Language of document : ECLI:EU:T:2007:263

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

12 septembre 2007(*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire tridimensionnelle se présentant sous la forme d’une tête de microphone – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l’affaire T‑358/04,

Georg Neumann GmbH, établie à Berlin (Allemagne), représentée par MR. Böhm, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Schneider, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 17 juin 2004 (affaire R 919/2002‑2), rejetant la demande d’enregistrement en tant que marque communautaire d’un signe tridimensionnel se présentant sous la forme d’une tête de microphone,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCEDES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),

composé de MM. J. D. Cooke, président, R. García-Valdecasas et Mme I. Labucka, juges,

greffier : Mme K. Andová, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 30 août 2004,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 5 janvier 2005,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 1er avril 2005,

à la suite de l’audience du 28 novembre 2006,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 9 décembre 1996, la requérante a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé consiste en la forme tridimensionnelle reproduite ci-après :

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3        La marque susvisée consiste en la forme de ce qu’il est convenu d’appeler une tête de microphone qui recouvre et protège la capsule du microphone se trouvant à l’extrémité d’une tige, laquelle renferme des composants électroniques et sert à tenir le microphone.

4        Les produits pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé relèvent de la classe 9 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Microphones, en particulier microphones de studio, microphones à condensateurs, microphones à gradient de pression et leurs pièces (compris dans la classe 9) ».

5        La requérante a revendiqué la priorité du dépôt de la marque allemande n° 39625644 du 10 juin 1996 et de son enregistrement le 18 septembre 1996.

6        Par lettre du 28 novembre 2001, l’examinateur a informé la requérante que sa marque n’était pas susceptible d’être enregistrée au motif qu’elle était dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. Aux objections de l’examinateur étaient jointes des images de microphones similaires fabriqués et commercialisés par d’autres sociétés. La requérante ayant renoncé à son droit de présenter d’autres observations, l’examinateur, par décision du 6 septembre 2002, a maintenu ses objections et a rejeté la demande d’enregistrement.

7        Le 6 novembre 2002, la requérante a formé un recours contre cette décision en invoquant le fait que certains des microphones de conception similaire auxquels se référait l’examinateur dans ses objections provenaient d’entreprises concurrentes qui, consécutivement aux démarches entreprises par elle, avaient cessé de les fabriquer et de les commercialiser. Elle faisait par ailleurs valoir que d’autres entreprises concurrentes commercialisant des microphones de conception similaire étaient originaires d’Extrême-Orient et fabriquaient des produits de peu de qualité qui n’étaient pas en concurrence directe avec les siens. Elle soutenait également que le groupe restreint de consommateurs, visé par les produits en cause, percevrait que la forme spécifique du microphone n’avait pas de signification fonctionnelle et que cette forme, en tant que combinaison d’éléments esthétiques, produisait une impression d’ensemble unique se gravant dans la mémoire. Elle a également fait observer que la forme constituant la marque demandée avait été enregistrée en tant que marque aux États-Unis.

8        Par décision du 17 juin 2004 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a confirmé la décision de l’examinateur. Elle a considéré que les éléments qui formaient la tête de microphone étaient habituels et qu’aucun élément additionnel ne la rendait apte à se démarquer visiblement de l’ensemble des formes courantes, de manière telle qu’elle puisse, du seul fait de sa forme, se graver dans la mémoire et être identifiée comme étant le produit d’une entreprise déterminée. Dès lors, elle a relevé que l’enregistrement de cette marque n’était éventuellement envisageable qu’en raison d’un caractère distinctif acquis après l’usage qui en avait été fait, mais que la requérante n’avait toutefois pas invoqué l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94. La chambre de recours a également pris acte du fait que la requérante avait réussi à empêcher des entreprises concurrentes de commercialiser des microphones ayant un design similaire, mais a estimé que le comportement adopté par ces entreprises ne pouvait suffire pour conférer à la marque demandée un caractère distinctif.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

10      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

11      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 28 janvier 2005 ainsi que dans le mémoire en réplique, la requérante a demandé l’adoption de mesures d’organisation de la procédure et d’instruction visant à établir que le public pertinent était habitué à regarder la forme donnée à la tête du microphone comme une indication d’origine et que tel était le cas de la forme en cause, dotée d’un aspect qui la distinguait des formes habituelles.

 En droit

 Arguments des parties

12      Par son moyen unique, la requérante fait valoir que la chambre de recours a violé l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 en procédant à une appréciation erronée du caractère distinctif de la marque dont l’enregistrement a été demandé.

13      En premier lieu, elle relève que la chambre de recours a commis une erreur de droit en méconnaissant le fait que le public pertinent en l’espèce porte une attention particulière à la forme qui est donnée aux têtes de microphone et perçoit dans les détails de l’aspect donné – qui peuvent apparaître au profane comme étant dictés par la nature de l’appareil – des caractéristiques qui individualisent et permettent d’identifier l’origine de ces microphones. Il en serait ainsi pour trois raisons.

