Language of document : ECLI:EU:T:2019:609

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

17 septembre 2019 (*)

« Dessin ou modèle communautaire – Procédure de nullité – Dessin ou modèle communautaire enregistré représentant une éponge pour la toilette – Dessins ou modèles antérieurs – Motifs de nullité – Examen d’office par la chambre de recours des faits constitutifs de divulgation – Charge de la preuve incombant au demandeur en nullité – Exigences liées à la reproduction du dessin ou modèle antérieur »

Dans l’affaire T‑532/18,

Aroma Essence Ltd, établie à Kazanlak (Bulgarie), représentée par Me A. Nastev, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. J. Ivanauskas et H. O’Neill, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Refan Bulgaria OOD, établie à Trud (Bulgarie),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la troisième chambre de recours de l’EUIPO du 19 juillet 2018 (affaire R 1197/2017‑3), relative à une procédure de nullité entre Aroma Essence et Refan Bulgaria,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. M. Prek, président, F. Schalin et Mme M. J. Costeira (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 10 septembre 2018,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 6 décembre 2018,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties principales dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Refan Bulgaria OOD est titulaire du dessin ou modèle communautaire déposé le 29 avril 2012 auprès de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et enregistré sous le numéro 1333223‑0001, en vertu du règlement (CE) no 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1).

2        Le dessin ou modèle contesté est représenté comme suit :

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3        Le dessin ou modèle contesté a été déposé pour des « éponges pour la toilette, savons », relevant de la classe 28.03 au sens de l’arrangement de Locarno instituant une classification internationale pour les dessins et modèles industriels, du 8 octobre 1968, tel que modifié.

4        Le 13 septembre 2016, la requérante, Aroma Essence Ltd, a déposé une demande en nullité relative au dessin ou modèle contesté en faisant valoir que ce dernier était dépourvu de nouveauté et de caractère individuel, conformément aux articles 5 et 6 du règlement no 6/2002.

5        À l’appui de son argumentation, la requérante a produit les images de deux dessins ou modèles antérieurs (no 1890492‑0001 et no 1890492‑0002), dont la titulaire du dessin ou modèle contesté avait été également titulaire et qui avaient été déclarés nuls par les décisions de la division d’annulation ICD 8688, du 24 octobre 2012, et ICD 8689, du 3 octobre 2012 (ci-après les « décisions antérieures »).

6        Par décision du 10 avril 2017, la division d’annulation a déclaré la nullité du dessin ou modèle contesté pour absence de caractère individuel sur la base du dessin ou modèle antérieur no 1890492‑0001. La division d’annulation a considéré que, même si son examen était limité aux faits, aux éléments de preuve et aux arguments présentés par les parties, rien ne l’empêchait de prendre en considération des faits notoires. Elle a estimé ainsi qu’elle ne pouvait pas ignorer que la titulaire du dessin ou modèle antérieur contesté avait été titulaire de deux dessins ou modèles déclarés nuls par les décisions antérieures sur la base de divulgations antérieures réalisées par la titulaire elle-même. Elle a considéré que, bien que le dessin ou modèle antérieur no 1890492‑0001 avait été divulgué pendant la période de douze mois prévue à l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 et ne devait pas être considéré comme élément de preuve contre la validité du dessin ou modèle contesté, le fait qu’il ait été déclaré nul justifiait de le prendre en considération aux fins de l’annulation du dessin ou modèle contesté, identique ou très similaire. Elle a estimé que décider autrement aurait tenu du paradoxe en ce sens qu’un enregistrement du dessin ou modèle aurait été déclaré nul, tandis qu’un enregistrement ultérieur du même dessin ou modèle aurait été maintenu dans le registre.

7        Le 5 juin 2017, la titulaire du dessin ou modèle contesté a formé un recours contre la décision de la division d’annulation.

8        Par décision du 19 juillet 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la troisième chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’annulation et a rejeté la demande en nullité du dessin ou modèle contesté.

9        En premier lieu, la chambre de recours a indiqué que, dans son recours devant la division d’annulation, la requérante a fait valoir que le dessin ou modèle contesté était dépourvu de nouveauté et de caractère individuel et a renvoyé à cet égard aux décisions antérieures, déclarant la nullité des dessins ou modèles no 1890492‑0001 et no 1890492‑0002. La chambre de recours a souligné que la demande en nullité était fondée sur le fait que le dessin ou modèle contesté devait être déclaré nul pour les mêmes motifs que ceux ayant conduit à la nullité de ces deux dessins ou modèles.

