Language of document : ECLI:EU:T:2015:860

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

18 novembre 2015 (*) (1)

« Clause compromissoire – Sixième et septième programmes-cadres pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration – Résiliation anticipée des contrats – Confiance légitime – Proportionnalité – Bonne foi – Responsabilité non contractuelle – Requalification du recours – Coexistence de demandes en indemnité contractuelle et extracontractuelle – Système d’alerte précoce (SAP) – Violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit conférant des droits aux particuliers – Lien de causalité »

Dans l’affaire T‑106/13,

d.d. Synergy Hellas Anonymi Emporiki Etaireia Parochis Ypiresion Pliroforikis, établie à Athènes (Grèce), représentée par Mes M. Angelopoulos et K. Damis, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. R. Lyal et A. Sauka, en qualité d’agents, assistés de Mes L. Athanassiou et G. Gerapetritis, avocats,

partie défenderesse,

ayant pour objet des demandes en indemnité contractuelle et extracontractuelle formulées dans le contexte de l’exécution de plusieurs contrats que la Commission a conclus avec la requérante au titre des sixième et septième programmes-cadres pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration contribuant à la réalisation de l’espace européen de la recherche et à l’innovation,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. M. Prek, président, Mme I. Labucka et M. V. Kreuschitz (rapporteur), juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 29 avril 2015,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        À la suite de la décision n° 1513/2002/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 juin 2002, relative au sixième programme-cadre de la Communauté européenne pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration contribuant à la réalisation de l’espace européen de la recherche et à l’innovation (2002-2006) (JO L 232, p. 1), la Commission des Communautés européennes a conclu avec la requérante, d.d. Synergy Hellas Anonymi Emporiki Etaireia Parochis Ypiresion Pliroforikis, membre d’un consortium, un contrat de subvention intitulé « Communication environment for Judicial European Network in Western Balkans (J-WeB) » (ci-après le « contrat J-WeB »).

2        Par ailleurs, dans le contexte de la décision n° 1982/2006/CE du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2006, relative au septième programme-cadre de la Communauté européenne pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration (2007-2013) (JO L 412, p. 1), la Commission a conclu deux autres contrats de subvention avec la requérante, membre d’un consortium, intitulés « Multi-level patient-specific artery and atherogenesis model for outcome prediction, decision support treatement and virtual hand-on training (ARTreat) » (ci-après le « contrat ARTreat ») et « Controlling Chronic Diseases related to Metabolic Disorders (Metabo) » (ci-après le « contrat Metabo »).

3        Dans le cadre de l’exécution du contrat J-WeB, la Commission a confié à la société Kypris & Associates l’audit des coûts déclarés par la requérante. Cet audit financier a eu lieu entre le 17 et le 20 octobre 2011. Durant cette même période, un audit concernant les coûts déclarés par la requérante pour le projet ARTreat a également été effectué par ladite société au nom de la Commission.

4        Le 4 avril 2012, le rapport d’audit provisoire concernant le projet J-WeB de la société Kypris & Associates a été transmis à la requérante. Dans ce rapport d’audit, la société d’audit a constaté des irrégularités et des déclarations de coûts inexactes. Des 518 984,04 euros de coûts déclarés par la requérante, seuls 9 701,51 euros ont été considérés comme éligibles par les auditeurs.

5        Le 25 avril 2012, la requérante a présenté ses observations sur le rapport d’audit provisoire concernant le projet J-WeB. Elle a contesté les conclusions dudit rapport.

6        Le 31 mai 2012, la société Kypris & Associates a adopté un rapport d’audit final concernant le projet J-WeB. Ledit rapport a confirmé les conclusions du rapport d’audit provisoire selon lesquelles seuls 9 701,51 euros des coûts déclarés pouvaient être considérés comme éligibles.

7        Par lettre du 14 juin 2012, la Commission a informé la requérante qu’elle confirmait les conclusions du rapport d’audit final concernant le projet J-WeB. En outre, elle a informé la requérante de son intention de mettre un terme à la participation de cette dernière aux contrats de subvention existants conclus dans le cadre du septième programme-cadre compte tenu des irrégularités constatées dans ledit rapport d’audit final.

8        Par courriel du 18 juin 2012 et lettre du 20 juin 2012, la Commission a informé le coordinateur du projet et la requérante qu’elle suspendait tout paiement concernant le projet ARTreat en application de l’article II.5, paragraphe 3, sous d), de l’annexe II du contrat ARTreat.

9        Par lettre du 27 juin 2012, la requérante a contesté les conclusions de l’audit final concernant le projet J-WeB et a demandé un réexamen dudit audit.

10      Le 29 juin 2012, la Commission a notifié à la requérante, d’une part, son intention de recouvrer les sommes dues à la suite de l’audit dans le projet J-WeB et, d’autre part, sa décision de mettre fin à la participation de cette dernière aux projets ARTreat et Metabo en application de l’article ΙΙ.38, paragraphe 1, sous c), de l’annexe II des contrats afférents à ces projets. Elle a également informé la requérante de son droit de demander une révision de la décision de résiliation.

11      Le 17 juillet 2012, la requérante a déposé auprès de la Commission une demande de révision de la décision mettant fin à sa participation aux projets ARTreat et Metabo par le comité interne d’examen des évaluations (ci-après le « comité de recours ») visé par le point 5.3 de l’annexe de la décision 2011/161/UE, Euratom de la Commission, du 28 février 2011, modifiant la décision C(2008) 4617 concernant l’adoption des règles pour la soumission de propositions et les procédures d’évaluation, de sélection et d’attribution pour les actions indirectes au titre du septième programme-cadre de la Communauté européenne pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration (2007-2013) et au titre du septième programme-cadre de la Communauté européenne de l’énergie atomique (Euratom) pour des activités de recherche et de formation en matière nucléaire (2007-2011) (JO L 75, p. 1). Cette demande a été complétée par la requérante le 20 juillet 2012.

12      Le 26 juillet 2012, la requérante a déposé une demande de révision du rapport d’audit final portant sur le projet J-WeB. Elle a, en outre, demandé d’interrompre les procédures de recouvrement pour le projet J-WeB.

13      Par lettre du 30 juillet 2012, la Commission a refusé la demande de révision du rapport d’audit final portant sur le projet J-WeB au motif que la procédure de révision n’avait pas trait à la procédure de recouvrement.

14      Le 30 juillet 2012, une réunion s’est tenue entre la requérante et des représentants de la Commission et de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) à propos de l’audit du contrat J-WeB et de ses conséquences.

15      Par lettre du 31 juillet 2012, la Commission a informé la requérante de la constitution d’un comité de recours chargé d’examiner la demande dûment formée contre son exclusion des projets ARTreat et Metabo.

16      Le 1er août 2012, la requérante a envoyé une lettre à la Commission dans laquelle elle reconnaissait qu’elle s’était livrée à différentes pratiques qui n’étaient pas conformes aux usages corrects. En outre, elle a déclaré qu’elle se retirait des projets visés par les sixième et septième programmes-cadres et qu’elle s’engageait à respecter ses obligations à l’égard de la Commission dans un cadre raisonnable. Enfin, elle a indiqué être à la disposition de la Commission pour fournir toute explication requise et pour un accord final.

17      Le 13 août 2012, une réunion s’est tenue dans les bâtiments de l’OLAF entre la requérante et des représentants de la Commission à propos de l’audit du contrat J-WeB et de ses conséquences.

18      Le 14 août 2012, la requérante a introduit un recours contre la Commission devant le Tribunal (affaire T-365/12) ayant pour objet, d’une part, le paiement avec intérêts de retard des sommes dues en exécution du contrat J-WeB et, d’autre part, la réparation du préjudice qu’elle aurait subi en raison de la violation par la Commission du secret professionnel et de la non-communication de certaines informations ainsi que le versement d’intérêts compensatoires et de retard. La requérante a déposé parallèlement à ce recours une demande de sursis à exécution (affaire T-365/12 R).

19      Le 22 août 2012, une réunion s’est tenue entre la requérante, des représentants de la Commission et des représentants de l’OLAF. Il ressort d’un compte rendu de cette réunion qu’il y a été convenu qu’il serait procédé comme suit :

–        l’unité R4 de la direction générale « Réseaux de communication, contenu et technologies » de la Commission (ci-après l’« unité R4 ») ne réviserait pas les conclusions du rapport d’audit du projet J‑WeB ;

–        l’unité R4 enverrait à la requérante un rapport d’audit provisoire concernant le projet ARTreat et un rapport d’audit révisé concernant le projet Metabo, rejetant tous les coûts de personnel en raison du manque de fiabilité du système d’enregistrement du temps de travail et de l’absence de preuves alternatives suffisantes ;

–        l’unité R4 convoquera le comité de recours II afin d’accepter le maintien de la requérante comme partenaire dans les projets ARTreat et Metabo sans aucune obligation (R4 will convene the redress II committee to accept the continuation of DDS as a partner in the ARTreat and Metabo projects without any obligation) ;

–        la requérante disposera d’un délai de 30 jours pour soumettre des éléments de preuve alternatifs concernant les coûts de personnel éligibles ; seuls les coûts encourus pour les membres du personnel dont le travail était effectif et réel seront éligibles ;

–        l’unité R4 révisera les rapports d’audit des projets ARTreat et Metabo ;

–        l’unité H5 fixera la somme due ;

–        l’échéancier de remboursement des sommes dues sera examiné avec le responsable des services comptables.

20      L’unité R4 a envoyé un mémorandum au président du comité de recours. Le représentant de l’unité R4 préconisait au comité, d’une part, d’accepter la demande de la requérante et, d’autre part, de recommander à l’ordonnateur compétent le maintien de la requérante dans les consortiums chargés des projets ARTreat et Metabo.

21      Le 3 septembre 2012, la Commission a notifié son rapport d’audit provisoire concernant le projet ARTreat du 24 août 2012 à la requérante. Dans ledit rapport, la Commission a rejeté l’ensemble des coûts de personnel et les coûts indirects connexes avancés par la requérante au motif qu’ils n’étaient pas conformes aux exigences du contrat ARTreat.

22      Le 11 septembre 2012, la requérante s’est désistée de ses recours devant le Tribunal dans les affaires T-365/12 et T-365/12 R. Par ordonnances du 21 septembre 2012, le Tribunal a rayé lesdites affaires du registre et condamné la requérante aux dépens (ordonnances du 21 septembre 2012, Synergy Hellas/Commission, T‑365/12, EU:T:2012:461, et T‑365/12 R, EU:T:2012:462).

23      Le 24 septembre 2012, le coordinateur du projet ARTreat a envoyé un courriel à la requérante dans lequel il indiquait notamment que, à la suite d’une rencontre avec la responsable dudit projet auprès de la Commission, il pensait que cette dernière était favorable à ce que le recours de la requérante soit accueilli.

24      Le 2 octobre 2012, la requérante a présenté ses observations sur les rapports d’audit provisoires des projets ARTreat et Metabo. Elle a notamment indiqué que les fiches de présence ne correspondaient pas à 100 % au travail effectué, mais que, à la suite des rapports d’audit, elle avait modifié le calcul des heures de production et des coûts totaux.

25      Le 10 octobre 2012, le comité de recours s’est réuni. Il ressort du procès-verbal de cette réunion que le comité de recours a rappelé qu’il n’était pas compétent pour mettre en cause les résultats des audits financiers ou l’interprétation faite à ce propos par les auditeurs, mais qu’il vérifiait si la procédure de résiliation ne comportait pas d’erreurs factuelles ou procédurales. En outre, le comité de recours a estimé qu’il n’était pas compétent pour statuer sur la demande de la requérante de la réintégrer dans les projets ARTreat et Metabo. Il a conclu que l’exclusion de la requérante des projets ARTreat et Metabo était conforme aux dispositions contractuelles et a recommandé à l’ordonnateur compétent de maintenir la décision de résilier les contrats ARTreat et Metabo conclus avec la requérante.

26      Le 15 octobre 2012, la Commission a demandé à la requérante le paiement des dépens dans l’affaire T-365/12 R s’élevant à 4 290 euros.

27      Le 4 décembre 2012, la Commission a informé la requérante que, en application de l’article II.30 de l’annexe II du contrat J-WeB, elle lui réclamerait dans une note de débit une indemnité forfaitaire (liquidated damages) de 25 643,16 euros conformément aux conclusions du rapport d’audit concernant le projet J-WeB.

28      Le 11 décembre 2012, la Commission a informé la requérante du fait que le comité de recours avait confirmé son exclusion du projet ARTreat.

