Language of document : ECLI:EU:T:2015:143

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

5 mars 2015 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale NEXTCARD – Refus partiel d’enregistrement par l’examinateur – Obligation de motivation – Recours manifestement dépourvu de tout fondement en droit »

Dans l’affaire T‑233/14,

Intesa Sanpaolo SpA, établie à Turin (Italie), représentée par Mes P. Pozzi, G. Ghisletti et F. Braga, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. L. Rampini, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’OHMI du 10 février 2014 (affaire R 1807/2013‑5), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal NEXTCARD comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. M. Prek (rapporteur), président, Mme I. Labucka et M. V. Kreuschitz, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 14 avril 2014,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 9 juillet 2014,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        Le 28 novembre 2012, la requérante, Intesa Sanpaolo SpA, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal NEXTCARD.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment des classes 9 et 36 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Appareils et instruments scientifiques, nautiques, géodésiques, photographiques, cinématographiques, optiques, de pesage, de mesurage, de signalisation, de contrôle (inspection), de secours (sauvetage) et d’enseignement ; appareils et instruments pour la conduite, la distribution, la transformation, l’accumulation, le réglage ou la commande du courant électrique ; appareils pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction du son ou des images ; supports d’enregistrement magnétiques, disques acoustiques ; disques compacts, DVD et autres supports d’enregistrement numériques ; mécanismes pour appareils à prépaiement ; caisses enregistreuses, machines à calculer, équipement de traitement de données, ordinateurs ; logiciels ; extincteurs » ;

–        classe 36 : « assurances ; affaires financières ; affaires monétaires ; affaires immobilières ».

4        Le 16 décembre 2012, l’examinateur a informé la requérante qu’il estimait que le signe en cause n’était pas susceptible d’être enregistré en ce qui concerne les « supports d’enregistrement magnétiques » de la classe 9 et les « affaires financières et affaires monétaires » de la classe 36, dans la mesure où celui-ci était, selon lui, descriptif de ces produits et services et ne présentait dès lors pas de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, du règlement n° 207/2009.

5        Par lettre du 17 avril 2013, la requérante a soumis ses observations à l’encontre de la position adoptée par l’examinateur.

6        Par décision du 15 juillet 2013, l’examinateur a rejeté partiellement la demande de marque communautaire, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

7        Le 13 septembre 2013, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de l’examinateur.

8        Par décision du 10 février 2014 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours.

9        La chambre de recours a considéré que le signe en cause n’était pas distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Tout d’abord, elle a estimé que les produits en cause s’adressaient aussi bien au consommateur moyen qu’au public des professionnels, de langue anglaise, dès lors que la marque demandée consiste en une expression en anglais. Ensuite, elle a fait valoir que le signe en cause sera perçu, au moins par le consommateur anglophone, comme étant composé des deux éléments verbaux « next » et « card » ayant tous deux une signification claire et connue du public pertinent. L’expression résultant de la combinaison des deux mots sera vraisemblablement entendue comme « la prochaine carte de crédit/débit » et donc comme un message promotionnel se référant, pour les produits « supports d’enregistrement magnétiques », relevant de la classe 9, à des caractéristiques de qualité et au caractère plus évolué des cartes bancaires de la requérante par rapport à celles présentes sur le marché. En ce qui concerne les services « affaires financières et monétaires », relevant de la classe 36, le signe en cause informera le public du fait que les services en question sont inhérents à ces cartes ou associés à ces dernières. Ledit message promotionnel ne demandant aucun effort d’interprétation, la chambre de recours en a conclu que le signe en cause était dépourvu du minimum de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, en précisant qu’une telle conclusion restait valable également eu égard au public des professionnels, dont le niveau d’attention, bien qu’élevé, est cependant relativement faible à l’égard des indications à caractère promotionnel.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater la violation de l’article 75 du règlement n° 207/2009 ;

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

11      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

12      Aux termes de l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal, lorsque le recours est manifestement irrecevable ou dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

13      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure, et ce même si une partie a demandé la tenue d’une audience [voir, en ce sens, ordonnances du 13 septembre 2011, ara/OHMI – Allrounder (A), T‑397/10, EU:T:2011:464, point 18, et du 17 juillet 2012, L’Oréal/OHMI ‑ United Global Media Group (MyBeauty TV), T‑240/11, EU:T:2012:391, point 10].

14      À l’appui du recours, la requérante invoque, en substance, un moyen unique, tiré de la violation de l’article 75, première phrase, du règlement n° 207/2009. Elle soutient que la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation, en ce qu’elle n’explique pas les raisons pour lesquelles la marque demandée est dépourvue de caractère distinctif, premièrement, en ce qui concerne les « supports d’enregistrement magnétiques » autres que les cartes de crédit magnétiques et, deuxièmement, en ce qui concerne les services financiers qui peuvent ne pas être associés ou liés à des cartes de crédit magnétiques.

