Language of document : ECLI:EU:T:2021:522

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

1er septembre 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative e*message – Motifs absolus de refus – Caractère descriptif – Absence de caractère distinctif – Déclaration de nullité – Dispositions applicables ratione temporis – Application d’une jurisprudence postérieure – Article 17 de la charte des droits fondamentaux – Principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique »

Dans l’affaire T‑834/19,

e*Message Wireless Information Services GmbH, établie à Berlin (Allemagne), représentée par Me A. Hotz, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme D. Walicka et M. V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Apple Inc., établie Cupertino, Californie (États-Unis), représentée par Me V. Schmitz-Fohrmann, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 10 septembre 2019 (affaire R 2454/2018‑5), relative à une procédure de nullité entre Apple et e*Message Wireless Information Services,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. A. M. Collins, président, Z. Csehi (rapporteur) et G. De Baere, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 5 décembre 2019,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 21 avril 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 17 avril 2020,

vu les questions adressées aux parties le 30 novembre 2020,

vu les observations déposées par les parties au greffe du Tribunal les 7, 17 et 21 décembre 2020,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 9 mars 2000, la requérante, e*Message Wireless Information Services GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9, 38 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante :

–        classe 9 : « Programmes informatiques et compilations de données enregistrés sur des supports de données ; logiciels compris dans la classe 9, en particulier pour les télécommunications et la transmission numérique de données ; systèmes et installations de vidéoconférence composés de protocoles de communication, de logiciels et d’appareils de transmission du son, des images et/ou des données multimédias, ainsi que de logiciels et d’appareils de capture et/ou de restitution de son et/ou d’images (compris dans la classe 9) ; appareils multimédia et leurs parties constitutives (compris dans la classe 9) ; appareils et logiciels de vidéo à la carte (compris dans la classe 9) ; routeurs ; équipement de télécommunications ; plates-formes d’accès ; centrales de commutation pour réseaux publics et privés numériques et analogiques ; installations de commutation pour réseaux publics et privés numériques et analogiques ; réseaux numériques ; systèmes de gestion de réseaux ; appareils de télécommunication, en particulier terminaux et installations téléphoniques RNIS ; boîtes de télécommunication RNIS ; cartes RNIS, en particulier pour ordinateurs personnels ; cartes de PC ; cartes PCMCIA ; modems ; appareils pour l’enregistrement, la transmission, le traitement et la reproduction du son et/ou des images et/ou des données ; appareils servant aux techniques de télécommunication ; supports d’images et/ou de sons et/ou supports de données équipés ou non de programmes et/ou de fichiers et/ou d’autres contenus, en particulier disquettes, bandes magnétiques, cassettes, y compris cassettes vidéo et bandes à déroulement continu, disques durs et mémoires mortes (ROM), mémoires vives (RAM) et modules à enficher, mémoires optiques (à l’exception des films exposés ou non), y compris CD-ROM et WROM ; CD-ROM audio, cassettes musicales ; équipement pour le traitement de l’information et les ordinateurs, y compris micro-ordinateurs et leurs périphériques, tels qu’écrans, modems, imprimantes, mémoires externes ; microprocesseurs et autres composants électroniques d’ordinateurs » ;

–        classe 38 : « Télécommunications ; mise à disposition de services RNIS ; services dans le domaine de l’information, à savoir utilisation de centres informatiques, de systèmes de bulletins d’information électroniques et de nœuds informatiques pour le transfert électronique de données ; services d’un fournisseur en ligne et services en rapport avec des réseaux d’ordinateurs, en particulier Internet, à savoir mise à disposition de services de répertoire, de services d’intermédiaire, de services de conversion de protocoles, mise à disposition de points d’accès et mise à disposition d’infrastructure de réseau pour la transmission du son, des images et/ou des données (compris dans la classe 38) ; exploitation d’un réseau de télécommunication, en particulier d’un réseau de téléphonie mobile ou d’un réseau de télécommunication par satellites ; services en ligne, à savoir livraison, transmission et envoi d’informations et de messages en tous genres ; envoi de courrier électronique » ;

–        classe 42 : « Programmation pour ordinateurs ; création et publication d’expertises dans le domaine de l’informatique et du traitement de données ; tests en rapport avec les systèmes, les appareils et les programmes informatiques ; développement et essai de systèmes électroniques de communication, de traitement de texte et d’information ; création, développement, amélioration et adaptation de programmes informatiques et/ou de fichiers (y compris multimédias et pages d’accueil) pour le compte de tiers, concession de licences de programmes informatiques, y compris jeux pour ordinateurs et jeux vidéo et fichiers ; services d’une banque de données, à savoir location de temps d’accès à et gestion de banques de données ainsi que agences d’informations, messages et informations, également dans le but de proposer le courtage d’affaires et de services en tous genres ».

4        La marque contestée a été enregistrée le 29 mai 2001 sous le numéro 1548619 pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

5        Le 22 septembre 2016, l’intervenante, Apple Inc., a présenté une demande en nullité de la marque contestée au titre de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), dudit règlement.

6        Le 25 octobre 2018, la division d’annulation a accueilli la demande en nullité dans son intégralité et a déclaré la nullité de la marque contestée.

7        Le 14 décembre 2018, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO à l’encontre de la décision de la division d’annulation.

8        Par décision du 10 septembre 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours a rejeté le recours.

9        Elle a considéré que la division d’annulation n’avait pas commis d’erreur en concluant que la nullité de la marque contestée devait être déclarée pour tous les produits et services désignés par celle-ci, en application de l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), dudit règlement.

10      Plus concrètement, s’agissant du public pertinent, la chambre de recours a relevé que les produits et services en cause étaient destinés, en partie, uniquement à des clients professionnels et, en partie, à la fois au grand public et à des clients professionnels. Elle a précisé qu’il convenait de tenir compte du public du territoire anglophone de l’Union européenne et des professionnels des domaines de l’informatique et des télécommunications dans l’ensemble de l’Union, au motif que la marque contestée était composée d’un terme anglais et que cette langue était la langue utilisée dans lesdits domaines. Ensuite, elle a retenu que la marque contestée considérée dans son ensemble était comprise par le public pertinent comme une expression dotée d’une signification, à savoir « un message qui est envoyé par voie électronique », et fournissait des indications quant à la nature, la destination et les caractéristiques des produits et des services en cause. Par conséquent, elle en a conclu que cette marque devait être considérée comme ayant été descriptive, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, pour l’ensemble des produits et des services qu’elle désigne. En outre, elle a estimé que, dès lors qu’elle était constituée d’un message ayant un caractère purement descriptif et informatif dont la signification pouvait être aisément comprise par le public pertinent, la marque contestée était également, au moment du dépôt de la demande d’enregistrement, dépourvue de caractère distinctif au regard des produits et services en cause, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. Enfin, elle a considéré que les documents fournis par la requérante ne suffisaient pas à prouver que la marque contestée avait acquis, après son enregistrement, un caractère distinctif par l’usage au sens de l’article 59, paragraphe 2, du règlement 2017/1001.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler la décision de la division d’annulation du 25 octobre 2018 ;

–        rejeter la demande en nullité de l’intervenante ;

–        condamner l’EUIPO ainsi que l’intervenante aux dépens.

12      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À l’appui de son recours, la requérante invoque sept moyens.

14      Le premier moyen est tiré, en substance, de l’absence de disposition d’habilitation valable permettant de déclarer la nullité de la marque contestée. Le deuxième moyen est tiré, en substance, de l’application erronée de l’interprétation actuelle de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001. Les troisième et quatrième moyens sont tirés, en substance, d’erreurs commises lors de l’appréciation des éléments figuratifs de la marque contestée dans le cadre de l’examen de son caractère descriptif. Le cinquième moyen est tiré d’une appréciation erronée du caractère distinctif de la marque contestée. Les sixième et septième moyens sont tirés, en substance, d’une violation de l’article 17 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ainsi que des principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique.