29      Par lettre du 19 décembre 2012, la requérante a demandé à la Commission de réexaminer ses arguments concernant le projet ARTreat d’accepter les déclarations de frais des projets ARTreat et Metabo ainsi que de réexaminer les demandes de paiement de dommages forfaitaires (liquidated damages) se rapportant au projet J-WeB et des dépens de l’affaire T-365/12.

30      Dans une lettre du 21 décembre 2012, la Commission a confirmé l’exclusion de la requérante du projet ARTreat. En outre, elle a indiqué que les fiches financières révisées de la requérante pour les projets ARTreat et Metabo seraient dûment évaluées dans le cadre de l’audit en cours. Enfin, elle a indiqué qu’elle recouvrerait auprès de la requérante les dommages se rapportant au projet J-Web et les dépens de l’affaire T-365/12.

 Procédure et conclusions des parties

31      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 février 2013, la requérante a introduit le présent recours.

32      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater que son exclusion du projet ARTreat constitue une violation par la Commission de ses obligations contractuelles au regard des principes de proportionnalité et de protection de la confiance légitime et ordonner à la Commission de lui verser la somme de 343 828,88 euros, au titre des paiements dus dans le cadre du projet ARTreat, assortie d’intérêts à compter du dépôt du présent recours ;

–        ordonner à la Commission de lui verser la somme de 89 933,16 euros, au titre de l’indemnisation de son préjudice matériel et du dommage causé à sa réputation professionnelle, en raison d’un abus de pouvoir, d’une violation du secret professionnel et d’une éventuelle omission de l’informer de son insertion dans le système d’alerte précoce, assortie d’intérêts compensatoires du 14 juin 2012 jusqu’au prononcé de l’arrêt dans la présente affaire et d’intérêts de retard du prononcé de l’arrêt dans la présente affaire jusqu’au paiement intégral ;

–        condamner la Commission aux dépens.

33      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le présent recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

34      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d’inviter les parties à répondre à certaines questions écrites et a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure. Les parties ont répondu auxdites questions écrites dans le délai imparti. En outre, les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal à l’audience du 29 avril 2015.

 En droit

I –  Sur la demande en indemnité contractuelle

A –  Introduction

35      À l’appui de la partie de son recours fondée sur la responsabilité contractuelle de l’Union européenne, la requérante allègue, en substance, que la résiliation anticipée du contrat ARTreat est illégale. Plus particulièrement, elle considère que ladite résiliation viole le principe de protection de la confiance légitime et le principe de proportionnalité. La Commission conteste tant la recevabilité que le bien-fondé de ces griefs.

36      À titre liminaire, le Tribunal observe que les contrats signés par la requérante avec la Commission pour la réalisation des projets J-WeB, ARTreat et Metabo sont des contrats de subventions. Il s’ensuit que le financement par l’Union, en application de ces contrats, ne constitue pas une rémunération du travail effectué par la requérante, mais une subvention des projets susvisés, dont le versement est soumis à des conditions précises, définies contractuellement. Le financement de l’Union a vocation à couvrir uniquement des coûts éligibles, tels qu’ils sont définis dans les contrats en cause (voir articles 1, 5 et 8 ainsi que la partie B de l’annexe II du contrat J-Web, articles 2 et 5 ainsi que la partie B de l’annexe II du contrat ARTreat et articles 2 et 5 ainsi que la partie B de l’annexe II du contrat Metabo).

37      Par ailleurs, il convient de rappeler que les litiges nés lors de l’exécution d’un contrat doivent être tranchés, en principe, sur la base des clauses contractuelles (voir arrêt du 9 mars 2011, Commission/Edificios Inteco, T‑235/09, EU:T:2011:79, point 49 et jurisprudence citée). En effet, la convention fait, en principe, loi entre les parties. La prise en compte du droit applicable au contrat ne se justifie qu’en cas de doute quant à la validité des clauses contractuelles ou quant à leur portée.

38      En l’espèce, les contrats ARTreat, J-WeB et Metabo contiennent chacun une clause compromissoire conférant au Tribunal, en première instance, et à la Cour, sur pourvoi, la compétence exclusive de trancher tout litige entre les parties concernant l’interprétation, l’application et la validité desdits contrats (voir article 12 du contrat J-WeB, article 9 du contrat ARTreat et article 9 du contrat Metabo).

39      Par ailleurs, les contrats ARTreat et Metabo prévoient que ceux-ci sont régis par les dispositions desdits contrats, les actes de l’Union ayant trait au septième programme-cadre, le règlement financier applicable au budget de l’Union et ses règles de mise en œuvre, les autres règles du droit de l’Union et, à titre subsidiaire, le droit belge (voir article 9 du contrat ARTreat et article 9 du contrat Metabo). Le contrat J-WeB précise que le contrat est régi par le droit belge (voir article 12 du contrat J-WeB).

B –  Sur la recevabilité

1.     Sur la violation des articles II.22 et II.38 de l’annexe II du contrat ARTreat

40      La Commission estime que les allégations de la requérante concernant la violation des articles II.22 et II.38 de l’annexe II du contrat ARTreat ne sont pas précisées et, partant, qu’elles doivent être rejetées comme irrecevables en application de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 44 du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991. La requérante conteste cette appréciation.

41      En vertu de l’article 21 du statut de la Cour, qui, conformément à l’article 53 dudit statut, s’applique aussi à la procédure devant le Tribunal, et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du 2 mai 1991, la requête doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal d’exercer son contrôle. Il en découle que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels un recours est fondé doivent ressortir d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle-même (voir arrêt du 14 février 2012, Italie/Commission, T‑267/06, EU:T:2012:69, point 35 et jurisprudence citée). Des exigences analogues sont requises lorsqu’un grief est invoqué au soutien d’un moyen (voir arrêt du 12 septembre 2013, Besselink/Conseil, T‑331/11, EU:T:2013:419, point 38 et jurisprudence citée).

42      En l’espèce, nonobstant une rédaction peu rigoureuse et l’intitulé d’un des titres de la requête, il ressort à suffisance de celle-ci que la requérante n’a pas avancé de moyens tirés d’une violation des articles II.22 et II.38 de l’annexe II du contrat ARTreat. En effet, à l’appui de son allégation de l’engagement de la responsabilité contractuelle de la Commission, la requérante n’invoque, en substance, que deux moyens, tirés, respectivement, d’une violation du principe de protection de la confiance légitime et d’une violation du principe de proportionnalité. Il importe, cependant, d’observer que, dans le cadre de son moyen tiré de la violation du principe de proportionnalité, la requérante allègue une violation de l’article II.22 de l’annexe II du contrat ARTreat. En outre, par les deux moyens susvisés, la requérante conteste, en substance, la résiliation anticipée du contrat ARTreat. Dès lors que l’article II.38 du contrat ARTreat a trait aux conditions de résiliation dudit contrat, l’invocation de cette disposition, si elle ne constitue pas un moyen, fait partie du contexte des moyens en cause.

43      Partant, les moyens et griefs avancés dans la requête impliquant les articles II.22 et II.38 de l’annexe II du contrat ARTreat sont suffisamment clairs et précis et la fin de non-recevoir soulevée à cet égard par la Commission doit être rejetée.

2.     Sur l’admissibilité d’arguments concernant des projets autres que le projet ARTreat

44      La Commission estime que la requérante ne saurait se prévaloir valablement d’arguments concernant des projets autres que le projet ARTreat qui fait l’objet de la présente affaire. En outre, elle estime que les allégations concernant le projet J-WeB auraient déjà été avancées dans le cadre du recours dans l’affaire Τ-365/12, dont la requérante s’est désistée (ordonnance Synergy Hellas/Commission, point 22 supra, EU:T:2012:461). Elle estime qu’il serait contraire à une bonne administration de la justice et au principe d’économie de la procédure d’autoriser des parties à présenter à nouveau des demandes et des allégations auxquelles elles ont renoncé. La requérante aurait ainsi perdu tout intérêt légitime à formuler des griefs contre les conclusions de l’audit effectué dans le cadre du contrat J-WeB. La requérante conteste l’irrecevabilité de ces arguments.

45      Au vu de ces arguments, il convient de rappeler que la Commission a résilié le contrat ARTreat conclu avec la requérante en application de l’article II.38, paragraphe 1, sous c), dudit contrat en raison des irrégularités commises par la requérante dans l’exécution du contrat J-WeB. Dès lors que l’exécution inadéquate du contrat J-WeB est la cause de la résiliation du contrat ARTreat, la requérante doit pouvoir contester ladite exécution dans un recours en responsabilité contractuelle contre ladite décision de résiliation. Partant, la Commission allègue à tort que la requérante ne peut invoquer des arguments ayant trait au projet J-WeB dans le contexte d’un recours en responsabilité contractuelle fondée sur le contrat ARTreat.

46      Le désistement de la requérante dans l’affaire T-365/12, Synergy Hellas/Commission (voir point 22 supra), ayant pour objet le contrat J-WeB, n’affecte pas son droit, dans le cadre des présentes conclusions portant sur la responsabilité contractuelle de la Commission en raison de la résiliation du contrat ARTreat, de se prévaloir d’irrégularités ayant trait à l’exécution du contrat J-WeB.

47      En effet, en cas de désistement, le Tribunal ne se prononce ni sur la recevabilité ni sur le fond, mais prend acte de la volonté de la requérante de ne pas poursuivre la procédure juridictionnelle. L’ordonnance de désistement n’est pas revêtue de l’autorité de chose jugée. Il a ainsi déjà été jugé que lorsqu’une requérante se désiste de son recours qui était pendant, le litige résultant de celui-ci cesse d’exister et, partant, la situation de litispendance avec un autre recours disparaît. La Cour a précisé que l’intérêt d’éviter que des justiciables fassent usage de cette possibilité d’une manière contraire au principe d’économie de la procédure ne requiert pas qu’une situation de litispendance persiste même au regard d’un recours duquel la requérante s’est désistée, dès lors que cet intérêt est suffisamment protégé par la condamnation de la requérante aux dépens (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2011, Comitato « Venezia vuole vivere » e.a./Commission, C‑71/09 P, C‑73/09 P et C‑76/09 P, Rec, EU:C:2011:368, point 32).

3.     Sur la recevabilité de la seconde partie du premier chef de conclusions

48      Selon la Commission, les conclusions relatives au versement d’un montant de 343 828,88 euros doivent être rejetées comme irrecevables au motif que l’audit du projet ARTreat est toujours en cours. La Commission indique que les observations, les nouvelles déclarations de coûts et la volumineuse documentation supplémentaire présentées par la requérante à la suite de la communication du rapport d’audit provisoire pour le projet ARTreat sont en cours d’examen par les auditeurs compétents. La Commission en déduit que, à la date d’introduction du présent recours, son non-paiement du montant demandé de 343 828,88 euros est incertain et hypothétique (voir, en ce sens, ordonnance du 9 septembre 2013, Planet/Commission, T‑489/12, EU:T:2013:496, points 38 et 42). Or, la requérante ne saurait invoquer des situations futures et incertaines pour justifier un intérêt né et actuel à la solution du litige. En outre, il serait ainsi demandé au Tribunal de se prononcer sur une question inexistante, voire sur un acte inexistant. La requérante conteste cette appréciation et estime que la somme de 343 828,88 euros lui était due.

49      À cet égard, il convient de rappeler que toute personne introduisant une action en justice doit avoir un intérêt à agir né et actuel (arrêt du 30 septembre 2009, Lior/Commission et Commission/Lior, T‑192/01 et T‑245/04, EU:T:2009:365, point 247) et que cet intérêt légitime doit se comprendre comme un bénéfice que le recours, par son résultat, est susceptible de procurer à la requérante (voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2009, GlaxoSmithKline Services e.a./Commission e.a., C‑501/06 P, C‑513/06 P, C‑515/06 P et C‑519/06 P, Rec, EU:C:2009:610, point 23 et jurisprudence citée).

50      En l’espèce, les conclusions en cause visent à obtenir une condamnation de la Commission à un paiement en exécution du contrat ARTreat. La requérante conclut en effet à ce que le Tribunal ordonne à la Commission de lui verser la somme de 343 828,88 euros au titre des paiements dus dans le cadre du projet ARTreat, assortie d’intérêts.

51      Le fait que la Commission soit en train d’apprécier si les coûts avancés par la requérante sont éligibles et, partant, si le paiement de la somme de 343 828,88 euros est dû ne permet pas de constater une absence d’intérêt à agir né et actuel de la requérante au sens de la jurisprudence précitée. En effet, dès l’introduction du recours, il est manifeste que la requérante aurait un bénéfice à ce que son recours aboutisse. La requérante a donc un intérêt né et actuel à obtenir du Tribunal la condamnation de la Commission au paiement de la somme de 343 828,88 euros majorée d’intérêts en exécution du contrat ARTreat.

