Language of document : ECLI:EU:C:2006:162



ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

9 mars 2006 (*)

«Recouvrement a posteriori des droits à l’importation ou à l’exportation – Article 220, paragraphe 2, sous b), du règlement (CEE) n° 2913/92 – Application dans le temps – Système de coopération administrative impliquant les autorités d’un pays tiers – Notion de ‘certificat incorrect’ – Charge de la preuve»

Dans l’affaire C-293/04,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Gerechtshof te Amsterdam (Pays-Bas), par décision du 14 juin 2004, parvenue à la Cour le 9 juillet 2004, dans la procédure

Beemsterboer Coldstore Services BV

contre

Inspecteur der Belastingdienst Douanedistrict Arnhem,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, MM. J. Makarczyk (rapporteur), R. Schintgen, Mme R. Silva de Lapuerta et M. G. Arestis, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: M. R. Grass,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées:

–       pour Beemsterboer Coldstore Services BV, par M. Jan van Nouhuys, advocaat,

–       pour l’Inspecteur der Belastingdienst – Douanedistrict Arnhem, par M. G. Wijngaard, en qualité d’agent,

–       pour le gouvernement néerlandais, par Mmes H. G. Sevenster et C. Wissels, en qualité d’agents,

–       pour le gouvernement italien, par MM. I. M. Braguglia, en qualité d’agent, assisté de G. Albenzio, avvocato dello Stato,

–       pour la Commission des Communautés européennes, par M. X. Lewis, en qualité d’agent, assisté de Me F. Tuytschaever, avocat,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 8 septembre 2005,

rend le présent

Arrêt

1       La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 220, paragraphe 2, sous b), du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO L 302, p. 1, ci-après le «code des douanes»), tant dans sa version d’origine que dans celle résultant du règlement (CE) n° 2700/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 16 novembre 2000 (JO L 311, p. 17).

2       Ces questions ont été soulevées dans le cadre d’un litige opposant la société de droit néerlandais Beemsterboer Coldstore Services BV (ci-après «Beemsterboer») à l’Inspecteur der Belastingdienst – Douanedistrict Arnhem (ci-après l’«inspecteur») au sujet du recouvrement a posteriori de droits à l’importation.

 Le cadre juridique

 Le code des douanes

3       L’article 220 du code des douanes, dans sa version d’origine, précise:

«1.      Lorsque le montant des droits résultant d’une dette douanière n’a pas été pris en compte conformément aux articles 218 et 219 ou a été pris en compte à un niveau inférieur au montant légalement dû, la prise en compte du montant des droits à recouvrer ou restant à recouvrer doit avoir lieu dans un délai de deux jours à compter de la date à laquelle les autorités douanières se sont aperçues de cette situation et sont en mesure de calculer le montant légalement dû et de déterminer le débiteur (prise en compte a posteriori). Ce délai peut être augmenté conformément à l’article 219.

2.      Hormis les cas visés à l’article 217 paragraphe 1 deuxième et troisième alinéas, il n’est pas procédé à une prise en compte a posteriori, lorsque:

[…]

b)      le montant des droits légalement dus n’avait pas été pris en compte par suite d’une erreur des autorités douanières elles-mêmes, qui ne pouvait raisonnablement être décelée par le redevable, ce dernier ayant pour sa part agi de bonne foi et observé toutes les dispositions prévues par la réglementation en vigueur en ce qui concerne la déclaration en douane;

[…]»

4       L’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes, a été modifié à compter du 19 décembre 2000 par le règlement n° 2700/2000, et est libellé ainsi:

«le montant des droits légalement dus n’avait pas été pris en compte par suite d’une erreur des autorités douanières elles-mêmes, qui ne pouvait raisonnablement être décelée par le redevable, ce dernier ayant pour sa part agi de bonne foi et observé toutes les dispositions prévues par la réglementation en vigueur en ce qui concerne la déclaration en douane.

Lorsque le statut préférentiel d’une marchandise est établi sur la base d’un système de coopération administrative impliquant les autorités d’un pays tiers, la délivrance d’un certificat par ces autorités, s’il se révèle incorrect, constitue une erreur qui n’était pas raisonnablement décelable au sens du premier alinéa.