 Sur le premier moyen, tiré de l’absence de disposition d’habilitation valable permettant de déclarer la nullité de la marque contestée

15      La requérante soutient que, dans la décision attaquée, la chambre de recours s’est fondée à tort sur l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), dudit règlement, pour déclarer la nullité de la marque contestée, dès lors que ce règlement n’était pas en vigueur à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, à savoir le 9 mars 2000, et n’était donc pas applicable à cette date. Elle précise que la marque contestée n’a pas été enregistrée en application des dispositions de l’article 7 du règlement 2017/1001, de sorte qu’elle ne pourrait pas être déclarée nulle en vertu de l’article 59, paragraphe 1, sous a), de ce règlement. Elle estime, en outre, que, le règlement no 207/2009 ayant été abrogé par le règlement 2017/1001 et ne s’appliquant plus depuis le 30 septembre 2017, la division d’annulation et la chambre de recours n’ont pas, à bon droit, fondé la nullité de la marque contestée sur les dispositions de l’article 52, paragraphe 1, sous a), et de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 207/2009, bien que l’intervenante ait fondé sa demande sur ces dispositions. Ensuite, elle soutient que la marque contestée ne pouvait pas être déclarée nulle en vertu de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du même règlement, étant donné que ce dernier avait été abrogé par le règlement no 207/2009 avec effet au 13 avril 2009. Elle en conclu qu’il n’existait pas de fondement juridique pour déclarer la nullité de la marque contestée, de sorte que celle-ci aurait été déclarée en violation du principe de l’État de droit.

16      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

17      À cet égard, il convient de relever que le règlement no 40/94 a été abrogé et remplacé par le règlement no 207/2009, entré en vigueur le 13 avril 2009. Ce dernier règlement, tel que modifié par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015 (JO 2015, L 341, p. 21), a également été abrogé et remplacé, avec effet au 1er octobre 2017, par le règlement 2017/1001.

18      Selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), à la différence des règles de fond, qui sont habituellement interprétées comme ne visant des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur que dans la mesure où il ressort clairement de leurs termes, de leur finalité ou de leur économie qu’un tel effet doit leur être attribué (voir arrêt du 14 mars 2019, Textilis, C‑21/18, EU:C:2019:199, point 30 et jurisprudence citée).

19      En outre, il ressort de la jurisprudence que, s’agissant des demandes en nullité de marques, la date de demande d’enregistrement de ces marques est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable (voir arrêt du 23 avril 2020, Gugler France/Gugler et EUIPO, C‑736/18 P, non publié, EU:C:2020:308, point 3 et jurisprudence citée).

20      Or, la détermination des causes de nullité absolue, pour lesquelles une marque peut être déclarée nulle, étant une règle de fond (voir, en ce sens, arrêt du 23 avril 2020, Gugler France/Gugler et EUIPO, C‑736/18 P, non publié, EU:C:2020:308, points 3 et 6), ce sont les dispositions matérielles applicables à la date de la demande d’enregistrement de la marque contestée qui régissent lesdites causes et leurs conséquences.

21      En l’occurrence, la demande d’enregistrement de la marque contestée est intervenue le 9 mars 2000, date à laquelle le règlement no 40/94 était en vigueur.

22      Par ailleurs, il ne ressort pas des termes, de la finalité ou de l’économie du règlement no 207/2009 ou du règlement 2017/1001 que l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 7 de ce dernier règlement, ou l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 7 de ce dernier règlement, devrait s’appliquer à des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur.

23      Dans ces conditions, la disposition du droit matériel qui était applicable ratione temporis devant l’EUIPO pour apprécier la demande en nullité de l’intervenante était l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94, lu conjointement avec l’article 7 dudit règlement. Dès lors que ces dispositions prévoyaient la possibilité de déclarer nulle une marque dépourvue de caractère distinctif ou ayant un caractère descriptif, la requérante ne saurait utilement soutenir que la marque contestée ne pouvait pas être déclarée nulle faute de fondement juridique pour une telle décision. Il est également sans pertinence, contrairement à ce qu’avance la requérante, que ces dispositions n’étaient plus en vigueur à la date d’adoption de la décision attaquée, dans la mesure où il s’agit des règles matérielles applicables ratione temporis qui étaient en vigueur à l’époque des faits pertinents en l’espèce.

24      Cela étant, il convient encore d’examiner si, dans la décision attaquée, la chambre de recours a effectivement appliqué les dispositions qui étaient applicables ratione temporis.

25      À cet égard, il ressort sans équivoque de la décision attaquée (voir notamment les points 10, 12, 13, 20 et 93 de cette décision) que la chambre de recours s’est fondée sur l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), de ce règlement, pour confirmer la décision de la division d’annulation déclarant la nullité de la marque contestée. Partant, comme le soutient la requérante, la chambre de recours s’est référée à des dispositions qui n’étaient pas applicables en l’espèce.

26      Cependant, cette circonstance demeure sans incidence sur la légalité de la décision attaquée (voir, par analogie, arrêt du 23 avril 2020, Gugler France/Gugler et EUIPO, C‑736/18 P, non publié, EU:C:2020:308, point 8).

27      En effet, il y a lieu de constater, tout d’abord, que les dispositions de l’article 59, paragraphe 1, sous a), et de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001, d’une part, correspondent à celles de l’article 51, paragraphe 1, sous a), et de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 40/94 et, d’autre part, n’ont subi, en ce qui concerne les motifs absolus de refus d’enregistrement, aucune modification quant à leur libellé, leur contexte ou leur objectif par rapport aux dispositions équivalentes du règlement no 40/94. Ensuite, il ressort des deux premiers considérants du règlement 2017/1001 que ce règlement constitue la codification du règlement no 207/2009, lequel a lui-même codifié le règlement no 40/94. Enfin, il ressort des points 17 et 22 de la décision attaquée que la chambre de recours a explicitement retenu la date du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée comme la date pertinente afin de déterminer si cette marque devait être déclarée nulle.

28      Dans ces conditions, il s’impose de constater que la chambre de recours a concrètement livré son appréciation à l’aune des conditions posées par les dispositions matérielles applicables en l’espèce, à savoir l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), dudit règlement.

29      Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré de l’application erronée de l’interprétation actuelle de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001

30      Dans le cadre du deuxième moyen, la requérante avance que la chambre de recours a fondé son appréciation sur des critères issus de la pratique actuelle d’enregistrement ainsi que de la jurisprudence récente du juge de l’Union, au lieu d’examiner l’existence de motifs absolus de refus d’enregistrement en ce qui concerne la marque contestée sur le fondement des critères et de l’interprétation des règles applicables à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de cette marque, tels que ces critères et cette interprétation étaient appréhendés à cette date. En outre, elle soutient que, au début des années 2000, s’agissant des motifs absolus visés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 40/94, tant les chambres de recours de l’EUIPO que les juridictions de l’Union étaient très favorables aux enregistrements et qu’un degré minimal de caractère distinctif intrinsèque était considéré comme suffisant pour écarter ces deux motifs de refus. Elle avance que l’EUIPO avait, à cette époque-là, comme pratique courante d’accepter même des demandes d’enregistrement de signes figuratifs ne présentant qu’une configuration graphique très peu originale. Enfin, elle affirme que, si la chambre de recours avait appliqué les principes et la jurisprudence datant du début des années 2000, elle aurait considéré qu’il n’existait pas de lien suffisamment direct et évident entre l’expression « e*message » et les produits et services visés par la marque contestée pour conférer à celle-ci un caractère descriptif.