52      En outre, la Commission ne saurait invoquer un défaut d’intérêt à agir de la part de la requérante au motif que, au moment de l’introduction du recours, son non-paiement à la requérante du montant de 343 828,88 euros était incertain ou hypothétique. En effet, lors de l’introduction du recours, il était certain que la Commission n’avait pas payé le montant en cause.

53      Les questions de savoir si la Commission était tenue de payer le montant en cause avant l’introduction du recours, si elle pouvait en suspendre le paiement en raison de l’audit en cours et si le Tribunal devait suspendre la procédure juridictionnelle jusqu’à la fin de l’audit de la Commission ou, au contraire, s’il devait se prononcer directement sur l’éligibilité des coûts impliquent l’appréciation d’éléments ayant trait au fond du recours et non à sa recevabilité. Ainsi, il a déjà été jugé, dans le contexte d’un recours fondé sur une clause compromissoire, que l’existence du caractère certain, liquide et exigible d’une créance constitue, selon le droit applicable au litige, une condition du bien-fondé de la demande en paiement introduite par le titulaire de ladite créance (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2014, Isotis/Commission, T‑59/11, Rec, EU:T:2014:679, point 280).

54      La recevabilité des conclusions de la requérante visant à la condamnation de la Commission au paiement d’une somme d’argent n’est pas remise en cause par l’ordonnance Planet/Commission (point 48 supra, EU:T:2013:496) invoquée par la Commission. En effet, à la différence du cas d’espèce où l’action de la requérante vise à obtenir une prestation de la part de la Commission, l’action introduite par la requérante devant le Tribunal dans l’affaire Planet visait à obtenir une déclaration de la part du juge de l’Union l’autorisant à conserver des sommes déjà payées par la Commission en vertu des contrats en cause (voir arrêt du 26 février 2015, Planet/Commission, C-564/13 P, EU:C:2015:124, point 18).

55      Or, comme l’a indiqué l’avocat général Kokott dans ses conclusions dans l’affaire Planet/Commission (C‑564/13 P, Rec, EU:C:2014:2352), si, s’agissant des recours tendant à l’exécution d’une prestation qui visent à obtenir l’exécution de prétentions concrètes, l’intérêt à agir peut, en règle générale, être déduit sans difficulté du contexte de la demande lui-même, l’intérêt légitime du requérant à obtenir une déclaration abstraite par le juge, s’agissant de l’existence ou non d’une relation juridique ou d’un droit déterminé, nécessite, en règle générale, une motivation particulière. En effet, il n’appartient pas aux juridictions de l’Union d’établir des avis juridiques abstraits (conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Planet/Commission, précitées, EU:C:2014:2352, point 41).

56      Partant, il convient de rejeter la fin de non-recevoir soulevée à cet égard par la Commission.

C –  Sur le fond

1.     Considérations liminaires

57      L’article II.38, paragraphe 1, de l’annexe II du contrat ARTreat prévoit que :

« […] la Commission peut résilier la convention de subvention ou mettre fin à la participation d’un bénéficiaire dans les cas suivants : […]

c)      lorsque le bénéficiaire a délibérément ou par négligence commis une irrégularité dans l’exécution de toute convention de subvention conclue avec la Commission. »

58      La notion d’irrégularité est définie à l’article II.1, paragraphe 10, de l’annexe II du contrat ARTreat comme « toute violation d’une disposition du droit communautaire ou toute méconnaissance d’une obligation contractuelle résultant d’un acte ou d’une omission par un contractant qui a ou qui pourrait avoir pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés européennes ou à des budgets gérés par celles-ci par une dépense indue ».

59      La Commission a résilié le contrat conclu avec la requérante pour le projet ARTreat en application de l’article II.38 susvisé au motif que l’audit financier du contrat J-WeB effectué par la société Kypris & Associates en son nom a révélé qu’une grande partie des coûts déclarés par la requérante étaient inéligibles (voir rapport d’audit final du contrat J-WeB).

60      La requérante estime cette résiliation illégale, car la Commission aurait considéré à tort ses coûts pour le projet J-WeB inéligibles. Elle fonde sa demande en indemnité contractuelle sur l’allégation selon laquelle ladite résiliation violerait, d’une part, le principe de protection de la confiance légitime et, d’autre part, le principe de proportionnalité (voir point 42 ci-dessus). Selon la requérante, la résiliation illégale du contrat ARTreat lui a causé un dommage s’élevant à 343 828,88 euros. De cette somme, 94 112,93 euros seraient dus en raison du manque à gagner pour la période entre la date de la résiliation du contrat ARTreat et la fin du projet ARTreat et 249 715,95 euros seraient dus en raison des coûts encourus avant la résiliation du contrat ARTreat.

2.     Sur la violation du principe de protection de la confiance légitime

61      À l’appui de son moyen selon lequel la résiliation du contrat ARTreat violerait le principe de protection de la confiance légitime, premièrement, la requérante conteste la fiabilité du rapport d’audit final concernant le projet J-WeB. En effet, les rapports d’audit de la société Ernst & Young concernant le projet Metabo et ceux de la société BDO concernant le projet J-WeB confirmeraient la fiabilité du système de relevé de temps de la requérante et le caractère éligible de ses dépenses. Deuxièmement, la requérante considère que, afin de se prononcer sur la nécessité de protéger sa confiance légitime, le Tribunal doit tenir compte du fait que le rejet de ses déclarations de dépenses seize mois après l’audit effectué par la société Ernst & Young du contrat Metabo dépasse le délai raisonnable. Troisièmement, la requérante estime, ainsi que cela est démontré par le compte rendu de la réunion du 22 août 2012 et le courriel du 24 septembre 2012, qu’elle était parvenue à un accord avec la Commission à propos de la non-résiliation du contrat ARTreat. La Commission se serait cependant illégalement rétractée de cet accord lui causant ainsi un dommage matériel et immatériel important.

62      La Commission conteste les arguments de la requérante. Tout d’abord, compte tenu de sa relation clairement contractuelle avec la requérante, la Commission estime que celle-ci ne saurait lui reprocher une violation du principe de protection de la confiance légitime auquel elle est tenue en tant qu’autorité administrative à l’égard de ses administrés. En outre, elle considère que la requérante n’a soulevé aucun moyen concernant les manifestations de la protection de la confiance légitime dans le droit des contrats. Ensuite, les griefs fondés sur la violation du principe de bonne foi et sur l’abus de droit seraient irrecevables, parce que soulevés pour la première fois au stade de la réplique et trop vagues. Enfin et en tout état de cause, la Commission estime qu’elle n’a pas conféré une quelconque confiance légitime à la requérante et qu’elle n’a pas violé le délai raisonnable.

63      Au vu de ces arguments, il convient de rappeler que le traité FUE a instauré un système de voies de recours autonomes. L’article 272 TFUE prévoit que la Cour est compétente pour statuer en vertu d’une clause compromissoire contenue dans un contrat de droit public ou de droit privé passé par l’Union ou pour son compte.

64      La requérante a introduit une demande en indemnité contractuelle sur la base de la clause compromissoire contenue dans l’article 9 du contrat ARTreat qui prévoit que le Tribunal est seul compétent pour statuer, en première instance, sur tout litige entre la Commission et le bénéficiaire en ce qui concerne l’interprétation, l’application et la validité dudit contrat de subvention (voir point 38 ci-dessus).

65      Dans le contexte de cette demande en indemnité contractuelle, la requérante a allégué, pour les motifs repris au point 61 ci-dessus, une violation du principe de protection de la confiance légitime. La requérante précise que la confiance légitime invoquée est « examinée du point de vue du citoyen » et « exige la protection de la confiance de ce dernier dans une action étatique continue et fiable, sur laquelle il peut se baser pour entreprendre certaines actions et fonder certaines attentes ». De plus, selon la requérante, ce principe constitue une « limitation du droit de retrait des actes administratifs illégaux ».

66      À cet égard, il y a lieu de considérer que le principe de protection de la confiance légitime tel qu’il est invoqué par la requérante régit le rapport de subordination d’un administré à l’administration et de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, le droit de réclamer la protection de la confiance légitime à l’encontre de l’administration de l’Union s’étend à tout particulier qui se trouve dans une situation de laquelle il ressort que ladite administration, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître chez lui des espérances fondées. Constituent de telles assurances, quelle que soit la forme sous laquelle ils sont communiqués, des renseignements précis, inconditionnels et concordants qui émanent de sources autorisées et fiables. En revanche, nul ne peut invoquer une violation de ce principe en l’absence d’assurances précises que lui aurait fournies l’administration (voir arrêt du 19 mars 2003, Innova Privat-Akademie/Commission, T‑273/01, Rec, EU:T:2003:78, point 26 et jurisprudence citée). Ce principe relève donc du contrôle de légalité, en application de l’article 263 TFUE, que le Tribunal peut opérer sur des actes adoptés par les institutions.

67      Cependant, en l’espèce, le Tribunal est saisi en sa qualité de juge du contrat. Certes, si, en vertu de l’article 9 du contrat ARTreat (voir point 39 ci-dessus), ce contrat est notamment régi par le droit de l’Union, cette circonstance ne permet pas de modifier la compétence du Tribunal telle qu’elle est définie par la voie de recours choisie par la requérante. Dans sa demande en indemnité contractuelle, la requérante ne peut donc reprocher à la Commission que des violations du droit applicable au contrat, à savoir des violations des stipulations contractuelles, du règlement financier ou de principes du droit des contrats de l’Union et, à titre subsidiaire, des principes du droit des contrats belge (voir, en ce sens, arrêt du 3 juin 2009, Commission/Burie Onderzoek en Advies, T‑179/06, EU:T:2009:171, point 118).

68      Partant, dans le contexte de la demande en indemnité contractuelle formulée par la requérante, le Tribunal doit déclarer irrecevable un grief tiré de la violation par la Commission, lors de son exécution du contrat ARTreat, du principe de protection de la confiance légitime tel qu’il est défini au point 66 ci-dessus.

69      Toutefois, dans la réplique, la requérante précise que son grief tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime doit être considéré dans le cadre de l’exécution des conventions de bonne foi et de l’interdiction de l’application abusive des clauses contractuelles.

70      Contrairement à ce qu’allègue la Commission dans ses réponses aux questions écrites du Tribunal, cette allégation n’est pas irrecevable en raison de sa tardivité ou de son manque de précision. En effet, un moyen, ou un argument, qui constitue l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et qui présente un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable (voir arrêt du 14 mars 2007, Aluminium Silicon Mill Products/Conseil, T‑107/04, Rec, EU:T:2007:85, point 60 et jurisprudence citée). Or, en l’espèce, la requérante a invoqué dans sa requête l’application de l’article 1134 du code civil belge, applicable au contrat ARTreat en vertu de son article 9. Cet article du code civil belge consacre l’obligation pour les parties à une convention de l’exécuter de bonne foi. En outre, une forme de confiance légitime est susceptible d’être invoquée en droit des contrats dès lors qu’elle participe au respect de l’obligation pour les parties à un contrat de l’exécuter de bonne foi.

71      Par ailleurs, la Commission ne peut invoquer le manque de précision du grief de la requérante dès lors que, dans la duplique, elle a argumenté que le bénéficiaire d’un concours financier de l’Union qui ne respectait pas une condition essentielle à laquelle l’octroi du concours était subordonné ne pouvait se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime en vue de contester le refus de la Commission de lui octroyer le montant initialement convenu et que la requérante ne saurait invoquer le principe de protection de la confiance légitime dès lors qu’elle n’a pas respecté les obligations financières auxquelles est subordonnée la contribution financière.

72      Le fait qu’il ne peut être exclu qu’une forme de confiance légitime est susceptible d’être invoquée en droit des contrats dès lors qu’elle participe au respect de l’obligation pour les parties à un contrat de l’exécuter de bonne foi découle du fait que ce principe d’exécution de bonne foi des conventions fait obstacle aux exécutions du contrat qui constituent un abus de droit.

73      La Cour de cassation belge a ainsi jugé que le principe consacré par l’article 1134 du code civil belge, en vertu duquel les conventions doivent être exécutées de bonne foi, interdisait à une partie d’abuser d’un droit qui lui était reconnu par la convention. L’abus de droit consiste à exercer un droit d’une manière qui excède manifestement les limites de l’exercice normal de ce droit par une personne prudente et diligente (Cass 16 novembre 2007 AR nr C.06.0349.F.1). Or, il ne peut être exclu que constitue un abus de droit le fait pour le titulaire d’un droit de s’en prévaloir après avoir créé, chez l’autre partie, la confiance légitime qu’il ne l’exercera pas par un comportement objectivement incompatible avec l’exercice normal de ce droit.