Toutefois, la délivrance d’un certificat incorrect ne constitue pas une erreur lorsque le certificat a été établi sur la base d’une présentation incorrecte des faits par l’exportateur, sauf si, notamment, il est évident que les autorités de délivrance du certificat savaient ou auraient dû savoir que les marchandises ne remplissaient pas les conditions requises pour bénéficier du traitement préférentiel.

La bonne foi du redevable peut être invoquée lorsqu’il peut démontrer que, pendant la période des opérations commerciales concernées, il a fait diligence pour s’assurer que toutes les conditions pour le traitement préférentiel ont été respectées.

Le redevable ne peut toutefois pas invoquer la bonne foi lorsque la Commission a publié au Journal officiel des Communautés européennes un avis signalant des doutes fondés en ce qui concerne la bonne application du régime préférentiel par le pays bénéficiaire.»

 L’accord entre les Communautés européennes et la République d’Estonie sur la libéralisation des échanges et l’institution de mesures d’accompagnement

5       L’accord entre la Communauté européenne, la Communauté européenne de l’énergie atomique et la Communauté européenne du charbon et l’acier, d’une part, et la République d’Estonie, d’autre part, sur la libéralisation des échanges et l’institution de mesures d’accompagnement, signé le 18 juillet 1994 (JO L 373, p. 2, ci-après l'«accord» de libre échange), comprend un protocole n° 3 relatif à la définition de la notion de «produits originaires» et aux méthodes de coopération administrative, qui a été modifié par la décision n° 1/97 de la Commission mixte entre les Communautés européennes et la République d’Estonie, du 6 mars 1997 (JO L 111, p. 1, ci-après le «protocole n°3»).

6       L’article 16, paragraphe 1, du protocole n° 3, intitulé «Conditions générales», inclus dans le titre V, relatif à la preuve de l’origine, dispose:

«1.      Les produits originaires de la Communauté bénéficient des dispositions de l’accord à l’importation en Estonie, de même que les produits originaires d’Estonie à l’importation dans la Communauté, sur présentation:

a)      […] d’un certificat de circulation des marchandises EUR.1 [ci-après le «certificat EUR.1»], dont le modèle figure à l’annexe III;

[…]».

7       L’article 17 dudit protocole, intitulé «Procédure de délivrance d’un certificat de circulation des marchandises EUR.1» comporte un paragraphe 3 qui est ainsi libellé:

« L’exportateur sollicitant la délivrance d’un certificat […] EUR.1 doit pouvoir présenter à tout moment, à la demande des autorités douanières du pays d’exportation où le certificat […] EUR.1 est délivré, tous les documents appropriés prouvant le caractère originaire des produits concernés ainsi que l’exécution de toutes les autres conditions prévues par le présent protocole.»

8       Selon l’article 28, paragraphe 1, du même protocole, intitulé «Conservation des preuves de l’origine et des documents probants»:

« L’exportateur sollicitant la délivrance d’un certificat EUR.1 doit conserver pendant trois ans au moins les documents visés à l’article 17, paragraphe 3.»

9       L’article 32 du protocole n° 3, intitulé «Contrôle de la preuve de l’origine» dispose:

«1.       Le contrôle a posteriori des preuves de l’origine est effectué par sondage ou chaque fois que les autorités douanières de l’État d’importation ont des doutes fondés en ce qui concerne l’authenticité de ces documents, le caractère originaire des produits concernés ou le respect des autres conditions prévues par le présent protocole.

[…]

3.      Le contrôle est effectué par les autorités douanières du pays d’exportation. À cet effet, elles sont habilitées à exiger toutes preuves et à effectuer tous contrôles des comptes de l’exportateur ou tout autre contrôle qu’elles estiment utile.»

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

10     En 1997, Hoogwegt International BV (ci-après «Hoogwegt») a acheté des lots de beurre à l’entreprise estonienne AS Lacto Ltd (ci-après «Lacto»). Ces lots ont été déclarés à leur entrée aux Pays-Bas par Beemsterboer, expéditeur en douane, agissant pour le compte de Hoogwegt. L’Estonie a été mentionnée comme pays d’origine des marchandises, lesquelles ont donc été mises en libre pratique avec application du tarif préférentiel sur la base de l’accord de libre susvisé. Pour prouver l’origine du beurre, chaque déclaration en douane était accompagnée d’un certificat EUR.1, délivré par les autorités douanières estoniennes à la demande de Lacto.

