Language of document : ECLI:EU:T:2013:583

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

7 novembre 2013 (*)

« Marque communautaire – Procédure de nullité – Marque communautaire verbale AYUR – Marques Benelux verbales antérieures AYUS – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), et article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑63/13,

Three-N-Products Private Ltd, établie à New Delhi (Inde), représentée par Mes M. Thewes et T. Chevrier, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme V. Melgar, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été,

Munindra Holding BV, établie à Lelystad (Pays-Bas),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 23 novembre 2012 (affaire R 2296/2011‑4), relative à une procédure d’opposition entre Munindra Holding BV et Three-N-Products Private Ltd,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas (rapporteur), président, N. J. Forwood et E. Bieliūnas, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 5 février 2013,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 16 mai 2013,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 31 octobre 2006, la requérante, Three-N-Products Private Ltd, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal AYUR.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment, après la limitation intervenue au cours de la procédure devant l’OHMI, des classes 3, 5 et 44 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, notamment, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Produits cosmétiques, produits non médicinaux à base d’herbes pour le soin de la peau, produits non médicinaux à base d’herbes pour le soin des cheveux, lotions non médicinales pour le soin du corps » ;

–        classe 5 : « Produits à base d’herbes pour le traitement de la peau, le contrôle du poids, la perte de poids et le traitement du diabète ; produits et substances à base de vitamines et de minéraux ; compléments santé à usage médical ; produits vitaminés, produits minéraux pour le traitement de la peau, la perte de poids et le traitement du diabète » ;

–        classe 44 : « Services de conseils dans le domaine des remèdes à base d’herbes, de la nutrition, de la santé et des soins de beauté ».

4        Le 24 octobre 2008, le signe a été enregistré en tant que marque communautaire, sous le numéro 5429469.

5        Le 27 février 2009, Munindra Holding BV a présenté à l’OHMI une demande visant à faire déclarer la nullité de la marque en cause, en vertu de l’article 52, paragraphe 1, sous a), lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenus respectivement article 53, paragraphe 1, sous a), et article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

6        Les marques antérieures invoquées à l’appui de la demande en nullité sont les suivantes :

–        la marque Benelux verbale AYUS, enregistrée le 4 novembre 1994 sous le numéro 559265, pour des produits relevant des classes 5, 30 et 31 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 5 : « Produits à base d’herbes à usage médicinal » ;

–        classe 30 : « Herbes à usage non médicinal » ;

–        classe 31 : « Herbes et plantes fraîches ».

–        la marque Benelux verbale AYUS, enregistrée le 11 octobre 2004 sous le numéro 755951, pour des produits relevant des classes 5, 29 et 30 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 5 : « Produits à base d’herbes à usage médicinal ; compléments alimentaires à base de minéraux ; herbes médicinales » ;

–        classe 29 : « Compléments alimentaires » ;

–        classe 30 : « Produits à base d’herbes à usage non médicinal ; herbes ; compléments alimentaires ».

7        Par décision du 9 septembre 2011, la division d’annulation a prononcé la nullité de la marque communautaire contestée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

8        Le 7 novembre 2011, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’annulation.

9        Par décision du 23 novembre 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. En particulier, elle a considéré que, compte tenu du degré moyen à élevé de similitudes visuelle et phonétique des signes en cause, de l’identité et de la similitude des produits et des services concernés et du caractère distinctif normal des marques antérieures, il existait un risque de confusion entre les marques en conflit pour lesdits produits et services.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI et Munindra aux dépens exposés dans le cadre de la procédure devant le Tribunal et dans le cadre de la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI.

11      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

12      À l’appui de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), et de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009.

13      En vertu de ces articles, une marque communautaire est déclarée nulle, sur demande du titulaire d’une marque antérieure, lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée.

14      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

 Sur le territoire pertinent

15      Les marques antérieures étant enregistrées au Benelux, c’est le territoire de ce dernier qui est pertinent en l’espèce, ainsi que l’a relevé la chambre de recours sans que cela soit contesté par la requérante.

 Sur le public pertinent

16      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 42, et la jurisprudence citée].

17      La chambre de recours a, en substance, estimé que le public pertinent était composé du consommateur moyen des produits et des services en cause. S’agissant, premièrement, des produits couverts par la marque contestée relevant de la classe 3, elle a relevé que le niveau d’attention du consommateur moyen était normal, étant donné qu’il s’agissait de produits de consommation courante. S’agissant, deuxièmement, des produits couverts par la marque contestée relevant de la classe 5, elle a considéré que le niveau d’attention du public était relativement élevé, étant donné qu’il s’agissait principalement de produits à usage médical. S’agissant, troisièmement, des services couverts par la marque contestée relevant de la classe 44, elle a estimé que le public pertinent était le public général, dont le niveau d’attention serait normal, s’agissant des soins de beauté, et relativement élevé, s’agissant des soins médicaux.