14      Premièrement, les produits couverts par la marque demandée seraient des microphones de grande valeur, en particulier des microphones pour studio, ainsi qu’en attesterait le fait d’apposer une tête de microphone pour les protéger. Il s’agirait dès lors non pas d’articles ordinaires, mais d’instruments de haute technologie coûteux, qui font l’objet à ce titre d’une attention particulière.

15      À cet égard, indiquant que « les microphones pour lesquels la marque en cause a été demandée sont en pratique exclusivement les microphones de studio de haute qualité et de haute performance », la requérante a sollicité, dans son mémoire en réplique, de limiter désormais la liste des produits aux « microphones de studio et leurs composants (dans la mesure où ils sont contenus dans la classe 9) ».

16      Deuxièmement, la requérante relève que l’aptitude de la marque demandée à distinguer le produit qu’elle désigne du produit d’autres fabricants doit être appréciée au regard du public pertinent. Elle fait valoir que celui-ci a été correctement défini par la chambre de recours et que les produits visés dans la demande d’enregistrement s’adressent incontestablement à des professionnels et à des spécialistes de l’acoustique pour lesquels les microphones sont un outil de travail essentiel auxquels ils prêtent dès lors une attention particulière.

17      Troisièmement, la forme en cause ne serait appelée à remplir aucune fonction en tant que telle et elle pourrait dès lors se voir donner un aspect particulier qui la singularise. En outre, la tête de microphone dont la forme constitue la marque demandée se détacherait clairement du reste du microphone et sa proéminence capterait automatiquement sur elle l’attention de l’observateur, ce d’autant que l’aspect du microphone ne comporterait aucun autre élément qui se détache.

18      Compte tenu de ces circonstances, la requérante considère que « les principes généraux fondés sur l’expérience quant à la perception de la forme d’un produit par le consommateur », invoqués par l’OHMI dans son mémoire en réponse, n’ont aucune pertinence dans la présente affaire. En effet, le principe évoqué au point 23 de la décision attaquée, selon lequel, dans le cas d’une marque tridimensionnelle constituée par la forme du produit lui-même, la perception du public concerné n’est pas nécessairement la même que dans le cas d’une marque verbale, figurative ou tridimensionnelle qui n’est pas constituée par la forme du produit, dépendrait du public pertinent et du degré d’attention de celui-ci. Ainsi, à la différence de la présente espèce, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du Tribunal du 19 septembre 2001, Henkel/OHMI (Tablette ronde rouge et blanc) (T‑337/99, Rec. p. II‑2597), cité au point 23 de la décision attaquée, il se serait agi de produits de consommation courante destinés à l’ensemble des consommateurs finals et ce serait pour cette raison qu’il y avait lieu d’apprécier le caractère distinctif de la marque demandée dans cette affaire « en tenant compte de l’attente présumée d’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé » (arrêt Tablette ronde rouge et blanc, précité, point 47).

19      À cet égard et au soutien de sa demande de mesures d’organisation de la procédure et d’instruction (voir point 11 ci-dessus), la requérante a fait valoir, lors de l’audience, que la question de la perception du public pertinent en l’espèce pourrait seulement être tranchée par des experts, à savoir des spécialistes du son.

20      En deuxième lieu, la requérante fait valoir que la chambre de recours a fondé son appréciation sur une analyse incomplète et inexacte des caractéristiques de la marque demandée. La requérante s’accorde avec la chambre de recours sur le fait que, à l’instar de nombreuses autres têtes de microphones, la tête de microphone dont la forme constitue la marque demandée se compose d’un anneau circulaire à la base de la grille de protection, d’une capsule de microphone entourée d’un grillage et d’une monture surmontant celui-ci perpendiculairement à l’anneau circulaire (point 25 de la décision attaquée). Elle conteste, cependant, l’affirmation selon laquelle la marque demandée serait « dépourvue de tout élément additionnel susceptible d’être considéré comme frappant, particulier ou original et qui pourrait lui conférer l’aptitude à se détacher visiblement de la forme ordinaire et courante de manière telle qu’elle puisse, du seul fait de sa forme, se graver dans la mémoire et être identifiée non pas comme une quelconque tête de microphone, mais comme étant le produit d’une entreprise déterminée » (point 25 de la décision attaquée).

21      En effet, les aplatissements symétriques du grillage de part et d’autre de la monture constitueraient une « empreinte identificatrice ». Du fait de la coupe partielle du plan pratiquée dans un corps (en grillage) essentiellement cylindrique, chaque surface aurait la forme inhabituelle d’ellipses partielles hyperboliques, qui apparaîtraient à l’avant-plan et seraient donc immédiatement visibles (voir l’illustration figurant en haut à gauche au point 2 ci-dessus). Les aplatissements seraient aussi perpendiculaires et clairement visibles de côté (voir l’illustration figurant en bas à droite au point 2 ci-dessus).

