Language of document : ECLI:EU:T:1999:127

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre élargie)

17 juin 1999 (1)

«Aides d'État - Plaintes d'entreprises concurrentes - Protection juridictionnelle des plaignantes -

Sucre - Aide octroyée en exécution d'un régime général d'aides d'État approuvé par la Commission - Aide d'État à la formation professionnelle - Aide d'État dans le cadre d'un cofinancement au titre du régime des fonds structurels»

Dans l'affaire T-82/96,

Associação dos Refinadores de Açúcar Portugueses (ARAP), association de droit portugais, établie à Lisbonne,

Alcântara Refinarias - Açúcares SA, société de droit portugais, établie à Santa Iria de Azóia (Portugal),

RAR Refinarias de Açúcar Reunidas SA, société de droit portugais, établie à Porto (Portugal),

représentées par Me Gerard van der Wal, avocat près le Hoge Raad der Nederlanden, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Aloyse May, 31, Grand-rue,

parties requérantes,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. Nicholas Khan, Anders Christian Jessen et James Flett, membres du service juridique, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

soutenue par

République portugaise, représentée par Mme Susana Brasil de Brito, consultante principale au centre juridique de la présidence du Conseil des ministres, et M. Luís Inez Fernandes, directeur du service juridique de la direction générale des affaires communautaires, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l'ambassade du Portugal, 33, allée Scheffer,

et

DAI - Sociedade de Desenvolvimento Agro-industrial SA, société de droit portugais, établie à Monte da Barca (Portugal), représentée par Mes Luís Sáragga Leal, Dulce Franco et Ricardo Oliveira, avocats au barreau de Lisbonne, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Aloyse May, 31, Grand-rue,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision de la Commission du 11 janvier 1996 de ne pas soulever d'objections aux aides d'État N11/95 en faveur de DAI - Sociedade de Desenvolvimento Agro-industrial SA, ainsi que de la lettre de la Commission du 19 mars 1996 adressée aux requérantes,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre élargie),

composé de MM. R. M. Moura Ramos, président, R. García-Valdecasas, Mmes V. Tiili, P. Lindh et M. P. Mengozzi, juges,

greffier: M. A. Mair, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 18 novembre 1998,

rend le présent

Arrêt

Faits et procédure

Antécédents du litige

1.
    Par lettre du 11 janvier 1996, la Commission a notifié au gouvernement portugais sa décision de ne soulever aucune objection, au titre des articles 92 du traité CE (devenu, après modification, article 87 CE) et 88 CE (ex-article 93), à l'égard, notamment, des aides d'État N11/95 accordées par le Portugal au projet d'investissement en faveur de DAI - Sociedade de Desenvolvimento Agro-industrial SA (ci-après «DAI»), en vue de la création d'une raffinerie de sucre de betterave à Coruche, dans la vallée du Tage et de Sorraia (ci-après «décision du 11 janvier 1996» ou «décision attaquée»).

2.
    Le projet d'investissement en cause concernait au départ une capacité de production de sucre installée maximale de 60 000 tonnes par an, correspondant au quota de sucre blanc attribué au Portugal continental par l'article 26 et l'annexe I, chapitre XIV, sous c), de l'acte relatif aux conditions d'adhésion du royaume d'Espagne et de la République portugaise et aux adaptations des traités (ci-après «acte d'adhésion»), qui modifient le règlement (CEE) n° 1785/81 du Conseil, du 30 juin 1981, portant organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (JO L 177, p. 4, ci-après «règlement n° 1785/81»). Aux termes de l'acte d'adhésion, ce quota est destiné aux entreprises établies dans la région continentale du Portugal, qui sont susceptibles «d'y commencer une production de sucre». Il a été porté à 70 000 tonnes par le règlement (CE) n° 1599/96 du Conseil, du 30 juillet 1996, modifiant le règlement n° 1785/81 (JO L 206, p. 43).

3.
    La procédure d'examen des aides susmentionnées en faveur de DAI s'est déroulée de la manière suivante devant la Commission: dans un premier temps, les autorités portugaises avaient notifié ces aides en vue d'obtenir un concours financier des fonds structurels. Cette demande d'aide communautaire, présentée d'abord au titre du Fonds européen de développement régional (FEDER), avait été modifiée pour être présentée ensuite au titre du Fonds européen d'orientation et de garantieagricole (FEOGA), section «orientation», dans la mesure où elle devait être examinée au regard des règles relatives au secteur agricole et non à l'industrie.

4.
    Les raffineries de sucre de canne Alcântara Refinarias - Açúcares SA et RAR Refinarias de Açúcar Reunidas SA , qui étaient alors les seuls producteurs de sucre établis au Portugal continental, ainsi que l'association regroupant ces deux raffineries, Associação dos Refinadores de Açúcar Portugueses (ARAP), ont déposé des plaintes contre les aides susmentionnées, destinées à DAI.

5.
    C'est à la suite de ces plaintes que les autorités portugaises ont, dans un second temps, également notifié ces aides au titre de l'article 88, paragraphe 3, CE.

6.
    Par lettre du 19 mars 1996, la Commission a informé les trois plaignantes de sa décision du 11 janvier 1996 de ne pas soulever d'objections à l'égard de ces aides, au titre des articles 92 du traité CE et 88 CE.

Cadre juridique

7.
    Les aides susvisées s'inscrivent dans le cadre juridique entourant la politique de la Communauté en matière d'aides d'État et d'interventions des fonds structurels, dans le secteur de l'agriculture. En vertu de son article 36, premier alinéa, CE (ex-article 42, premier alinéa), les dispositions du traité relatives aux aides d'État ne sont applicables «à la production et au commerce des produits agricoles que dans la mesure déterminée par le Conseil [...], compte tenu des objectifs [de politique agricole commune] énoncés à l'article [33 CE (ex-article 39)]».

8.
    A cet égard, le règlement n° 1785/81 énonce, en son article 44, que, «sous réserve de dispositions contraires [de ce même] règlement, les articles [92 du traité CE, 88 CE et 89 CE] sont applicables à la production et au commerce des produits visés à l'article 1er, paragraphe 1», parmi lesquels figurent, notamment, le sucre de betterave et le sucre de canne, ainsi que les betteraves sucrières et les cannes à sucre. Aux termes de l'article 45 de ce règlement, celui-ci «doit être appliqué de telle sorte qu'il soit tenu compte, parallèlement et de manière appropriée, des objectifs prévus aux articles [33 CE et 131 CE (ex-article 110)]».

9.
    Par ailleurs, pour ce qui est du cofinancement par la Communauté de certains investissements au titre du régime des fonds structurels, en vue de renforcer la cohésion économique et sociale conformément à l'article 130 A du traité CE (devenu, après modification, article 158 CE), le règlement (CEE) n° 2052/88 du Conseil, du 24 juin 1988, concernant les missions des fonds à finalité structurelle, leur efficacité ainsi que la coordination de leurs interventions entre elles et celles de la Banque européenne d'investissement et des autres instruments financiers existants (JO L 185, p. 9, ci-après «règlement n° 2052/88»), donne aux fonds structurels mission, notamment, de promouvoir le développement et l'ajustementstructurel des régions en retard de développement (objectif n° 1), d'accélérer l'adaptation des structures agricoles [objectif n° 5 a)] et de promouvoir le développement des zones rurales [objectif n° 5 b)]. D'après l'annexe de ce règlement, le Portugal est considéré en totalité comme une région visée par l'objectif n° 1. Le règlement (CEE) n° 4256/88 du Conseil, du 19 décembre 1988, prévoit les dispositions d'application du règlement n° 2052/88, en ce qui concerne le fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «orientation» (JO L 374, p. 25), et a été modifié par le règlement (CEE) n° 2085/93 du Conseil du 20 juillet 1993 (JO L 193, p. 44).

10.
    En application de l'article 10 du règlement n° 4256/88, du 19 décembre 1988, précité, le Conseil a défini les conditions et les modalités de la contribution du FEOGA, section «orientation», aux mesures d'amélioration des conditions de commercialisation et de transformation des produits agricoles, en vue de la réalisation des objectifs visés par le règlement n° 2052/88, dans son règlement (CEE) n° 866/90, du 29 mars 1990, concernant l'amélioration des conditions de transformation et de commercialisation des produits agricoles (JO L 91, p. 1), modifié en dernier lieu et refondu par le règlement (CE) n° 951/97 du Conseil, du 20 mai 1997, concernant l'amélioration des conditions de transformation et de commercialisation des produits agricoles (JO L 142, p. 22, ci-après «règlement n° 866/90»). L'article 1er du règlement n° 866/90 institue, en son paragraphe 1, une action commune au titre de l'objectif n° 5 a), du règlement n° 2052/88, laquelle vise également à contribuer à la réalisation, notamment, des objectifs nos 1 et 5 b), visés à l'article 1er dudit règlement.

11.
    Le règlement n° 866/90 prévoit, en son article 2, l'adoption par la Commission de critères pour la sélection des investissements devant bénéficier du financement communautaire, dénommés «critères de choix». Il précise, en son article 8, paragraphe 1, que ces critères de choix déterminent les investissements à retenir pour un concours du Fonds, en fixant des priorités et en indiquant les investissements à exclure d'un financement communautaire. Aux termes du paragraphe 2 de cet article 8, «les critères de choix sont établis conformément aux orientations des politiques communautaires et, notamment, de la politique agricole commune».

