ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)
10 avril 2003(1)
«Fonctionnaires - Recours - Délais - Irrecevabilité»
Dans l'affaire T-186/01,
Nicole Robert, fonctionnaire du Parlement européen, demeurant à Strassen (Luxembourg), représentée par Me A. Lorang, avocat, ayant élu domicile à Luxembourg,
contre
Parlement européen, représenté par MM. H. von Hertzen et D. Moore, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
ayant pour objet une demande d'annulation de la décision du Parlement de ne pas promouvoir la requérante au grade B 1 au titre de l'exercice de promotion 1999,
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),
composé de M. R. García-Valdecasas, président, Mme P. Lindh et M. J. D. Cooke, juges,
greffier: M. J. Plingers, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 28 novembre 2002,
rend le présent
Arrêt
Faits à lorigine du litige
- 1.
- La requérante, fonctionnaire de grade B 2 du Parlement, avait vocation à être promue au grade B 1 depuis le 1er janvier 1995. Elle a été promue au grade B 1 au titre de lexercice de promotion 2000.
- 2.
- Le bureau du Parlement a adopté, le 8 mars 1999, les «instructions en matière de promotion et de programmation des carrières» sur lesquelles le nouveau système de notation et de promotion est fondé. Aux termes de ces instructions, il est prévu que le mérite de chaque fonctionnaire est évalué chaque année au sein de sa direction générale à la suite de létablissement de son rapport de notation. Dans ce cadre, chaque fonctionnaire méritant obtient chaque année un ou plusieurs «points de promouvabilité» dans une fourchette de un à trois points (un point = carrière lente; deux points = carrière normale; trois points = carrière rapide).
- 3.
- Le secrétaire général du Parlement a adopté, le 1er septembre 1999, les «instructions relatives à la procédure dattribution des points de promouvabilité».
- 4.
- Le 22 septembre 1999, le directeur général de la requérante a proposé de lui attribuer trois «points de promouvabilité» par année pour les exercices de promotion 1997 et 1998.
- 5.
- Dans son avis du 4 novembre 1999, le comité des rapports a estimé quil devait être attribué seulement deux «points de promouvabilité» à la requérante pour les exercices de promotion 1997 et 1998, lattribution dun troisième point nétant pas justifiée sur la base du rapport de notation.
- 6.
- Le 11 novembre 1999, le secrétaire général du Parlement a pris une décision dattribution des points définitifs de promouvabilité pour les années 1997 et 1998. Il est notamment indiqué dans cette note, concernant la requérante, quelle dispose dun bon rapport de notation qui ne comporte toutefois pas déléments exceptionnels permettant de justifier lattribution dun 3e «point de promouvabilité» et quil est recommandé de suivre lavis du comité des rapports de lui accorder deux points pour chacune des années de référence.
- 7.
- Dans sa décision du 22 novembre 1999, rendue après examen du procès-verbal de la réunion du comité de promotion pour la catégorie B, le directeur général du personnel, en tant quautorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l«AIPN»), na pas mentionné la requérante parmi les fonctionnaires de grade B 2 promus au grade B 1 au titre de lexercice de promotion 1999.
- 8.
- Le 7 décembre 1999, la requérante a saisi le comité des rapports afin de contester le nombre de «points de promouvabilité» qui lui a été attribué au titre des exercices de promotion 1997 et 1998 ainsi quau titre des exercices 1995 et 1996.
- 9.
- Le 14 décembre 1999, le comité des rapports, dans lavis n° 142/99, a estimé que la transposition en «points de promouvabilité» des appréciations portées dans les rapports de notation de la requérante pour les exercices de promotion 1995 et 1996 était correcte.
- 10.
- Par lettre du 17 décembre 1999, le secrétaire général du Parlement a indiqué ce qui suit à la requérante:
«Objet: points de promouvabilité pour lexercice 1997-1998
[.]
Conformément aux instructions relatives à la procédure dattribution des points de promouvabilité, le comité des rapports rend un avis sur la 'liste des fonctionnaires pour lesquels les directeurs généraux et les chefs dunité autonome proposent dattribuer un 3e point.
