Language of document : ECLI:EU:T:2014:1030

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

9 décembre 2014 (*)

« Concurrence – Ententes – Marché des ronds à béton en barres ou en rouleaux – Décision constatant une infraction à l’article 65 CA, après l’expiration du traité CECA, sur le fondement du règlement (CE) n° 1/2003 – Fixation des prix et des délais de paiement – Limitation ou contrôle de la production ou des ventes – Violation des formes substantielles – Base juridique – Instruction de l’affaire – Définition du marché – Violation de l’article 65 CA – Amendes – Circonstances atténuantes – Proportionnalité »

Dans l’affaire T‑69/10,

Industrie Riunite Odolesi SpA (IRO), établie à Odolo (Italie), représentée par Mes A. Giardina et P. Tomassi, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. R. Sauer et B. Gencarelli, puis par M. Sauer, Mmes R. Striani et T. Vecchi, en qualité d’agents, assistés de Me P. Manzini, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2009) 7492 final de la Commission, du 30 septembre 2009, relative à une procédure d’application de l’article 65 CA (affaire COMP/37.956 – Ronds à béton armé, réadoption), telle que complétée et modifiée par la décision C (2009) 9912 final de la Commission, du 8 décembre 2009, par laquelle la Commission a infligé à la requérante une amende de 3,58 millions d’euros, pour violation de l’article 65, paragraphe 1, CA,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro (rapporteur), président, MM. G. Berardis et A. Popescu, juges,

grefier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 11 février 2014,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

 Dispositions du traité CECA

1        L’article 36 CA prévoyait :

« La Commission, avant de prendre une des sanctions pécuniaires ou de fixer une des astreintes prévues au présent traité, doit mettre l’intéressé en mesure de présenter ses observations.

Les sanctions pécuniaires et les astreintes prononcées en vertu des dispositions du présent traité peuvent faire l’objet d’un recours de pleine juridiction.

Les requérants peuvent se prévaloir, à l’appui de ce recours, dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article 33 du présent traité, de l’irrégularité des décisions et recommandations dont la méconnaissance leur est reprochée. »

2        L’article 47 CA se lisait comme suit :

« La Commission peut recueillir les informations nécessaires à l’accomplissement de sa mission. Elle peut faire procéder aux vérifications nécessaires.

La Commission est tenue de ne pas divulguer les informations qui, par leur nature, sont couvertes par le secret professionnel, et notamment les renseignements relatifs aux entreprises et concernant leurs relations commerciales ou les éléments de leur prix de revient. Sous cette réserve, elle doit publier les données qui sont susceptibles d’être utiles aux gouvernements ou à tous autres intéressés.

La Commission peut prononcer, à l’encontre des entreprises qui se soustrairaient aux obligations résultant pour elles des décisions prises en application des dispositions du présent article ou qui fourniraient sciemment des informations fausses, des amendes, dont le montant maximum sera de 1 % du chiffre d’affaires annuel, et des astreintes, dont le montant maximum sera de 5 % du chiffre d’affaires journalier moyen par jour de retard.

Toute violation par la Commission du secret professionnel ayant causé un dommage à une entreprise pourra faire l’objet d’une action en indemnité devant la Cour, dans les conditions prévues à l’article 40. »

3        L’article 65 CA disposait :

« 1. Sont interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d’association d’entreprises et toutes pratiques concertées qui tendraient, sur le marché commun, directement ou indirectement, à empêcher, restreindre ou fausser le jeu normal de la concurrence et en particulier :

a)      à fixer ou déterminer les prix ;

b)      à restreindre ou à contrôler la production, le développement technique ou les investissements ;

c)      à répartir les marchés, produits, clients ou sources d’approvisionnement.

[…]

4. Les accords ou décisions interdits en vertu du paragraphe 1 du présent article sont nuls de plein droit et ne peuvent être invoqués devant aucune juridiction des États membres.

La Commission a compétence exclusive, sous réserve des recours devant la Cour, pour se prononcer sur la conformité avec les dispositions du présent article desdits accords ou décisions.

5. La Commission peut prononcer contre les entreprises qui auraient conclu un accord nul de plein droit, appliqué ou tenté d’appliquer, par voie d’arbitrage, dédit, boycott ou tout autre moyen, un accord ou une décision nuls de plein droit ou un accord dont l’approbation a été refusée ou révoquée, ou qui obtiendraient le bénéfice d’une autorisation au moyen d’informations sciemment fausses ou déformées, ou qui se livreraient à des pratiques contraires aux dispositions du paragraphe 1, des amendes et astreintes au maximum égales au double du chiffre d’affaires réalisé sur les produits ayant fait l’objet de l’accord, de la décision ou de la pratique contraires aux dispositions du présent article, sans préjudice, si cet objet est de restreindre la production, le développement technique ou les investissements, d’un relèvement du maximum ainsi déterminé à concurrence de 10 % du chiffre d’affaires annuel des entreprises en cause, en ce qui concerne l’amende, et de 20 % du chiffre d’affaires journalier, en ce qui concerne les astreintes. »

4        Conformément à l’article 97 CA, le traité CECA a expiré le 23 juillet 2002.

 Dispositions du traité CE

5        L’article 305, paragraphe 1, CE énonçait :

« Les dispositions du présent traité ne modifient pas celles du traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l’acier, notamment en ce qui concerne les droits et obligations des États membres, les pouvoirs des institutions de cette Communauté et les règles posées par ce traité pour le fonctionnement du marché commun du charbon et de l’acier. »

 Règlement n° 1/2003

6        Aux termes de l’article 4 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO 2003, L 1, p. 1), « [p]our l’application des articles 81 [CE] et 82 [CE], la Commission dispose des compétences prévues par le présent règlement ».

7        L’article 7 du règlement n° 1/2003, intitulé « Constatation et cessation d’une infraction », prévoit :

« 1. Si la Commission, agissant d’office ou saisie d’une plainte, constate l’existence d’une infraction aux dispositions de l’article 81 [CE] ou 82 [CE], elle peut obliger par voie de décision les entreprises et associations d’entreprises intéressées à mettre fin à l’infraction constatée. [...] Lorsque la Commission y a un intérêt légitime, elle peut également constater qu’une infraction a été commise dans le passé.

[...] »

8        L’article 11, paragraphe 1, du règlement n° 1/2003 se lit comme suit :

« La Commission et les autorités de concurrence des États membres appliquent les règles communautaires de concurrence en étroite collaboration. »

9        L’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003 dispose :

« La Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises et associations d’entreprises lorsque, de propos délibéré ou par négligence:

a)      elles commettent une infraction aux dispositions de l’article 81 [CE] ou [de l’article] 82 [CE…] »

10      L’article 27, paragraphe 1, du règlement n° 1/2003 énonce ce qui suit :

« Avant de prendre les décisions prévues aux articles 7, 8 et 23 et à l’article 24, paragraphe 2, la Commission donne aux entreprises et associations d’entreprises visées par la procédure menée par la Commission l’occasion de faire connaître leur point de vue au sujet des griefs retenus par la Commission. La Commission ne fonde ses décisions que sur les griefs au sujet desquels les parties concernées ont pu faire valoir leurs observations. Les plaignants sont étroitement associés à la procédure. »

11      Aux termes de l’article 33 du règlement n° 1/2003, « avant de publier un projet de disposition et d’adopter celle-ci, la Commission consulte le comité consultatif en matière d’ententes et de positions dominantes ».

 Règlement n° 773/2004

12      L’article 10 du règlement (CE) n° 773/2004 de la Commission, du 7 avril 2004, relatif aux procédures mises en œuvre par la Commission en application des articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO L 123, p. 18), dispose :

« 1. La Commission informe par écrit les parties concernées des griefs soulevés à leur encontre. La communication des griefs est notifiée à chacune d’elles.

2. Lors de la notification de la communication des griefs, la Commission donne aux parties concernées la possibilité de l’informer par écrit de leur point de vue dans un délai qu’elle fixe. La Commission n’est pas tenue de prendre en considération les observations écrites reçues après l’expiration de ce délai.

3. Dans leurs observations écrites, les parties peuvent exposer tous les faits dont elles ont connaissance et qui entrent en ligne de compte dans leur défense contre les griefs soulevés par la Commission. Elles joignent en annexe tout document attestant les faits exposés […] »

13      L’article 14 du règlement n° 773/2004 prévoit :

« 1. Les auditions sont conduites en toute indépendance par un conseiller-auditeur.

2. La Commission invite les personnes qui doivent être entendues à assister à l’audition à la date qu’elle fixe.

3. La Commission invite les autorités de concurrence des États membres à prendre part à l’audition. Elle peut également inviter les fonctionnaires et agents d’autres autorités des États membres. »

 Communication de la Commission sur certains aspects du traitement des affaires de concurrence résultant de l’expiration du traité CECA

14      Le 18 juin 2002, la Commission des Communautés européennes a adopté la communication sur certains aspects du traitement des affaires de concurrence résultant de l’expiration du traité CECA (JO C 152, p. 5, ci-après la « communication du 18 juin 2002 »).

15      Au paragraphe 2 de la communication du 18 juin 2002, il est précisé que l’objet de celle-ci est :

« […]

–        de récapituler, à l’intention des opérateurs économiques et des États membres dans la mesure où ils sont concernés par le traité CECA et son droit dérivé, les modifications les plus importantes du droit matériel et procédural découlant de la transition vers le régime du traité CE […],

–        d’expliquer comment la Commission entend régler les problèmes spécifiques posés par la transition du régime CECA au régime CE dans le domaine des ententes et des abus de position dominante […], du contrôle des concentrations […] et du contrôle des aides d’État. »

16      Le paragraphe 31 de la communication du 18 juin 2002, qui figure dans la subdivision consacrée aux problèmes spécifiques posés par la transition du régime du traité CECA au régime du traité CE, est libellé comme suit :

« Si, dans l’application des règles communautaires de la concurrence à des accords, la Commission constate une infraction dans un domaine relevant du traité CECA, le droit matériel applicable est, quelle que soit la date d’application, celui en vigueur au moment où les faits constitutifs de l’infraction se sont produits. En tout état de cause, sur le plan procédural, le droit applicable après l’expiration du traité CECA sera le droit CE […] »

 Objet du litige

17      La présente affaire a pour objet un recours tendant à obtenir l’annulation de la décision C (2009) 7492 final de la Commission, du 30 septembre 2009, relative à une procédure d’application de l’article 65 CA (affaire COMP/37.956 – Ronds à béton armé, réadoption) (ci-après la « première décision »), telle que complétée et modifiée par la décision C (2009) 9912 final de la Commission, du 8 décembre 2009 (ci-après la « décision modificative ») (la première décision, telle qu’elle a été modifiée par la décision modificative, étant ci-après dénommée la « décision attaquée »), par laquelle la Commission a infligé à Industrie Riunite Odolesi SpA (IRO) (ci-après « IRO » ou la « requérante ») une amende de 3,58 millions d’euros, pour violation de l’article 65, paragraphe 1, CA.

18      Dans la décision attaquée, la Commission a considéré que les sociétés suivantes avaient enfreint l’article 65 CA :

–        Alfa Acciai SpA (ci-après « Alfa ») ;

–        Feralpi Holding SpA (ci-après « Feralpi ») ;

–        Ferriere Nord SpA ;

–        IRO ;

–        Leali SpA et Acciaierie e Ferriere Leali Luigi SpA, en liquidation (ci-après « AFLL ») (ces deux sociétés étant ci-après dénommées ensemble « Leali-AFLL ») ;

–        Lucchini SpA et SP SpA, en liquidation (ces deux sociétés étant ci-après dénommées ensemble « Lucchini-SP ») ;

–        Riva Fire SpA (ci-après « Riva ») ;

–        Valsabbia Investimenti SpA et Ferriera Valsabbia SpA (ces deux sociétés étant ci-après dénommées ensemble « Valsabbia »).

 Présentation de la requérante et antécédents du litige

19      La requérante est une entreprise dont le siège est sis à Odolo (Italie) qui est active dans le secteur des ronds à béton en Italie depuis 1952 (considérant 89 de la première décision).

20      D’octobre à décembre 2000, la Commission a effectué, conformément à l’article 47 CA, des vérifications auprès des entreprises italiennes productrices de ronds à béton et auprès d’une association d’entreprises sidérurgiques italiennes. Elle leur a également adressé des demandes de renseignements, en vertu de l’article 47 CA (considérant 114 de la première décision).

21      Le 26 mars 2002, la Commission a ouvert la procédure administrative et a formulé des griefs au titre de l’article 36 CA (ci-après la « communication des griefs ») (considérant 114 de la première décision). La requérante a présenté des observations écrites sur la communication des griefs. Une audition a eu lieu le 13 juin 2002 (considérant 118 de la première décision).

22      Le 12 août 2002, la Commission a formulé des griefs supplémentaires (ci-après la « communication des griefs supplémentaires »), adressés aux destinataires de la communication des griefs initiale. Dans la communication des griefs supplémentaires, fondée sur l’article 19, paragraphe 1, du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81 CE] et [82 CE] (JO 1962, 13, p. 204), la Commission a expliqué sa position concernant la poursuite de la procédure après l’expiration du traité CECA. Un délai a été accordé aux entreprises concernées pour la présentation de leurs observations et une seconde audition en présence des représentants des États membres a eu lieu le 30 septembre 2002 (considérant 119 de la première décision).

23      À l’issue de la procédure, la Commission a adopté la décision C (2002) 5087 final, du 17 décembre 2002, relative à une procédure d’application de l’article 65 CA (affaire COMP/37.956 – Ronds à béton) (ci-après la « décision de 2002 »), par laquelle elle a constaté que les entreprises destinataires de celle-ci avaient mis en œuvre une entente unique, complexe et continue sur le marché italien des ronds à béton en barres ou en rouleaux, qui avait pour objet ou pour effet la fixation des prix et qui avait également donné lieu à une limitation ou à un contrôle concertés de la production ou des ventes, contraire à l’article 65, paragraphe 1, CA (considérant 121 de la première décision). La Commission a, dans cette décision, infligé à la requérante une amende d’un montant de 3,58 millions d’euros.

24      Le 27 février 2003, la requérante a formé un recours devant le Tribunal contre la décision de 2002. Par arrêt du 25 octobre 2007, SP e.a./Commission (T‑27/03, T‑46/03, T‑58/03, T‑79/03, T‑80/03, T‑97/03 et T‑98/03, Rec. p. II‑4331), le Tribunal a annulé la décision de 2002. Le Tribunal a relevé que, eu égard notamment au fait que la décision de 2002 ne comportait aucune référence à l’article 3 et à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, cette décision était fondée uniquement sur l’article 65, paragraphes 4 et 5, CA (arrêt SP e.a./Commission, précité, point 101). Dès lors que ces dispositions avaient expiré le 23 juillet 2002, la Commission ne pouvait plus tirer de compétence de celles-ci, éteintes au moment de l’adoption de la décision de 2002, pour constater une infraction à l’article 65, paragraphe 1, CA et pour imposer des amendes aux entreprises qui auraient participé à ladite infraction (arrêt SP e.a./Commission, précité, point 120).

25      Par lettre du 30 juin 2008, la Commission a informé la requérante et les autres entreprises concernées de son intention de réadopter une décision, en modifiant la base juridique par rapport à celle qui avait été choisie pour la décision de 2002. Elle a en outre précisé que, compte tenu de la portée limitée de l’arrêt SP e.a./Commission, point 24 supra, la décision réadoptée serait fondée sur les preuves présentées dans la communication des griefs et dans la communication des griefs supplémentaires. Un délai a été accordé aux entreprises concernées pour présenter leurs observations (considérants 6 et 123 de la première décision).

 Première décision

26      Le 30 septembre 2009, la Commission a adopté la première décision, laquelle a été notifiée à la requérante par lettre du 2 octobre 2009.

27      Dans la première décision, la Commission a constaté que les restrictions de la concurrence visées dans celle-ci avaient pour origine une entente entre producteurs italiens de ronds à béton et entre ces derniers et leur association, qui avait eu lieu durant la période comprise entre 1989 et 2000 et qui avait eu pour objet ou pour effet de fixer ou de déterminer les prix et de limiter ou de contrôler la production ou les ventes par le biais de l’échange d’un nombre considérable d’informations relatives au marché des ronds à béton en Italie (considérants 7 et 399 de la première décision).

28      S’agissant de l’appréciation juridique des comportements en cause en l’espèce, en premier lieu, la Commission a souligné, aux considérants 353 à 369 de la première décision, que le règlement n° 1/2003 devait être interprété comme lui permettant de constater et de sanctionner, après le 23 juillet 2002, les ententes dans les secteurs relevant du champ d’application du traité CECA ratione materiae et ratione temporis. Au considérant 370 de la première décision, elle a indiqué que celle-ci avait été adoptée conformément aux règles procédurales du traité CE et du règlement n° 1/2003. Aux considérants 371 à 376 de la première décision, la Commission a par ailleurs rappelé que les principes qui régissent la succession des règles dans le temps pouvaient conduire à l’application de dispositions matérielles qui ne sont plus en vigueur au moment de l’adoption d’un acte par une institution de l’Union européenne, sous réserve de l’application du principe général de la lex mitior, en vertu duquel une personne ne peut être sanctionnée pour un fait qui ne constitue pas un délit au sens de la législation entrée en vigueur postérieurement. Elle a conclu que, en l’espèce, le traité CE n’était pas in concreto plus favorable que le traité CECA et que, par conséquent, le principe de la lex mitior ne pouvait de toute façon pas être valablement invoqué pour contester l’application du traité CECA aux comportements en cause en l’espèce.

29      En deuxième lieu, s’agissant de l’application de l’article 65, paragraphe 1, CA, premièrement, la Commission a relevé que l’entente avait pour objet la fixation des prix en fonction de laquelle avait également été convenue la limitation ou le contrôle de la production ou des ventes. Selon la Commission, en ce qui concerne la fixation des prix, l’entente s’était essentiellement articulée autour des accords ou pratiques concertées relatifs au prix de base pendant la période allant du 15 avril 1992 au 4 juillet 2000 (et, jusqu’en 1995, autour des accords ou pratiques concertées relatifs aux délais de paiement) et autour des accords ou pratiques concertées relatifs aux « suppléments » pendant la période allant du 6 décembre 1989 au 1er juin 2000 (considérants 399 et 400 de la première décision).

30      Deuxièmement, s’agissant des effets sur le marché des pratiques restrictives en cause, la Commission a indiqué que, dès lors qu’il était question d’une entente dont l’objectif était d’empêcher, de limiter ou d’altérer le jeu normal de la concurrence, il n’était pas nécessaire de vérifier qu’elle avait produit des effets sur le marché (considérant 512 de la première décision). Elle a toutefois estimé que l’entente avait eu des effets concrets sur le marché (considérants 513 à 518 de la première décision). En particulier, la Commission a conclu que l’entente avait influencé le prix de vente pratiqué par les producteurs de ronds à béton en Italie, même si les mesures prises au sein de l’entente n’avaient pas toujours immédiatement produit les résultats espérés par les entreprises qui y participaient. En outre, selon la Commission, il a pu y avoir eu des phénomènes aux effets différés. Par ailleurs, les entreprises en cause représentaient environ 21 % du marché italien des ronds à béton en 1989, 60 % en 1995 et environ 83 % en 2000, ce qui indiquerait un effet croissant sur le marché des augmentations de prix concertées. La Commission a enfin souligné que le fait que les initiatives prises en cette matière étaient, dès 1989, communiquées à l’ensemble des producteurs de ronds à béton avait accru l’importance de ces effets également durant les premières années de l’entente (considérant 519 de la première décision).

31      En troisième lieu, la Commission a identifié les destinataires de la première décision. Pour ce qui concerne la requérante, la Commission a indiqué, au considérant 534 de la première décision, qu’IRO était la même entreprise et la même personne morale, avec la même raison sociale, qui avait mis à exécution les comportements en cause, en sorte qu’elle était destinataire de la première décision.

32      En quatrième lieu, la Commission a considéré que l’article 65, paragraphe 2, CA et l’article 81, paragraphe 3, CE étaient inapplicables en l’espèce (considérants 567 à 570 de la première décision). Elle a également souligné que les règles en matière de prescription énoncées à l’article 25 du règlement n° 1/2003 ne l’empêchaient pas d’adopter la première décision (considérants 571 à 574 de la première décision).

33      En cinquième lieu, s’agissant du calcul du montant des amendes infligées en l’espèce, la Commission a indiqué que, en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, elle pouvait infliger des amendes aux entreprises qui avaient violé les règles de concurrence. Le plafond du montant des amendes prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 étant différent de celui fixé à l’article 65, paragraphe 5, CA, la Commission a indiqué qu’elle appliquerait le plafond le plus bas, conformément au principe de la lex mitior (considérant 576 de la première décision). Elle a également indiqué que, ainsi qu’elle en avait informé les entreprises concernées par lettre du 30 juin 2008, elle avait décidé d’appliquer, en l’espèce, les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et de l’article 65, paragraphe 5, [CA] (JO 1998, C 9, p. 3, ci-après les « lignes directrices de 1998 »). Elle a ajouté que, en l’espèce, toutefois, elle tiendrait compte du fait qu’elle avait déjà décidé du montant des amendes qu’elle comptait infliger aux entreprises en cause lors de l’adoption de la décision de 2002 (considérants 579 et 580 de la première décision).

34      Premièrement, la Commission a considéré qu’une entente ayant pour objet la fixation des prix, mise en œuvre de différentes manières, notamment en ayant recours à la limitation ou au contrôle de la production ou des ventes, constituait une infraction très grave au droit de la concurrence de l’Union (considérant 591 de la première décision). La Commission a rejeté les arguments des entreprises en cause selon lesquels la gravité de l’infraction serait atténuée eu égard aux effets concrets limités sur le marché et au contexte économique dans lequel celles-ci auraient évolué (considérants 583 à 596 de la première décision). Selon la Commission, sans préjudice du caractère très grave de l’infraction, elle a tenu compte, lors de la détermination du montant de base de l’amende, des caractéristiques spécifiques de la présente affaire, en l’occurrence le fait qu’elle portait sur un marché national qui était soumis, à l’époque des faits, à une réglementation particulière du traité CECA et sur lequel les entreprises destinataires de la première décision détenaient, dans les premiers temps de l’infraction, des parts limitées (considérant 599 de la première décision).

35      Deuxièmement, la Commission a considéré le poids spécifique de chaque entreprise et a classé celles-ci en fonction de leur importance relative sur le marché en cause. Dès lors que les parts de marché relatives atteintes par les destinataires de la première décision au cours de la dernière année complète de l’infraction (1999) n’avaient pas été considérées par la Commission comme représentatives de la présence effective de ces dernières sur le marché en cause au cours de la période de référence, la Commission a distingué, sur la base des parts de marché moyennes au cours de la période 1990-1999, trois groupes d’entreprises, à savoir, tout d’abord, Feralpi et Valsabbia, à qui elle a appliqué un montant de départ de l’amende de 5 millions d’euros, ensuite, Lucchini-SP, Alfa, Riva et Leali-AFLL, à qui elle a appliqué un montant de départ de l’amende de 3,5 millions d’euros, et, enfin, IRO et Ferriere Nord, à qui elle a appliqué un montant de départ de 1,75 million d’euros (considérants 599 à 602 de la première décision).

36      Afin d’assurer à l’amende un effet suffisamment dissuasif, la Commission a augmenté le montant de départ de l’amende de Lucchini-SP de 200 % et celui de Riva de 375 % (considérants 604 et 605 de la première décision).

37      Troisièmement, la Commission a estimé que l’entente avait duré du 6 décembre 1989 au 4 juillet 2000. S’agissant de la participation de la requérante à l’infraction, la Commission a relevé que celle-ci s’était étendue du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000 (considérant 606 de la première décision).