12.
    En application de l'article 8, paragraphe 3, du règlement n° 866/90, la Commission a adopté la décision 94/173/CE, du 22 mars 1994, relative à l'établissement des critères de choix à retenir pour les investissements concernant l'amélioration des conditions de transformation et de commercialisation des produits agricoles et sylvicoles et abrogeant la décision 90/342/CEE, du 7 juin 1990 (JO L 79, p. 29, ci-après «décision 94/173»). Il ressort du préambule de cette décision que «les critères de choix expriment les orientations de la politique agricole commune» (septième considérant), et que leur application «devrait tenir compte des besoins spécifiques dûment justifiés de certaines productions locales» (cinquièmeconsidérant). Cette décision exclut, à annexe à laquelle renvoie son article 1er, «tous les investissements dans le secteur du sucre [...], à l'exception de ceux qui prévoient:

-    [...]

-    l'utilisation du quota prévu par l'acte d'adhésion du Portugal (pour le continent, 60 000 tonnes de sucre).»

13.
    Par ailleurs, aux termes de l'article 16, paragraphe 5, du règlement n° 866/90, «les États membres peuvent prendre, dans le domaine du présent règlement, des mesures d'aides dont les conditions ou modalités d'octroi s'écartent de celles qui sont prévues dans le présent règlement ou dont les montants excèdent les plafonds qui y sont prévus, sous réserve que ces mesures soient prises en conformité avec les articles [92 du traité CE, 88 CE et 89 CE]». Lors de l'application de ces dispositions du traité à des mesures d'aide d'État, la Commission applique par analogie, notamment, les limitations sectorielles relatives au cofinancement de tels investissements par la Communauté, d'après l'encadrement des aides d'État relatives aux investissements dans le secteur de la transformation et de la communication des produits agricoles, du 2 février 1996 (JO C 29, p. 4). Selon cet encadrement, est ainsi exclue toute aide d'État en rapport avec des investissements visés au point 1.2 de l'annexe à décision n° 94/173 ou visés au point 2 de cette annexe si les conditions particulières qui y sont prévues ne sont pas remplies.

Aides examinées dans la décision du 11 janvier 1996

14.
    Les aides en faveur de DAI, examinées par la Commission dans la décision du 11 janvier 1996, sont de trois types. Une première aide de 1 275 290 000 ESC se présente sous forme d'exonérations fiscales accordées dans le cadre du régime général d'aides institué au Portugal par le décret-loi 95/90, du 20 mars 1990, amendant le «Estatuto dos Beneficios Fiscais» (statut des avantages fiscaux portugais) et instaurant un régime spécifique en faveur des grands projets d'investissements. Ce régime prévoit des exonérations fiscales spéciales, limitées à une période de dix ans, en faveur des sociétés réalisant des investissements supérieurs à 10 milliards d'ESC. L'importance maximale de l'aide peut atteindre 10 % net des investissements effectués et, dans des cas exceptionnels, 20 % de ces investissements.

15.
    Le régime institué par le décret-loi 95/90 a été approuvé, en application de l'article 92 du traité CE, par une décision de la Commission du 3 juillet 1991 [SG (91) D/13312], notifiée au gouvernement portugais le 15 juillet suivant, à condition que les aides individuelles respectent «les réglementations et encadrements du droit communautaire visant certains secteurs industriels, agricoles et de la pêche» (ci-après «décision du 3 juillet 1991» ou «décision d'approbation»). En outre, la décision d'approbation impose au gouvernementportugais de notifier «tous les projets bénéficiant d'exonérations d'une importance entre 10 et 20 % (ESL) ainsi que tous ceux relevant des secteurs sensibles». Ce régime général d'aides était en vigueur jusqu'au 31 décembre 1995. Par décision notifiée au gouvernement portugais le 30 mai 1996, la Commission a approuvé la prorogation de ce régime aux mêmes conditions, jusqu'en 1999, en éliminant toutefois l'obligation de notifier les projets relevant des secteurs sensibles, qui n'est plus mentionnée.

16.
    Dans sa décision du 11 janvier 1996, la Commission constate que les exonérations fiscales en faveur de DAI ne dépassent pas 10 % de l'investissement et que sa décision d'approbation soumet l'octroi de ces aides aux règles communautaires applicables au secteur agricole. Après avoir précisé que son examen du projet en objet, pour la partie relative aux investissements, a porté sur la vérification du respect des dispositions communautaires relatives aux aides d'État dans le secteur agricole, elle constate que les exonérations fiscales en cause ne sont pas exclues par la décision 94/173, établissant les critères de choix des investissements susceptibles de bénéficier d'un cofinancement au titre du FEOGA, section «orientation».

17.
    Une deuxième aide de 380 000 000 ESC, à la formation professionnelle du personnel de la nouvelle raffinerie (au moins 200 personnes), est considérée comme compatible avec le marché commun. La décision du 11 janvier 1996 indique, à cet égard, que, «selon la pratique de la Commission, les mesures de ce type destinées à l'acquisition de connaissances nouvelles sont autorisées jusqu'à 100 % des frais éligibles». En l'espèce, l'aide ne dépasserait pas 68 % de ces frais.

18.
    Enfin, la Commission déclare, dans cette même décision, que la troisième aide nationale en cause, d'un montant de 1 912 335 000 ESC (soit 15 % des investissements éligibles), octroyée à titre de cofinancement d'investissements éligibles à une aide communautaire d'un montant de 6 372 065 000 ESC (soit 49,97 % des investissements éligibles), au titre du règlement n° 866/90 ne relève pas du champ d'application des articles 92 du traité CE et 88 CE et qu'elle l'examinera dans le cadre dudit règlement.

Procédure et conclusions des parties

19.
    Par requête enregistrée au greffe du Tribunal le 29 mai 1996, les requérantes ont introduit le présent recours.

20.
    Par demandes enregistrées au greffe du Tribunal respectivement les 8 et 18 novembre 1996, la République portugaise et DAI ont demandé à intervenir dans le litige à l'appui des conclusions de la partie défenderesse. Le président de la cinquième chambre élargie a admis ces interventions, par ordonnance du 18 mars 1997. DAI et la République portugaise ont présenté leur mémoire en intervention,respectivement, les 19 et 24 juin 1997. La Commission et les requérantes ont présenté leurs observations écrites sur les mémoires en intervention, respectivement, les 30 septembre et 1er décembre 1997.

21.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l'audience du 18 novembre 1998.

22.
    Les requérantes concluent à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    déclarer le recours recevable;

-    annuler les décisions du 11 janvier 1996 et du 19 mars 1996;

-    condamner la Commission aux dépens.

23.
    La partie défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter comme irrecevable la demande en annulation de la lettre de la Commission du 19 mars 1996 ainsi que la demande en annulation de sa décision du 11 janvier 1996, en ce qu'elle concerne l'aide accordée sous forme d'exonérations fiscales, et rejeter le recours comme non-fondé pour le surplus;

-    à titre subsidiaire, rejeter intégralement le recours comme non fondé;

-    condamner les parties requérantes aux dépens.

24.
    La République portugaise, intervenant au soutien des conclusions de la Commission, conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours comme irrecevable;

-    à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé.

25.
    DAI, intervenant au soutien des conclusions de la Commission, conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours comme irrecevable en ce qu'il tend à l'annulation de la lettre de la Commission du 19 mars 1996 et de la décision du 11 janvier 1996, en tant qu'elle concerne l'aide accordée sous forme d'exonérations fiscales;

-    pour le surplus, rejeter le recours comme étant non fondé;

-    subsidiairement, rejeter le recours comme étant non fondé;

-    condamner les requérantes aux dépens.

Sur la demande en annulation de la décision du 19 mars 1996

Sur la recevabilité

1. Argumentation des parties

26.
    La Commission, soutenue par la République portugaise et DAI, fait valoir que la demande en annulation de sa lettre du 19 mars 1996, est irrecevable. Cette lettre se limiterait à informer les requérantes de la décision du 11 janvier 1996 de ne pas soulever d'objections, au titre des articles 92 du traité CE et 88 CE, aux aides prévues en faveur de DAI.

27.
    Les requérantes estiment, pour leur part, que le présent recours est recevable dans son ensemble. La lettre du 19 mars 1996 ne se limiterait pas à leur donner des informations mais constituerait un rejet définitif de leur plainte ainsi que de leur demande explicite d'ouvrir la procédure de l'article 88, paragraphe 2, CE (a contrario, voir l'arrêt du Tribunal du 22 octobre 1996, CSF et CSME/Commission, T-154/94, Rec. p. II-1377, points 49 et 50). Elle comporterait des effets juridiques définitifs à leur égard et présenterait donc un caractère décisionnel (arrêt de la Cour du 15 décembre 1988, Irish Cement/Commission, 166/86 et 220/86, Rec. p. 6473, point 11).

2. Appréciation du Tribunal

28.
    Les décisions adoptées par la Commission dans le domaine des aides d'État ont pour destinataires les États membres concernés. Cela vaut également lorsque ces décisions concernent des mesures étatiques dénoncées dans des plaintes comme des aides d'État contraires aux traités et qu'il en résulte que la Commission refuse d'ouvrir la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, CE parce qu'elle estime soit que les mesures dénoncées ne constituent pas des aides d'État au sens de l'article 92 du traité CE, soit qu'elles sont compatibles avec le marché commun. Si la Commission adopte une telle décision et, conformément à son devoir de bonne administration, en informe les plaignants, c'est la décision adressée à l'État membre qui doit, le cas échéant, faire l'objet d'un recours en annulation de la part du plaignant et non pas la lettre adressée à celui-ci (arrêt de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink's France, C-367/95 P, Rec. p. I-1719, point 45).

