Language of document : ECLI:EU:T:2013:276

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

28 mai 2013 (*)

« Pourvoi – Fonction publique – Concours général – Non-inscription sur la liste de réserve – Délai de pourvoi – Tardiveté – Absence de cas fortuit ou de force majeure – Pourvoi manifestement irrecevable »

Dans l’affaire T‑130/13 P,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 13 décembre 2012, Honnefelder/Commission (F‑42/11, non encore publié au Recueil), et tendant à l’annulation de cet arrêt,

Stephanie Honnefelder, demeurant à Bruxelles (Belgique), représentée par Me C. Bode, avocat,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant

Commission européenne,

partie défenderesse en première instance,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),

composé de M. M. Jaeger, président, Mme I. Pelikánová et M. A. Dittrich (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, la requérante, Mme Stephanie Honnefelder, demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 13 décembre 2012, Honnefelder/Commission (F‑42/11, non encore publié au Recueil, ci-après l’« arrêt attaqué »), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision du jury du concours général EPSO/AD/26/05, du 11 février 2011, de ne pas l’inscrire sur la liste de réserve.

 Faits et procédure

2        Le 13 décembre 2012, le Tribunal de la fonction publique a rendu l’arrêt attaqué. Celui-ci a été notifié à la requérante le 19 décembre 2012.

3        Par télécopie reçue au greffe du Tribunal le 21 février 2013, la requérante a entendu former le présent pourvoi.

4        L’original signé du pourvoi, accompagné des annexes et des copies visées à l’article 43, paragraphe 1, second alinéa, du règlement de procédure du Tribunal, est parvenu au greffe du Tribunal le 5 mars 2013.

5        Par lettre du 20 mars 2013, le greffier du Tribunal a informé la requérante qu’il avait constaté que, conformément à l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, la date de l’envoi par télécopie du pourvoi ne pouvait pas être prise en considération aux fins du respect des délais de procédure et que, en conséquence, la date retenue comme date de dépôt du pourvoi était celle du dépôt de l’original signé de celui-ci.

6        Par télécopie parvenue au greffe du Tribunal le 27 mars 2013, la requérante, en fournissant des explications quant au dépôt tardif de son pourvoi, a fait valoir l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure au sens de l’article 45, second alinéa, du statut de la Cour et a demandé que son pourvoi soit considéré comme recevable au regard de sa date de dépôt. L’original signé de ce courrier est parvenu au greffe le 4 avril 2013.

 En droit

7        Aux termes de l’article 145 du règlement de procédure, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, le Tribunal peut, à tout moment, sur rapport du juge rapporteur, rejeter le pourvoi totalement ou partiellement, par voie d’ordonnance motivée.

8        En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

9        Selon une jurisprudence constante, le délai de recours est d’ordre public, ayant été institué en vue d’assurer la clarté et la sécurité des situations juridiques et d’éviter toute discrimination ou traitement arbitraire dans l’administration de la justice, et il appartient au juge de l’Union de vérifier, d’office, s’il a été respecté (ordonnance du Tribunal du 12 octobre 2009, Aayhan e.a./Parlement, T‑283/09 P, RecFP p. I‑B‑1‑113 et II‑B‑1‑695, point 14 ; voir également, en ce sens, arrêts de la Cour du 23 janvier 1997, Coen, C‑246/95, Rec. p. I‑403, point 21, et du Tribunal du 18 septembre 1997, Mutual Aid Administration Services/Commission, T‑121/96 et T‑151/96, Rec. p. II‑1355, points 38 et 39).

10      Aux termes de l’article 9, premier alinéa, de l’annexe I du statut de la Cour, un pourvoi peut être formé devant le Tribunal, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision attaquée, contre les décisions du Tribunal de la fonction publique mettant fin à l’instance. Compte tenu des dispositions de l’article 101, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement de procédure, applicables aux pourvois contre les décisions du Tribunal de la fonction publique en vertu de l’article 144 du même règlement, ce délai ne commence à courir que le lendemain du jour de la notification de la décision attaquée et expire, s’agissant d’un délai exprimé en mois de calendrier, à la fin du jour qui, dans le deuxième mois, porte le même chiffre que le jour au cours duquel a été effectué l’acte à partir duquel le délai est à compter, à savoir celui de la notification. En vertu de l’article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure, ce délai est augmenté d’un délai de distance forfaitaire de dix jours.

11      En l’espèce, le délai de deux mois pour l’introduction par la requérante d’un pourvoi contre l’arrêt attaqué a commencé à courir à compter du 20 décembre 2012. Augmenté d’un délai de distance forfaitaire de dix jours, il a donc expiré le 1er mars 2013 à minuit.

12      Le pourvoi a été transmis au greffe du Tribunal par télécopieur le 21 février 2013, à savoir avant l’expiration du délai pour l’introduction du présent pourvoi.