22      La tête de microphone dont la forme constitue la marque demandée se distinguerait ainsi de manière marquante des têtes de microphones ordinaires et traditionnelles ayant des formes cylindriques ou sphériques. La requérante fait valoir, par ailleurs, que cette forme a été conçue pour la requérante dans les années 1960/1964 par Wilhelm Braun-Feldweg, dessinateur industriel connu, professeur de design industriel à l’école supérieure des arts plastiques de Berlin.

23      En troisième lieu, la requérante conteste la pertinence des exemples des microphones évoqués par l’examinateur dans ses objections du 28 novembre 2001. Elle relève que, s’agissant des microphones qui présentaient une tête analogue à celle dont la forme constitue la marque demandée, leurs fabricants ont été contraints de renoncer à leur fabrication et à leur commercialisation, à la suite de démarches entreprises par elle, ainsi qu’elle l’a exposé devant la chambre de recours.

24      Il serait sans importance, dans le présent contexte, de savoir si cette renonciation s’est produite en raison des droits qu’elle tire de sa marque allemande (dont le caractère distinctif aurait été jugé suffisant) qui correspond à la marque demandée, en raison de l’usage fait de celle-ci (au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la loi allemande sur les marques) ou pour une raison tirée du droit de la concurrence. Ce qui serait décisif, c’est que les utilisations faites par des tiers, évoquées par l’examinateur, n’existent plus et ne peuvent donc plus compromettre le caractère distinctif de la marque demandée. La constatation faite par la chambre de recours au point 29 de la décision attaquée serait donc sans objet.

25      En quatrième lieu, la requérante a fait également valoir lors de l’audience que la décision attaquée était erronée en droit, puisqu’elle reposait sur des considérations qui ont été rejetées par la Cour dans un arrêt rendu après le dépôt de la requête dans la présente affaire. En effet, pour refuser l’enregistrement de la marque demandée au motif que celle-ci ne présentait pas de caractère distinctif, la chambre de recours aurait affirmé, en citant le point 36 de l’arrêt du Tribunal du 2 juillet 2002, SAT.1/OHMI (SAT.2) (T‑323/00, Rec. p. II‑2839), au point 22 de la décision attaquée, que les motifs absolus de refus figurant à l’article 7, paragraphe 1, sous b) à e), du règlement n° 40/94 poursuivaient un but d’intérêt général, lequel exigeait que les signes qu’ils visaient puissent être librement utilisés par tous, et qu’il s’avérait nécessaire d’exclure la constitution d’un droit exclusif sur un signe qui, afin d’éviter de créer un avantage concurrentiel illégitime en faveur d’un seul opérateur économique, devait être laissé à la libre utilisation de tous. Or, par arrêt du 16 septembre 2004, SAT.1/OHMI (C‑329/02 P, Rec. p. I‑8317), la Cour aurait annulé l’arrêt précité, en considérant que le critère mentionné au point 36 de l’arrêt du Tribunal n’était pas pertinent pour l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

26      L’OHMI considère que c’est à bon droit que la chambre de recours a rejeté la demande d’enregistrement de la forme de tête de microphone au motif qu’elle était dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

27      Tout d’abord, s’agissant de l’argumentation de la requérante selon laquelle le public composé de spécialistes du son, contrairement aux consommateurs ordinaires, percevrait habituellement la forme d’un microphone comme une indication d’origine, l’OHMI fait valoir qu’il s’agit en réalité d’un argument de fait qui est contredit par les principes généraux fondés sur l’expérience quant à la perception de la forme d’un produit par le consommateur, tels qu’exposés dans la jurisprudence communautaire. Dès lors, l’OHMI considère que cette affirmation ne correspond pas à la réalité. Par ailleurs, lors de l’audience, l’OHMI a fait observer que la requérante fondait son argumentation sur les microphones de studio, alors que la description des produits dans la demande était plus large et n’avait pas été limitée.

28      Ensuite, l’OHMI conteste l’affirmation selon laquelle les aplatissements du grillage en fil métallique constitueraient un élément inhabituel pour des microphones.

29      Il fait valoir, à cet égard, que, hormis ses enregistrements nationaux antérieurs et les actions judiciaires introduites contre des concurrents pour faire cesser les atteintes portées aux droits qu’elle tire de ceux-ci, la requérante n’a produit aucun élément qui puisse remettre en cause le constat de l’examinateur selon lequel la forme dont l’enregistrement est demandé est une forme habituelle. Or, l’OHMI considère que l’introduction d’actions judiciaires indique peu de choses sur la situation du marché et permet encore moins de se faire une idée de la perception présumée des consommateurs. Il fait observer que, de même qu’un enregistrement national ne peut lier l’OHMI dans son appréciation, les résultats obtenus dans le cadre d’une action en contrefaçon fondée sur des droits nationaux ne peut avoir d’influence sur l’appréciation du caractère distinctif.