11     En mars 2000, à la suite d’indications relatives à une fraude portant sur du beurre commercialisé entre l’Union européenne et l’Estonie, une délégation instituée par la Commission des Communautés européennes, en collaboration avec les autorités douanières nationales, a effectué un contrôle à cet égard.

12     Dans le cadre de l’enquête, il s’est avéré que Lacto n’avait pas conservé les documents initiaux confirmant l’origine du beurre exporté.

13     Par décision du 14 juillet 2000, l’inspection de la douane à Tallin (Estonie) a déclaré nuls les certificats EUR.1 et les a retirés. À la suite d’une réclamation de Lacto auprès du service des douanes estonien, la décision de retrait desdits certificats a été jugée illégale pour des raisons formelles.

14     Dans la mesure où l’origine du beurre n’a pas pu être établie, les autorités douanières néerlandaises ont procédé au recouvrement a posteriori auprès de Beemsterboer. La réclamation qu’elle avait formée contre les avis de recouvrement ayant été rejetée, Beemsterboer a introduit un recours devant la juridiction de renvoi.

15     C’est dans ces conditions que le Gerechtshof te Amsterdam a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Le nouveau texte de l’article 220, paragraphe 2, initio et sous b), du [...] [code des douanes] peut-il être appliqué dans un cas où la dette douanière a pris naissance et où le recouvrement a posteriori a eu lieu avant l’entrée en vigueur de cette disposition?

2)      Si la première question reçoit une réponse affirmative, un certificat EUR.l, dont il ne peut pas être établi qu’il est effectivement incorrect parce que l’origine des marchandises pour lesquelles il a été délivré n’a pas pu être confirmée lors d’un contrôle a posteriori, alors que les marchandises perdent leur traitement préférentiel pour cette seule raison, est-il un ‘certificat incorrect’ au sens du nouveau texte de l’article 220, paragraphe 2, initio et sous b), du [...] [code des douanes] et, si tel n’est pas le cas, une partie intéressée peut-elle invoquer cette disposition avec succès?

3)      Si la deuxième question reçoit une réponse affirmative, qui doit prouver que le certificat est fondé sur un exposé incorrect des faits par l’exportateur, ou qui doit prouver que les instances qui ont délivré le certificat [EUR.1] savaient manifestement ou auraient dû savoir que les marchandises ne pouvaient pas bénéficier d’un traitement préférentiel?

4)      Si la première question reçoit une réponse négative, une partie intéressée peut-elle invoquer avec succès l’article 220, paragraphe 2, initio et sous b), du [...] [code des douanes], tel qu’il était libellé jusqu’au 19 décembre 2000, dans un cas où il ne peut pas être établi a posteriori que les autorités douanières ont délivré un certificat EUR.l pour de bonnes raisons à l’époque où elles l’ont délivré?»

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la première question

16     Par sa première question, la juridiction de renvoi demande à la Cour si l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes, dans sa rédaction résultant du règlement n° 2700/2000, s’applique à une dette douanière ayant pris naissance et dont le recouvrement a posteriori a été entrepris avant l’entrée en vigueur dudit règlement.

17     Le gouvernement néerlandais, l’inspecteur et le gouvernement italien estiment que cette question appelle une réponse négative. Ayant rappelé les règles concernant l’application dans le temps des règles de fond en droit communautaire, le gouvernement néerlandais considère que l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes est une disposition de fond ordinaire et en déduit qu’elle ne peut avoir d’effet rétroactif. Le gouvernement italien fait valoir que la nouvelle rédaction de l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes s’applique uniquement aux dettes ayant pris naissance après le 19 décembre 2000, date d’entrée en vigueur du règlement n° 2700/2000.

18     La Commission propose de répondre à la première question par l’affirmative et rappelle que, à la lumière de l’exposé des motifs figurant dans les travaux préparatoires du règlement n° 2700/2000, les dispositions qui ont été ajoutées à l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes visaient à préciser ce texte en vue d’améliorer la sécurité juridique, plutôt qu’à le modifier. Selon Beemsterboer, la nouvelle rédaction de l’article 220 du code des douanes constituerait un éclaircissement d’une règle existant avant le 19 décembre 2000 et, en conséquence, il y aurait lieu de l’appliquer rétroactivement.