29.
    En l'espèce, la Commission s'est limitée, dans sa lettre du 19 mars 1996, à informer les requérantes, qui avaient déposé des plaintes contres les mesures d'aides en cause, de sa décision du 11 janvier 1996, notifiée au gouvernement portugais lemême jour, de ne pas soulever d'objections à ces aides au titre des articles 92 du traité CE et 88 CE.

30.
    Cette lettre purement informative est privée de tout caractère décisionnel et ne constitue pas, dès lors, un acte attaquable au sens de l'article 173 du traité CE (devenu, après modification, article 230 CE). En l'occurrence, la protection des droits des requérantes est garantie par la possibilité, dont elles se sont d'ailleurs prévalues dans le cadre du présent litige, de former un recours en annulation contre la décision du 11 janvier 1996 destinée à l'État membre concerné.

31.
    Dans ces conditions, la demande en annulation de la lettre du 19 mars 1996 doit être rejetée comme irrecevable.

Sur la demande en annulation de la décision du 11 janvier 1996

Sur la recevabilité

1. Argumentation des parties

32.
    La Commission, soutenue par le gouvernement portugais et DAI, conclut à l'irrecevabilité partielle de la demande en annulation de la décision attaquée, en ce qu'elle porte sur l'aide accordée sous forme d'exonérations fiscales, au motif que les requérantes seraient privées d'intérêt à agir. Elle rappelle qu'elle était uniquement habilitée à vérifier, dans cette décision, la conformité des exonérations fiscales en cause à sa décision autorisant le régime général d'aides instauré par le décret-loi 95/90. Or, comme les requérantes ne contestent pas cette conformité, elles ne justifieraient d'aucun intérêt à obtenir l'annulation de la décision attaquée, dans la mesure où, même dans l'hypothèse d'une telle annulation, ces exonérations, octroyées en application d'un régime général d'aides approuvé par la décision du 3 juillet 1991, constitueraient une aide existante que les autorités portugaises seraient toujours en droit d'octroyer. A cet égard, les requérantes ne sauraient invoquer, comme elles l'ont fait en l'espèce, une exception d'illégalité contre la décision d'approbation sans commettre un détournement de procédure.

33.
    Le gouvernement portugais conteste, en outre, que les requérantes sont directement et individuellement concernées par la décision attaquée, au sens de l'article 173, quatrième alinéa, du traité CE, au motif que les trois types d'aides en cause n'auraient pas de répercussions sur leur position sur le marché portugais du sucre.

34.
    Les requérantes estiment, pour leur part, qu'Alcântara Refinarias - Açúcares SA et RAR Refinarias de Açucar Reunidas SA sont directement et individuellement concernées par la décision attaquée, dans la mesure où elles sont affectées par cette décision en leur qualité d'entreprises concurrentes de DAI qui avaient déposé des plaintes contre les aides accordées à cette société. Il en serait de même d'ARAP, qui représente les intérêts de l'industrie portugaise du sucre de canne et a également déposé une plainte auprès de la Commission.

2. Appréciation du Tribunal

35.
    Le premier moyen d'irrecevabilité tiré de l'absence alléguée d'intérêt des parties requérantes à obtenir l'annulation de la décision attaquée, qui se fonde sur l'argument selon lequel, même en cas d'annulation de cette décision, les exonérations fiscales en cause seraient maintenues parce qu'elles constituent des aides existantes, ne saurait être accueilli.

36.
    En effet, la circonstance qu'une aide individuelle relevant d'un régime général d'aides régulièrement approuvé par la Commission est considérée comme une aide existante, dont le versement a déjà été autorisé, ne prive pas pour autant les requérantes d'intérêt à agir en l'espèce. Celles-ci justifient, notamment, d'un intérêt à obtenir l'annulation de la décision attaquée en ce que la Commission ne soulève pas d'objections aux exonérations fiscales accordées à DAI, au motif précisément que ces aides pourraient ne pas être couvertes par la décision d'approbation - laquelle subordonne l'octroi d'aides individuelles au respect, notamment, des réglementations et encadrements applicables dans le secteur agricole concerné - parce qu'elles seraient incompatibles avec les règles de la politique agricole commune. En effet, si le Tribunal devait, le cas échéant, annuler la décision attaquée pour ce motif, il appartiendrait en principe à la Commission d'exiger la restitution de l'ensemble de ces aides déjà octroyées à DAI. De même, si la décision d'approbation devait être jugée irrégulière, il incomberait à l'institution défenderesse de considérer les exonérations fiscales en faveur de DAI comme une aide nouvelle et d'en apprécier directement la conformité avec le traité (voir l'arrêt de la Cour du 5 octobre 1994, Italie/Commission, C-47/91, Rec. p. I-4635, point 26). A cet égard, la question de la recevabilité de l'exception d'illégalité de la décision d'approbation, soulevée par la Commission, ne saurait être examinée à ce stade. Elle est liée à l'appréciation du bien-fondé de la présente demande en annulation et sera examinée dans ce cadre.

37.
    Les requérantes justifient donc d'un intérêt certain à obtenir l'annulation de la décision attaquée en ce qu'elle concerne ces exonérations.

38.
    Dans le cadre du second moyen d'irrecevabilité, le gouvernement portugais soutient que les requérantes ne sont pas directement et individuellement concernées, au sens de l'article 173, quatrième alinéa, du traité CE. Bien que ce moyen n'ait pasété invoqué par la partie défenderesse, les conditions de recevabilité d'un recours étant d'ordre public, le Tribunal doit les examiner d'office (arrêt du Tribunal du 19 mai 1994, Consorzio Gruppo di Azione Locale «Murgia Messapica»/Commission, T-465/93, Rec. p. II-361, point 24).

39.
    Il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante (voir, notamment, les arrêts de la Cour du 15 mai 1993, Cook/Commission, C-198/91, Rec. p. I-2487, points 20 à 24, et Commission/Sytraval et Brink's France, précité, points 47 à 48), le droit d'agir des entreprises concurrentes contre la décision de la Commission constatant, à l'issue de la phase préliminaire d'examen de l'article 88, paragraphe 3, CE, que des aides sont compatibles avec le marché commun ne saurait être contesté. En effet, comme le traité n'impose à la Commission l'obligation de mettre les intéressés en mesure de présenter leurs observations que dans le cadre de la phase d'examen prévue par son article 88, paragraphe 2, CE, ceux-ci ne peuvent obtenir le respect de ces garanties procédurales, lorsque la Commission décide de ne pas ouvrir la procédure de l'article 88, paragraphe 2, CE, que s'ils ont la possibilité de contester cette décision devant le Tribunal.

40.
    En l'espèce, le régime général d'exonérations fiscales en cause avait été approuvé par la Commission sans ouvrir la procédure de l'article 88, paragraphe 2, CE. En outre, et en toute hypothèse, seule l'adoption de la décision attaquée a permis aux requérantes d'apprécier dans quelle mesure leurs intérêts sont affectés. Les requérantes ne peuvent donc obtenir le respect des garanties de procédure qui leur sont conférées par l'article 88, paragraphe 2, CE en leur qualité de tiers intéressés que si elles ont la possibilité de contester cette décision devant le Tribunal.

41.
    L'exception d'irrecevabilité soulevée par la Commission doit, dès lors, être rejetée.

Sur le fond

42.
    Les requérantes invoquent à l'encontre de la décision attaquée des moyens distincts en ce qui concerne chacune des trois catégories d'aides accordées.

A - En ce qui concerne les exonérations fiscales

43.
    A l'appui de leur demande en annulation de la décision attaquée, en ce qu'elle ne soulève pas d'objections à l'aide accordée sous forme d'exonérations fiscales, les requérantes font valoir trois moyens. Premièrement, elles se fondent sur l'article 241 CE (ex-article 184) pour invoquer l'illégalité de la décision du 3 juillet 1991. Deuxièmement, et en toute hypothèse, ces exonérations représenteraient une aidenouvelle que le gouvernement portugais aurait été tenu de notifier sur la base de l'article 88, paragraphe 3, CE. Troisièmement, cette aide serait contraire à la politique agricole commune.

Sur le premier moyen, tiré de l'illégalité de la décision du 3 juillet 1991

Sur la recevabilité de l'exception d'illégalité

- Argumentation des parties

44.
    Selon la Commission, soutenue par le gouvernement portugais et DAI, l'exception d'illégalité de sa décision du 3 juillet 1991, soulevée par les requérantes, est irrecevable. Cette décision ne constituerait pas la base juridique de la décision attaquée, mais celle des mesures nationales d'exécution adoptées pour l'octroi des exonérations fiscales en cause. Les requérantes auraient dû former un recours contre ces mesures devant le juge national et invoquer l'article 241 CE pour écarter l'application de la décision du 3 juillet 1991.

45.
    Les requérantes exposent que leur exception visant à l'inapplicabilité de la décision d'approbation sur laquelle se fonderait la décision attaquée est recevable en vertu de l'article 241 CE.

- Appréciation du Tribunal

46.
    Selon une jurisprudence bien établie, l'exception d'illégalité prévue par l'article 241 CE constitue «l'expression d'un principe général assurant à toute partie le droit de contester, en vue d'obtenir l'annulation d'une décision qui la concerne directement et individuellement, la validité des actes institutionnels antérieurs, constituant la base juridique de la décision attaquée, si cette partie ne disposait pas du droit d'introduire, en vertu de l'article 173 du traité [CE], un recours direct contre ces actes, dont elle subit ainsi les conséquences sans avoir été en mesure d'en demander l'annulation» (arrêt de la Cour du 6 mars 1979, Simmenthal/Commission, 92/78, Rec. p. 777, point 39).