La tâche du comité des rapports était de vérifier que le rapport de notation des fonctionnaires concernés démontrait bien un niveau exceptionnel de prestation,notamment en indiquant des éléments factuels et précis. Dans son avis du 4 novembre 1999, le comité a estimé que votre rapport de notation ne répondait pas à ce critère.
Jai décidé de suivre cet avis et par conséquent de vous accorder 2 points pour chacune des deux années de référence.»
- 11.
- Par lettre du 22 février 2000, le président du comité des rapports a transmis à la requérante lavis n° 142/99, rendu par ledit comité le 14 décembre 1999, concernant lattribution des points de promouvabilité pour les années 1995 et 1996.
- 12.
- Par lettre du 29 février 2000, enregistrée au Parlement le 9 mars 2000, la requérante a introduit, auprès du secrétaire général de cette institution, une réclamation sur la base de larticle 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut»). Aux termes de sa réclamation, la requérante demande au secrétaire général du Parlement de reconsidérer la décision de ne lui accorder que deux «points de promouvabilité» par année pour la période allant de 1995 à 1998.
- 13.
- Par lettre du 10 mars 2000, le secrétaire général du Parlement a informé la requérante de ce qui suit:
«Je confirme lavis du comité [des rapports] relatif au calcul de vos points de promouvabilité pour 1995-1996. Quant à la période 1997-1998, je vous ai fait part de ma décision par lettre en date du 17 décembre 1999 dans laquelle je vous indiquais également la procédure suivie.»
- 14.
- Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 juin 2000, la requérante a introduit un recours en annulation de la lettre du secrétaire général du Parlement du 10 mars 2000, lequel a été enregistré sous le numéro T-157/00.
- 15.
- Le 12 juillet 2000, le Parlement a envoyé à la requérante une lettre rédigée comme suit:
«Tout en regrettant le retard dans lanalyse de votre dossier, nous vous assurons quil sera traité dans les meilleurs délais. En effet, le nombre très élevé de réclamations et lexigence dun examen approfondi du contenu de votre réclamation na pas permis délaborer une réponse à celle-ci dans les délais prévus à larticle 90, paragraphe 2, du statut.
Bien évidemment, la décision contre laquelle vous avez introduit une réclamation est celle du 17 décembre 1999 de Monsieur le secrétaire général du Parlement.
[...][L]a lettre du 10 mars 1999, par laquelle ce dernier confirme avoir examiné lavis n° 142/99 du comité des rapports, nest pas un rejet de votre réclamationdu 29 février 2000 mais une réponse à votre saisine du comité des rapports du 7 décembre 1999.»
- 16.
- Le 6 novembre 2000, le président du Parlement a adressé à la requérante une lettre rédigée comme suit:
«Par lettre du 29 février 2000, enregistrée au courrier officiel le 9 mars 2000, vous avez introduit une réclamation en vertu de larticle 90, paragraphe 2, du statut contre la décision du secrétaire général datée du 17 décembre 1999 de confirmer lavis n° 142/99 du comité des rapports vous accordant deux points de promouvabilité par année pour la période 1997-1998. Vous demandez également de reconsidérer les points attribués pour les années 1995 et 1996.
Étant donné que pour 1997-1998 vous étiez proposée pour lattribution dun troisième point par votre directeur général, jai décidé de saisir à nouveau le comité des rapports en ce qui concerne cet exercice. Jinvite ce dernier à procéder à une comparaison très détaillée de votre rapport de notation et du niveau de vos mérites non seulement avec ceux des fonctionnaires de votre direction générale ayant obtenu trois points, mais également avec ceux des fonctionnaires ayant obtenu deux points.»
- 17.
- Par ordonnance du 15 novembre 2000, le Tribunal a rejeté comme irrecevable le recours dans laffaire T-157/00. À cet égard, le Tribunal a considéré que le recours était prématuré, puisque il a été introduit avant lexpiration du délai de réponse à la réclamation. Il a été jugé, à cet égard, que la lettre du secrétaire général du 10 mars 2000 (voir point 13 ci-dessus) ne pouvait pas être considérée comme une décision portant rejet de la réclamation de la requérante.