74      Toutefois, en l’espèce, la Commission n’a nullement conféré une confiance légitime à la requérante qu’elle ne résilierait pas le contrat ARTreat en application de l’article II.38, paragraphe 1, sous c), de l’annexe II dudit contrat à la suite des résultats de l’audit du contrat J-WeB par la société Kypris & Associates révélant un grand nombre de coûts inadmissibles.

75      En effet, en ce que la requérante estime qu’elle a pu avoir une confiance légitime en ce que ses coûts pour le projet J-Web seraient éligibles, parce que la société Ernst & Young avait effectué un audit similaire à propos du projet Metabo et avait jugé que ses coûts étaient éligibles, il y a lieu d’observer que le rapport d’audit concernant le projet Metabo, dont se prévaut la requérante, n’était qu’un projet de rapport d’audit. Le caractère provisoire de ce rapport fait obstacle à la création d’une quelconque confiance légitime chez la requérante.

76      De plus, la requérante omet d’exposer avec suffisamment de précision pour quelle raison elle estime que l’évaluation des coûts du contrat Metabo était transposable aux coûts du projet J-WeB. Elle n’indique pas non plus sur quelle base elle considère que ce rapport d’audit concernant le projet Metabo a été accepté par la Commission. Ce projet de rapport d’audit indique que ledit rapport a été préparé à la demande de la Commission, mais que les positions exprimées sont celles de l’auditeur indépendant et ne représentent pas le point de vue officiel de la Commission. En outre, la Commission a indiqué dans la duplique que ce projet de rapport n’avait jamais été finalisé, n’ayant pas été accepté, et qu’il devait être remplacé par le rapport d’audit du projet ARTreat.

77      Ces conclusions ne sont pas remises en cause par la circonstance avancée par la requérante selon laquelle seize mois se sont écoulés entre l’adoption du projet de rapport d’audit par la société Ernst & Young portant sur l’exécution du contrat Metabo et le rejet d’un grand nombre de coûts à la suite de l’audit de l’exécution du contrat J-WeB. En effet, le délai écoulé entre ces deux évaluations est sans incidence sur l’exactitude ou non des appréciations contenues dans les audits en cause. L’écoulement dudit délai ne confère pas une plus grande crédibilité à l’appréciation contenue dans le premier rapport d’audit.

78      En ce que la requérante invoque le rapport d’audit du 13 juillet 2012 portant sur le projet J‑Web établi par la société BDO, force est de constater que ce rapport d’audit a été commandité par la requérante elle-même. L’adoption de ce rapport ne peut dès lors conférer une quelconque confiance légitime quant à l’inapplication par la Commission de l’article II.38, paragraphe 1, sous c), de l’annexe II du contrat ARTreat à la suite des résultats de l’audit du contrat J-Web effectué par la société Kypris & Associates.

79      En ce que la requérante allègue, en substance, que la Commission a généré auprès d’elle une confiance légitime qu’elle ne résilierait pas le contrat ARTreat compte tenu de sa prise de position lors de la réunion du 22 août 2012 et du contenu du courriel du 24 septembre 2012, force est de constater que ni le compte rendu de ladite réunion ni le contenu dudit courriel ne permettent d’étayer cette allégation.

80      En effet, il ressort du compte rendu de la réunion du 22 août 2012 qu’il a été convenu que « R4 [l’unité R4] will convene the redress II commitee to accept the continuation of DDS [la requérante] as a partner in the ARTreat and Metabo projects without any obligation ».

81      Bien que ce passage ne soit pas très bien rédigé, il ne peut pas en être déduit que la Commission a conféré à la requérante une quelconque confiance qu’elle ne résilierait pas le contrat ARTreat. En effet, comme cela est exposé dans la lettre du 29 juin 2012, à cette date elle avait pris la décision de résilier le contrat en question, mais elle pouvait revenir sur cette décision si la requérante saisissait le comité de recours et que ce comité faisait droit à la demande de la requérante. Le passage du compte rendu de la réunion du 22 août 2012 indique uniquement que l’unité R4 allait convoquer le comité de recours afin que celui-ci se prononce sur la poursuite de la participation de la requérante au projet ARTreat.

82      De plus, si le passage cité au point 80 ci-dessus doit être compris comme indiquant que l’unité R4 allait convoquer le comité de recours afin qu’il accepte, sans conditions, la poursuite de la participation de la requérante aux contrats ARTreat et Metabo, il implique nécessairement que le comité de recours n’avait pas déjà accepté que la requérante continuerait à participer auxdits contrats. Le pouvoir décisionnel propre dudit comité implique qu’après avoir été convoqué il décide s’il accepte ou non la poursuite de la participation de la requérante au contrat. Par ailleurs, l’unité R4 ne pouvant s’engager pour ledit comité, elle ne pouvait, avant même d’avoir saisi ledit comité, considérer que celui-ci accepterait la poursuite de la participation de la requérante au contrat ARTreat.

83      De plus, le fait que, après la réunion du 22 août 2012, un représentant de l’unité R4 a envoyé un mémorandum dans lequel il préconisait au comité de recours de recommander à l’ordonnateur compétent la réintégration de la requérante dans le projet ARTreat (voir point 20 ci-dessus) ne peut pas non plus constituer une prise de position de la part des institutions conférant à la requérante une quelconque confiance qu’elle continuera à participer à l’exécution du projet ARTreat. En effet, il ne s’agit que d’une recommandation d’un représentant de l’unité R4 auprès du comité de recours qui devait décider de la continuation de la participation de la requérante au projet ARTreat.

84      Ainsi, compte tenu de la portée de la phrase reprise au point 80 ci-dessus et de son contexte, la requérante ne pouvait avoir une quelconque confiance qu’elle continuerait à participer au contrat ARTreat à la suite de la réunion du 22 août 2012.

85      Enfin, en ce que la requérante invoque le courriel du 24 septembre 2012, il convient d’observer que ce courriel émane non pas de la Commission, mais du coordinateur de projet du contrat ARTreat et qu’il y est uniquement indiqué « after my meeting with the PO of ARTreat, Mrs Roesems, I think that the EC is favorable to accept the request of redress from DDS [; i]f a legal action between DDS and EC is pending, the advice of PO is to withdraw the suit, in order to facilitate the solution of this issue and DDS reintegration on the project [; s]he will work in your favour ». La circonstance que le coordinateur du projet considère qu’une des responsables du projet est favorable à la demande de la requérante et soutiendra la demande de la requérante ne suffit pas à démontrer que la Commission lui a conféré l’assurance légitime qu’elle ne résilierait pas le contrat ARTreat.

86      Partant, au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, il y a lieu de rejeter l’allégation de la requérante à l’appui de sa demande en indemnité contractuelle selon laquelle la Commission aurait violé le principe de protection de la confiance légitime.

3.     Sur la violation du principe de proportionnalité

a)     Sur le caractère proportionné de la résiliation

87      La requérante considère, en substance, que la résiliation du contrat ARTreat à la suite du rapport d’audit du contrat J-Web est disproportionnée. À l’appui de ce grief, premièrement, elle allègue que le rapport d’audit concernant le projet J-WeB constate erronément des irrégularités financières, comme le démontrent les rapports d’audit effectués par les sociétés BDO et Ernst & Young, et que le rapport d’audit concernant le projet J-WeB est le résultat d’une appréciation arbitraire en raison du manque d’impartialité de la société Kypris & Associates. Deuxièmement, la requérante estime que la résiliation en cause était contraire à ce qu’elle avait convenu avec la Commission lors de la réunion du 22 août 2012. Troisièmement, elle allègue la violation des délais prévus, d’une part, au point 5.3 de l’annexe de la décision 2011/161, pour le réexamen de la résiliation du contrat ARTreat par le comité de recours, et, d’autre part, à l’article II.22 de l’annexe II du contrat ARTreat, pour l’envoi du rapport d’audit final. Quatrièmement, la requérante estime que la résiliation des contrats ARTreat et Metabo est illégale, parce qu’elle a eu lieu avant tant l’expiration du délai pour l’introduction du recours devant le comité de recours que la décision de ce comité. La Commission conteste ces allégations et considère que ladite résiliation était proportionnée.

88      Au vu de ces griefs, il convient de rappeler que le principe de proportionnalité constitue un principe général de droit de l’Union, qui est consacré par l’article 5, paragraphe 4, TUE. Ce principe exige que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire pour atteindre le but recherché (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, Rec, EU:T:2013:431, point 98 et jurisprudence citée).

89      Ce principe a vocation à régir tous les modes d’action de l’Union, qu’ils soient ou non contractuels (arrêt du 25 mai 2004, Distilleria Palma/Commission, T‑154/01, Rec, EU:T:2004:154, point 44). En effet, dans le contexte de l’exécution d’obligations contractuelles, le respect de ce principe participe à l’obligation plus générale des parties à un contrat de l’exécuter de bonne foi. En vertu du droit belge applicable au contrat ARTreat (voir point 39 ci-dessus), l’obligation d’exécuter de bonne foi les conventions interdit à une partie d’exercer un droit d’une manière qui excède manifestement les limites de l’exercice normal de ce droit par une personne prudente et diligente (voir point 73 ci-dessus).

90      En l’espèce, la Commission a, en application de l’article II.38, paragraphe 1, sous c), de l’annexe II du contrat ARTreat, résilié unilatéralement la participation de la requérante à ce contrat à la suite du rapport d’audit final du contrat J-WeB. La Commission a considéré que le rapport d’audit final concernant le projet J-WeB démontrait que la requérante avait commis une irrégularité au sens de l’article II.1 de l’annexe II du contrat ARTreat qui lui permettait de résilier unilatéralement ledit contrat en application de l’article II.38, paragraphe 1, sous c), de l’annexe II dudit contrat.

91      Afin d’apprécier si la Commission a fait une application proportionnée de l’article II.38, paragraphe 1, sous c), de l’annexe II du contrat ARTreat, il importe d’observer que, dans le rapport d’audit final concernant le contrat conclu par la Commission avec la requérante pour la subvention du projet J-WeB, les auditeurs de la société Kypris & Associates ont rejeté tous les coûts de personnel déclarés en les considérant non éligibles. Ils sont arrivés à cette conclusion en tenant compte des constats suivants :

–        le manque de fiabilité du système d’enregistrement du temps de travail de la requérante ;

–        l’absence de preuves suffisantes et appropriées permettant de confirmer le nombre d’heures et la contribution du personnel déclaré par la requérante à l’exécution du projet, et

–        l’existence d’un contrat de sous-traitance conclu entre la requérante et une société tierce qui a donné lieu à des factures faisant référence au contrat J-WeB, qui n’a pas été notifié à la Commission ni approuvé par celle-ci et qui soulève des doutes quant à l’entité qui a réellement exécuté le projet J-WeB.

92      Il s’ensuit que la déclaration de ces frais par la requérante en vue de leur remboursement par la Commission n’était pas fiable et que la requérante a manqué à ses obligations contractuelles de ne déclarer que des frais éligibles. Ces manquements constituent des irrégularités au sens de l’article II.1, paragraphe 10, de l’annexe II du contrat ARTreat. En effet, ils ont ou pourraient avoir pour effet de porter préjudice au budget général de l’Union. Ils justifient, en application de l’article II.38, paragraphe 1, sous c), de l’annexe II du contrat ARTreat, la résiliation dudit contrat sans que cette résiliation puisse être considérée comme disproportionnée ou constitutive d’un abus de droit. La légalité des causes de résiliation prévues par l’article II.38, paragraphe 1, sous c), de l’annexe II du contrat ARTreat n’est pas remise en question par la requérante. En outre, les irrégularités établies par l’audit sont suffisamment graves, de sorte que la résiliation du contrat ARTreat ne constitue pas un exercice du droit à la résiliation unilatérale qui excède manifestement les limites de l’exercice normal de ce droit par une personne prudente et diligente.

93      Aucun argument avancé par la requérante ne remet en cause cette conclusion.

94      S’agissant du rapport d’audit de la société Ernst & Young concernant le projet Metabo, tout d’abord, il convient d’observer que, indépendamment de son objet, son caractère provisoire fait obstacle à la remise en cause du rapport d’audit final concernant le projet J-WeB.

95      Ensuite, il y a lieu d’observer que le rapport d’audit concernant le projet Metabo indique que, à l’exception d’un directeur de la requérante, l’exécution du projet n’impliquait pas le personnel de la requérante, mais bien des consultants externes. Le système d’enregistrement du temps de travail de la requérante pour la majorité de son personnel n’a, dès lors, pas pu faire l’objet de l’audit. Seule la rémunération d’un de ses directeurs a pu en faire l’objet. Or, à cet égard, le rapport d’audit indique que cette rémunération n’a pas été correctement reprise dans le rapport d’audit et est donc inéligible. Partant, ce rapport d’audit ne valide pas la régularité du système d’enregistrement des coûts du personnel de la requérante.

