Language of document : ECLI:EU:T:2020:469

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

5 octobre 2020 (*)

 « Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative apiheal – Marque nationale verbale antérieure APIRETAL – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Absence de similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑53/19,

SBS Bilimsel Bio Çözümler Sanayi Ve Ticaret AŞ, établie à Istanbul (Turquie), représentée par Me M. E. López Camba, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Palmero Cabezas et M. H. O’Neill, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Laboratorios Ern, SA, établie à Barcelone (Espagne), représentée par Me S. Correa Rodríguez, avocate,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 19 novembre 2018 (affaire R 1725/2017-4), relative à une procédure d’opposition entre Laboratorios Ern et SBS Bilimsel Bio Çözümler Sanayi Ve Ticaret,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. D. Spielmann, président, U. Öberg (rapporteur) et Mme O. Spineanu-Matei, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 31 janvier 2019,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 25 avril 2019,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 30 avril 2019,

vu la mesure d’organisation de la procédure du 4 février 2020 et la réponse de la requérante déposée au greffe du Tribunal le 17 février 2020,

vu les observations de l’EUIPO et de l’intervenante sur la réponse de la requérante déposées au greffe du Tribunal le 17 mars 2020,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 27 juillet 2015, la requérante, SBS Bilimsel Bio Çözümler Sanayi Ve Ticaret AŞ, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p.1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 3, 5 et 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Produits de nettoyage et de blanchissage, détergents [détersifs] autres que ceux utilisés au cours d’opérations de fabrication et ceux à usage médical, produits de blanchiment pour la lessive, assouplisseurs, produits détachants, détergents pour lave-vaisselle ; produits de parfumerie ; cosmétiques ; produits odorants ; déodorants (corporels ou pour animaux) ; savons ; herbes pour le bain [autres qu’à usage médical] ; produits de soins dentaires, dentifrices, préparations pour polir les prothèses dentaires, produits médicinaux de blanchissage des dents, bains de bouche, non à usage médical ; abrasifs ; toile émeri ; papier de verre ; pierre ponce ; pâtes abrasives ; matières à astiquer le cuir, le vinyle, les métaux et le bois, cirages et crèmes pour le cuir, le vinyle, les métaux et le bois, cire lustrante » ;

–        classe 5 : « Produits pharmaceutiques et vétérinaires à usage médical ; produits chimiques à usage médical et vétérinaire, réactifs chimiques à usage pharmaceutique et vétérinaire ; compléments alimentaires à usage pharmaceutique et vétérinaire ; compléments alimentaires ; compléments nutritionnels ; préparations médicales destinées à la perte de poids ; aliments pour bébés ; herbes et boissons aux herbes adaptées à des fins médicales ; compléments à base d’herbes ; crèmes à base d’herbes à usage médical ; crèmes aux plantes à usage médical ; tisanes ; compléments liquides à base d’herbes ; matériaux de plombage dentaire, matières pour empreintes dentaires, adhésifs à usage dentaire et matériaux pour réparer les dents ; produits hygiéniques à usage médical ; serviettes hygiéniques ; tampons hygiéniques ; emplâtres, matériel pour pansements ; matières pour pansements ; langes, y compris ceux en papier et matières textiles ; produits pour la destruction d’animaux nuisibles ; fongicides, herbicides ; désodorisants ; désodorisants d’atmosphère ; désinfectants ; antiseptiques ; détergents [détersifs] à usage médical » ;

–        classe 30 : « Café, thé, cacao et succédanés du café ; riz ; tapioca et sagou ; farines et préparations faites de céréales ; pain, pâtisseries et confiseries ; glaces alimentaires ; sucre, miel, sirop de mélasse ; levure, poudre pour faire lever ; sel ; moutarde ; vinaigre, sauces (condiments) ; épices ; glace à rafraîchir ; miel, propolis pour la consommation humaine, miel à base de plantes, propolis, propolis pour la consommation humaine ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 2015/167, du 4 septembre 2015.

5        Le 4 décembre 2015, l’intervenante, Laboratorios Ern, SA, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque espagnole verbale antérieure APIRETAL, dont l’enregistrement a été demandé le 18 octobre 1979 et qui a été enregistrée le 20 octobre 1980 sous le numéro 921 669, désignant notamment des produits relevant de la classe 5 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques et vétérinaires ; substances diététiques à usage médical ; matériel pour pansements ; désinfectants ; insecticides et parasiticides ».

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001], tiré de l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, et à l’article 8, paragraphe 5, dudit règlement (devenu article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001), tiré de ce que l’usage de la marque demandée aurait tiré indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure et leur aurait porté préjudice.

8        Le 2 septembre 2016, la requérante a demandé à l’intervenante d’apporter la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure conformément à l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement no 207/2009 (devenu article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001).

9        Par décision du 29 juin 2017, la division d’opposition a partiellement accueilli l’opposition et refusé l’enregistrement de la marque demandée pour certains produits relevant des classes 3 et 5. Elle a considéré que, pour les « antipyrétiques » compris dans la classe 5, dont le but était de réduire la température corporelle dans des états fébriles, la marque antérieure avait fait l’objet d’un usage sérieux, au sens de l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, et jouissait d’une renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, dudit règlement.

10      Le 3 août 2017, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’opposition, dans la mesure où l’opposition n’avait pas été accueillie pour une partie des produits relevant de la classe 30, à savoir les « propolis pour la consommation humaine, propolis, propolis pour la consommation humaine ». Le 3 janvier 2018, la requérante a, dans ses observations en réponse, formulé des conclusions visant à l’annulation de la décision de la division d’opposition sur un point non soulevé dans le recours, conformément à l’article 60, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 (devenu article 68, paragraphe 2, du règlement 2017/1001), au motif de l’existence de différences entre les signes, de ce que la renommée de la marque antérieure n’avait pas été correctement établie et de l’absence de profit indu.

11      Par décision du 19 novembre 2018 (ci-après, la « décision attaquée »), s’agissant du motif d’opposition visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a accueilli le recours de l’intervenante et annulé la décision de la division d’opposition dans la mesure où celle-ci avait rejeté l’opposition pour les « propolis pour la consommation humaine, miel à base de plantes, propolis, propolis pour la consommation humaine » relevant de la classe 30, au motif qu’il existait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

12      En outre, la chambre de recours a annulé la décision de la division d’opposition, dans la mesure où cette dernière avait accueilli l’opposition pour les « produits de parfumerie ; produits odorants ; déodorants (corporels ou pour animaux) ; cosmétiques, savons ; herbes pour le bain [autres qu’à usage médical] ; produits de soins dentaires, dentifrices, préparations pour polir les prothèses dentaires, produits médicinaux de blanchissage des dents, bains de bouche, non à usage médical » relevant de la classe 3 ainsi que les « produits pour la destruction d’animaux nuisibles ; fongicides, herbicides » relevant de la classe 5. Elle a considéré que ces produits étaient différents des « antipyrétiques » visés par la marque antérieure.

13      Enfin, la chambre de recours a confirmé la décision de la division d’opposition dans la mesure où celle-ci avait accueilli l’opposition pour les produits de la classe 5 autres que les « produits pour la destruction d’animaux nuisibles ; fongicides, herbicides ».

