Language of document : ECLI:EU:T:2014:1108

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA PREMIÈRE CHAMBRE DU TRIBUNAL

11 décembre 2014 (*)

« Aide judiciaire – Demande présentée concomitamment à l’introduction d’un recours en annulation – Mesures restrictives prises à l’encontre de certains fonctionnaires de Biélorussie »

Dans l’affaire T‑694/13 AJ,

Vadzim Ipatau, demeurant à Minsk (Biélorussie), représenté par Me M. Michalauskas, avocat,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. F. Naert et B. Driessen, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’aide judiciaire au titre de l’article 95 du règlement de procédure du Tribunal présentée concomitamment à l’introduction d’un recours en annulation,

LE PRÉSIDENT DE LA PREMIÈRE CHAMBRE DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 31 décembre 2013, le requérant, M. Vadzim Ipatau, a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision 2013/534/PESC du Conseil, du 29 octobre 2013, modifiant la décision 2012/642/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie (JO L 288, p. 69), et du règlement d’exécution (UE) n° 1054/2013 du Conseil, du 29 octobre 2013, mettant en œuvre l’article 8 bis, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 765/2006 concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie (JO L 288, p. 1), en ce que cette décision et ce règlement le concernent.

2        Par acte déposé au greffe du Tribunal le même jour, le requérant a demandé au Tribunal de l’admettre au bénéfice de l’aide judiciaire, au titre de l’article 94 du règlement de procédure du Tribunal.

3        À l’appui de cette demande, le requérant fait notamment valoir, en produisant certaines pièces justificatives, qu’il perçoit un revenu mensuel moyen de 1 039 euros, que son épouse perçoit une pension mensuelle de 276 euros et qu’il a sa mère, qui n’a aucun revenu, et une fille à sa charge. Par ailleurs, le requérant indique qu’il est propriétaire d’un appartement de 52,5 m2 à Minsk, d’une valeur de 9 765 euros, d’un garage à Minsk, d’une valeur de 2 857 euros, qu’il dispose aussi d’un véhicule d’une valeur de 4 778 euros et que son épouse est propriétaire d’un appartement de 45 m2 à Minsk, d’une valeur de 11 575 euros.

4        Quant à l’apparence de fondement de son recours, au sens de l’article 94, paragraphe 3, du règlement de procédure, en premier lieu, le requérant fait valoir une violation des droits de la défense, en ce que la procédure contradictoire préalable n’a pas été respectée par le Conseil. En deuxième lieu, le requérant invoque une violation de l’obligation de motivation. En troisième lieu, il se prévaut d’une erreur d’appréciation et, en quatrième lieu, du caractère disproportionné de la mesure.

5        Par lettre du greffe du 10 mars 2014, le Tribunal a invité le Conseil de l’Union européenne à déposer des observations sur la demande d’aide judiciaire du requérant.

6        Dans ses observations, déposées au greffe du Tribunal le 25 mars 2014, le Conseil déclare s’en remettre à l’appréciation du Tribunal sur le point de savoir si les renseignements et pièces justificatives fournis par le requérant prouvent à suffisance qu’il a besoin de l’aide judiciaire. Le Conseil soutient que le présent recours est largement semblable à celui déjà introduit par le requérant dans l’affaire T‑646/11, dans laquelle le requérant invoque, selon le Conseil, des moyens quasi identiques et pour laquelle il lui a déjà été accordé une aide judiciaire qui s’élève à 6 000 euros. Le Conseil estime que le montant de l’aide judiciaire en l’espèce ne devrait pas dépasser 6 000 euros.

7        Il ressort de l’article 94, paragraphe 1, du règlement de procédure que, pour assurer un accès effectif à la justice, l’aide judiciaire accordée pour la procédure devant le Tribunal couvre, totalement ou en partie, les frais liés à l’assistance et à la représentation en justice devant le Tribunal. Ces frais sont pris en charge par la caisse du Tribunal.

8        En vertu de l’article 94, paragraphes 2 et 3, du règlement de procédure, l’octroi de l’aide judiciaire est subordonné à la double condition que, d’une part, le requérant soit, en raison de sa situation économique, dans l’incapacité totale ou partielle de faire face aux frais liés à l’assistance et à la représentation en justice devant le Tribunal et, d’autre part, que son action ne paraisse pas manifestement irrecevable ou manifestement non fondée.

9        En vertu de l’article 95, paragraphe 2, du règlement de procédure, la demande d’aide judiciaire doit être accompagnée de tous renseignements et pièces justificatives permettant d’évaluer la situation économique du demandeur, tels qu’un certificat d’une autorité nationale compétente justifiant cette situation économique.

10      En vertu de l’article 96, paragraphe 2, du règlement de procédure, la décision sur la demande d’aide judiciaire est prise par le président par voie d’ordonnance, celle-ci devant être motivée en cas de refus.

11      Dans la présente affaire, il ressort des éléments du dossier relatifs à la situation économique du requérant et tels qu’exposés au point 3 ci-dessus que la demande présentée par le requérant remplit la première condition visée à l’article 94, paragraphe 2, du règlement de procédure.

12      S’agissant de la seconde condition visée à l’article 94, paragraphe 3, du même règlement, il importe d’indiquer que le recours pour lequel l’aide judiciaire est demandée ne paraît pas manifestement irrecevable ou manifestement non fondé en ce qui concerne la décision 2013/534 et le règlement d’exécution n° 1054/2013.

13      Dans ces circonstances, il y a lieu d’accorder l’aide judiciaire au requérant et de désigner M. Mažvydas Michalauskas pour le représenter dans la présente affaire, en application de l’article 96, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure.