96      Enfin et en tout état de cause, dans le rapport d’audit concernant le projet J-WeB, le système d’enregistrement du temps de travail a été considéré comme non fiable pour des raisons spécifiques à l’exécution du projet en cause. Ainsi, l’audit a révélé que la déclaration de coûts de personnel de la requérante pour le projet J-WeB comportait les coûts d’une personne qui ne travaillait pas encore pour la requérante et ceux d’une autre personne qui était en congé de maternité et qui, légalement, ne pouvait pas travailler. En outre, le même audit a révélé l’existence d’un contrat de sous-traitance non déclaré et non approuvé par la Commission qui laissait supposer que le projet J-WeB avait été exécuté par une autre entreprise que la requérante et qui créait ainsi de sérieux doutes quant à l’importance du travail effectivement réalisé par le personnel de la requérante. Ces éléments propres à l’exécution du contrat J-WeB ne peuvent être remis en cause par l’audit du projet Metabo.

97      S’agissant du rapport d’audit de la société BDO concernant le projet J-WeB, il y a lieu d’observer que les auditeurs de la société BDO, contrairement aux auditeurs de la société Kypris & Associates, n’ont pas relevé que chaque membre du personnel de la requérante enregistrait pour chaque mois le même nombre d’heures pour chaque projet, même pendant les mois de vacances de juillet et d’août. En outre, les auditeurs de la société BDO n’ont apparemment pas identifié l’accord de sous-traitance conclu par la requérante avec une société tierce et n’ont avancé aucun élément permettant de remettre en cause les conclusions auxquelles sont parvenus les auditeurs de la société Kypris & Associates à cet égard. De plus, même les auditeurs de la société BDO admettent que, dans l’exécution du contrat J-WeB, la requérante a considéré comme coûts éligibles les salaires de deux personnes ayant prétendument travaillé sur le projet J-WeB, alors qu’elles étaient, respectivement, en congé de maternité et pas employée par la requérante. Enfin, il ressort du compte rendu de la réunion du 22 août 2012 que la requérante a admis que des erreurs avaient été commises en sous-traitant la mise en œuvre des projets et en assignant des personnes de son personnel sans préciser leur contribution au projet. Partant, les conclusions du rapport d’audit commandité par la requérante auprès de la société BDO ne suffisent pas pour remettre en cause les conclusions du rapport d’audit final de la société Kypris & Associates pour le projet J-WeB.

98      S’agissant du prétendu accord conclu entre les parties lors de la réunion du 22 août 2012, le Tribunal estime, pour les motifs repris aux points 81 et suivants ci-dessus, que le compte rendu de ladite réunion ne permet pas de constater qu’il y a eu un accord entre les parties selon lequel la Commission ne résilierait pas le contrat ARTreat à la suite du rapport d’audit concernant le projet J-WeB. La Commission s’est uniquement engagée à convoquer le comité de recours afin qu’il se prononce sur la poursuite de la participation de la requérante au contrat ARTreat.

99      Par ailleurs, le dossier ne contient pas de preuve d’un accord entre les parties en vertu duquel la Commission accepterait 60 % des dépenses déclarées pour le projet ARTreat, comme l’allègue la requérante. Le Tribunal observe, en outre, qu’un accord, à la suite d’un audit, qui aurait pour résultat l’acceptation par la Commission de dépenses déclarées sans que leur éligibilité soit prouvée constituerait un accord illégal, voire une fraude. En effet, l’obligation de la Commission de veiller à la bonne gestion financière des ressources de l’Union, conformément à l’article 317 TFUE, et la nécessité de lutter contre la fraude aux financements de l’Union confèrent une importance fondamentale aux engagements relatifs aux conditions financières (voir, par analogie, arrêt du 17 juin 2010, CEVA/Commission, T‑428/07 et T‑455/07, Rec, EU:T:2010:240, point 126 et jurisprudence citée). En l’occurrence, l’obligation de la requérante de respecter ses obligations, notamment en matière de traçabilité des coûts et de production des documents justificatifs concernant les coûts supportés, est essentielle pour vérifier si les contributions en cause ont été utilisées en conformité avec les stipulations des contrats qui visent à garantir la bonne gestion financière des ressources de l’Union. En outre et en tout état de cause, il convient d’observer qu’un tel accord serait sans incidence sur la validité des résultats de l’audit du projet J-WeB et sur la résiliation du contrat ARTreat en raison de ces résultats.

100    En ce que la requérante estime, en substance, qu’il avait été convenu avec la Commission que la contrepartie de son désistement dans l’affaire T-365/12 serait l’absence de résiliation du contrat ARTreat, force est de constater que le compte rendu de la réunion du 22 août 2012 ne donne aucune indication en ce sens. Le courriel du 24 septembre 2012 (voir point 85 ci-dessus), rédigé par le coordinateur du projet, ne suffit pas à démontrer un tel accord. En effet, dans ce courriel, le coordinateur de projet ne fait référence qu’à la position d’un représentant de la Commission qui avait conseillé à la requérante de retirer son recours afin de faciliter sa réintégration dans le projet. Il ne ressort pas de ce courriel que la Commission s’était engagée à ne pas résilier le contrat ARTreat à l’égard de la requérante si celle-ci retirait son recours.

101    Enfin, en ce que la requérante allègue que les parties se seraient accordées sur l’absence d’indemnité forfaitaire, force est de constater que le dossier ne contient pas de preuve d’un tel accord (voir points 81 et suivants ci-dessus). En tout état de cause, cet accord serait sans pertinence pour la question de savoir si, en raison des résultats de l’audit du projet J-WeB, la résiliation du contrat ARTreat était proportionnée.

102    La requérante considère également que la méconnaissance des délais applicables à la procédure de réexamen par le comité de recours et à la procédure d’audit rend la résiliation du contrat ARTreat disproportionnée.

103    En premier lieu, la requérante estime que, lors du traitement de sa demande de réexamen par le comité de recours, la Commission a méconnu le délai visé par le point 5.3 de l’annexe de la décision 2011/161. De plus, la requérante estime que ledit point a été violé en ce que la Commission aurait démesurément tardé à lui envoyer la réponse finale du comité de recours.

104    À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de ladite disposition, une réponse initiale est envoyée aux plaignants dans les trois semaines suivant le délai applicable pour le dépôt du recours devant le comité de recours. La réponse initiale indique quand la réponse définitive sera fournie par le comité de recours.

105    En l’espèce, la requérante a déposé sa demande de réexamen le 17 juillet 2012. Par lettre du 31 juillet 2012, la Commission lui a répondu que le comité de recours serait convoqué rapidement afin de traiter son recours. Elle a précisé que, compte tenu de la période des vacances, cela aurait lieu au cours du mois de septembre. Au vu de cette réponse, il ne peut être reproché à la Commission de ne pas avoir respecté le délai de trois semaines pour le dépôt de la réponse initiale. En outre, la Commission a précisé que le comité de recours traiterait son recours en septembre, de sorte qu’elle a indiqué quand la réponse définitive serait fournie. La violation alléguée du point 5.3 de l’annexe de la décision 2011/161 n’est donc pas démontrée.

106    Par ailleurs, en ce que la requérante allègue que la Commission aurait démesurément tardé à lui envoyer la réponse finale du comité de recours, il y a lieu d’observer que ce dernier s’est réuni le 10 octobre 2012 pour arrêter sa décision. Il ne ressort pas des pièces du dossier que cette réponse ait été communiquée à la requérante avant le 11 décembre 2012. Toutefois, ce délai ne peut affecter le caractère proportionné de la résiliation du contrat ARTreat. En effet, ainsi qu’il ressort de la lettre du 11 décembre 2012, la résiliation du contrat ARTreat conclu avec la requérante n’a pris effet qu’au jour de la prise de connaissance de ladite lettre.

107    Enfin, le Tribunal estime, en tout état de cause, qu’une méconnaissance des délais susvisés ne pourrait remettre en cause la proportionnalité de la résiliation du contrat ARTreat. En effet, d’une part, la résiliation dudit contrat avant la saisine dudit comité n’était pas disproportionnée compte tenu des irrégularités constatées par le rapport d’audit concernant le projet J-WeB. D’autre part, la résiliation du contrat ARTreat ne pouvait être considérée comme définitive tant que le comité n’avait pas confirmé ladite résiliation. Un retard dans les réponses à fournir par le comité de recours à la suite de sa saisine par la requérante n’affecte la proportionnalité ni de la décision de résiliation initiale, ni de celle dudit comité.

108    En second lieu, la requérante estime que l’article II.22, paragraphe 5, de l’annexe II du contrat ARTreat a été violé dès lors que le rapport d’audit final pour le projet ARTreat ne lui a pas été envoyé dans le délai imparti.

109    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, en vertu de la disposition susvisée, le rapport d’audit final est envoyé au bénéficiaire concerné dans les deux mois qui suivent l’expiration du délai dont dispose ledit bénéficiaire pour formuler ses observations sur le rapport provisoire.

110    Cependant, un retard dans l’adoption du rapport d’audit concernant le projet ARTreat ne pourrait remettre en cause la proportionnalité de la résiliation dudit contrat au vu des irrégularités constatées par le rapport d’audit final concernant le projet J-WeB. En effet, le fait que la Commission n’a pas respecté le délai pour la remise d’un rapport d’audit final pour le projet ARTreat en raison de la présentation d’un nombre important d’explications et d’éléments additionnels par la requérante n’affecte pas l’application de l’article II.38, paragraphe 1, sous c), de l’annexe II du contrat ARTreat au vu des résultats du rapport d’audit final du projet J-WeB.

111    Dans ses griefs, ayant trait au caractère disproportionné de la résiliation du contrat ARTreat, la requérante allègue également le non-respect de certains délais dans les procédures de réexamen concernant le contrat Metabo. Toutefois, étant donné les conclusions formulées par la requérante dans le présent recours, force est de constater que la résiliation du contrat Metabo ne fait pas l’objet du présent recours. Partant, les griefs formulés par la requérante sur le contrat Metabo sont inopérants.

112    La requérante considère également que la résiliation du contrat ARTreat est illégale, parce qu’elle a eu lieu avant l’expiration du délai de recours devant le comité de recours et l’examen par ce dernier.

113    À cet égard, il convient d’observer que, dans la lettre du 29 juin 2012, la Commission a indiqué que le contrat ARTreat n’était résilié à cette date qu’à condition que la requérante n’introduise pas un recours devant le comité de recours. En cas de recours devant ledit comité, la convention n’est résiliée que si, à la suite de l’examen par ledit comité, cette résiliation est confirmée. Dans ce dernier cas, la résiliation du contrat ne prend effet qu’à la date de réception de la lettre confirmant la résiliation. La requérante a saisi le comité de recours qui, le 10 octobre 2012, a rejeté le recours de la requérante. Le 11 décembre 2012, la Commission a informé la requérante de ce rejet et a confirmé la résiliation du contrat ARTreat. Ledit contrat a ainsi été résilié à cette date. Partant, le grief de la requérante doit être rejeté comme non fondé.

114    La requérante estime également que la résiliation du contrat ARTreat est disproportionnée, parce qu’elle se fonde sur un rapport d’audit qui n’est pas fiable en raison de l’absence d’impartialité de ses auteurs.

115    Les différents arguments avancés à l’appui de ce grief doivent cependant être rejetés. S’agissant de l’absence de participation de certains auditeurs à l’audit, il convient d’observer que le rapport d’audit concernant le projet J-WeB reprend sous l’intitulé « personnes présentes » pour la société Kypris & Associates les noms de trois personnes. La requérante déduit à tort du fait que l’une de ces personnes n’était pas présente lors de l’audit sur place qu’elle n’était aucunement présente lors de l’audit. En effet, l’activité d’audit comprend également le contrôle des données recueillies et la rédaction du rapport d’audit qui ne doivent pas nécessairement être effectués sur place. En tout état de cause, même s’il devait être admis qu’un des auditeurs mentionnés dans ledit rapport d’audit n’avait pas participé à cet audit, cette circonstance ne suffirait pas à démontrer un manque d’impartialité des auditeurs ayant effectué l’audit.

116    S’agissant de la déclaration sous serment d’un cadre de la requérante selon laquelle M. B. de la société Kypris & Associates « ne disposait pas du discernement nécessaire » et a fait preuve de « forts préjugés à l’égard des employés et des représentants de [la requérante] », force est de constater que la requérante ne la produit pas. En outre, une telle déclaration, sans aucune autre précision, ne suffirait pas pour prouver un manque d’impartialité des auditeurs de la société Kypris & Associates lors de leur audit du projet J-WeB.

