Language of document : ECLI:EU:C:2018:1033

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

19 décembre 2018 (*)

« Renvoi préjudiciel – Droit d’auteur et droits voisins – Directive 2001/29/CE – Article 4, paragraphe 1 – Droit de distribution – Contrefaçon – Marchandises portant un motif protégé par un droit d’auteur destinées à la vente – Stockage à des fins commerciales – Entrepôt séparé du lieu de vente »

Dans l’affaire C‑572/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Högsta domstolen (Cour suprême, Suède), par décision du 21 septembre 2017, parvenue à la Cour le 28 septembre 2017, dans la procédure pénale contre



Imran Syed,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. T. von Danwitz, président de la septième chambre, faisant fonction de président de la quatrième chambre, Mme K. Jürimäe (rapporteure), MM. C. Lycourgos, E. Juhász et C. Vajda, juges,

avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

–        pour le Riksåklagaren, par Mmes M. Hedström et K. Skarp, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par Mme J. Samnadda et M. K. Simonsson, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 3 octobre 2018,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information (JO 2001, L 167, p. 10).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure pénale engagée par le riksåklagaren (procureur du Royaume, Suède) à l’encontre de M. Imran Syed pour contrefaçon de marques et atteintes au droit de la propriété littéraire et artistique.

 Le cadre juridique

 Le droit international

3        L’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) a adopté à Genève, le 20 décembre 1996, le traité de l’OMPI sur le droit d’auteur (ci-après le « TDA »), qui a été approuvé au nom de la Communauté européenne par la décision 2000/278/CE du Conseil, du 16 mars 2000 (JO 2000, L 89, p. 6), et est entré en vigueur, en ce qui concerne l’Union européenne, le 14 mars 2010 (JO 2010, L 32, p. 1).

4        L’article 6 du TDA, intitulé « Droit de distribution », dispose, à son paragraphe 1 :

« Les auteurs d’œuvres littéraires et artistiques jouissent du droit exclusif d’autoriser la mise à la disposition du public de l’original et d’exemplaires de leurs œuvres par la vente ou tout autre transfert de propriété. »

 Le droit de l’Union


5        L’article 4 de la directive 2001/29, intitulé « Droit de distribution », dispose, à son paragraphe 1 :

« Les États membres prévoient pour les auteurs le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire toute forme de distribution au public, par la vente ou autrement, de l’original de leurs œuvres ou de copies de celles-ci. »

 Le droit suédois

6        La lag (1960:729) om upphovsrätt till litterära och konstnärliga verk [loi (1960:729) relative au droit de la propriété littéraire et artistique] transpose la directive 2001/29 en droit suédois.

7        L’article 53 de cette loi prévoit :

« Toute personne qui, intentionnellement ou à la suite d’une négligence grave, adopte des mesures relative à une œuvre littéraire ou artistique, et qui constituent une infraction au droit d’auteur qu’une personne détient sur l’œuvre en vertu du chapitre 1 ou du chapitre 2 de ladite loi ou une violation d’une disposition prévue à l’article 41, deuxième alinéa, ou à l’article 50, est passible d’une amende ou d’une peine d’emprisonnement de deux ans au plus. »

8        Aux termes de l’article 2 de ladite loi, est susceptible de constituer une telle mesure, notamment, le fait d’exploiter l’œuvre en la mettant à la disposition du public sans le consentement du titulaire du droit d’auteur. Le troisième alinéa, point 4, de cet article précise que l’œuvre est mise à la disposition du public notamment lorsque des exemplaires de celle-ci sont proposés à la vente, à la location ou au prêt ou sont distribués auprès du public par tout autre moyen.

9        Ladite loi n’interdit pas expressément le stockage de marchandises protégées aux fins de leur mise en vente.

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

10      M. Syed exploitait un commerce de détail à Stockholm (Suède), dans lequel il vendait des vêtements et des accessoires sur lesquels étaient apposés des motifs ayant pour thème la musique rock. En plus des pièces mises en vente dans ce magasin, M. Syed stockait de telles marchandises dans un entrepôt attenant à celui-ci ainsi que dans un autre entrepôt situé à Bandhagen (Suède), une banlieue de la commune de Stockholm. Il est constant que le magasin de M. Syed était régulièrement approvisionné en marchandises provenant de ces entrepôts.