31      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

32      En premier lieu, s’agissant des arguments de la requérante tirés de la jurisprudence prise en considération par la chambre de recours, il convient de rappeler que l’interprétation que le juge de l’Union donne d’une règle de droit de l’Union éclaire et précise, si besoin est, la signification et la portée de cette règle, telle qu’elle doit ou aurait dû être comprise et appliquée depuis le moment de son entrée en vigueur (voir, en ce sens, arrêt du 5 juillet 2012, Grèce/Commission, T‑86/08, EU:T:2012:345, point 49 et jurisprudence citée, et, par analogie, conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire EUIPO/Cactus, C‑501/15 P, EU:C:2017:383, point 54). En outre, il ressort de la jurisprudence que la légalité des décisions des chambres de recours est appréciée sur la base du règlement sur la marque applicable, en l’occurrence, le règlement no 40/94, tel qu’interprété par le juge de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 65 et jurisprudence citée). Par ailleurs, ni les parties ni le Tribunal lui-même ne sauraient être empêchés de s’inspirer, dans l’interprétation du droit de l’Union, d’éléments tirés de la jurisprudence de l’Union [arrêt du 1er février 2012, Carrols/OHMI – Gambettola (Pollo Tropical CHICKEN ON THE GRILL), T‑291/09, EU:T:2012:39, point 35].

33      Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en fondant la décision attaquée notamment sur l’interprétation donnée par la Cour et par le Tribunal de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 40/94 dans des décisions rendues postérieurement à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, dans la mesure où, par ces décisions, le juge de l’Union n’a fait qu’interpréter les règles de fond applicables à la date du dépôt de ladite demande, de sorte que de telles décisions, qui précisent la portée et les conditions d’application de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 40/94, permettent de tirer des conclusions sur la situation juridique en cause telle qu’elle se présentait à cette même date.

34      Contrairement à ce qu’avance la requérante, cela vaut également, en principe, en ce qui concerne la jurisprudence ayant trait à l’interprétation de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 207/2009 et de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001, dans la mesure où ces dispositions sont identiques à celles de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 40/94, de sorte qu’il s’agit de codifications successives de dispositions équivalentes. Partant, la jurisprudence relative aux dispositions de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 207/2009 et de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001 est, en principe, pertinente pour les dispositions équivalentes du règlement no 40/94 (voir, par analogie, arrêt du 19 juin 2014, Oberbank e.a., C‑217/13 et C‑218/13, EU:C:2014:2012, point 32).

35      L’argument de la requérante tiré du caractère plus favorable aux enregistrements de la jurisprudence des années 2000 en ce qui concerne les motifs absolus de refus d’enregistrement visés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 40/94 ne permet pas d’arriver à une autre conclusion.

36      À cet égard, premièrement, il y a lieu de relever que la requérante se limite à invoquer quelques principes découlant de cinq arrêts rendus plusieurs mois après la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause. Il s’agit, en ce qui concerne la Cour, de l’arrêt du 20 septembre 2001, Procter & Gamble/OHMI (C‑383/99 P, EU:C:2001:461), et, en ce qui concerne le Tribunal, des arrêts du 31 janvier 2001, Taurus-Film/OHMI (Cine Action) (T‑135/99, EU:T:2001:30), du 31 janvier 2001, Wrigley/OHMI (DOUBLEMINT) (T‑193/99, EU:T:2001:32), du 31 janvier 2001, Sunrider/OHMI (VITALITE) (T‑24/00, EU:T:2001:34), et du 5 avril 2001, Bank für Arbeit und Wirtschaft/OHMI (EASYBANK) (T‑87/00, EU:T:2001:119).

37      Il convient de constater que la requérante n’explique pas en quoi les principes découlant des arrêts auxquels elle se réfère seraient plus favorables aux enregistrements, eu égard aux motifs absolus de refus d’enregistrement visés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 40/94, que l’interprétation ultérieure de ces dispositions ou celle de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 207/2009 et de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001. En outre, la requérante n’établit aucun lien entre ses allégations génériques, d’une part, et les principes rappelés et appliqués dans la décision attaquée, d’autre part. En tout état de cause, aucune conclusion ne peut être tirée de l’arrêt du 31 janvier 2001, DOUBLEMINT (T‑193/99, EU:T:2001:32), dans la mesure où cet arrêt a été annulé par l’arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley (C‑191/01 P, EU:C:2003:579).

38      Deuxièmement, il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours s’est référée régulièrement à l’interprétation faite par la Cour et par le Tribunal de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 40/94 au début des années 2000 et, dès lors, à des arrêts qui concernaient nécessairement une appréciation de l’existence des motifs absolus de refus par rapport à des demandes d’enregistrement déposées soit avant la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause, soit à une date suivant de près celle du dépôt de cette demande (voir, par exemple, les points 23 à 25, 27, 47, 49, 58, 65 à 67, 71, 73, 76 de la décision attaquée).

39      En deuxième lieu, s’agissant des arguments de la requérante tirés de la pratique décisionnelle de l’EUIPO, il convient de rappeler que les décisions que l’EUIPO est conduit à prendre concernant la nullité d’une marque de l’Union européenne en vertu des dispositions matérielles du règlement no 40/94, qui sont applicables en l’espèce, relèvent de l’exercice d’une compétence liée, et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur la base de ce règlement, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur la base d’une pratique administrative antérieure à celles-ci (voir, en ce sens, arrêt du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 65 et jurisprudence citée).

40      Au demeurant, si l’EUIPO doit prendre en considération les décisions déjà adoptées et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, le respect du principe de légalité impose que l’examen de toute demande d’enregistrement soit strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. Cet examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus [voir, en ce sens, arrêts du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 76 et 77 ; du 16 janvier 2019, Pologne/Stock Polska sp. z o.o. et EUIPO, C‑162/17 P, non publié, EU:C:2019:27, point 60, et du 6 décembre 2018, Vans/EUIPO – Deichmann (V), T‑817/16, non publié, EU:T:2018:880, point 132].

41      En l’espèce, la requérante invoque plusieurs décisions des chambres de recours au soutien de ses arguments, sans que ces décisions soient produites devant le Tribunal en tant qu’éléments de preuve.

42      En outre, conformément à la jurisprudence citée au point 40 ci-dessus, l’examen doit avoir lieu dans chaque cas concret pour vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif absolu de refus.

43      En tout état de cause, en ce qui concerne les décisions relatives aux signes INHOUSE-OUTSOURCING (affaire R 57/1999-3) et NETMEETING (affaire R 26/1998-3), outre le fait que ces signes sont constitués de termes différents de ceux dont est composée la marque contestée, la requérante ne présente pas d’argument concret tiré de ces décisions permettant de remettre en cause les appréciations faites par la chambre de recours dans la décision attaquée ou les principes appliqués par la chambre de recours dans cette dernière.

44      En ce qui concerne les décisions relatives aux signes figuratifs selecta (affaire R 104/1998-3) et DECOPROJECT (affaire R 810/2000-3), par référence auxquelles la requérante vise à établir que l’EUIPO avait, au début des années 2000, comme pratique courante d’accepter des demandes d’enregistrement de signes figuratifs sur la base d’une configuration graphique même très peu originale, il convient tout d’abord de relever, ainsi que l’avance l’intervenante, que, dans ces décisions, les éléments verbaux desdits signes n’ont pas été considérés comme descriptifs au regard des produits et des services concernés, contrairement aux éléments verbaux de la marque contestée. Partant, dans lesdites décisions, les éléments figuratifs examinés ne faisaient que renforcer la conclusion de la chambre de recours au sujet des éléments verbaux des signes concernés. Ensuite, il existe des différences entre les éléments figuratifs desdits signes et ceux de la marque contestée. Enfin, ainsi que le soutient l’EUIPO, invoquer deux décisions des chambres de recours ne suffit pas pour établir quelle était la pratique décisionnelle de l’EUIPO à un moment donné.