117    Par ailleurs, la requérante invoque la lettre du 27 juin 2013 que lui a fait parvenir la société Kypris & Associates afin de démontrer que cette dernière a manqué d’impartialité et a créé une situation de conflit d’intérêts en promouvant auprès d’elle ses services d’audit et de consultance. Cette lettre ne démontre toutefois pas un manque d’impartialité ou un conflit d’intérêts s’agissant des auditeurs chargés de l’audit concernant le projet J-WeB. En effet, dans ladite lettre, la société Kypris & Associates promeut uniquement ses services d’audit et de consultance, et ce de façon générique. Une telle promotion ne démontre pas un conflit d’intérêts ou un manque d’impartialité de la part de la société Kypris & Associates lors de son audit du projet J-WeB.

118    Enfin, dès lors qu’il n’est pas démontré qu’il y a eu un accord valablement conclu entre les parties afin de revenir sur la résiliation anticipée du contrat ARTreat à la suite de l’audit du projet J-WeB (voir point 98 ci-dessus), la demande de la requérante visant au paiement d’une somme de 94 112,93 euros doit être rejetée. En effet, selon la requérante, cette somme correspond à la somme qui lui est due en vertu du contrat ARTreat pour la période entre la date de la résiliation anticipée de son contrat ARTreat et la fin du projet ARTreat. La validité de la résiliation anticipée du contrat ARTreat de la requérante rend ladite demande de paiement non fondée. Par ailleurs, comme l’indique, à juste titre, la Commission, il ressort de l’article II.39, paragraphes 1 et 3, de l’annexe II du contrat ARTreat que, en cas de résiliation, toute contribution financière de l’Union est limitée aux coûts éligibles encourus et acceptés à la date effective de la résiliation et aux engagements légitimes antérieurs à cette date qui ne peuvent être annulés. Cette disposition prévoit également que, lorsque l’article II.38, paragraphe 1, sous c), de ladite annexe s’applique, la Commission peut exiger le remboursement intégral ou partiel de la contribution financière. En vertu de ces dispositions, il ne peut être fait droit à la demande de la requérante tant qu’elle ne prouve pas que les coûts allégués sont éligibles. Or, la requérante n’a pas apporté une telle preuve devant le Tribunal.

b)     Sur la demande de paiement de la somme de 249 715,95 euros

119    Dans le contexte de son grief tiré de la violation du principe de proportionnalité, la requérante estime qu’une somme de 249 715,95 euros lui est due en application du contrat ARTreat pour des coûts encourus avant la résiliation du contrat, et ce nonobstant le fait que ces coûts font l’objet d’un audit.

120    Ainsi que cela est exposé au point 118 ci-dessus, l’article II.39, paragraphe 1, de l’annexe II du contrat ARTreat dispose que, en cas de résiliation, les contributions de la Commission sont limitées aux coûts éligibles qui sont encourus et acceptés jusqu’à la date effective de résiliation.

121    La requérante ne peut donc réclamer la somme de 249 715,95 euros à la suite de la résiliation anticipée du contrat que pour autant qu’elle démontre que cette somme correspond à des coûts éligibles qui sont encourus et acceptés jusqu’à la date effective de résiliation du contrat.

122    En l’espèce, la requérante n’apporte aucun élément de preuve ou argument spécifique à cet égard. Cette appréciation n’est pas remise en cause par le fait que les coûts allégués par la requérante pour le contrat ARTreat ont fait l’objet d’un rapport d’audit provisoire de la part de la Commission qui a été contesté par la requérante ou que le rapport d’audit final de la Commission pour ce contrat n’a pas encore été adopté en raison d’un grand nombre de documents produits par la requérante et que les auditeurs de la Commission sont en train d’analyser. En effet, ces éléments ne permettent pas de démontrer pour quelle raison la somme de 249 715,95 euros correspondrait à des coûts éligibles au sens du contrat ARTreat. Partant, il convient de rejeter la demande de la requérante de voir la Commission condamnée au paiement de cette somme.

123    Au vu de l’ensemble des appréciations qui précèdent, la demande en indemnité contractuelle de la requérante doit être rejetée dans son intégralité.

II –  Sur la demande en indemnité extracontractuelle

A –  Considérations liminaires

124    Selon une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité extracontractuelle de l’Union, au sens de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, pour comportement illicite de ses organes est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché à l’institution, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (voir, en ce sens, arrêts du 29 septembre 1982, Oleifici Mediterranei/CEE, 26/81, Rec, EU:C:1982:318, point 16 ; du 9 novembre 2006, Agraz e.a./Commission, C‑243/05 P, Rec, EU:C:2006:708, point 26, et du 2 mars 2010, Arcelor/Parlement et Conseil, T‑16/04, Rec, EU:T:2010:54, point 139 et jurisprudence citée). Étant donné le caractère cumulatif de ces conditions, le recours doit être rejeté dans son ensemble lorsqu’une seule de ces conditions n’est pas remplie (voir arrêt Arcelor/Parlement et Conseil, précité, EU:T:2010:54, point 140 et jurisprudence citée).

125    À l’appui de sa demande en indemnité extracontractuelle, la requérante invoque les illégalités suivantes.

126    Premièrement, la requérante estime que, dans sa lettre du 29 juin 2012, la Commission a illégalement divulgué aux coordinateurs des projets ARTreat et Metabo son exclusion des projets J-WeB, ARTreat et Metabo à la suite du rapport d’audit final concernant le projet J-WeB. Cette divulgation violerait les règles relatives à la protection du secret professionnel prévues à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, à l’article 339 TFUE, aux articles II.2, paragraphe 8, de l’annexe II, respectivement, des contrats ARTreat et Metabo, à l’article 8, paragraphe 1, du règlement (Euratom, CE) n° 2185/96 du Conseil, du 11 novembre 1996, relatif aux contrôles et vérifications sur place effectués par la Commission pour la protection des intérêts financiers des Communautés européennes contre les fraudes et autres irrégularités (JO L 292, p. 2), ainsi qu’aux articles 7 et 10 du code européen de bonne conduite administrative adopté à la suite de la résolution du Parlement européen du 6 septembre 2001 (JO C 72, p. 331, ci-après le « code de bonne conduite »). En outre, la requérante estime que cette divulgation est illégale, parce qu’elle a été faite avant qu’elle n’ait pu exercer son droit de formuler des observations sur la décision de la Commission concernant le projet J-WeB, ce qui a nui de manière irréparable à son image et à sa réputation.

127    Deuxièmement, la requérante estime que son inscription par la Commission dans le système d’alerte précoce (SAP) avant même l’existence d’une décision définitive concernant le contrat J-WeB viole le principe de proportionnalité et le code de bonne conduite. De plus, l’absence d’information de la requérante par la Commission de son inscription dans le SAP constituerait une violation de l’article 8 de la décision 2008/969/CE, Euratom de la Commission, du 16 décembre 2008, relative au système d’alerte précoce à l’usage des ordonnateurs de la Commission et des agences exécutives (JO L 344, p. 125).

128    Troisièmement, la requérante considère que la Commission a violé l’accord qu’elles avaient conclu à la suite des résultats de l’audit du projet J-WeB. Elle rappelle le contenu de cet accord et invoque à l’appui de l’existence de cet accord le compte rendu de la réunion du 22 août 2012. Par son non-respect dudit accord, la Commission aurait violé les règles de bonne foi et de loyauté, abusé de son pouvoir et opéré une discrimination en violation du code de bonne conduite et violerait les principes de proportionnalité et de continuité administrative.

129    Quatrièmement, la requérante estime que l’absence d’acceptation par la Commission de ses observations sur l’audit provisoire des contrats ARTreat et Metabo ainsi que l’absence d’adoption d’un rapport d’audit définitif constituent des violations du principe du délai raisonnable consacré à l’article 17, paragraphe 1, du code de bonne conduite et des articles II.22, paragraphe 5, de l’annexe II des contrats ARTreat et Metabo.

130    La Commission estime que les allégations de la requérante dans sa demande en indemnité extracontractuelle sont pour partie irrecevables et, en tout état de cause, non fondées.

B –  Sur la recevabilité de la demande en indemnité extracontractuelle

1.     Sur l’intérêt à agir

131    La Commission estime, en substance, que la requérante n’a pas d’intérêt à agir en responsabilité extracontractuelle, parce que les allégations reprises dans la demande en responsabilité extracontractuelle du présent recours sont identiques à celles qu’elle a invoquées dans son recours introduit dans l’affaire T-365/12 dont elle s’est désistée (voir point 22 ci-dessus). En outre, cette demande constituerait un abus de procédure. Partant, elle devrait être rejetée comme irrecevable.

132    Cette objection doit être rejetée. En effet, la Commission ne démontre pas que les allégations avancées dans la présente demande en indemnité extracontractuelle sont « absolument identiques » à celles qui avaient été invoquées dans le recours de l’affaire T-365/12. En outre, il y a lieu de rappeler que le seul fait que la requérante se soit désistée d’un recours en responsabilité contractuelle ou extracontractuelle ne suffit pas à démontrer une absence d’intérêt à agir pour introduire un nouveau recours en responsabilité contractuelle ou extracontractuelle. Un tel agissement ne constitue pas non plus un abus de procédure, dès lors que, d’une part, en cas de désistement, le Tribunal ne se prononce ni sur la recevabilité ni sur le fond dudit recours, de sorte que l’ordonnance de désistement n’a pas d’autorité de la chose jugée, et, d’autre part, la requérante qui se désiste est condamnée aux dépens (voir, à ce propos, la jurisprudence citée au point 47 ci-dessus).

2.     Sur la précision des griefs invoqués par la requérante à l’appui de sa demande en indemnité extracontractuelle

133    La Commission allègue que les griefs de la requérante concernant l’absence d’information quant à l’inscription dans le SAP et la violation alléguée du principe de « bonne administration » en raison du fait que la Commission aurait invité la requérante à se désister dans l’affaire T-365/12 ne satisfont pas à l’exigence de précision requise.

134    En vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour, lu conjointement avec l’article 53, premier alinéa, dudit statut et l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du 2 mai 1991, toute requête doit contenir l’indication de l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels il se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même. Plus particulièrement, pour satisfaire à ces exigences, une requête visant à la réparation de dommages prétendument causés par une institution de l’Union doit contenir les éléments qui permettent d’identifier le comportement que le requérant reproche à l’institution, les raisons pour lesquelles il estime qu’un lien de causalité existe entre le comportement et le préjudice qu’il prétend avoir subi, ainsi que le caractère et l’étendue de ce préjudice (voir arrêt Arcelor/Parlement et Conseil, point 124 supra, EU:T:2010:54, point 132 et jurisprudence citée).

135    Contrairement à ce qu’indique la Commission, la requérante n’allègue pas dans ses écritures une violation d’un principe de « bonne administration » en raison du fait que la Commission aurait invité la requérante à se désister dans l’affaire T‑365/12. Partant, l’objection de la Commission est inopérante.

136    En ce qui concerne l’absence d’information quant à l’inscription dans le SAP, force est de constater que le grief de la requérante est suffisamment précis, dès lors qu’elle reproche à la Commission de l’avoir inscrite dans le SAP sans l’en avoir informée et avant que la Commission n’ait pris une décision définitive la concernant en ce qui concerne le contrat J-WeB.

137    Partant, il convient de rejeter les objections de la Commission fondées sur l’absence de précision de ces griefs invoqués à l’appui de la demande en indemnité extracontractuelle de la requérante.

138    En revanche, en ce que la requérante allègue une violation de l’obligation de confidentialité en raison de la divulgation par la Commission aux coordinateurs des projets ARTreat et Metabo de son exclusion du projet J-WeB, avant que la décision de la Commission concernant le projet J-WeB soit devenue définitive, il y a lieu de rejeter ce grief comme irrecevable faute de précision. En effet, en formulant ce grief, la requérante a omis d’exposer quand elle aurait été exclue par la Commission du projet J-WeB, quelle décision la Commission aurait prise concernant le projet J-WeB qui ne serait pas définitive, quand et comment la Commission aurait divulgué son exclusion du projet J-WeB aux coordinateurs des projets ARTreat et Metabo et, enfin, pour quelle raison cette divulgation violerait l’obligation de confidentialité de la Commission.