- 18.
- Le 21 mars 2001, le président du Parlement a adressé à la requérante une lettre ainsi rédigée:
«Par lettre du 22 février 2001 enregistrée au courrier officiel le 26 février suivant, vous vous interrogez sur lissue de votre réclamation du 29 février 2000.
Conformément à ma lettre du 6 novembre 2000, jai invité le comité des rapports à procéder à un nouvel examen de votre rapport de notation pour la période 1997/1998 afin de le comparer à ceux des autres fonctionnaires ayant obtenu deux ou trois points de promouvabilité.
Le 11 janvier 2001, le comité des rapports ma communiqué son avis qui fait actuellement lobjet dune analyse minutieuse de lunité réclamations juridiques ainsi que du service juridique du Parlement européen.
Dès que ces analyses seront achevées, vraisemblablement début avril, je vous informerai de lissue définitive de votre réclamation.»
- 19.
- Le Parlement a, par lettre du 23 mai 2001, informé la requérante, notamment, de ce qui suit:
«Le comité des rapports a donné son avis en date du 11 janvier 2001.
[.]
Pour ma part, après avoir vérifié minutieusement les appréciations du comité des rapports, jai décidé de suivre son avis et de rejeter votre réclamation comme non fondée. En effet, deux points de promouvabilité par année, correspondant à une carrière normale, sont attribués aux fonctionnaires méritants dont le rapport de notation met en évidence, par le biais déléments factuels probants, la haute qualité densemble de leurs compétence, rendement et intégrité pendant la période de référence.
[.]
Or, votre rapport de notation pour 1997-1998 mentionne un fonctionnaire méritant, ce qui justifie lattribution de deux points de promouvabilité, et la comparaison avec les rapports des fonctionnaires de même grade permet de confirmer la décision du comité des rapports.»
Procédure
- 20.
- Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 août 2001, la requérante a introduit le présent recours.
- 21.
- Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 11 septembre 2001, le Parlement a soulevé une exception dirrecevabilité au titre de larticle 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.
- 22.
- Le 24 octobre 2001, la requérante a déposé ses observations sur lexception dirrecevabilité.
- 23.
- Par ordonnance du Tribunal (cinquième chambre) du 23 novembre 2001, lexamen de lexception dirrecevabilité a été joint à celui du fond et les dépens ont été réservés.
- 24.
- Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé douvrir la procédure orale.
- 25.
- Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de laudience publique du 28 novembre 2002.
Conclusions des parties
- 26.
- La requérante conclut à ce quil plaise au Tribunal:
constater que le Parlement a pris une décision contraire aux articles 4, 5, 7, deuxième alinéa, 9, 45 et à lannexe 1 du statut;
annuler la décision du Parlement du 22 novembre 1999 de promouvoir douze autres fonctionnaires du grade B 2 au grade B 1;
annuler la décision du président du Parlement du 23 mai 2001;
condamner le Parlement aux dépens.
- 27.
- Le Parlement conclut à ce quil plaise au Tribunal:
rejeter le recours comme étant irrecevable;
à titre subsidiaire, rejeter le recours comme étant non fondé;
statuer sur les dépens comme de droit.
Sur la recevabilité
Arguments des parties
- 28.
- Le Parlement excipe de lirrecevabilité du recours aux motifs du non-respect des délais de recours, de linsuffisance de lidentification de lacte faisant grief et de labsence de concordance entre lobjet de la réclamation et celui du recours.
Sur le premier argument, tiré du non-respect des délais de recours
- 29.
- Le Parlement soutient que, en vertu de larticle 90, paragraphe 2, du statut, il disposait dun délai de quatre mois à compter de lintroduction de la réclamation de la requérante, qui lui a été notifiée le 9 mars 2000, pour y répondre. À lexpiration de ce délai, le 10 juillet 2000, aucune décision explicite portant rejet de la réclamation de la requérante ne lui ayant été notifiée, ce défaut de réponse valait décision implicite de rejet susceptible de faire lobjet dun recours dans un délai de trois mois. Ce délai a, selon le Parlement, expiré le 10 octobre 2000.