45      Pour autant que la requérante se réfère aux décisions concernant les signes verbaux E-SECURITY (affaire R 156/2001-3), E-SERVER (affaire R 253/2002‑2) et e-travel (affaire R 412/2000-2) afin d’établir que le lien entre l’expression « e*message » et les produits et services visés par la marque contestée n’a pas été apprécié conformément aux critères découlant de la pratique décisionnelle et que ce lien était trop vague et indéterminé pour conférer un caractère descriptif à la marque contestée, il convient, d’abord, de relever que, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours n’a pas considéré qu’un lien quelconque entre l’expression « e*message » et les produits et services visés par la marque contestée était suffisant pour établir le caractère descriptif de celle-ci. En effet, il ressort des points 25 et 51 de la décision attaquée que la chambre de recours a retenu, en se fondant sur la jurisprudence, que, pour que l’enregistrement d’un signe soit refusé en raison de son caractère descriptif, il faut qu’il présente avec les produits ou services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description de ces produits ou services ou d’une de leurs caractéristiques.

46      En outre, d’une part, les signes invoqués par la requérante ne visent que partiellement les mêmes produits et services que ceux en cause en l’espèce et, d’autre part, ils portent sur des termes différents et véhiculent donc une signification différente de celle de la marque contestée. Partant, les décisions portant sur ces signes ne permettent pas de tirer de conclusion quant au caractère descriptif de la marque contestée.

47      Dans ces conditions, les arguments de la requérante tirés de la pratique décisionnelle des chambres de recours ne sauraient prospérer.

48      En troisième lieu, la requérante soutient que l’expression « e*message » n’est pas descriptive des produits et des services visés par la marque contestée, dès lors qu’elle ne permettrait pas au public pertinent de déceler immédiatement et sans autre réflexion la description d’une caractéristique de ces produits ou services. Selon elle, ladite expression ne permet pas au public pertinent d’identifier immédiatement et avec précision ni le service de télécommunication concret susceptible de lui être proposé, ni un appareil nécessaire à un tel service, ni un logiciel indispensable à ce service.

49      Par ces arguments, la requérante vise à remettre en cause, en substance, les constats figurant aux points 52 à 56 de la décision attaquée, selon lesquels la marque contestée, prise dans son ensemble, informe immédiatement le public pertinent, et sans autre réflexion, du fait que les services ou les produits qu’elle désigne sont susceptibles d’être utilisés pour des messages électroniques ou de se rapporter à ces derniers. Plus particulièrement, en ce qui concerne les produits en cause compris dans la classe 9, selon la chambre de recours, la marque contestée informe clairement le public pertinent que ces produits sont des produits destinés à la transmission, à l’envoi, à la réception ou au stockage de messages électroniques, ou qu’ils sont utilisés à ces fins. En outre, en ce qui concerne les services en cause compris dans la classe 38, la chambre de recours a considéré que la marque contestée informe clairement le public pertinent que ces services sont nécessaires pour la transmission et la réception de messages électroniques et/ou sont destinés au stockage de messages électroniques ou utilisés à cette fin. Enfin, en ce qui concerne les services en cause compris dans la classe 42, la chambre de recours a estimé que la marque contestée informe clairement le public pertinent que lesdits services constituent une large gamme de services qui, par exemple, comprennent le traitement de messages électroniques ainsi que des services auxiliaires et connexes et des bases de données pour le stockage de tous types de messages électroniques.

50      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 40/94, applicable en l’espèce (voir points 17 à 23 ci-dessus), sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. En vertu de l’article 7, paragraphe 2, du même règlement, l’article 7, paragraphe 1, est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union.

51      Pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 40/94, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public pertinent de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir arrêts du 12 janvier 2005, Deutsche Post EURO EXPRESS/OHMI (EUROPREMIUM), T‑334/03, EU:T:2005:4, point 25 et jurisprudence citée, et du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, EU:T:2005:247, point 25].

52      Les arguments de la requérante ne sont pas susceptibles de remettre en cause les considérations de la chambre de recours rappelées au point 49 ci-dessus. Plus précisément, la requérante n’explique pas les raisons pour lesquelles elle estime que, pour pouvoir être considérée comme descriptive, la combinaison de la lettre « e » et de l’élément verbal « message » devrait permettre d’identifier immédiatement et avec précision le service de télécommunication concret susceptible d’être proposé au public pertinent, un appareil nécessaire ou un logiciel indispensable à ce service.

53      En outre, il n’importe pas que les caractéristiques des produits ou des services qui sont susceptibles d’être décrites soient essentielles sur le plan commercial ou accessoires. En effet, le libellé de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 40/94 ne distingue pas selon les caractéristiques que les signes ou indications composant la marque peuvent désigner. De fait, à la lumière de l’intérêt général qui sous-tend ladite disposition, toute entreprise doit pouvoir utiliser librement de tels signes ou indications pour décrire n’importe quelle caractéristique de ses propres produits, quelle que soit son importance sur le plan commercial [voir arrêt du 12 septembre 2007, ColArt/Americas/OHMI (BASICS), T‑164/06, non publié, EU:T:2007:274, point 21 et jurisprudence citée].

54      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que les produits et services que la marque contestée désigne sont susceptibles d’être utilisés pour des messages électroniques ou de se rapporter à ces derniers. Elle visait donc une caractéristique desdits produits et services. La requérante ne présente aucun développement précis permettant de constater que cette conclusion de la chambre de recours serait erronée.

55      Pour autant que la requérante soutient que l’intervenante n’a fourni aucun élément de preuve, notamment lexical, de ce que, le 9 mars 2000, l’expression « e*message » était utilisée dans un sens descriptif, il convient de relever qu’il ressort du dossier de l’EUIPO que l’intervenante a déposé, en annexe de sa demande en nullité, plusieurs décisions des examinateurs, antérieures à la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause, concernant la signification de la lettre « e » et du terme « message ». Dans ces décisions, il est fait référence à des explications figurant dans des dictionnaires de la langue anglaise de l’époque, ce qui ressort également de la décision rendue en l’espèce par la division d’annulation. En outre, en ce qui concerne le terme « message », l’intervenante a produit une impression d’Oxford Dictionaries datant du mois de septembre 2016. Étant donné qu’il s’agit d’un mot du vocabulaire de base de la langue anglaise, et cela déjà à la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause, ce que la requérante ne conteste pas, un tel extrait pouvait être pris en considération par les instances de l’EUIPO.

56      Par ailleurs, lorsqu’une partie a contesté la validité d’une marque enregistrée en se fondant sur des éléments au soutien de sa demande en nullité, il incombe à la chambre de recours d’examiner ces éléments ainsi que de prendre en considération l’existence de faits notoires que l’examinateur aurait, le cas échéant, omis de prendre en considération dans le cadre de la procédure d’enregistrement [voir arrêt du 3 mai 2018, Raise Conseil/EUIPO – Raizers (RAISE), T‑463/17, non publié, EU:T:2018:249, point 28 et jurisprudence citée].

57      Partant, l’argument de la requérante tiré de l’absence d’éléments de preuve portant sur le caractère descriptif des éléments verbaux de la marque contestée ne saurait prospérer.