14      En particulier, la chambre de recours a constaté, aux points 23 et 24 de la décision attaquée, que le public pertinent était espagnol, que les produits relevant de la classe 30 s’adressaient au grand public, dont le niveau d’attention était moyen ou légèrement plus élevé, et que les produits relevant de la classe 5 s’adressaient tant à un public professionnel qu’au grand public, faisant preuve d’un niveau d’attention élevé. S’agissant des produits de la classe 5 autres que les « produits pour la destruction d’animaux nuisibles ; fongicides, herbicides »), à savoir les « produits pharmaceutiques et vétérinaires à usage médical ; produits chimiques à usage médical et vétérinaire, réactifs chimiques à usage pharmaceutique et vétérinaire ; compléments alimentaires à usage pharmaceutique et vétérinaire ; compléments alimentaires ; compléments nutritionnels ; préparations médicales destinées à la perte de poids ; aliments pour bébés ; herbes et boissons aux herbes adaptées à des fins médicales ; compléments à base d’herbes ; crèmes à base d’herbes à usage médical ; crèmes aux plantes à usage médical ; tisanes ; compléments liquides à base d’herbes ; matériaux de plombage dentaire, matières pour empreintes dentaires, adhésifs à usage dentaire et matériaux pour réparer les dents ; produits hygiéniques à usage médical ; serviettes hygiéniques ; tampons hygiéniques ; emplâtres, matériel pour pansements ; matières pour pansements ; langes, y compris ceux en papier et matières textiles ; désinfectants ; antiseptiques ; détergents [détersifs] à usage médical » et de la classe 30, à savoir « propolis pour la consommation humaine, miel à base de plantes, propolis, propolis pour la consommation humaine », pour lesquels elle a estimé qu’il existait un risque de confusion, elle a confirmé le caractère identique ou similaire des produits en cause. Ensuite, elle a estimé que les signes en conflit présentaient un degré moyen de similitude sur le plan visuel et un degré élevé de similitude sur le plan phonétique et que la comparaison des signes en conflit sur le plan conceptuel était neutre. Partant et dans la mesure où le caractère distinctif de la marque antérieure devait être considéré comme initialement normal et ayant augmenté du fait de son usage sur le marché, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent pour ces produits.

 Le corrigendum du 1er mars 2019

15      Le 1er mars 2019, la chambre de recours a adopté un corrigendum par lequel elle a rectifié le dispositif de la décision attaquée en supprimant, au point 1, le « miel à base de plantes » relevant de la classe 30 et, au point 2, les « fongicides » relevant de la classe 5 et a ajouté, au point 3, les « fongicides » et les « désinfectants » relevant de la classe 5.

16      Il y a lieu de constater que, à la suite du corrigendum du 1er mars 2019, la décision attaquée doit être lue en ce sens que la chambre de recours a considéré qu’il existait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent pour les produits correspondant à la description suivante :

–        classe 5 : « Produits pharmaceutiques et vétérinaires à usage médical ; produits chimiques à usage médical et vétérinaire, réactifs chimiques à usage pharmaceutique et vétérinaire ; compléments alimentaires à usage pharmaceutique et vétérinaire ; compléments alimentaires ; compléments nutritionnels ; préparations médicales destinées à la perte de poids ; aliments pour bébés ; herbes et boissons aux herbes adaptées à des fins médicales ; compléments à base d’herbes ; crèmes à base d’herbes à usage médical ; crèmes aux plantes à usage médical ; tisanes ; compléments liquides à base d’herbes ; matériaux de plombage dentaire, matières pour empreintes dentaires, adhésifs à usage dentaire et matériaux pour réparer les dents ; produits hygiéniques à usage médical ; serviettes hygiéniques ; tampons hygiéniques ; emplâtres, matériel pour pansements ; matières pour pansements ; langes, y compris ceux en papier et matières textiles ; fongicides ; désinfectants ; antiseptiques ; détergents [détersifs] à usage médical » ;

–        classe 30 : « Propolis pour la consommation humaine, propolis, propolis pour la consommation humaine ».

 Conclusions des parties

17      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en ce qu’elle a refusé l’enregistrement pour des produits relevant des classes 5 et 30 ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

18      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

19      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        confirmer la décision attaquée et le rejet de la demande de marque de l’Union européenne en ce qui concerne l’enregistrement pour certains produits relevant des classes 5 et 30 ;

–        condamner la requérante aux dépens.

20      Dans sa réponse à la question du Tribunal du 17 février 2020, la requérante a précisé qu’elle demandait l’annulation de la décision attaquée en ce qu’elle avait refusé l’enregistrement pour les produits relevant des classes 5 et 30 et cités au point 16 ci-dessus. Elle a en outre demandé au Tribunal d’autoriser l’enregistrement pour lesdits produits.

21      Dans ses observations du 17 mars 2020, l’intervenante a précisé qu’elle demandait la confirmation de la décision attaquée en ce qui concernait le refus d’enregistrement pour les produits relevant des classes 5 et 30 et cités au point 16 ci-dessus.

 En droit

 Sur la recevabilité

 Sur la recevabilité du nouveau chef de conclusions de la requérante, visant à ce que soit autorisé l’enregistrement de la marque demandée pour des produits relevant des classes 5 et 30

22      Par lettre du 17 février 2020, la requérante a modifié ses chefs de conclusions et a demandé au Tribunal, en substance, d’une part, d’admettre que sa requête soit étendue aux produits pour lesquels l’enregistrement de la marque avait été refusé en vertu du corrigendum du 1er mars 2019, à savoir les « fongicides et les désinfectants » relevant de la classe 5, et, d’autre part, d’annuler la décision attaquée en ce qui concerne les produits relevant des classes 5 et 30 cités au point 16 ci-dessus et d’autoriser l’enregistrement de la marque contestée pour lesdits produits.

23      L’EUIPO ne conteste pas l’élargissement de la demande d’annulation de la décision attaquée de la requérante aux « fongicides » et « désinfectants » relevant de la classe 5, mais soulève l’irrecevabilité de la demande d’enregistrement formulée par la requérante.

24      Le Tribunal rappelle que, si l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne découle de la constatation que l’ensemble des conditions prévues par l’article 45 du règlement no 207/2009 (article 51 du règlement 2017/1001) sont remplies, les instances de l’EUIPO compétentes en matière d’enregistrement de marques de l’Union n’adoptent pas, à cet égard, de décision formelle qui pourrait faire l’objet d’un recours. Dès lors, la chambre de recours, qui peut, en vertu de l’article 64, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 (devenu article 71, paragraphe 1, du règlement 2017/1001), soit exercer les compétences de l’instance qui a pris la décision attaquée, soit renvoyer l’affaire à ladite instance pour qu’elle y donne suite, n’est pas compétente pour connaître d’une demande visant à ce qu’elle enregistre une marque de l’Union.

25      Partant, il n’appartient pas davantage au Tribunal de connaître d’une demande de réformation visant à ce qu’il modifie la décision d’une chambre de recours en ce sens [voir arrêt du 18 octobre 2016, Raimund Schmitt Verpachtungsgesellschaft/EUIPO (Brauwelt), T‑56/15, EU:T:2016:618, point 13 et jurisprudence citée]. Dès lors, il y a lieu de rejeter ladite demande d’enregistrement de la requérante, celle-ci étant irrecevable.