19     Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à tous les litiges pendants au moment où elles entrent en vigueur [voir arrêts du 6 juillet 1993, CT Control (Rotterdam) et JCT Benelux/Commission, C‑121/91 et C‑122/91, Rec. p I‑3873, point 22; du 7 septembre 1999, De Haan, C‑61/98, Rec. p. I‑5003, point 13; du 14 novembre 2002, Ilumitrónica, C‑251/00, Rec. p. I‑10433, point 29, et du 1er juillet 2004, Tsapalos et Diamantakis, C‑361/02 et C‑362/02, Rec. p. I‑6405, point 19].

20     À cet égard, il convient de constater que, dans la mesure ou l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes régit les conditions dans lesquelles un redevable est exonéré de la perception a posteriori des droits à l’importation à la suite d’une erreur des autorités douanières, il édicte une règle de fond. En conséquence, ladite disposition ne devrait pas, en principe, s’appliquer à des situations acquises antérieurement à son entrée en vigueur.

21     Toutefois, les règles communautaires de droit matériel peuvent exceptionnellement être interprétées comme visant des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur dans la mesure où il ressort clairement de leurs termes, finalité ou économie qu’un tel effet doit leur être attribué (voir arrêts du 12 novembre 1981, Salumi e.a., 212/80 à 217/80, Rec. p. 2735, point 9; du 15 juillet 1993, GruSa Fleich, C-34/92, Rec. p. I-4147, point 22, et du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, C-74/00 P et C-75/00 P, Rec. p. I-7869, point 119).

22     Il y a lieu d’observer qu’il ressort du onzième considérant du règlement n° 2700/2000 que la modification de l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes visait à définir, pour le cas particulier des régimes préférentiels, les notions d’erreur des autorités douanières et de bonne foi du redevable. Ainsi, sans recourir à une modification sur le fond, ledit article a pour objet d’expliciter les notions susmentionnées, déjà contenues dans la version initiale dudit article 220, et d’ores et déjà précisées par la jurisprudence de la Cour (voir, notamment, arrêts du 14 mai 1996, Faroe Seafood e.a., C‑153/94 et C‑204/94, Rec. p. I‑2465, points 92 et 97; du 19 octobre 2000, Sommer, C‑15/99, Rec. p. I‑8989, points 35 à 37; ordonnance du 11 octobre 2001, William Hinton & sons, C‑30/00, Rec. p. I‑7511, points 68 à 73, et arrêt Ilumitrónica, précité, points 42 et 43).

23     Par conséquent, il y a lieu de constater que le nouveau texte de l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes revêt un caractère essentiellement interprétatif, et qu’il convient de l’appliquer à des situations acquises antérieurement à son entrée en vigueur.

24     Cependant, l’effet ainsi reconnu à une disposition de droit matériel ne doit pas compromettre les principes fondamentaux de la Communauté, notamment les principes de sécurité juridique et de confiance légitime en vertu desquels la législation communautaire doit être claire et prévisible pour les justiciables (voir, en ce sens, arrêts Salumi e.a., précité, point 10; du 10 février 1982, Bout, 21/81, Rec. p. 381, point 13; GruSa Fleisch, précité, point 22, et du 26 avril 2005, «Goed Wonen», C‑376/02, Rec. p. I‑3445, point 33).

25     À cet égard, il convient d’observer, d’une part, qu’il découle de l’article 1er et de l’exposé des motifs de la proposition modifiée de règlement (CE) du Parlement et du Conseil modifiant le règlement n° 2913/92 [document COM(99)/236 final], que le nouveau texte de l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes tend à améliorer la sécurité juridique, tout en opérant un partage du risque d’incertitude entre l’importateur et le système et en précisant les obligations des autorités douanières. D’autre part, ainsi que le relève Mme l’avocat général au point 32 de ses conclusions, le nouveau texte renforce la protection de la confiance de l’opérateur économique concerné en cas d’erreurs des autorités douanières à propos du statut préférentiel de marchandises originaires de pays tiers.

26     Ainsi, ni le principe de la sécurité juridique ni celui de la confiance légitime ne s’opposent à l’application de la disposition en cause à des situations acquises antérieurement à son entrée en vigueur.

27     À la lumière de ce qui précède, il convient de répondre à la question posée que l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes, dans sa version issue du règlement n° 2700/2000, s’applique à une dette douanière ayant pris naissance et dont le recouvrement a posteriori a été entrepris avant l’entrée en vigueur dudit règlement.