38      L’infraction ayant duré plus de dix ans et six mois pour l’ensemble des entreprises, à l’exception de Ferriere Nord, le montant de départ de l’amende a été augmenté de 105 % pour toutes les entreprises, à l’exception de Ferriere Nord, dont le montant de départ a été majoré de 70 %. Les montants de base des amendes ont, partant, été fixés comme suit :

–        Feralpi : 10,25 millions d’euros ;

–        Valsabbia : 10,25 millions d’euros ;

–        Lucchini-SP : 14,35 millions d’euros ;

–        Alfa : 7,175 millions d’euros ;

–        Riva : 26,9 millions d’euros ;

–        Leali-AFLL : 7,175 millions d’euros ;

–        IRO : 3,58 millions d’euros ;

–        Ferriere Nord : 2,97 millions d’euros (considérants 607 et 608 de la première décision).

39      Quatrièmement, pour ce qui concerne les circonstances aggravantes, la Commission a relevé que Ferriere Nord avait déjà été destinataire d’une décision de la Commission, adoptée le 2 août 1989, pour sa participation à une entente portant sur la fixation des prix et la limitation des ventes dans le secteur des treillis soudés et a augmenté de 50 % le montant de base de son amende. Aucune circonstance atténuante n’a été retenue par la Commission (considérants 609 à 623 de la première décision).

40      Cinquièmement, s’agissant de la détermination du montant maximal de l’amende conformément à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, la Commission a estimé que le montant de l’amende imposé aux entreprises en cause n’excédait pas le plafond de 10 % du chiffre d’affaires réalisé pour les produits relevant du traité CECA sur le territoire de l’Union en 2007 (considérants 630 à 632 de la première décision).

41      Sixièmement, s’agissant de l’application de la communication concernant la non-imposition d’amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 1996, C 207, p. 4), la Commission a indiqué que Ferriere Nord lui avait fourni des indications utiles qui lui avaient permis de mieux comprendre le fonctionnement de l’entente avant l’envoi de la communication des griefs, en sorte qu’elle lui avait octroyé une réduction de 20 % du montant de son amende. La Commission a considéré que les autres entreprises en cause n’avaient pas satisfait aux conditions de ladite communication (considérants 633 à 641 de la première décision).

42      Le dispositif de la première décision se lit comme suit :

« Article premier

Les entreprises suivantes ont enfreint l’article 65, paragraphe 1, [CA] en participant, au cours des périodes indiquées, à un accord continu et/ou à des pratiques concertées concernant les ronds à béton en barres ou en rouleaux, qui avaient pour objet et/ou pour effet la fixation des prix et la limitation et/ou le contrôle de la production ou des ventes sur le marché commun :

–        [Leali-AFLL], du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000 ;

–        [Alfa], du 6 décembre 1989 au 4 juillet 2000 ;

–        [Ferriera Valsabbia et Valsabbia Investimenti], du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000 ;

–        [Feralpi], du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000 ;

–        [IRO], du 6 décembre 1989 au 4 juillet 2000 ;

–        [Lucchini-SP], du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000 ;

–        [Riva], du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000 ;

–        [Ferriere Nord], du 1er avril 1993 au 4 juillet 2000.

Article 2

Les amendes suivantes sont infligées pour les infractions visées à l’article 1er :

–        [Alfa] : 7,175 millions d’EUR ;

–        [Feralpi] : 10,25 millions d’EUR ;

–        [Ferriere Nord] : 3,57 millions d’EUR ;

–        [IRO] : 3,58 millions d’EUR ;

–        [Leali et AFLL], solidairement : 6,093 millions d’EUR ;

–        [Leali] : 1,082 million d’EUR ;

–        [Lucchini et SP], solidairement : 14,35 millions d’EUR ;

–        [Riva] : 26,9 millions d’EUR ;

–        [Valsabbia Investimenti et Ferriera Valsabbia], solidairement : 10,25 millions d’EUR

[…] »

 Développements postérieurs à la notification de la première décision

43      Par lettres envoyées entre le 20 et le 23 novembre 2009, huit des onze sociétés destinataires de la première décision, à savoir la requérante, Alfa Acciai, Riva, Feralpi, Ferriere Nord, Lucchini, Ferriera Valsabbia, Valsabbia Investimenti, ont indiqué à la Commission que l’annexe de la première décision, telle que notifiée à ses destinataires, ne contenait pas les tableaux illustrant les variations de prix.

44      Le 24 novembre 2009, les services de la Commission ont informé tous les destinataires de la première décision qu’ils feraient le nécessaire pour qu’une décision contenant lesdits tableaux leur soit notifiée.

 Décision modificative

45      Le 8 décembre 2009, la Commission a adopté la décision modificative, qui intégrait dans son annexe les tableaux manquants et corrigeait les renvois numérotés auxdits tableaux dans huit notes en bas de page.

46      Le dispositif de la décision modificative portait modification des notes en bas de page nos 102, 127, 198, 264, 312, 362, 405 et 448 de la première décision. Les tableaux figurant en annexe de la décision modificative ont été ajoutés comme annexes de la première décision.

 Procédure et conclusions des parties

47      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 février 2010, la requérante a introduit le présent recours.

48      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision pour excès de pouvoir et violation de la loi, la Commission ayant infligé une sanction à IRO sans avoir examiné l’ensemble des documents sur lesquels se base la violation prétendument imputée à la société ;

–        annuler la décision pour défaut de pouvoir et incompétence manifeste de la Commission, et pour inexistence de la base juridique, la décision ayant été adoptée postérieurement à l’extinction du traité CECA, en l’absence de toute disposition des États membres ou des institutions compétentes attribuant à la Commission le pouvoir d’intervenir au titre du traité ayant expiré ;

–        annuler la décision pour excès de pouvoir, application erronée, contradictoire et inexacte du droit, en ce que la Commission a eu recours, aux fins de l’application de l’article 65 CA, aux règles de procédure prévues par le règlement n° 1/2003 alors que celles-ci sont réservées expressément et exclusivement à l’application des articles 81 et 82 CE (devenus articles 101 et 102 TFUE) ;

–        annuler la décision pour excès de pouvoir, application erronée, contradictoire et inexacte du droit, résultant de la violation des dispositions de procédure prévues par le règlement n° 1/2003, la Commission n’ayant entrepris aucune activité d’instruction telle que l’envoi aux parties de la communication des griefs et/ou l’audition des parties, ainsi qu’en raison de l’absence de participation des autorités nationales, ayant pour conséquence que la procédure tout entière de la Commission est incomplète, incohérente et illégale ;

–        annuler la décision pour excès de pouvoir tenant à un défaut d’instruction et de motivation, la définition du marché en cause étant, en conséquence, erronée, et les conditions et les effets de la prétendue entente, contradictoires et illogiques ;

–        à titre subsidiaire, annuler la décision pour violation de la loi imputable à un défaut d’instruction, dans la partie de ladite décision où IRO est tenue pour responsable d’une entente anticoncurrentielle au cours de la période 1989-1996, alors qu’il n’existe aucun élément prouvant sa participation à l’activité prétendument illicite, et, partant, réduire proportionnellement l’amende infligée à la requérante ;

–        à titre subsidiaire, annuler ou réduire l’amende infligée à IRO dans la décision, pour violation des principes d’égalité de traitement, de protection de la confiance légitime, de proportionnalité et d’adéquation dans la détermination de la sanction ;

–        en tout état de cause, condamner la Commission au paiement des dépens de l’instance.

49      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

50      La composition des chambres ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la deuxième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

51      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale dans la présente affaire et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure, a demandé à la Commission de produire des documents. Celle-ci y a déféré dans le délai imparti.

52      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 11 février 2014.

 En droit

53      Au soutien de son recours, la requérante invoque sept moyens. Le premier est tiré d’un excès de pouvoir et de la violation de la loi par la Commission, en raison du caractère incomplet de la décision adoptée de manière collégiale. Le deuxième est tiré du défaut de pouvoir et de l’incompétence manifeste de la Commission, y compris en raison de l’inexistence de la base juridique de la décision attaquée, du fait de l’extinction du traité CECA. Le troisième est tiré d’un excès de pouvoir et de la violation de la loi, du fait de l’utilisation du règlement n° 1/2003 aux fins de l’application des règles de concurrence relevant du traité CECA. Le quatrième est tiré d’un excès de pouvoir et d’une application erronée, contradictoire et inexacte du droit, du fait de la violation des règles de procédure prévues par les règlements nos 1/2003 et 773/2004, l’entière procédure suivie par la Commission étant, en conséquence, incomplète, incohérente et illégale. Le cinquième moyen est tiré d’un excès de pouvoir pour défaut d’instruction et absence de motivation, la définition du marché en cause ainsi que les conditions et les effets de la prétendue entente étant, en conséquence, erronés, contradictoires et illogiques. Le sixième moyen est tiré de la violation de la loi pour absence d’instruction, dans la mesure où IRO est tenue pour responsable d’une entente anticoncurrentielle au cours de la période 1989-1996, en l’absence de tout élément probant. Enfin, le septième moyen est tiré de la violation des principes d’égalité de traitement, de confiance légitime, de proportionnalité et d’adéquation dans la détermination du montant de la sanction.

 Sur le premier moyen, tiré d’un excès de pouvoir et de la violation de la loi par la Commission, en raison du caractère incomplet de la décision adoptée de manière collégiale

54      La requérante fait valoir que la première décision lui a initialement été notifiée sans les annexes qui y étaient mentionnées et qui contenaient les tableaux relatifs aux variations des prix des ronds à béton, alors que cet élément constituerait le fondement de la violation qui lui est imputée. D’une part, la Commission ne se serait jamais prononcée sur le texte complet de la décision attaquée. D’autre part, la requérante aurait été sanctionnée sur la base d’un document manifestement incomplet, puisque exempt d’un élément fondamental dans un cartel de prix présumé, à savoir les tableaux relatifs aux prix appliqués. Eu égard au principe de collégialité prévu par le règlement intérieur de la Commission (JO 2000, L 308, p. 26), l’adoption de la décision modificative pourrait être considérée comme suffisante pour remédier au vice ayant entaché la notification de l’acte à la requérante, mais pas pour réparer l’illégalité de la procédure d’adoption.

55      À titre liminaire, il y a lieu de constater que la première décision ne comportait pas ses annexes, parmi lesquelles figuraient plusieurs tableaux auxquels il était fait référence aux considérants 451 (tableau 13), 513 (tableaux 1 et 3), 515 (tableaux 1, 2 et 3), 516 (tableaux 9, 11 à 14 et 16) et 518 (tableaux 11, 12 et 14) ainsi qu’aux notes en bas de page nos 102 (tableaux 15 à 17), 127 (tableaux 18 à 21), 198 (tableaux 22 et 23), 264 (tableaux 24 et 25), 312 (tableau 26), 362 (tableau 27), 405 (tableau 28), 448 (tableaux 29 et 30) et 563 (ensemble des tableaux annexés à la décision) de la première décision. La Commission affirme à cet égard que les tableaux joints à la décision modificative ne feraient qu’illustrer, sous forme schématique et synthétique, les éléments déjà contenus dans la première décision.

56      En premier lieu, la requérante affirme que les tableaux qui ne figuraient pas en annexe de la première décision constituaient le fondement de la violation qui lui est imputée et que cette décision serait donc manifestement incomplète.

57      Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 15 CA doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêts du Tribunal du 24 septembre 1996, NALOO/Commission, T‑57/91, Rec. p. II‑239, point 298, et du 13 décembre 2001, Krupp Thyssen Stainless et Acciai speciali Terni/Commission, T‑45/98 et T‑47/98, Rec. p. II‑3757, point 129 ; voir également, par analogie, arrêts de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, point 63, et du 14 octobre 2010, Deutsche Telekom/Commission, C‑280/08 P, Rec. p. I‑9555, point 131, et la jurisprudence citée).

58      Par ailleurs, dans le cadre des décisions individuelles, il ressort d’une jurisprudence constante que l’obligation de motiver une décision individuelle a pour but, outre de permettre un contrôle judiciaire, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est éventuellement entachée d’un vice permettant d’en contester la validité (voir arrêt de la Cour du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, Rec. p. I‑8947, point 148, et la jurisprudence citée).

59      La motivation doit donc, en principe, être communiquée à l’intéressé en même temps que la décision lui faisant grief (arrêt Elf Aquitaine/Commission, point 58 supra, point 149).

60      Premièrement, s’agissant des tableaux 15 à 17 (mentionnés dans la note en bas de page n° 102 de la première décision), il y a lieu de constater qu’ils comportent, selon cette note en bas de page, la reproduction des « données concernant les modifications des prix des ‘suppléments de dimension’ qui ont caractérisé l’industrie des ronds à béton en Italie entre décembre 1989 et juin 2000 ». Ces tableaux sont mentionnés par la Commission au soutien de la première phrase du considérant 126 de la première décision, qui est libellée comme suit :

« Au cours de la première réunion dont la Commission a eu connaissance (celle du 6 décembre 1989, à l’[Association des industriels de Brescia]), les participants ont décidé à l’unanimité d’augmenter, à partir du lundi 11 décembre 1989, les suppléments liés au diamètre pour les ronds à béton, en barres et en rouleaux, destinés au marché italien (+ 10 ITL/kg pour les ‘suppléments’ de 14 à 30 mm, + 15 ITL/kg pour ceux de 8 à 12 mm, + 20 ITL/kg pour ceux de 6 mm ; augmentation générale de 5 ITL/kg pour le matériel en rouleaux). »

61      Il y a lieu de constater que la Commission a expressément indiqué, audit considérant, les augmentations des suppléments liés au diamètre pour les ronds à béton qui avaient été décidées par les participants à la réunion du 6 décembre 1989 ainsi que leur date d’entrée en vigueur. Par ailleurs, s’agissant des augmentations ultérieures qui, selon la note en bas de page n° 102 de la première décision, sont également reprises dans ces tableaux (dès lors qu’ils couvrent la période comprise entre 1989 et 2000), il doit être relevé qu’elles ne font pas l’objet du point 4.1 de la première décision, auquel se rapporte le considérant 126, relatif au comportement des entreprises entre 1989 et 1992. En tout état de cause, ces augmentations sont également mentionnées notamment aux considérants 126 à 128 et 133 (pour les années 1989-1992), 93 et 94 (pour les années 1993-1994), 149 à 151, 162 et 163 (pour 1995), 184 et 185 (pour 1996), 199, 200 et 213 (pour 1997), 269 (pour 1999) et 296 à 304 (pour 2000) ainsi qu’aux considérants 439 et 515 de la première décision.

62      Deuxièmement, en ce qui concerne les tableaux 18 à 21, mentionnés dans la note en bas de page n° 127 de la première décision , il y a lieu de constater qu’ils comportent, selon cette note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents concernant la période fin 1989/fin 1992, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ces tableaux sont mentionnés par la Commission au soutien du considérant 131 de la première décision, qui énonce ce qui suit :

« En ce qui concerne les prix de base des ronds à béton pratiqués durant la période d’application de l’accord susmentionné, notons qu’IRO et (l’ancienne) Ferriera Valsabbia SpA ont appliqué, à partir du 16 avril 1992, le prix de 210 ITL/kg et, à partir du 1er/6 mai 1992, celui de 225 ITL/kg. À partir du 1er/8 juin 1992, IRO, (l’ancienne) Ferriera Valsabbia SpA, Acciaieria di Darfo SpA et Acciaierie e Ferriere Leali Luigi SpA ont appliqué le prix de 235 ITL/kg ».

63      Il doit dès lors être constaté que, tout en s’appuyant sur cinq pages du dossier administratif, mentionnées dans la note en bas de page n° 126 de la première décision, la Commission a expressément indiqué, audit considérant, les prix de base qui avaient été fixés par les entreprises qui y étaient mentionnées ainsi que leur date d’entrée en vigueur. En outre, il doit être relevé que la Commission, au considérant 419 de la première décision, a considéré que le premier comportement relatif à la fixation du prix de base avait eu lieu au plus tard le 16 avril 1992. Les éventuelles données figurant dans les tableaux 18 à 21 de la première décision, relatives aux prix de base pour la période comprise, selon la note en bas de page n° 127 de la première décision, entre « fin 1989 » et le 16 avril 1992, sont partant sans pertinence pour la compréhension des griefs de la Commission figurant au considérant 131 de la première décision.

64      Troisièmement, s’agissant des tableaux 22 et 23, mentionnés dans la note en bas de page n° 198 de la première décision, il y a lieu de constater qu’ils comportent, selon ladite note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents concernant les années 1993 et 1994, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ces tableaux sont mentionnés par la Commission au soutien du considérant 145 de la première décision, qui est rédigé comme suit :

« Comme prévu dans la télécopie de la Federacciai du 25 novembre 1994, une nouvelle réunion s’est tenue le 1er décembre 1994 à Brescia, au cours de laquelle ont été prises les décisions précisées dans une autre télécopie de la Federacciai reçue par les entreprises le 5 décembre 1994. Ces décisions avaient pour objet :

–        les prix des ronds à béton (320 ITL/kg, base au départ de Brescia, avec effet immédiat) ;

–        les paiements (à partir du 1er janvier 1995, le délai maximum sera de 60/90 jours fin de mois ; à partir du 1er mars 1995, le délai sera limité à 60 jours) et les rabais ;

–        la production (obligation, pour chacune des entreprises, de communiquer à la Federacciai, avant le 7 décembre 1994, les poids en tonnes de ronds à béton produits en septembre, octobre et novembre 1994).

Alfa Acciai Srl a adopté le nouveau prix de base le 7 décembre 1994. Le 21 décembre 1994, Acciaieria di Darfo SpA l’a également adopté, et Alfa Acciai Srl a confirmé à nouveau le même prix. Le prix de base de [Lucchini-SP] relatif à janvier 1995 était aussi de 320 ITL/kg. »

65      À cet égard, il doit être souligné que les tableaux visés dans la note en bas de page n° 198 de la première décision ont été mentionnés par la Commission au soutien de son affirmation selon laquelle « Alfa Acciai Srl a[vait] adopté le nouveau prix de base le 7 décembre 1994 », « [l]e 21 décembre 1994, Acciaieria di Darfo SpA l’a[vait] également adopté, et Alfa Acciai Srl a[vait] confirmé à nouveau le même prix ». Or, le « nouveau prix de base » et le « même prix » auxquels il était fait référence étaient le prix de 320 lires italiennes par kilo (ITL/kg), mentionné au premier tiret dudit considérant. Les éventuelles données figurant dans les tableaux 22 et 23 de la première décision, relatives aux prix de base pour la période comprise entre 1993 et le 7 décembre 1994, sont dès lors sans pertinence pour la compréhension des griefs de la Commission figurant au considérant 145 de la première décision.

66      Quatrièmement, pour ce qui concerne les tableaux 24 et 25, mentionnés dans la note en bas de page n° 264 de la première décision, il y a lieu de constater qu’ils comportent, selon ladite note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents (et, pour Lucchini Siderurgica, également les données relatives à la situation mensuelle) concernant 1995, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ces tableaux sont mentionnés par la Commission au soutien du considérant 174 de la première décision, qui est rédigé comme suit :

« Par la suite, dans un document remontant aux premiers jours d’octobre 1995, en possession de la Federacciai (manuscrit de la secrétaire du directeur général faisant fonction), il est affirmé que :

–        la clientèle remettait en discussion les paiements (d’où la nécessité d’une communication qui réaffirme la fermeté sur les paiements) ;

–        depuis la semaine précédente, le prix des ronds à béton avait encore diminué de 5/10 ITL/kg, se situant ainsi autour de 260/270 ITL/kg dans la zone de Brescia, avec des cotations inférieures à 250 ITL/kg en dehors de cette zone ;

–        la situation du marché plutôt confuse rendait difficile la tâche de donner des chiffres précis pour le prix ; et

–        il fallait demander aux entreprises les données relatives aux commandes des semaines 39 (du 25 au 29 septembre 1995) et 40 (du 2 au 6 octobre 1995). »

67      Il doit ainsi être relevé que, au considérant 174 de la première décision, la Commission s’est limitée à rendre compte du contenu d’un document manuscrit de la secrétaire du directeur général faisant fonction, établi en octobre 1995. À cet égard, la Commission ne s’est référée aux tableaux 24 et 25 qu’au soutien de l’affirmation figurant dans ce document, selon laquelle « la situation du marché plutôt confuse rendait difficile la tâche de donner des chiffres précis pour le prix ». Les tableaux 24 et 25 apparaissent dès lors sans pertinence pour la compréhension des griefs de la Commission figurant au considérant 174 de la première décision.

68      Cinquièmement, s’agissant du tableau 26, mentionné dans la note en bas de page n° 312 de la première décision, il y a lieu de constater qu’il comporte, selon ladite note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents (et, pour Lucchini Siderurgica, également les données relatives à la situation mensuelle) concernant 1996, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ce tableau est mentionné par la Commission à l’appui de l’affirmation figurant au considérant 200 de la première décision selon laquelle, « [d]urant la période qui va du 22 octobre 1996 au 17 juillet 1997, il y a[vait] eu au moins douze réunions des responsables commerciaux des entreprises, qui [s’étaient] déroulées [… en particulier le] mardi 22 octobre 1996, où a[vaient] été confirmés pour le mois de novembre 1996 le prix de 230 ITL/kg base départ Brescia et le maintien de la cotation de 210 ITL/kg exclusivement pour les livraisons d’octobre ».

69      Force est partant de constater que, nonobstant l’absence du tableau 26 de la première décision, la Commission a expressément mentionné, au considérant 200 de celle-ci, les prix de base de la période en cause ainsi que le moment de leur entrée en vigueur.

70      Sixièmement, pour ce qui concerne le tableau 27, mentionné dans la note en bas de page n° 362 de la première décision, il comporte, selon ladite note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents (et, pour Lucchini Siderurgica, également les données relatives à la situation mensuelle) concernant 1997, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ce tableau est mentionné par la Commission au soutien de l’affirmation figurant au considérant 216 de la première décision, qui est libellé comme suit :

« Quoi qu’il en soit, [Lucchini-SP …], Acciaieria di Darfo SpA, Alfa Acciai Srl, Feralpi Siderurgica Srl, IRO, Riva Prodotti Siderurgici SpA et (l’ancienne) Ferriera Valsabbia SpA sont les sept entreprises auxquelles est destinée une communication (datée du 24 novembre 1997) de M. Pierluigi Leali, ayant pour objet l’‘accord prix-livraisons’ […] ‘Le prix de 270 ITL/kg n’a été demandé que par peu d’entreprises, en vain – continuait la communication –, alors qu’en réalité, la cotation s’est stabilisée à 260 ITL/kg, avec quelques pics inférieurs, comme beaucoup l’ont confirmé lors de la dernière réunion des responsables commerciaux. Nous notons toutefois avec une satisfaction partielle que la chute s’est arrêtée grâce au contingentement des livraisons que nous respectons tous et qui, conformément aux accords, sera vérifié par des inspecteurs externes nommés à cet effet.’ ‘En cette fin de mois – poursuivait encore la communication –, qui se traîne désormais par inertie, il est indispensable d’intervenir par un durcissement immédiat sur la cotation minimum de 260 ITL/kg (qui n’aura certainement pas d’influence sur les acquisitions peu nombreuses de cette période). Avec la planification des livraisons de décembre convenues (– 20 % par rapport à novembre), nous sommes certainement en mesure de maintenir le niveau de prix convenu ; il est toutefois indispensable – concluait M. Pierluigi Leali – que personne n’accepte de dérogations sur le prix minimum établi (260 ITL/kg).’ »

71      Il résulte ainsi du libellé dudit considérant que la Commission s’est limitée à reproduire les termes de la communication du 24 novembre 1997 qui y est mentionnée. Le tableau 27 apparaît dès lors sans pertinence pour la compréhension du grief de la Commission figurant au considérant 216 de la première décision.