11      Il a été constaté que la vente de plusieurs de ces marchandises portait atteinte à des marques et des droits d’auteur. Une procédure pénale a été ouverte contre M. Syed pour contrefaçon de marques et infraction à la loi (1960:729) devant le tingsrätt (tribunal de première instance, Suède). Selon l’åklagaren (procureur, Suède), M. Syed aurait porté atteinte au droit d’auteur des plaignants en ayant mis illégalement à la disposition du public des vêtements et des drapeaux sur lesquels sont apposés des motifs protégés par ces droits d’auteur. Il a donc considéré que l’ensemble des marchandises portant de tels motifs qui se trouvait dans le magasin et dans les entrepôts était mis en vente ou distribué au public et, partant, que de tels actes constituaient une infraction à la loi (1960:729).

12      Le tingsrätt (tribunal de première instance) a condamné M. Syed pour contrefaçon de marques pour l’ensemble des marchandises recensées. Ce tribunal l’a également condamné pour infraction à la loi (1960:729) pour les marchandises portant un motif protégé par un droit d’auteur qui se trouvaient dans le magasin qu’il exploitait, ainsi que pour les marchandises stockées dans les deux entrepôts en cause, dans la mesure où elles étaient identiques à celles qui étaient en vente dans ce magasin. Le tingsrätt (tribunal de première instance) a considéré, aux fins de condamner M. Syed également pour ces dernières marchandises, que la notion de « mise en vente » de marchandises portant atteinte au droit d’auteur des plaignants ne s’appliquait pas uniquement aux marchandises qui, à un moment donné, se trouvaient dans le magasin de M. Syed, mais concernait également les marchandises identiques stockées dans les entrepôts. En revanche, cette juridiction a jugé que les autres marchandises stockées dans ces entrepôts ne pouvaient être considérées comme ayant été mises en vente. Pour l’ensemble de ces infractions, le tingsrätt (tribunal de première instance) a condamné M. Syed à une peine privative de liberté assortie d’un sursis et à 80 jours-amende.

13      Saisi en appel, le Svea hovrätt, Patent- och marknadsöverdomstolen (cour d’appel siégeant à Stockholm en tant que juridiction spécialisée en matière de brevets et de commerce, Suède) a estimé que M. Syed avait commis une infraction à la loi (1960:729) uniquement en ce qui concerne les marchandises qui se trouvaient dans le magasin de celui-ci, à l’exclusion des marchandises stockées dans les entrepôts. Cette juridiction a considéré que M. Syed avait bien stocké ces marchandises dans le but de les vendre. Cependant, il ne pouvait être considéré que ces marchandises avaient été mises en vente ou distribuées au public. De même, la manipulation des marchandises dans les entrepôts ne constituait pas, selon la juridiction d’appel, une tentative ou une préparation d’infraction à la loi (1960:729). La peine infligée à M. Syed a été réduite, dans la mesure où ce dernier a été condamné à une peine privative de liberté assortie d’un sursis et à 60 jours-amende.

14      Devant le Högsta domstolen (Cour suprême, Suède), juridiction de renvoi dans cette affaire, le Riksåklagaren (procureur du Royaume) a requis la condamnation de M. Syed pour les mêmes marchandises que celles qui avaient été retenues par le tingsrätt (tribunal de première instance) pour caractériser l’infraction à la loi (1960:729). Il a également demandé au Högsta domstolen (Cour suprême) de saisir la Cour à titre préjudiciel aux fins qu’elle se prononce sur l’interprétation de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/29.