 Sur la deuxième question

28     La deuxième question se divise en deux parties. Par la première partie de sa question, la juridiction de renvoi demande en substance si, dans la mesure où, à la suite d’un contrôle a posteriori, l’origine des marchandises pour lesquelles le certificat EUR.1 a été délivré ne peut plus être confirmée, ce certificat est un «certificat incorrect» au sens de l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes, dans sa version résultant du règlement nº 2700/2000. Par la deuxième partie de sa question, la juridiction de renvoi demande si, dans l’hypothèse où tel n’est pas le cas, une partie intéressée peut invoquer cette disposition avec succès.

29     À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il résulte des dispositions du protocole n° 3 que les produits originaires de la Communauté ou d’Estonie bénéficient du régime préférentiel prévu par l’accord, sur présentation d’un certificat EUR.1 qui constitue le titre justificatif de cette origine.

30     Il reste cependant possible, aux termes de l’article 32 dudit protocole, de procéder à un contrôle a posteriori des preuves de l’origine lorsque les autorités douanières du pays d’importation ont des doutes fondés en ce qui concerne l’authenticité des documents, le caractère originaire des produits concernés ou le respect des autres conditions prévues par ce protocole.

31     Il ressort de la décision de renvoi que, à l’issue d’un contrôle a posteriori effectué auprès de Lacto, il s’est avéré que cette dernière n’avait pas conservé les documents initiaux prouvant le caractère originaire des produits concernés et que, sur la base des indications disponibles, l’origine du beurre qu’elle avait exporté ne pouvait pas être établie.

32     À cet égard, la Cour a déjà jugé que la finalité du contrôle a posteriori est de vérifier l’exactitude de l’origine indiquée dans le certificat EUR.1, délivré auparavant (arrêts du 7 décembre 1993, Huygen e.a., C‑12/92, Rec. p. I‑6381, point 16, et du 17 juillet 1997, Pascoal & Filhos, C‑97/95, Rec. p. I‑4209, point 30).

33     Le redevable ne peut fonder une confiance légitime quant à la validité de certificats EUR.1 du fait de leur acceptation initiale par les autorités douanières d’un État membre, étant donné que le rôle de ces services, dans le cadre de la première acceptation des déclarations, ne fait nullement obstacle à l’exercice de contrôles ultérieurs (arrêt Faroe Seafood e.a., précité, point 93).

34     Ainsi, lorsqu’un contrôle a posteriori ne permet pas de confirmer l’origine de la marchandise indiquée dans le certificat EUR.1, il y a lieu de conclure qu’elle est d’origine inconnue et que, dès lors, le certificat EUR.1 et le tarif préférentiel ont été accordés à tort (arrêts précités Huygen e.a., points 17 et 18, ainsi que Faroe Seafood e.a., point 16).

35     Dans ces conditions, il convient de répondre à la première partie de la deuxième question que, dans la mesure où, à la suite d’un contrôle a posteriori, l’origine des marchandises figurant dans un certificat EUR.1 ne peut plus être confirmée, ledit certificat doit être considéré comme un «certificat incorrect» au sens de l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes, tel que modifié par le règlement n° 2700/2000.

36     Compte tenu de la réponse apportée à la première partie de la deuxième question, il n’y a pas lieu de répondre à la deuxième partie de ladite question.

 Sur la troisième question

37     La troisième question porte sur l’interprétation du troisième alinéa de l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes, dans sa version issue du règlement n° 2700/2000.

38     En premier lieu, le juge de renvoi souhaite savoir à qui il appartient de prouver qu’un certificat EUR.1 a été établi sur la base d’une présentation incorrecte des faits par l’exportateur.

39     À cet égard, il convient de constater que, conformément aux règles traditionnelles de répartition de la charge de la preuve, il appartient aux autorités douanières qui veulent se prévaloir de l’article 220, paragraphe 2, sous b), troisième alinéa, initio, du code des douanes, en vue de procéder au recouvrement a posteriori, d’apporter, à l’appui de leur prétention, la preuve que la délivrance des certificats incorrects est imputable à la présentation inexacte des faits par l’exportateur.

40     Cependant, il ressort des constatations faites par le juge national dans la décision de renvoi que, en l’espèce, les autorités douanières étaient privées de la possibilité de démontrer si les informations fournies en vue de la délivrance d’un certificat EUR.1 étaient correctes ou non, dès lors que l’exportateur n’avait pas gardé, par-devers lui, les documents probants, malgré l’obligation découlant de l’article 28, paragraphe 1, du protocole nº 3 de conserver les documents appropriés prouvant le caractère originaire des produits concernés pendant au moins trois ans.