72      Septièmement, s’agissant du tableau 28, mentionné dans la note en bas de page n° 405 de la première décision, il y a lieu de constater qu’il comporte, selon ladite note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents (et, pour Lucchini/Siderpotenza, également les données relatives à la situation mensuelle) concernant 1998, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ce tableau est mentionné par la Commission au soutien de l’affirmation figurant au considérant 241 de la première décision, lequel est libellé comme suit :

« Le 11 septembre 1998, M. Pierluigi Leali a envoyé une communication […] dans laquelle, en référence à l’intention exprimée (au cours d’une rencontre le 9 septembre 1998) de maintenir la cotation minimum à ‘170 ITL base départ’ ???, on notait ‘des comportements anormaux, à savoir des cotations inférieures en moyenne de 5 ITL/kg au niveau établi, et qui étaient encore plus importantes dans certaines zones du Sud’. ‘Pour notre part – écrivait M. Pierluigi Leali – le niveau minimum convenu est maintenu grâce à une réduction en conséquence du flux de commandes.’      ‘Nous espérons – concluait la communication – que, lors de la réunion des responsables commerciaux de ce mardi 15, l’on pourra observer une bonne tenue des prix, en mesure de faire remonter éventuellement la cotation.’ »

73      Il ressort donc des termes mêmes dudit considérant que la Commission s’est limitée à reproduire le contenu de la communication du 11 septembre 1998 qui y est mentionnée. Le tableau 28 apparaît dès lors sans pertinence pour la compréhension du grief de la Commission figurant au considérant 241 de la première décision.

74      Huitièmement, s’agissant des tableaux 29 et 30, mentionnés dans la note en bas de page n° 448 de la première décision, il y a lieu de constater qu’ils comportent, selon ladite note, la reproduction des « données relatives aux prix de base des barèmes ou communiquées aux agents (et, pour Lucchini/Siderpotenza, également les données relatives à la situation mensuelle) concernant 1999, et dont la Commission [étai]t en possession ». Ces tableaux sont mentionnés par la Commission au soutien de l’affirmation figurant au considérant 276 de la première décision, lequel se lit comme suit :

« Des informations supplémentaires sur la situation du marché des ronds à béton en Italie durant cette période sont contenues dans un document rédigé par Leali le 10 novembre 1999, et en particulier dans la section intitulée ‘Bénéfices et limites de l’accord commercial de 1999’, où l’on peut lire : ‘L’accord de base conclu entre les producteurs nationaux a permis, durant l’année 1999, d’inverser la situation de faiblesse des prix qui avait caractérisé les deux exercices précédents (1997 et 1998) et de récupérer plus de 50 ITL/kg brut de marge. Durant l’année 1998, la marge brute moyenne (prix de vente – coût des matières premières) était de 70 ITL/kg, et pendant 5 mois, elle était descendue sous ce seuil’. ‘L’accord obtenu a permis de stabiliser les prix de vente en cours d’année, et les producteurs ont pu bénéficier de la situation des coûts de la matière première, en accroissant la marge brute de plus de 50 ITL/kg, pour la porter à 122 ITL/kg net.’»

75      Il ressort donc du libellé du considérant 276 de la première décision que la Commission s’est limitée à reproduire le contenu de la communication du 11 septembre 1998 qui y est mentionnée. L’absence des tableaux 29 et 30 est dès lors sans incidence sur la compréhension du grief de la Commission figurant au considérant 276 de la première décision.

76      Neuvièmement, le tableau 13, mentionné au considérant 451 de la première décision, est cité au soutien de l’affirmation selon laquelle, « [e]n ce qui concerne l’année 1997, il convient de constater qu’elle a[vait] été caractérisée, au cours de son premier semestre, par une augmentation constante du prix de base fixé par l’entente anticoncurrentielle : 190 ITL/kg, fixé lors de la réunion du 30 janvier ; 210 ITL/kg, fixé lors de la réunion du 14 février ; 250 ITL/kg, fixé lors de la réunion du 10 juillet (considérant 200) », et selon laquelle, « [a]u cours de la même période, le prix de base moyen de marché a[vait], lui aussi, augmenté constamment, passant des 170 ITL/kg de janvier aux 240 ITL/kg de juillet (tableau 13 en annexe) ; en septembre de la même année, le prix de base moyen de marché a encore augmenté, pour atteindre les 290 ITL/kg (tableau 13 en annexe) ». Il y a dès lors lieu de constater que la Commission a expressément indiqué, audit considérant, les augmentations du prix de base relatives à l’année 1997, en sorte que ledit tableau n’apparaît pas indispensable à la compréhension du raisonnement de la Commission.

77      Dixièmement, il doit être relevé que, au considérant 496 de la première décision (note en bas de page n° 563 de la première décision), la Commission s’est référée, de manière globale, aux « tableaux annexés à la présente décision », aux fins de soutenir l’affirmation selon laquelle « [s]es informations […] montr[ai]ent que toutes les entreprises impliquées dans la présente procédure [avaie]nt publié des barèmes durant la période en cause ». Il y a toutefois lieu de souligner que le considérant 496 de la première décision fait également référence aux considérants 419 à 433 de celle-ci, qui « dressent la liste de toutes les occasions avérées où le prix de base a fait l’objet de discussions entre les entreprises (y compris l’association) ». À cet égard, la Commission a précisé que, « [p]armi ces occasions, certaines [avaie]nt déjà été mentionnées lorsque le concours de volontés a[vait] été évoqué (considérants 473 à 475) », que, « [p]our les autres occasions, entre 1993 et 2000, il [fallait] recourir à la notion de concertation » et que « [l]’objet de cette concertation était d’influer sur le comportement des producteurs sur le marché et de rendre public le comportement que chacun d’entre eux se proposait d’adopter concrètement en matière de détermination du prix de base ». L’ensemble des tableaux annexés à la première décision n’apparaissent donc pas indispensables à la compréhension du grief de la Commission.

78      Onzièmement, pour ce qui concerne les références aux tableaux 1 à 3, 9, 11 à 14 et 16 aux considérants 513, 515, 516 et 518 de la première décision, il doit être souligné que lesdits considérants s’insèrent dans la subdivision de la première décision relative aux effets sur le marché des pratiques restrictives et qu’il résulte de l’analyse de ces considérants que les tableaux qui y sont mentionnés soit ne font que reprendre les données chiffrées qui y sont mentionnées, soit ne sont pas indispensables à la compréhension du raisonnement de la Commission s’agissant des effets de l’entente.

79      Eu égard aux considérations qui précèdent, la requérante ne saurait affirmer qu’elle a été sanctionnée sur la base d’un document manifestement incomplet.

80      En second lieu, il doit être rappelé que le dispositif et les motifs d’une décision, qui doit être obligatoirement motivée en vertu de l’article 15 CA, constituent un tout indivisible, de sorte qu’il appartient uniquement au collège des membres de la Commission, en vertu du principe de collégialité, d’adopter à la fois l’un et les autres, toute modification des motifs dépassant une adaptation purement orthographique et grammaticale étant du ressort exclusif du collège (voir, par analogie, arrêts de la Cour du 15 juin 1994, Commission/BASF e.a., C‑137/92 P, Rec. p. I‑2555, points 66 à 68, et du Tribunal du 18 janvier 2005, Confédération nationale du Crédit mutuel/Commission, T‑93/02, Rec. p. II‑143, point 124).

81      En l’espèce, il y a lieu de considérer que l’absence, en annexe de la première décision, des tableaux cités au point 55 ci-dessus ne saurait entraîner l’illégalité de celle-ci que si une telle absence n’avait pas permis au collège des membres de la Commission de sanctionner la conduite visée à l’article 1er de la première décision en pleine connaissance de cause, c’est-à-dire sans avoir été induit en erreur sur un point essentiel par des inexactitudes ou des omissions (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 10 juillet 1991, RTE/Commission, T‑69/89, Rec. p. II‑485, points 23 à 25 ; du 27 novembre 1997, Kaysersberg/Commission, T‑290/94, Rec. p. II‑2137, point 88 ; du 15 mars 2000, Cimenteries CBR e.a./Commission, T‑25/95, T‑26/95, T‑30/95 à T‑32/95, T‑34/95 à T‑39/95, T‑42/95 à T‑46/95, T‑48/95, T‑50/95 à T‑65/95, T‑68/95 à T‑71/95, T‑87/95, T‑88/95, T‑103/95 et T‑104/95, Rec. p. II‑491, point 742, et du 17 février 2011, Zhejiang Xinshiji Foods et Hubei Xinshiji Foods/Conseil, T‑122/09, non publié au Recueil, points 104 et 105).

82      Dès lors que, indépendamment de l’absence des tableaux susmentionnés, les éléments sur lesquels la première décision est fondée sont exposés à suffisance de droit dans le texte même de celle-ci (voir points 60 à 79 ci-dessus), il ne saurait être affirmé que le collège des membres de la Commission ne disposait pas, lors de l’adoption de la première décision, d’une connaissance pleine et entière des éléments sur la base desquels la mesure reposait. Il s’ensuit que le collège a sanctionné la conduite visée à l’article 1er de la première décision en pleine connaissance de cause. Une telle omission n’est dès lors pas susceptible d’avoir vicié le processus d’adoption de la décision attaquée et de mettre ainsi en cause la légalité de celle-ci.

83      Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter le présent moyen.

 Sur les deuxième et troisième moyens, tirés, pour l’un, du défaut de pouvoir et de l’incompétence manifeste de la Commission, y compris en raison de l’inexistence de la base juridique de la décision attaquée, du fait de l’extinction du traité CECA, et, pour l’autre, d’un excès de pouvoir et de la violation de la loi, du fait de l’utilisation du règlement n° 1/2003 aux fins de l’application des règles de concurrence relevant du traité CECA

84      Il convient d’examiner ensemble le deuxième moyen, tiré du défaut de pouvoir et de l’incompétence manifeste de la Commission, y compris en raison de l’inexistence de la base juridique de la décision attaquée, du fait de l’extinction du traité CECA, et le troisième moyen, tiré d’un excès de pouvoir et de la violation de la loi, du fait de l’utilisation du règlement n° 1/2003 aux fins de l’application des règles de concurrence relevant du traité CECA, lesquels soulèvent en substance la question de la compétence de la Commission pour adopter la décision attaquée.

85      Le deuxième moyen de la requérante comporte trois branches.

86      Dans le cadre de la première branche, la requérante invoque l’incompatibilité de la décision attaquée avec les règles du droit international et celles du droit de l’Union. Selon la requérante, il conviendrait de partir du postulat de l’extinction, à caractère automatique, pendant la procédure d’instruction, de la norme sur laquelle sont fondées les poursuites et de l’ordre juridique à laquelle celle-ci appartenait. Tandis que la Commission concentrerait son analyse sur les principes régissant la succession des lois dans le temps, il conviendrait de déterminer si la Commission a conservé ou non, après le 23 juillet 2002, le pouvoir d’appliquer l’article 65 CA ou toute autre disposition de ce traité. Tel ne serait pas le cas, les dispositions instituant les différents organes de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) et attribuant à ceux-ci des compétences à l’égard des personnes et des États en vue de la gestion de celle-ci étant éteintes. Les considérations de la Commission relatives, d’une part, à la prétendue unicité de l’ordre juridique communautaire à l’intérieur duquel le traité CECA constituerait une lex specialis et, d’autre part, à l’adoption le 8 avril 1965 du traité de fusion des exécutifs seraient dépourvues de pertinence.

87      S’agissant de l’unicité de l’ordre juridique communautaire, l’article 305 CE établirait expressément l’autonomie complète des champs d’application respectifs des deux traités et la Commission aurait clairement soutenu, par le passé, la thèse de l’autonomie et de la séparation des traités. En tout état de cause, l’existence d’un ordre juridique unique ne serait pas susceptible de modifier l’appréciation relative à l’illégalité absolue de l’action de la Commission. Il serait impossible de soutenir qu’une partie de la réglementation CECA et une partie de la réglementation de la Communauté européenne (CE) puissent s’appliquer à un même cas d’espèce, et encore moins qu’un organe du « système CE » puisse appliquer le droit matériel du « système CECA ». Les arrêts relatifs aux rapports entre les traités CECA et CE ne seraient jamais allés jusqu’à considérer que les dispositions des deux ordres juridiques étaient interchangeables. Le Tribunal aurait d’ailleurs confirmé, dans l’arrêt SP e.a./Commission, point 24 supra, que la nature de lex specialis du traité CECA ne saurait servir de fondement à la compétence de la Commission. Il ne s’agirait pas, en l’espèce, de déterminer les règles qui s’appliqueront dans le futur aux produits anciennement CECA, mais de comprendre comment la Commission a pu appliquer les dispositions de l’ordre juridique CECA, alors que celles-ci avaient disparu lors de l’expiration de ce traité.

88      La thèse de la Commission cherchant à justifier son action sur la base de la fusion des exécutifs de 1965 serait également erronée, dès lors que l’unité subjective de la Commission ne s’inscrirait aucunement dans une logique d’identité institutionnelle ou fonctionnelle et n’atténuerait pas l’autonomie des trois traités, le traité CE, le traité CECA et le traité CEEA.

89      Eu égard à ce qui précède, il serait évident que la Commission n’aurait eu, contrairement à ce qu’elle a affirmé dans la lettre du 30 juin 2008, aucun pouvoir pour poursuivre la procédure en cause et prendre une décision, sauf si les États membres en avaient décidé autrement. Le traité CECA serait un véritable accord international et les procédures de révision de cet acte ne pourraient être que celles prévues par celui-ci ou, à défaut, par la volonté unanime des États fondateurs.

90      Dans le cadre de la deuxième branche, la requérante fait valoir qu’une analyse synthétique de la pratique des organes communautaires eux-mêmes dans la réglementation adoptée dans les secteurs autres que celui de la concurrence, en prévision de l’expiration du traité CECA, confirme la nécessité absolue d’une mesure appropriée de la part des entités et des organes ayant compétence pour définir le régime indispensable des situations transitoires de façon conforme aux principes gouvernant la succession entre traités. Une telle réglementation aurait été adoptée dans des domaines tels que les mesures de défense commerciale, la succession de la CE aux accords internationaux conclus par la CECA, le système de surveillance des importations de charbon originaires de pays tiers, les statistiques communautaires, le régime prévu pour les activités financières et les fonds CECA. Il pourrait clairement en être déduit que la succession automatique de la CE à la CECA non seulement ne constitue pas un principe de caractère général, mais n’a même jamais été envisagée par les États membres et par les institutions de l’Union dans des situations qu’ils considéraient comme temporaires. Il conviendrait d’ajouter que le caractère impraticable d’une succession automatique des secteurs CECA dans le domaine du droit de la concurrence aurait été reconnu, en fait, par le comité consultatif CECA dans des mémorandums de 1995 et de 2000.

91      Dans le cadre de la troisième branche, la requérante soutient que la base juridique de la décision attaquée est une question de droit matériel et non une question procédurale (voir considérant 359 de la décision attaquée). Il serait réducteur de soutenir que l’expiration d’un traité communautaire doit être envisagée comme une simple question de succession d’un ensemble de règles à un autre, dans le cadre d’un même ordre juridique. L’attribution de la compétence impliquerait le fondement même de l’action administrative ou judiciaire, ce que le Tribunal aurait confirmé dans son arrêt SP e.a./Commission, point 24 supra (points 117 et 118). Ainsi, la Commission aurait dû tirer sa propre compétence, pour appliquer l’article 65 CA, d’une disposition expresse en vigueur au moment de l’adoption de la décision. Ce pouvoir ne lui aurait certainement pas été donné par le règlement n° 1/2003, qui ne mentionne pas l’article 65 CA.

92      Dans le cadre du troisième moyen, la requérante invoque la nullité de la décision attaquée en raison du choix de la Commission d’utiliser le règlement n° 1/2003, aux fins de l’application de l’article 65 CA. Le règlement n° 1/2003 ne constituerait pas la réglementation générale aux fins de l’application des dispositions en matière d’ententes ou d’abus de position dominante, mais aurait été prévu exclusivement pour l’application des articles 81 CE et 82 CE. À cet égard, l’affirmation de la Commission selon laquelle l’article 65 CA et l’article 81 CE seraient substantiellement similaires serait vouée à être écartée. Tout d’abord, cette affirmation serait sans incidence sur le cadre procédural à adopter, le règlement n° 1/2003 n’habilitant pas la Commission à constater des infractions présumées à l’article 65 CA. Ensuite, ainsi que la Commission le relèverait au considérant 372 de la décision attaquée, les articles 65 CA et 81 CE ne seraient pas identiques. En se fondant sur le règlement n° 1/2003, la Commission aurait violé celui-ci et commis un excès de pouvoir manifeste. Enfin, la requérante aurait conscience de l’orientation récente du Tribunal dans ses arrêts du 31 mars 2009, ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission (T‑405/06, Rec. p. II‑771), et du 1er juillet 2009, ThyssenKrupp Stainless/Commission (T‑24/07, Rec. p. II‑2309), lesquels sembleraient confirmer la compétence actuelle de la Commission pour adopter des décisions appliquant des dispositions relevant du traité CECA, y compris dans le cadre procédural du traité CE. Cette jurisprudence serait toutefois en contradiction avec les données normatives et institutionnelles exposées dans le cadre du deuxième moyen.

 Sur le choix de la base juridique de la décision attaquée

93      Il y a lieu de rappeler que les traités communautaires ont instauré un nouvel ordre juridique au profit duquel les États ont limité, dans des domaines de plus en plus étendus, leurs droits souverains et dont les sujets sont non seulement les États membres, mais également leurs ressortissants (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 5 février 1963, van Gend & Loos, 26/62, Rec. p. 1, et du 15 juillet 1964, Costa, 6/64, Rec. p. 1141, 1159 ; avis de la Cour 1/91, du 14 décembre 1991, Rec. p. I‑6079, point 21 ; arrêts SP e.a./Commission, point 24 supra, point 70, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 63).

94      Au sein de cet ordre juridique, les institutions ne disposent que de compétences d’attribution. Pour cette raison, les actes communautaires mentionnent dans leur préambule la base juridique qui habilite l’institution concernée à agir dans le domaine en cause. Le choix de la base juridique appropriée revêt en effet une importance de nature constitutionnelle (voir arrêts SP e.a./Commission, point 24 supra, point 71, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 64, et la jurisprudence citée).

95      En l’espèce, il doit être constaté que le préambule de la décision attaquée comporte des références à des dispositions du traité CECA, à savoir les articles 36 CA, 47 CA et 65 CA, mais également la mention du traité CE, du règlement n° 17, en particulier de son article 11, du règlement n° 1/2003, à savoir de son article 7, paragraphe 1, de son article 18 et de son article 23, paragraphe 2, et du règlement (CE) n° 2842/98 de la Commission, du 22 décembre 1998, relatif à l’audition dans certaines procédures fondées sur les articles [81 CE] et [82 CE] (JO L 354, p. 18).

96      Il importe de relever en outre que, dans les motifs de la décision attaquée, la Commission a indiqué, au considérant 1, que « [l]a présente décision constat[ait] une infraction à l’article 65, paragraphe 1, [CA] et [qu’elle était] adoptée sur la base de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 1/2003 ». Au considérant 3 de la décision attaquée, la Commission a ajouté que, « [p]ar la présente décision, [… elle] inflige[ait] des amendes aux entreprises destinataires au titre de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 ».

97      Au considérant 350 de la décision attaquée, la Commission a ainsi indiqué qu’elle estimait que « l’article 7, paragraphe 1, et l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 constitu[aient] les bases juridiques appropriées qui l’autoris[aient] à adopter la présente décision » et que, « [s]ur la base de l’article 7, paragraphe 1, [elle …] constat[ait] une infraction à l’article 65, paragraphe 1, [CA] et oblige[ait] les destinataires de la présente décision à y mettre fin, tandis qu’en vertu de l’article 23, paragraphe 2, elle leur inflige[ait] des amendes » (voir également considérant 361 de la décision attaquée).

98      Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que la décision attaquée, par laquelle la Commission a constaté une infraction à l’article 65, paragraphe 1, CA et infligé une amende à la requérante, trouve sa base juridique dans l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 1/2003 pour la constatation de l’infraction et dans l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 pour l’imposition de l’amende.

 Sur la compétence de la Commission pour constater et sanctionner une infraction à l’article 65, paragraphe 1, CA, après l’expiration du traité CECA, sur la base du règlement n° 1/2003

99      En premier lieu, il convient de rappeler que la disposition constituant la base juridique d’un acte et habilitant l’institution de l’Union à adopter l’acte en cause doit être en vigueur au moment de l’adoption de celui-ci (arrêts de la Cour du 4 avril 2000, Commission/Conseil, C‑269/97, Rec. p. I‑2257, point 45 ; du 29 mars 2011, ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., C‑201/09 P et C‑216/09 P, Rec. p. I‑2239, point 75, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, C‑352/09 P, Rec. p. I‑2359, point 88 ; arrêts SP e.a./Commission, point 24 supra, point 118, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 74), ce qui est incontestablement le cas de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, qui constituent la base juridique de la décision attaquée.

100    En second lieu, il importe de souligner, contrairement à ce qu’affirme la requérante, que les traités communautaires ont institué un ordre juridique unique, dans le cadre duquel, ainsi que cela est reflété à l’article 305, paragraphe 1, CE, le traité CECA constituait un régime spécifique dérogeant aux règles à vocation générale établies par le traité CE (voir arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 92 supra, point 57, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 75, et la jurisprudence citée).

101    Le traité CECA constituait ainsi, en vertu de l’article 305, paragraphe 1, CE, une lex specialis dérogeant à la lex generalis qu’est le traité CE (arrêt de la Cour du 24 octobre 1985, Gerlach, 239/84, Rec. p. 3507, points 9 à 11 ; avis de la Cour 1/94, du 15 novembre 1994, Rec. p. I‑5267, points 25 à 27 ; arrêt SP e.a./Commission, point 24 supra, point 111, et arrêt ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 76, confirmé sur pourvoi par arrêt ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, points 70 et 73).

102    Il en résulte que, en ce qui concerne le fonctionnement du marché commun, les règles du traité CECA et l’ensemble des dispositions prises pour son application sont demeurées en vigueur, nonobstant l’intervention du traité CE (arrêts de la Cour Gerlach, point 101 supra, point 9, et du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, C‑74/00 P et C‑75/00 P, Rec. p. I‑7869, point 100 ; arrêt ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 77, confirmé sur pourvoi par arrêt ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, points 70 et 73).

103    Toutefois, dans la mesure où des questions ne faisaient pas l’objet de dispositions du traité CECA ou de réglementations adoptées sur la base de ce dernier, le traité CE et les dispositions prises pour son application pouvaient, même avant l’expiration du traité CECA, s’appliquer à des produits relevant du traité CECA (arrêts de la Cour du 15 décembre 1987, Deutsche Babcock, 328/85, Rec. p. 5119, point 10, et Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, point 102 supra, point 100 ; arrêt du Tribunal du 25 octobre 2007, Ferriere Nord/Commission, T‑94/03, non publié au Recueil, point 83, et arrêt ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 78, confirmé sur pourvoi par arrêt ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, points 70 et 73).

104    En vertu de son article 97, le traité CECA est venu à expiration le 23 juillet 2002. En conséquence, le 24 juillet 2002, le champ d’application du régime général issu du traité CE s’est étendu aux secteurs qui étaient régis initialement par le traité CECA (arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 92 supra, point 58, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 79, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 99 supra, points 59 et 63, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, points 70 et 73).

105    Si le passage du cadre juridique du traité CECA à celui du traité CE a entraîné, à compter du 24 juillet 2002, une modification des bases juridiques, des procédures et des règles de fond applicables, celle-ci s’inscrit dans le contexte de l’unité et de la continuité de l’ordre juridique communautaire et de ses objectifs (arrêts du Tribunal du 12 septembre 2007, González y Díez/Commission, T‑25/04, Rec. p. I‑3121, point 55 ; ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 92 supra, point 59, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 80, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 99 supra, points 60 et 63, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, points 71 et 73). C’est donc à tort que la requérante fait valoir, à l’appui de son deuxième moyen, que l’unité de l’ordre juridique de l’Union ou le rapport de lex generalis-lex specialis des traités CE et CECA sont sans incidence pour l’appréciation de la prétendue illégalité de l’action de la Commission en l’espèce.