10      Cependant, la chambre de recours a relevé que la requérante n’avait fait aucune référence à la motivation des décisions antérieures ni aux dessins ou modèles antérieurs sur lesquels ces décisions étaient fondées.

11      Par ailleurs, la chambre de recours a considéré que le fait que les décisions antérieures reproduisaient également la preuve de la divulgation du dessin ou modèle antérieur, sous la forme de captures d’écran tirées du site YouTube et d’une image de catalogue, ne pouvait être considéré comme suffisant pour prouver l’existence de ce dessin ou modèle antérieur prétendument divulgué en 2010. Elle a considéré en effet qu’il appartenait à la requérante d’identifier et de reproduire précisément les dessins ou modèles antérieurs invoqués pour prouver la nullité du dessin ou modèle contesté, et non à la chambre de recours d’interpréter les dessins ou modèles antérieurs à partir des éléments de preuve présentés.

12      La chambre de recours en a conclu que seuls les dessins ou modèles no 1890492‑0001 et no 1890492‑0002 pouvaient être pris en considération aux fins de l’examen de la demande en nullité.

13      En second lieu, la chambre de recours a considéré que, contrairement à ce qui avait été conclu par la division d’annulation, la nullité des dessins ou modèles antérieurs pour absence de nouveauté n’était pas un fait notoirement connu à prendre en considération d’office. Elle a souligné que l’argument selon lequel une quelconque autre conclusion aurait tenu du paradoxe, en ce sens qu’un dessin ou modèle antérieur aurait été déclaré nul, tandis que l’enregistrement ultérieur du même dessin ou modèle aurait été maintenu, méconnaissait les principes de la procédure de nullité en tant que procédure inter partes.

14      Par ailleurs, la chambre de recours a précisé que, s’il n’était pas interdit à la requérante de renvoyer à des dessins ou modèles antérieurs invoqués dans d’autres procédures et aux éléments de preuve présentés à cet égard, elle ne pouvait se défaire de son obligation de justifier ces dessins ou modèles en se contentant de faire référence à la décision prise dans le cadre de ces autres procédures.

 Conclusions des parties

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ou la modifier en rejetant le recours introduit par Refan Bulgaria contre la décision de la division d’annulation de l’EUIPO du 10 avril 2017 ;

–        condamner l’EUIPO et Refan Bulgaria à supporter leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par elle dans le cadre de la procédure devant le Tribunal et devant l’EUIPO.

16      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

17      À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens. Le premier moyen est tiré de la violation du principe de bonne administration et d’une violation de l’article 53, paragraphes 1 et 2, et de l’article 60, paragraphe 1, du règlement no 6/2002, lus conjointement avec l’article 28, paragraphe 1, sous b), i), v) et vi), l’article 30, paragraphe 1 et l’article 36, paragraphe 1, du règlement (CE) no 2245/2002 de la Commission, du 21 octobre 2002, portant modalités d’application du règlement no 6/2002 (JO 2002, L 341, p. 28), en ce que ces dispositions auraient été interprétées d’une manière extrêmement restrictive. Le second moyen est tiré de la violation des principes de sécurité juridique, d’égalité de traitement et de bonne administration et d’une violation de l’article 59, l’article 60, paragraphe 1, l’article 65, paragraphe 5, sous b) et c), et l’article 75 du règlement no 6/2002 ainsi que de l’article 36, paragraphe 1, du règlement no 2245/2002.

18      Le Tribunal estime opportun de traiter ensemble ces deux moyens sous un moyen unique, dans la mesure où les arguments développés au soutien de ceux-ci sont identiques.

19      La requérante avance que la conclusion de la chambre de recours, selon laquelle « aucune référence à la motivation des décisions antérieures ni aux dessins ou modèles antérieurs sur lesquels ces décisions étaient fondées » n’a été faite dans ses écritures, était inexacte. La requérante fait valoir, à cet égard, que ses écritures présentées dans le cadre de la procédure devant la chambre de recours contenaient une référence explicite à la motivation des décisions antérieures. De plus, les décisions antérieures, contenant des captures d’écran des dessins ou modèles d’une éponge de toilette accompagnée d’un savon tirées des vidéos provenant d’un site Internet chargées le 12 janvier 2010 et le 3 avril 2010 et de la brochure datée du « printemps 2010 », auraient été jointes en annexe à sa demande en nullité.