41     Or, il revient aux opérateurs économiques de prendre, dans le cadre de leurs relations contractuelles, les dispositions nécessaires pour se prémunir contre les risques d’une action en recouvrement a posteriori (arrêt Pascoal & Filhos, précité, point 60).

42     Aussi, en vue d’atteindre la finalité poursuivie par le contrôle a posteriori, à savoir la vérification de l’authenticité et de l’exactitude du certificat EUR.1, c’est au redevable qu’il incombera, en l’espèce, de prouver que lesdits certificats établis par les autorités du pays tiers étaient basés sur une présentation exacte des faits.

43     En tout état de cause, il est constant que la Communauté européenne ne saurait supporter les conséquences préjudiciables des agissements incorrects des fournisseurs des importateurs (arrêt Pascoal & Filhos, précité, point 59).

44     En second lieu, la juridiction de renvoi souhaite savoir à qui il incombe de prouver que les autorités douanières qui ont délivré le certificat EUR.1 savaient manifestement ou auraient dû savoir que les marchandises ne remplissaient pas les conditions requises pour bénéficier du traitement préférentiel.

45     À cet égard, il suffit de constater que c’est à celui qui invoque une exception figurant in fine du troisième alinéa de l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes qu’il incombe de supporter la charge de la preuve qu’il était évident que les autorités de délivrance dudit certificat savaient ou auraient dû savoir que les marchandises ne remplissaient pas les conditions requises pour bénéficier du traitement préférentiel.

46     À la lumière de ce qui précède, il convient de répondre à la troisième question que c’est à celui qui invoque le troisième alinéa de l’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes tel que modifié par le règlement n° 2700/2000, qu’il incombe de produire les preuves nécessaires au succès de sa prétention. Ainsi, il appartient, en principe, aux autorités douanières qui veulent se prévaloir dudit article 220, paragraphe 2, sous b), troisième alinéa, initio, en vue de procéder au recouvrement a posteriori, d’apporter la preuve que la délivrance des certificats incorrects est imputable à la présentation inexacte des faits par l’exportateur. Toutefois, lorsque, à la suite d’une négligence imputable au seul exportateur, les autorités douanières se trouvent dans l’impossibilité d’apporter la preuve nécessaire que le certificat EUR.1 a été établi sur la base de la présentation exacte ou inexacte des faits par ce dernier, il incombe au redevable des droits de prouver que ledit certificat délivré par les autorités du pays tiers était basé sur une présentation exacte des faits.

 Sur la quatrième question

47     Au vu de la réponse apportée à la première question, il n’y pas lieu de statuer sur la quatrième question.

 Sur les dépens

48     La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit:

1)      L’article 220, paragraphe 2, sous b), du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié par le règlement (CE) n° 2700/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 16 novembre 2000, s’applique à une dette douanière ayant pris naissance et dont le recouvrement a posteriori a été entrepris avant l’entrée en vigueur dudit règlement.

2)      Dans la mesure où, à la suite d’un contrôle a posteriori, l’origine des marchandises figurant dans un certificat de circulation des marchandises EUR.1 ne peut plus être confirmée, ledit certificat doit être considéré comme un «certificat incorrect» au sens de l’article 220, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 2913/92, tel que modifié par le règlement n° 2700/2000.

3)      C’est à celui qui invoque le troisième alinéa de l’article 220, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 2913/92, tel que modifié par le règlement n° 2700/2000, qu’il incombe de produire les preuves nécessaires au succès de sa prétention. Ainsi, il appartient, en principe, aux autorités douanières qui veulent se prévaloir dudit article 220, paragraphe 2, sous b), troisième alinéa, initio, en vue de procéder au recouvrement a posteriori, d’apporter la preuve que la délivrance des certificats incorrects est imputable à la présentation inexacte des faits par l’exportateur. Toutefois, lorsque, à la suite d’une négligence imputable au seul exportateur, les autorités douanières se trouvent dans l’impossibilité d’apporter la preuve nécessaire que le certificat de circulation des marchandises EUR.1 a été établi sur la base de la présentation exacte ou inexacte des faits par ce dernier, il incombe au redevable des droits de prouver que ledit certificat délivré par les autorités du pays tiers était basé sur une présentation exacte des faits.

Signatures


* Langue de procédure: le néerlandais.