15      Devant la juridiction de renvoi, M. Syed a soutenu qu’il découlait de la jurisprudence de la Cour que, pour qu’une mise en vente porte atteinte au droit de distribution d’un titulaire de droit d’auteur, un comportement actif vis-à-vis du public, visant à vendre chaque objet spécifiquement, est exigé. L’achat et le stockage de marchandises ne sauraient être considérés comme relevant d’un tel comportement actif. Une interprétation contraire élargirait le champ de la responsabilité pénale en violation du principe de légalité.

16      La juridiction de renvoi constate que ni la loi (1960:729) ni la directive 2001/29 n’interdisent expressément le stockage de marchandises sur lesquelles est apposé un motif protégé par un droit d’auteur aux fins de leur mise en vente. Elle ajoute qu’il découle de l’arrêt du 13 mai 2015, Dimensione Direct Sales et Labianca (C‑516/13, EU:C:2015:315), qu’une atteinte au droit de distribution consacré à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/29 peut être constituée par des mesures ou des actes qui précèdent l’exécution d’un contrat de vente. Toutefois, se poserait la question de savoir si des marchandises sur lesquelles est apposé un motif protégé qui sont stockées, par une personne, dans des entrepôts peuvent être considérées comme étant mises en vente lorsque cette personne offre à la vente des marchandises identiques dans un commerce de détail qu’elle exploite.

17      C’est dans ces circonstances que le Högsta domstolen (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Lorsque des marchandises sur lesquelles sont apposés des motifs protégés sont illégalement proposées à la vente dans un magasin, peut-il également exister une atteinte au droit exclusif de distribution de l’auteur prévu à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/29 en ce qui concerne des marchandises sur lesquelles figurent les mêmes motifs, et qui sont stockées dans des locaux par la personne qui propose les marchandises à la vente ?

2)      Le fait que les marchandises soient stockées dans un local attenant à ce magasin ou dans un autre endroit revêt-il de l’importance ? »

 Sur les questions préjudicielles

18      Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/29 doit être interprété en ce sens que le stockage, par un commerçant, de marchandises sur lesquelles est apposé un motif protégé par un droit d’auteur sur le territoire de l’État membre de stockage peut constituer une atteinte au droit exclusif de distribution du titulaire de ce droit, au sens de cette disposition, lorsque ce commerçant propose à la vente, dans un magasin sans l’autorisation du titulaire dudit droit d’auteur, des marchandises identiques à celles qu’il stocke sans l’autorisation de ce titulaire. La juridiction de renvoi demande également à la Cour de préciser s’il convient de tenir compte, à cet égard, de la distance entre le lieu de stockage et le lieu de vente.

19      Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/29, les États membres prévoient pour les auteurs le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire toute forme de distribution au public, par la vente ou autrement, de l’original de leurs œuvres ou de copies de celles-ci.

20      Il convient de rappeler que, étant donné que la directive 2001/29 vise à mettre en œuvre dans l’Union les obligations qui incombent à l’Union en vertu, notamment, du TDA, et que les textes du droit de l’Union doivent être, selon une jurisprudence constante, interprétés, dans la mesure du possible, à la lumière du droit international, en particulier lorsque de tels textes visent précisément à mettre en œuvre un accord international conclu par l’Union, la notion de « distribution », contenue à l’article 4, paragraphe 1, de cette directive, doit être interprétée en conformité avec l’article 6, paragraphe 1, du TDA (arrêt du 13 mai 2015, Dimensione Direct Sales et Labianca, C‑516/13, EU:C:2015:315, point 23 ainsi que jurisprudence citée).

21      La notion de « distribution au public [...] par la vente », figurant à l’article 4, paragraphe 1, de ladite directive, a donc la même signification que l’expression « mise à la disposition du public [...] par la vente », au sens de l’article 6, paragraphe 1, du TDA (arrêt du 13 mai 2015, Dimensione Direct Sales et Labianca, C‑516/13, EU:C:2015:315, point 24 ainsi que jurisprudence citée).