58      Compte tenu de tout ce qui précède, le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur les troisième et quatrième moyens, tirés d’erreurs commises lors de l’appréciation des éléments figuratifs de la marque contestée dans le cadre de l’examen de son caractère descriptif

59      Dans le cadre du troisième moyen, la requérante fait valoir que la marque contestée, en raison de sa configuration graphique distinctive, n’était pas exclusivement composée de signes ou d’indications à caractère descriptif. Elle estime que la décision attaquée ne comporte pas de constatation en ce qui concerne la perception par le public pertinent des éléments figuratifs de la lettre « e » et de l’élément verbal « message » ainsi que du symbole « * » à la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause. Elle avance également que l’intervenante n’a pas présenté d’élément de preuve concernant cette perception et que, partant, la chambre de recours n’a disposé d’aucune base pour apprécier la configuration graphique de la marque contestée à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de celle-ci. Elle soutient, en outre, que, dans une procédure de nullité dans laquelle l’enregistrement de la marque contestée remonte à une date éloignée, il convient, pour des raisons de sécurité juridique, d’imposer des exigences strictes s’agissant de prouver et de confirmer l’existence d’un motif absolu de refus. Dans le cadre du quatrième moyen, la requérante soutient que la chambre de recours a appliqué à tort, par référence à une jurisprudence récente, le critère selon lequel il fallait que les éléments figuratifs aient la faculté de détourner la perception du public pertinent de la signification descriptive de l’élément verbal de la marque pour écarter le motif de refus tiré de son caractère descriptif. Elle renvoie, dans ce contexte, à la pratique décisionnelle des chambres de recours à l’époque pertinente. En outre, elle fait valoir que, à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, cette dernière pouvait être enregistrée du seul fait de sa configuration graphique.

60      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

61      À titre liminaire, il convient de relever que la requérante ne conteste pas, dans le cadre des troisième et quatrième moyens, la constatation de la chambre de recours selon laquelle la combinaison de la lettre « e » et du terme « message » signifie « un message qui est envoyé par voie électronique » et que cette combinaison est descriptive des produits et des services visés par la marque contestée. Par ces moyens, elle se limite à remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours portant sur les éléments figuratifs de la marque contestée lors de l’examen du caractère descriptif de celle-ci. Cette appréciation étant critiquée dans le cadre tant du troisième que du quatrième moyen, il convient de les examiner ensemble.

62      Il ressort de la décision attaquée que la marque contestée se compose de la lettre minuscule « e », de couleur orange, légèrement stylisée, et de l’élément verbal « message », représenté en lettres minuscules noires légèrement stylisées. La chambre de recours a également retenu que la lettre « e » est légèrement plus grande que l’élément verbal « message » et qu’un astérisque, « * », de couleur orange figure entre ces deux éléments. Elle a considéré, en substance, que ces éléments figuratifs ne sont pas de nature à détourner la perception du public pertinent du sens descriptif de la combinaison de la lettre « e » et de l’élément verbal « message » par rapport aux produits et aux services en cause et ne confèrent, par conséquent, aucun caractère distinctif à la marque contestée. La stylisation de cette marque serait relativement classique et minimale, et la police de caractères utilisée assez courante. En outre, l’astérisque, ayant une nature fonctionnelle et décorative, serait perçu comme un symbole séparant les éléments verbaux de ladite marque et la combinaison de couleurs utilisée ne serait qu’une simple variante des nombreuses couleurs ou combinaisons de couleurs utilisées dans le commerce.

63      En premier lieu, la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas effectué de constatation en ce qui concerne la perception par le public pertinent des éléments figuratifs de la marque contestée à la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause et que l’intervenante n’a pas présenté d’élément de preuve concernant cette perception.

64      À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’une marque de l’Union européenne est considérée comme étant valide jusqu’à ce qu’elle soit déclarée nulle par l’EUIPO à la suite d’une procédure de nullité. Elle bénéficie donc d’une présomption de validité, qui constitue la conséquence logique du contrôle mené par l’EUIPO dans le cadre de l’examen d’une demande d’enregistrement. Partant, il appartient à la personne ayant présenté la demande en nullité d’invoquer devant l’EUIPO les éléments concrets qui mettraient en cause la validité de la marque contestée [voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2013, Fürstlich Castell’sches Domänenamt/OHMI – Castel Frères (CASTEL), T‑320/10, EU:T:2013:424, points 27 et 28].

65      En outre, conformément à l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, qui était applicable, en tant qu’une règle de procédure, à la procédure de recours [arrêt du 15 octobre 2020, smart things solutions/EUIPO – Samsung Electronics (smart:)things), T‑48/19, non publié, EU:T:2020:483, point 64], dans les procédures de nullité, l’EUIPO limite son examen aux moyens et aux arguments soumis par les parties. Toutefois, cette disposition ne fait pas obstacle à ce que les instances de l’EUIPO fondent leurs décisions, outre sur les faits et les preuves présentés par les parties, sur des faits notoires [voir, en ce sens, arrêt du 15 janvier 2013, Welte-Wenu/OHMI – Commission (EUROPEAN DRIVESHAFT SERVICES), T‑413/11, non publié, EU:T:2013:12, point 24], c’est-à-dire des faits qui sont susceptibles d’être connus par toute personne ou qui peuvent être connus par des sources généralement accessibles [arrêt du 22 juin 2004, Ruiz-Picasso e.a./OHMI – DaimlerChrysler (PICARO), T‑185/02, EU:T:2004:189, point 29].

66      En l’espèce, il ressort du dossier de l’EUIPO ainsi que de la décision de la division d’annulation que l’intervenante a formulé, dans sa demande en nullité, plusieurs arguments concernant les éléments figuratifs de la marque contestée et leur perception par le public pertinent. Au soutien de ses arguments, elle a notamment renvoyé à la jurisprudence, aux lignes directrices de l’EUIPO et à une impression d’un site Internet concernant la police de caractères utilisée dans la marque contestée, étant précisé que ce dernier élément de preuve a été écarté par la division d’annulation au motif qu’il était postérieur à la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause (voir point 5 de la décision attaquée).

67      En outre, comme il a été déjà constaté au point 62 ci-dessus, la chambre de recours s’est prononcée sur tous les éléments figuratifs de la marque contestée, à savoir sa stylisation, la police de caractères utilisée, ses couleurs et l’astérisque, en se fondant sur des faits notoires, ainsi que l’expose, en substance, l’EUIPO dans son mémoire en réponse. Compte tenu de la jurisprudence citée au point 65 ci-dessus, cette dernière circonstance ne permet pas de considérer que la décision attaquée serait entachée d’erreur.

68      En ce qui concerne la date à laquelle se rapportent lesdits constats relatifs aux éléments figuratifs de la marque contestée, il est certes vrai que, dans les points concernés de la décision attaquée, la chambre de recours ne s’est pas référée explicitement à la perception du public pertinent à la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause. Néanmoins, il ressort des points 17 et 22 de la décision attaquée que la chambre de recours a retenu explicitement la date du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée comme date pertinente pour déterminer si cette marque devait être déclarée nulle. En outre, au point 44 de la décision attaquée, elle a également fait mention de cette date pour les besoins de l’appréciation de la signification de la combinaison de la lettre « e » et de l’élément verbal « message ». Rien ne permet de considérer qu’il n’en a pas été de même en ce qui concerne l’examen des éléments figuratifs de la marque contestée. En tout état de cause, compte tenu de la nature des éléments figuratifs concernés, ainsi que l’avancent l’EUIPO et l’intervenante, rien ne laisse penser que la perception qu’avait le public pertinent de ces éléments ait évolué depuis la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause.

69      Dans la mesure où la requérante fait valoir que, dans une procédure de nullité dans laquelle l’enregistrement de la marque contestée remonte à une date éloignée, il convient, pour des raisons de sécurité juridique, d’imposer des exigences strictes pour prouver l’existence d’un motif absolu de refus, il suffit de relever, d’une part, que la seule date pertinente aux fins de l’examen d’une demande en nullité fondée sur l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94 est celle du dépôt de la demande d’enregistrement en cause [arrêt du 3 juin 2009, Frosch Touristik/OHMI – DSR touristik (FLUGBÖRSE), T‑189/07, EU:T:2009:172, point 19] et, d’autre part, que les conditions d’application d’un motif absolu de refus d’enregistrement dans le cadre d’une procédure de nullité ne changent pas en fonction de cette date ni de l’éloignement de celle-ci.