- 30.
- Le fait quune décision explicite portant rejet de la réclamation de la requérante soit intervenue le 23 mai 2001, cest-à-dire postérieurement au délai de recours susmentionné, ne saurait justifier une extension de ce délai. Dès lors, le présent recours, introduit le 8 août 2001, devrait être déclaré irrecevable en vertu de larticle 91, paragraphe 3, du statut et de la jurisprudence (arrêt du Tribunal du 9 juillet 1997, Echauz Brigaldi e.a./Commission, T-156/95, RecFP p. I-A-171 et II-509).
- 31.
- Le Parlement précise que la requérante a bénéficié des services dun conseil, que le Tribunal a jugé que le recours T-157/00 avait été introduit prématurément et quil a, à cette occasion, insisté sur la nécessité de respecter les délais de recours, lesquels sont dordre public.
- 32.
- La requérante soutient que, dans sa lettre du 12 juillet 2000, le Parlement lui avait indiqué quil ny avait pas eu de rejet de sa réclamation du 29 février 2000 et que, eu égard au nombre très élevé de réclamations introduites par dautres fonctionnaires, il navait pas été possible de traiter sa réclamation. Il ne saurait donc être question dun rejet implicite de sa réclamation, puisque le Parlement lui a demandé de patienter en attendant que soit adoptée une décision finale.
- 33.
- La requérante considère que, dans ces circonstances, il nétait pas question dintroduire un recours avant davoir pris connaissance de la position définitive du Parlement.
- 34.
- Or, ce ne serait que le 23 mai 2001 que le Parlement aurait explicitement rejeté la réclamation de la requérante, après avoir réexaminé sa situation en prenant en considération les éléments nouveaux.
- 35.
- En outre, le président du Parlement aurait donné des assurances à la requérante selon lesquelles, à la suite de sa réclamation, le comité des rapports serait à nouveau saisi. Il sagissait donc, selon la requérante, dune procédure nouvelle par laquelle le Parlement sengageait à reconsidérer sa situation. Cet engagement aurait dailleurs été réitéré dans la lettre du président du Parlement du 21 mars 2001.
- 36.
- La loyauté qui devrait présider aux relations entre linstitution et le fonctionnaire ne saurait permettre que ladministration considère que, lorsquelle sengage à réexaminer une situation, un tel examen ne puisse faire lobjet dun recours. À cet égard, la requérante relève que le Parlement na nullement, en procédant de la sorte, invoqué le fait quun tel réexamen aurait un caractère gracieux qui lexonérerait des voies de recours statutaires.
Sur le deuxième argument, tiré de linsuffisance didentification de lacte faisant grief.
- 37.
- Le Parlement fait valoir que la requérante demande au Tribunal de conclure que la décision du Parlement est contraire au statut sans préciser lauteur et la date de cette décision. Le premier chef de conclusions de la requête ferait référence à une «seule décision attaquée», alors que celui de la réplique viserait les «décisions attaquées».
- 38.
- En outre, le deuxième chef de conclusions de la requête ferait référence à la décision de promotion adoptée le 26 novembre 1999. Or, cette décision daterait du 22 novembre 1999 et naurait, en tout état de cause, jamais fait lobjet duneréclamation. En effet, la réclamation du 29 février 2000 ne concernerait que la décision du secrétaire général du 17 décembre 1999 relative à lattribution des «points de promouvabilité». Ainsi, lidentification de lacte faisant grief étant confuse, une telle demande devrait être rejetée en application de larticle 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal.
- 39.
- La requérante soutient que, tant dans le corps de sa requête que dans sa conclusion finale, elle a indiqué quelles sont les décisions attaquées et le nom de leur auteur, ce qui naurait dailleurs pas échappé au Parlement, lequel a commenté les deuxième et troisième chefs de conclusions de la requête.