22      Tenant compte de ce contexte, la Cour a constaté que la distribution au public se caractérise par une série d’opérations allant, à tout le moins, de la conclusion d’un contrat de vente à l’exécution de celui-ci par la livraison à un membre du public. Un commerçant est, dès lors, responsable de toute opération réalisée par lui-même ou pour son compte donnant lieu à une distribution au public dans un État membre où les biens distribués sont protégés par un droit d’auteur (arrêt du 13 mai 2015, Dimensione Direct Sales et Labianca, C‑516/13, EU:C:2015:315, point 25 ainsi que jurisprudence citée).

23      Il ressort de cette jurisprudence, et notamment des termes « à tout le moins » employés par la Cour, qu’il n’est pas exclu que des opérations ou des actes précédant la conclusion du contrat de vente puissent également relever de la notion de « distribution » et être réservés, à titre exclusif, aux titulaires de droits d’auteur (arrêt du 13 mai 2015, Dimensione Direct Sales et Labianca, C‑516/13, EU:C:2015:315, point 26).

24      À cet égard, si l’existence d’une distribution au public doit être considérée comme avérée en cas de conclusion d’un contrat de vente et d’expédition, il en est également ainsi dans le cas d’une offre de contrat de vente qui lie son auteur, dans la mesure où une telle offre constitue, par sa nature même, un acte préalable à la réalisation d’une vente (arrêt du 13 mai 2015, Dimensione Direct Sales et Labianca, C‑516/13, EU:C:2015:315, point 27).

25      La Cour a également jugé, en substance, qu’une telle opération pouvait constituer une atteinte au droit exclusif de distribution, prévu à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/29, même si cette opération n’est pas suivie du transfert de propriété à un acquéreur de l’œuvre protégée ou de sa copie (voir, en ce sens, arrêt du 13 mai 2015, Dimensione Direct Sales et Labianca, C‑516/13, EU:C:2015:315, point 32).

26      Ainsi, peut constituer une atteinte au droit de distribution, tel qu’il est défini à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/29, un acte préalable à la réalisation d’une vente d’une œuvre ou d’une copie d’une œuvre protégée par un droit d’auteur, accompli sans l’autorisation du titulaire de ce droit et dans l’objectif de réaliser une telle vente (voir, en ce sens, arrêt du 13 mai 2015, Dimensione Direct Sales et Labianca, C‑516/13, EU:C:2015:315, point 28).

27      Si la réalisation de la vente n’est pas un élément nécessaire à la caractérisation d’un atteinte au droit de distribution, il doit toutefois être prouvé, à cet effet, que les marchandises concernées sont effectivement destinées à être distribuées au public sans l’autorisation du titulaire de ce droit, notamment au moyen d’une mise en vente, dans un État membre où l’œuvre en cause est protégée (voir, par analogie, arrêt du 13 mai 2015, Dimensione Direct Sales et Labianca, C‑516/13, EU:C:2015:315, points 29 et 32 ainsi que jurisprudence citée).

28      Dans l’affaire au principal, M. Syed stockait des marchandises sur lesquelles étaient apposés des motifs protégés par des droits d’auteur et vendait, sans l’autorisation des titulaires de ces droits, des marchandises identiques dans un magasin.

29      Il y a lieu de déterminer si un tel stockage peut être considéré comme un acte préalable à la réalisation d’une vente susceptible de constituer une atteinte au droit exclusif de distribution, tel qu’il est défini à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/29.

30      À cet égard, il convient d’observer que le stockage de marchandises sur lesquelles sont apposés des motifs protégés par un droit d’auteur est susceptible d’être considéré comme un tel acte s’il est démontré que ces marchandises sont effectivement destinées à être vendues au public sans l’autorisation du titulaire du droit d’auteur.

31      À ce titre, le fait qu’une personne, qui vend dans un magasin des marchandises sur lesquelles sont apposés des motifs protégés par un droit d’auteur sans l’autorisation du titulaire de ce droit, stocke des marchandises identiques peut constituer un indice tendant à démontrer que les marchandises stockées sont également destinées à être vendues dans ce magasin et, partant, que ce stockage peut constituer un acte préalable à la réalisation d’une vente susceptible de porter atteinte au droit de distribution de ce titulaire.