13      Toutefois, l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, applicable aux pourvois contre les décisions du Tribunal de la fonction publique en vertu de l’article 138, paragraphe 1, dernier alinéa, du même règlement, dispose que la date à laquelle une copie de l’original signé d’un acte de procédure parvient au greffe du Tribunal par télécopieur n’est prise en considération, aux fins du respect des délais de procédure, que si l’original signé de l’acte est déposé à ce greffe au plus tard dix jours après la réception de la télécopie.

14      En l’espèce, l’original signé du pourvoi a été déposé au greffe du Tribunal le 5 mars 2013, soit plus de dix jours après qu’une copie de l’original signé du pourvoi est parvenue au greffe, par télécopieur, le 21 février 2013. Il s’ensuit que, conformément à l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, la date à retenir pour l’introduction du pourvoi est celle du 5 mars 2013.

15      Le présent pourvoi a, par conséquent, été introduit tardivement.

16      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argumentation de la requérante, avancée dans son courrier du 27 mars 2013, selon laquelle la transmission du pourvoi par télécopie, effectuée avant l’expiration du délai pour l’introduction du présent pourvoi, ne saurait avoir pour conséquence le raccourcissement de ce délai. La requérante estime que, si elle avait déposé le pourvoi par télécopie seulement le 25 février 2013, donc encore dans le délai pour l’introduction du pourvoi, le dépôt de l’original signé le 5 mars 2013 aurait été effectué dans le délai de dix jours visé à l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure.

17      Cette argumentation revient à affirmer, en substance, que le délai de dix jours visé à l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure commence à courir à compter de la date d’expiration du délai de deux mois et dix jours résultant des dispositions mentionnées au point 10 ci-dessus, quelle que soit la date de réception de la télécopie. Or, une telle argumentation ne saurait être accueillie. Il convient notamment de souligner que, lorsque la télécopie est reçue plus de dix jours avant l’expiration du délai fixé pour introduire un pourvoi devant le Tribunal, les dispositions de l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure n’ont pas pour effet d’augmenter ce délai (voir, en ce sens, ordonnance de la Cour du 18 janvier 2005, Zuazaga Meabe/OHMI, C‑325/03 P, Rec. p. I‑403, point 18).

18      Dans son courrier du 27 mars 2013, la requérante fait également valoir que, après la transmission du pourvoi par télécopie le jeudi 21 février 2013, son représentant a établi les annexes et les copies certifiées conformes requises pendant le week-end du 23 au 24 février 2013, puis les a remises à sa secrétaire, avec l’original signé du pourvoi, le lundi 25 février 2013. Cette dernière aurait remis le colis, contenant l’original signé du pourvoi ainsi que les annexes et les copies certifiées conformes, le mardi 26 février 2013, au service d’un opérateur postal allemand après avoir reçu, de la part de celui-ci, l’information selon laquelle le délai de transmission habituel du colis de l’Allemagne au Luxembourg était de deux à trois jours et, dans des cas exceptionnels, de cinq jours au maximum. Ce délai de transmission de deux à trois jours serait, par ailleurs, confirmé par d’autres sources d’information comme par exemple les informations figurant sur les sites Internet de deux autres opérateurs de services postaux. Le fait que, en l’espèce, le délai de transmission du colis aurait excédé le délai maximal indiqué par cet opérateur postal allemand n’aurait pas été prévisible pour la requérante. Eu égard à ces circonstances, la requérante se prévaut de l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure qui, aux termes de l’article 45, second alinéa, du statut de la Cour, rendrait inopposable à son égard la déchéance tirée de l’expiration du délai.

19      Selon une jurisprudence constante, les notions de cas fortuit et de force majeure, au sens de l’article 45, second alinéa, du statut de la Cour, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut, requièrent que l’on se trouve en présence de difficultés anormales, indépendantes de la volonté du requérant et apparaissant inévitables, alors même que toutes les diligences auraient été mises en œuvre (arrêt de la Cour du 15 décembre 1994, Bayer/Commission, C‑195/91 P, Rec. p. I‑5619, point 31). Ces notions comportent toutes deux un élément objectif, relatif aux circonstances anormales et étrangères à l’intéressé, et un élément subjectif, tenant à l’obligation, pour l’intéressé, de se prémunir contre les conséquences de l’événement anormal en prenant des mesures appropriées sans consentir des sacrifices excessifs. En particulier, l’intéressé doit surveiller soigneusement le déroulement de la procédure entamée et, notamment, faire preuve de diligence afin de respecter les délais prévus (arrêt Bayer/Commission, précité, point 32, et ordonnance de la Cour du 8 novembre 2007, Belgique/Commission, C‑242/07 P, Rec. p. I‑9757, point 17). Ainsi la notion de force majeure ne s’applique pas à une situation où une personne diligente et avisée aurait objectivement été en mesure d’éviter l’expiration d’un délai de recours (arrêt de la Cour du 12 juillet 1984, Ferriera Valsabbia/Commission, 209/83, Rec. p. 3089, point 22, et ordonnance Zuazaga Meabe/OHMI, point 17 supra, point 25).