20      La requérante soutient, en toute hypothèse, que la chambre de recours, au lieu de faire une interprétation trop extensive du principe de disposition et une interprétation trop restrictive du principe d’examen d’office, aurait dû exercer ses pleins pouvoirs en l’informant que sa demande en nullité n’était pas conforme à l’article 28, paragraphe 1), sous b), i), v) et vi), du règlement no 2245/2002 et en lui fixant un délai sur le fondement de l’article 30, paragraphe 1, du règlement no 2245/2002 pour lui permettre de remédier aux irrégularités entachant sa demande.  La chambre de recours aurait ainsi violé le principe de bonne administration, l’article 30, paragraphe 1, du règlement no 2245/2002, l’article 36, paragraphe 1, du règlement no 2245/2002 et l’article 60, paragraphes 1 et 2, du règlement no 6/2002. À l’appui de cette allégation, la requérante se prévaut de l’arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma (C‑564/16 P, EU:C:2018:509), pour faire valoir que la chambre de recours était tenue de lui demander de produire les éléments de preuve, invoqués dans les décisions antérieures, afin de procéder à un examen complet de la demande en nullité conformément aux principes de bonne administration et d’égalité de traitement.

21      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

22      À titre liminaire, il convient de relever que la requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir conclu que, dans son mémoire devant celle-ci, elle ne faisait aucune référence à la motivation des décisions antérieures et aux dessins ou modèles antérieurs sur lesquels ces décisions étaient fondées. Cette argumentation de la requérante procède d’une lecture erronée du point 18 de la décision attaquée. En effet, la chambre de recours reproche à la requérante de ne pas avoir fait référence à la motivation desdites décisions antérieures et desdits dessins et modèles dans ses écritures présentées devant la division d’annulation.

23      En premier lieu, il convient de rappeler que l’article 63, paragraphe 1, du règlement no 6/2002, relatif à l’examen d’office des faits, dispose que, dans une action en nullité, l’examen de l’EUIPO est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties. Cette disposition vise, notamment, la base factuelle des décisions de l’EUIPO, à savoir les faits et les preuves sur lesquels celles‑ci peuvent être valablement fondées. Ainsi, la chambre de recours, en statuant sur un recours mettant fin à une procédure de nullité, ne saurait fonder sa décision que sur les faits et les preuves présentés par les parties [voir arrêt du 5 juillet 2017, Gamet/EUIPO – « Metal-Bud II » Robert Gubała (Poignée de porte), T‑306/16, non publié, EU:T:2017:466, point 31 et jurisprudence citée].

24      En second lieu, il convient de relever que l’article 52, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 dispose que la demande en nullité doit être présentée par écrit et motivée. L’article 28, paragraphe 1, sous b), i) et vi), du règlement no 2245/2002 précise qu’une demande en nullité doit contenir une déclaration précisant les motifs de nullité ainsi que les faits, preuves et observations présentés à l’appui de cette demande. L’article 28, paragraphe 1, sous b), v), du règlement no 2245/2002 exige, en outre, que, lorsque la demande en nullité est fondée, notamment, sur l’absence de nouveauté ou de caractère individuel du dessin ou modèle communautaire enregistré, elle doit comporter l’indication et la reproduction des dessins ou modèles antérieurs susceptibles de faire obstacle à la nouveauté ou au caractère individuel du dessin ou modèle communautaire enregistré ainsi que des documents prouvant l’existence de ces dessins ou modèles antérieurs.

25      Il ressort ainsi de ces dispositions que, d’une part, il appartient à la partie ayant introduit la demande en nullité de fournir à l’EUIPO les indications nécessaires et, en particulier, l’identification et la reproduction précises et complètes du dessin ou modèle dont l’antériorité est alléguée, afin de démontrer que le dessin ou modèle contesté ne peut être valablement enregistré (arrêt du 21 septembre 2017, Easy Sanitary Solutions et EUIPO/Group Nivelles, C‑361/15 P et C‑405/15 P, EU:C:2017:720, point 65). D’autre part, il n’appartient pas à l’EUIPO, mais au demandeur en nullité de fournir les éléments de nature à démontrer la réalité de ce motif (voir arrêt du 21 septembre 2017, Easy Sanitary Solutions et EUIPO/Group Nivelles, C‑361/15 P et C‑405/15 P, EU:C:2017:720, point 59 et jurisprudence citée).