Sur le troisième argument, tiré de labsence de concordance entre lobjet de la réclamation et lobjet du recours
- 40.
- Le Parlement rappelle que, selon une jurisprudence constante, les conclusions des recours des fonctionnaires doivent avoir le même objet que celui de la réclamation administrative préalable et contenir des chefs de conclusions reposant sur la même cause que celle de la réclamation (arrêt de la Cour du 14 juillet 1988, Aldinger et Virgili/Parlement, 23/87 et 24/87, Rec. p. 4395, point 15; arrêts du Tribunal du 11 juin 1996, Anacoreta Correia/Commission, T-118/95, RecFP p. I-A-283 et II-835, point 43, et du 16 septembre 1998, Rasmussen/Commission, T-193/96, RecFP p. I-A-495 et II-1495, point 47).
- 41.
- À cet égard, la réclamation du 29 février 2000 porterait seulement sur la décision de notation et lattribution des «points de promouvabilité», cest-à-dire sur la décision du secrétaire général du Parlement du 17 décembre 1999 et non sur la décision du directeur général du personnel du 22 novembre 1999 relative à la promotion dautres fonctionnaires.
- 42.
- Cette décision du 22 novembre 1999, concernant la promotion des fonctionnaires de grade B 2 au grade B 1, aurait été portée à la connaissance de lensemble du personnel. En conséquence, la requérante aurait dû introduire une réclamation à lencontre de cette décision au plus tard à léchéance du délai de trois mois à compter de sa publication.
- 43.
- En outre, la procédure de notation et la procédure de promotion seraient deux procédures distinctes pour lesquelles deux AIPN différentes sont responsables. Le secrétaire général du Parlement serait ainsi lAIPN compétente pour clôturer la procédure de notation et le directeur général du personnel du Parlement serait lAIPN compétente pour décider de la promotion des fonctionnaires de catégorie B.
- 44.
- La réclamation de la requérante ne concernerait donc que la procédure de notation et lattribution de ses «points de promouvabilité».
- 45.
- La requérante avance que la décision du 22 novembre 1999 ne la concernant pas, celle-ci ne lui a naturellement pas été communiquée.
- 46.
- En outre, en contestant la décision de promouvabilité dont elle faisait lobjet, la requérante aurait implicitement et nécessairement mis en cause les décisions relatives à ses collègues, lesquels, sur le fondement du seul système de notation, nauraient pas dû bénéficier dune promotion.
Appréciation du Tribunal
- 47.
- Il convient demblée de constater que, contrairement aux allégations du Parlement, il ressort des écrits de la requérante quelle a clairement identifié deux décisions dont elle demande lannulation, à savoir la décision du Parlement du 22 novembre 1999 de promouvoir douze fonctionnaires au grade B 1, dont la date a été confirmée lors de laudience, et la décision du président du Parlement du 23 mai 2001.
- 48.
- Selon une jurisprudence constante, les délais de réclamation et de recours fixés par les articles 90 et 91 du statut sont destinés à assurer la clarté et la sécurité des situations juridiques et sont dordre public, de sorte quils ne peuvent être laissés à la disposition des parties et du juge (arrêt de la Cour du 23 janvier 1997, Coen, C-246/95, Rec. p. I-403, point 21, et arrêt du Tribunal du 15 novembre 2001, Van Huffel/Commission, T-142/00, RecFP p. I-A-219 et II-1011, point 28). Les éventuelles exceptions ou dérogations à ces délais doivent être interprétées de manière restrictive (ordonnance du Tribunal du 15 décembre 1995, Progoulis/Commission, T-131/95, RecFP p. I-A-297 et II-907, point 36).
- 49.
- En lespèce, il y a lieu de constater que, conformément aux dispositions de larticle 90, paragraphe 2, du statut, en labsence de réponse explicite du Parlement, dans un délai de quatre mois, à la réclamation de la requérante du 29 février 2000, notifiée au Parlement le 9 mars 2000, celle-ci a été implicitement rejetée le 10 juillet 2000.