47.
    Le principe général ainsi dégagé par la Cour s'applique également dans l'hypothèse où une décision individuelle se fonde directement sur un acte de portée générale susceptible de faire l'objet d'un recours en annulation par des personnes physiques ou morales ayant qualité pour agir contre cet acte, notamment lorsque seule la décision individuelle leur permet de savoir avec certitude dans quelle mesure leurs intérêts particuliers sont affectés (voir, notamment, les arrêts de la Cour du 18 mars 1975, Acton e.a./Commission, 44/74, 46/74 et 49/74, Rec. p. 383, point 7, etdu 6 juillet 1988, Simonella/Commission, 164/87, Rec. p. 3807, point 16, ainsi que l'arrêt du Tribunal du 16 septembre 1993, Noonan/Commission, T-60/92, Rec. p. II-911, point 23).

48.
    En l'espèce, contrairement aux allégations de la Commission, il existe un lien juridique direct entre la décision du 3 juillet 1991 et la décision attaquée, dans la mesure où celle-ci se fonde, pour ce qui est des exonérations fiscales, sur la décision d'approbation du régime général d'exonérations fiscales du 3 juillet 1991. En effet, les aides individuelles, considérées comme des aides existantes, peuvent uniquement être contrôlées par la Commission au regard des conditions qu'elle a énoncées dans la décision d'approbation du régime général (arrêt Italie/Commission, précité, point 24, et arrêt de la Cour du 15 mai 1997, Siemens/Commission, C-278/95 P, Rec. p. I-2507, point 31).

49.
    Dans ces conditions - indépendamment de la question de savoir si les requérantes auraient pu se voir reconnaître qualité pour agir contre la décision du 3 juillet 1991 -, la protection juridictionnelle efficace de leurs droits n'est, en toute hypothèse, assurée que si elles disposent de la possibilité d'invoquer l'irrégularité de cette décision d'approbation par voie d'exception, dans le cadre d'un recours formé contre la décision de la Commission relative à l'aide individuelle, qui seule leur permet de déterminer avec certitude dans quelle mesure leurs intérêts sont affectés.

50.
    Il s'ensuit que l'exception d'irrecevabilité invoquée à l'encontre du moyen tiré de l'irrégularité de la décision d'approbation doit, en toute hypothèse, être rejetée.

Sur le bien-fondé de l'exception d'illégalité

51.
    Le premier moyen, tiré de l'illégalité alléguée de la décision du 3 juillet 1991 s'articule en trois branches. En premier lieu, la Commission se serait abstenue de tenir compte des conséquences sectorielles de ce régime général d'aides lors de l'adoption de la décision d'approbation, laquelle serait incompatible avec la politique agricole commune. En deuxième lieu, la procédure d'adoption de cette décision d'approbation aurait été privée de transparence, dans la mesure où la Commission n'a pas ouvert la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, CE. En troisième lieu, cette procédure serait entachée d'irrégularités formelles.

a) Sur l'absence alléguée de contrôle des conséquences sectorielles du régime général d'aides en cause

Argumentation des parties

52.
    Les requérantes font observer que les dérogations prévues par l'article 92, paragraphe 3, sous a) et sous c), du traité CE doivent être interprétées de manière restrictive. En particulier, dans les secteurs «névralgiques», comme le secteur agricole ou les secteurs caractérisés par une surcapacité, la Commission serait tenue, lorsqu'elle approuve des régimes généraux d'aides, d'imposer aux États membres concernés des conditions adéquates permettant, lors de chaque application concrète de ces régimes, de vérifier, notamment, que les conséquences sectorielles de l'aide envisagée ne sont pas contraires à l'intérêt commun (arrêt de la Cour du 14 janvier 1997, Espagne/Commission, C-169/95, Rec. p. I-135, point 20). Il en découlerait qu'un régime général d'aides national ne saurait être approuvé sans la condition expresse que son application au secteur agricole fasse toujours l'objet d'une notification préalable à la Commission au titre de l'article 88, paragraphe 3, CE.

53.
    En l'espèce, la décision du 3 juillet 1991 serait incompatible avec la politique agricole commune, dans la mesure où elle ne prévoit pas une obligation de notifier les aides individuelles, alors que le régime communautaire des marchés du sucre n'autorise pas, d'après les requérantes, les aides d'État aux producteurs portugais de sucre de betterave. La condition relative au respect de la réglementation communautaire, énoncée dans cette décision d'approbation, serait à cet égard trop imprécise.

54.
    Pour sa part, la Commission affirme que, dans la décision d'approbation, elle a imposé le type de condition réclamé par les requérantes, à titre de garantie contre les conséquences sectorielles du régime général d'aides, sans qu'il soit nécessaire de définir précisément toutes ces conditions dans la décision elle-même, puisqu'elles sont énoncées en détail dans les règles communautaires visant le secteur agricole. En effet, la décision d'approbation subordonnerait l'application du régime général d'aides en cause au respect de ces règles, comme le rappelle expressément la décision attaquée.

Appréciation du Tribunal

55.
    En l'espèce, les requérantes n'ont pas démontré que le respect des règles applicables dans le secteur du sucre n'était pas assuré par les conditions énoncées dans la décision d'approbation. En l'occurrence, la Commission a expressémentsubordonné, dans cette décision, l'octroi d'exonérations fiscales individuelles au respect des règles communautaires visant, notamment, les secteurs agricoles. Les requérantes n'avancent, à cet égard, aucun élément concret permettant de supposer que cette condition est insuffisante pour exclure du régime général autorisé les aides incompatibles avec la politique agricole commune. De plus, elles n'invoquent aucune règle applicable dans le cadre de l'organisation commune des marchés du sucre, qui aurait imposé de prévoir, lors de l'approbation du régime général d'aides en cause, une obligation de notification des aides individuelles accordées dans le secteur du sucre.

56.
    En outre, les aides accordées dans le secteur du sucre en application du régime général d'exonérations fiscales en cause n'échappent pas pour autant au contrôle de la Commission. En effet, s'il est vrai qu'il incombe en premier lieu à l'État membre concerné de veiller au respect de la réglementation communautaire lorsqu'il envisage d'accorder une exonération fiscale en application du régime général d'aides approuvé par la Commission, il n'en demeure pas moins que cette institution peut à tout moment vérifier la compatibilité d'une telle aide individuelle avec la décision d'approbation et, en particulier, avec les règles applicables dans le secteur agricole concerné. Dans l'intérêt d'une bonne administration des règles fondamentales du traité relatives aux aides d'État, il lui appartient tout spécialement d'effectuer un tel contrôle lorsque, comme en l'espèce, elle est saisie d'une plainte à l'encontre d'une telle aide.

57.
    Pour l'ensemble de ces motifs, la première branche du premier moyen, relative à l'absence de contrôle des conséquences sectorielles du régime général d'aides en cause, ne saurait être accueillie.

b) Sur l'absence alléguée de transparence de la procédure d'approbation du régime général d'aides

Argumentation des parties

58.
    Les requérantes font grief à la Commission de n'avoir rendu publiques qu'a posteriori la notification du décret-loi 95/90 et la décision d'approbation. Les intérêts légitimes des tiers n'auraient donc pas été respectés, dans un secteur sensible comme celui du sucre, dans la mesure où la Commission a approuvé ce régime général d'aides en vertu de l'article 88, paragraphe 3, CE, sans ouvrir la procédure prévue par le paragraphe 2 de cet article, qui seul consacre le droit des intéressés d'être entendus et prévoit une analyse du marché pour évaluer les effets potentiels de l'aide considérée.

59.
    La Commission écarte cet argument en faisant valoir que l'obligation d'ouvrir la procédure de l'article 88, paragraphe 2, CE dépend de la difficulté à apprécier la compatibilité du régime d'aides et non pas, comme le soutiennent les requérantes, de l'importance du secteur d'activité concerné.

60.
    DAI soutient cette argumentation. Elle ajoute qu'aucune règle ne précise, en vue de protéger les droits des tiers, à quel moment la notification d'une aide d'État au titre de l'article 88, paragraphe 3, CE doit être publiée par la Commission.

Appréciation du Tribunal

61.
    L'absence de publicité concernant la notification, par l'État membre concerné, et l'examen, par la Commission, d'une aide au titre de l'article 88, paragraphe 3, alliée à la décision de cette institution de ne pas ouvrir la procédure de l'article 88, paragraphe 2, CE associant les tiers, ne saurait être assimilée à une absence de transparence, dans le système d'examen des aides d'État institué par les articles 92 du traité CE et 88 CE. Il est vrai que l'examen sommaire d'une aide d'État dans le cadre de la phase préliminaire, sur la base de l'article 88, paragraphe 3, CE, ne permet pas à la Commission de prendre en considération les intérêts des tiers. Cette solution est cependant assortie de garanties suffisantes et se justifie dès lors pleinement pour répondre aux exigences de rapidité lorsque, manifestement, la mesure notifiée par l'État membre concerné, ou dénoncée dans une plainte émanant d'un tiers, ne constitue pas une aide d'État ou constitue une aide d'État compatible avec le marché commun. En effet, la protection des droits des tiers est assurée par la possibilité qui leur est reconnue d'agir, le cas échéant, contre la décision de la Commission de ne pas ouvrir la procédure de l'article 88, paragraphe 2, CE (arrêts de la Cour Cook/Commission, précité, points 22 à 24, et du 15 juin 1993, Matra/Commission, C-225/91, Rec. p. I-3203, points 16 à 18).