 Sur la recevabilité du premier chef de conclusions de l’intervenante

26      S’agissant du premier chef de conclusions de l’intervenante, visant à la confirmation de la décision attaquée et du rejet de la demande de marque de l’Union européenne en ce qui concerne le refus d’enregistrement pour des produits relevant des classes 5 et 30, cités au point 16 ci-dessus, il convient de comprendre que, par celui-ci, l’intervenante demande le rejet du recours. Partant, ledit chef de conclusions doit être regardé comme recevable.

 Sur le fond

27      À l’appui de son recours, la requérante invoque en substance un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

28      La requérante fait valoir, en substance, que c’est à tort que la chambre de recours a accueilli l’opposition pour les produits relevant de la classe 30 et les produits relevant de la classe 5 mentionnés au point 16 ci‑dessus, en application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009. À cet égard, elle soutient que les signes sont différents pour le consommateur espagnol et que les produits en cause sont également différents, en particulier les « propolis pour la consommation humaine, propolis, propolis pour la consommation humaine », visés par la marque demandée, et les « antipyrétiques », désignés par la marque antérieure.

29      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

30      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 2, sous a), ii) du règlement 2017/1001], il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.

31      Constitue un risque de confusion, le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, points 33 et 34  et jurisprudence citée, et du 22 septembre 2016, Sun Cali/EUIPO – Abercrombie & Fitch Europe (SUN CALI), T‑512/15, EU:T:2016:527, point 44 et jurisprudence citée].

32      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir, par analogie, arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42].

33      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’il existait un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 eu égard aux produits mentionnés au point 16 ci-dessus.

 Sur le public pertinent

34      Dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie des produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêts du 3 septembre 2009, Aceites del Sur-Coosur/Koipe, C‑498/07 P, EU:C:2009:503, point 74 et jurisprudence citée, et du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

35      En l’espèce, la chambre de recours a constaté, aux points 23 et 24 de la décision attaquée, que, la marque antérieure étant une marque espagnole, le public pertinent était le public vivant en Espagne, que les produits relevant de la classe 30 s’adressaient au grand public, manifestant un niveau d’attention moyen ou légèrement élevé, et que les produits relevant de la classe 5 s’adressaient tant à un public professionnel qu’au grand public, faisant preuve d’un niveau d’attention élevé.

36      Bien que la requérante ne remette pas en cause la définition du public pertinent visé par les produits relevant de la classe 5, elle conteste l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle le niveau d’attention du public pertinent pour les produits relevant de la classe 30 serait légèrement élevé. Elle soutient que les produits en cause relevant de la classe 30 sont destinés au grand public, qui fait preuve d’un degré d’attention moyen.

37      À cet égard, les produits visés par la marque demandée relevant de la classe 30 ont en commun avec les « antipyrétiques » de la classe 5 couverts par la marque antérieure qu’ils sont susceptibles d’être commercialisés sur recommandation ou par l’intermédiaire d’un professionnel de la santé, médecin prescripteur ou pharmacien, même s’ils peuvent également être commercialisés dans les grandes surfaces ou magasins spécialisés dans la vente de compléments alimentaires ou sur l’internet. Ces produits sont en outre susceptibles d’avoir une incidence sur la santé de l’utilisateur, si bien que les consommateurs seront généralement bien informés et particulièrement attentifs et avisés et sont susceptibles de faire preuve d’un niveau d’attention plus élevé que la moyenne, qu’il s’agisse du grand public ou des professionnels, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence du Tribunal [voir, en ce sens, arrêts du 9 avril 2014, Farmaceutisk Laboratorium Ferring/OHMI – Tillotts Pharma (OCTASA), T‑501/12, non publié, EU:T:2014:194, point 32, et du 13 décembre 2017, Laboratorios Ern/EUIPO – Ascendo Medienagentur (SLIMDYNAMICS), T‑700/16, non publié, EU:T:2017:896, point 24].

38      Dès lors, en l’espèce, il convient de considérer que le public pertinent est le public vivant en Espagne, que les produits relevant de la classe 30 s’adressent au grand public, dont le niveau d’attention est élevé, et que les produits relevant de la classe 5 s’adressent tant à un public professionnel qu’au grand public, faisant preuve d’un niveau d’attention élevé.

 Sur la comparaison des produits

39      La chambre de recours a considéré, aux points 31 à 39 de la décision attaquée, que les produits visés par la marque demandée et compris dans les classes 5 et 30 étaient similaires, quoique parfois à un degré inférieur à la moyenne, ou identiques aux « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, à l’exception des « produits pour la destruction d’animaux ; herbicides ».

40      Selon la requérante, les produits visés par la marque demandée et relevant de la classe 30 et au moins une partie des produits relevant de la classe 5 ne sont pas similaires aux « antipyrétiques » relevant de la classe 5 et visés par la marque antérieure. Elle considère en effet que ces produits diffèrent, notamment, par leur nature, leur utilisation et leur finalité.

41      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

42      Pour apprécier la similitude des produits en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêts du 21 janvier 2016, Hesse/OHMI, C‑50/15 P, EU:C:2016:34, point 21 et jurisprudence citée, et du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

43      Il y a lieu de comparer, d’une part, les produits « antipyrétiques » couverts par la marque antérieure et relevant de la classe 5 avec, d’autre part, les produits visés par la marque demandée, tels que cités au point 16 ci-dessus.

44      En premier lieu, s’agissant des produits visés par la marque demandée et relevant de la classe 30, à savoir les « propolis pour la consommation humaine, propolis, propolis pour la consommation humaine », la chambre de recours a considéré, au point 39 de la décision attaquée, que « [l]e fait que les produits contestés soient ou non compris dans la classe 30 ou dans la classe 5 ne change pas le fait que le public soit susceptible d’établir un lien en ce qui concerne la finalité curative de certains d’entre eux, motif pour lequel ils sont similaires à un degré légèrement inférieur à la moyenne ». Elle a rappelé que la propolis, utilisée comme antibactérien, antivirus, antifongique et anti-inflammatoire, ne se consommait pas pour sa saveur, très amère, mais pour ses propriétés curatives et était vendue dans certains rayons de parapharmacie. Dès lors, le public pertinent pourrait percevoir un certain degré de similitude entre la « propolis pour la consommation humaine, propolis, propolis pour la consommation humaine » et les « antipyrétiques ».

45      La requérante estime, tout d’abord, qu’il n’existe pas de lien entre les « propolis pour la consommation humaine, propolis, propolis pour la consommation humaine » relevant de la classe 30 et les « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, dans la mesure où ces produits n’ont ni la même nature, ni la même utilisation, ni la même finalité. Elle considère que la propolis relevant de la classe 30 répond à une finalité alimentaire, contrairement aux produits « antipyrétiques » de la marque antérieure. En effet, la propolis, dont la composition serait biologique ou écologique, ne serait pas soumise aux mêmes contrôles, ne peut pas être considérée comme un médicament. Son utilisation ne serait, en outre, pas prescrite par un professionnel de la santé, comme ce serait le cas des médicaments « antipyrétiques » couverts par la marque antérieure, à l’instar du paracétamol.