106    À cet égard, il y a lieu de relever que l’instauration et le maintien d’un régime de libre concurrence, au sein duquel les conditions normales de concurrence sont assurées et qui est notamment à l’origine des règles en matière d’aides d’État et d’ententes entre entreprises, constituent l’un des objectifs essentiels tant du traité CE que du traité CECA (voir arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 92 supra, point 60, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 81, et la jurisprudence citée, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 99 supra, points 60 et 63, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, points 71 et 73).

107    Dans ce contexte, quoique les règles des traités CECA et CE régissant le domaine des ententes divergent dans une certaine mesure, il convient de souligner que les notions d’accord et de pratiques concertées sous l’empire de l’article 65, paragraphe 1, CA répondent à celles d’accord et de pratiques concertées au sens de l’article 81 CE et que ces deux dispositions sont interprétées de la même manière par le juge de l’Union. Ainsi, la poursuite de l’objectif d’une concurrence non faussée dans les secteurs relevant initialement du marché commun du charbon et de l’acier n’est pas interrompue du fait de l’expiration du traité CECA, cet objectif étant également poursuivi dans le cadre du traité CE et par la même institution, la Commission, autorité administrative chargée de la mise en œuvre et du développement de la politique de la concurrence dans l’intérêt général de la CE (voir arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 92 supra, point 61, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 82, et la jurisprudence citée, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 99 supra, points 60 et 63, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, points 71 et 73).

108    La continuité de l’ordre juridique communautaire et des objectifs qui président à son fonctionnement exige ainsi que, en tant qu’elle succède à la CECA, et dans le cadre procédural qui est le sien, la CE assure, à l’égard des situations nées sous l’empire du traité CECA, le respect des droits et des obligations qui s’imposaient eo tempore tant aux États membres qu’aux particuliers en vertu du traité CECA et des règles prises pour son application. Cette exigence s’impose d’autant plus dans la mesure où la distorsion de la concurrence résultant du non-respect des règles en matière d’ententes est susceptible d’étendre ses effets dans le temps après l’expiration du traité CECA, sous l’empire du traité CE (voir arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 92 supra, point 63, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 83, et la jurisprudence citée, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 99 supra, points 62 et 63, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, points 72 et 73).

109    La Cour a ainsi également rappelé que la succession des traités CECA, CE et TFUE assurait, en vue de garantir une libre concurrence, que tout comportement correspondant à l’état de fait prévu à l’article 65, paragraphe 1, CA, qu’il ait eu lieu avant ou après le 23 juillet 2002, ait pu être sanctionné par la Commission et puisse continuer de l’être (arrêts ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, points 65 à 67 et 77, et ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 99 supra, points 55 à 57 et 65).

110    Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence, d’une part, que, conformément à un principe commun aux systèmes juridiques des États membres, dont les origines peuvent être retracées jusqu’au droit romain, il y a lieu, en cas de changement de législation, d’assurer, sauf expression d’une volonté contraire par le législateur, la continuité des structures juridiques et, d’autre part, que ce principe s’applique aux modifications du droit primaire de l’Union (arrêts de la Cour du 25 février 1969, Klomp, 23/68, Rec. p. 43, point 13, et ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 99 supra, point 63).

111    Or, il n’existe aucun indice de ce que le législateur de l’Union aurait souhaité que les comportements collusoires interdits sous l’empire du traité CECA pussent échapper à l’application de toute sanction après l’expiration de ce dernier (arrêt ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 99 supra, point 64).

112    En effet, d’une part, la Cour a relevé que le Conseil et les représentants des gouvernements des États membres avaient indiqué être prêts à adopter toutes les mesures nécessaires pour faire face aux conséquences de l’expiration dudit traité. D’autre part, elle a souligné que la Commission avait précisé qu’elle ne devait soumettre des propositions de dispositions transitoires que si une telle démarche était jugée nécessaire et que, au regard des principes généraux de droit applicables, elle considérait qu’une telle nécessité faisait défaut dans le domaine du droit des ententes (arrêt ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 99 supra, point 75).

113    Par conséquent, la requérante ne saurait tirer aucun argument valable de l’absence de dispositions transitoires en la matière (voir, en ce sens, arrêt ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, point 76).

114    Dans ces circonstances, il serait contraire à la finalité ainsi qu’à la cohérence des traités et inconciliable avec la continuité de l’ordre juridique de l’Union que la Commission soit sans qualité pour assurer l’application uniforme des normes se rattachant au traité CECA qui continuent de produire des effets même après l’expiration de ce dernier (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 18 juillet 2007, Lucchini, C‑119/05, Rec. p. I‑6199, point 41).

115    Il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient la requérante dans ses deuxième et troisième moyens, le règlement n° 1/2003 et, plus particulièrement, son article 7, paragraphe 1, et son article 23, paragraphe 2, doivent être interprétés en ce sens qu’ils permettent à la Commission de constater et de sanctionner, après le 23 juillet 2002, les ententes réalisées dans les secteurs relevant du champ d’application du traité CECA ratione materiae et ratione temporis, et ce quand bien même les dispositions précitées dudit règlement ne mentionnent pas expressément l’article 65 CA (voir arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 92 supra, point 64, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 84, et la jurisprudence citée, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 99 supra, point 74, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, points 72, 73 et 87).

116    En outre, il convient de relever que l’application, au sein de l’ordre juridique de l’Union, des règles du traité CE dans un domaine initialement régi par le traité CECA doit intervenir dans le respect des principes gouvernant l’application de la loi dans le temps. À cet égard, il résulte d’une jurisprudence constante que, si les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à tous les litiges pendants au moment où elles entrent en vigueur, il n’en est pas de même des règles de fond. En effet, ces dernières doivent être interprétées, en vue de garantir le respect des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime, comme ne visant des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur que dans la mesure où il ressort clairement de leurs termes, finalités ou économie qu’un tel effet doit leur être attribué (arrêts de la Cour du 12 novembre 1981, Meridionale Industria Salumi e.a., 212/80 à 217/80, Rec. p. 2735, point 9, et du 10 février 1982, Bout, 21/81, Rec. p. 381, point 13 ; arrêt du Tribunal du 19 février 1998, Eyckeler & Malt/Commission, T‑42/96, Rec. p. II‑401, point 55 ; arrêt ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 92 supra, point 65, et arrêt ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 85, confirmé sur pourvoi par arrêt ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, point 79).

117    Dans cette perspective, s’agissant de la question des dispositions matérielles applicables à une situation juridique définitivement acquise antérieurement à l’expiration du traité CECA, la continuité de l’ordre juridique de l’Union et les exigences relatives aux principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime imposent l’application des dispositions matérielles prises en application du traité CECA aux faits relevant de leur champ d’application ratione materiae et ratione temporis. La circonstance selon laquelle, en raison du fait que le traité CECA a expiré, le cadre réglementaire en question n’est plus en vigueur au moment où l’appréciation de la situation factuelle est opérée ne modifie pas cette considération, dès lors que cette appréciation porte sur une situation juridique définitivement acquise à une époque où étaient applicables les dispositions matérielles prises en application du traité CECA (arrêt ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 92 supra, point 66, et arrêt ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 86, confirmé sur pourvoi par arrêt ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, point 79 ; voir également, en ce sens, arrêt Ferriere Nord/Commission, point 103 supra, point 96).

118    En l’espèce, s’agissant des règles de fond, il convient d’observer que la décision attaquée concerne une situation juridique définitivement acquise antérieurement à l’expiration du traité CECA le 23 juillet 2002, la période infractionnelle allant du 6 décembre 1989 au 4 juillet 2000 (voir point 37 ci-dessus). En l’absence de tout effet rétroactif du droit matériel de la concurrence applicable depuis le 24 juillet 2002, il y a lieu de constater que l’article 65, paragraphe 1, CA constitue la règle de fond applicable et effectivement appliquée par la Commission dans la décision attaquée, étant rappelé qu’il résulte précisément de la nature de lex generalis du traité CE par rapport au traité CECA, consacrée à l’article 305 CE, que le régime spécifique issu du traité CECA et des règles prises pour son application est, en vertu du principe lex specialis derogat legi generali, seul applicable aux situations acquises avant le 24 juillet 2002 (voir, en ce sens, arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 92 supra, point 68, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 89, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 99 supra, point 77, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, point 79).

119    Par ailleurs, la décision attaquée a été adoptée sur la base de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, à la suite d’une procédure conduite conformément au règlement n° 17 et au règlement n° 1/2003. Les dispositions relatives à la base juridique et à la procédure suivie jusqu’à l’adoption de la décision attaquée relèvent des règles de procédure au sens de la jurisprudence visée au point 116 ci-dessus. Dès lors que la décision attaquée a été adoptée après l’expiration du traité CECA, c’est à bon droit que la Commission a fait application des règles contenues dans le règlement n° 1/2003 (voir arrêts ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, point 92 supra, point 67, et ThyssenKrupp Stainless/Commission, point 92 supra, point 87, et la jurisprudence citée, confirmés sur pourvoi par arrêts ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 99 supra, points 74 et 77, et ThyssenKrupp Nirosta/Commission, point 99 supra, point 90).

120    Eu égard à l’ensemble des développements qui précèdent, il convient de rejeter les deuxième et troisième moyens.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’un excès de pouvoir et d’une application erronée, contradictoire et inexacte du droit, du fait de la violation des règles de procédure prévues par les règlements nos 1/2003 et 773/2004, l’entière procédure suivie par la Commission étant, en conséquence, incomplète, incohérente et illégale

121    La requérante fait valoir que, en n’accomplissant aucun acte de procédure après l’annulation de la décision de 2002, en n’envoyant pas aux entreprises concernées une nouvelle communication des griefs et en n’autorisant pas le déroulement d’une nouvelle audition, la Commission a violé les dispositions des règlements nos 1/2003 et 773/2004. Selon la requérante, ces violations résulteraient de la volonté de la Commission de poursuivre, après l’extinction du traité CECA et de ses dispositions d’application, la procédure ouverte sur la base des dispositions procédurales de ce traité, en appliquant les règles de procédure CE à partir du 23 juillet 2002, rendant la procédure illégale et incomplète à la lumière des deux ordres juridiques concernés.

122    À titre liminaire, il y a lieu de relever que, si la requérante invoque, dans l’intitulé de son moyen et au point 110 de la requête, une « application erronée, contradictoire et inexacte du droit, du fait de la violation des règles de procédure prévues par le règlement n° 1/2003 et par le règlement n° 773/2004 », dans ses écritures, elle ne soulève formellement qu’une violation, d’une part, de l’article 11, paragraphe 1, du règlement n° 1/2003, qui prévoit que la Commission et les autorités de concurrence des États membres appliquent les règles de concurrence de l’Union en étroite collaboration, et, d’autre part, de l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 773/2004, qui prévoit que la Commission invite les autorités de concurrence des États membres à prendre part aux auditions.

123    Il ressort toutefois de l’examen de son moyen qu’elle reproche à la Commission de n’avoir pas permis aux parties d’exercer leurs droits de la défense, notamment en procédant à l’envoi d’une communication des griefs et en organisant une audition finale, à laquelle auraient dû participer les autorités des États membres.

124    En premier lieu, la requérante soutient que, après l’annulation par le Tribunal de la décision de 2002, la Commission aurait dû adopter une nouvelle communication des griefs. Contrairement à ce que la Commission affirme au considérant 122 de la décision attaquée, la décision de 2002 n’aurait pas été annulée pour un simple vice de procédure, l’absence de base juridique constituant un vice bien plus radical, puisqu’il concernerait le pouvoir même de l’exécutif d’adopter l’acte. Ce vice s’étendrait également à la communication des griefs supplémentaires, adoptée sur le même fondement que la décision de 2002. Il n’y aurait par ailleurs pas d’identité parfaite entre les griefs mentionnés dans la décision de 2002 et les griefs figurant dans la décision attaquée.

125    Il doit être rappelé qu’il ressort d’une jurisprudence constante que le respect des droits de la défense dans toute procédure susceptible d’aboutir à des sanctions, notamment à des amendes ou à des astreintes, constitue un principe fondamental du droit de l’Union, qui doit être observé, même s’il s’agit d’une procédure ayant un caractère administratif. À cet égard, l’envoi d’une communication des griefs constitue une garantie procédurale conforme au principe fondamental du droit de l’Union qui exige le respect des droits de la défense dans toute procédure. Ce principe exige notamment que la communication des griefs adressée par la Commission à une entreprise à l’encontre de laquelle elle envisage d’infliger une sanction pour violation des règles de concurrence contienne les éléments essentiels retenus à l’encontre de cette entreprise, tels que les faits reprochés, la qualification qui leur est donnée et les éléments de preuve sur lesquels la Commission se fonde, afin que cette entreprise soit en mesure de faire valoir utilement ses arguments dans le cadre de la procédure administrative engagée à son égard (arrêt de la Cour du 3 septembre 2009, Prym et Prym Consumer/Commission, C‑534/07 P, Rec. p. I‑7415, points 26 à 28 ; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 3 septembre 2009, Papierfabrik August Koehler e.a./Commission, C‑322/07 P, C‑327/07 P et C‑338/07 P, Rec. p. I‑7191, points 34 à 36, et la jurisprudence citée).

126    Le respect des droits de la défense exige en effet que l’entreprise intéressée ait été mise en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et circonstances allégués ainsi que sur les documents retenus par la Commission à l’appui de son allégation de l’existence d’une infraction à son endroit (voir arrêt de la Cour du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, Rec. p. I‑123, point 66, et la jurisprudence citée).

127    Si la communication des griefs doit permettre aux intéressés de prendre effectivement connaissance des comportements qui leur sont reprochés par la Commission, cette exigence est respectée lorsque la décision finale ne met pas à la charge des intéressés des infractions différentes de celles visées dans la communication des griefs et ne retient que les faits sur lesquels les intéressés ont eu l’occasion de s’expliquer. Aucune disposition n’interdit à la Commission de communiquer aux parties à une procédure en matière de concurrence, après l’envoi de la communication des griefs, d’autres éléments pertinents pour compléter celle-ci, à partir du moment où ces éléments ne modifient pas les infractions reprochées aux entreprises et où ces dernières ont eu la possibilité de s’exprimer sur tous les éléments qui sont retenus à leur charge (arrêt de la Cour du 25 octobre 1983, AEG-Telefunken/Commission, 107/82, Rec. p. 3151, point 29 ; arrêts du Tribunal du 20 avril 1999, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, T‑305/94 à T‑307/94, T‑313/94 à T‑316/94, T‑318/94, T‑325/94, T‑328/94, T‑329/94 et T‑335/94, Rec. p. II‑931, point 497 ; du 20 mars 2002, LR AF 1998/Commission, T‑23/99, Rec. p. II‑1705, point 190 ; du 12 juillet 2011, Fuji Electric/Commission, T‑132/07, Rec. p. II‑4091, point 238, et du 27 juin 2012, Microsoft/Commission, T‑167/08, non encore publié au Recueil, points 182 à 186).

128    Il doit en outre être rappelé que, selon une jurisprudence constante, l’annulation d’un acte de l’Union n’affecte pas nécessairement les actes préparatoires, la procédure visant à remplacer l’acte annulé pouvant en principe être reprise au point précis auquel l’illégalité est intervenue (arrêts de la Cour du 12 novembre 1998, Espagne/Commission, C‑415/96, Rec. p. I‑6993, points 31 et 32, et du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, Rec. p. I‑8375, point 73 ; arrêt du Tribunal du 25 juin 2010, Imperial Chemical Industries/Commission, T‑66/01, Rec. p. II‑2631, point 125).

129    Par ailleurs, selon la jurisprudence, lorsque, à la suite de l’annulation d’une décision en matière de concurrence, la Commission choisit de réparer la ou les illégalités constatées et d’adopter une décision identique qui n’est pas entachée de ces illégalités, cette décision concerne les mêmes griefs, sur lesquels les entreprises se sont déjà prononcées (arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, point 128 supra, point 98).

130    En l’espèce, premièrement, dès lors que la décision de 2002 a été annulée en raison du fait que l’article 65, paragraphes 4 et 5, CA avait expiré le 23 juillet 2002 et que la Commission ne pouvait dès lors plus tirer de compétence desdites dispositions, éteintes au moment de l’adoption de ladite décision, pour constater une infraction à l’article 65, paragraphe 1, CA et pour imposer des amendes aux entreprises qui auraient participé à ladite infraction (voir point 24 ci-dessus), l’exécution de l’arrêt SP e.a./Commission, point 24 supra, imposait à la Commission de reprendre la procédure au point précis où l’illégalité était intervenue, à savoir au moment de l’adoption de la décision de 2002. Eu égard aux développements figurant aux points 99 à 120 ci-dessus, la requérante ne saurait, dans ce contexte, prétendre que le vice ne concernerait pas le choix de la procédure adoptée, mais plus radicalement le pouvoir dont disposait l’exécutif communautaire pour adopter un acte tel que la décision de 2002 après l’expiration du traité CECA.

131    Deuxièmement, la requérante ne saurait prétendre que la communication des griefs supplémentaires n’est pas valable, en raison du fait qu’elle aurait été adoptée sur le même fondement que la décision de 2002, annulée par le Tribunal. Ainsi que le relève à juste titre la Commission, la communication des griefs supplémentaires a été adoptée sur la base de l’article 65 CA et du règlement n° 17, ce dernier étant en vigueur au moment de l’adoption de ladite communication (voir points 22 et 119 ci-dessus).

132    Troisièmement, il convient de souligner que la requérante ne fait pas valoir, dans le présent moyen, que le contenu des griefs de la Commission a été modifié dans la décision attaquée par rapport au contenu des griefs qui figurait dans la communication des griefs et la communication des griefs supplémentaires, ni ne conteste que, au moment de l’annulation de la décision de 2002, les actes préparatoires accomplis par la Commission, et notamment la communication des griefs et la communication des griefs supplémentaires, permettaient une analyse exhaustive du comportement des entreprises en cause au regard de l’article 65, paragraphe 1, CA.

133    La requérante se limite en revanche à relever de prétendues omissions, dans la décision attaquée, par rapport à la décision de 2002. Selon elle, certains passages de la décision de 2002 ne figureraient plus aux considérants 171, 172 et 455 de la décision attaquée, alors même qu’ils établiraient l’engagement des entreprises en cause à exporter une partie de la production des ronds à béton. La Commission aurait ainsi omis certains éléments qui affaibliraient sa thèse relative à l’étendue géographique nationale du marché. Il s’ensuivrait qu’il n’existe pas d’identité parfaite entre les griefs de fait faisant l’objet de la décision de 2002 et ceux faisant l’objet de la décision attaquée.

134    À cet égard, d’une part, force est de constater que les omissions alléguées concernent des considérants de la décision attaquée qui ne sont pas relatifs à la dimension géographique du marché en cause, mais aux comportements des entreprises en 1999. D’autre part, l’engagement des entreprises en cause à exporter une partie de leur production, parfois en lieu et place des arrêts de production concertés, est mentionné dans de nombreux autres considérants de la décision attaquée (voir notamment les considérants 183, 185, 190, 192, 197, 206, 207, 210, 246, 296, 328 et 375 de la décision attaquée), en sorte que les omissions constatées par la requérante, dont la Commission affirme qu’elles résultent de la prise en compte des droits de la défense de certaines entreprises, doivent être considérées comme étrangères à la détermination de l’étendue géographique du marché en cause.

135    En tout état de cause, de telles omissions dans la décision attaquée, à les supposer avérées, sont étrangères à tout nouveau grief, cette dernière ne portant pas sur des comportements autres que ceux sur lesquels les entreprises ont pu déjà s’expliquer (voir, en ce sens, arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, point 128 supra, point 103, et arrêt du Tribunal du 19 mars 2003, CMA CGM e.a./Commission, T‑213/00, Rec. p. II‑913, point 114).

136    En deuxième lieu, la requérante affirme que la Commission a violé les droits de la défense des entreprises en cause en ne leur permettant pas d’avoir avec elle un dialogue contradictoire sur les modifications opérées par rapport à la décision de 2002, notamment en procédant à l’envoi d’une nouvelle communication des griefs et lors d’une audition finale.

137    Il y a lieu de rappeler que, selon l’article 12, paragraphe 1, du règlement n° 773/2004, « [l]a Commission donne aux parties auxquelles elle adresse une communication des griefs la possibilité de développer leurs arguments lors d’une audition, si elles en font la demande dans leurs observations écrites ». Force est toutefois de constater que les entreprises concernées ont été invitées à exposer oralement leurs observations lors des auditions du 13 juin et du 30 septembre 2002, à la suite de la communication des griefs et de la communication des griefs supplémentaires (voir considérants 118 et 119 de la décision attaquée). Dès lors que la Commission n’avait pas l’obligation d’adresser aux entreprises en cause une nouvelle communication des griefs à la suite de l’annulation de la décision de 2002, et en l’absence de nouveaux griefs, la Commission n’avait pas l’obligation d’organiser une nouvelle audition par le conseiller-auditeur.

138    La requérante ne saurait prétendre à cet égard que, en ne procédant pas à l’envoi d’une nouvelle communication des griefs et en n’organisant pas une audition finale afin que les entreprises en cause pussent se prononcer sur les appréciations juridiques de la Commission ou sur les aspects institutionnels, la Commission aurait violé le principe du contradictoire.

139    Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, l’obligation de la Commission au stade de la communication des griefs se limite à exposer les griefs avancés et à énoncer, de manière claire, les faits sur lesquels elle se fonde ainsi que la qualification qui leur est donnée, afin que ses destinataires puissent se défendre utilement. La Commission n’est pas obligée d’exposer les conclusions qu’elle tire des faits, documents et arguments juridiques présentés (voir arrêt du Tribunal du 8 juillet 2004, JFE Engineering e.a./Commission, T‑67/00, T‑68/00, T‑71/00 et T‑78/00, Rec. p. II‑2501, point 453, et la jurisprudence citée).

140    Comme il a été relevé au point 129 ci-dessus, la Cour a par ailleurs déjà souligné que, lorsque, à la suite de l’annulation d’une décision en matière de concurrence, la Commission choisit de réparer la ou les illégalités constatées et d’adopter une décision identique qui n’est pas entachée de ces illégalités, cette décision concerne les mêmes griefs, sur lesquels les entreprises se sont déjà prononcées.

141    Il s’ensuit que la Commission n’avait pas l’obligation, à la suite de l’annulation de la décision de 2002, de donner la possibilité aux entreprises en cause d’être entendues sur d’éventuels appréciations juridiques ou aspects institutionnels pertinents, avant d’adopter la décision attaquée.

142    En tout état de cause, il doit d’ailleurs être souligné que, dans la lettre du 30 juin 2008, la Commission avait informé les entreprises en cause de son intention de réadopter la décision de 2002 et les avait averties de l’absence de toute communication des griefs supplémentaires, tout en les invitant à présenter leurs observations, ce que la requérante a d’ailleurs fait par lettre du 30 juillet 2008.

143    En troisième lieu, la requérante affirme que la décision attaquée est illégale dès lors que les autorités des États membres n’auraient pas été associées à la procédure, en violation de l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 773/2004. Étant donné que la participation active des autorités nationales n’était pas prévue par le régime du traité CECA, ces autorités n’auraient jamais été associées à la procédure avant le 23 juillet 2002 et elles n’auraient, en particulier, pas participé à la première audition, au cours de laquelle le fond de l’affaire aurait été discuté. Ce faisant, la Commission aurait également trahi l’esprit, sinon la lettre, de l’article 11, paragraphe 1, du règlement n° 1/2003. L’omission irrémédiable serait d’autant plus grave dans un cas tel que celui de l’espèce, où les infractions se seraient déroulées entièrement à l’intérieur d’un seul et même État membre et où le recours à l’autorité nationale aurait été fondamental aux fins de permettre à la Commission d’apprécier correctement le marché concerné et les comportements en cause. La différence de procédure sur ce point serait une conséquence directe de la différence substantielle existant entre l’article 65 CA et l’article 81 CE.