62.
    En l'espèce, la protection des intérêts légitimes des requérantes est, en toute hypothèse, garantie, notamment, par le droit dont elles se sont prévalues dans le cadre du présent recours contre la décision du 11 janvier 1996 d'invoquer, en ce qui concerne les exonérations fiscales en faveur de DAI, l'inapplicabilité de la décision d'approbation, en vertu de l'article 241 CE (voir, ci-dessus, les points 43 à 50).

63.
    Dans ces conditions, le grief relatif à la méconnaissance des droits des tiers, dans le cadre de la procédure d'adoption de la décision du 3 juillet 1991, est privé de tout fondement. La deuxième branche du premier moyen, relative à l'absence alléguée de transparence de cette procédure, ne saurait, dès lors, être accueillie.

c) Sur l'irrégularité alléguée de la procédure interne d'adoption de la décision du 3 juillet 1991

Argumentation des parties

64.
    Les requérantes mettent en doute la conformité de la procédure d'adoption de la décision du 3 juillet 1991 au règlement interne de la Commission. Pour vérifier si la version authentique, en langue portugaise, de la décision susvisée a bien été soumise au collège des commissaires en vue de son adoption et de son authentification, il y aurait lieu de comparer le texte contenu dans le document SEC (91) 1266, mentionné dans le procès-verbal de la réunion de la Commission du 3 juillet 1991, avec la lettre du 15 juillet 1991, susvisée, adressée au gouvernement portugais.

65.
    Selon la Commission, le compte rendu de sa réunion du 3 juillet 1991 montre que la décision d'approbation a été adoptée par le collège des commissaires et dûment authentifiée par le président et le secrétaire général, comme l'exige son règlement intérieur.

Appréciation du Tribunal

66.
    Les requérantes n'avancent aucun élément significatif permettant de susciter des doutes sérieux quant à la légalité de la procédure d'adoption de la décision d'approbation. Au contraire, il ressort du procès-verbal de la réunion de la Commission du 3 juillet 1991, produit par la Commission, que la décision d'approbation a bien été adoptée par le collège des commissaires et autentifiée par le président et le secrétariat général.

67.
    Dans ce contexte, compte tenu de la présomption de validité s'attachant aux actes communautaires, et à défaut du moindre indice fourni par les requérantes de l'irrégularité de la procédure d'adoption de la décision d'approbation, la troisième branche du premier moyen doit être rejetée, sans qu'il y ait lieu de procéder à la comparaison des documents demandée par les requérantes (voir les arrêts du Tribunal du 10 mars 1992, Hüls/Commission, T-9/89, Rec. p. II-499, point 384, et du 11 mars 1999, Siderúrgica Aristrain Madrid/Commission, T-156/94, non encore publié au Recueil, point 217).

68.
    Il s'ensuit que le premier moyen doit être rejeté.

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l'obligation alléguée d'examiner les aides individuelles accordées à DAI

Argumentation des parties

69.
    Les requérantes font grief à la Commission d'avoir renoncé, en l'occurrence, à apprécier les exonérations fiscales en faveur de DAI au regard des articles 92 du traité CE et 88 CE. La Cour n'aurait pas jugé, dans l'arrêt Italie/Commission, précité, que les mesures concrètes d'application d'un régime général d'aides n'ont pas à être notifiées à la Commission et qu'il n'est pas nécessaire de les examiner individuellement dès lors que le régime général a été approuvé. Cette dispense de notification s'appliquerait uniquement lorsque les facteurs que la Commission va prendre en considération pour apprécier les mesures d'exécution sont les mêmes que ceux appliqués lors de l'examen du régime général (point 21 de l'arrêt). Les États membres seraient donc tenus de notifier les aides envisagées en application d'un tel régime général d'aides, si celles-ci ne constituent pas une application pure et simple ou prévisible de ce régime et pour autant que ces aides doivent être appréciées au regard d'autres éléments que le régime général lui-même, notamment lorsqu'elles sont susceptibles d'amplifier les défauts existants du marché comme la surcapacité. En l'espèce, l'approbation du décret-loi 95/90 n'autoriserait pas le Portugal à l'appliquer dans le secteur du sucre où l'aide affecterait l'équilibre délicat que la politique agricole commune s'efforce d'instaurer.

70.
    La Commission conteste cette interprétation de l'arrêt Italie/Commission, précité. La distinction effectuée par les requérantes entraînerait une grande insécurité juridique.

71.
    Les parties intervenantes soutiennent cette argumentation. DAI souligne, en outre, que la thèse des requérantes méconnaît la logique sous-tendant l'approbation d'un régime général d'aides par la Commission. Une telle approbation viserait à concilier un contrôle cohérent des aides d'État - qui ne doivent pas dépasser les limites établies par le régime général ni méconnaître des règles spécifiques du droit communautaire - avec la nécessité de soulager la Commission d'une partie des charges administratives, en offrant aux entreprises la sécurité juridique souhaitable.

Appréciation du Tribunal

72.
    Dans l'arrêt Italie/Commission, précité, la Cour a jugé que, dès lors qu'un régime général d'aides a été approuvé par la Commission, les mesures individuelles d'exécution ne doivent pas lui être notifiées, sauf si des réserves ont été émises en ce sens dans la décision d'approbation. En effet, l'examen de chaque aide individuelle, directement au regard de l'article 92 du traité CE, permettrait à laCommission de revenir sur la décision d'approbation et serait contraire aux principes de protection de la confiance légitime et de la sécurité juridique.

73.
    La distinction proposée par les requérantes est incompatible avec les principes susvisés. En effet, une aide individuelle octroyée en exécution d'un régime général d'aides ne peut, en principe, être considérée comme une application imprévisible de ce régime. D'une part, il serait contraire aux principes de protection de la confiance légitime et de la sécurité juridique d'exiger la notification des mesures individuelles en vue de leur réexamen par la Commission au regard de l'article 92 du traité CE, en fonction d'éléments qu'elle aurait déjà pris en compte lors de l'approbation du régime général. D'autre part, en cas d'évolution de la situation depuis l'approbation du régime général d'aides en cause, celle-ci sera prise en considération par la Commission, tout en respectant le principe de sécurité juridique, dans le cadre de l'examen permanent des régimes d'aides existants, en vertu de l'article 88, paragraphe 1, CE (voir, par exemple, l'arrêt de la Cour du 9 août 1994, Namur-Les assurances du crédit, C-44/93, Rec. p. I-3829, point 34). Quant aux éléments invoqués par la requérante se rapportant à la situation particulière de certains secteurs agricoles, caractérisés, par exemple, par une production excédentaire, force est de rappeler que l'approbation d'un régime général d'aide par la Commission n'a, en aucun cas, pour effet de soustraire les mesures d'aides individuelles, adoptées dans le cadre de ce régime, à l'application de l'ensemble des règles spécifiques régissant le secteur concerné. Ainsi qu'il a déjà été jugé (voir, ci-dessus, points 55 et 56), le respect de ces règles n'est pas subordonné, en l'espèce, à l'exigence d'une notification préalable des mesures individuelles envisagées.

74.
    En l'occurrence, si, lors de l'examen du régime général d'aides institué par le décret-loi 95/90, la Commission avait estimé que l'octroi de telles aides, dans certains secteurs déterminés, nécessitait un examen direct au regard de l'article 92 du traité CE, elle aurait pu et dû imposer, dans sa décision d'approbation, la notification des aides individuelles octroyées dans ce secteur. Or, la décision du 3 juillet 1991 n'impose aucune obligation de notifier les aides individuelles octroyées dans le secteur du sucre. Elle subordonne uniquement l'autorisation des exonérations fiscales en cause à deux conditions précises: les exonérations fiscales accordées ne doivent pas dépasser 10 % des investissements réalisés et doivent être compatibles avec le droit communautaire applicable dans le secteur agricole concerné. Il en résulte que la Commission n'était pas en droit d'examiner les exonérations fiscales accordées à DAI directement au regard de l'article 92 du traité CE, dès lors qu'elles étaient conforme aux deux conditions susvisées, comme elle l'a constaté dans la décision attaquée.

75.
    Il s'ensuit que le deuxième moyen doit être rejeté.

Sur le troisième moyen, tiré de l'incompatibilité des exonérations fiscales en cause avec la politique agricole commune

Argumentation des parties

76.
    D'après les requérantes, la mise en oeuvre de la politique agricole commune prime sur l'application des articles 92 du traité CE, 88 CE et 89 CE et sur les actions conduites dans le cadre des fonds structurels. La Cour aurait consacré cette primauté des objectifs de la politique agricole commune notamment sur les règles du traité relatives aux aides d'État dans son arrêt du 15 octobre 1996, Ijssel-Vliet Combinatie (C-311/94, Rec. p. I-5023, points 31 à 33).

77.
    Or, en l'occurrence, toute aide à la création d'une raffinerie de sucre de betterave serait contraire aux objectifs de la politique agricole commune dans le secteur du sucre. Aucune dérogation au titre de l'article 92, paragraphe 3, du traité CE ne pourrait, par conséquent, lui être appliquée.