30      L’OHMI souligne, par ailleurs, que l’argumentation de la requérante ne concerne manifestement que l’Allemagne et les États-Unis, alors que le constat de l’examinateur est valable pour l’ensemble de l’Union européenne, puisqu’il peut être présumé que les concurrents cités commercialisent aussi leurs produits en France, au Royaume-Uni ainsi que dans d’autres États membres.

31      S’agissant des documents concernant le styliste Braun-Feldweg qui a conçu la forme dont l’enregistrement est demandé, l’OHMI souligne qu’ils ont été présentés pour la première fois devant le Tribunal. En tout état de cause, l’OHMI considère que le fait qu’un certain Braun-Feldweg ait réussi à concevoir un produit hautement technique « qui répond[ait] aux critères de beauté » confirme l’importance esthétique de la forme dont l’enregistrement est demandé, mais en aucune manière son caractère distinctif au sens du droit des marques. Cela aurait d’ailleurs déjà été reconnu par la chambre de recours au point 25 de la décision attaquée, lorsqu’elle a admis que le consommateur pouvait percevoir le design du microphone comme étant esthétique sans pour autant qu’il fût pourvu d’un caractère distinctif.

 Appréciation du Tribunal

32      Il y a lieu de rappeler que le caractère distinctif d’une marque au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 signifie que cette marque permet d’identifier les produits ou les services pour lesquels l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises (voir arrêt de la Cour du 7 octobre 2004, Mag Instrument/OHMI, C‑136/02 P, Rec. p. I‑9165, point 29, et la jurisprudence citée). Il doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, qui est constitué par le consommateur moyen desdits produits ou services, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (voir arrêt de la Cour du 22 juin 2006, Storck/OHMI, C‑24/05 P, Rec. p. I‑5677, point 23, et la jurisprudence citée).

 Sur les produits concernés

33      Il ressort des arguments avancés par la requérante devant le Tribunal qu’elle considère que les produits au regard desquels le caractère distinctif de la marque demandée doit être apprécié sont exclusivement des microphones de grande valeur et, en particulier, des microphones de studio. Or, eu égard à la liste des produits reproduite au point 4 ci-dessus, cette thèse ne saurait être accueillie. En effet, il ressort de l’utilisation, dans la description des produits, des termes « en particulier », que les microphones de studio, les microphones à condensateurs et les microphones à gradient de pression n’y figurent qu’à titre d’exemples et que la liste des produits vise, dès lors, les microphones en général.

34      À cet égard, il se peut que la requérante produise seulement des microphones de haute qualité et de grande valeur qui, partant, sont achetés exclusivement par des professionnels et des spécialistes de l’acoustique. Cependant, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence du Tribunal, des circonstances extrinsèques au droit conféré par la marque communautaire telles que le concept de commercialisation, et, en particulier, le prix du produit concerné, ne font pas l’objet de l’enregistrement et, par conséquent, ne peuvent pas être prises en considération lors de l’appréciation du caractère distinctif d’une marque [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 30 avril 2003, Axions et Belce/OHMI (Forme de cigare de couleur brune et forme de lingot doré), T‑324/01 et T‑110/02, Rec. p. II‑1897, point 36, et la jurisprudence citée].

35      Or, il ne ressort pas du dossier que la haute qualité ou la grande valeur des produits visés dans la demande d’enregistrement soient des éléments imposés nécessairement par la nature de ces produits (à savoir des microphones) ou par la forme constituant la marque demandée, telle que reproduite au point 2 ci-dessus. Au contraire, l’allégation de la requérante selon laquelle le fait d’apposer une tête de microphone atteste qu’il s’agit de microphones de grande valeur est contredite par les arguments qu’elle a avancés devant la chambre de recours, selon lesquels certains microphones de conception similaire étaient des produits de peu de qualité et n’étaient pas en concurrence directe avec ses produits. Il ne ressort pas, non plus, du dossier que la forme constituant la marque demandée est susceptible d’être apposée exclusivement sur des microphones de studio. Au contraire, la requérante affirme qu’elle ne remplit aucune fonction en tant que telle.

