort du point 51 ci-dessus, les éléments verbaux en cause partagent un nombre significatif de lettres. Quant à l’élément verbal de la marque demandée, celui-ci ne saurait être considéré comme hautement stylisé dans la mesure où la police de caractères utilisée n’est pas fantaisiste et où, ainsi que l’admet la requérante, sa graphie est conforme aux usages typographiques.

56      Enfin, s’il est vrai que les signes en conflit diffèrent par la présence de l’élément figuratif au sein de la marque demandée, il suffit de rappeler que cet élément ne joue toutefois qu’un rôle secondaire (voir point 45 ci-dessus).

57      Il s’ensuit que c’est à juste titre que la chambre de recours a constaté que les signes en conflit présentaient un degré de similitude visuelle supérieur à la moyenne.

 Sur la comparaison phonétique

58      Au point 22 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que le consommateur espagnol prononcera de manière identique les syllabes des mots « revanesse » et « rejeunesse », à l’exception de la deuxième syllabe, avec le même rythme et la même intonation. Elle en a déduit que les signes en conflit présentaient un degré de similitude phonétique supérieur à la moyenne.

59      La requérante fait valoir que les marques en cause présentent une connotation française et doivent donc être prononcées avec un accent français. La prononciation des deuxièmes syllabes « va » et « jeu » au sein des marques en cause serait alors clairement différente. Même si le public pertinent n’a pas de connaissance suffisante de la langue française, ces syllabes ne seraient, en tout état de cause, pas prononcées de manière similaire dans les autres langues de l’Union. Or, une différence entre les parties centrales des deux éléments verbaux en cause contribuerait à écarter toute similitude phonétique.

60      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

61      D’emblée, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, lorsqu’une marque purement figurative représente une forme que le public pertinent est facilement à même de reconnaître et d’associer à un mot précis et concret, c’est par ce mot qu’il désignera ladite marque, tandis que si une marque figurative comporte également un élément verbal, c’est en principe par l’emploi de celui-ci que ledit public se référera à cette marque [arrêt du 7 mai 2015, Cosmowell/OHMI – Haw Par (GELENKGOLD), T‑599/13, EU:T:2015:262, point 53]. En l’espèce, le public pertinent se référera à la marque demandée en prononçant son élément verbal, à savoir le terme « rejeunesse ».

62      Il est constant que l’élément verbal « rejeunesse » constituant la marque demandée ainsi que l’élément verbal « revanesse » composant la marque antérieure partagent des syllabes identiques en début et en fin de signe, lesquelles seront prononcées de la même manière par le public pertinent. Seule la prononciation des deuxièmes syllabes « va » et « jeu » au sein de ces éléments verbaux diffère.

63      À cet égard, il convient de relever que les deuxièmes syllabes des signes en cause seront prononcées de manière différente par la partie hispanophone du public pertinent, indépendamment de la question de savoir si elles seront prononcées avec un accent français ou non. L’éventuelle connotation française des signes, au demeurant non démontrée, n’est donc pas pertinente.

64      La différence de prononciation des deuxièmes syllabes des signes en conflit n’a toutefois pas d’incidence sur la conclusion à laquelle est parvenue la chambre de recours. En effet, elle a considéré, en substance, que cette différence n’était pas susceptible de contrebalancer les similitudes provenant de la prononciation identique des autres syllabes au début et à la fin des signes.

65      La requérante ne parvient pas à remettre en cause cette conclusion. À cet égard, elle ne peut s’appuyer sur l’arrêt du 20 avril 2005, CALPICO (T‑273/02, EU:T:2005:134), pour démontrer qu’une différence de prononciation des parties centrales des marques en conflit aboutit au constat d’une absence de similitude entre ces dernières. En effet, ainsi que le fait valoir l’EUIPO, le Tribunal a constaté, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, que la chambre de recours avait, à bon droit, conclu à l’absence de similitude phonétique des signes dans la mesure où ceux-ci présentaient deux syllabes nettement différentes sur trois, où l’accent tonique dans les deux signes ne portait pas sur la même syllabe et où l’une des lettres de chacun des signes était prononcée différemment par le public pertinent (voir, en ce sens, arrêt du 20 avril 2005, CALPICO, T‑273/02, EU:T:2005:134, point 41). Or, en l’espèce, les éléments verbaux en cause ne présentent qu’une seule syllabe différente alors que les autres syllabes se prononcent de la même façon par le public pertinent. De plus, ainsi que l’a relevé la chambre de recours sans que la requérante ne le conteste, tant le rythme de prononciation des signes que l’intonation sont identiques, nonobstant la présence d’une syllabe différente au milieu du signe.

66      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a constaté que les signes en conflit présentaient un degré de similitude phonétique supérieur à la moyenne.

 Sur le risque de confusion

67      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74).

68      La requérante fait valoir que les produits visés par les marques en cause sont tout au plus similaires et que les signes en conflit ne présentent aucune similitude de sorte qu’il n’existe aucun risque de confusion.

69      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

70      Il ressort des points 30, 57 et 66 ci-dessus que la chambre de recours a considéré, à juste titre, que les produits en conflit étaient identiques et que les signes présentaient une similitude supérieure à la moyenne sur les plans visuel et phonétique, tandis que la comparaison conceptuelle restait neutre. Les prémisses du raisonnement de la requérante visant à constater l’absence de risque de confusion sont donc erronées.

71      Par ailleurs, il convient de constater que la marque antérieure présente un caractère distinctif intrinsèque normal, ce que la requérante n’a, au demeurant, pas contesté.

72      Il s’ensuit que la chambre de recours a conclu à bon droit à l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit de la partie hispanophone du public pertinent, même en tenant compte de son niveau d’attention élevé.

73      Partant, le moyen unique invoqué par la requérante doit être rejeté.

 Sur les dépens

74      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Purasac Co. Ltd est condamnée aux dépens.

De Baere

Kreuschitz

Kingston

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 juillet 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.