15      À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, en vertu de l’article 75, première phrase, du règlement n° 207/2009, les décisions de l’OHMI doivent être motivées. Cette obligation de motivation a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE, selon laquelle le raisonnement de l’auteur de l’acte doit apparaître de façon claire et non équivoque. Cette obligation a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union européenne d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision. La question de savoir si la motivation d’une décision satisfait à ces exigences doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte, ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée [voir arrêt du 16 juillet 2014, Langguth Erben/OHMI (Forme d’une bouteille de boisson alcoolisée), T‑66/13, EU:T:2014:681, point 72 et jurisprudence citée].

16      En outre, il est de jurisprudence constante que, si la décision de refus d’enregistrement d’une marque doit en principe être motivée pour chacun des produits ou des services concernés, l’autorité compétente peut cependant se limiter à une motivation globale lorsque le même motif de refus est opposé pour une catégorie ou un groupe de produits ou de services présentant entre eux un lien suffisamment direct et concret, au point qu’ils forment une catégorie ou un groupe de produits ou de services d’une homogénéité suffisante [arrêt du 30 avril 2013, ABC‑One/OHMI (SLIM BELLY), T‑61/12, EU:T:2013:226, point 33 ; voir également, en ce sens, ordonnance du 18 mars 2010, CFCMCEE/OHMI, C‑282/09 P, Rec, EU:C:2010:153, points 37 à 40, et, en ce sens et par analogie, arrêt du 15 février 2007, BVBA Management, Training en Consultancy, C‑239/05, Rec, EU:C:2007:99, points 34 à 38].

17      De plus, il ressort de la jurisprudence que, en vertu du règlement n° 207/2009, l’OHMI doit examiner une demande de marque communautaire par rapport à tous les produits ou services figurant sur la liste des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé, étant entendu que, lorsque cette liste inclut une ou plusieurs catégories de produits ou de services, l’OHMI n’a pas l’obligation de procéder à une analyse de chacun des produits ou des services faisant partie de chaque catégorie, mais doit porter son examen sur la catégorie en question, en tant que telle [voir, en ce sens, arrêts du 9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, Rec, EU:T:2008:268, points 22 et 23 et jurisprudence citée, et du 12 avril 2012, Euro-Information/OHMI (EURO AUTOMATIC PAYMENT), T‑28/10, Rec, EU:T:2011:158, point 56].

18      Enfin, aux termes de l’article 65, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, le recours devant le Tribunal contre une décision d’une chambre de recours de l’OHMI « est ouvert à toute partie à la procédure devant la chambre de recours pour autant que la décision de celle-ci n’a pas fait droit à ses prétentions ».

19      En l’espèce, la requérante, par ses allégations, interprète erronément la portée de l’obligation de motivation à laquelle est soumise la chambre de recours.

20      En effet, premièrement, à propos de la classe 9, la requérante allègue un défaut de motivation en ce qui concerne les disques durs, disques compacts, DVD et autres supports d’enregistrement numériques. La décision attaquée ayant autorisé l’enregistrement pour lesdits produits, il découle de l’article 65, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009 qu’elle ne saurait faire l’objet du présent recours [voir, en ce sens, arrêts du 14 décembre 2011, Völkl/OHMI – Marker Völkl (VÖLKL), T‑504/09, Rec, EU:T:2011:739, point 55 et jurisprudence citée ; du 30 mai 2013, Buzil-Werk Wagner/OHMI – Roca Sanitario (Roca), T‑115/12, EU:T:2013:285, point 22, et du 11 décembre 2013, Smartbook/OHMI (SMARTBOOK), T‑123/12, EU:T:2013:636, points 19 et 20].

21      Deuxièmement, dans la mesure où les critiques de la requérante peuvent être comprises comme se référant à d’autres supports d’enregistrement magnétiques que les cartes bancaires magnétiques et dans la mesure où elle allègue un défaut de motivation en ce qui concerne les services financiers et monétaires non liés aux cartes bancaires, il ressort de la jurisprudence rappelée aux points 16 et 17 ci-dessus que l’examen de l’OHMI doit porter sur chaque catégorie inscrite dans une classe donnée de produits ou de services et qu’il n’appartient pas à celui-ci, mais à la demanderesse de l’enregistrement, de préciser les produits ou services concernés par une demande d’enregistrement d’une marque ni d’identifier, le cas échéant, des sous-catégories à l’intérieur d’une catégorie expressément libellée dans une classe de produits ou de services donnée. Dès lors que la requérante n’a demandé une limitation de la liste originaire ni au moment de la demande initiale ni devant la chambre de recours, elle ne saurait s’attendre à ce que cette dernière se prononce spécifiquement sur des produits ou des services contenus dans la catégorie « supports d’enregistrement magnétiques » incluse dans la classe 9 ou dans la catégorie « affaires financières et monétaires » incluse dans la classe 36.

22      Compte tenu de tout ce qui précède, il convient de conclure que la décision attaquée est suffisamment motivée. Il s’ensuit que le recours doit être rejeté comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit, cela sans qu’il soit nécessaire de s’interroger sur la recevabilité du premier chef de conclusions de la requérante.

 Sur les dépens

23      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par l’OHMI, conformément aux conclusions de celui-ci.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Intesa Sanpaolo SpA est condamnée aux dépens.

Fait à Luxembourg, le 5 mars 2015.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Prek


* Langue de procédure : l’italien.