78.
    En effet, l'attribution d'un quota de sucre au Portugal continental, par le traité d'adhésion, ne justifierait pas le soutien à la création d'une raffinerie de sucre de betterave dans ce pays, au moyen d'aides d'État et/ou d'un cofinancement de la Communauté. Les requérantes font valoir, en se fondant sur l'article 241 CE, que la décision 94/173 est illégale dans la mesure où elle n'exclut pas la possibilité d'un tel soutien et ne saurait être invoquée comme base juridique valable de la décision attaquée. Aucun principe ou règle du droit communautaire ne légitimerait la décision 94/173 lorsqu'elle prévoit que les investissements concernant la production ou le raffinage du sucre de betterave au Portugal continental, en vue d'utiliser le quota de 60 000 tonnes de sucre blanc attribué par l'acte d'adhésion, peuvent bénéficier d'un cofinancement de la Communauté.

79.
    Un tel soutien aurait des effets négatifs sur le régime des marchés du sucre ainsi que sur la situation des tiers, producteurs de sucre de betterave dans les autres États membres ou raffineries portugaises de sucre de canne. La production de sucre de betterave au Portugal créerait un excédent de 83 000 tonnes par rapport à la consommation dans ce pays qui, contrairement aux allégations de la Commission, ne serait pas un État déficitaire en ce qui concerne le sucre. Elle alourdirait ainsi considérablement la charge financière du FEOGA, en entraînant l'achat en intervention de 60 000 tonnes de sucre de betterave, ainsi que des restitutions à l'exportation pour le sucre de canne en provenance des pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, raffiné et vendu par les entreprises requérantes sur le marché mondial. En outre, elle aggraverait la surproduction structurelle dans la Communauté, alors que l'excédent de sucre qui y est produit atteignait plus de 5 300 000 tonnes en 1995-1996. Enfin, l'industrie du sucre de betterave créée au Portugal grâce aux aides en cause pourrait s'avérer non viable. Le Portugal aurait d'ailleurs obtenu une augmentation de son contingent annuel de60 000 à 70 000 tonnes afin d'assurer la viabilité de la raffinerie de sucre de betterave en cours de construction.

80.
    La Commission objecte qu'un quota de sucre de 60 000 tonnes a été attribué au Portugal continental dans l'acte d'adhésion pour permettre aux agriculteurs d'une région offrant peu d'alternatives en termes de production agricole de cultiver de la betterave sucrière. Comme le Portugal continental n'avait pas, à l'époque, de production de sucre susceptible de servir de référence, le quota de 60 000 tonnes de sucre blanc aurait été considéré comme le minimum nécessaire pour permettre l'exploitation rentable d'une raffinerie de sucre à partir de la culture de betterave sucrière dans la région. Il n'y aurait jamais eu de doute sur la nécessité d'une installation de transformation régionale, en raison des frais de transport importants des betteraves sucrières par rapport au coût de production. En outre, dans le cadre de l'organisation commune des marchés du sucre, les quotas attribués aux États membres seraient destinés aux entreprises productrices de sucre établies sur leur territoire. Du fait du retard dans la création d'une raffinerie au Portugal, une mesure transitoire aurait autorisé une sucrerie établie en Espagne à raffiner les betteraves sucrières récoltées au Portugal, le sucre produit étant «considéré comme production de l'entreprise portugaise en cause» [article 24, paragraphe 1 bis, du règlement n° 1785/81, tel que modifié par le règlement (CEE) n° 1107/88 du Conseil, du 25 avril 1988 (JO L 110, p. 20)]. Cette mesure aurait permis de débuter la production de betteraves sucrières au Portugal, en 1986, mais uniquement à une petite échelle. C'est pour donner l'impulsion nécessaire à la construction d'une raffinerie de betteraves sucrières rentable, dans ce pays, afin d'encourager les agriculteurs portugais à se lancer dans la production betteravière que le quota de sucre attribué au Portugal continental aurait été porté à 70 000 tonnes par le règlement n° 1599/96, du 30 juillet 1996, précité [voir la proposition de règlement (CE) du Conseil modifiant le règlement n° 1785/81 (JO 1996, C 28, p. 6)].

81.
    Le gouvernement portugais souligne que l'impossibilité, pour le Portugal, d'utiliser le quota de sucre qui lui est attribué par le traité d'adhésion, en raison de l'insuffisance de ses structures agricoles dans le secteur du sucre de betterave, priverait le traité d'adhésion d'effet utile sur ce point et l'économie portugaise du bénéfice des avantages inhérents à la politique des marchés auxquels cette économie contribue par sa participation aux charges communautaires, notamment à travers le FEOGA, section «garantie». Cette situation, contraire à l'équité, serait d'autant plus anormale qu'elle concerne un État considéré dans sa totalité comme une région cible de la politique de cohésion économique et sociale par le règlement n° 2052/88.

82.
    DAI soutient cette argumentation. Elle fait valoir que les requérantes n'ont fourni aucun élément de preuve permettant de supposer que l'industrie du sucre de betterave destinée à exploiter le quota attribué au Portugal ne serait pas viable, nécessiterait des aides nouvelles et alourdirait la charge financière du FEOGA.

83.
    En outre, dans la poursuite des différents objectifs définis par l'article 33 CE, les institutions communautaires pourraient être conduites à accorder à tel ou tel d'entre eux la prééminence temporaire qu'imposent les circonstances économiques au vu desquelles elles arrêtent leurs décisions (arrêt de la Cour du 11 mars 1987, Rau e.a./Commission, 279/84, 280/84, 285/84 et 286/84, Rec. p. 1069, point 21).

Appréciation du Tribunal

84.
    Dans la décision attaquée, la Commission pouvait et devait uniquement examiner la régularité des exonérations fiscales accordées en l'espèce à DAI au regard des conditions qu'elle avait imposées dans sa décision d'approbation et, en particulier, des règles applicables dans le secteur du sucre.

85.
    En l'occurrence, les requérantes invoquent l'incompatibilité des exonérations fiscales en faveur de DAI avec les objectifs de la politique agricole commune dans le secteur du sucre. En substance, la création d'une industrie de production de sucre de betterave au Portugal aggraverait la situation de surcapacité dans ce secteur, dans la Communauté, et entraînerait des coûts importants pour les mécanismes d'intervention.

86.
    Il convient de rappeler, au préalable, qu'une organisation commune des marchés poursuit un ensemble de finalités distinctes, reflétant les différents objectifs de la politique agricole commune, tels qu'ils sont définis par l'article 33, paragraphe 1, CE. Elle tend, notamment, à assurer un emploi optimal des agriculteurs et à leur garantir un niveau de vie équitable, à stabiliser les marchés, à garantir la sécurité des approvisionnements et à assurer des prix raisonnables aux consommateurs. De plus, l'article 33, paragraphe 2, CE prévoit que, dans l'élaboration de la politique agricole commune, il sera tenu compte du caractère particulier de l'activité agricole, découlant de la structure sociale de l'agriculture et des disparités structurelles et naturelles entre les diverses régions agricoles, de la nécessité d'opérer graduellement les ajustements opportuns et du fait que, dans les États membres, l'agriculture constitue un secteur intimement lié à l'ensemble de l'économie.

87.
    En outre, comme le souligne DAI, les institutions communautaires doivent assurer la conciliation permanente que peuvent exiger d'éventuelles contradictions entre ces objectifs, considérés séparément. Dans le cadre d'une telle conciliation, elles peuvent accorder à l'un ou l'autre de ces objectifs la prééminence temporaire qu'imposent les faits ou les circonstances économiques au vu desquels elles arrêtent leurs décisions (arrêt Rau e.a./Commission, précité, point 21).

88.
    En l'espèce, il y a lieu de vérifier si les exonérations fiscales en cause, qui visent à faciliter le développement de certaines régions économiques conformément à l'article 92, paragraphe 3, sous c), du traité CE, sont compatibles avec les objectifspoursuivis par la réglementation applicable dans le secteur de la production et de la transformation du sucre.

89.
    L'analyse de cette réglementation conduit à constater que les exonérations fiscales en faveur de DAI, destinées à favoriser la création d'une raffinerie de sucre de betterave au Portugal continental, sont conformes aux objectifs poursuivis et aux règles énoncées, dans le cadre de la politique agricole commune, par le règlement n° 1785/81. C'est précisément ce règlement qui définit, en son article 24, paragraphe 2, tel qu'il a été modifié par le traité d'adhésion, un quota de 60 000 tonnes - porté ultérieurement à 70 000 tonnes - en ce qui concerne la région continentale du Portugal, après avoir spécifié, en son paragraphe 1, que le Portugal attribuera une part de ce quota «à chaque entreprise établie dans cette région qui est susceptible d'y commencer une production de sucre». De plus, il admet clairement, en son article 44, que des aides d'État en faveur, notamment, de la production du sucre de betterave peuvent être autorisées en application des articles 92 du traité CE, 88 CE et 89 CE.