- 50.
- Le délai de trois mois pour lintroduction du recours, prévu à larticle 91, paragraphe 3, du statut, a ainsi expiré le 20 octobre 2000, délai de distance inclus, sans quaucune décision explicite de rejet susceptible de faire de nouveau courir le délai de recours soit intervenue dans ledit délai, tel que le prévoit larticle 91, paragraphe 3, du statut.
- 51.
- Le présent recours ayant été introduit le 8 août 2001, il est tardif. Dès lors, la décision du secrétaire général du Parlement, du 17 décembre 1999, de naccorder que deux points de promouvabilité à la requérante au titre des exercices de promotion 1997 et 1998 est, en principe, devenue définitive à son égard faute davoir fait lobjet dun recours contentieux introduit dans les délais requis.
- 52.
- Il convient toutefois dexaminer si lintroduction tardive du recours de la requérante peut être justifiée par lexistence dune erreur excusable de cette dernière susceptible de rouvrir les délais de recours prescrits à larticle 91, paragraphe 3, du statut.
- 53.
- En effet, afin de justifier lintroduction tardive de son recours, la requérante avance quil résulte des courriers que lui a fait parvenir le Parlement que ce dernier lui a assuré que sa situation serait réexaminée et quil serait répondu à sa réclamation.
- 54.
- Sagissant de la notion derreur excusable, il a été itérativement jugé quelle ne peut viser que des circonstances exceptionnelles où, notamment, linstitution concernée a adopté un comportement de nature, à lui seul ou dans une mesure déterminante, à provoquer une confusion admissible dans lesprit dun justiciable de bonne foi et faisant preuve de toute la diligence requise dune personne normalement avertie (arrêts du Tribunal du 16 mars 1993, Blackmann/Parlement, T-33/89 et T-74/89, Rec. p. II-249, point 34, et du 15 mars 1995, Cobrecaf e.a./Commission, T-514/93, Rec. p. II-621, point 40).
- 55.
- Par sa lettre du 12 juillet 2000 (voir point 15 ci-dessus), le Parlement a informé la requérante de la circonstance selon laquelle il navait pas été possible de traiter sa réclamation dans le délai de quatre mois prescrit à larticle 90, paragraphe 2, du statut et que celle-ci serait traitée dans les meilleurs délais.
- 56.
- Il ressort de cette lettre que le Parlement na pas tenté de dissuader la requérante dintroduire un recours contre la décision implicite portant rejet de sa réclamation intervenue le 10 juillet 2000 et que son contenu nest pas de nature à avoir provoqué, dans lesprit de cette dernière, une confusion quant au délai dans lequel elle était tenue dintroduire ce recours.
- 57.
- Quant aux lettres des 6 novembre 2000 et 21 mars 2001 (voir points 16 et 18 ci-dessus) aux termes desquelles le président du Parlement a informé la requérante, respectivement, de son intention de saisir à nouveau le comité des rapports afin quil réexamine le nombre de «points de promouvabilité» qui lui a été attribué et de la circonstance selon laquelle lavis ainsi rendu par ledit comité le 11 janvier 2001 est analysé par lunité «Réclamations juridiques» et par le service juridique du Parlement, elles ne peuvent pas être à lorigine dune confusion dans lesprit de la requérante quant à la computation du délai pour lintroduction du présent recours, dès lors que ces lettres lui ont été envoyées postérieurement à lexpiration de celui-ci, intervenue le 20 octobre 2000.
- 58.
- Il en est, a fortiori, de même sagissant de la décision du président du Parlement du 23 mai 2001 de ne pas octroyer un troisième «point de promouvabilité» à la requérante pour chacune des années de la période allant de 1995 à 1998, laquelle constitue, selon le Parlement, une décision explicite portant rejet de sa réclamation.
- 59.
- Il sensuit que la notion derreur excusable nétant pas applicable en lespèce, elle ne saurait justifier lintroduction tardive du présent recours.
- 60.