18      La requérante admet que le niveau d’attention du public pertinent est élevé s’agissant des produits à usage médical, mais estime, contrairement à la chambre de recours, que cela est également le cas s’agissant des produits pour les soins du corps en général. Selon elle, ainsi que l’OHMI l’aurait déjà constaté, les consommateurs de ces produits auraient tendance à être plus attentifs au moment de leur achat.

19      En l’espèce, il convient de relever que, même si elle estime que les consommateurs des produits pour les soins du corps en général auraient tendance à être plus attentifs au moment de leur achat que lorsqu’ils achètent des produits quotidiens communs, il n’en demeure pas moins que la requérante ne conteste pas que les produits et les services couverts par la marque contestée, à l’exception de ceux se rapportant aux soins médicaux, sont des produits et des services de consommation courante, comme l’a en substance relevé, à bon droit, eu égard à leur nature, la chambre de recours.

20      Aussi, sans être faible, le degré d’attention du consommateur moyen est moindre que celui consacré à des biens durables ou, simplement, à des biens et services d’une plus grande valeur ou d’un usage plus exceptionnel [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 22 mai 2012, Olive Line International/OHMI – Umbria Olii International (O·LIVE), T‑273/10, non publié au Recueil, point 40, et la jurisprudence citée].

21      En tout état de cause, la requérante n’a pas étayé par des éléments de fait et des éléments de preuve son allégation selon laquelle les consommateurs des produits et des services auxquels elle se réfère seraient plus attentifs, eu égard à l’importance qu’ils accordent à leur bien-être physique, à leur hygiène et à leur apparence personnelle, au moment de leur achat que lorsqu’ils achètent des produits quotidiens communs.

22      Partant, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a estimé que le public pertinent aurait un niveau d’attention normal pour les produits et les services couverts par la marque contestée, à l’exception de ceux se rapportant à des soins médicaux pour lesquels le niveau d’attention serait relativement élevé, comme l’admet la requérante. Le Tribunal a d’ailleurs eu l’occasion d’entériner une telle appréciation s’agissant de produits et de services de même nature que ceux en cause en l’espèce et relevant des classes 3 et 44 [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 7 février 2012, Hartmann-Lamboy/OHMI – Diptyque (DYNIQUE), T‑305/10, non publié au Recueil, point 26, et O·LIVE, précité, points 40 à 42, et la jurisprudence citée].

 Sur la comparaison des produits et des services

23      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec. p. II‑2579, point 37, et la jurisprudence citée].

24      Les produits ou les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise. Par définition, des produits ou des services adressés à des publics différents ne peuvent pas présenter un caractère complémentaire [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, points 57 et 58, et la jurisprudence citée]

25      La chambre de recours a en substance estimé que les produits et les services en cause étaient identiques ou similaires.

26      La requérante critique la comparaison effectuée par la chambre de recours entre les produits couverts par la marque Benelux antérieure enregistrée sous le numéro 755951 relevant de la classe 5 et, d’une part, ceux couverts par la marque contestée relevant de la même classe ainsi que, d’autre part, les services couverts par la marque contestée relevant de la classe 44.

27      En premier lieu, s’agissant de la comparaison des produits couverts par la marque Benelux antérieure enregistrée sous le numéro 755951 relevant de la classe 5 avec ceux couverts par la marque contestée relevant de la même classe, il convient de relever, à titre liminaire, que la requérante ne remet pas en cause l’appréciation de la chambre de recours, figurant au considérant 28 de la décision attaquée, selon laquelle les produits et substances à base de vitamines, les produits vitaminés pour le traitement de la peau, la perte de poids et le traitement du diabète, couverts par la marque contestée, et les produits à base d’herbes à usage médicinal, les compléments alimentaires à base de minéraux, les herbes médicinales, couverts par la marque antérieure, sont similaires.

28      La requérante soutient en revanche, en substance, que la chambre de recours n’a pas opéré de comparaison valable des autres produits couverts par la marque contestée relevant de la classe 5, visés au considérant 27 de la décision attaquée, avec ceux couverts par les marques antérieures.