144    Il y a lieu de rappeler que le droit des entreprises et associations d’entreprises intéressées de faire connaître leur point de vue, lors de la phase écrite et de la phase orale de la procédure administrative, au sujet des griefs retenus par la Commission constitue un élément essentiel des droits de la défense (arrêts de la Cour du 21 septembre 1989, Hoechst/Commission, 46/87 et 227/88, Rec. p. 2859, point 52, et du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, point 128 supra, point 248).

145    Toutefois, dès lors que, ainsi qu’il ressort des développements figurant aux points 124 à 141 ci-dessus, la Commission n’avait pas l’obligation d’adopter une nouvelle communication des griefs et que les entreprises en cause avaient déjà eu la possibilité d’être entendues oralement lors de l’audition du 13 juin 2002, consécutive à la communication des griefs, et lors de l’audition du 30 septembre 2002, qui a fait suite à la communication des griefs supplémentaires, la Commission n’avait pas l’obligation d’organiser une nouvelle audition.

146    À cet égard, si, certes, ainsi que le souligne la requérante, les États membres n’ont pas participé à l’audition relative au fond de l’affaire, il a été rappelé au point 116 ci-dessus que l’application, au sein de l’ordre juridique de l’Union, des règles du traité CE dans un domaine initialement régi par le traité CECA doit intervenir dans le respect des principes gouvernant l’application de la loi dans le temps, les règles de procédure étant généralement censées s’appliquer à tous les litiges pendants au moment où elles entrent en vigueur. Or, les règles du traité CECA, qui étaient alors en vigueur, et notamment l’article 36 CA, ne prévoyaient pas une telle participation, contrairement à l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 773/2004 (voir point 13 ci-dessus).

147    Ainsi que la Commission l’a souligné lors de l’audience, cette dernière a toutefois tenu les États membres pleinement informés de la procédure, en leur adressant, avant l’adoption de la décision de 2002, la communication des griefs, la communication des griefs supplémentaires, des copies des observations écrites sur les deux communications des griefs, une copie de l’étude Lear (Laboratorio di Economia, Antitrust, Regolamentazione), intitulée « L’industrie du rond à béton armé en Italie de 1989 à 2000 » (ci-après l’« étude Lear »), commandée par les entreprises Alfa, Feralpi, IRO, SP et Valsabbia, un résumé des arguments des parties exposés lors de l’audition et l’enregistrement de celle-ci en anglais. La Commission a également transmis aux autorités nationales de la concurrence, le 7 septembre 2009, les réponses des entreprises en cause à la lettre du 30 juin 2008.

148    Il s’ensuit que l’absence, en l’espèce, de participation des États membres à l’audition ne saurait entraîner la violation ni de l’article 11, paragraphe 1, du règlement n° 1/2003, qui prévoit que la Commission et les États membres appliquent les règles de concurrence en étroite collaboration (voir point 8 ci-dessus), ni de l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 773/2004.

149    Eu égard à l’ensemble des développements qui précèdent, il y a lieu de rejeter le présent moyen.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’un excès de pouvoir pour défaut d’instruction et absence de motivation, la définition du marché en cause ainsi que les conditions et les effets de la prétendue entente étant, en conséquence, erronés, contradictoires et illogiques

150    La requérante fait valoir que la décision attaquée doit être annulée parce que la Commission n’a pas mené une instruction suffisante sur l’étendue du marché géographique, ce qui l’aurait conduite à formuler des conclusions insuffisamment motivées et erronées à cet égard, ainsi que sur les conditions et les effets de l’entente.

 Sur l’étendue du marché géographique

151    La requérante rappelle que, pour soutenir que le marché pertinent est le territoire de la République italienne, la Commission s’est fondée, au considérant 47 de la décision attaquée, sur le niveau extrêmement bas des importations en Italie, qui serait justifié par l’absence d’intérêt économique à vendre des ronds à béton produits à l’étranger aux prix pratiqués en Italie.

152    Or, tout d’abord, il ressortirait du paragraphe 50 de la communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence (JO 1997, C 372, p. 5) que l’absence d’achats ou de courants d’échanges transfrontaliers ne signifie pas nécessairement que le marché soit purement national. Ensuite, la requérante aurait produit, au cours de la procédure administrative, l’étude Lear, dont les conclusions iraient clairement dans le sens d’une extension transfrontalière du marché géographique pertinent. Les données présentées à la Commission, et notamment les observations de l’association nationale des entreprises de façonnage de fer (ci-après l’« Ansfer »), infirmeraient également la thèse selon laquelle les coûts de production seraient plus importants pour les concurrents étrangers et confirmeraient que les prix des ronds à béton en Italie étaient inférieurs à ceux appliqués dans le reste de la Communauté. La Commission n’en aurait pourtant pas tiré les conclusions quant à la nature transfrontalière du marché. Enfin, la Commission se contredirait en soutenant que le marché est de dimension géographique nationale, tout en affirmant que l’entente affecte le commerce entre États membres. Selon la requérante, la cause de l’absence d’importations importantes devrait davantage être recherchée dans l’existence de conditions de concurrence altérées sur d’autres marchés nationaux.

153    La requérante ajoute que la Commission ne peut se fonder sur la jurisprudence selon laquelle, en matière d’ententes, il n’est pas nécessaire de préciser le cadre territorial de référence. D’une part, cette jurisprudence serait inapplicable en l’espèce, puisqu’elle se référerait à la preuve de l’altération du commerce intracommunautaire. D’autre part, l’absence de définition du marché s’inscrirait dans un cadre plus général, caractérisé par une absence d’éléments probants rendant inapproprié l’ensemble de l’accusation que la Commission aurait tenté de construire.

154    En premier lieu, il convient de rejeter l’argument de la requérante tiré de l’absence de motivation de la décision attaquée, la définition du marché géographique en cause ayant été motivée à suffisance de droit aux considérants 47 à 60 de la décision attaquée.

155    C’est ainsi que la Commission, aux considérants 47 et 48 de la décision attaquée, a relevé que, au cours des années 1989 à 2000, le produit provenant d’autres zones géographiques a représenté entre 0 et 6 % du total des ventes sur le territoire italien, en sorte que les flux du produit vers l’Italie avaient été très limités pendant la période concernée. Elle a indiqué que l’obstacle majeur à la vente en Italie d’un produit ne provenant pas de l’Italie devait résider dans l’absence structurelle d’intérêt économique à vendre à des prix en vigueur en Italie les ronds à béton fabriqués hors d’Italie, ce qui expliquerait en outre pourquoi les flux de produit dont les entreprises italiennes considèrent qu’ils exercent une pression sous l’angle de la concurrence sont uniquement ceux qui proviennent de Turquie et des pays d’Europe orientale, où les coûts de production inférieurs leur permettent d’être compétitifs par rapport aux prix pratiqués en Italie. La Commission a toutefois considéré que, indépendamment de la question de savoir dans quelle mesure cette thèse était correcte et exhaustive, il était de toute façon certain que, en raison des flux limités de produit provenant de l’extérieur de l’Italie, le territoire de la République italienne constituait le marché géographique en cause des ronds à béton crantés en barres ou en rouleaux. Aux considérants 49 à 59 de la décision attaquée, la Commission a répondu aux observations des entreprises en cause sur la définition du marché géographique, et a notamment exprimé sa position sur l’étude Lear et les déclarations de l’Ansfer.

156    En deuxième lieu, pour ce qui concerne les arguments de la requérante qui démontreraient l’existence d’erreurs dans la définition du marché géographique, premièrement, il doit être observé, à l’instar de la Commission, que l’argument de la requérante fondé sur le paragraphe 50 de la communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence, selon lequel « l’absence d’achats ou de courants d’échanges transfrontaliers, par exemple, ne signifie pas nécessairement que le marché soit purement national », ne s’oppose pas à ce que la Commission tire une telle conclusion si elle considère, dans des circonstances de fait données, que le périmètre à l’intérieur duquel s’exerce la concurrence entre les entreprises a une dimension nationale. Il y a d’ailleurs lieu de souligner que le paragraphe 49 de ladite communication rappelle que, si les courants d’échanges et, avant tout, l’analyse de ces courants d’échanges permettent d’obtenir des informations utiles pour établir l’étendue du marché géographique, ils ne permettent pas, à eux seuls, de tirer des conclusions définitives à ce sujet.

157    Deuxièmement, s’agissant de l’étude Lear, dont les conclusions iraient clairement dans le sens d’une extension transfrontalière du marché géographique pertinent, la requérante se limite à affirmer que la Commission n’a pas tiré de cette étude les conclusions qui s’imposaient quant à la nature transfrontalière du marché et qu’elle a « éliminé notamment les résultats apparus en contestant, partiellement, d’une part, l’interprétation des preuves sur la base d’un seul et unique critère de référence parmi les critères cités dans l’étude et en affirmant, d’autre part, qu’indépendamment de toute considération économique, les faits confirmaient la nature nationale du marché, eu égard à l’absence d’importations ».

158    À cet égard, force est de constater que la requérante ne formule aucun argument précis afin d’infirmer les constatations de la Commission figurant aux considérants 51 à 53 de la décision attaquée, selon lesquelles, d’une part, la théorie des flux avancée par l’étude Lear était fondée uniquement sur des affirmations d’école, sur des théories économiques et non sur des considérations de fait et, d’autre part, cette étude appliquerait le test d’Elzinga et Hogarthy aux pays de l’Union, lequel ferait apparaître que seule l’Italie, parmi tous les États membres, pourrait constituer le marché géographique en cause. Par ailleurs, le renvoi global à l’étude Lear ne saurait pas non plus être admis dès lors que, d’une part, un tel renvoi ne peut pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui doivent figurer dans la requête (arrêt de la Cour du 31 mars 1992, Commission/Danemark, C‑52/90, Rec. p. I‑2187, point 17 ; ordonnances du Tribunal du 29 novembre 1993, Koelman/Commission, T‑56/92, Rec. p. II‑1267, point 21, et du 21 mai 1999, Asia Motor France e.a./Commission, T‑154/98, Rec. p. II‑1703, point 49), et, d’autre part, il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (arrêts du Tribunal du 7 novembre 1997, Cipeke/Commission, T‑84/96, Rec. p. II‑2081, point 34, et du 21 mars 2002, Joynson/Commission, T‑231/99, Rec. p. II‑2085, point 154).

159    Troisièmement, l’argument de la requérante selon lequel les observations écrites de l’Ansfer infirmeraient également la thèse selon laquelle les coûts de production seraient plus importants pour les concurrents étrangers est inopérant, dès lors que la Commission ne s’est pas fondée sur les coûts de production en Italie pour définir l’étendue du marché géographique. Ainsi, au considérant 50 de la décision attaquée, la Commission a précisé qu’elle « avait proposé l’hypothèse de coûts de production plus bas en Italie, tandis que les parties et l’étude Lear ont rejeté cette hypothèse, affirmant que la cause doit être recherchée dans les marges généralement plus basses pratiquées en Italie[, ce qui] n’invalide toutefois pas la position de la Commission selon laquelle il n’est pas intéressant pour les États membres d’exporter des ronds en Italie ». Quant à la déclaration de l’Ansfer selon laquelle les prix des ronds à béton en Italie auraient été inférieurs à ceux appliqués dans le reste de la Communauté, à la supposer avérée, elle semble plutôt indiquer que le marché italien se distingue des zones géographiques voisines parce que, en particulier, les conditions de concurrence y diffèrent de manière appréciable.

160    Quatrièmement, la constatation que l’entente a affecté le commerce entre États membres n’est pas, comme le soutient la requérante, en contradiction avec la détermination du marché géographique pertinent comme étant le territoire de la République italienne. Il résulte en effet d’une jurisprudence constante que, pour qu’une décision, un accord ou une entente soient susceptibles d’affecter le commerce entre États membres, ils doivent, sur la base d’un ensemble d’éléments de droit ou de fait, permettre d’envisager avec un degré de probabilité suffisant qu’ils puissent exercer une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d’échanges entre États membres, et cela de manière à faire craindre qu’ils puissent entraver la réalisation d’un marché unique entre États membres (arrêts de la Cour du 30 juin 1966, LTM, 56/65 Rec. p. 337 ; du 29 octobre 1980, Van Landewyck e.a./Commission, 209/78 à 215/78 et 218/78, Rec. p. 3125, point 170, et du 17 juillet 1997, Ferriere Nord/Commission, C‑219/95 P, Rec. p. I‑4411, point 20). Ainsi, une incidence sur les échanges intracommunautaires résulte en général de la réunion de plusieurs facteurs qui, pris isolément, ne seraient pas nécessairement déterminants. Pour vérifier si une entente affecte sensiblement le commerce entre États membres, il faut l’examiner dans son contexte économique et juridique (arrêts de la Cour du 23 novembre 2006, Asnef-Equifax et Administración del Estado, C‑238/05, Rec. p. I‑11125, point 35, et du 24 septembre 2009, Erste Group Bank e.a./Commission, C‑125/07 P, C‑133/07 P, C‑135/07 P et C‑137/07 P, Rec. p. I‑8681, point 37).

161    À cet égard, la Cour a déjà jugé que le fait qu’une entente n’ait pour objet que la commercialisation des produits dans un seul État membre ne suffit pas pour exclure que le commerce entre États membres puisse être affecté. En effet, une entente s’étendant à l’ensemble du territoire d’un État membre a, par sa nature même, pour effet de consolider des cloisonnements de caractère national, entravant ainsi l’interpénétration économique voulue par le traité CE (arrêts de la Cour du 29 avril 2004, British Sugar/Commission, C‑359/01 P, Rec. p. I‑4933, point 28 ; Asnef-Equifax et Administración del Estado, point 160 supra, point 37, et Erste Group Bank e.a./Commission, point 160 supra, point 38 ; arrêt du Tribunal du 13 juillet 2011, ThyssenKrupp Liften Ascenseurs/Commission, T‑144/07, T‑147/07 à T‑150/07 et T‑154/07, Rec. p. II‑5129, point 60).

162    En troisième lieu, la requérante affirme que la nature au moins communautaire du marché serait démontrée par l’absence de barrières législatives et de coûts de transport ainsi que la présence d’importantes exportations à partir de l’Italie. L’absence d’importations importantes ne saurait, dès lors, être attribuée à des raisons structurelles liées à la dimension nationale du marché, mais trouverait sa source dans les conditions de concurrence altérées des autres contextes nationaux. Toutefois, dès lors que la requérante ne conteste pas l’absence d’importations importantes en Italie et que la prémisse même de son argument se fonde sur de prétendues conditions de concurrence altérées dans d’autres États membres, il doit être considéré que les conditions de la concurrence diffèrent de manière appréciable entre l’Italie et les autres États membres, en sorte que la nature au moins communautaire du marché n’est pas établie.

163    En quatrième lieu, la requérante affirme que c’est à tort que la Commission a considéré qu’en matières d’ententes anticoncurrentielles il n’est pas nécessaire de définir le cadre territorial de référence. Il y a toutefois lieu de considérer que c’est à juste titre que la Commission a estimé, en se fondant par analogie sur la jurisprudence rendue dans le cadre de l’application de l’article 81 CE (voir, par analogie, arrêts du Tribunal du 14 mai 1998, Enso Española/Commission, T‑348/94, Rec. p. II‑1875, point 232, et Cimenteries CBR e.a./Commission, point 81 supra, points 1085 et 1086), que, dans le cadre de l’application de l’article 65, paragraphe 1, CA, c’est afin de déterminer si l’entente tend directement ou indirectement à empêcher, restreindre ou fausser le jeu normal de la concurrence sur le marché commun qu’il convient de définir le marché géographique, en sorte que, dans le cas où une entente tend à fausser de manière sensible la concurrence, la définition du marché géographique ne revêt pas une importance décisive.

164    Eu égard à l’ensemble des développements qui précèdent, il convient de rejeter la première branche du présent moyen.

 Sur l’instruction insuffisante et le défaut de motivation en ce qui concerne les conditions et les effets de l’entente

165    La requérante soutient que l’étude Lear a « envisagé d’autres thèmes » en aboutissant à des conclusions entièrement incompatibles avec la décision finale.

166    Premièrement, en matière de fixation des prix, cette étude, à laquelle la requérante « renvoie, à toutes fins utiles, […] pour toute appréciation supplémentaire de l’absence d’une instruction adéquate de l’affaire qui aurait concilié la conclusion de la procédure et l’évidence des données recueillies et produites par les parties », montrerait, selon elle, que les prix des ronds à béton sont caractérisés par une variabilité élevée et que les conditions de prix prévalant sur le marché dépendraient des variations du coût des facteurs de production.

167    Deuxièmement, la Commission n’aurait pas répondu aux entreprises en cause en ce qui concerne la nature purement indicative des barèmes qui lui ont été communiqués. La requérante aurait communiqué à la Commission, sans que celle-ci effectue toutes les évaluations pertinentes, un nombre considérable de factures, dont il ressortirait que les prix appliqués différaient clairement de ceux communiqués dans les barèmes et donc des prix prétendument convenus. À cet égard, la Commission aurait dû procéder à des mesures d’instruction pour vérifier la thèse de l’alignement des prix concertés.

168    Troisièmement, la Commission n’aurait pas tenu compte de manière appropriée des déclarations de l’Ansfer, selon lesquelles le marché italien aurait toujours été caractérisé par une vive concurrence sur les prix.

169    En tout état de cause, confrontée à une masse aussi considérable d’observations, la Commission aurait, à tout le moins, dû motiver abondamment sa décision.

170    En premier lieu, il y a lieu de rejeter le renvoi global, par la requérante, « pour toute appréciation supplémentaire », à l’étude Lear, pour les motifs exposés au point 158 ci-dessus. En outre, la requérante n’est pas en mesure d’expliquer les raisons pour lesquelles la prétendue variabilité élevée des prix des ronds à béton sur le marché ou la prétendue influence des variations du coût des facteurs de production sur les prix des ronds à béton démontreraient une instruction insuffisante sur « les conditions et les effets de l’entente ».

171    En deuxième lieu, s’agissant de la prétendue insuffisance de motivation de la décision attaquée, il y a lieu de relever que la Commission a consacré le point 6.3 de ladite décision aux effets de l’entente (considérants 512 à 524 de la décision attaquée) (voir également point 30 ci-dessus). Après avoir souligné qu’il était question d’une entente dont l’objectif était d’empêcher, limiter ou altérer le jeu normal de la concurrence et qu’il n’était donc pas nécessaire de vérifier qu’elle avait produit des effets sur le marché, elle a relevé que l’évolution des prix réels totaux ne pouvait pas être reconstruite de façon univoque. Toutefois, la Commission, ayant comme point de référence les prix moyens des suppléments de décembre 1989-janvier 1990 et mai-juin 2000, a estimé une augmentation du prix des suppléments d’au moins 40 % en termes réels, ce qui signifie que, même si on voulait considérer comme importantes les réductions du prix de base en termes réels, les données ne semblaient pas supporter la thèse de l’étude Lear d’une réduction du prix total de 32 % en termes réels. La Commission a ajouté que les informations dont elle disposait provenaient des entreprises elles-mêmes (considérants 512 à 514 de la décision attaquée).

172    Pour ce qui concerne les augmentations des suppléments de dimension, la Commission a souligné que, du 6 décembre 1989 au 4 juillet 2000, au moins 19 augmentations avaient été décidées et appliquées et que, pour neuf d’entre elles, elle était en possession de preuves directes relatives aux accords ou pratiques concertées concernant ces augmentations. Entre 1989 et 2000, le niveau des prix des suppléments de dimension aurait été multiplié par deux. Par ailleurs, selon la Commission, chaque augmentation de ces suppléments, décidée par les principaux producteurs, a eu un effet concret sur le marché, parce qu’elle a été adoptée plus ou moins rapidement également par les producteurs qui n’ont pas été les premiers à l’initiative de l’augmentation, en sorte qu’il n’est pas apparu nécessaire d’examiner l’effet de chacune des ententes relatives à l’augmentation des prix des suppléments de dimension (considérant 515 de la décision attaquée).

173    La Commission a également considéré que les accords ou pratiques concertées concernant la fixation du prix de base avaient eu un effet sur le marché et a indiqué, au considérant 516 de la décision attaquée, les éléments faisant apparaître les effets de l’entente sur le marché, repris notamment aux considérants 129 à 131, 136 à 138, 140, 142, 143, 145, 153, 155, 156, 160, 167, 168, 174, 183, 187, 191, 192, 200, 210, 214, 215, 233, 241, 268, 276, 280 à 300 et 302 de la même décision.

174    La Commission a fourni une description des effets de l’entente sur les conditions de paiement au considérant 517 de la décision attaquée, qui se réfère notamment aux considérants 164 et 165 de celle-ci, tandis qu’elle a expliqué les effets de l’entente sur la limitation ou le contrôle de la production et des ventes au considérant 518 de la décision attaquée.

175    La Commission a conclu, aux considérants 519 et 520 de la décision attaquée, que l’évaluation des effets concrets de l’entente permettait de conclure que celle-ci avait influencé le prix de vente pratiqué par les producteurs de ronds à béton en Italie, même si les mesures prises au sein de l’entente n’avaient pas toujours immédiatement produit les résultats escomptés. En outre, il a pu y avoir eu des phénomènes aux effets différés. Selon la Commission, l’incidence insuffisante de certaines initiatives concernant les prix a aussi conduit les entreprises en question à les combiner avec d’autres mesures sur les volumes ou à modifier les mesures prises sur les prix, ce qui montre que les comportements à travers lesquels l’entente s’est concrétisée étaient tous destinés à atteindre un seul et même objectif, à savoir l’augmentation des prix. La Commission a souligné que les entreprises en cause représentaient environ 21 % du marché italien des ronds à béton en 1989, 60 % en 1995 et environ 83 % en 2000, en sorte que l’effet sur le marché d’augmentations de prix concertées entre ces entreprises a été croissant, d’autant que les initiatives prises en cette matière étaient, dès 1989, communiquées ensuite à l’ensemble des producteurs de ronds à béton. Enfin, la Commission a ajouté que la position des parties selon laquelle les comportements en cause n’avaient eu aucun effet sur le marché n’était pas conforme aux preuves en sa possession.

176    Eu égard à ces considérations, le grief de la requérante, tiré de la prétendue motivation insuffisante de la décision attaquée au sujet des effets de l’entente sur le marché, ne saurait être retenu.

177    En troisième lieu, s’agissant des arguments qui démontreraient des carences de l’instruction, la requérante affirme que la Commission n’a pas fourni de réponse aux parties en ce qui concerne la nature purement indicative des barèmes qui lui ont été communiqués et qu’elle a fourni à la Commission un nombre considérable de factures se rapportant à des ventes effectuées après les réunions au cours desquelles les prix auraient été fixés, qui démontreraient que les prix appliqués différaient des prix convenus. La publication des barèmes correspondrait à une obligation légale et n’aurait été qu’une formalité.

178    Premièrement, force est de constater que la Commission a répondu à l’argument de la requérante tiré de la nature prétendument indicative des barèmes, à tout le moins implicitement, aux considérants 481 et 492 de la décision attaquée. Par ailleurs, la Commission a expressément indiqué, aux considérants 494 et 495 de la décision attaquée, que les parties avaient insisté sur la distinction entre prix de barème et prix effectivement appliqués sur le marché, mais a conclu que cette distinction n’apparaîssait pas déterminante. La Commission a également souligné ce qui suit :

« (494)      [… À] l’exception de Feralpi et Alfa (qui ont fourni des prix moyens), les autres entreprises ont fourni à la Commission des échantillons de factures relatives aux périodes pendant lesquelles les augmentations de prix étaient décidées. Or, sur la base d’échantillons, il n’est pas possible de vérifier si le prix moyen pratiqué correspond au prix de barème ou diverge de celui-ci, puisqu’on ne sait pas, par exemple, quelles factures correspondent à des clients normaux ou privilégiés. On peut seulement affirmer que, pour les transactions documentées, les prix était différents, mais cela ne démontre en rien que les prix pratiqués pour l’ensemble des transactions réalisées durant les jours ou les périodes suivant les augmentations aient été différents de ceux des barèmes.