C –  Sur le fond

1.     Sur les violations du code de bonne conduite

139    En ce que la requérante allègue des violations des dispositions du code de bonne conduite, il convient d’observer que ce code n’est pas un texte juridiquement contraignant, mais une résolution du Parlement apportant des modifications à un projet qui lui avait été soumis par le Médiateur européen et invitant la Commission à présenter une proposition législative à cet égard (voir, en ce sens, arrêt du 11 mai 2010, PC-Ware Information Technologies/Commission, T‑121/08, Rec, EU:T:2010:183, point 90 et jurisprudence citée). Le Médiateur a confirmé dans l’introduction dudit code que celui-ci n’était pas un instrument juridiquement contraignant. Ainsi, en adoptant le code de bonne conduite, le Médiateur n’a pas eu pour objectif d’édicter des règles de droit conférant des droits à des particuliers. Par conséquent, leur non-respect ne suffit pas à constater une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers pouvant engager la responsabilité de l’Union consacrée par la jurisprudence (arrêts du 4 juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C‑352/98 P, Rec, EU:C:2000:361, points 42 et 43, et du 9 septembre 2008, FIAMM e.a./Conseil et Commission, C‑120/06 P et C‑121/06 P, Rec, EU:C:2008:476, point 173).

140    Il s’ensuit que la requérante allègue à tort des violations des règles du code de bonne conduite à l’appui de sa demande en indemnité extracontractuelle.

2.     Sur les violations de l’obligation de confidentialité et de l’accord mentionné dans le compte rendu du 22 août 2012, sur l’absence d’acceptation des observations sur l’audit provisoire des contrats ARTreat et Metabo, sur l’absence d’adoption d’un rapport d’audit définitif et sur la violation du principe de « bonne administration »

141    La Commission estime que l’objet de la demande en indemnité extracontractuelle de la requérante concerne, en l’espèce, un préjudice contractuel. Elle en déduit que les allégations de la requérante à l’appui de sa demande en indemnité extracontractuelle devront être appréciées à la lumière des clauses contractuelles.

142    À cet égard, il convient de rappeler que le traité FUE établit un système complet de voies de recours. Chacune de ces voies de recours est autonome, remplit une fonction particulière dans le cadre du système des voies de recours et est subordonnée à des conditions d’exercice conçues en vue de son objet spécifique (voir, en ce sens, arrêts du 23 mars 2004, Médiateur/Lamberts, C‑234/02 P, Rec, EU:C:2004:174, point 59, et du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C‑402/05 P et C‑415/05 P, Rec, EU:C:2008:461, point 281).

143    Le recours en responsabilité extracontractuelle consacré à l’article 268 TFUE a pour objet la demande en réparation d’un préjudice découlant d’un acte ou d’un comportement illicite imputable à une institution ou à un organe de l’Union (arrêt Médiateur/Lamberts, point 142 supra, EU:C:2004:174, point 59). Comme cela est rappelé au point 124 ci-dessus, l’engagement de la responsabilité extracontractuelle de l’Union est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions relatives à l’illégalité du comportement reproché à l’institution de l’Union, à la réalité du dommage et à l’existence d’un lien de causalité entre le comportement de ladite institution et le préjudice invoqué.

144    Le recours en responsabilité contractuelle, visé à l’article 272 TFUE, a pour objet la demande en réparation d’un préjudice découlant d’un contrat passé par l’Union ou pour son compte. La compétence du juge de l’Union et la responsabilité des parties contractantes dépendent de la portée des clauses contractuelles et, notamment, des clauses d’attribution de compétence et de désignation du droit applicable au contrat. Cette compétence est dérogatoire du droit commun et doit, partant, être interprétée strictement (arrêts du 18 décembre 1986, Commission/Zoubek, 426/85, Rec, EU:C:1986:501, point 11, et du 16 décembre 2010, Commission/Arci Nuova associazione comitato di Cagliari et Gessa, T‑259/09, EU:T:2010:536, point 39). Ainsi, le Tribunal ne peut connaître que des seules demandes qui dérivent du contrat contenant la clause compromissoire ou qui ont un rapport direct avec les obligations qui en découlent (arrêt Commission/Zoubek, précité, EU:C:1986:501, point 11).

145    Étant donné l’autonomie des voies de recours susvisées et des conditions d’engagement de la responsabilité propres à chacun de ces recours, le Tribunal est tenu de déterminer si le recours dont il est saisi a pour objet une demande de dommages et intérêts reposant objectivement sur des droits et des obligations d’origine contractuelle ou d’origine extracontractuelle (voir, par analogie, arrêt du 18 avril 2013, Commission/Systran et Systran Luxembourg, C‑103/11 P, Rec, EU:C:2013:245, point 66).

146    Il a ainsi été jugé que la simple invocation de règles ou de principes juridiques qui ne découlent pas du contrat liant les parties, mais qui s’imposent à elles, ne saurait avoir pour conséquence de modifier la nature contractuelle d’un litige [voir arrêts du 20 mai 2009, Guigard/Commission, C‑214/08 P, EU:C:2009:330, point 43 ; Commission/Systran et Systran Luxembourg, point 145 supra, EU:C:2013:245, point 65, et du 19 mai 2010, Nexus Europe (Ireland)/Commission, T‑424/08, EU:T:2010:211, point 60].

147    Cependant, étant donné que, en vertu du traité FUE, les juridictions de l’Union sont, en principe, compétentes pour statuer tant sur un recours portant sur la responsabilité extracontractuelle des institutions que sur un recours portant sur la responsabilité contractuelle des institutions lorsqu’elles ont conclu un contrat contenant une clause compromissoire, il a été jugé que, lorsque le Tribunal est saisi d’un recours en responsabilité extracontractuelle, alors que le litige est, en réalité, de nature contractuelle, le Tribunal requalifie le recours si les conditions d’une telle requalification sont réunies (arrêt du 19 septembre 2001, Lecureur/Commission, T‑26/00, Rec, EU:T:2001:222, point 38 ; ordonnance du 10 mai 2004, Musée Grévin/Commission, T‑314/03 et T‑378/03, Rec, EU:T:2004:139, point 88, et arrêt du 24 octobre 2014, Technische Universität Dresden/Commission, T‑29/11, Rec, EU:T:2014:912, point 42).

148    Plus particulièrement, tel que cela a été reconnu par la jurisprudence, en présence d’un litige d’une telle nature, le Tribunal est dans l’impossibilité de requalifier un recours soit lorsque la volonté expresse du requérant de ne pas fonder sa demande sur l’article 272 TFUE s’oppose à une telle requalification (voir, en ce sens, ordonnance Musée Grévin/Commission, point 147 supra, EU:T:2004:139, point 88 ; arrêt CEVA/Commission, point 99 supra, EU:T:2010:240, point 59, et ordonnance du 6 septembre 2012, Technion et Technion Research & Development Foundation/Commission, T‑657/11, EU:T:2012:411, point 55), soit lorsque le recours ne s’appuie sur aucun moyen tiré de la violation des règles régissant la relation contractuelle en cause, qu’il s’agisse des clauses contractuelles ou des dispositions de la loi nationale désignée dans le contrat (voir arrêt du 16 octobre 2014, Federación Española de Hostelería/EACEA, T‑340/13, EU:T:2014:889, point 35 et jurisprudence citée).

149    En outre, il y a lieu d’observer que la violation d’une disposition contractuelle par une institution ne peut, en elle-même, engager la responsabilité extracontractuelle de ladite institution à l’égard d’une des parties avec laquelle elle a conclu le contrat contenant ladite disposition. En effet, dans un tel cas, l’illégalité imputable à ladite institution a une origine purement contractuelle et émane de son engagement en tant que partie contractante et non en raison d’une quelconque autre qualité comme celle d’autorité administrative. Par conséquent, dans de telles circonstances, l’allégation d’une violation d’une disposition contractuelle à l’appui d’une demande en indemnité extracontractuelle doit être déclarée inopérante.

150    Toutefois, il ne peut être exclu que les responsabilités contractuelles et extracontractuelles d’une institution de l’Union puissent coexister à l’égard d’un de ses contractants. En effet, la nature des comportements illicites imputables à une institution causant un préjudice pouvant faire l’objet d’une demande en réparation extracontractuelle n’est pas prédéfinie (voir, en ce sens, arrêts Médiateur/Lamberts, point 142 supra, EU:C:2004:174, point 59 et jurisprudence citée, et du 18 décembre 2009, Arizmendi e.a./Conseil et Commission, T‑440/03, T‑121/04, T‑171/04, T‑208/04, T‑365/04 et T‑484/04, Rec, EU:T:2009:530, point 65). À supposer qu’une telle coexistence des responsabilités des institutions existe, elle ne serait possible qu’à condition que, d’une part, l’illégalité qui est imputée à l’institution en cause constitue un manquement non seulement à une obligation contractuelle, mais également à une obligation générale qui lui incombe et, d’autre part, cette illégalité par rapport à ladite obligation générale ait causé un dommage autre que celui qui résulte de la mauvaise exécution du contrat.

151    En l’espèce, trois des quatre griefs avancés par la requérante à l’appui de sa demande en indemnité extracontractuelle, résumés aux points 125 et suivants ci-dessus, reposent objectivement sur des prétendus manquements d’origine contractuelle et aucun dommage autre que celui qui résulte de la mauvaise exécution du contrat n’est avancé.

152    En effet, s’agissant des prétendues divulgations d’informations confidentielles par la Commission, il convient d’observer qu’elles consistent à avoir informé les coordinateurs des projets ARTreat et Metabo de la résiliation, respectivement, du contrat ARTreat et du contrat Metabo. La prétendue information confidentielle, à savoir la résiliation par la Commission des contrats ARTreat et Metabo avec la requérante, est une information qui émane de la Commission et dont elle dispose en sa qualité de partie contractante et non en sa qualité d’autorité administrative. Par ailleurs, les coordinateurs des projets en question à qui la prétendue information confidentielle a été communiquée ne sont pas des tiers aux contrats en cause. Ils sont des cocontractants de la requérante et de la Commission. Enfin, la requérante invoque elle-même, à l’appui de ce grief, la violation des articles II.22, paragraphe 8, de l’annexe II de ces contrats selon lesquels la Commission peut procéder à des inspections sur place conformément aux règlements n° 2185/96 et (CE) n° 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil, du 25 mai 1999, relatif aux enquêtes effectuées par l’OLAF (JO L 136, p. 1), et omet de tenir compte du fait que l’article II.38, paragraphe 2, de l’annexe II desdits contrats prévoit que la cessation de la participation d’un ou plusieurs bénéficiaires à l’initiative de la Commission est notifiée aux bénéficiaires concernés, avec copie au coordinateur. Partant, l’obligation de confidentialité que la requérante reproche à la Commission d’avoir violée repose objectivement sur des droits et des obligations d’origine contractuelle et non sur les obligations visées par l’article 339 TFUE et l’article 41 de la charte des droits fondamentaux, qui ont également été invoqués.

153    Par ailleurs, le Tribunal observe que la requérante ne précise pas, et encore moins ne démontre, que ladite divulgation de la prétendue information confidentielle aux coordinateurs des contrats lui a causé un dommage autre que celui qui serait dû à la mauvaise exécution du contrat, en particulier, des articles II.22 et II.38 de l’annexe II desdits contrats.

154    S’agissant de la violation du prétendu accord conclu entre la requérante et la Commission relaté dans le compte rendu de la réunion du 22 août 2012, force est de constater que ce grief a trait à la manière dont les parties ont exécuté les contrats ARTreat et Metabo. Le fait que la requérante estime que, par son non-respect dudit accord, la Commission a violé les règles de bonne foi et de loyauté, abusé de son pouvoir, opéré une discrimination et violé les principes de proportionnalité et de continuité administrative ne remet pas en cause ce constat. Ces griefs visent, en réalité, des prétendues violations qui sont objectivement rattachées à des droits et à des obligations d’origine contractuelle. En outre et en tout état de cause, la requérante ne précise pas, et encore moins ne démontre, que lesdites violations lui ont causé un dommage autre que celui qui serait dû à la mauvaise exécution des contrats en cause.

155    Enfin, s’agissant de la prétendue absence d’acceptation des observations sur les rapports d’audit provisoires des projets ARTreat et Metabo ainsi que des prétendus retards dans l’adoption des rapports d’audit définitifs concernant l’exécution des contrats ARTreat et Metabo, ces griefs ont objectivement trait à l’exécution des contrats en cause par la Commission en tant que partie contractante. La requérante invoque d’ailleurs, à l’appui de ces griefs, une violation de l’article II.22, paragraphe 5, des contrats en cause. La simple invocation du respect des principes du délai raisonnable et des droits de la défense s’imposant à la Commission ne saurait avoir pour conséquence de modifier la nature contractuelle du litige. Enfin et en tout état de cause, la requérante ne précise pas, et encore moins ne démontre, que lesdites violations lui ont causé un dommage autre que celui qui serait dû à la mauvaise exécution des contrats en cause.