32      Toutefois, il ne saurait être inféré du seul constat que les marchandises stockées et les marchandises vendues dans le magasin de l’intéressé sont identiques, que le stockage constitue un acte accompli dans l’objectif de réaliser une vente sur le territoire de l’État membre dans lequel lesdites marchandises sont protégées par un droit d’auteur.

33      Il ne peut être exclu que tout ou partie des marchandises stockées dans des circonstances telles que celles en cause au principal ne soit pas destiné à être vendu sur le territoire de l’État membre dans lequel l’œuvre apposée sur ces marchandises est protégée, quand bien même ces marchandises seraient identiques à celles qui sont proposées à la vente dans le magasin du commerçant.

34      Or, dans une telle hypothèse, une approche telle que celle exposée au point 32 du présent arrêt conduirait à ne pas tenir compte de la destination effective des marchandises considérées et à traiter indistinctement l’ensemble des marchandises stockées alors qu’elles peuvent avoir, en principe, des destinations différentes.

35      Une telle approche reviendrait donc à élargir la protection conférée par le droit exclusif de distribution au-delà du cadre mis en place par le législateur de l’Union.

36      Dès lors, il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier à la lumière des éléments de preuve dont elle dispose si l’ensemble des marchandises identiques à celles qui étaient vendues dans le magasin en cause, ou une partie seulement de ces marchandises, était destiné à être commercialisé dans ce local.

37      À cet égard, la Cour estime utile de fournir les indications suivantes.

38      S’agissant de la détermination de la destination des marchandises considérées, il doit être tenu compte de l’ensemble des éléments susceptibles de démontrer que les marchandises concernées sont stockées dans l’objectif d’être vendues dans l’État membre sur le territoire duquel les motifs apposés sur les marchandises sont protégés par un droit d’auteur sans l’autorisation du titulaire de ce droit.

39      Si, parmi ces éléments, la distance entre le lieu de stockage et le lieu de vente peut constituer un indice pour établir que les marchandises concernées sont destinées à être vendues dans ce lieu de vente, cet indice ne saurait, à lui seul, être décisif. Celui-ci peut, en revanche, être pris en compte dans une analyse concrète de l’ensemble des éléments susceptibles d’être pertinents, tels que, notamment, l’approvisionnement régulier du magasin par des marchandises provenant des entrepôts en cause, des éléments comptables, le volume des ventes et des commandes par rapport au volume des marchandises stockées, ou encore les contrats de vente en cours.

40      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions posées que l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/29 doit être interprété en ce sens que le stockage par un commerçant de marchandises sur lesquelles est apposé un motif protégé par un droit d’auteur sur le territoire de l’État membre de stockage peut constituer une atteinte au droit exclusif de distribution, tel que défini par cette disposition, lorsque ce commerçant propose à la vente dans un magasin sans l’autorisation du titulaire de ce droit d’auteur des marchandises identiques à celles qu’il stocke, à la condition que les marchandises stockées soient effectivement destinées à la vente sur le territoire de l’État membre où ce motif est protégé. La distance entre le lieu de stockage et le lieu de vente ne saurait être, à elle seule, un élément décisif pour déterminer si les marchandises stockées sont destinées à la vente sur le territoire de cet État membre.

 Sur les dépens

41      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit :

L’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/29/CE du Parlement et du Conseil, du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, doit être interprété en ce sens que le stockage par un commerçant de marchandises sur lesquelles est apposé un motif protégé par un droit d’auteur sur le territoire de l’État membre de stockage peut constituer une atteinte au droit exclusif de distribution, tel que défini par cette disposition, lorsque ce commerçant propose à la vente dans un magasin sans l’autorisation du titulaire de ce droit d’auteur des marchandises identiques à celles qu’il stocke, à la condition que les marchandises stockées soient effectivement destinées à la vente sur le territoire de l’État membre où ce motif est protégé. La distance entre le lieu de stockage et le lieu de vente ne saurait être, à elle seule, un élément décisif pour déterminer si les marchandises stockées sont destinées à la vente sur le territoire de cet État membre.

Signatures


*      Langue de procédure : le suédois.