36      Par ailleurs, le Tribunal estime qu’il n’y a pas lieu d’accéder à la demande tendant à limiter la liste des produits désignés dans la demande d’enregistrement, telle que reproduite au point 4 ci-dessus, aux « microphones de studio et leurs composants », que la requérante a formulée, à titre subsidiaire, dans son mémoire en réplique. En effet, le Tribunal considère que cette demande vise une modification du public pertinent au regard duquel la chambre de recours a analysé le caractère distinctif de la marque demandée et, par conséquent, vise à modifier nécessairement la portée du litige. Or, il est rappelé, à cet égard, que, aux termes de l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal, les mémoires des parties ne peuvent modifier l’objet du litige devant la chambre de recours. En effet, il appartient au Tribunal, dans le présent contentieux, de contrôler la légalité des décisions des chambres de recours [arrêts du Tribunal du 9 octobre 2002, KWS Saat/OHMI (Nuance d’orange), T‑173/00, Rec. p. II‑3843, point 13, et du 21 avril 2005, Ampafrance/OHMI – Johnson & Johnson (monBeBé), T‑164/03, Rec. p. II‑1401, points 20 et 21].

37      Par conséquent, le caractère distinctif de la marque demandée doit être apprécié au regard des produits figurant dans la liste mentionnée au point 4 ci-dessus.

 Sur le public pertinent

38      S’agissant du public pertinent, il y a lieu de considérer que les produits concernés ne sont pas, en principe, destinés à un large public, mais à un cercle restreint de consommateurs. Par conséquent, il y a lieu d’adopter la définition retenue par la chambre de recours au point 24 de la décision attaquée, non contestée par la requérante, selon laquelle les produits concernés visent « le groupe restreint de personnes qui ont des connaissances spéciales en matière de microphones ».

39      Cependant, compte tenu des considérations qui précèdent au sujet des produits concernés, il n’y a pas lieu de comprendre cette définition comme visant « exclusivement [les] professionnels, en particulier [les] techniciens du son pour lesquels les microphones sont un outil de travail », comme le suggère la requérante. En effet, les microphones, compris sans la limitation sollicitée par la requérante dans son mémoire en réplique, s’adressent certainement à un public plus large, à savoir également aux consommateurs qui ne s’en servent pas à des fins professionnelles.

40      Il convient de rappeler, par ailleurs, que la perception de la marque par le public pertinent est influencée par son niveau d’attention, qui est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause (arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 26). En l’espèce, l’on peut présumer que, les microphones étant des biens d’un usage moins fréquent et d’une plus grande valeur que des produits de consommation courante, le public est susceptible d’avoir un degré d’attention élevé lors du choix des produits en cause.

 Sur le caractère distinctif

41      Selon une jurisprudence constante, les critères d’appréciation du caractère distinctif des marques tridimensionnelles constituées par l’apparence du produit lui-même ne sont pas différents de ceux applicables aux autres catégories de marques (voir arrêt Storck/OHMI, précité, point 24, et la jurisprudence citée). Partant, il y a lieu d’apprécier le caractère distinctif de la marque demandée au regard des critères mentionnés au point 32 ci-dessus.

42      Toutefois, dans le cadre de l’application de ces critères, la perception du public pertinent n’est pas nécessairement la même dans le cas d’une marque tridimensionnelle, constituée par l’apparence du produit lui-même, que dans le cas d’une marque verbale ou figurative, qui consiste en un signe indépendant de l’aspect des produits qu’elle désigne. En effet, les consommateurs moyens n’ont pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se fondant sur leur forme ou celle de leur emballage, en l’absence de tout élément graphique ou textuel, et il pourrait donc s’avérer plus difficile d’établir le caractère distinctif s’agissant d’une telle marque tridimensionnelle que s’agissant d’une marque verbale ou figurative (voir arrêt Storck/OHMI, précité, point 25, et la jurisprudence citée).

43      Dans ces conditions, seule une marque qui, de manière significative, diverge de la norme ou des habitudes du secteur et, de ce fait, est susceptible de remplir sa fonction essentielle d’origine n’est pas dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 (voir arrêt Storck/OHMI, précité, point 26, et la jurisprudence citée).

44      En l’espèce, il y a lieu d’examiner, à titre liminaire, les arguments tirés de ce que le public pertinent serait sensibilisé à la forme des têtes de microphone en tant qu’indication de l’origine.

45      À cet égard, d’une part, il y a lieu de constater que, contrairement à ce qu’affirme la requérante, la chambre de recours n’a commis aucune erreur de droit en rappelant, au point 23 de la décision attaquée, que la perception du public pertinent n’est pas nécessairement la même dans le cas d’une marque tridimensionnelle, constituée par l’apparence du produit lui-même, que dans le cas d’une marque verbale ou figurative, qui consiste en un signe indépendant de l’aspect des produits qu’elle désigne. En effet, ce faisant, la chambre de recours n’a nullement considéré que le consommateur était, par principe, indifférent à la forme en tant qu’indication de la provenance des produits ou que la forme d’une tête de microphone ne pouvait jamais présenter un caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

46      D’autre part, s’agissant de la perception du public pertinent en l’espèce, le Tribunal considère que la circonstance que le consommateur moyen des produits concernés est averti et doté d’un degré d’attention élevé ne suffit pas, à elle seule, pour établir qu’il est habitué à voir, dans la forme de ces produits, une indication d’origine. En effet, s’il est possible de présumer que ce public sera plus attentif aux différents détails techniques ou esthétiques du produit, cela n’implique pas automatiquement qu’il percevra ceux-ci comme ayant la fonction d’une marque. Or, le Tribunal relève, à cet égard, que la requérante n’avance aucun élément concret de nature à établir l’existence d’une pratique dans le secteur concerné qui consisterait à différencier les produits des différents fabricants en fonction de leur forme. En absence de tels éléments, l’argument selon lequel la forme d’une tête de microphone se prêterait particulièrement bien à une individualisation des produits concernés est également insuffisant.