156    Lors de l’audience, le Tribunal a demandé à la requérante si elle s’opposait à ce qu’il requalifie sa demande en indemnité extracontractuelle en demande en indemnité contractuelle pour la partie de sa demande en indemnité extracontractuelle fondée sur des griefs tirés de la violation des règles des contrats en cause. En réponse à cette question, la requérante a déclaré s’opposer à une telle requalification.

157    Étant donné cette opposition de la requérante à une requalification et que les trois griefs repris aux points 151 et suivants ci-dessus, avancés à l’appui de la demande en indemnité extracontractuelle de la requérante, ont trait objectivement à l’exécution des contrats en cause, il convient de rejeter la demande en indemnité extracontractuelle de la requérante fondée sur lesdits griefs comme inopérante.

3.     Sur l’inscription sur la liste SAP

158    D’une part, la requérante considère que son signalement dans le SAP viole le principe de proportionnalité, parce qu’au moment dudit signalement il n’y avait pas de décision définitive concernant le contrat J-WeB.

159    D’autre part, elle estime qu’elle n’a pas été informée du fait qu’elle faisait l’objet d’un signalement en violation de l’article 8 de la décision 2008/969.

160    En outre, lors de l’audience, la requérante a également invoqué l’arrêt du 22 avril 2015, Planet/Commission (T‑320/09, Rec, EU:T:2015:223), selon lequel il n’y aurait pas de base juridique pour les procédures du SAP. Elle a ajouté que son signalement dans le SAP lui avait causé un préjudice matériel et immatériel important. Le préjudice matériel aurait été aggravé par le retard de 31 mois pour la présentation des rapports définitifs.

161    La Commission conteste ces allégations.

162    Au vu de ces griefs, il convient de rappeler que le SAP vise à assurer, au sein de la Commission et de ses agences exécutives, la circulation d’informations de diffusion restreinte concernant les tiers, parmi lesquels figurent les bénéficiaires de subventions qui pourraient représenter une menace pour les intérêts financiers et la réputation de l’Union ou pour tout autre fonds géré par elle (voir considérant 4 de la décision 2008/969).

163    Les signalements SAP contiennent notamment des informations permettant d’identifier les bénéficiaires de subventions qui représentent une menace pour les intérêts financiers et la réputation de l’Union, parce qu’ils ont commis ou sont soupçonnés d’avoir commis des fraudes ou des erreurs administratives graves ou font l’objet d’importants ordres de recouvrement (voir article 3 de la décision 2008/969). Le comptable de la Commission, au sens de l’article 4 de la décision 2008/969, assure la gestion du SAP. Il procède à l’introduction, à la modification ou à la suppression des signalements SAP (article 4 de la décision 2008/969). Seuls l’ordonnateur délégué compétent, le directeur général ou un directeur de l’OLAF ou de l’IAS (service d’audit interne) peuvent adresser des demandes de signalement au comptable de la Commission (article 5 de la décision 2008/969).

164    Les signalements sont répartis en différentes catégories en fonction de la nature et de la gravité des faits portés à la connaissance du service demandant l’inscription dans le SAP. Ainsi, un signalement W1c est demandé notamment lorsqu’un audit ou une enquête réalisés sous la responsabilité de l’ordonnateur délégué ou portés à son attention donnent des raisons suffisantes de penser que des constatations finales de fraudes ou d’erreurs administratives graves sont susceptibles d’être introduites dans le SAP en ce qui concerne des tiers, en particulier si ces derniers bénéficient ou ont bénéficié de fonds communautaires relevant de sa responsabilité. Une demande d’activation d’un signalement W2b est faite par l’ordonnateur compétent lorsque des enquêtes aboutissent à constater par écrit des fraudes ou des erreurs administratives graves concernant des tiers, en particulier si ces derniers bénéficient ou ont bénéficié de fonds communautaires relevant de sa responsabilité. Un signalement W4 a trait à des tiers faisant l’objet d’ordres de recouvrement émis par la Commission qui excèdent un montant déterminé et dont le paiement connaît un retard significatif. Il demeure actif tant que la dette demeure impayée (articles 10, 11 et 13 de la décision 2008/969).

165    En l’espèce, en réponse à une question écrite du Tribunal, la Commission a indiqué que la requérante avait fait l’objet d’un signalement initial SAP W1c du 28 novembre 2011 au 12 mai 2012, d’un signalement W2b du 31 mai 2012 au 21 avril 2014 et, enfin, d’un signalement W4 à partir du 10 juillet 2013 qui demeurait actif au jour de l’audience.

166    Le signalement SAP de la requérante constitue une mise en œuvre de la décision 2008/969, par la Commission, en sa qualité d’autorité administrative. Les demandes en indemnité, en raison d’un signalement SAP prétendument illégal, relèvent de la responsabilité extracontractuelle de l’Union pour les agissements de la Commission. Partant, la requérante a adéquatement qualifié sa demande en indemnité comme une demande en indemnité extracontractuelle lorsqu’elle a demandé une indemnité en raison de prétendues illégalités commises par la Commission en reprenant son signalement dans le SAP.

167    Toutefois, cette demande doit être rejetée comme non fondée.

168    En effet, en ce que la requérante reproche à la Commission d’avoir repris son nom dans le signalement SAP alors qu’il n’y avait pas encore de décision définitive concernant le contrat J-WeB et d’avoir violé l’article 8 de la décision 2008/969, en ne l’ayant pas préalablement informée d’un possible signalement SAP, force est de constater que le contrat J-WeB a été conclu entre la Commission et la requérante avant l’entrée en vigueur de la décision 2008/969, de sorte qu’il ne peut être reproché à la Commission, en application de l’article 8, paragraphe 1, de ladite décision, de ne pas l’avoir informée avant l’attribution des subventions visées par le contrat J-WeB du fait que des données la concernant pouvaient être introduites dans le SAP. En outre, la requérante n’expose pas à suffisance pour quels motifs ledit signalement, avant la décision définitive concernant le contrat J-WeB, viole le principe de proportionnalité. L’unique fait que l’audit du contrat J-WeB n’a pas été clôturé ne suffit pas à considérer le signalement disproportionné, dès lors que la décision 2008/969 permet un signalement lorsque des informations donnent des raisons suffisantes de penser que des constatations de fraudes ou d’erreurs administratives graves sont susceptibles d’être introduites dans le SAP en ce qui concerne des tiers (voir article 10 de la décision 2008/969).

169    En tout état de cause, même à supposer que le signalement SAP de la requérante soit entaché d’une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit pouvant engager la responsabilité de l’Union pour les motifs exposés ci-dessus ou en raison d’une absence de base légale de la décision 2008/969, eu égard à l’arrêt Planet/Commission, point 160 supra (EU:T:2015:223), il convient de constater que les dommages allégués ne peuvent être causés par lesdites illégalités ou que lesdits dommages ne sont pas établis à suffisance.

170    Plus particulièrement, il convient de rappeler que la responsabilité de l’Union ne saurait être engagée que si la requérante a effectivement subi un préjudice réel et certain (arrêts du 27 janvier 1982, De Franceschi/Conseil et Commission, 51/81, EU:C:1982:20, point 9, et du 16 janvier 1996, Candiotte/Conseil, T‑108/94, Rec, EU:T:1996:5, point 54). Il incombe à la requérante d’apporter des éléments de preuve au juge de l’Union afin d’établir l’existence et l’ampleur d’un tel préjudice (voir, en ce sens, arrêts du 21 mai 1976, Roquette frères/Commission, 26/74, Rec, EU:C:1976:69, p. 677, points 22 à 24 ; du 9 janvier 1996, Koelman/Commission, T‑575/93, Rec, EU:T:1996:1, point 97, et du 28 avril 1998, Dorsch Consult/Conseil et Commission, T‑184/95, Rec, EU:T:1998:74, point 60).

171    En outre, il a été jugé que, dans le contexte d’un recours en indemnité, un lien de causalité était admis lorsqu’il existait un lien suffisamment direct de cause à effet entre le comportement reproché à l’institution et le préjudice invoqué, lien dont il appartient au requérant d’apporter la preuve. Le comportement reproché doit ainsi être la cause déterminante du préjudice (voir arrêt Arizmendi e.a./Conseil et Commission, point 150 supra, EU:T:2009:530, point 85 et jurisprudence citée).

172    Or, s’agissant du dommage matériel allégué par la requérante, il convient d’observer que, dans ses écritures, la requérante a uniquement estimé que le non-respect par la Commission de l’accord du 22 août 2012 avait eu pour conséquence qu’elle avait été tenue au paiement d’une indemnité forfaitaire pour le contrat J-WeB de 25 643,16 euros ainsi qu’au paiement des dépens pour ses désistements dans les affaires T‑365/12 et T-365/12 R s’élevant à 4 290 euros. La requérante a ainsi considéré que l’indemnisation pour le préjudice matériel en raison de la violation par la Commission de l’accord qu’elles avaient conclu s’élevait à 29 933,16 euros.

173    Le préjudice matériel ainsi allégué n’a pas de lien suffisamment direct de cause à effet avec les comportements reprochés à la Commission ayant trait au signalement SAP de la requérante.

174    En ce qui concerne le dommage moral, la requérante allègue uniquement que la divulgation illégale de son exclusion des projets ARTreat et Metabo aux coordinateurs desdits projets a causé un important préjudice à son image et à sa réputation professionnelle compte tenu du rôle et de l’importance de ces coordinateurs. Pour l’évaluation du préjudice immatériel, la requérante estime qu’il convient de tenir compte de sa bonne exécution du projet J-WeB et du manquement de la Commission à ses obligations au regard des principes du délai raisonnable et du droit d’être entendu. La requérante souligne que la divulgation illégale a eu lieu avant qu’elle n’ait pu exercer son droit à présenter des observations sur la décision de la Commission concernant le projet J-WeB. Elle évoque également la partialité des agents de la Commission. Les retards dans l’exécution des obligations de la Commission lui auraient causé une asphyxie économique et un dommage immatériel. Au vu de ces éléments, elle évalue le préjudice immatériel qu’elle a encouru à 60 000 euros.

175    Aucun préjudice moral ainsi allégué n’a un lien suffisamment direct de cause à effet avec les comportements reprochés à la Commission en ce qui concerne le signalement SAP de la requérante.

176    Les allégations de la requérante à l’audience concernant les prétendus dommages causés par son signalement SAP n’affectent pas cette appréciation. En effet, ces allégations sont tardives et ne précisent ni l’importance dudit dommage ni le lien de causalité entre le dommage en question et les illégalités se rapportant au signalement SAP.

177    Partant, il convient de rejeter dans son intégralité comme non fondée la demande en indemnité extracontractuelle de la requérante tirée de la prétendue illégalité de son signalement SAP.

178    La demande d’intérêts compensatoires et moratoires étant accessoire aux demandes en indemnité principales qui ont toutes été rejetées, il convient également de la rejeter.

179    Au vu de l’ensemble des motifs qui précèdent, la demande en indemnité extracontractuelle doit également être rejetée et, partant, le recours de la requérante dans son intégralité.

 Sur les dépens

180    En vertu de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

181    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      d.d. Synergy Hellas Anonymi Emporiki Etaireia Parochis Ypiresion Pliroforikis est condamnée aux dépens.

Prek

Labucka

Kreuschitz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 novembre 2015.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

I – Sur la demande en indemnité contractuelle

A – Introduction

B – Sur la recevabilité

1. Sur la violation des articles II.22 et II.38 de l’annexe II du contrat ARTreat

2. Sur l’admissibilité d’arguments concernant des projets autres que le projet ARTreat

3. Sur la recevabilité de la seconde partie du premier chef de conclusions

C – Sur le fond

1. Considérations liminaires

2. Sur la violation du principe de protection de la confiance légitime

3. Sur la violation du principe de proportionnalité

a) Sur le caractère proportionné de la résiliation

b) Sur la demande de paiement de la somme de 249 715,95 euros

II – Sur la demande en indemnité extracontractuelle

A – Considérations liminaires

B – Sur la recevabilité de la demande en indemnité extracontractuelle

1. Sur l’intérêt à agir

2. Sur la précision des griefs invoqués par la requérante à l’appui de sa demande en indemnité extracontractuelle

C – Sur le fond

1. Sur les violations du code de bonne conduite

2. Sur les violations de l’obligation de confidentialité et de l’accord mentionné dans le compte rendu du 22 août 2012, sur l’absence d’acceptation des observations sur l’audit provisoire des contrats ARTreat et Metabo, sur l’absence d’adoption d’un rapport d’audit définitif et sur la violation du principe de « bonne administration »

3. Sur l’inscription sur la liste SAP

Sur les dépens


* Langue de procédure : le grec.


1 Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.