29      À cet égard, il convient de relever qu’il ressort du considérant 27 de la décision attaquée que la chambre de recours a estimé que la division d’annulation avait conclu à juste titre que les produits à base d’herbes pour le traitement de la peau, le contrôle du poids, la perte de poids et le traitement du diabète et les produits et substances à base de minéraux, les compléments santé à usage médical, les produits minéraux pour le traitement de la peau, la perte de poids et le traitement du diabète étaient similaires.

30      Force est de constater que, ainsi que le soutient la requérante et le reconnaît l’OHMI, par cette appréciation, la chambre de recours ne procède pas à une comparaison des produits couverts par la marque contestée avec ceux couverts par une des marques antérieures. Elle compare, en effet, entre elles, différentes catégories de produits couverts par la marque contestée relevant de la classe 5.

31      Toutefois, nonobstant cette erreur, qualifiée par l’OHMI d’« erreur de frappe », il ressort très clairement des termes mêmes du considérant 27 de la décision attaquée que la chambre de recours entendait faire sienne l’appréciation de la division d’annulation par laquelle celle-ci a estimé que ces produits étaient identiques à ceux couverts par la marque Benelux antérieure enregistrée sous le numéro 755951 relevant de la classe 5.

32      À cet égard, il convient de rappeler que la division d’annulation a estimé que les produits à base d’herbes à usage médicinal couverts par cette dernière marque et relevant de cette classe incluaient les produits à base d’herbes pour le traitement de la peau, le contrôle du poids, la perte de poids et le traitement du diabète, couverts par la marque contestée relevant de la même classe, de sorte qu’ils étaient identiques. Elle a en outre considéré que les compléments santé à usage médical couverts par la marque contestée relevant de la classe 5 incluaient les biens couverts par la marque Benelux antérieure enregistrée sous le numéro 755951 relevant de ladite classe, de sorte qu’ils étaient identiques. Elle a enfin estimé que les produits et substances à base de vitamines et de minéraux et les produits minéraux pour le traitement de la peau, la perte de poids et le traitement du diabète couverts par la marque contestée relevant de la classe 5 pouvaient prendre la forme de compléments alimentaires à base de minéraux, couverts par la marque Benelux antérieure enregistrée sous le numéro 755951 relevant de la même classe, de sorte que ces produits étaient identiques.

33      Or, aucun élément n’a été avancé par la requérante permettant de remettre en cause valablement ces appréciations, lesquelles ont été validées par la chambre de recours.

34      En deuxième lieu, s’agissant de la comparaison des produits couverts par la marque Benelux antérieure enregistrée sous le numéro 755951 relevant de la classe 5 avec les services couverts par la marque contestée relevant de la classe 44, la requérante estime que ces produits et ces services ne sont pas complémentaires et qu’ils ont une nature et des canaux de distribution différents.

35      À titre liminaire, il convient de constater que la requérante ne remet pas en cause l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle ces produits et ces services concernent tous le domaine commun des remèdes à bases d’herbes, de la nutrition et de la santé, ont tous pour finalité de soigner ou d’améliorer la santé et ont tous les mêmes consommateurs finaux.

36      S’agissant de la nature des produits et des services en cause, il convient de rappeler qu’une similitude peut être constatée même entre des produits et des services. En effet, ainsi que la chambre de recours l’a en substance indiqué, si, du fait de leur nature même, les produits sont généralement différents des services, il n’en demeure pas moins qu’ils peuvent être complémentaires, ou que les services peuvent avoir le même objet ou la même destination que le produit, et se trouver de ce fait en concurrence [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 27 octobre 2005, Éditions Albert René/OHMI – Orange (MOBILIX), T‑336/03, Rec. p. II‑4667, point 66].

37      S’agissant du caractère complémentaire des produits et des services en cause, il convient de relever, à l’instar de la chambre de recours, que les produits à base d’herbes à usage médicinal couverts par les marques antérieures relevant de la classe 5 peuvent être prescrits par des médecins spécialisés proposant des services de conseil dans le domaine des remèdes à base d’herbes, de la nutrition et de la santé, couverts par la marque contestée relevant de la classe 44. Il s’ensuit que, même si, comme l’indique la requérante, les conseils d’un spécialiste ne sont pas indispensables ou importants pour la décision de recourir à un traitement à base de plantes médicinales, il n’en demeure pas moins que l’existence de produits à base d’herbes à usage médicinal est une condition essentielle pour la prestation de conseil dans le domaine des remèdes à base d’herbes. Il existe donc une relation de complémentarité entre ces produits et ces services.