20      En outre, il y a lieu de souligner qu’une partie requérante ne peut se prévaloir d’un fonctionnement défectueux de l’organisation interne du cabinet d’avocats la représentant [voir ordonnance du Tribunal du 28 avril 2008, PubliCare Marketing Communications/OHMI (Publicare), T‑358/07, non publiée au Recueil, point 17, et la jurisprudence citée].

21      Il y a lieu de constater que, en l’espèce, la requérante a envoyé l’original signé du pourvoi ainsi que les annexes et les copies certifiées conformes par un colis confié à un opérateur postal allemand le 26 février 2013, soit cinq jours après que le pourvoi a été envoyé par télécopie. Conformément à l’information fournie par cet opérateur, telle qu’avancée par la requérante, le délai habituel pour l’envoi d’un tel colis au Luxembourg est de deux à trois jours et, dans des cas exceptionnels, de cinq jours au maximum.

22      La requérante n’a toutefois apporté aucune preuve relative à cette prétendue information fournie par l’opérateur postal allemand en cause. L’indication de sites Internet d’opérateurs de services postaux situés en Allemagne, autres que l’opérateur choisi par la requérante, n’est pas suffisante à cet égard. En outre, elle n’a pas fait valoir que le délai maximal de cinq jours était garanti par l’opérateur postal allemand en cause.

23      Par ailleurs, même si l’information prétendument donnée par cet opérateur constituait un engagement strict de la part de ce dernier de délivrer le colis en cause au Luxembourg dans un délai maximal de cinq jours après sa remise, le non-respect de ce délai par ledit opérateur n’équivaudrait pas, en tout état de cause, à un cas fortuit ou de force majeure pour la requérante.

24      En effet, premièrement, l’existence d’un engagement de cet opérateur envers l’expéditeur de livrer son courrier dans un certain délai ne saurait, par lui seul, avoir pour effet de rendre imprévisible tout retard dans cette livraison (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 21 mars 2002, Laboratoire Monique Rémy/Commission, T‑218/01, Rec. p. II‑2139, point 16).

25      Deuxièmement, la requérante n’a pas indiqué si les délais prétendument mentionnés par l’opérateur postal allemand en cause se comptaient en jours ouvrés ou calendaires. Pourtant, il y a lieu de tenir compte du fait que parmi les cinq jours suivant la remise du colis en cause au service de cet opérateur se trouvaient un samedi et un dimanche, donc des jours pendant lesquels il n’était pas certain que tous les opérateurs concernés par le transport du colis en cause assuraient le service. À supposer que seul le dimanche ait constitué un jour qui ne comptait pas parmi les jours indiqués par l’opérateur postal allemand en cause, le délai maximal de cinq jours pour la livraison du colis au Luxembourg, que cet opérateur se serait engagé à respecter, correspondait, en principe et en tenant compte du fait que le colis a été expédié cinq jours après l’envoi de la télécopie, au délai maximal prévu à l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure. Il s’ensuit que, dans un tel cas, tout dépassement, même léger, du délai maximal indiqué par ledit opérateur pour la livraison du colis en cause risquait d’entraîner le dépassement du délai prévu à l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, lequel expirait, en l’espèce, le 4 mars 2013 à minuit [voir, en ce sens, ordonnances du Tribunal Laboratoire Monique Rémy/Commission, point 24 supra, point 18, et du 20 février 2013, Kappa Filter Systems/OHMI (THE FUTURE HAS ZERO EMISSIONS), T‑422/12, non publiée au Recueil, points 17 et 18].

26      Au vu de ce qui précède, il convient de constater que, en décidant d’envoyer l’original signé du pourvoi ainsi que les annexes et les copies certifiés conformes au greffe du Tribunal par colis de l’opérateur postal allemand en cause cinq jours après le dépôt du pourvoi par télécopie, la requérante n’a pas fait preuve de la diligence requise afin de respecter le délai prévu à l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure.

27      Il s’ensuit que la requérante n’a pas établi l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure au sens de l’article 45, second alinéa, du statut de la Cour.

28      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le pourvoi doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable, sans qu’il soit nécessaire de le signifier à la Commission européenne.

 Sur les dépens

29      La présente ordonnance étant adoptée avant la signification du pourvoi à la Commission et avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il suffit de décider que la requérante supportera ses propres dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 144 dudit règlement.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

ordonne :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Mme Stephanie Honnefelder supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 28 mai 2013.

Le greffier

 

       Le président

E.  Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’allemand.