Language of document : ECLI:EU:T:2018:532

Affaire T73/17

RS

contre

Commission européenne

« Fonction publique – Agents temporaires – Recrutement – Concours interne – Constitution d’une liste de réserve pour le recrutement d’assistants – Condition d’admission relative à l’exigence d’activité sans interruption pendant les douze mois précédant la clôture du délai pour le dépôt des candidatures – Congé de convenance personnelle – Non‑admission à participer aux épreuves d’un concours »

Sommaire – Arrêt du Tribunal (neuvième chambre) du 12 septembre 2018

1.      Fonctionnaires – Concours – Conditions d’admission – Dispositions impératives de l’article 27, premier alinéa, du statut – Conditions limitant l’inscription de candidats à un concours – Admissibilité – Conditions – Exigences liées à l’intérêt du service – Contrôle juridictionnel – Limites

(Statut des fonctionnaires, art. 27, al. 1, et 29, § 1)

2.      Fonctionnaires – Recrutement – Concours interne à l’institution – Participation étendue à tous les agents et fonctionnaires – Obligation – Absence

3.      Fonctionnaires – Concours – Concours interne pour la constitution d’une liste de réserve pour le recrutement d’assistants – Agents temporaires – Condition d’admission relative à l’exigence d’activité sans interruption pendant les douze mois précédant la clôture du délai pour le dépôt de candidatures – Non-admission à participer aux épreuves du concours d’un agent temporaire en raison de son congé sans rémunération d’une durée de deux mois au cours de cette période – Inadmissibilité

(Statut des fonctionnaires, art. 27, al. 1 ; régime applicable aux autres agents, art. 82, § 7)

1.      Les institutions disposent d’un large pouvoir d’appréciation pour déterminer les critères de capacité exigés par les emplois à pourvoir et pour déterminer, en fonction de ces critères et dans l’intérêt du service, les conditions et les modalités d’organisation d’un concours. Toutefois, l’exercice du pouvoir d’appréciation qui appartient aux institutions en matière d’organisation de concours, en particulier en ce qui concerne la fixation des conditions d’admission, doit être compatible avec les dispositions impératives de l’article 27, premier alinéa, et de l’article 29, paragraphe 1, du statut. C’est de manière impérative que l’article 27, premier alinéa, du statut définit le but de tout recrutement et que l’article 29, paragraphe 1, du statut fixe le cadre des procédures à suivre en vue de pourvoir aux vacances d’emploi. En conséquence, ce pouvoir doit toujours être exercé en fonction des exigences liées aux emplois à pourvoir et, plus généralement, de l’intérêt du service.

S’agissant spécifiquement des conditions limitant l’inscription de candidats à un concours, si elles sont certes susceptibles de restreindre les possibilités pour l’institution concernée de recruter les meilleurs candidats au sens de l’article 27, premier alinéa, du statut, il n’en résulte pas pour autant que toute condition portant une telle limitation est contraire à l’article susmentionné. En effet, le pouvoir d’appréciation de l’administration dans l’organisation des concours et, plus généralement, l’intérêt du service permettent à l’institution de poser les conditions qu’elle juge appropriées et qui, tout en limitant l’accès des candidats à un concours, et donc forcément le nombre des candidats inscrits, ne comportent cependant pas le risque de compromettre l’objectif d’assurer l’inscription des candidats qui présentent les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité au sens de l’article 27, premier alinéa, du statut.

Ne sont ainsi jugées contraires à l’article 27, premier alinéa, du statut que les conditions limitant l’accès des candidats à un concours qui comportent le risque de compromettre l’objectif d’assurer l’inscription des candidats qui présentent les plus hautes qualités.

En outre, compte tenu du large pouvoir d’appréciation reconnu aux institutions en ce domaine, le contrôle du Tribunal portant sur le respect de la condition relative à l’intérêt du service doit se limiter à la question de savoir si l’institution s’est tenue dans des limites raisonnables, non critiquables, et n’a pas usé de son pouvoir d’appréciation de manière manifestement erronée.

(voir points 36-38, 40, 41)

2.      Il n’existe aucune obligation d’admettre à un concours interne à l’institution toutes les personnes se trouvant au service de celle-ci. Une telle obligation porterait, en effet, atteinte au large pouvoir d’appréciation reconnu à cette institution. Aucun droit absolu de participer à un concours interne à une institution ne saurait, dès lors, être reconnu aux agents et aux fonctionnaires de celle-ci.

(voir point 39)

3.      L’exigence d’un certain nombre d’années d’ancienneté de service constitue un moyen approprié pour s’assurer que les fonctionnaires possèdent les qualités prescrites par l’article 27, premier alinéa, du statut et, partant, pour garantir l’intérêt du service. En effet, la possession d’une certaine ancienneté, et donc d’une expérience significative au sein des institutions de l’Union européenne, constitue un « indice certain » de l’existence des qualités susvisées.

Une telle condition d’ancienneté permet d’assurer que les personnes admises au concours interne ont été soumises au régime applicable au personnel administratif des institutions, notamment aux règles relatives à la notation et à la discipline, pendant une certaine période et qu’elles ont fait preuve de leurs aptitudes dans ce cadre. La procédure de recrutement assure donc à l’institution concernée le concours de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité telles qu’elles ont été appréciées par les institutions elles-mêmes.

En revanche, une condition supplémentaire consistant à exiger, outre une certaine ancienneté de service, que les fonctionnaires ou les agents candidats aient été au service de l’institution de façon ininterrompue pendant la période visée par cette condition d’ancienneté de service peut avoir pour résultat d’écarter du concours interne des fonctionnaires ou des agents justifiant d’une ancienneté de service égale ou supérieure à celle requise par cette dernière condition. Il apparaît que l’avis de concours exige que, pendant la période de douze mois précédant la date de clôture de l’inscription électronique, les candidats aient été au service de l’institution sans interruption en position administrative d’activité, de congé pour service militaire, de congé parental ou familial, de détachement dans l’intérêt du service ou de détachement sur demande, positions parmi lesquelles ne figure notamment pas le congé de convenance personnelle. La partie requérante justifiait d’une ancienneté de service de 69 mois mais avait pris un congé de convenance personnelle d’une durée de deux mois au cours des douze mois précédant la date de clôture de l’inscription électronique.

Il s’ensuit que, en l’absence de justification apportée par l’institution, une telle exigence doit être tenue pour illégale.

Dans ces conditions, l’institution concernée doit être regardée comme ayant usé de son pouvoir d’appréciation de manière manifestement erronée en introduisant dans l’avis de concours une condition supplémentaire à la condition liée à l’ancienneté dans le service exigeant que, pendant la période de douze mois précédant la date de clôture de l’inscription électronique, les candidats aient été au service de l’institution sans interruption.

(voir points 43, 44, 46-49, 51)