(495)            Même dans les cas où les prix moyens ont été fournis, on ne peut pas exclure que la divergence ait été liée à la conjoncture du marché (par exemple, pression des importations en provenance de pays tiers, demande saisonnière, marge de négociation) ou à la volonté d’exploiter l’entente à son propre avantage […] »

179    Deuxièmement, s’agissant du bien-fondé de l’argument de la requérante, il ressort de la jurisprudence du Tribunal, rappelée au considérant 481 de la décision attaquée, que le fait qu’une entreprise ne se plie pas aux résultats des réunions ayant un objet manifestement anticoncurrentiel n’est pas de nature à la priver de sa pleine responsabilité du fait de sa participation à l’entente, dès lors qu’elle ne s’est pas distanciée publiquement du contenu des réunions. À supposer même que le comportement sur le marché de la requérante et celui des autres producteurs, qui auraient annoncé des objectifs de prix différents, n’auraient pas été conformes au comportement convenu, cela n’affecte en rien leur responsabilité (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 mai 1998, Sarrió/Commission, T‑334/94, Rec. p. II‑1439, point 118, confirmé sur pourvoi par arrêt de la Cour du 16 novembre 2000, Sarrió/Commission, C‑291/98 P, Rec. p. I‑9991, points 43 et 49), dès lors qu’ils ont simplement pu tenter d’utiliser l’entente à leur profit (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 15 juin 2005, Tokai Carbon e.a./Commission, T‑71/03, T‑74/03, T‑87/03 et T‑91/03, non publié au Recueil, point 74, et la jurisprudence citée). La requérante ne saurait affirmer de manière générale, dans la réplique, qu’« il n’y a aucune preuve de la participation d’IRO aux réunions », la Commission ayant fait état, au considérant 559 de la décision attaquée, de la participation de la requérante à de nombreuses réunions, à tout le moins à compter de 1996 (voir également le sixième moyen ci-dessous). En tout état de cause, lorsque, comme en l’occurrence, la Commission a rapporté la preuve de l’existence d’un accord, il incombe à l’entreprise y ayant pris part de rapporter la preuve qu’elle s’en est distanciée, preuve qui doit témoigner d’une volonté claire, et portée à la connaissance des autres entreprises participantes, de se soustraire à cet accord (voir arrêt du Tribunal du 27 septembre 2006, GlaxoSmithKline Services/Commission, T‑168/01, Rec. p. II‑2969, point 86, et la jurisprudence citée). En outre, l’approbation tacite d’une initiative illicite, sans se distancier publiquement de son contenu ou la dénoncer aux entités administratives, a pour effet d’encourager la continuation de l’infraction et compromet sa découverte. Cette complicité constitue un mode passif de participation à l’infraction qui est donc de nature à engager la responsabilité de l’entreprise dans le cadre d’un accord unique (arrêt Aalborg Portland e.a./Commission, point 126 supra, point 84).

180    Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que l’article 65, paragraphe 1, CA interdit les accords qui « tendraient » à empêcher, à restreindre ou à fausser le jeu normal de la concurrence. Il s’ensuit qu’est interdit, au sens de cette disposition, un accord ayant pour objet de restreindre la concurrence, mais dont les effets anticoncurrentiels n’auraient pas été établis. Dès lors que la Commission a constaté, au considérant 399 de la décision attaquée, que l’entente avait pour objet la fixation des prix en fonction de laquelle a également été convenue la limitation ou le contrôle de la production et/ou des ventes, elle n’était pas tenue de démontrer l’existence d’un effet préjudiciable sur la concurrence pour établir une violation de l’article 65, paragraphe 1, CA (arrêt de la Cour du 2 octobre 2003, Ensidesa/Commission, C‑198/99 P, Rec. p. I‑11111, points 59 et 60, et arrêt du Tribunal du 11 mars 1999, Thyssen Stahl/Commission, T‑141/94, Rec. p. II‑347, point 277) (voir également considérant 463 de la décision attaquée).

181    En quatrième lieu, l’argument de la requérante fondé sur les déclarations de l’Ansfer, selon lesquelles le marché italien aurait toujours été caractérisé par une vive concurrence sur les prix et par une concurrence qui s’est toujours révélée authentique, ne saurait davantage être retenu, dès lors que, ainsi que la Commission l’a souligné au considérant 524 de la décision attaquée, les déclarations de l’Ansfer ne peuvent pas effacer une donnée incontestable, consistant en des preuves documentaires de l’infraction. Par ailleurs, la Commission a fait état, aux considérants 512 à 524 de la décision attaquée, rappelés aux points 171 à 175 ci-dessus, que l’entente avait eu des effets réels.

182    Il s’ensuit que la présente branche doit être rejetée ainsi que le cinquième moyen dans son ensemble.

 Sur le sixième moyen, tiré de la violation de la loi pour absence d’instruction, en ce qu’IRO est tenue pour responsable d’une entente anticoncurrentielle au cours de la période 1989-1996 en l’absence de tout élément probant

183    La requérante fait valoir que la Commission n’a fondé sa constatation selon laquelle IRO a participé à l’entente entre 1989 et janvier 1996 sur aucun élément probant. Ainsi, ce serait à tort que la Commission a déduit la participation d’IRO à l’accord du 6 décembre 1989 et à celui d’avril 1992. Il n’existerait, à cet égard, aucune preuve, jusqu’en 1996, de la participation d’IRO à une réunion ou à un accord tendant à fixer les prix de base ou les prix des suppléments de dimension des ronds à béton en Italie.

184    Elle soutient en particulier que la Commission lui reproche d’avoir participé à l’entente sur les prix des suppléments de dimension à partir du 6 décembre 1989 en se fondant, d’une part, sur le fait qu’elle aurait reçu une télécopie de la Federacciai et, d’autre part, sur la communication par IRO de ses barèmes de prix alignés sur les prix identifiés au cours des réunions. Ainsi, la Commission ne pourrait démontrer, sur la base des preuves qu’elle a recueillies, qu’IRO a participé à la réunion en cause, puisque la télécopie aurait été envoyée à toutes les entreprises, y compris à celles n’ayant pas adhéré à la Federacciai. En outre, s’agissant de l’accord d’avril 1992 sur le prix de base, la Commission se fonderait sur un document non signé, dont la provenance serait incertaine, qui serait dépourvu de valeur probante et qui, même s’il avait fait l’objet d’une discussion, n’aurait jamais connu aucune application concrète.

185    La Commission aurait admis, premièrement, aux considérants 465 et 466 de la décision attaquée, qu’elle ne pouvait identifier les participants aux réunions qu’à partir de février 1996. Aucune preuve de la participation d’IRO aux réunions organisées en vue de la fixation des prix, jusqu’en 1996, n’aurait été versée au dossier. Deuxièmement, la participation de la requérante à l’entente ne saurait se déduire de la réception de télécopies de la Federacciai, ces documents étant habituellement adressés à toutes les entreprises du secteur. À cet égard, la requérante ne saurait être tenue pour responsable en raison du fait qu’elle aurait prétendument aligné ses prix sur les prix convenus, dès lors que, primo, les barèmes n’auraient pas été représentatifs des prix sur le marché, secundo, l’analyse des prix en possession de la Commission montrerait l’absence de tout alignement réel et délibéré, tertio, certaines augmentations auraient concerné tout le secteur des ronds à béton, soit environ 50 entreprises, quarto, les variations de prix ne seraient pas aussi concomitantes que le suggère la Commission et, quinto, l’alignement tendanciel sur les conditions appliquées par la concurrence constituerait un cas typique de parallélisme de comportement induit par la nature même du marché. Troisièmement, les communications de la requérante à la Federacciai n’auraient pas contenu de référence aux prix, mais aux quantités. Par ailleurs, les communications parvenaient aux entreprises par le biais de leur propre association professionnelle, ce qui était de nature à faire croire aux destinataires des télécopies, étrangers à la prétendue entente, que ces communications faisaient partie de la politique de transparence des conditions contractuelles propres au marché concerné. Quatrièmement, les renvois opérés par la Commission à des décisions ou arrêts antérieurs seraient dénués de pertinence.

186    Dans la décision attaquée, la Commission a constaté que l’entente pratiquée entre les entreprises destinataires de celle-ci a eu lieu durant la période comprise entre 1989 et 2000 et qu’elle avait pour objet la fixation des prix en fonction de laquelle a été également convenue la limitation ou le contrôle de la production ou des ventes (considérant 399 de la décision attaquée). En ce qui concerne la fixation des prix, la Commission a relevé que l’entente s’était articulée essentiellement dans les accords ou pratiques concertées relatifs au prix de base du 15 avril 1992 jusqu’au 4 juillet 2000 (et, jusqu’en 1995, relatifs aux délais de paiement) et dans les accords ou pratiques concertées relatifs aux « suppléments » du 6 décembre 1989 au 1er juin 2000 (considérant 400 de la décision attaquée). Quant aux comportements concernant la limitation ou le contrôle de la production ou des ventes, la Commission a indiqué qu’ils avaient été pratiqués du 13 juin 1995 au 23 mai 2000 (considérants 457 et 458 de la décision attaquée) et que cette partie de l’entente était indissolublement liée à l’entente concernant la fixation du prix minimal, puisque son objectif était également l’augmentation du prix (considérants 449, 451, 452, 453, 454, 455, 456, 458, 462 et 507 de la décision attaquée).

187    La Commission a donc conclu que les agissements constatés constituaient une infraction unique, complexe et continue qui pouvait être qualifiée comme une seule infraction s’étant concrétisée à travers un comportement continu constitué tant par des accords que par des pratiques concertées, qui poursuivaient tous le même objectif, à savoir l’augmentation des prix des ronds à béton. (considérants 436, 437, 442, 444, 458, 462, 507, 508 et 510 de la décision attaquée).

188    Pour ce qui est de la requérante, la Commission a affirmé qu’il était certain que la participation de celle-ci à l’entente avait duré au moins du 6 décembre 1989 au 27 juin 2000. La Commission a ainsi noté que la requérante avait adhéré à la partie de l’entente relative à la fixation des prix des « suppléments de dimension » à partir du 6 décembre 1989 et que, lorsque l’objet de l’entente s’était étendu à la fixation du prix de base (y compris, jusqu’au 30 septembre 1995, aux délais de paiement), elle avait immédiatement participé au système fondé sur l’accord d’avril 1992 (considérants 559 et 606 de la décision attaquée).

189    À titre liminaire, il doit être rappelé que l’article 65 CA interdit notamment tous les accords entre entreprises et toutes les pratiques concertées qui tendraient, sur le marché commun, directement ou indirectement, à empêcher, restreindre ou fausser le jeu normal de la concurrence et en particulier à fixer ou déterminer les prix, à restreindre ou à contrôler la production, le développement technique ou les investissements ou à répartir les marchés, produits, clients ou sources d’approvisionnement (voir point 3 ci-dessus).

190    La notion d’accord au sens de l’article 65, paragraphe 1, CA résulte de l’expression, par les entreprises participantes, de la volonté commune de se comporter sur le marché d’une manière déterminée (voir, s’agissant de l’article 81, paragraphe 1, CE, arrêt de la Cour du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, Rec. p. I‑4125, point 130 ; voir, s’agissant de l’article 65, paragraphe 1, CA, arrêt Thyssen Stahl/Commission, point 180 supra, point 262 ; voir également considérant 403 de la décision attaquée).

191    Par ailleurs, ainsi que la Commission l’a relevé aux considérants 491 et 492 de la décision attaquée, la notion de pratique concertée au sens de cette même disposition vise une forme de coordination entre entreprises qui, sans avoir été poussée jusqu’à la réalisation d’une convention proprement dite, substitue sciemment une coopération pratique entre elles aux risques de la concurrence (arrêts de la Cour du 16 décembre 1975, Suiker Unie e.a./Commission, 40/73 à 48/73, 50/73, 54/73 à 56/73, 111/73, 113/73 et 114/73, Rec. p. 1663, point 26 ; du 31 mars 1993, Ahlström Osakeyhtiö e.a./Commission, C‑89/85, C‑104/85, C‑114/85, C‑116/85, C‑117/85 et C‑125/85 à C‑129/85, Rec. p. I‑1307, point 63 ; Commission/Anic Partecipazioni, point 190 supra, point 115, et du 8 juillet 1999, Hüls/Commission, C‑199/92 P, Rec. p. I‑4287, point 158 ; arrêt Thyssen Stahl/Commission, point 180 supra, point 266).

192    La Cour a ajouté que les critères de coordination et de coopération devaient être interprétés à la lumière de la conception inhérente aux dispositions du traité relatives à la concurrence, selon laquelle tout opérateur économique doit déterminer de manière autonome la politique qu’il entend suivre sur le marché commun (arrêts de la Cour Suiker Unie e.a./Commission, point 191 supra, point 173 ; Ahlström Osakeyhtiö e.a./Commission, point 191 supra, point 63 ; Commission/Anic Partecipazioni, point 190 supra, point 116, et du 2 octobre 2003, Corus UK/Commission, C‑199/99 P, Rec. p. I‑11177, point 106).

193    Selon cette jurisprudence, si cette exigence d’autonomie n’exclut pas le droit des opérateurs économiques de s’adapter intelligemment au comportement constaté ou à escompter de leurs concurrents, elle s’oppose cependant rigoureusement à toute prise de contact directe ou indirecte entre de tels opérateurs de nature soit à influencer le comportement sur le marché d’un concurrent actuel ou potentiel, soit à dévoiler à un tel concurrent le comportement que l’on est décidé à, ou que l’on envisage de, tenir soi-même sur le marché, lorsque ces contacts ont pour objet ou pour effet d’aboutir à des conditions de concurrence qui ne correspondraient pas aux conditions normales du marché en cause, compte tenu de la nature des produits ou des prestations fournies, de l’importance et du nombre des entreprises et du volume dudit marché (arrêts Suiker Unie e.a./Commission, point 191 supra, point 174 ; Commission/Anic Partecipazioni, point 190 supra, point 117 ; Hüls/Commission, point 191 supra, point 160, et Corus UK/Commission, point 192 supra, point 107).

194    Il y a en outre lieu de présumer, sous réserve de la preuve contraire qu’il incombe aux opérateurs intéressés de rapporter, que les entreprises participant à la concertation et qui demeurent actives sur le marché tiennent compte des informations échangées avec leurs concurrents pour déterminer leur comportement sur ce marché. Il en sera d’autant plus ainsi lorsque la concertation a lieu sur une base régulière au cours d’une longue période (arrêt Commission/Anic Partecipazioni, point 190 supra, point 121 ; voir également, en ce sens, arrêt Hüls/Commission, point 191 supra, point 162).

195    Par ailleurs, il convient de rappeler que la comparaison entre la notion d’accord et celle de pratique concertée fait apparaître que, du point de vue subjectif, elles appréhendent des formes de collusion qui partagent la même nature et ne se distinguent que par leur intensité et par les formes dans lesquelles elles se manifestent (arrêt Commission/Anic Partecipazioni, point 190 supra, point 131).

196    Il y a finalement lieu de rappeler que, pour établir l’existence d’une infraction à l’article 65, paragraphe 1, CA, il est nécessaire que la Commission fasse état de preuves sérieuses, précises et concordantes. Toutefois, chacune des preuves apportées par cette dernière ne doit pas nécessairement répondre à ces critères par rapport à chaque élément de l’infraction. Il suffit que le faisceau d’indices invoqués par ladite institution, apprécié globalement, réponde à cette exigence (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 1er juillet 2010, Knauf Gips/Commission, C‑407/08 P, Rec. p. I‑6375, point 47, et la jurisprudence citée).

197    Dès lors, à supposer même qu’aucun des différents éléments de l’infraction en cause ne constitue, considéré séparément, un accord ou une pratique concertée interdits par l’article 65, paragraphe 1, CA, une telle conclusion n’empêche pas que lesdits éléments, considérés dans leur ensemble, constituent un tel accord ou une telle pratique (voir, en ce sens, arrêt Knauf Gips/Commission, point 196 supra, point 48).

198    En effet, ainsi que la Cour l’a déjà jugé, étant donné que l’interdiction de participer à des pratiques et à des accords anticoncurrentiels ainsi que les sanctions que les contrevenants peuvent encourir sont notoires, il est usuel que les activités que ces pratiques et ces accords comportent se déroulent de manière clandestine, que les réunions se tiennent secrètement, le plus souvent dans un État tiers, et que la documentation y afférente soit réduite au minimum. Même si la Commission découvre des pièces attestant de manière explicite une prise de contact illégitime entre des opérateurs, telles que les comptes rendus d’une réunion, celles-ci ne seront normalement que fragmentaires et éparses, de sorte qu’il se révèle souvent nécessaire de reconstituer certains détails par des déductions. Dans la plupart des cas, l’existence d’une pratique ou d’un accord anticoncurrentiel doit être inférée d’un certain nombre de coïncidences et d’indices qui, considérés ensemble, peuvent constituer, en l’absence d’une autre explication cohérente, la preuve d’une violation des règles de la concurrence (arrêt Knauf Gips/Commission, point 196 supra, point 49 ; voir également, en ce sens, arrêt Aalborg Portland e.a./Commission, point 126 supra, points 55 à 57).

199    En premier lieu, la requérante affirme qu’il n’y a aucune preuve qu’elle a participé à une entente tendant à fixer les prix de base ou ceux des suppléments de dimension du 6 décembre 1989 jusqu’à 1996, la Commission ayant admis, aux considérants 465 et 466 de la décision attaquée, qu’elle ne pouvait identifier les participants aux réunions qu’à partir de 1996. Pour démontrer cette absence de participation à l’entente, la requérante affirme qu’il n’y a pas de preuve de sa participation à la réunion du 6 décembre 1989 et qu’elle n’a pas participé à l’accord d’avril 1992.

200    Premièrement, la requérante soutient que la Commission ne peut démontrer, sur la base des preuves qu’elle a recueillies, qu’elle a participé à la réunion du 6 décembre 1989, puisque la télécopie faisant état de cette réunion aurait été envoyée à toutes les entreprises, y compris à celles n’ayant pas adhéré à la Federacciai.

201    Il y a lieu de souligner, s’agissant de la fixation des prix des suppléments de dimension, qu’il ressort du dossier que la première réunion des entreprises productrices de ronds à béton en Italie, dont la Commission a eu connaissance, s’est tenue le 6 décembre 1989 et que, au cours de cette réunion, les participants ont décidé à l’unanimité d’augmenter, à une date convenue, les suppléments liés au diamètre pour les ronds à béton, en barres et en rouleaux, destinés au marché italien. Pour étayer cette affirmation, la Commission s’est fondée sur une télécopie de la Federacciai du jour même de la réunion, envoyée à toutes les entreprises productrices de ronds à béton en Italie, par laquelle elle a communiqué les conclusions de cette réunion, en rappelant les augmentations qui avaient été décidées et en précisant leur date d’entrée en vigueur, soit le 11 décembre 1989. Or, même en l’absence d’une participation de la requérante à cette réunion, il doit être relevé qu’il ressort du considérant 127 de la décision attaquée que la requérante a modifié les prix de ses suppléments conformément aux décisions mentionnées dans la télécopie du 6 décembre 1989.

202    Par ailleurs, bien que la requérante ne se fonde explicitement que sur son absence de participation à la réunion du 6 décembre 1989, il y a lieu de souligner qu’elle ne conteste pas, dans ses écritures, qu’elle fait partie des entreprises qui ont modifié à plusieurs reprises, et de manière quasi identique, les suppléments de dimension le 21 mars et le 2 avril 1990, le 1er et le 20 août 1990, le 17 janvier et le 1er février 1991 et le 1er et le 28 août 1991 (considérant 128 de la décision attaquée). Elle ne conteste pas non plus avoir également été destinataire a) de la communication de la Federacciai du 25 janvier 1993 (considérant 135 de la décision attaquée) et avoir modifié les prix correspondants en conséquence (considérant 136 de la décision attaquée), b) de la communication de la Federacciai du 1er avril 1993 et avoir adapté ses prix en conséquence (considérant 137 de la décision attaquée), c) de la communication de la Federacciai du 7 février 1994 (considérant 138 de la décision attaquée) et avoir adopté les augmentations concernées à la date convenue (considérant 139 de la décision attaquée), d) de la communication de la Federacciai du 30 août 1994 (considérant 140 de la décision attaquée) et avoir modifié ses prix en conséquence (considérant 141 de la décision attaquée), e) et de la communication du 22 février 1995 (considérant 149 de la décision attaquée), qu’elle a mise en œuvre le même jour (considérant 150 de la décision attaquée) (voir également le considérant 439 de la décision attaquée).

203    Eu égard à ces éléments et à la jurisprudence rappelée aux points 192 à 194 ci-dessus, la requérante ne saurait affirmer que la Commission aurait dû prouver sa participation à la réunion du 6 décembre 1989. Il s’ensuit que c’est à bon droit que la Commission a considéré que la requérante avait commencé à participer à l’entente relative à la fixation des prix des suppléments de dimension à cette date, même en l’absence de preuve de participation à cette réunion.

204    Deuxièmement, la requérante affirme que, pour établir l’accord sur le prix de base qui serait entré en vigueur en avril 1992, la Commission s’est fondée sur un document non signé, dont la provenance serait incertaine, qui serait dépourvu de valeur probante et qui, même s’il avait fait l’objet d’une discussion, n’aurait jamais connu aucune application concrète.

205    Il ressort de ce document qu’il s’agit d’un projet d’accord entre 19 entreprises productrices de ronds en béton en Italie, parmi lesquelles figure la requérante, qui avait pour principal objectif d’obliger les parties à respecter les prix minimaux de vente des ronds à béton sur le marché italien, qui y étaient visés. Le projet d’accord, qui devait, selon son article 2, entrer en vigueur le 13 avril 1992, prendre fin le 30 juillet 1992 et être renouvelé trimestriellement par les parties, contenait, outre des prix minimaux, des dispositions relatives aux délais de paiement ou aux contrôles.

206    S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel rien ne prouverait que ledit projet a été mis en œuvre, il ressort du dossier, et notamment du protocole d’adhésion produit par la Commission et cité au considérant 130 de la décision attaquée, que huit entreprises qui n’étaient pas parties à l’accord ont souhaité adhérer « [à] l’esprit et aux conditions de l’accord existant » entre certains producteurs de ronds à béton, pour toute la période de validité de cet accord. Ainsi que la Commission l’a relevé au considérant 478 de la décision attaquée, le protocole d’adhésion mentionne également que « l’acceptation concerne aussi le dernier prix de base décidé pour juin (235 ITL/kg) et les variations ultérieures qui seront décidées par tous les producteurs adhérents ». Eu égard à ces considérations, les arguments de la requérante selon lesquels ledit projet serait dépourvu de valeur probante dès lors qu’il serait non signé et incomplet ou que certaines dispositions de l’accord ne sembleraient pas avoir été mises en œuvre, en raison notamment de l’absence d’indication de la société de révision comptable qui aurait dû contrôler le respect de l’accord, sont dépourvus de pertinence. D’une part, selon une jurisprudence constante, la notion d’accord est axée sur l’existence d’une concordance de volontés entre deux parties au moins, dont la forme de manifestation n’est pas importante pour autant qu’elle constitue l’expression fidèle de celles-ci (voir, s’agissant de l’application de l’article 81 CE, arrêt du Tribunal du 9 juillet 2009, Peugeot et Peugeot Nederland/Commission, T‑450/05, Rec. p. II‑2533, point 170, et la jurisprudence citée). D’autre part, l’interdiction de participer à des pratiques et à des accords anticoncurrentiels ainsi que les sanctions que les contrevenants peuvent encourir étant notoires, il est usuel que la documentation y afférente soit réduite au minimum (voir point 198 ci-dessus).

207    En deuxième lieu, la requérante affirme que sa participation à l’entente ne saurait être déduite du fait qu’elle a reçu des télécopies de sa propre association professionnelle, ces documents étant adressés habituellement à toutes les entreprises du secteur, en sorte que la Commission aurait dû démontrer qu’elle avait participé aux réunions au cours desquelles les prix étaient fixés par les participants. Or, une telle démonstration serait inexistante jusqu’en 1996. Un tel argument doit toutefois également être rejeté, pour les motifs figurant aux points 201 à 203 ci-dessus.