26      Or, il ressort du dossier que, d’une part, la demande en nullité présentée par la requérante devant la division d’annulation ne contenait aucune référence (directe et explicite) à la motivation, aux éléments de preuve et aux conclusions des décisions antérieures et aux dessins ou modèles antérieurs sur lesquels ces décisions étaient fondées. En effet, la requérante s’est contentée dans sa demande, d’une part, de déclarer que le dessin ou modèle contesté devait être déclaré nul pour les mêmes motifs que ceux invoqués dans les décisions antérieures sans préciser quels étaient ces motifs et, d’autre part, d’y annexer les décisions antérieures dans lesquelles étaient représentées des captures d’écran tirées du site Internet ainsi qu’une image de catalogue dans le but de prouver l’existence du dessin ou modèle antérieur prétendument divulgué en 2010.

27      D’autre part, seuls les dessins ou modèles antérieurs no 1890492‑0001 et no 1890492‑0002 ont été valablement invoqués par la requérante à l’appui de sa demande en nullité. En effet, la requérante a identifié uniquement ces dessins ou modèles antérieurs en tant que dessins ou modèles antérieurs susceptibles de faire obstacle à la nouveauté ou au caractère individuel du dessin ou modèle communautaire enregistré en indiquant précisément leur numéro d’enregistrement et leur reproduction. En outre, s’agissant desdits dessins ou modèles antérieurs enregistrés auprès de l’EUIPO, ces éléments suffisaient à prouver leurs existences, puisque toutes les informations pertinentes les concernant pouvaient être vérifiées dans la base de données de l’EUIPO. Par ailleurs, la demande comportait une comparaison du dessin ou modèle contesté avec ces seuls dessins ou modèles antérieurs.

28      Il s’ensuit que la chambre de recours a conclu à juste titre que seuls les dessins ou modèles no 1890492‑0001 et no 1890492‑0002 pouvaient être pris en considération aux fins de l’examen de la demande en nullité.

29      En effet, bien que les décisions antérieures contenaient la preuve de divulgation de dessins ou modèles représentant une éponge de toilette accompagnée d’un savon, sous la forme de captures d’écran et d’une image de catalogue, il n’en demeure pas moins que cette référence aux décisions antérieures, sans plus de précisions, ne satisfait pas à l’exigence d’une démonstration de l’existence d’un dessin ou modèle antérieur identique à celui contesté. En l’espèce, la requérante se limite à cette référence et ne fournit pas les explications nécessaires à l’appréciation de l’absence de nouveauté et de caractère individuel du dessin ou modèle contesté au regard du dessin ou modèle antérieur. L’appréciation du caractère nouveau d’un dessin ou modèle doit s’effectuer par rapport à un ou plusieurs dessins ou modèles précis, individualisés, déterminés et identifiés parmi l’ensemble des dessins ou modèles divulgués au public antérieurement (voir arrêt du 21 septembre 2017, Easy Sanitary Solutions et EUIPO/Group Nivelles, C‑361/15 P et C‑405/15 P, EU:C:2017:720, point 61 et jurisprudence citée).

30      La requérante ne saurait dès lors reprocher à la chambre de recours de s’être livrée à une interprétation trop restrictive du principe de l’examen d’office des faits, dans la mesure où, conformément à l’article 63, paragraphe 1, du règlement no 6/2002, dans une action en nullité, l’examen de l’EUIPO est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties. Il appartenait à la requérante de s’assurer que tous les dessins ou modèles antérieurs invoqués étaient clairement identifiés et reproduits, dans la mesure où la procédure de nullité fait partie des procédures inter partes.

31      La requérante ne saurait pas davantage reprocher à la chambre de recours de ne pas l’avoir informée que sa demande en nullité comportait des irrégularités et de ne pas l’avoir invitée à remédier à celles-ci.

32      À cet égard, il convient de relever que l’article 30, paragraphe 1, du règlement no 2245/2002, relatif au rejet de la demande en nullité pour irrecevabilité, dispose que, si l’EUIPO constate que la demande en nullité ne satisfait pas aux dispositions de l’article 52 du règlement no 6/2002, de l’article 28, paragraphe 1, du règlement no 2245/2002 ou à toute autre disposition de ces deux règlements, il en informe le demandeur et l’invite à remédier, dans le délai qu’il lui impartit, aux irrégularités constatées.

33      Il ressort ainsi de cette disposition que l’EUIPO invite le demandeur en nullité à remédier aux irrégularités lorsque la demande est irrecevable.