46      Ensuite, la requérante estime que les produits en cause ne sont pas commercialisés par les mêmes canaux de distribution. Elle fait valoir que les produits visés par la marque demandée sont essentiellement commercialisés sur l’internet, alors que les produits « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, soumis à des normes plus restrictives, ne sont disponibles qu’en pharmacie. Enfin, elle estime que les produits de la marque antérieure sont destinés à un public en âge pédiatrique, alors que les produits de la marque demandée s’adressent à un public plus âgé.

47      La requérante estime également que, alors que les produits « antipyrétiques » de la marque antérieure compris dans la classe 5 relèvent du domaine strictement médical et ont pour but de remédier à un problème médical, les produits visés par la marque demandée seraient couverts par la classe 30 et relèveraient du domaine des produits alimentaires. La chambre de recours aurait commis une erreur en identifiant la propolis relevant de la classe 30 comme étant susceptible de relever de la classe 5

48      À cet égard, le Tribunal rappelle que la classification des produits est effectuée à des fins exclusivement administratives et qu’il ne peut donc être déduit de cette classification aucune conclusion directe concernant la similitude entre les produits en cause [voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2004, El Corte Inglés/OHMI – Pucci (EMILIO PUCCI), T‑8/03, EU:T:2004:358, point 40].

49      Par conséquent, la chambre de recours a considéré, à juste titre, que le fait que les produits en cause étaient compris dans la classe 30 ou la classe 5 n’influait pas sur leur similitude.

50      Concernant la nature, l’utilisation et la finalité des produits en cause, il convient de distinguer, en l’espèce, d’une part, les médicaments qui poursuivent une finalité médicale, auxquels les « antipyrétiques » visés par la marque antérieure peuvent être rattachés et, d’autre part, la propolis relevant de la classe 30 et visée par la marque demandée.

51      En l’espèce, s’agissant de la nature des « propolis pour consommation humaine, propolis, propolis pour consommation humaine » relevant de la classe 30 et visés par la marque demandée, il convient de constater qu’il s’agit de produits résineux élaborés par certains végétaux et par les abeilles à partir, notamment, de cette même résine végétale et des bourgeons des peupliers et des conifères. Leur origine naturelle diffère donc de la composition chimique des produits « antipyrétiques » visés par la marque antérieure.

52      S’agissant de l’utilisation et de la finalité des « propolis pour consommation humaine, propolis, propolis pour consommation humaine » relevant de la classe 30 et visés par la marque demandée, il convient de relever que, ainsi que le constate la chambre de recours, la propolis ne se consomme généralement pas pour sa saveur, particulièrement amère, et est avant tout utilisée en raison de ses propriétés curatives et cicatrisantes. Les produits contenant de la propolis peuvent en effet être utilisés comme anti-infectieux, en raison de leurs propriétés antibactériennes, antivirus et antifongiques, comme anti-inflammatoires, et comme produits cicatrisants et assainissant les plaies dans le cadre d’un usage dermatologique. Cependant, même si la propolis peut être utilisée en vue de prévenir ou de traiter certains maux ou maladies, elle ne saurait être qualifiée de « médicament » au même titre que les « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, du fait qu’elle ne répond pas à une finalité strictement médicale. En effet, il n’est pas suffisant qu’un produit ait des propriétés bénéfiques pour la santé en général pour être qualifié de « médicament », mais il doit à proprement parler avoir pour fonction de prévenir ou de guérir (arrêt du 15 novembre 2007, Commission/Allemagne, C‑319/05, EU:C:2007:678, point 64).

53      Le Tribunal rappelle ensuite que, pour apprécier la similitude de produits, les canaux de distributions des produits concernés peuvent être pris en compte [arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37]. Plus particulièrement, seules les conditions « objectives » de commercialisation des produits désignés par les marques en conflit, c’est‑à‑dire celles auxquelles il est normal de s’attendre pour la catégorie de produits désignés par lesdites marques, doivent être prises en considération [arrêt du 12 février 2015, Compagnie des montres Longines, Francillon/OHMI – Cheng (B), T‑505/12, EU:T:2015:95, point 76].

54      En l’espèce, il convient de relever, ainsi que le fait valoir la requérante, que les conditions de commercialisation des produits désignés par les marques en conflit sont susceptibles d’être différentes. Les produits visés par la marque demandée et relevant de la classe 30 peuvent être commercialisés en vente libre en herboristerie, dans les magasins spécialisés en nutrition ou simplement dans les supermarchés, voire sur l’internet. Néanmoins, il n’est pas exclu qu’ils soient également susceptibles d’être commercialisés dans des rayons spécifiques de pharmacies ou de parapharmacies, en raison de leur lien avec la santé des consommateurs. Quant aux produits « antipyrétiques » relevant de la classe 5 et visés par la marque antérieure, ils sont généralement commercialisés dans des lieux spécifiques, tels que des pharmacies ou des parapharmacies, ou dans des centres de santé, tels que des hôpitaux. De plus, la commercialisation des produits « antipyrétiques » relevant de la classe 5 et visés par la marque antérieure est soumise à des normes restrictives et à davantage de contrôle, faisant intervenir par exemple l’action d’un professionnel de la santé, ce qui n’est pas le cas des produits relevant de la classe 30 visés par la marque demandée.

55      Il s’ensuit que c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à un degré de similitude légèrement inférieur à la moyenne entre les « propolis pour consommation humaine, propolis, propolis pour consommation humaine » et les produits relevant de la classe 5 assimilés aux « antipyrétiques » et visés par la marque antérieure, notamment au regard de la finalité préventive ou curative et compte tenu du fait qu’ils sont susceptibles d’être commercialisés par les mêmes canaux de distribution.

56      En deuxième lieu, s’agissant des « compléments alimentaires à usage pharmaceutique et vétérinaire ; compléments alimentaires ; compléments nutritionnels ; préparations médicales destinées à la perte de poids ; aliments pour bébés ; herbes et boissons aux herbes adaptés à des fins médicales ; compléments à base d’herbes ; crèmes à base d’herbes à usage médical ; crèmes aux plantes à usage médical ; tisanes ; compléments liquides à base d’herbes » visés par la marque demandée et relevant de la classe 5, la chambre de recours a considéré qu’ils étaient similaires à un degré inférieur à la moyenne aux « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, dans la mesure où ils étaient distribués à travers les mêmes canaux de commercialisation et partageaient une même finalité préventive, voire curative.

57      La requérante conteste ce constat et souligne les différences entre les produits, relevant de la classe 5, visés par la marque demandée et cités au point 56  ci-dessus, d’une part, et les « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, d’autre part, en raison, notamment, de leur nature, de leur finalité et de leurs canaux de distribution.

58      La requérante estime notamment que, bien que les compléments alimentaires et les aliments diététiques à usage médical puissent être destinés à améliorer la santé, ils peuvent également être consommés comme compléments d’une alimentation normale, ce qui n’est pas le cas des produits pharmaceutiques, à l’instar des « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, qui sont seulement utilisés en cas de maladie. Par ailleurs, elle estime que les consommateurs sont conscients, en général, de la différence entre les « produits pharmaceutiques », auxquels appartiennent les produits « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, et les « aliments diététiques », incluant notamment des produits relevant de la classe 5, visés par la marque demandée.