90.
    En outre, les exonérations fiscales en cause sont compatibles avec la politique de la Communauté en matière d'interventions publiques en faveur d'actions structurelles dans le domaine agricole. A cet égard, le règlement n° 866/90 confirme expressément, en son article 16, paragraphe 5, que les États membres peuvent octroyer, en dehors des mesures spécifiquement prévues par ce règlement, des aides dans le domaine de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles, dans les conditions énoncées aux articles 92 du traité CE, 88 CE et 89 CE. De plus, les aides à la création d'une raffinerie de sucre, en cause en l'espèce, concordent également avec les critères de choix des investissements susceptibles de bénéficier d'un soutien financier au titre du FEOGA, section «orientation». En effet, la décision 94/173, établissant ces critères, exclut expressément, au point 2.8. de son annexe, tous les investissements dans le secteur du sucre, à l'exception de ceux destinés à permettre l'utilisation du quota prévu par l'acte d'adhésion du Portugal. Contrairement aux allégations des requérantes (voir, ci-dessus, point 77), cette dérogation prévue par la décision 94/173 s'explique par l'attribution, par le règlement n° 1785/81, d'un quota au Portugal continental, en vue précisément de permettre à des entreprises qui y sont établies de «commencer une production de sucre». Les aides en cause en l'espèce respectent ainsi les limitations sectorielles relatives au cofinancement des investissements dans le secteur de la transformation et de la commercialisation du sucre, lesquelles sont applicables par analogie aux aides d'État relatives aux investissements dans ce secteur, selon l'encadrement des aides d'État relatives aux investissements dans le secteur de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles, du 2 févier 1996, susmentionné (point 13).

91.
    Dans ce contexte, les arguments des requérantes relatifs à l'aggravation de la surproduction de sucre dans la Communauté et à l'alourdissement des charges pesant sur le FEOGA, section «orientation», ne sont pas de nature à remettre encause la compatibilité d'aides en faveur de la création d'une raffinerie de sucre de betterave au Portugal avec la politique agricole commune dans le secteur du sucre. En effet, dans la mesure où, ainsi qu'il vient d'être jugé aux points précédents, ces aides sont destinées à permettre l'utilisation du quota de 70 000 tonnes de sucre expressément attribué au Portugal continental, afin que des entreprises puissent y «commencer» une production de sucre, par le règlement n° 1785/81 qui institue une organisation commune des marchés dans ce secteur, il ne saurait être contesté qu'elles concourent à la réalisation des objectifs poursuivis dans le cadre de la politique agricole commune. De plus, la capacité de production de 70 000 tonnes de la nouvelle raffinerie de sucre de betterave qui sera créée au Portugal ne pourrait entraîner, en toute hypothèse, qu'une augmentation relativement minime de l'excédent de sucre dans la Communauté, lequel atteignait environ 5 300 000 tonnes en 1995-1996, d'après les chiffres cités par les requérantes.

92.
    Enfin, il convient de relever que le dossier ne contient aucun indice sérieux susceptible de mettre en doute la viabilité de la raffinerie de sucre de betterave bénéficiaire de l'aide en cause. A cet égard, les requérantes se limitent à invoquer, de manière très générale, l'absence de débouchés ainsi que les incertitudes relatives à l'évolution des prix, et à mettre en doute le succès de la culture des betteraves sucrières au Portugal continental, en raison des conditions climatiques et de l'absence d'expérience des agriculteurs portugais dans ce domaine. Elles ne fournissent aucun élément concret précis à l'appui de ces allégations.

93.
    Il ressort de l'ensemble de ce qui précède que les requérantes n'ont pas démontré que les exonérations fiscales accordées à DAI sont incompatibles avec les objectifs de la politique agricole commune, tels qu'ils sont mis en oeuvre dans la réglementation pertinente.

94.
    Le troisième moyen ne saurait, dès lors, être accueilli.

95.
    Il s'ensuit que la demande en annulation de la décision attaquée, en ce qu'elle se rapporte aux aides accordées sous forme d'exonérations fiscales, doit être rejetée comme non fondée.

B - En ce qui concerne l'aide à la formation professionnelle

Argumentation des parties

    

96.
    Les parties requérantes invoquent un moyen unique tiré de la violation de l'article 92, paragraphe 3, sous c), du traité CE. L'aide à la formation professionnelle encause tomberait sous le coût de l'interdiction énoncée à l'article 92, paragraphe 1, du traité CE et ne pourrait bénéficier de la dérogation prévue par le paragraphe 3, sous c), de cet article, en raison des conséquences négatives de l'ensemble des aides d'État en faveur de DAI sur la concurrence et la politique agricole commune. En effet, ces conséquences, qui porteraient atteinte aux intérêts de la Communauté et des tiers, devraient être appréciées au regard de la totalité du soutien accordé, lequel s'élèverait à 61,65 % de l'investissement total, d'après les chiffres fournis par la Commission.

97.
    La Commission est d'avis que chaque type d'aides doit être apprécié individuellement. En l'espèce, l'aide à la formation viserait à financer environ 68 % du coût de la formation professionnelle dispensée au nouveau personnel de DAI et remplirait les conditions définies par l'article 92, paragraphe 3, sous c), du traité CE. Dans le secteur agricole, la Commission autoriserait systématiquement, jusqu'à concurrence de 100 % des frais, ce type d'aides favorisant l'emploi, en raison des particularités de ce secteur et de la diversité des systèmes de formation professionnelle dans les différents États membres, les coûts supportés par l'employeur dans un pays pouvant, dans un autre pays, être à la charge de l'État.

Appréciation du Tribunal

98.
    Les trois types d'aides examinés dans la décision attaquée, à savoir les exonérations fiscales, l'aide à la formation professionnelle et l'aide à l'investissement au titre du règlement n° 866/90, relèvent de régimes juridiques différents et doivent de ce fait être examinés individuellement au regard de leurs régimes respectifs et des objectifs qu'ils poursuivent, sous réserve du contrôle éventuel de leur compatibilité avec la réglementation spécifique applicable dans le secteur de la transformation et de la commercialisation du sucre. L'aide à la formation professionnelle doit, dès lors, être appréciée séparément au regard de l'article 92, paragraphe 3, sous c), du traité CE.

99.
    A cet égard, il est de jurisprudence constante que, pour l'application de cette disposition de l'article 92 du traité CE, la Commission jouit d'un large pouvoir d'appréciation dont l'exercice implique des évaluations d'ordre économique et social qui doivent être effectuées dans un contexte communautaire. Dans le cadre de ce contrôle de légalité, le juge communautaire doit, dès lors, uniquement examiner si la Commission n'a pas excédé les limites de son pouvoir d'appréciation par une erreur manifeste d'appréciation ou un détournement de pouvoir (arrêt Matra/Commission, précité, points 24 et 25).

100.
    En l'espèce, il est à noter que l'aide à la formation professionnelle en cause a été prévue afin de permettre la création d'une nouvelle industrie de raffinage du sucre de betterave au Portugal continental en vue de promouvoir l'activité des agriculteurs dans une région offrant peu d'alternatives en termes de productionagricole. Dans ce contexte, les requérantes n'invoquent aucun argument sérieux susceptible de mettre en doute que l'aide à la formation professionnelle en cause facilitera le développement de certaines activités économiques sans altérer les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun.

101.
    Il s'ensuit que la demande en annulation de la décision attaquée, en ce qu'elle se rapporte à l'aide à la formation professionnelle, doit être rejetée comme non fondée.

C - En ce qui concerne l'aide à l'investissement au titre du règlement n° 866/90

102.
    Les requérantes invoquent deux moyens à l'appui de leur demande en annulation de la décision attaquée, en ce qu'elle porte sur l'aide à l'investissement au titre du règlement n° 866/90. En premier lieu, elles soutiennent que les aides d'État remplissant les conditions énoncées par ce règlement pour bénéficier d'un cofinancement communautaire sont néanmoins soumises à l'application des articles 92 du traité CE et 88 CE. En second lieu, elles font valoir que le règlement n° 866/90 exclut le cofinancement de l'aide en cause en l'espèce.

Sur le premier moyen, tiré de la violation des articles 92 du traité CE et 88 CE

Argumentation des parties

103.
    Les requérantes soutiennent que, dans le secteur du sucre, seules les aides admissibles au regard des articles 92 du traité CE et 88 CE sont susceptibles de bénéficier d'un cofinancement communautaire au titre du règlement n° 866/90.

104.
    En effet, en application de l'article 36 CE (ex-article 42), l'article 44 du règlement n° 1785/81 prévoirait que les articles 92 du traité CE, 88 CE et 89 CE s'appliquent à la production et au commerce des produits énumérés à l'article 1er, paragraphe 1, de ce même règlement, qui comprennent, notamment, le sucre de betterave et le sucre de canne. Comme ces dispositions du traité ont été rendues applicables à un produit agricole spécifique, il serait contraire aux objectifs définis à l'article 3 du traité CE (devenu, après modification, article 3 CE), d'écarter leur application dans ce secteur, en fonction des développements économiques ou de la politique communautaire, sur la base de l'article 36 CE.

105.
    En outre, et en tout état de cause, le règlement n° 866/90 n'abrogerait pas explicitement les dispositions précitées du règlement n° 1785/81. Dans ces conditions, dans la mesure où ce règlement présente une portée générale, sonarticle 16, paragraphe 5, ne saurait être interprété comme excluant l'application des articles 92 du traité CE et 88 CE aux aides d'État éligibles à un cofinancement au titre du règlement n° 866/90, car cela priverait ces dispositions du traité de leur efficacité dans l'ensemble du secteur agricole. L'article 16, paragraphe 5, se limiterait à rappeler l'applicabilité évidente des règles générales énoncées par les articles 92 du traité CE et 88 CE aux mesures d'aides ne remplissant pas les conditions d'un cofinancement communautaire.

106.
    De même, les requérantes contestent la distinction effectuée par la Commission entre, d'une part, l'aide directement liée à la production du sucre qui relèverait du règlement n° 1785/81 et, d'autre part, les mesures structurelles dans le domaine de la transformation et de la commercialisation de ce produit, qui ne devraient être appréciées que sur la base du règlement n° 866/90. Selon les requérantes, le règlement n° 1785/81 prévoit des garanties équitables tant pour les transformateurs (raffineries de sucre de betterave ou de canne) que pour les producteurs. L'ensemble des mesures adoptées dans le secteur de la transformation du sucre de betterave relèverait donc exclusivement du régime exhaustif instauré par ce règlement.