38      S’agissant des canaux de distribution, la chambre de recours a retenu que les produits et les services en cause avaient les mêmes. La division d’annulation a, quant à elle, retenu qu’il était fréquent que le producteur de produits pharmaceutiques et de substances diététiques consulte également sur leur utilisation, leur bénéfice ou leur contre-indication. Or, la requérante n’a pas étayé par des éléments de fait et des éléments de preuve son allégation selon laquelle les canaux de distribution seraient différents. Elle se borne à affirmer que les services en cause sont dispensés par des spécialistes, lesquels se distinguent des producteurs de ce type de traitements, sans apporter d’éléments démontrant le bien-fondé de cette affirmation. Au demeurant, elle reconnaît, tout en indiquant que ce serait de manière marginale, que l’auteur de tels conseils proposerait à la vente les produits en cause. Elle n’avance enfin aucun élément démontrant que les professionnels renvoient les destinataires des conseils aux points de ventes spécialisés.

39      Il en résulte qu’aucun élément ne permet de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les produits couverts par la marque Benelux antérieure enregistrée sous le numéro 755951 relevant de la classe 5 et les services couverts par la marque contestée relevant de la classe 44 sont similaires.

40      En troisième lieu, il convient de relever que la requérante ne conteste pas l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les produits couverts par la marque Benelux antérieure enregistrée sous le numéro 755951 relevant de la classe 5 et les produits couverts par la marque contestée relevant de la classe 3 sont similaires, ladite appréciation devant, en tout état de cause, être validée au regard de la nature des produits en cause.

 Sur la comparaison des signes

41      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

42      La chambre de recours a considéré que, sur le plan visuel et sur le plan phonétique, les signes en cause ont un degré de similitude moyen à élevé et que, sur le plan conceptuel, aucun n’a, en tant que tel, de signification.

43      La requérante soutient que les signes en conflit ne présentent pas de similitude élevée sur le plan visuel et sur le plan phonétique. Sur le plan conceptuel, elle estime que le sens du terme « ayus », en l’occurence « vie » ou « longévité », sera perçu par une partie significative du public pertinent.

44      À cet égard, il convient de rappeler que les signes à comparer en l’espèce sont les éléments verbaux « ayur », s’agissant de la marque contestée, et « ayus », s’agissant des marques antérieures.

45      Sur le plan visuel et sur le plan phonétique, il convient de relever que les signes en cause sont tous deux composés de deux syllabes et de quatre lettres, dont trois sont identiques et placées dans le même ordre au début desdits signes, de sorte que le début des signes sera perçu et prononcé de manière identique par le public pertinent. Seules les dernières lettres de ces signes sont différentes. À cet égard, il convient de relever que, ainsi que le souligne en substance la requérante, s’agissant de signes verbaux relativement brefs, comme ceux de l’espèce, les éléments de début et de fin du signe sont aussi importants que les éléments centraux [voir arrêt du Tribunal du 16 septembre 2009, Hipp & Co/OHMI – Laboratorios Ordesa (Bebimil), T‑221/06, non publié au Recueil, point 47, et la jurisprudence citée]. Toutefois, en l’espèce, les éléments de similitude entre les signes en conflit, en l’occurrence trois lettres placées dans le même ordre au début du signe, sont plus importants que le seul élément de différence, en l’occurrence une lettre, placée à la fin de ces signes, même si les lettres finales en cause se prononcent de manière différente, ainsi que le souligne la requérante. Il s’ensuit que, selon une impression d’ensemble, ces signes peuvent être considérés comme présentant un degré de similitude moyen sur le plan visuel et sur le plan phonétique.