14      S’agissant de la somme à octroyer au titre de l’aide judiciaire, il importe de relever que, dans l’affaire T‑646/11 qui a donné lieu à un arrêt du 23 septembre 2014, Ipatau/Conseil (T‑646/11, EU:T:2014:800), le requérant a introduit un recours contre des actes du Conseil qui ont été remplacés ou complétés par ceux dont il demande l’annulation dans le cadre de la présente affaire. L’affaire T‑646/11, dans laquelle une aide judiciaire d’un montant ne pouvant excéder 6 000 euros a déjà été accordée au requérant par ordonnance du 6 juin 2012, CD/Conseil (T‑646/11 AJ, EU:T:2012:279), a une grande connexité avec la présente affaire. Le requérant est représenté par le même avocat, MMichalauskas, dans les deux affaires et a soulevé des moyens quasi identiques à l’encontre des actes respectivement attaqués.

15      Dans ces circonstances, et en l’absence d’arguments du requérant tendant à démontrer le contraire, il y a lieu de considérer que l’analogie existant entre la présente affaire et l’affaire T‑646/11 est de nature à engendrer une économie d’échelle en ce qui concerne la préparation de la présente affaire.

16      Dès lors, compte tenu de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit, des difficultés prévisibles de la cause ainsi que de l’ampleur prévisible du travail que la procédure contentieuse représente pour les parties, il y a lieu de préciser dès à présent, conformément à l’article 96, paragraphe 3, troisième alinéa, du règlement de procédure, que les débours et les honoraires de l’avocat désigné ne pourront, en principe, dépasser un montant de 2 500 euros pour l’ensemble de la procédure dans la présente affaire.

17      S’agissant des conditions de versement de l’aide judiciaire, il convient de relever que l’article 2, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 765/2006 du Conseil, du 18 mai 2006, concernant des mesures restrictives à l’encontre du président Lukashenko et de certains fonctionnaires de Biélorussie (JO L 134, p. 1), dans sa version applicable à l’espèce, prévoit qu’aucun fonds ou ressource économique n’est mis directement ou indirectement à la disposition des personnes physiques énumérées à l’annexe I de ce règlement, au nombre desquels figure le demandeur, ni utilisé à leur profit.

18      L’article 3, paragraphe 1, du même règlement prévoit que les autorités compétentes des États membres peuvent autoriser le déblocage de certains fonds ou ressources économiques gelés ou la mise à disposition de certains fonds ou ressources économiques dans les conditions qu’elles jugent appropriées, après avoir établi que les fonds ou les ressources économiques concernés sont destinés notamment au paiement d’honoraires professionnels raisonnables et au remboursement de dépenses liées à la prestation de services juridiques.

19      Or, le représentant du requérant n’a joint aucune dérogation l’autorisant à percevoir le montant de l’aide judiciaire.

20      Toutefois, il ressort de la jurisprudence que le rejet de la demande d’aide judiciaire au seul motif que le requérant n’a pas produit l’autorisation d’une autorité nationale, prévue à l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 765/2006, alors que la demande d’aide judiciaire remplit les conditions prévues par le règlement de procédure, rappelées au point 8 ci-dessus, constituerait une entrave au droit fondamental qu’est le droit à un recours effectif (ordonnance du 10 novembre 2014, DD/Conseil, T‑228/12 AJ, EU:T:2014:958, point 30).

21      Il a été aussi déjà jugé qu’aucun mécanisme du droit de l’Union ne permet aux autorités nationales compétentes ni d’examiner si l’octroi d’une aide judiciaire par le Tribunal est nécessaire pour assurer un accès effectif à la justice, question qui relève de la seule appréciation du Tribunal, ni de contrôler l’utilisation, par ce dernier, des fonds indispensables à cet égard, ni, enfin, de fixer à l’égard du Tribunal des conditions pour garantir que l’objectif de la mesure adoptée n’est pas ignoré (ordonnance DD/Conseil, point 20 supra, EU:T:2014:958, point 31)

22      Ainsi, afin de permettre en l’espèce une application cohérente du règlement de procédure et du règlement n° 765/2006, il y a lieu de considérer que le Tribunal est à la fois obligé, d’une part, d’octroyer une aide judiciaire à tout demandeur énuméré à l’annexe I de ce dernier règlement ayant satisfait aux conditions prévues par les articles 94 et suivants du règlement de procédure, ce qui permet d’atteindre la finalité de ce règlement, et, d’autre part, de s’assurer que l’aide judiciaire octroyée sera uniquement utilisée pour couvrir les frais d’avocat du demandeur et ne portera pas atteinte à l’objectif de la mesure restrictive prononcée, tel que défini à l’article 2, paragraphe 2, du règlement n° 765/2006 (ordonnance DD/Conseil, point 20 supra, EU:T:2014:958, point 32).

23      À cette fin, il y a lieu de décider que les débours et honoraires seront versés directement à l’avocat désigné pour représenter le requérant et de réserver la décision finale sur leur montant, qui sera fixé sur le fondement d’un décompte détaillé soumis au Tribunal à la fin de l’affaire.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DE LA PREMIÈRE CHAMBRE DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      M. Vadzim Ipatau est admis au bénéfice de l’aide judiciaire.

2)      Me M. Michalauskas est désigné comme avocat pour représenter M. Ipatau dans l’affaire T‑694/13.

3)      Les débours et honoraires de Me Michalauskas lui seront versés directement et seront fixés sur le fondement d’un décompte détaillé soumis au Tribunal à la fin de l’affaire, mais ne pouvant excéder, en principe, un maximum de 2 500 euros.

Fait à Luxembourg, le 11 décembre 2014.

Le greffier

 

       Le président

E.  Coulon

 

       H. Kanninen


* Langue de procédure : le français.