47      Il y a lieu d’ajouter que, même si le consommateur moyen des produits en cause était pleinement apte à percevoir la forme des têtes de microphones comme une indication de leur origine, cette constatation ne signifierait pas que toute forme de tête de microphone possède le caractère distinctif requis pour son enregistrement en tant que marque communautaire. En effet, pour conclure au caractère distinctif de la marque demandée dans une telle hypothèse, il y aurait encore lieu de vérifier si la forme en question présente des caractéristiques suffisantes pour retenir l’attention du public [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 24 novembre 2004, Henkel/OHMI (Forme d’un flacon blanc et transparent), T‑393/02, Rec. p. II‑4115, point 34, et la jurisprudence citée].

48      S’agissant de la question de savoir si la marque demandée est ou non dépourvue de caractère distinctif, il convient de prendre en considération l’impression d’ensemble qu’elle produit, ce qui n’est pas incompatible avec un examen successif des différents éléments de présentation utilisés pour cette marque. En effet, il peut être utile, au cours de l’appréciation globale, d’examiner chacun des éléments constitutifs de la marque concernée (voir arrêt de la Cour du 30 juin 2005, Eurocermex/OHMI, C‑286/04 P, Rec. p. I‑5797, points 22 et 23, et la jurisprudence citée).

49      Selon la description faite par la requérante de la marque demandée, qui apparaît exacte au vu de la reproduction de celle-ci figurant au point 2 ci-dessus, ladite marque est caractérisée par les éléments suivants :

–        un anneau circulaire en métal ;

–        une monture en métal perpendiculaire à l’anneau circulaire ;

–        deux demi-têtes en grillage se faisant face, allant de l’anneau circulaire à la monture ;

–        deux aplatissements des demi-têtes convergeant face à face vers le sommet de la boule en forme d’ellipses partielles hyperboliques.

50      Alors que la requérante s’accorde avec la chambre de recours sur le fait que les trois premiers des éléments susmentionnés caractérisent également de nombreuses autres têtes de microphone, elle soutient que la forme de la tête de microphone constituant la marque demandée se distingue de manière très marquante de celle des têtes de microphone ordinaires et traditionnelles en raison des aplatissements symétriques du grillage de part et d’autre de la monture. En effet, du fait de la coupe partielle du plan pratiqué dans un corps essentiellement cylindrique, chaque surface aurait la forme inhabituelle d’ellipses partielles hyperboliques qui apparaîtraient clairement à l’avant-plan ainsi que de côté et constitueraient une « empreinte identificatrice » de la marque demandée. Elle relève que la chambre de recours a omis de prendre en compte cette caractéristique et a donc fondé son appréciation du caractère distinctif sur une analyse incomplète de la marque en cause.

51      Force est de constater, à cet égard, que la chambre de recours, dans sa description des éléments composant la marque demandée figurant au point 25 de la décision attaquée, n’a pas mentionné les aplatissements du grillage. Cependant, il ressort également de ce point qu’elle a fondé sa conclusion, selon laquelle la marque demandée était dépourvue de tout élément additionnel de nature à la rendre apte à se graver dans la mémoire et à être identifiée en tant que produit d’une entreprise déterminée, sur l’examen des pièces produites par l’examinateur.

52      Or, l’analyse des pièces du dossier de la chambre de recours confirme que plusieurs têtes de microphone évoquées par l’examinateur se caractérisent par des aplatissements du grillage de sorte que leurs surfaces ont une forme d’ « ellipses partielles hyperboliques ». Par ailleurs, la requérante admet elle-même que, parmi les exemples donnés par l’examinateur, il y avait des têtes de microphone de forme « analogue » ou « similaire ». Du reste, il ressort du dossier de la chambre de recours que les mesures qu’elle a prises à l’égard de certaines de ces entreprises ont été justifiées par le fait qu’elles fabriquaient ou commercialisaient des têtes de microphone ayant un design présentant des caractéristiques identiques ou quasi identiques à celles de la marque de la requérante.