59      De plus, la requérante considère que certains produits cités au point 56 ci-dessus, tels que les « compléments alimentaires », bien qu’ils peuvent être vendus en pharmacie, sont généralement fabriqués par des sociétés différentes. Ils peuvent être commercialisés chez des herboristes ou dans des magasins vendant des produits comestibles, ce qui n’est pas le cas des produits « antipyrétiques » visés par la marque antérieure.

60      Il y a lieu de relever, tout d’abord, que, concernant la nature, l’utilisation et la finalité des produits relevant de la classe 5 cités au point 56 ci-dessus, certains produits de la classe 5 visés par la marque demandée peuvent être d’origine naturelle, à l’instar des « tisanes », ce qui n’est pas le cas des produits « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, dont la composition est chimique, ainsi qu’il été rappelé au point 51 ci-dessus.

61      En outre, selon la jurisprudence, les compléments alimentaires peuvent être consommés pour prévenir ou remédier à des affections d’ordre médical au sens large du terme ou pour équilibrer des déficiences nutritionnelles [voir, en ce sens, arrêts du 23 janvier 2014, Sunrider/OHMI – Nannerl (SUN FRESH), T‑221/12, non publié, EU:T:2014:25, point 38, et du 26 novembre 2015, Bionecs/OHMI – Fidia farmaceutici (BIONECS), T‑262/14, non publié, EU:T:2015:888, point 19].

62      En l’espèce, il y a lieu de constater que les produits cités au point 56 ci-dessus, à l’instar des « compléments alimentaires », sont susceptibles d’être destinés en général à améliorer l’état de santé, en raison de leur valeur nutritionnelle, et peuvent, dès lors, répondre à une finalité curative. Toutefois, ils ne sauraient être assimilés à des médicaments et aux « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, dont la finalité vise à réduire la fièvre. Ces derniers sont en effet, par nature, destinés à être utilisés à des fins exclusivement médicales, ce qui n’est pas le cas des compléments alimentaires, qui peuvent être utilisés de manière indépendante à tout traitement médical.

63      Par ailleurs, s’agissant des modes de commercialisation, il y a lieu de constater, comme il a été souligné au point 54 ci-dessus, que les « antipyrétiques » couverts par la marque antérieure, sont susceptibles d’être commercialisés notamment dans des pharmacies ou parapharmacies, ce qui est également le cas de certains produits visés au point 56 ci-dessus, tel que les « compléments alimentaires à usage pharmaceutique et vétérinaire ».

64      Il s’ensuit que, compte tenu de leur nature, de leur finalité et de leur utilisation, ainsi que de leur mode de commercialisation, c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé que les « compléments alimentaires à usage pharmaceutique et vétérinaire ; compléments alimentaires ; compléments nutritionnel ; préparations médicales destinées à la perte de poids ; aliments pour bébés ; herbes et boissons aux herbes adaptées à des fins médicales ; compléments à base d’herbes ; crèmes à base d’herbes à usage médical ; crèmes aux plantes à usage médical ; tisanes ; compléments liquides à base d’herbes » relevant de la classe 5 et visés par la marque demandée étaient similaires à un degré inférieur à la moyenne aux « antipyrétiques » visés par la marque antérieure.

65      En troisième lieu, s’agissant des « matériaux de plombage dentaire, matières pour empreintes dentaires, adhésif à usage dentaire et matériaux pour réparer les dents » relevant de la classe 5 et visés par la marque demandée, la chambre de recours a estimé que ces produits étaient similaires à un degré légèrement inférieur à la moyenne aux « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, notamment en raison du fait qu’ils appartiennent au domaine de la santé et qu’ils s’adressaient au même public (professionnels de la santé et consommateurs finaux).

66      La requérante avance que les « matériaux de plombage dentaire, matières pour empreintes dentaires, adhésif à usage dentaire et matériaux pour réparer les dents » relevant de la classe 5 et visés par la marque demandée diffèrent des « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, bien qu’ils fassent également partie des produits liés aux soins de santé. Elle considère que ce lien est trop vague pour pouvoir considérer les produits comme similaires. En outre, elle estime que les produits ne sont pas destinés au même public, les produits désignés par la marque demandée ne s’adressant pas au consommateur final, mais plutôt à un public spécialisé tel qu’un odontologue.

67      À cet égard, il convient de constater que les produits en cause sont parfois susceptibles d’être vendus par des canaux de distribution identiques, notamment en pharmacie ou en parapharmacie, ou auprès d’autres professionnels de santé.

68      Toutefois, les « matériaux de plombage dentaire, matières pour empreintes dentaires, adhésif à usage dentaire et matériaux pour réparer les dents » visés par la marque demandée constituent des produits spécifiques qui sont, par nature, souvent destinés à un usage localisé et ponctuel, lié à l’entretien ou au traitement de la dentition d’un individu. Au contraire, les produits « antipyrétiques » visés par la marque antérieure sont, par nature, destinés à prévenir ou à guérir, de manière plus généralisée, des infections fiévreuses au sens large.

69      De plus, les « matériaux de plombage dentaire, matières pour empreintes dentaires, adhésif à usage dentaire et matériaux pour réparer les dents » visés par la marque demandée sont destinés à l’usage des professionnels de santé, tels que des odontologues ou des dentistes, ou dans le cadre de structures médicales spécialisées, afin de pratiquer des soins à des patients, contrairement aux produits « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, qui sont d’abord destinés au consommateur moyen, pour son usage personnel, lorsqu’il souffre de troubles liés à sa santé.

70      Il s’ensuit que, contrairement à l’appréciation de la chambre de recours, les « matériaux de plombage dentaire, matières pour empreintes dentaires, adhésif à usage dentaire et matériaux pour réparer les dents » relevant de la classe 5 et visés par la marque demandée ne sont pas similaires, même à un degré légèrement inférieur à la moyenne, notamment en raison de leur destination, aux « antipyrétiques » visés par la marque antérieure.

71      En quatrième lieu, la requérante n’a pas contesté le constat de la chambre de recours suivant lequel les « produits pharmaceutiques et vétérinaires à usage médical » ainsi que les « produits chimiques à usage médical et vétérinaire » étaient identiques aux antipyrétiques et que les « réactifs chimiques à usage pharmaceutique et vétérinaire » étaient similaires aux antipyrétiques. Il n’y a pas lieu de remettre en cause ledit constat.

72      La requérante n’a pas davantage contesté que les « produits hygiéniques à usage médical ; serviettes hygiéniques ; tampons hygiéniques ; emplâtres, matériel pour pansements ; matières pour pansements ; langes, y compris ceux en papier et matières textiles ; fongicides ; désinfectants ; antiseptiques ; détergents [détersifs] à usage médical » étaient similaires à un degré inférieur à la moyenne aux antipyrétiques. Il n’y a pas lieu de remettre en cause ledit constat.