70      Dans ces conditions, la chambre de recours n’a pas violé les règles relatives à la charge de la preuve et la requérante ne saurait valablement reprocher à celle-ci qu’elle n’a pas disposé de base factuelle pour apprécier la perception par le public pertinent des éléments figuratifs de la marque contestée à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de celle-ci.

71      En deuxième lieu, la requérante soutient que la chambre de recours a appliqué à tort, par référence à une jurisprudence récente, le critère selon lequel il fallait que les éléments figuratifs aient eu la faculté de détourner la perception du public pertinent de la signification descriptive de l’élément verbal de la marque contestée pour écarter le motif de refus tiré de son caractère descriptif. Elle renvoie, dans ce contexte, à la pratique décisionnelle des chambres de recours à l’époque pertinente et, plus concrètement, aux décisions concernant les signes figuratifs selecta (affaire R 104/1998-3) et DECOPROJECT (affaire R 810/2000-3). Dans la mesure où ce grief recoupe, en substance, certains arguments de la requérante présentés dans le cadre du deuxième moyen, il suffit de renvoyer aux considérations figurant notamment aux points 39 à 42 et 44 ci-dessus.

72      En troisième lieu, la requérante fait valoir que, à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, cette dernière pouvait être enregistrée du seul fait de sa configuration graphique. Selon elle, la lettre « e » de couleur orange accompagnée de l’astérisque, compte tenu de sa taille, se distingue nettement de l’élément verbal « message » écrit en noir. Elle ajoute que la police de caractères utilisée et l’astérisque, placé en exposant, étaient inhabituels dans une marque à la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause.

73      Ces arguments ne permettent pas non plus de remettre en cause les considérations figurant dans la décision attaquée et résumées au point 62 ci-dessus.

74      Certes, la lettre minuscule « e » de couleur orange légèrement stylisée est plus grande que l’élément verbal « message », écrit en lettres minuscules noires légèrement stylisées, et un astérisque orange figure entre ces éléments. Toutefois, l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle cette stylisation de la marque contestée est minimale et, dès lors, n’est pas de nature à détourner la perception du public pertinent de la signification descriptive de la combinaison de la lettre « e » et de l’élément verbal « message », n’est pas erronée.

75      En effet, les éléments figuratifs de la lettre « e » et de l’élément verbal « message », à savoir leurs tailles, leurs couleurs et la police de caractères employée, se limitent à la présentation de ces éléments en utilisant des méthodes graphiques courantes, et cela même à la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause. L’allégation de la requérante selon laquelle la police de caractères utilisée était inhabituelle dans une marque à la date pertinente n’est pas convaincante et, par ailleurs, n’est aucunement étayée. En outre, l’astérisque a une nature essentiellement fonctionnelle, dans la mesure où il sépare la lettre « e » et l’élément verbal « message ». Il s’agissait, par ailleurs, d’un signe typographique courant déjà à la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause.

76      Dans ces conditions, il y a lieu d’écarter la thèse de la requérante selon laquelle la marque contestée a été enregistrée dans le respect de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 40/94 du seul fait de ses éléments figuratifs.

77      Eu égard de l’ensemble des considérations qui précèdent, les troisième et quatrième moyens doivent être rejetés.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une appréciation erronée du caractère distinctif de la marque contestée

78      La requérante soutient que la chambre de recours a considéré à tort que la marque contestée était dépourvue de caractère distinctif. Elle avance que la chambre de recours a fondé son analyse à cet égard sur des critères qui n’étaient pas applicables, cela s’agissant tant de l’appréciation de la combinaison d’une lettre et d’un élément verbal que de celle des éléments figuratifs. En outre, la décision attaquée ne contiendrait aucune constatation quant à la perception des éléments figuratifs de la marque contestée à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de celle-ci et l’intervenante n’aurait fourni aucune indication quant aux représentations graphiques d’une marque verbale ou figurative qui étaient courantes à ladite date. Selon la requérante, dans ces conditions, il n’est pas possible de déterminer si, à cette date, les éléments figuratifs de la marque contestée étaient de nature à détourner l’attention du public pertinent d’un élément verbal prétendument dépourvu de caractère distinctif.

79      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

80      Il convient de rappeler que chacun des motifs absolus de refus d’enregistrement énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 40/94 est indépendant des autres et exige un examen séparé (voir arrêt du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C‑456/01 P et C‑457/01 P, EU:C:2004:258, point 45 et jurisprudence citée). Néanmoins, selon la jurisprudence, il suffit qu’un de ces motifs absolus s’applique pour qu’un signe ne puisse être enregistré comme marque de l’Union européenne (arrêt du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, EU:C:2002:506, point 29).

81      En l’espèce, il ressort de l’analyse des quatre premiers moyens que l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle la marque contestée était descriptive pour l’ensemble des produits et des services qu’elle désigne ne viole pas l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 40/94. Partant, le cinquième moyen, tiré, en substance, d’une appréciation erronée du caractère distinctif de la marque contestée, est inopérant.

82      Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter le cinquième moyen.

 Sur les sixième et septième moyens, tirés d’une violation de l’article 17 de la charte des droits fondamentaux ainsi que des principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique

83      Dans le cadre du sixième moyen, la requérante fait valoir que la confirmation par la chambre de recours de la nullité de la marque contestée, qui constituerait le retrait d’un acte administratif légal et favorable à celle-ci, en appliquant rétroactivement des dispositions qui n’étaient pas en vigueur à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de cette marque et alors que les dispositions antérieures étaient appliquées d’une manière moins restrictive à cette date, est illégale et viole l’article 17 de la charte des droits fondamentaux ainsi que les principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique. Elle avance que, par l’enregistrement de la marque contestée, elle a légalement acquis un droit de propriété qui est protégé par l’article 17, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux. Elle ajoute que, au cours des 19 dernières années, elle a pris des dispositions concernant son patrimoine sur la base de la confiance qu’elle accordait à la décision d’enregistrement pertinente de l’EUIPO et à sa pérennité, et que cette confiance mérite d’être protégée.

84      Dans le cadre du septième moyen, la requérante soutient que, même si le Tribunal aboutissait à la conclusion que la marque contestée a été enregistrée contrairement à l’article 7, paragraphe 1, sous b) ou c), du règlement 2017/1001 ou du règlement no 40/94, le retrait de l’acte d’enregistrement de cette marque ne peut s’effectuer sans réserve. Elle avance, en substance, qu’un acte administratif favorable illégal ne peut être retiré avec effet rétroactif que si la décision de retrait intervient dans un délai raisonnable et si la confiance légitime du destinataire de l’acte est prise en considération. Elle ajoute que le titulaire de la marque contestée peut se fier à l’examen réalisé par l’EUIPO au cours de la procédure d’enregistrement pour déceler d’éventuels motifs absolus de refus d’enregistrement de cette marque et aux critères d’examen appliqués à cette fin.

85      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

86      Compte tenu des chevauchements entre les sixième et septième moyens, il convient de les examiner ensemble.

87      En premier lieu, la requérante avance, en substance, que l’enregistrement de la marque contestée était légal et que, dès lors, la décision attaquée viole l’article 17, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux ainsi que les principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique.