53      Le Tribunal considère, dans ces circonstances, que le caractère incomplet de la description des éléments composant la marque demandée ne remet pas en cause la conclusion susmentionnée de la chambre de recours. En tout état de cause, il y a lieu de rappeler que, selon l’économie du règlement n° 40/94, l’enregistrement ne peut avoir lieu que sur le fondement et dans les limites de la demande d’enregistrement présentée à l’OHMI par le demandeur. Il s’ensuit que la description de la marque demandée effectuée par la chambre de recours n’a pas de pertinence pour l’examen du caractère distinctif de la forme en cause, dès lors que seule la forme telle que reproduite au point 2 ci-dessus doit faire l’objet de l’examen [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 30 novembre 2005, Almdudler-Limonade/OHMI (Forme d’une bouteille de limonade), T‑12/04, non publié au Recueil, point 42, et du 31 mai 2006, De Waele/OHMI (Forme d’une saucisse), T‑15/05, Rec. p. II‑1511, point 36].

54      Or, il convient de souligner que, mis à part les aplatissements du grillage en forme d’ellipses partielles hyperboliques, la requérante ne fait état d’aucune caractéristique de la forme constituant la marque demandée qui, prise seule ou en combinaison avec d’autres, permettrait au public pertinent de distinguer ses produits des produits d’autres entreprises. Le Tribunal doit en conclure que les éventuelles différences existant entre la forme constituant la marque demandée et les microphones caractérisés par des aplatissements du grillage en forme d’ellipses partielles hyperboliques qui figurent dans le dossier de la chambre de recours ne seraient pas de nature à retenir l’attention du public pertinent en tant qu’indication de l’origine des produits en cause. Par ailleurs, compte tenu du degré de similitude entre la marque demandée et les autres formes analysées, cette conclusion n’est pas remise en cause par le fait que le public pertinent est susceptible de manifester un niveau d’attention élevé lors du choix des produits en cause.

55      En outre, le fait que la forme de la tête de microphone constituant la marque demandée ne remplisse aucune fonction en tant que telle n’est pas non plus de nature à remettre en cause cette conclusion. En effet, dans la mesure où le public pertinent perçoit le signe comme une indication de l’origine commerciale du produit ou du service, le fait que ce signe remplisse ou non simultanément une fonction autre que celle indicative de l’origine commerciale, par exemple une fonction technique, est sans incidence sur son caractère distinctif [voir arrêt du Tribunal Nuance d’orange, précité, point 30].

56      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la marque demandée se distinguerait de manière marquante des têtes de microphones ordinaires et traditionnelles ayant des formes cylindriques ou sphériques, il convient de constater que le public pertinent, tel que défini par la chambre de recours, qui possède des connaissances spéciales dans le domaine concerné aura connaissance non seulement des formes ordinaires et traditionnelles des produits en cause, mais également des formes moins typiques qui pourraient paraître au profane comme inhabituelles. Or, le Tribunal considère que les exemples figurant dans le dossier de la chambre de recours démontrent à suffisance de droit que le public pertinent est habitué à la présence de têtes de microphones qui sont dotées de cette caractéristique que la requérante considère comme étant une « empreinte identificatrice » de la marque demandée et donc que ce type de têtes de microphone fait partie de la norme ou des habitudes du marché.

57      Il est rappelé, cependant, que la requérante conteste la pertinence des exemples de l’examinateur. Elle fait observer que, s’agissant des microphones évoqués par l’examinateur qui présentaient une tête analogue à celle dont la forme constitue la marque demandée, leurs fabricants ont été contraints de renoncer à leur fabrication et à leur commercialisation, ainsi qu’elle l’a exposé devant la chambre de recours. Les utilisations évoquées par l’examinateur n’existant plus, elles ne pourraient plus compromettre le caractère distinctif de la marque demandée.

58      À cet égard, en premier lieu, le Tribunal considère que les allégations factuelles de la requérante n’ont pas été établies à suffisance de droit. En effet, ainsi que l’OHMI l’a fait observer lors de l’audience, il ne ressort pas du mémoire exposant les motifs de recours, ou des ses annexes, que des mesures de défense aient été prises avec succès à l’égard de toutes les formes analogues évoquées par l’examinateur. En particulier, quant au microphone Røde, il apparaît que des mesures de défense ont été prises seulement à l’égard du distributeur allemand de ses produits, Kotec Music Electronic.

59      En second lieu, il y a lieu de constater qu’il ressort du dossier de la chambre de recours que la requérante a pris des mesures de défense à l’égard de certaines formes analogues postérieurement à la date du dépôt de la demande d’enregistrement. Dans ces conditions, rejeter la pertinence de ces exemples de formes au motif que les concurrents de la requérante auraient renoncé à leur utilisation serait de nature à conduire à l’enregistrement d’une marque qui était dépourvue de caractère distinctif intrinsèque au moment du dépôt de la demande. Or, un tel résultat ne saurait être accepté [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 6 mars 2003, DaimlerChrysler/OHMI (Calandre), T‑128/01, Rec. p. II‑701, point 41].