73      Il découle de l’ensemble de ces considérations que, premièrement, les « produits pharmaceutiques et vétérinaires à usage médical » ainsi que les « produits chimiques à usage médical et vétérinaire » cités au point 71 ci-dessus sont identiques aux produits « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, deuxièmement, les « réactifs chimiques à usage pharmaceutique et vétérinaire » également cités au point 71 ci-dessus sont similaires aux produits « antipyrétiques » couverts par la marque antérieure, troisièmement, les produits cités aux points 56 et 72 ci-dessus sont similaires à un degré inférieur à la moyenne aux « antipyrétiques » visés par la marque antérieure, quatrièmement, les produits visés par la marque demandée cités au point 44 ci-dessus sont similaires à un degré légèrement inférieur à la moyenne aux produits « antipyrétiques » visés par la marque antérieure et, enfin, les produits cités au point 65 ci-dessus ne sont pas similaires aux produits « antipyrétiques » couverts par la marque antérieure.

 Sur la comparaison des signes

74      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

75      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir, en ce sens, arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée).

76      Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (voir, en ce sens, arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43 ). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

77      La chambre de recours a considéré que les signes en conflit présentaient un degré moyen de similitude sur le plan visuel et qu’ils étaient similaires à un degré élevé sur le plan phonétique. D’un point de vue conceptuel, elle a estimé que la comparaison des signes en conflit était neutre, car aucun de ces signes ne véhiculait un sens clair et sans équivoque.

78      La requérante conteste les constatations de la chambre de recours et estime que les différences visuelles, phonétiques et conceptuelles que présentent les signes en conflit sont suffisantes pour neutraliser leurs similitudes.

 Sur la comparaison visuelle

79      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a conclu à un degré moyen de similitude visuelle entre les signes en conflit. Elle a constaté que lesdits signes étaient similaires, dans la mesure où leurs éléments verbaux partageaient la combinaison des lettres « a », « p », « i », « e » et « a ». En outre, les signes en conflit coïncideraient par leur partie initiale, ce qui renforcerait l’impression visuelle de similitude.

80      La requérante soutient que la marque demandée présente d’importantes différences visuelles par rapport à la marque antérieure, que ce soit au niveau des couleurs, de la structure graphique et de la présence d’éléments figuratifs. En particulier, elle estime que les signes en conflit diffèrent, dans la mesure où les deux vocables de la marque demandée sont représentés chacun dans une couleur différente, à savoir, d’une part, « api » en caractères de couleur orange et, d’autre part, « heal » en caractères de couleur bleue, tous deux en lettres minuscules. La présence d’une abeille, représentée dans la partie supérieure de la marque demandée, contribuerait également à créer une différence visuelle. Elle estime que la marque antérieure consiste, en revanche, en un seul mot, sans aucun autre élément verbal ou graphique, de sorte que le consommateur moyen du public pertinent, au lieu de trouver des similitudes dans la suite de lettres communes, observera, dans la marque demandée, deux termes distincts qui ne seront pas perçus comme formant un tout.

81      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

82      L’EUIPO considère, notamment, que les signes en conflit coïncident tant dans leur structure que dans leur composition, en raison du fait qu’ils se composent d’un élément verbal unique et que six des sept lettres de la marque demandée sont reproduites à l’identique dans la marque antérieure. L’EUIPO estime également que la marque demandée restera perçue comme un signe composé d’un mot unique et que l’utilisation de la couleur ne modifie pas la perception de la structure du signe.

83      À titre liminaire, il convient de rappeler que rien ne s’oppose à ce que soit vérifiée l’existence d’une similitude visuelle entre une marque verbale et une marque figurative, étant donné que ces deux types de marques ont une configuration graphique capable de donner lieu à une impression visuelle [voir arrêt du 4 mai 2005, Chum/OHMI – Star TV (STAR TV), T‑359/02, EU:T:2005:156, point 43 et jurisprudence citée].

84      Il ressort de la jurisprudence que la présence d’éléments figuratifs ayant une configuration particulière et originale est susceptible d’aboutir à ce que l’impression globale fournie par chaque signe soit différente [arrêt du 24 novembre 2005, Simonds Farsons Cisk/OHMI – Spa Monopole (KINJI by SPA), T‑3/04, EU:T:2005:418, point 48 ; voir également, en ce sens, arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO AIRE), T‑156/01, EU:T:2003:198, point 74].

85      Il convient en outre de rappeler que, lorsque les signes sont composés d’éléments tant verbaux que figuratifs, en principe, les premiers ont un plus grand impact sur le consommateur que les seconds, et ce parce que le public n’analyse habituellement pas les signes et fera plus facilement référence aux signes en question en citant leur élément verbal qu’en décrivant leurs éléments figuratifs [voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2005, Wassen International/OHMI – Stroschein Gesundkost (SELENIUM-ACE), T‑312/03, EU:T:2005:289, point 37].

86      En outre, si le consommateur perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’en demeure pas moins que, en percevant un signe verbal, il décomposera celui-ci en des éléments verbaux, qui, pour lui, ont une signification concrète ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît [arrêt du 6 septembre 2013, Eurocool Logistik/OHMI – Lenger (EUROCOOL), T‑599/10, non publié, EU:T:2013:399, point 104 ; voir également, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT), T‑356/02, EU:T:2004:292, point 51 ].

87      À cet égard, il a déjà été jugé que la partie initiale d’une marque avait normalement un impact plus fort, sur le plan visuel, que la partie finale de celle-ci [arrêt du 20 septembre 2018, Kwizda Holding/EUIPO – Dermapharm (UROAKUT), T‑266/17, EU:T:2018:569, point 51 ; voir également, en ce sens, arrêt du 3 septembre 2010, Companhia Muller de Bebidas/OHMI – Missiato Industria e Comercio (61 A NOSSA ALEGRIA), T‑472/08, EU:T:2010:347, point 62], de sorte que le consommateur prête, en général, plus d’attention à la partie initiale d’une marque qu’à sa fin [voir arrêt du 19 mai 2011, PJ Hungary/OHMI – Pepekillo (PEPEQUILLO), T‑580/08, EU:T:2011:227, point 77 et jurisprudence citée].

88      En l’espèce, il convient de relever que la marque demandée est une marque complexe, dans la mesure où elle est composée d’un élément figuratif et d’un élément verbal, qui est composé de sept lettres, écrites en caractères minuscules et dans deux couleurs. Les trois premières de ces lettres sont représentées en orange et les quatre lettres suivantes le sont en bleu. L’élément figuratif est composé du dessin stylisé d’une abeille, en couleur bleue et orange, et se trouvant au-dessus de la lettre « i ». Tout d’abord, l’utilisation de deux couleurs différentes permet au public pertinent de distinguer nettement et distinctement deux composants verbaux dans la marque demandée, à savoir « api » et « heal ». Ensuite, la présence d’une abeille située au-dessus de la partie initiale de l’élément verbal du signe, apparaissant en couleur vive, est susceptible de retenir l’attention du public pertinent, qui peut alors l’associer directement à l’élément « api », généralement utilisé pour désigner l’apiculture,  terme lui-même dérivé du latin « apis » pour désigner une abeille. Il s’ensuit que la marque demandée sera susceptible d’être aisément distinguée en deux composants verbaux par le public pertinent, dont l’un est susceptible d’être associé au dessin de l’abeille.