208    En troisième lieu, la requérante affirme qu’il n’est pas justifié de lui infliger une amende au motif qu’elle a communiqué en certaines occasions à la Federacciai les quantités de ronds à béton qu’elle avait produites ou vendues, ces communications ne contenant pas de référence aux prix. À cet égard, force est de constater, ainsi que la Commission l’a souligné au considérant 559 de la décision attaquée, que les informations communiquées à la Federacciai devaient permettre à celle-ci de gérer l’entente de manière efficace, ce que la requérante ne pouvait ignorer. En effet, les demandes adressées aux entreprises en cause par la Federacciai pour qu’elles lui envoient les données relatives aux livraisons sur les marchés italien et étrangers étaient généralement formulées dans les télécopies informant lesdites entreprises, parmi lesquelles IRO, des augmentations de prix, fixant les dates des réunions ultérieures et spécifiant parfois que ces télécopies devaient être détruites après réception (voir notamment les considérants 143, 144, 147 et 171 à 176 de la décision attaquée, que la requérante a affirmé ne pas contester lors de l’audience). Son argument tiré de la prétendue communication légitime de données ne saurait donc être accueilli.

209    En quatrième lieu, la requérante conteste qu’elle se soit alignée sur les prix qui auraient été décidés lors des réunions et dont elle aurait été informée par les communications de la Federacciai.

210    Premièrement, elle affirme que, en l’état de leur publication, les barèmes n’auraient pas été représentatifs des prix pratiqués sur le marché. Ainsi qu’il ressortirait des factures produites au cours de la procédure administrative, IRO aurait appliqué d’autres prix que les prix publiés, ces derniers pouvant constituer tout au plus une référence indiquant une tendance.

211    S’agissant des factures produites par la requérante, il y a lieu de considérer qu’elles ne sauraient constituer la preuve du fait qu’elle n’a pas tenu compte des informations échangées avec les autres opérateurs, puisque, ainsi que la Commission l’a indiqué à juste titre au considérant 494 de la décision attaquée, sur la base d’échantillons, il n’est pas possible de vérifier si le prix moyen pratiqué correspond à celui décidé dans le cadre de l’entente ou diverge de celui-ci, puisqu’on ne sait pas, par exemple, quelles factures correspondent à des clients normaux et quelles autres à des clients privilégiés. Ainsi, on peut seulement affirmer que, pour les transactions documentées, les prix étaient différents, mais cela ne démontre en rien que les prix pratiqués pour l’ensemble des transactions réalisées durant les jours ou les périodes suivant les augmentations aient été différents de ceux décidés par l’entente. En outre, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 179 ci-dessus, la requérante a simplement pu tenter d’utiliser l’entente à son profit.

212    Deuxièmement, la requérante fait valoir que l’analyse des prix en possession de la Commission démontrerait l’absence d’alignement réel et délibéré, les prix tendant à s’aligner naturellement sur un marché caractérisé par un nombre de producteurs relativement réduit, par la transparence des prix, par l’homogénéité totale des produits, par le caractère essentiel de ceux-ci et par une clientèle composée d’opérateurs professionnels. Telle serait aussi la raison pour laquelle des écarts de prix, même minimes, seraient symptomatiques de l’existence d’une concurrence et de l’absence de collusion. Par ailleurs, les variations de prix ne seraient pas aussi concomitantes que la Commission le suggérerait, puisqu’il aurait existé des écarts de quelques jours.

213    Un tel argument doit être rejeté, dès lors que, en l’espèce, l’alignement à la hausse des prix des suppléments de dimension dérive d’un commun accord, parfois tacite et parfois explicite, visant à ce que les participants ne se fassent pas de concurrence (considérant 440 de la décision attaquée) et que, du 6 décembre 1989 jusqu’en 2000, au moins 19 augmentations des prix desdits suppléments ont été décidées et appliquées (considérant 439 de la décision attaquée). Ainsi, la thèse d’un alignement intelligent à la suite de l’initiative d’un producteur important ne saurait être retenue, dès lors que la Commission a apporté la preuve d’ententes en matière d’augmentation des suppléments de prix et qu’il existait une conviction commune concernant la condition selon laquelle les suppléments devaient toujours être uniformes parmi les producteurs (considérants 441, 489 et note en bas de page n° 542 de la décision attaquée). Par ailleurs, ainsi que la Commission l’a souligné à juste titre au considérant 440 de la décision attaquée, si l’alignement des prix des suppléments de dimension avait été le résultat de l’évolution normale du marché, il serait difficile de comprendre pourquoi les parties auraient éprouvé la nécessité de se réunir régulièrement pour s’accorder sur ces augmentations.

214    Troisièmement, certaines augmentations prétendument convenues auraient concerné tous les producteurs de ronds à béton, dont un grand nombre n’avaient pas adhéré à la Federacciai, en sorte que toutes les entreprises du secteur auraient pris part à l’entente, ce qui constituerait une solution extrême à laquelle la Commission n’aboutirait pas. Il convient toutefois de considérer que la requérante ne saurait tirer argument du fait que d’autres entreprises qui étaient également destinataires des communications de la Federacciai n’ont pas été poursuivies. Ainsi que la Commission l’a précisé au considérant 551 de la décision attaquée, les entreprises impliquées dans la présente procédure sont les plus importantes du secteur et celles vis-à-vis desquelles les enquêtes ont permis de rassembler le plus de preuves. Or, il résulte des développements qui précèdent que la Commission a réuni suffisamment de preuves justifiant des poursuites à l’encontre de la requérante. 

215    Quatrièmement, la requérante souligne que l’alignement tendanciel sur les conditions appliquées par la concurrence constitue un cas typique de parallélisme de comportement, induit par la nature même du marché, la publicité obligatoire prévue par l’article 60, paragraphe 2, CA ayant précisément pour but de permettre aux entreprises de connaître exactement les prix de leurs concurrents pour leur permettre de s’aligner. Face à cette transparence institutionnalisée, l’alignement sur les prix communiqués ne saurait aucunement constituer une preuve de participation à une entente visant à la fixation des prix. Par ailleurs, les informations sur les prix de vente auraient de toute manière été disponibles du fait de l’obligation de communiquer les barèmes.

216    Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la publicité obligatoire des prix prévue par l’article 60, paragraphe 2, CA avait pour but, tout d’abord, d’empêcher autant que possible les pratiques interdites, ensuite, de permettre aux acheteurs de se renseigner exactement sur les prix et de participer également au contrôle des discriminations et, enfin, de permettre aux entreprises de connaître exactement les prix de leurs concurrents, pour leur donner la possibilité de s’aligner (voir arrêt Thyssen Stahl/Commission, point 180 supra, point 308, et la jurisprudence citée).

217    Il est également de jurisprudence constante que les prix qui figurent dans les barèmes doivent être fixés par chaque entreprise de façon indépendante, sans accord, même tacite, entre elles. En particulier, le fait que les dispositions de l’article 60 CA ont tendance à restreindre la concurrence n’empêche pas l’application de l’interdiction des ententes prévue par l’article 65, paragraphe 1, CA. Par ailleurs, l’article 60 CA ne prévoit aucun contact entre les entreprises, préalable à la publication des barèmes, aux fins d’une information mutuelle sur leurs prix futurs. Or, dans la mesure où de tels contacts empêchent que ces mêmes barèmes soient fixés de façon indépendante, ils sont susceptibles de fausser le jeu normal de la concurrence, au sens de l’article 65, paragraphe 1, CA (voir arrêt Thyssen Stahl/Commission, point 180 supra, points 312 et 313, et la jurisprudence citée).

218    Dès lors que l’alignement des prix de la requérante était le résultat d’une concertation préalable et non de la publication desdits prix, celle-ci ne saurait tirer argument, pour se soustraire à sa responsabilité du fait de sa participation à l’entente, du fait que le parallélisme des comportements, qui ne serait en tout état de cause pas démontré, pourrait s’expliquer à la lumière des conditions normales du marché.

219    En cinquième lieu, la requérante souligne que l’origine des communications, qui lui parvenaient par l’intermédiaire de sa propre association professionnelle, et la nature des données agrégées et relatives à des données connues par ailleurs ou devant être publiées dans un bref délai étaient de nature à laisser croire aux destinataires des télécopies, étrangers à la prétendue entente, que ces communications faisaient partie de la politique de transparence des conditions contractuelles propres au marché considéré, en sorte que les entreprises en cause avaient pu estimer que ces données, fournies par la Federacciai, étaient indicatives de la tendance du marché.

220    Un tel argument ne saurait pas non plus être accueilli. Tout d’abord, contrairement à ce que soutient la requérante, et ainsi qu’il ressort du dossier, les données qui étaient communiquées aux entreprises par la Federacciai ne l’étaient pas sous forme agrégée, mais sous forme détaillée. Ensuite, ces données ne pouvaient pas non plus être interprétées comme étant indicatives de la tendance du marché, certaines télécopies indiquant des dates précises pour les augmentations qui y étaient mentionnées. Enfin, la requérante ne pouvait nourrir aucun doute raisonnable sur le caractère illicite de son comportement, certaines communications de celle-ci portant la mention « À détruire après lecture » (voir, à cet égard, notamment les considérants 160, 161, 164, 425, 588 et 596 de la décision attaquée).

221    Eu égard à l’ensemble des développements qui précèdent, il y a lieu de rejeter le sixième moyen.

 Sur le septième moyen, tiré de la violation des principes d’égalité de traitement, de confiance légitime, de proportionnalité et d’adéquation dans la détermination du montant de la sanction

222    La requérante soutient, à titre subsidiaire, que la décision attaquée doit être réformée dans sa partie relative au montant de l’amende, pour violation des principes d’égalité de traitement, de confiance légitime, de proportionnalité et d’adéquation, dès lors que la Commission n’aurait pas tenu compte de nombreux éléments constitutifs de circonstances atténuantes et lui aurait infligé une amende totalement disproportionnée eu égard aux circonstances de fait de l’affaire et à sa taille.

 Observations liminaires

223    Il convient de rappeler qu’il résulte d’une jurisprudence constante que la Commission bénéficie d’un large pouvoir d’appréciation pour ce qui est de la méthode de calcul du montant des amendes. Cette méthode, circonscrite par les lignes directrices de 1998, comporte différents éléments de flexibilité permettant à la Commission d’exercer son pouvoir d’appréciation en conformité avec les dispositions de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 (voir, en ce sens, arrêt Papierfabrik August Koehler e.a./Commission, point 125 supra, point 112, et la jurisprudence citée).

224    La gravité des infractions au droit de la concurrence de l’Union doit être établie en fonction d’un grand nombre d’éléments, tels que, notamment, les circonstances particulières de l’affaire, son contexte et la portée dissuasive des amendes, et ce sans qu’ait été établie une liste contraignante ou exhaustive de critères devant obligatoirement être pris en compte (arrêts de la Cour du 19 mars 2009, Archer Daniels Midland/Commission, C‑510/06 P, Rec. p. I‑1843, point 72, et Prym et Prym Consumer/Commission, point 125 supra, point 54).

225    Ainsi qu’il a été exposé au point 33 ci-dessus, la Commission a, en l’espèce, déterminé le montant des amendes en faisant application de la méthode définie dans les lignes directrices de 1998.

226    Si les lignes directrices de 1998 ne sauraient être qualifiées de règle de droit à l’observation de laquelle l’administration serait, en tout cas, tenue, elles énoncent toutefois une règle de conduite indicative de la pratique à suivre dont l’administration ne peut s’écarter, dans un cas particulier, sans donner des raisons qui soient compatibles avec le principe d’égalité de traitement (voir arrêt de la Cour du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, point 209, et la jurisprudence citée ; arrêt du Tribunal du 8 octobre 2008, Carbone-Lorraine/Commission, T‑73/04, Rec. p. II‑2661, point 70).

227    En adoptant de telles règles de conduite et en annonçant par leur publication qu’elle les appliquera dorénavant aux cas concernés par celles-ci, la Commission s’autolimite dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation et ne saurait se départir de ces règles sous peine de se voir sanctionner, le cas échéant, au titre d’une violation de principes généraux du droit, tels que l’égalité de traitement ou la protection de la confiance légitime (voir arrêt Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 226 supra, point 211, et la jurisprudence citée ; arrêt Carbone-Lorraine/Commission, point 226 supra, point 71).

228    En outre, les lignes directrices de 1998 déterminent, de manière générale et abstraite, la méthodologie que la Commission s’est imposée aux fins de la fixation du montant des amendes et assurent, par conséquent, la sécurité juridique des entreprises (arrêt Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 226 supra, points 211 et 213).

229    Conformément aux lignes directrices de 1998, la méthodologie applicable pour le montant de l’amende repose sur la fixation d’un montant de base auquel s’appliquent des majorations pour tenir compte des circonstances aggravantes et des diminutions pour tenir compte des circonstances atténuantes.

230    Selon le point 1 des lignes directrices de 1998, le montant de base est déterminé en fonction de la gravité et de la durée de l’infraction.

231    S’agissant de l’appréciation de la gravité de l’infraction, les lignes directrices de 1998 indiquent, au point 1 A, premier et deuxième alinéas, ce qui suit :

« [L]’évaluation du caractère de gravité de l’infraction doit prendre en considération la nature propre de l’infraction, son impact concret sur le marché lorsqu’il est mesurable et l’étendue du marché géographique concerné.

Les infractions seront ainsi classées en trois catégories permettant de distinguer les infractions peu graves, les infractions graves et les infractions très graves. »

232    Il ressort des lignes directrices de 1998 que les infractions peu graves pourront, par exemple, consister en des « restrictions, le plus souvent verticales, visant à limiter les échanges mais dont l’impact sur le marché reste limité, ne concernant en outre qu’une partie substantielle mais relativement étroite du marché communautaire » (point 1 A, deuxième alinéa, premier tiret, des lignes directrices de 1998). Quant aux infractions graves, la Commission précise qu’« il s’agira le plus souvent de restrictions horizontales ou verticales de même nature que dans le cas [des infractions peu graves], mais dont l’application est plus rigoureuse, dont l’impact sur le marché est plus large et qui peuvent produire leurs effets sur des zones étendues du marché commun ». Elle indique également qu’il pourrait « s’agir de comportements abusifs de position dominante » (point 1 A, deuxième alinéa, deuxième tiret, des lignes directrices de 1998). S’agissant des infractions très graves, la Commission indique qu’il s’agit « pour l’essentiel de restrictions horizontales de type ‘cartels de prix’ et de quotas de répartition des marchés, ou autres pratiques portant atteinte au bon fonctionnement du marché intérieur, telles que celles visant à cloisonner les marchés nationaux ou d’abus caractérisés de position dominante d’entreprise en situation de quasi-monopole » (point 1 A, deuxième alinéa, troisième tiret, des lignes directrices de 1998).

233    La Commission précise également que, d’une part, à l’intérieur de chacune de ces catégories, et notamment pour les catégories dites graves et très graves, l’échelle des sanctions retenues permettra de différencier le traitement qu’il convient d’appliquer aux entreprises selon la nature des infractions commises et, d’autre part, il est nécessaire de prendre en considération la capacité économique effective des auteurs d’infraction à créer un dommage important aux autres opérateurs, notamment aux consommateurs, et de déterminer le montant de l’amende à un niveau qui lui assure un caractère suffisamment dissuasif (point 1 A, troisième et quatrième alinéas, des lignes directrices de 1998).

234    Selon les lignes directrices de 1998, pour les infractions « très graves », le montant de départ envisageable des amendes va au-delà de 20 millions d’euros ; pour les infractions « graves », celui-ci peut varier entre 1 et 20 millions d’euros ; enfin, pour les infractions « peu graves », le montant de départ envisageable des amendes est compris entre 1 000 euros et 1 million d’euros (point 1 A, deuxième alinéa, premier à troisième tiret, des lignes directrices de 1998).

235    Pour ce qui concerne la durée de l’infraction, selon le point 1 B des lignes directrices de 1998, celle-ci devrait être prise en considération de manière à distinguer :

–        les infractions de courte durée (en général inférieure à un an), pour lesquelles aucun montant additionnel n’est prévu ;

–        les infractions de moyenne durée (en général de un à cinq ans), pour lesquelles un montant pouvant aller jusqu’à 50 % du montant retenu pour la gravité de l’infraction est prévu ;

–        les infractions de longue durée (en général au-delà de cinq ans), pour lesquelles un montant pouvant être fixé pour chaque année à 10 % du montant retenu pour la gravité de l’infraction est prévu.

236    Conformément aux lignes directrices de 1998, au montant de base s’appliquent des majorations pour tenir compte des circonstances aggravantes et des diminutions pour tenir compte des circonstances atténuantes.

237    S’agissant de ces dernières, le point 3 des lignes directrices de 1998 prévoit que le montant de base de l’amende peut être diminué pour les circonstances atténuantes particulières telles que, par exemple :

–        rôle exclusivement passif ou suiviste dans la réalisation de l’infraction,

–        non-application effective des accords ou pratiques infractionnels,

–        cessation des infractions dès les premières interventions de la Commission (notamment vérifications),

–        existence d’un doute raisonnable de l’entreprise sur le caractère infractionnel du comportement restrictif,

–        infractions commises par négligence et non de propos délibéré,

–        collaboration effective de l’entreprise à la procédure, en dehors du champ d’application de la communication du 18 juillet 1996 concernant la non-imposition ou la réduction du montant des amendes,

–        autres.

238    Enfin, ainsi que la Cour l’a rappelé dans ses arrêts du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission (C‑389/10 P, non encore publié au Recueil, point 129) et KME e.a./Commission (C‑272/09 P, non encore publié au Recueil, point 102), il appartient au juge de l’Union d’effectuer le contrôle de légalité qui lui incombe sur la base des éléments apportés par la partie requérante au soutien des moyens invoqués. Lors de ce contrôle, le juge ne saurait s’appuyer sur la marge d’appréciation dont dispose la Commission ni en ce qui concerne le choix des éléments pris en considération lors de l’application des critères mentionnés dans les lignes directrices de 1998 ni en ce qui concerne l’évaluation de ces éléments pour renoncer à exercer un contrôle approfondi tant de droit que de fait.

239    C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’examiner le présent moyen.

 Sur l’existence de circonstances atténuantes et sur la violation du principe de confiance légitime

240    La requérante fait valoir que la Commission n’a pas tenu compte de nombreux éléments qui seraient clairement constitutifs de circonstances atténuantes.

241    En premier lieu, la requérante soutient que la Commission, comme elle l’aurait fait par le passé, aurait dû tenir compte de la situation générale du marché des ronds à béton en Italie, qui aurait connu une période de crise, particulièrement entre 1995 et 2000, caractérisée par une baisse de la production et du nombre d’entreprises sur le marché, et d’une stagnation voire d’une baisse des prix. Ainsi, l’entente n’aurait pas eu pour objet de faire monter les prix, mais de limiter autant que possible les conséquences de la situation de crise ayant entraîné la fermeture de plusieurs entreprises et menaçant de provoquer la faillite de toutes les entreprises du secteur.

242    Un tel argument doit être rejeté. Il ressort d’une jurisprudence constante que la Commission n’est pas tenue de considérer comme circonstance atténuante la mauvaise santé financière du secteur en cause (voir arrêt du Tribunal du 29 avril 2004, Tokai Carbon e.a./Commission, T‑236/01, T‑239/01, T‑244/01 à T‑246/01, T‑251/01 et T‑252/01, Rec. p. II‑1181, point 345, et la jurisprudence citée ; arrêts du Tribunal du 29 novembre 2005, Heubach/Commission, T‑64/02, Rec. p. II‑5137, point 139, et du 19 mai 2010, Wieland-Werke e.a./Commission, T‑11/05, non publié au Recueil, point 227). En effet, il a été relevé que, généralement, les cartels naissent au moment où un secteur connaît des difficultés. Ainsi, si l’on devait suivre le raisonnement de la requérante, le montant de l’amende devrait être réduit dans la quasi-totalité des cas de cartels (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 14 décembre 2006, Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, T‑259/02 à T‑264/02 et T‑271/02, Rec. p. II‑5169, point 510 ; du 12 septembre 2007, Prym et Prym Consumer/Commission, T‑30/05, non publié au Recueil, point 207, et du 5 octobre 2011, Transcatab/Commission, T‑39/06, Rec. p. II‑6831, point 352).

243    Certes, il est vrai que, dans la pratique décisionnelle de la Commission, des crises structurelles ont parfois été considérées comme étant des circonstances atténuantes. Cependant, selon la jurisprudence citée au point précédent, la prise en compte par la Commission, dans de précédentes affaires, de la situation économique du secteur comme circonstance atténuante n’implique pas qu’elle doive nécessairement continuer à observer cette pratique (arrêts du 12 septembre 2007, Prym et Prym Consumer/Commission, point 242 supra, point 208 ; Wieland-Werke e.a./Commission, point 242 supra, point 227, et Transcatab, point 242 supra, point 353).

244    En effet, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, la pratique décisionnelle de la Commission ne saurait servir de cadre juridique aux amendes en matière de concurrence, lequel est uniquement constitué par le règlement n° 1/2003 (voir arrêt de la Cour du 7 juin 2007, Britannia Alloys & Chemicals/Commission, C‑76/06 P, Rec. p. I‑4405, point 60, et la jurisprudence citée).

245    En tout état de cause, il y a lieu de souligner que la Commission a indiqué, au considérant 64 de la décision attaquée, qu’elle connaissait le contexte économique du secteur de l’acier dans l’Union, et du rond à béton en particulier. Au considérant 68 de la décision attaquée, la Commission a également considéré, sans être contredite par la requérante, s’agissant des conditions de crise manifeste dans le secteur de la sidérurgie, que les ronds à béton, qui ne rentrent plus dans le champ d’application du système de quotas depuis le 1er janvier 1986, avaient été exclus du « régime de surveillance » en raison du fait que les ronds à béton étaient pour plus de 80 % fabriqués par de petites entreprises à faibles coûts qui ne connaissent normalement pas de difficultés. L’argument de la requérante fondé sur la prétendue grave crise économique ayant caractérisé le marché italien des ronds à béton ne saurait dès lors prospérer.

246    En deuxième lieu, la requérante affirme que l’évolution des prix prouve qu’il n’y a pas eu d’effets significatifs sur le marché, la tendance à la diminution du prix global des ronds à béton démontrant que le prétendu cartel n’a produit aucun résultat concret et n’a pas porté préjudice aux consommateurs, ce qui ressortirait incontestablement des déclarations de l’Ansfer. Les lignes directrices de 1998 qualifieraient expressément de circonstance atténuante la « non-application effective de fait des accords ou des pratiques illégales ». La Commission aurait d’ailleurs, par le passé, considéré qu’en pareilles circonstances l’infraction devait être qualifiée de seulement « grave ». Selon la requérante, la Commission aurait négligé une circonstance atténuante d’une importance considérable, tenant à l’absence de profits supplémentaires pour les entreprises participantes.

247    Premièrement, à supposer que, par son argument, la requérante vise à contester la fixation du montant de départ de l’amende au titre de la gravité, un tel argument doit être écarté.

248    Il doit en effet être rappelé que, si l’impact de l’infraction est un élément à prendre en considération pour évaluer la gravité de celle-ci, il s’agit d’un critère parmi d’autres, tels que la nature propre de l’infraction et l’étendue du marché géographique. De même, il ressort du point 1 A, premier alinéa, des lignes directrices de 1998 que cet impact est à prendre en considération uniquement lorsqu’il est mesurable (arrêts de la Cour du 9 juillet 2009, Archer Daniels Midland/Commission, C‑511/06 P, Rec. p. I‑5843, point 125, et du 3 septembre 2009, Prym et Prym Consumer/Commission, point 125 supra, point 74).

249    En ce qui concerne les ententes horizontales de prix ou de répartitions de marchés, il ressort aussi des lignes directrices de 1998 que ces ententes peuvent être qualifiées d’infractions très graves sur le seul fondement de leur nature propre, sans que la Commission soit tenue de démontrer un impact concret de l’infraction sur le marché. Dans ce cas de figure, l’impact concret de l’infraction ne constitue qu’un élément parmi d’autres qui, s’il est mesurable, peut permettre à la Commission d’augmenter le montant de départ de l’amende au-delà du montant minimal envisageable de 20 millions d’euros (arrêt du 3 septembre 2009, Prym et Prym Consumer/Commission, point 125 supra, point 75).