46      Sur le plan conceptuel, il convient de relever qu’aucun élément ne permet de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle aucun des signes en cause n’a, en tant que tel, de signification. En effet, d’une part, s’agissant du terme « ayur », la requérante admet qu’il n’a aucune portée conceptuelle définie et identifiable pour le public. D’autre part, contrairement à ce que prétend la requérante, aucun élément ne permet de considérer que le public pertinent percevra immédiatement la signification du terme « ayus ». Certes, ainsi que le souligne la requérante, le terme « ayus » est mentionné sur les sites Internet dont les pages ont été versées au dossier, lesquelles indiquent que ce terme signifie, en langue sanscrite, « vie » et qu’il est utilisé pour former le terme « ayurvéda », qui se réfère à une médecine traditionnelle indienne. Cela n’est toutefois pas suffisant pour considérer que le public pertinent, lequel est composé du consommateur moyen du Benelux, est familiarisé avec le terme de langue sanscrite « ayus » et qu’il en comprendra immédiatement la portée. Aucun élément n’a d’ailleurs été apporté pour démontrer que ledit public, ou une partie significative de celui-ci, a des connaissances en sanskrit. Quant à l’argument selon lequel les consommateurs des produits et des services en cause sont généralement des amateurs de médecine alternative et connaissent les éléments de vocabulaire rattaché à cette pratique, il doit être relevé que, même à supposer qu’il existe, parmi le grand public des consommateurs de l’Union européenne, un public plus spécialisé ayant des connaissances en matière de médecine alternative, d’ésotérisme, d’hindouisme, de culture orientale et de yoga [arrêt du Tribunal du 17 septembre 2008, Prana Haus/OHMI (PRANAHAUS), T‑226/07, non publié au Recueil, points 26 et 29] ainsi qu’un public de professionnels des produits de beauté et de santé, qui pourront comprendre la signification du terme « ayus », rien ne permet de considérer que ces publics constituent une partie significative du public pertinent. Dans ces conditions, aucune comparaison conceptuelle n’apparaît possible.

47      En tout état de cause, à supposer que le public pertinent, ou une partie de celui-ci, en l’occurrence les amateurs de médecine alternative ou les professionnels des produits de beauté et de santé, puisse associer le terme « ayus » à l’ayurvéda, ce public, ou cette partie de ce dernier, associera également, ainsi que la chambre de recours l’a relevé, le terme « ayur » à l’ayurvéda. Dans cette hypothèse, les signes en cause devraient être considérés comme similaires sur le plan conceptuel.

 Sur le risque de confusion

48      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 74].

49      La chambre de recours a considéré que, compte tenu du degré moyen à élevé de similitudes visuelle et phonétique des signes en cause, de l’identité et de la similitude des produits et des services concernés et du caractère distinctif normal des marques antérieures, il existait un risque de confusion entre les marques en conflit pour lesdits produits et services.

50      La requérante objecte, premièrement, que les marques antérieures sont dépourvues de caractère distinctif pour une partie substantielle du public pertinent, deuxièmement, que ce dernier sera enclin à percevoir les différences entre les signes en cause, et ce d’autant plus qu’ils sont relativement brefs, et, troisièmement, que les différences conceptuelles entre ces signes sont en mesure de contrebalancer les similitudes visuelles et phonétiques existant entre ceux-ci.

51      À cet égard, il convient d’emblée de relever que l’argumentation de la requérante relative au niveau d’attention du public pertinent et aux différences conceptuelles ne peut qu’être rejetée, pour les motifs figurant aux points 19 et 46 à 47 ci-dessus.

52      S’agissant de l’argumentation relative au caractère distinctif des marques antérieures, il doit être relevé que, ainsi qu’il ressort du point 46 ci-dessus et contrairement à ce que prétend la requérante, la signification du terme « ayus » ne sera pas comprise par une partie significative du public et ledit terme ne sera donc pas perçu par une telle partie du public pertinent comme ayant une signification en lien avec les produits et les services concernés. Il s’ensuit que le caractère distinctif de ce terme doit être considéré comme normal, ainsi que la chambre de recours l’a retenu.

53      En tout état de cause, la reconnaissance d’un caractère faiblement distinctif des marques antérieures n’empêcherait pas de constater l’existence d’un risque de confusion en l’espèce. En effet, si le caractère distinctif de la marque antérieure doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion (voir, par analogie, arrêt Canon, précité, point 24), il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 mars 2005, L’Oréal/OHMI – Revlon (FLEXI AIR), T‑112/03, Rec. p. II‑949, point 61].

54      En l’espèce, eu égard à la similitude ou à l’identité des produits et services en cause, à la similitude des signes en cause, il y a lieu de considérer, au regard du caractère distinctif normal des marques antérieures, qu’il existe un risque de confusion entre les marques en conflit. Cette conclusion est également valable pour les produits et les services pour lesquels le public aura un niveau d’attention relativement élevé, en raison de la similitude ou de l’identité existant entre ceux-ci ainsi qu’au regard du degré de similitude des signes en cause.

55      L’examen du risque de confusion effectué par la chambre de recours est donc exempt d’erreur.

56      Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

57      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La partie requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Three-N-Products Private Ltd est condamnée aux dépens.

Papasavvas

Forwood

Bieliūnas

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 novembre 2013.

Signatures


* Langue de procédure : le français.