- À titre subsidiaire, il convient de relever que la décision du président du Parlement du 23 mai 2001 a été adoptée à la suite de la nouvelle saisine du comité des rapports, laquelle constitue, tel que la admis le Parlement lors de laudience, une procédure exceptionnelle non prévue par les dispositions applicables en lespèce, à savoir les «instructions relatives à la procédure dattribution des points de promouvabilité».
- 61.
- Ainsi, à supposer que la décision du 23 mai 2001 adoptée par le président du Parlement à lissue de ce réexamen ne constitue pas une décision portant rejet de la réclamation de la requérante, mais une nouvelle décision au sens de larticle 90, paragraphe 2, du statut (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 16 décembre 1987, Beiten/Commission, 206/85, Rec. p. 5301, point 8, et arrêt du Tribunal du 5 décembre 2002, Hoyer/Commission, T-209/99, non encore publié au Recueil, point 48), il incombait à la requérante dintroduire une réclamation administrative contre cette décision, conformément à larticle 90, paragraphe 2, du statut.
- 62.
- Dans cette hypothèse, le présent recours, en ce quil vise cette décision aux termes du troisième chef de conclusions de la requérante, doit également être rejeté comme étant irrecevable pour défaut de réclamation administrative préalable.
- 63.
- Par ailleurs, il y a lieu dexaminer largument du Parlement tiré de labsence de concordance entre lobjet de la réclamation administrative et celui du présent recours.
- 64.
- Il convient à cet égard de rappeler que la règle de la concordance entre la réclamation administrative préalable et le recours exige, sous peine dirrecevabilité, quun moyen soulevé devant le juge communautaire lait déjà été dans le cadre de la procédure précontentieuse, afin que lAIPN ait été en mesure de connaître dune façon suffisamment précise les critiques formulées par lintéressé à lencontre de la décision contestée (voir, notamment, arrêt du Tribunal du 8 juin 1995, Allo/Commission, T-496/93, RecFP p. I-A-127 et II-405, point 26).
- 65.
- En lespèce, il ressort des deuxième et troisième chefs de conclusions de la requérante quelle demande lannulation tant de la décision du Parlement, du 22 novembre 1999, de promouvoir au grade B 1 douze fonctionnaires dont elle ne fait pas partie que de la décision du président du Parlement, du 23 mai 2001, de ne pas lui accorder trois «points de promouvabilité» pour chacune des années de la période allant de 1995 à 1998.
- 66.
- Les moyens soulevés par la requérante dans le cadre de son recours viennent uniquement à lappui de son deuxième chef de conclusions, tendant à obtenir lannulation de la décision du Parlement, du 22 novembre 1999, relative à la promotion au grade B 1 de douze fonctionnaires dont elle ne fait pas partie et nepeuvent, même dans un esprit douverture, être interprétés comme visant à contester le nombre de «points de promouvabilité» obtenus par la requérante pour les exercices de promotion 1995 à 1998.
- 67.
- Or, il convient de rappeler que, aux termes de sa réclamation du 29 février 2000, la requérante contestait uniquement le nombre de «points de promouvabilité» qui lui avait été accordé au titre des exercices de promotion 1995 à 1998 et non la comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables effectuée dans le cadre de lexercice de promotion 1999.
- 68.
- Dès lors, le présent recours est également irrecevable pour défaut de concordance entre les moyens soulevés par la requérante à lappui de son recours et lobjet de sa réclamation.
- 69.
- Il ressort de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté comme étant irrecevable.
Sur les dépens
- 70.
- Aux termes de larticle 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens sil est conclu en ce sens. Toutefois, selon larticle 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Le requérant ayant succombé en ses moyens et la Commission ayant conclu à ce que le Tribunal statue sur les dépens comme de droit, chaque partie supportera ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (cinquième chambre)
déclare et arrête:
1) Le recours est rejeté comme étant irrecevable.
2) Chacune des parties supportera ses propres dépens.
García-ValdecasasLindh Cooke |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 avril 2003.
Le greffier
Le président
H. Jung
R. García-Valdecasas