88      À cet égard, il y a lieu de constater que la requérante a échoué à établir, dans le cadre de ses cinq premiers moyens, que la décision attaquée serait erronée à tout le moins en ce que la chambre de recours a considéré que la marque contestée avait été enregistrée en violation des dispositions de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 40/94. Plus particulièrement, il convient de souligner que, bien que la chambre de recours se soit référée à des dispositions qui n’étaient pas applicables à la date pertinente, elle a livré son appréciation, concrètement, à l’aune des conditions posées par les dispositions matérielles applicables à cette date, à savoir l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94, lu conjointement avec, à tout le moins, l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement. En outre, les arguments avancés n’ont pas permis de constater que la chambre de recours aurait appliqué des critères d’examen nouveaux et plus stricts que ceux applicables au moment de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée ou qu’elle aurait violé les règles relatives à la charge de la preuve.

89      Partant, il ne saurait être reproché aux instances de l’EUIPO d’avoir déclaré la nullité de ladite marque pour cause de nullité absolue.

90      En effet, en vertu de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94, la nullité d’une marque de l’Union européenne est déclarée, sur demande, lorsque cette marque a été enregistrée contrairement aux dispositions de l’article 7 de ce règlement. Dès lors, en présence d’une demande en nullité, la division d’annulation n’a pas de marge d’appréciation et doit déclarer la nullité de la marque en cause lorsque les conditions d’application d’un motif absolu de refus d’enregistrement sont remplies, sous réserve de l’application des dispositions de l’article 51, paragraphe 2, du règlement no 40/94, qui permettent, dans certains cas, d’échapper à une telle conséquence si ladite marque a acquis après son enregistrement un caractère distinctif. Sur ce dernier point, il convient de relever que la chambre de recours a confirmé l’appréciation de la division d’annulation selon laquelle, en l’espèce, l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage n’avait pas été prouvée, étant précisé que ces appréciations n’ont pas été remises en cause par la requérante devant le Tribunal.

91      En outre, il ressort de la jurisprudence que l’enregistrement d’une marque ne saurait prémunir le titulaire de ladite marque contre le risque que cette dernière soit déclarée nulle en vertu de l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 40/94 et que l’objectif poursuivi par cette disposition consiste précisément à permettre de réparer les éventuelles erreurs commises par l’examinateur au moment du dépôt d’une demande d’enregistrement [voir, en ce sens, arrêt du 30 novembre 2017, Red Bull/EUIPO – Optimum Mark (Combinaison des couleurs bleue et argent), T‑101/15 et T‑102/15, EU:T:2017:852, points 135 et 136].

92      Par ailleurs, selon l’article 54, paragraphe 2, du règlement no 40/94 (devenu article 55, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, lui-même devenu article 62, paragraphe 2, du règlement 2017/1001), la déclaration de nullité d’une marque a pour effet que cette marque est réputée n’avoir pas eu, dès l’origine, les effets prévus par le règlement no 40/94.

93      Ces dispositions ont été en vigueur tant à la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause qu’à la date d’enregistrement de la marque contestée et leur teneur était claire et non équivoque. Il s’ensuit que la requérante était censée connaître les limites auxquelles était soumise, à cet égard, la marque contestée.

94      Ensuite, il convient de rappeler que le droit de se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime s’étend à tout justiciable dans le chef duquel une institution a fait naître des espérances fondées. Nul ne peut invoquer une violation de ce principe en l’absence d’assurances précises, inconditionnelles et concordantes que lui aurait fournies une autorité compétente de l’Union (voir arrêt du 29 juillet 2019, Red Bull/EUIPO, C‑124/18 P, EU:C:2019:641, point 79 et jurisprudence citée).

95      Selon la jurisprudence, l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne ne saurait créer une confiance légitime pour le titulaire de ladite marque en ce qui concerne le résultat d’une procédure de nullité ultérieure, puisque la réglementation applicable offre explicitement la possibilité de contester ultérieurement ledit enregistrement dans le cadre d’une demande en nullité ou d’une demande reconventionnelle formée dans le cadre d’une action en contrefaçon [arrêt du 19 mai 2010, Ravensburger/OHMI – Educa Borras (Memory), T‑108/09, non publié, EU:T:2010:213, point 25]. Il ressort également de la jurisprudence que le fait qu’une marque a été initialement enregistrée par l’EUIPO n’est pas de nature à lier l’EUIPO pour l’avenir, dans la mesure où l’enregistrement d’une marque ne fait pas obstacle à ce que cette dernière soit déclarée nulle si cet enregistrement a été effectué en violation d’un des motifs absolus de refus prévus à l’article 7 du règlement no 40/94 (voir, en ce sens, arrêt du 29 juillet 2019, Red Bull/EUIPO, C‑124/18 P, EU:C:2019:641, point 82).

96      S’agissant de la violation de l’article 17 de la charte des droits fondamentaux, il y a lieu de rappeler que la protection de la propriété intellectuelle est consacrée à l’article 17, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux. Cela étant, il ne ressort pas de cette disposition ni de la jurisprudence que la protection des droits de propriété intellectuelle devrait être assurée de manière absolue (voir, en ce sens, arrêt du 29 juillet 2019, Spiegel Online, C‑516/17, EU:C:2019:625, point 56 et jurisprudence citée). Selon la jurisprudence, la marque de l’Union européenne existe notamment dans les limites posées par l’article 4 combiné avec les articles 7 et 8 du règlement no 40/94 [voir, en ce sens, arrêt du 3 juillet 2013, Cytochroma Development/OHMI – Teva Pharmaceutical Industries (ALPHAREN), T‑106/12, non publié, EU:T:2013:340, point 45 et jurisprudence citée]. Par ailleurs, la requérante n’avance pas d’argument permettant de constater que la limitation du droit de propriété intellectuelle telle qu’elle se présente en l’espèce serait contraire à l’article 52, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux.

97      Dans ces conditions, la requérante ne saurait valablement soutenir que l’enregistrement de la marque contestée était légal et que, en confirmant la décision de la division d’annulation, la chambre de recours a enfreint l’article 17 de la charte des droits fondamentaux ainsi que les principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique.

98      En deuxième lieu, la requérante soutient, en substance, que, même si la marque contestée a été enregistrée contrairement à l’article 7, paragraphe 1, sous b) ou c), du règlement no 40/94, un acte administratif favorable illégal ne peut être retiré avec effet rétroactif que si la décision de retrait intervient dans un délai raisonnable et si la confiance légitime du destinataire de l’acte est prise en considération.

99      À titre liminaire, il convient de constater que, dans le cadre d’une procédure de nullité, contrairement à ce que soutient la requérante, la division d’annulation ne procède pas au retrait d’un acte administratif lorsque les conditions de nullité sont remplies, mais adopte une nouvelle décision déclarant la nullité de la marque en cause pour les produits et services concernés, dont une mention est inscrite au registre lorsqu’elle devient définitive. Cela ressort tant de l’article 64, paragraphes 5 et 6, du règlement 2017/1001, qui était en vigueur au moment où les instances de l’EUIPO ont, en l’espèce, adopté leurs décisions, que des dispositions équivalentes du règlement no 40/94 (voir l’article 56, paragraphes 5 et 6) et du règlement no 207/2009 (voir l’article 57, paragraphes 5 et 6). En outre, ainsi qu’il a été déjà indiqué (voir point 92 ci-dessus), une telle décision a pour effet que la marque concernée est réputée n’avoir pas eu, dès l’origine, les effets prévus par le règlement no 40/94, et a, dès lors, un effet rétroactif.

100    Indépendamment des termes utilisés, par ses arguments, la requérante vise à remettre en cause la légalité de la décision attaquée dans la mesure où la chambre de recours a confirmé la décision de la division d’annulation déclarant, avec effet rétroactif, la nullité de la marque contestée.