107.
    Selon la Commission, l'aide en cause ne serait pas directement liée à la production de betteraves sucrières. Elle ne relèverait donc pas du régime de l'organisation commune des marchés du sucre institué par le règlement n° 1785/81. Elle constituerait une aide structurelle destinée à faciliter les investissements en faveur de la transformation et de la commercialisation du sucre de betterave et devrait, de ce fait, être appréciée uniquement au regard du règlement n° 866/90 et des critères de sélection énoncés dans la décision 94/173.

108.
    Or, il ressortirait de l'article 16, paragraphe 5, du règlement n° 866/90 que les articles 92 du traité CE, 88 CE et 89 CE ne s'appliquent que si les mesures d'aides s'écartent des conditions ou des modalités d'octroi prévues dans ledit règlement ou si le montant des aides excède les plafonds qu'il définit.

109.
    Le gouvernement portugais soutient que la participation de l'État membre concerné à une action structurelle bénéficiant d'un concours du FEOGA, section «orientation», constitue une aide communautaire et non une aide d'État au sens des articles 92 du traité CE et 88 CE. Elle ne relèverait donc pas du champ d'application des dispositions du règlement n° 1785/81 prévoyant l'applicabilité des dispositions relatives aux aides d'État.

110.
    DAI fait valoir, pour sa part, que l'article 16, paragraphe 5, du règlement n° 866/90 se fonde sur l'article 36 CE et exclut l'application des articles 92 du traité CE, 88 CE et 89 CE aux aides d'État à des investissements éligibles à un cofinancement communautaire.

Appréciation du Tribunal

111.
    L'argument essentiel invoqué par les requérantes pour démontrer que la Commission aurait dû vérifier, dans la décision attaquée, si les aides à l'investissement en cause pouvaient bénéficier d'une dérogation au titre de l'article 92, paragraphe 3, du traité CE se fonde sur l'article 44 du règlement n° 1785/81, prévoyant, sur la base de l'article 36 CE, que les articles 92 du traité CE, 88 CE et 89 CE ne s'appliquent à la production et au commerce des produits agricoles que dans la mesure déterminée par le Conseil.

112.
    A cet égard, il y a lieu de constater que, lorsqu'il soumet les mesures d'aides liées au fonctionnement de l'organisation commune des marchés dans le secteur du sucre à l'application des articles 92 du traité CE, 88 CE et 89 CE, l'article 44 du règlement n° 1785/81 ne vise pas les actions d'ordre structurel conduites au titre du FEOGA, section «orientation», lesquelles ne relèvent pas du champ d'application du règlement n° 1785/81, mais de celui du règlement n° 866/90. Or, ce règlement, fondé, tout comme le règlement n° 1785/81, sur les articles 36 CE, susvisé, et 43 du traité CE (devenu, après modification, article 37 CE), relatif à l'élaboration et à la mise en oeuvre de la politique agricole commune, prévoit les dispositions applicables aux aides d'État envisagées dans son domaine d'application.

113.
    En particulier, le règlement n° 866/90 n'exclut pas la possibilité pour les États membres d'octroyer, en dehors de toute contribution communautaire, certaines aides nationales à l'investissement, qui relèvent de son domaine d'application. Il soumet expressément aux dispositions des articles 92 du traité CE, 88 CE et 89 CE l'octroi de telles aides qui ne sont pas éligibles à un cofinancement communautaire, parce qu'elles ne remplissent pas les critères qu'il définit, ni ceux visés par la décision 94/173.

114.
    Dans ce contexte, à défaut de disposition similaire du règlement n° 866/90 prévoyant expressément l'application des articles 92 du traité CE, 88 CE et 89 CE aux aides éligibles à un cofinancement de la Communauté au titre du FEOGA, section «orientation», ces aides doivent être appréciées dans le cadre propre de l'action commune conduite en application de ce règlement et ne peuvent pas faire l'objet d'un examen au titre des articles 92 du traité CE et 88 CE.

115.
    En outre, à supposer même que l'article 44 du règlement n° 1785/81 puisse être interprété dans le sens qu'il prévoit de manière spécifique l'application des articles 92 du traité CE, 88 CE et 89 CE à toute mesure d'aide relative à la production et à la commercialisation du sucre, il doit, en toute hypothèse, être appliqué en tenant compte des objectifs de la politique agricole commune, dont la primauté sur l'application des dispositions du traité relatives à la concurrence est consacrée par le traité lui-même en son article 36 CE (voir l'arrêt Ijssel-Vliet Combinatie, précité, points 31 à 33).

116.
    Or, l'application des articles 92 du traité CE et 88 CE à des aides éligibles à un cofinancement de la Communauté dans le cadre du règlement n° 866/90 risquerait de faire échec à la poursuite de certains objectifs de la politique agricole commune au moyen d'une action structurelle spécifique conduite en conformité avec les critères définis par la décision 94/173 établissant des priorités pour le cofinancement des investissements relevant de ce règlement.

117.
    A cet égard, il convient de relever que le règlement n° 866/90 assure lui-même la cohérence des aides à l'investissement, cofinancées par la Communauté et l'État membre concerné en application de ce règlement, avec la politique agricole commune, notamment dans le secteur spécifique du sucre, en prévoyant l'adoption de critères de choix (cinquième considérant et article 8) et l'établissement de plans sectoriels (articles 2 et 7) destinés, notamment, à garantir une telle cohérence. En l'occurrence, les critères de choix définis par la décision 94/173 en application de l'article 8, paragraphe 3, du règlement n° 866/90, excluent tous les investissements dans le secteur du sucre à l'exception, notamment, de ceux qui prévoient l'utilisation du quota attribué au Portugal continental par le règlement n° 1785/81, à la suite de sa modification par l'acte d'adhésion.

118.
    Il s'ensuit que l'application des articles 92 du traité CE et 88 CE aux aides à l'investissement éligibles à un cofinancement de la Communauté au titre du règlement n° 866/90 serait incompatible avec la primauté attribuée par le traité à la politique agricole commune sur l'application des règles de la concurrence.

119.
    Pour l'ensemble de ces motifs, les aides éligibles à un cofinancement par la Communauté au titre du règlement n° 866/90 ne sont pas soumises à l'application des articles 92 du traité CE et 88 CE.

120.
    Le premier moyen, tiré de la violation de ces articles, ne saurait, dès lors, être accueilli.

Sur le second moyen, tiré de l'incompatibilité de l'aide en cause avec le règlement n° 866/90

Argumentation des parties

121.
    Dans le cadre de ce second moyen, invoqué à titre subsidiaire, les parties requérantes soutiennent que l'exigence de cohérence de l'intervention communautaire avec la politique agricole commune, mise en évidence dans le préambule du règlement n° 866/90 (cinquième considérant) et requise par les articles 1er, paragraphe 2, sous b), 2 et 8, paragraphe 2, de ce règlement, s'opposerait au cofinancement de l'aide au secteur portugais du sucre de betterave.

122.
    En particulier, l'aide à l'investissement en cause ne saurait se fonder sur la décision 94/173. Celle-ci serait en effet irrégulière dans la mesure où elle ne respecterait pas les conditions de cofinancement imposées par le règlement n° 866/90, lequel n'autorise pas le cofinancement des aides incompatibles avec la politique agricole commune.

123.
    La Commission conteste que l'aide en cause ne respecte pas les conditions et les modalités définies par le règlement n° 866/90. Cette aide viserait uniquement à permettre aux autorités portugaises de faciliter la création d'une installation de transformation du sucre afin d'assurer des débouchés pour les betteraves sucrières récoltées dans la région, en vue d'utiliser le quota de sucre blanc attribué au Portugal continental.

Appréciation du Tribunal

124.
    Ce moyen se fonde, en substance, sur l'argument selon lequel l'aide à l'investissement en cause serait exclue par le règlement n° 866/90 parce qu'elle serait incompatible avec la politique agricole commune et ne pourrait se fonder sur la décision 94/173, elle-même incompatible avec cette politique. A cet égard, il suffit de rappeler que, ainsi qu'il a été déjà jugé (voir ci-dessus les points 89 et 90), les aides octroyées en vue de permettre l'utilisation du quota attribué au Portugal continental ne sont pas incompatibles avec les objectifs de la politique agricole commune. Le second moyen ne saurait, dès lors, être accueilli.

125.
    Il s'ensuit que le présent recours en annulation doit être rejeté comme non fondé dans son intégralité.

Sur les dépens

126.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé en leurs conclusions, il y a lieu de les condamner à supporter leurs dépens ainsi que ceux exposés par la partie défenderesse et DAI qui ont conclu en ce sens.

127.
    La République portugaise supportera ses propres dépens, conformément à l'article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre élargie)

déclare et arrête:

1)    Le recours est rejeté.

2)    Les parties requérantes supporteront leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par la partie défenderesse et par la partie intervenante DAI - Sociedade de Desenvolvimento Agro-industrial SA.

3)    La République portugaise supportera ses propres dépens.

Moura Ramos      García-Valdecasas             Tiili

            Lindh                        Mengozzi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 juin 1999.

Le greffier

Le président

H. Jung

R. M. Moura Ramos


1: Langue de procédure: l'anglais.

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