89      En revanche, la marque verbale antérieure n’offre pas, dans sa configuration visuelle, la même possibilité de distinguer aisément deux composants verbaux et sera perçue comme un tout par le public pertinent. Elle consiste en effet en un seul élément qui est un simple signe verbal, dépourvu de tout élément graphique, composé de huit lettres.

90      Il en découle que les signes en conflit présentent des points de similitude sur le plan visuel, du fait d’un élément verbal de longueur proche, constitué de sept lettres pour la marque antérieure et de huit lettres pour la marque demandée, et des trois lettres communes « a », « p » et « i », placées dans le même ordre et au début de chacun des signes. En revanche, l’utilisation des couleurs et le dessin de l’abeille constituent des différences notables. Il s’ensuit que les signes en conflit présentent un faible degré de similitude sur le plan visuel, et non moyen comme l’a estimé la chambre de recours.

 Sur la comparaison phonétique

91      En ce qui concerne la comparaison phonétique des signes en conflit, la chambre de recours a conclu à un degré élevé de similitude, du fait, notamment, que leur partie initiale serait prononcée de manière identique, et que le public pertinent les prononcerait avec un même nombre de quatre syllabes, soit, respectivement, « a », « pi », « e » et « al » et « a », « pi », « re » et « tal ».

92      La requérante avance que les signes en conflit présentent des consonnes différentes (« p », « h » et « l », d’une part, et « p », « r », « t » et « l », d’autre part) ainsi qu’une structure et un rythme sonore différents. En effet, alors que la troisième syllabe de la marque demandée consisterait en un son vocalique, la troisième syllabe de la marque antérieure commencerait par un « r ». Par ailleurs, la quatrième syllabe de la marque demandée commencerait par la voyelle « a », alors que la quatrième syllabe de la marque antérieure commencerait par la consonne « t ». La requérante soutient que ces différences sont importantes en terme de prononciation, du point de vue du public pertinent, qui est hispanophone.

93      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

94      L’EUIPO estime que, compte tenu de la phonétique de la langue espagnole, les lettres qui se prononcent dans la marque demandée se prononcent également, et avec une sonorité identique, dans la marque antérieure et que, dès lors, les signes en conflit coïncident sur le plan phonétique. L’EUIPO considère également que la structure identique en quatre syllabes des deux signes en conflit produit un rythme et une intonation identiques lorsque l’on prononce les deux marques.

95      En l’espèce, la prononciation de la partie initiale des signes en conflit, à savoir « api », est identique.

96      Par ailleurs, concernant la prononciation de la seconde partie des deux signes en conflit, compte tenu du fait que le public pertinent est espagnol, il est susceptible de prononcer l’élément « heal » contenu dans la marque demandée en deux syllabes, à savoir « he » et « al ». Il en découle que, outre le fait que leur prononciation coïncide de manière totalement identique dans leur partie initiale, les deux signes en conflit sont également susceptibles de présenter le même nombre de syllabes et les mêmes sonorités concernant les voyelles.

97      Toutefois, il y a lieu de relever que les signes en conflit présentent des différences phonétiques significatives. Ainsi, compte tenu des spécificités liées à la prononciation espagnole, il n’est pas exclu que le « h » présent dans le terme « heal » contenu dans la marque demandée soit prononcé de façon gutturale par un son proche de celui du terme « jota ». En conséquence, le signe de la marque demandée est susceptible d’être prononcé de la manière suivante : « apiéal » ou éventuellement « apirréal ». En revanche, la prononciation dentale des consonnes « r » et « t » dans la marque antérieure est, quant à elle, de nature à induire une différenciation phonétique nette entre les deux signes en conflit.

98      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que les signes en conflit présentent un degré moyen de similitude sur le plan phonétique, et non élevé comme l’a retenu la chambre de recours.

 Sur la comparaison conceptuelle

99      La chambre de recours a considéré, au point 51 de la décision attaquée, que, sur le plan conceptuel, la comparaison entre les signes en conflit était neutre, ces derniers n’ayant pas de signification claire pour le public pertinent. D’une part, dans la marque demandée, la signification en anglais de l’élément « heal » ne serait pas directement perçue par le public pertinent, étant donné qu’il ne s’agirait pas d’un terme de base et qu’il ne serait pas établi que le public espagnol l’ait intégré dans son vocabulaire. D’autre part, la chambre de recours estime que, dans la marque antérieure, le préfixe « api » ne serait assimilé à aucun concept concret.

100    La requérante avance qu’il n’y a pas de similitude conceptuelle entre les signes en conflit. D’une part, elle soutient que la marque antérieure n’a aucune signification du point de vue du public pertinent, dans la mesure où le préfixe « api » peut renvoyer à l’« apyrexie », mot peu utilisé et réservé aux professionnels de la santé. D’autre part, elle fait valoir que le préfixe « api » de la marque demandée renverrait au terme latin « api », signifiant « abeille », ce qui serait souligné par le dessin d’une abeille au-dessus de cet élément verbal. Le suffixe « heal » de la marque demandée renverrait, quant à lui, au terme anglais « heal », qui signifie « guérir ». Selon la requérante, ce terme d’anglais basique serait compris par une partie du public pertinent.

101    Il convient, à titre liminaire, de rappeler que le public pertinent est composé tant de professionnels de la santé que du grand public, faisant preuve, dans les deux cas, d’un niveau d’attention élevé.

102    S’agissant du public spécialisé, celui-ci est susceptible de percevoir, en raison de ses connaissances médicales, l’élément « api », voire « apire », contenu dans la marque antérieure, comme renvoyant à la notion très spécifique d’« apyrexie », utilisée dans le domaine médical pour signifier l’absence de fièvre.

103    À cet égard, il convient de rappeler que les marques dites « évocatrices » sont usuelles dans le secteur des médicaments. Les références au domaine d’application et aux principes actifs des produits sont plus fréquentes dans le domaine de la pharmacologie [arrêts du 14 juillet 2011, Winzer Pharma/OHMI – Alcon (OFTAL CUSI), T‑160/09, non publié, EU:T:2011:379, point 80, et du 20 septembre 2018, UROAKUT, T‑266/17, EU:T:2018:569, point 43]. Le public spécialisé percevra donc l’élément verbal « api », voire « apire », contenu dans la marque antérieure comme une référence à la destination des produits « antipyrétiques » couverts par elle. L’élément initial « apire » est ainsi faiblement distinctif, dans la mesure où il fait allusion aux caractéristiques des produits en cause.

104    Concernant la marque demandée, le public spécialisé sera susceptible d’associer à la partie initiale de l’élément verbal de ladite marque, à savoir « api », le concept d’apiculture, voire de traitement par l’apiculture, et ce en raison de la présence d’une abeille ainsi que de la couleur différente utilisée pour cette partie initiale.

105    Les signes en conflit sont donc, pour le public spécialisé, conceptuellement différents.

106    S’agissant du grand public, il y a lieu de relever qu’il ne sera pas en mesure d’associer, contrairement au public spécialisé, la marque antérieure au concept d’« apyrexie », celui-ci étant une notion spécifique du domaine médical. En revanche, il pourra éventuellement voir « api », dans la marque antérieure, comme renvoyant au domaine de l’apiculture, dans la mesure ou « api » est susceptible de se rattacher au mot « apiculture », un mot relativement courant qu’il connaît.