60      En troisième lieu et en tout état de cause, le Tribunal considère que c’est à bon droit que la chambre de recours a constaté, au point 29 de la décision attaquée, que le comportement adopté, à tort ou à raison, par des entreprises concurrentes ne peut suffire en l’espèce pour conférer un caractère distinctif à la marque demandée.

61      En effet, comme il a été relevé ci-dessus, le public pertinent est déjà habitué à des formes analogues à celle constituant la marque demandée et c’est en raison de cette habitude que la marque demandée est dépourvue de caractère distinctif intrinsèque. Or, il n’y a aucune raison de penser que la circonstance que les entreprises concurrentes aient été contraintes de renoncer à produire ou à commercialiser des produits présentant une forme analogue à celle constituant la marque demandée ait entraîné un changement soudain de la norme ou des habitudes du secteur.

62      Il y a lieu d’ajouter que la pertinence des exemples de formes analogues aux fins de l’examen du caractère distinctif de la marque demandée, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, ne saurait être niée au motif que le comportement des tiers produisant ou commercialisant des produits ayant ces formes pourrait éventuellement relever des législations nationales relatives à la concurrence déloyale (voir, en ce sens, arrêt Forme d’une bouteille de limonade, précité, point 51) ou au droit des marques. Il est rappelé, en effet, que le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national. Par conséquent, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque communautaire ne doit être apprécié que sur le fondement de la réglementation communautaire pertinente [arrêts du Tribunal du 7 février 2002, Mag Instrument/OHMI (Forme de lampes de poche), T‑88/00, Rec. p. II‑467, point 41, et Forme d’un flacon blanc et transparent, précité, point 45]. Au demeurant, la requérante n’a pas établi que les formes évoquées par l’examinateur ne reflètent pas la norme ou les habitudes réelles du secteur concerné.

63      Dans ces conditions, la pertinence des exemples retenus par l’examinateur aux fins de l’examen du caractère distinctif de la marque demandée ne saurait être remise en cause.

64      Par ailleurs, s’agissant des éléments de preuve tendant à démontrer l’excellence du design de la forme en cause, il y a lieu de rappeler que la circonstance que des produits aient un design de qualité n’implique pas nécessairement qu’une marque constituée de la forme tridimensionnelle de ces produits permet ab initio de distinguer lesdits produits de ceux d’autres entreprises, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 (arrêt Mag Instrument/OHMI, précité, point 68). Par conséquent, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré qu’il était possible que les consommateurs perçoivent le design de la marque demandée comme esthétique, mais qu’il était improbable qu’ils y voient une référence à l’origine des produits (point 25 de la décision attaquée).

65      En outre, il y a lieu de rejeter, sans qu’il soit nécessaire d’examiner sa recevabilité, l’argument présenté par la requérante pour la première fois à l’audience, selon lequel la chambre de recours, au point 22 de la décision attaquée, se serait référée à tort au point 36 de l’arrêt SAT.2, annulé par la Cour (voir point 25 ci-dessus). En effet, il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours a conclu au défaut de caractère distinctif de la marque demandée au motif que celle-ci ne pourrait pas, du seul fait de sa forme, se graver dans la mémoire du public pertinent et être identifiée non pas comme étant une forme quelconque de tête de microphone, mais comme étant le produit d’une entreprise déterminée (point 25 de la décision attaquée). Dès lors, la chambre de recours ne s’est pas fondée sur les considérations énoncées au point 36 de l’arrêt SAT.2, mais s’est attachée à déterminer si la marque demandée permettrait au public pertinent de distinguer les produits de la requérante de ceux qui ont une autre provenance. Partant, nonobstant les considérations figurant aux points 22 et 27 de la décision attaquée, la chambre de recours a fondé sa décision en faisant une exacte application des critères pertinents, conformément à la jurisprudence rappelée au point 32 ci-dessus.

66      Enfin, il y a lieu de rejeter également la demande de mesures d’organisation de la procédure ou d’instruction (voir point 11 ci-dessus). Il est rappelé, à cet égard, que c’est au Tribunal qu’il appartient d’apprécier l’utilité de telles mesures (arrêt de la Cour du 2 octobre 2003, Corus UK/Commission, C‑199/99 P, Rec. p. I‑11177, point 67, et arrêt du Tribunal du 20 mars 1991, Pérez-Mínguez Casariego/Commission, T‑1/90, Rec. p. II‑143, point 94). Or, en l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par l’ensemble de la procédure, le dossier de la chambre de recours contenant, ainsi que cela résulte des considérations qui précèdent, des éléments suffisants pour établir le bien-fondé du motif de refus retenu en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

67      Au vu de tout ce qui précède, le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

68      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Georg Neumann GmbH est condamnée aux dépens.

Cooke

García-Valdecasas

Labucka

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 septembre 2007.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      J. D. Cooke


* Langue de procédure : l’allemand.