34      Or, en l’espèce, ainsi que le souligne à juste titre l’EUIPO dans le mémoire en réponse, la demande en nullité a été considérée comme recevable dans la mesure où la requérante a invoqué, comme base de la demande en nullité, les dessins ou modèles antérieurs no 1890492‑0001 et no 1890492‑0002, qui étaient les seuls dessins ou modèles antérieurs expressément mentionnés et identifiés par la requérante.

35      Partant, il y a lieu de conclure qu’il appartenait à la requérante non seulement d’identifier et de reproduire clairement les dessins ou modèles antérieurs qui avaient servi de base aux décisions déclarant la nullité des dessins ou modèles no 1890492‑0001 et no 1890492‑0002, mais également de faire référence aux éléments de preuve examinés dans les décisions antérieures.

36      C’est donc à juste titre que l’EUIPO a pris en considération, lors de l’examen de la demande en nullité, uniquement ces dessins ou modèles, qui ont été les seuls expressément invoqués par la requérante. Par conséquent, la chambre de recours a procédé à un examen correct et n’a pas violé les principes de bonne administration et d’égalité de traitement.

37      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma (C‑564/16 P, EU:C:2018:509, points 91 à 100), dont se prévaut la requérante.

38      En effet, dans l’arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma (C‑564/16 P, EU:C:2018:509), la Cour a confirmé l’obligation de l’EUIPO, dans le cadre des procédures d’opposition dirigées contre les marques, de tenir compte de ses décisions antérieures invoquées par l’opposant pour prouver la renommée de la marque antérieure invoquée et, si nécessaire, de demander des faits et des preuves supplémentaires ou, à titre subsidiaire, de fournir les raisons pour lesquelles il estime que les constats effectués dans ces décisions doivent être écartés.

39      À cet égard, il y a lieu de relever que rien ne s’oppose à ce que soient invoquées, en tant qu’éléments de preuve, des décisions antérieures de l’EUIPO dans le cadre d’autres procédures inter partes, notamment lorsqu’elles sont identifiées avec précision et que leur contenu essentiel est présenté dans la demande en nullité (voir, par analogie, arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, point 69).

40      Il ressort de l’arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma (C‑564/16 P, EU:C:2018:509, point 61 et jurisprudence citée), invoqué par la requérante, que l’EUIPO doit, conformément à l’article 36 paragraphe 1, du règlement no 2245/2002 et eu égard aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, prendre en considération les décisions qu’il a déjà adoptées sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens.

41      Toutefois, il s’avère que les enseignements de l’arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma (C‑564/16 P, EU:C:2018:509), ne sont pas applicables dans les circonstances particulières de l’espèce. En effet, dans ledit arrêt, les décisions antérieures de l’EUIPO avaient été identifiées avec précision et les passages pertinents et les éléments de preuve de ces décisions avaient été expressément mentionnés et résumés (arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, point 73).

42      Or, en l’espèce, ainsi qu’il ressort des points 26 à 29 ci-dessus, les décisions antérieures n’ont pas été valablement invoquées par la requérante dans la mesure où elle s’est bornée à mentionner les dessins ou modèles déclarés nuls par les décisions antérieures sans présenter le contenu essentiel de ces décisions et, notamment, sans identifier les dessins ou modèles antérieurs qui ont servi de base à la déclaration de nullité.

43      En outre, la chambre de recours a effectivement fourni les raisons pour lesquelles elle n’a pas considéré que le dessin ou modèle antérieur en cause avait été dûment invoqué. En revanche, dans l’affaire invoquée par la requérante, la Cour reprochait à l’EUIPO ne pas avoir fourni de motivation sur les raisons qu’il l’avait amené à ne pas tenir compte des décisions antérieures précédentes.

44      En tout état de cause et ainsi que l’a souligné l’EUIPO dans ses écritures, ces décisions ont été, en l’espèce, prises en considération dans la mesure où elles renvoyaient aux dessins ou modèles antérieurs invoqués expressément par la requérante.

45      Ainsi, force est de constater que l’arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma (C‑564/16 P, EU:C:2018:509), invoqué par la requérante n’est pas transposable au cas d’espèce.

46      Au vu de l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble comme non fondé.

 Sur les dépens

47      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

48      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Aroma Essence Ltd est condamnée aux dépens.

Prek

Schalin

Costeira

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 septembre 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.