107    En ce qui concerne la marque demandée, le grand public sera susceptible d’associer la partie initiale de l’élément verbal de la marque demandée au domaine de l’apiculture, en raison de la présence d’une abeille et de l’utilisation de couleurs différentes qui soulignent l’élément « api ». Cette partie initiale « api » est ainsi faiblement distinctive, dans la mesure où elle renvoie à certaines caractéristiques des produits visés par la marque demandée, susceptibles de contenir des composants issus du miel ou liés à l’apiculture.

108    S’agissant de la marque demandée, le Tribunal estime que le public pertinent ne sera pas nécessairement susceptible d’associer le terme « heal » au domaine de la guérison et des soins de santé. Il est vrai que certains mots anglais peuvent être compris par le consommateur moyen, même s’il n’est pas anglophone et ne possède que certaines notions rudimentaires d’anglais [voir, en ce sens, arrêt du 28 avril 2016, Gervais Danone/EUIPO – Mahou (B’lue), T‑803/14, non publié, EU:T:2016:251, point 27]. Toutefois, en l’espèce, il ne s’agit pas d’un terme rudimentaire, en ce qu’il se rattache au domaine spécifique de la santé, et en ce qu’il n’est pas couramment utilisé dans le langage ordinaire. Dès lors, le grand public n’associera pas nécessairement l’élément « heal » de la marque demandée au domaine de la guérison.

109    Partant, même à supposer que le grand public puisse être susceptible d’associer chacun des signes en conflit au domaine de l’apiculture, en raison de la partie commune « api », faiblement distinctive en raison de son caractère descriptif, les signes ne seront, pour le grand public, que tout au plus faiblement similaires sur le plan conceptuel, eu égard au fait que les secondes parties des signes en conflit, à savoir les éléments « retal » et « heal », divergent.

110    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que, contrairement à l’appréciation de la chambre de recours, les signes en conflit seront, pour le public spécialisé, différents sur le plan conceptuel et, pour le grand public, tout au plus faiblement similaires sur ce même plan.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

111    L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74 ; voir également, par analogie, arrêt du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17]. En outre, le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important [arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24, et du 7 juillet 2017, Axel Springer/EUIPO – Stiftung Warentest (TestBild), T‑359/16, non publié, EU:T:2017:477, point 76].

112    En l’espèce, après avoir notamment relevé que le caractère distinctif de la marque antérieure devait être considéré comme supérieur, dans la mesure où le terme correspondant était dépourvu de tout sens dans la langue officielle du territoire pertinent, la chambre de recours a conclu, au point 65 de la décision attaquée, à l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, dont le niveau d’attention devait être considéré comme moyen ou légèrement élevé pour les produits relevant de la classe 30 et élevé pour les produits relevant de la classe 5. Elle a fondé cette conclusion sur le caractère similaire ou identique de certains des produits en cause ainsi que sur l’impression de similitude globale des signes en conflit.

113    La requérante reconnaît que les signes en cause sont similaires sur les plans visuel et phonétique, mais fait valoir que les différences visuelles, phonétiques et conceptuelles sont suffisantes pour neutraliser ces similitudes. En outre, elle estime que les produits désignés par la marque demandée ne sont pas similaires aux « antipyrétiques » visés par la marque antérieure.

114    L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

115    Tout d’abord, ainsi qu’il ressort du point 70 ci-dessus, les « matériaux de plombage dentaire, matières pour empreintes dentaires, adhésif à usage dentaire et matériaux pour réparer les dents » visés par la marque demandée et relevant de la classe 5 sont différents des produits « antipyrétiques » visés par la marque antérieure.

116    Partant, une des conditions prévues par l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 faisant défaut, tout risque de confusion doit être exclu pour cette catégorie de produits.

117    Ensuite, eu égard aux autres produits en cause, il y a lieu de rappeler que les produits cités aux points 44, 56, 71 et 72 ci-dessus sont soit identiques, soit similaires, soit similaires à un degré inférieur, voire légèrement inférieur, à la moyenne aux « antipyrétiques » visés par la marque antérieure.

118    De plus, il convient de rappeler que les signes en conflit sont similaires à un faible degré sur le plan visuel, et à un degré moyen sur le plan phonétique. Sur le plan conceptuel, ils sont tout au plus faiblement similaires pour le grand public et différents pour le public spécialisé.

119    Il convient dès lors d’examiner la possibilité d’un risque de confusion eu égard au grand public, pour lequel existe la probabilité théorique la plus grande d’un tel risque, compte tenu du fait que les signes en conflit présentent pour ledit public une similitude sur les trois plans de perception.

120    Or, même en présence de produits identiques, eu égard au degré de similitude des signes en cause, laquelle est fondée sur une partie faiblement distinctive des signes en conflit, et en prenant en compte le niveau d’attention élevé du grand public, il y a lieu de conclure que ce dernier ne sera pas susceptible de croire que les produits en cause proviennent de la même entreprise, ou d’entreprises liées économiquement, même si, comme l’a retenu la chambre de recours, sans que cela soit contesté par les parties, la marque antérieure a un caractère distinctif intrinsèque moyen qui s’est accru.

121    Dès lors, la chambre de recours a conclu à tort à l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

122    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’accueillir l’unique moyen soulevé par la requérante, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, et d’annuler la décision attaquée en tant qu’elle concerne les produits cités au point 16 ci-dessus.

 Sur les dépens

123    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

124    L’EUIPO ayant succombé en l’essentiel de ses conclusions, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la requérante, conformément aux conclusions de celle-ci.

125    En application de l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure, l’intervenante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 19 novembre 2018 (affaire R 1725/2017-4) est annulée en ce qui concerne les « produits pharmaceutiques et vétérinaires à usage médical ; produits chimiques à usage médical et vétérinaire, réactifs chimiques à usage pharmaceutique et vétérinaire ; compléments alimentaires à usage pharmaceutique et vétérinaire ; compléments alimentaires ; compléments nutritionnels ; préparations médicales destinées à la perte de poids ; aliments pour bébés ; herbes et boissons aux herbes adaptées à des fins médicales ; compléments à base d’herbes ; crèmes à base d’herbes à usage médical ; crèmes aux plantes à usage médical ; tisanes ; compléments liquides à base d’herbes ; matériaux de plombage dentaire, matières pour empreintes dentaires, adhésifs à usage dentaire et matériaux pour réparer les dents ; produits hygiéniques à usage médical ; serviettes hygiéniques ; tampons hygiéniques ; emplâtres, matériel pour pansements ; matières pour pansements ; langes, y compris ceux en papier et matières textiles ; fongicides ; désinfectants ; antiseptiques ; détergents [détersifs] à usage médical » relevant de la classe 5 et les « propolis pour la consommation humaine, propolis, propolis pour la consommation humaine » relevant de la classe 30.

2)       Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      L’EUIPO supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par SBS Bilimsel Bio Çözümler Sanayi Ve Ticaret AŞ.

4)      Laboratorios Ern, SA supportera ses propres dépens.

Spielmann

Öberg

Spineanu-Matei

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 octobre 2020.

Signatures


* Langue de procédure : l’espagnol