101    À cette fin, premièrement, elle se prévaut d’une violation du principe de protection de la confiance légitime.

102    Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence rappelée au point 94 ci-dessus, le droit de se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime s’étend à tout justiciable dans le chef duquel une institution a fait naître des espérances fondées. En outre, nul ne peut invoquer une violation de ce principe en l’absence d’assurances précises, inconditionnelles et concordantes que lui aurait fournies une autorité compétente de l’Union.

103    En l’espèce, la requérante avance que la décision attaquée a été adoptée sur la base de nouveaux critères d’examen, plus stricts que ceux applicables à la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause. Par ce grief, la requérante réitère des arguments qui ont déjà été soulevés dans le cadre du deuxième moyen et qui ne sont pas fondés (voir points 32 à 47 ci-dessus). En tout état de cause, un tel grief n’est pas, par sa nature même, révélateur d’assurances qui seraient susceptibles de fonder la confiance légitime de la requérante. Il en va de même s’agissant de l’argument selon lequel, dans le cadre des procédures de nullité portant sur des enregistrements de longue date, des exigences strictes doivent être imposées afin de constater l’existence d’un motif absolu de refus, argument qui, par ailleurs, a déjà été avancé par la requérante dans le cadre du troisième moyen, et écarté (voir point 69 ci-dessus).

104    En outre, la requérante fait valoir qu’elle se fiait à l’examen réalisé par l’EUIPO au cours de la procédure d’enregistrement et qu’elle avait confiance dans l’enregistrement de la marque contestée. À cet égard, il convient de réitérer que, conformément à la jurisprudence rappelée au point 95 ci-dessus, l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne ne saurait créer une confiance légitime pour le titulaire de ladite marque en ce qui concerne le résultat d’une procédure de nullité ultérieure, puisque la réglementation applicable offre explicitement la possibilité de contester ultérieurement ledit enregistrement dans le cadre d’une demande en nullité.

105    Dans ces conditions, les arguments de la requérante tirés de la violation du principe de protection de la confiance légitime dans l’hypothèse où la marque contestée a été enregistrée contrairement à l’article 7, paragraphe 1, sous b) ou c), du règlement no 40/94 ne sauraient prospérer.

106    Deuxièmement, la requérante avance, en substance, que la déclaration de nullité n’est pas intervenue dans un délai raisonnable après l’enregistrement de la marque contestée.

107    À cet égard, force est de relever que les dispositions applicables ne prévoient pas de délai pour le dépôt d’une demande en nullité pour cause de nullité absolue, ce que la requérante reconnaît elle-même.

108    En outre, comme il a déjà été indiqué au point 90 ci-dessus, dans la mesure où il ressort de l’examen d’une demande en nullité que les conditions d’application d’un motif absolu de refus d’enregistrement sont réunies, la division d’annulation ne peut que déclarer la nullité de la marque contestée, en vertu de l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 40/94, sous réserve de l’application des dispositions de l’article 51, paragraphe 2, dudit règlement. Cette conclusion est corroborée par la jurisprudence citée au point 39 ci-dessus, dont il découle que les décisions que l’EUIPO est conduit à prendre concernant la nullité d’une marque de l’Union européenne relèvent de l’exercice d’une compétence liée, et non d’un pouvoir discrétionnaire.

109    Il ressort également de la jurisprudence citée au point 91 ci-dessus que l’exigence de sécurité juridique constitue l’intérêt général poursuivi par l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 40/94 et que l’objectif de cette disposition consiste précisément à permettre de réparer les éventuelles erreurs commises par l’examinateur au moment du dépôt d’une demande d’enregistrement.

110    En ce qui concerne l’article 7 du règlement no 40/94, auquel renvoie l’article 51, paragraphe 1, sous a), du même règlement, il convient de rappeler, d’une part, que chacun des motifs de refus d’enregistrement énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 40/94 est indépendant des autres et exige un examen séparé et, d’autre part, qu’il convient d’interpréter lesdits motifs de refus à la lumière de l’intérêt général qui sous‑tend chacun d’entre eux (voir arrêt du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, EU:C:2005:547, point 59 et jurisprudence citée). Selon la jurisprudence, la notion d’intérêt général sous‑jacente à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 se confond, à l’évidence, avec la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service désigné par la marque, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance (voir arrêt du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, EU:C:2005:547, point 60 et jurisprudence citée). S’agissant de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 40/94, celui-ci poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou indications descriptives des caractéristiques de produits ou de services pour lesquels l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous. Cette disposition empêche, dès lors, que de tels signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque (arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 31).

111    Le législateur a donc, sous réserve du cas spécifique visé à l’article 51, paragraphe 2, du règlement no 40/94, fait prévaloir l’intérêt général tel que poursuivi par l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94 et par l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du même règlement sur l’intérêt de nature privée qu’un titulaire d’une marque de l’Union européenne pourrait éventuellement faire valoir, et cela sans prévoir que la procédure de nullité doive être initiée dans un certain délai.

112    Compte tenu de ce cadre réglementaire et, par ailleurs, compte tenu du fait que, en l’espèce, la demande en nullité a été introduite le 22 septembre 2016, il ne saurait être reproché à l’EUIPO que ses instances n’aient statué que le 25 octobre 2018 (division d’annulation) et le 10 septembre 2019 (chambre de recours) sur la nullité d’une marque qui avait été enregistrée le 29 mai 2001 à la suite d’une demande déposée le 9 mars 2000.

113    Les arrêts invoqués par la requérante, à savoir les arrêts du 9 mars 1978, Herpels/Commission (54/77, EU:C:1978:45), du 3 mars 1982, Alpha Steel/Commission (14/81, EU:C:1982:76), et du 26 février 1987, Consorzio Cooperative d’Abruzzo/Commission (15/85, EU:C:1987:111), ne permettent pas d’arriver à une autre conclusion.

114    En effet, ces arrêts concernent des cas où l’administration a procédé de sa propre initiative au retrait d’actes qu’elle considérait comme fautifs ou erronés. Ils couvrent donc des situations où l’administration décidait du moment de l’adoption des décisions de retrait d’actes illégaux, ayant un effet rétroactif. De telles décisions sont effectivement soumises à des conditions strictes, dont le respect d’un délai raisonnable, afin de concilier le principe de légalité avec le principe de sécurité juridique.

115    Or, en l’espèce, ainsi qu’il a déjà été indiqué, la division d’annulation a déclaré, en exerçant une compétence liée et à la suite d’une procédure spécifique, la nullité de la marque contestée sur une demande introduite auprès de l’EUIPO, pour laquelle les règles applicables ne prévoient, ni expressément ni implicitement, de limitation temporelle. À cet égard, il convient de souligner que, en vertu de l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 40/94, une décision déclarant la nullité d’une marque est subordonnée au dépôt d’une demande présentée auprès de l’EUIPO ou à la présentation d’une demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon, et, dès lors, ne peut pas être adoptée d’office par l’EUIPO. Le présent cas se distingue donc, de ce fait, de ceux visés par les arrêts invoqués par la requérante.

116    En troisième lieu, il convient de relever qu’il ressort de la réponse de la requérante aux questions du Tribunal que celle-ci ne soulève pas, par ces arguments tirés de la violation de l’article 17 de la charte des droits fondamentaux ainsi que des principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique, une exception d’illégalité de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94, au titre l’article 277 TFUE.

117    Eu égard à tout ce qui précède, il convient de rejeter les sixième et septième moyens et, partant, le recours dans son intégralité, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la recevabilité des deuxième et troisième chefs de conclusion de la requérante.

 Sur les dépens

118    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

119    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      e*Message Wireless Information Services GmbH est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et parApple Inc.

Collins

Csehi

De Baere

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 1er septembre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.