250    À cet égard, il importe de constater qu’il ressort du système de sanctions pour violation des règles de concurrence de l’Union, tel que mis en place par le règlement n° 1/2003 et interprété par la jurisprudence, que les ententes méritent, en raison de leur nature propre, les amendes les plus sévères. Leur éventuel impact concret sur le marché, notamment la question de savoir dans quelle mesure la restriction de concurrence a abouti à un prix de marché supérieur à celui qui aurait prévalu dans l’hypothèse de l’absence du cartel, n’est pas un critère déterminant pour la détermination du niveau des amendes. Il convient d’ajouter qu’il résulte des lignes directrices de 1998 que les accords ou les pratiques concertées visant notamment, comme en l’espèce, à la fixation des prix peuvent, sur le seul fondement de leur nature propre, être qualifiés de « très graves », sans qu’il soit nécessaire de caractériser de tels comportements par un impact ou une étendue géographique particuliers. Cette conclusion est corroborée par le fait que, si la description des infractions « graves » mentionne expressément l’impact sur le marché et les effets sur des zones étendues du marché commun, celle des infractions « très graves », en revanche, ne mentionne aucune exigence d’impact concret sur le marché ni de production d’effets sur une zone géographique particulière (voir arrêt du Tribunal du 6 mai 2009, KME Germany e.a./Commission, T‑127/04, Rec. p. II‑1167, points 65 et 66, et la jurisprudence citée).

251    En l’espèce, l’entente en cause avait pour objet la fixation des prix, mise en œuvre de différentes manières, notamment en ayant recours à la limitation ou au contrôle de la production ou des ventes, et pouvait donc être qualifiée d’infraction très grave sans que la Commission soit tenue de démontrer un impact concret de celle-ci sur le marché.

252    Deuxièmement, aucune circonstance atténuante ne saurait être reconnue à la requérante du fait de la prétendue absence d’effets de l’entente sur le marché.

253    Il convient à cet égard de rappeler que la circonstance atténuante prévue au point 3, deuxième tiret, des lignes directrices de 1998, tirée de la non-application effective des accords ou des pratiques infractionnels, est fondée sur le comportement propre à chaque entreprise. Il en résulte que, aux fins de l’évaluation de cette circonstance atténuante, il y a lieu de prendre en considération non pas les effets résultant de l’ensemble de l’infraction, qui doivent être pris en compte dans l’appréciation de l’impact concret d’une infraction sur le marché aux fins de l’évaluation de sa gravité (point 1 A, premier alinéa, des lignes directrices de 1998), mais le comportement individuel de chaque entreprise, aux fins d’examiner la gravité relative à la participation de chaque entreprise à l’infraction (arrêts du Tribunal du 25 octobre 2005, Groupe Danone/Commission, T‑38/02, Rec. p. II‑4407, point 384, et Transcatab/Commission, point 242 supra, point 273). Or, la requérante ne présente pas le moindre argument en ce sens, en sorte qu’il n’y a pas lieu de lui reconnaître le bénéfice de cette circonstance atténuante.

254    En tout état de cause, l’argument de la requérante tiré de l’évolution des prix, qui, selon elle, prouverait l’absence d’effets du cartel et l’absence de préjudice pour les consommateurs, est dépourvu de fondement.

255    Outre les développements figurant à cet égard dans le cadre du cinquième moyen, il doit être relevé, d’une part, que, la Commission ayant comme point de référence les prix moyens des suppléments de dimension de décembre 1989-janvier1990 et de mai-juin 2000, elle a estimé une augmentation du prix des suppléments d’au moins 40 % en termes réels, ce qui signifie que, même en considérant d’importantes réductions du prix de base en termes réels, les données ne semblaient pas supporter la thèse de l’étude Lear, produite par la requérante, d’une réduction du prix total de 32 % en termes réels (considérant 413 de la décision attaquée). Or, la requérante n’apporte pas d’éléments susceptibles de mettre en cause cette constatation.

256    D’autre part, l’augmentation des prix sur le marché, à tout le moins au cours de certaines périodes de l’infraction, ressort de déclarations des producteurs en cause. Ainsi, un document interne de Lucchini de janvier 1996, cité au considérant 185 de la décision attaquée, se réfère à une « légère augmentation des prix de vente » ; dans le rapport mensuel de Lucchini-SP de décembre 1998, cité au considérant 259 de la décision attaquée, il est mentionné que « l’accord entre producteurs a nettement contribué à augmenter le prix de vente » ; le rapport interne de Lucchini-SP de février 1999, cité au considérant 268 de la décision attaquée et produit par la Commission, note que « l’accord entre producteurs contribue à une tenue substantielle du prix, indépendamment du marché, lequel est caractérisé par une demande normale, pas particulièrement vive » ; enfin, un document de Leali du 10 novembre 1999, cité au considérant 276 de la décision attaquée et produit par la Commission, stipule notamment que « [l]’accord obtenu a permis de stabiliser les prix de vente en cours d’année, et les producteurs ont pu bénéficier des coûts de la matière première, en accroissant la marge brute de plus de 50 ITL/kg ». Eu égard à ces éléments, d’éventuelles déclarations de l’Ansfer à ce sujet, qui ne sont de surcroît précisées par la requérante ni dans la requête ni lors de l’audience, ne sauraient apporter la preuve de l’absence d’effets sur le marché ou de l’absence de préjudice pour les consommateurs.

257    En troisième lieu, la requérante invoque la portée limitée des accords et des effets potentiels de ceux-ci, en raison du fait que cette portée a uniquement concerné le territoire italien. Une telle circonstance aurait amené la Commission, dans sa pratique décisionnelle, à considérer des ententes sur les prix comme seulement « graves ».

258    Ainsi qu’il a été rappelé au point 231 ci-dessus, l’étendue du marché géographique est, selon les lignes directrices de 1998, prise en considération lors de l’évaluation du caractère de gravité de l’infraction.

259    À cet égard, il doit être rappelé qu’il résulte de la jurisprudence que l’étendue du marché géographique ne représente qu’un des trois critères pertinents, selon les lignes directrices de 1998, aux fins de l’appréciation globale de la gravité de l’infraction. Parmi ces critères interdépendants, la nature de l’infraction joue un rôle primordial. En revanche, l’étendue du marché géographique n’est pas un critère autonome en ce sens que seules des infractions concernant plusieurs États membres seraient susceptibles de recevoir la qualification de « très graves ». Ni le traité CE, ni le règlement n° 17, ni le règlement nº 1/2003, ni les lignes directrices de 1998, ni la jurisprudence ne permettent de considérer que seules des restrictions géographiquement très étendues peuvent être qualifiées ainsi (voir, en ce sens, arrêt Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, point 242 supra, point 311, et la jurisprudence citée). Il s’ensuit que c’est à bon droit que la Commission a considéré que la limitation des effets de l’entente au seul marché italien ne justifiait pas de qualifier l’infraction de « grave ».

260    En tout état de cause, il ressort du considérant 599 de la décision attaquée que la Commission a expressément tenu compte, pour la détermination du montant de départ de l’amende, du fait que l’entente avait porté sur un marché national qui était soumis, à l’époque des faits, à une réglementation particulière du traité CECA et sur lequel les entreprises en cause détenaient, dans les premiers temps de l’infraction, des parts limitées.

261    En quatrième lieu, la requérante tire argument du fait que la spécificité du secteur de l’acier, qui serait caractérisé par un régime de concurrence atténué par les dispositions en matière de transparence des prix, n’a pas été correctement évaluée lors de la fixation du montant des amendes. Ainsi, la reconnaissance et l’admission d’un régime de concurrence atténué seraient par le passé apparues comme une évidence aux yeux des entreprises lorsque la Communauté était intervenue pour réglementer les prix et la production en période de crise, en sorte que les entreprises avaient pu considérer que leur comportement était légal. Un tel argument doit toutefois être rejeté, pour les motifs figurant aux points 215 à 218 ci-dessus.

262    La requérante ne saurait davantage invoquer une prétendue confiance légitime dans la licéité de son comportement, en raison du fait que les réunions et les initiatives auraient été gérées et organisées dès l’origine par la Federacciai, de la circonstance qu’elle n’aurait pas disposé d’un service juridique ou encore de l’absence de réglementation nationale sur la concurrence pendant les premières années de l’entente.

263    S’agissant de l’absence de réglementation nationale sur la concurrence en Italie pendant les premières années de l’entente, il suffit de constater que tant le traité CECA que le règlement n° 17, conformément à son article 24, étaient applicables dans tous les États membres pendant toute la durée de l’infraction. Même à supposer que la requérante n’ait pas disposé de service juridique et n’ait pas jugé utile d’obtenir un quelconque avis juridique, elle ne pouvait nourrir aucun doute raisonnable sur le caractère illicite de son comportement, quand bien même l’entente aurait été gérée par la Federacciai, certaines communications de celle-ci portant la mention « À détruire après lecture » (voir point 220 ci-dessus).

264    En cinquième lieu, la requérante affirme que la partie principale de l’entente a porté sur la fixation des prix des suppléments de dimension, lesquels joueraient un rôle particulier dans la détermination du prix final. Cette composante aurait été introduite précisément dans le but de simplifier les négociations contractuelles et de faciliter la comparaison avec les offres concurrentes. Une telle pratique serait incontestable et n’affecterait pas la concurrence, dès lors que celle-ci serait garantie par le prix de base. La majorité des produits sidérurgiques serait commercialisée à partir d’un prix de base majoré du prix des suppléments de dimension, ce qui expliquerait qu’à l’augmentation du prix des suppléments ait correspondu, à due proportion, une diminution sensible du prix de base.

265    Un tel argument est toutefois contredit par les constatations de la Commission figurant au considérant 515 de la décision attaquée, qui ne sont pas contestées par la requérante, selon lesquelles, en 1989-1990 les suppléments de dimension avaient une valeur correspondant à environ deux tiers du prix de base, tandis qu’en 1999-2000, le prix des ces suppléments pouvait s’élever jusqu’à plus du double du prix de base. Or, le prix total des ronds étant composé du prix de base et du supplément, et ce dernier étant considéré comme hors concurrence ou non négociable, et n’étant donc soumis à aucune incertitude, l’augmentation du supplément, surtout si elle se fait au détriment du prix de base, se traduit par une réduction de la variabilité du prix total et donc par une réduction de la marge d’incertitude de ce prix (voir considérants 490 et 515 de la décision attaquée). Il y a dès lors lieu de considérer, à l’instar de la Commission (considérant 523 de la décision attaquée), que, au cours de l’entente, une partie de plus en plus importante du prix total a été soustraite à toute concurrence. En tout état de cause, la fixation du prix de base a également fait l’objet de l’entente, à tout le moins entre le 15 avril 1992 et le 4 juillet 2000. Il s’ensuit que la requérante ne saurait valablement soutenir que l’entente sur la fixation des prix des suppléments de dimension n’a pas affecté la concurrence.

266    En sixième lieu, la requérante prétend qu’elle a eu un rôle passif ou exclusivement suiviste dans la réalisation de l’infraction et que la Commission, à ce titre, aurait dû lui reconnaître le bénéfice d’une circonstance atténuante. La requérante relève qu’elle est une petite entreprise, dont la part de marché sur le marché italien des ronds à béton au cours de la période infractionnelle aurait été inférieure à 5 %, et que les ronds à béton constitueraient plus de 90 % de sa production. Confrontée à des concurrents puissants, diversifiés et dotés de ressources importantes, elle n’aurait eu d’autre choix que de s’adapter aux décisions prises ou de sortir du marché.

267    Conformément au point 3 des lignes directrices de 1998, le rôle exclusivement passif ou suiviste d’une entreprise dans la réalisation de l’infraction constitue, s’il est établi, une circonstance atténuante, étant précisé que ce rôle passif implique l’adoption par l’entreprise concernée d’un « profil bas », c’est-à-dire une absence de participation active à l’élaboration du ou des accords anticoncurrentiels. Parmi les éléments de nature à révéler le rôle passif d’une entreprise au sein d’une entente, peuvent être pris en compte le caractère sensiblement plus sporadique de ses participations aux réunions par rapport aux membres ordinaires de l’entente de même que son entrée tardive sur le marché ayant fait l’objet de l’infraction, indépendamment de la durée de sa participation à celle-ci, ou encore l’existence de déclarations expresses en ce sens émanant de représentants d’entreprises tierces ayant participé à l’infraction (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 9 juillet 2003, Cheil Jedang/Commission, T‑220/00, Rec. p. II‑2473, points 167 et 168 ; du 29 novembre 2005, Union Pigments/Commission, T‑62/02, Rec. p. II‑5057, point 126, et du 30 septembre 2009, Arkema/Commission, T‑168/05, non publié au Recueil, points 148 et 149).

268    Or, il doit être relevé qu’il ressort du considérant 559 de la décision attaquée et des considérants qui y sont cités que la requérante n’a pas eu un rôle exclusivement passif ou suiviste, dès lors qu’elle a notamment communiqué à de multiples reprises des informations confidentielles utiles pour une gestion efficace de l’entente, qu’elle a été remerciée par Leali « pour la collaboration et la disponibilité manifestées durant l’année 1996 afin de maintenir une situation de marché ordonnée » (considérant 202 de la décision attaquée), qu’elle a participé activement aux décisions relatives à la fixation du prix de base (considérants 210 et 214 de la décision attaquée) et qu’elle a participé à toutes les interventions et exercices de contrôle de KPMG (considérants 217, 223 à 244 de la décision attaquée).

269    La requérante ne saurait davantage prétendre qu’elle n’a subi l’entente qu’en vue d’assurer sa propre survie. En effet, la requérante ne fait aucunement état d’éventuelles pressions ou menaces de rétorsion qu’elle aurait subies. En outre, il ressort de la jurisprudence que les pressions exercées par des entreprises et visant à amener d’autres entreprises à participer à une infraction au droit de la concurrence ne dégagent pas, quelle que soit leur importance, l’entreprise concernée de sa responsabilité pour l’infraction commise, ne modifient en rien la gravité de l’entente et ne sauraient constituer une circonstance atténuante aux fins du calcul du montant des amendes, dès lors que l’entreprise concernée aurait pu dénoncer les éventuelles pressions aux autorités compétentes et introduire auprès d’elles une plainte (voir, en ce sens, arrêt Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 226 supra, points 369 et 370 ; arrêts du Tribunal Union Pigments/Commission, point 267 supra, point 63, et du 5 octobre 2011, Romana Tabacchi/Commission, T‑11/06, Rec. p. II‑6681, point 212).

270    Il résulte de l’ensemble des développements qui précèdent que la requérante ne saurait prétendre au bénéfice d’aucune circonstance atténuante et que la présente branche doit, partant, être rejetée.

 Sur la violation des principes de proportionnalité, d’égalité de traitement et d’adéquation dans la détermination du montant de la sanction

271    En premier lieu, la requérante fait valoir que la Commission n’a pas attribué une importance suffisante à sa taille, ce qui ressortirait à l’évidence d’une comparaison entre les amendes infligées aux diverses entreprises impliquées dans la procédure, et, ce faisant, a violé les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité.

272    Ainsi, le montant de l’amende infligée à IRO correspondrait à 1,4 % de son chiffre d’affaires, alors que le montant des amendes des entreprises qui ont été sanctionnées plus lourdement correspondrait à 0,3 % et 0,5 % de leurs chiffres d’affaires respectifs. Le montant de l’amende infligée à IRO serait donc environ cinq fois supérieur à celui de l’amende infligée à l’entreprise la plus importante et trois fois supérieur au montant de l’amende infligée à l’entreprise qui se trouverait être la deuxième en taille. Le montant des amendes d’autres entreprises ayant participé à la prétendue entente aurait été de l’ordre de 1 % de leur chiffre d’affaires, soit bien moins que la valeur en pourcentage de la sanction infligée à la requérante. Par ailleurs, le nombre de personnes employées par les deux plus grandes entreprises aurait été respectivement de 100 fois et de près de 50 fois supérieur à celui des personnes travaillant chez IRO, qui n’emploierait que 200 personnes et se situerait sous le seuil de 250 employés que prévoit la catégorie de « petites et moyennes entreprises ».

273    Selon une jurisprudence constante, la Commission n’étant pas obligée d’effectuer le calcul du montant de l’amende à partir de montants fondés sur le chiffre d’affaires des entreprises concernées, elle n’est pas non plus tenue d’assurer, au cas où des amendes sont imposées à plusieurs entreprises impliquées dans une même infraction, que le montant final des amendes auquel son calcul aboutit pour les entreprises concernées traduise toute différenciation entre celles-ci quant à leur chiffre d’affaires global ou à leur chiffre d’affaires sur le marché du produit en cause (arrêt Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 226 supra, point 312 ; arrêts du Tribunal du 20 mars 2002, Dansk Rørindustri/Commission, T‑21/99, Rec. p. II‑1681, point 202 ; du 28 avril 2010, Gütermann et Zwicky/Commission, T‑456/05 et T‑457/05, Rec. p. II‑1443, point 279, et du 17 mai 2013, MRI/Commission, T‑154/09, non encore publié au Recueil, point 264).

274    À cet égard, il y a lieu de préciser que l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et l’article 23, paragraphe 3, du règlement n° 1/2003 n’exigent pas non plus que, au cas où des amendes sont imposées à plusieurs entreprises impliquées dans une même infraction, le montant de l’amende infligée à une entreprise de petite ou de moyenne taille ne soit pas supérieur, en pourcentage du chiffre d’affaires, à celui des amendes infligées aux entreprises plus grandes. En effet, il ressort de ces dispositions que, tant pour les entreprises de petite ou de moyenne taille que pour les entreprises de taille supérieure, il y a lieu de prendre en considération, pour déterminer le montant de l’amende, la gravité et la durée de l’infraction. Dans la mesure où la Commission impose aux entreprises impliquées dans une même infraction des amendes justifiées, pour chacune d’elles, par la gravité et la durée de l’infraction, il ne saurait lui être reproché que, pour certaines d’entre elles, le montant de l’amende soit supérieur, par rapport au chiffre d’affaires, à celui d’autres entreprises (arrêts du 20 mars 2002, Dansk Rørindustri/Commission, point 273 supra, point 202 ; Gütermann/Commission, point 273 supra, point 280, et MRI/Commission, point 273 supra, point 264).

275    Ainsi, la Commission n’est pas tenue de diminuer le montant des amendes lorsque les entreprises concernées sont des petites et moyennes entreprises. La taille de l’entreprise est, en effet, déjà prise en considération par le plafond fixé par l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et par l’article 23, paragraphe 3, du règlement n °1/2003 ainsi que par les dispositions des lignes directrices (arrêt du Tribunal du 5 décembre 2006, Westfalen Gassen Nederland/Commission, T‑303/02, Rec. p. II‑4567, point 174). À part ces considérations relatives à la taille, il n’y a aucune raison de traiter les petites et moyennes entreprises différemment des autres entreprises. Le fait que les entreprises concernées soient des petites et moyennes entreprises ne les exonère pas de leur devoir de respecter les règles de concurrence (arrêts Gütermann/Commission, point 273 supra, point 281, et MRI/Commission, point 273 supra, point 264).

276    C’est par conséquent à tort que la requérante fait valoir que la Commission n’a pas attribué à sa taille une importance suffisante et, ce faisant, a violé les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité.

277    En deuxième lieu, la requérante affirme qu’une sanction particulièrement lourde, telle que celle qui lui a été infligée, aurait certainement une incidence contre-productive sur le marché du point de vue concurrentiel, car elle entraînerait sans aucun doute la mise en liquidation de plusieurs entreprises, générant ainsi une diminution effective de la concurrence.

278    À cet égard, la requérante n’explique pas les raisons pour lesquelles l’imposition d’amendes par la Commission dans la décision attaquée entraînerait une telle mise en liquidation, d’autant que, ainsi qu’elle l’affirme elle-même dans la requête, le montant des amendes infligées dans la décision attaquée représenterait seulement respectivement 0,3 % et 0,5 % du chiffre d’affaires des deux entreprises condamnées le plus lourdement et 1,4 % de son propre chiffre d’affaires en 2008. En tout état de cause, selon la jurisprudence, le fait qu’une mesure prise par une autorité de l’Union provoque la faillite ou la liquidation d’une entreprise donnée n’est pas interdit, en tant que tel, par le droit de l’Union. En effet, la liquidation d’une entreprise sous sa forme juridique en cause, si elle peut porter atteinte aux intérêts financiers des propriétaires, actionnaires ou détenteurs de parts, ne signifie pas pour autant que les éléments personnels, matériels et immatériels représentés par l’entreprise perdraient eux aussi leur valeur (voir arrêts Union Pigments/Commission, point 267 supra, point 177, et Heubach/Commission, point 242 supra, point 163, et la jurisprudence citée).

279    En troisième lieu, la requérante souligne qu’IRO a informé la Commission du redimensionnement de son activité au cours de l’année 2009, par lettres du 6 juillet 2009 et du 23 septembre 2009, dont celle-ci n’aurait pas tenu compte. Ainsi, IRO aurait informé la Commission de la forte contraction de l’activité, qui aurait entraîné une réduction du chiffre d’affaires de 60 % entre 2008 et 2009. Or, conformément au point 5, sous b), des lignes directrices de 1998, la Commission aurait dû prendre en considération certaines données objectives telles qu’un contexte économique spécifique, les caractéristiques propres des entreprises en cause ainsi que leur capacité contributive réelle dans un contexte social particulier pour adapter, in fine, les montants d’amende envisagés.

280    Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la Commission n’est pas obligée, lors de la détermination du montant de l’amende, de tenir compte de la situation financière déficitaire d’une entreprise, étant donné que la reconnaissance d’une telle obligation reviendrait à procurer un avantage concurrentiel injustifié aux entreprises les moins adaptées aux conditions du marché (arrêts de la Cour du 8 novembre 1983, IAZ International Belgium e.a./Commission, 96/82 à 102/82, 104/82, 105/82, 108/82 et 110/82, Rec. p. 3369, points 54 et 55 ; du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 226 supra, point 327, et du 29 juin 2006, SGL Carbon/Commission, C‑308/04 P, Rec. p. I‑5977, point 105 ; arrêts Union Pigments/Commission, point 267 supra, point 175, et Heubach/Commission, point 242 supra, point 161).

281    Il convient d’observer également que cette jurisprudence n’est nullement remise en cause par le point 5, sous b), des lignes directrices de 1998, selon lequel la capacité contributive réelle d’une entreprise doit être prise en considération. En effet, cette capacité ne saurait jouer que dans un « contexte social particulier », constitué par les conséquences que le paiement de l’amende pourrait avoir, notamment sur le plan d’une augmentation du chômage ou d’une détérioration des secteurs économiques en amont et en aval de l’entreprise concernée (arrêt SGL Carbon/Commission, point 280 supra, point 106 ; arrêts Union Pigments/Commission, point 267 supra, point 174, et Heubach/Commission, point 242 supra, point 162).

282    Or, la requérante n’a pas produit d’élément susceptible d’étayer l’existence d’un tel contexte.

283    Il s’ensuit que la présente branche du moyen doit être rejetée ainsi que le septième moyen.

284    Au regard de ce qui précède, il y a lieu de rejeter les conclusions en annulation dans leur intégralité. En outre, en ce qui concerne la demande, présentée à titre subsidiaire, tendant à la réformation du montant de l’amende imposée aux requérantes, eu égard notamment aux considérations qui précèdent, il n’y a pas lieu, dans l’exercice du pouvoir de pleine juridiction du Tribunal, de faire droit à cette demande.

 Sur les dépens

285    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

286    La requérante ayant succombé en ses conclusions, il y a lieu de la condamner aux dépens dans la présente affaire, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Industrie Riunite Odolesi SpA (IRO) est condamnée aux dépens.

Martins Ribeiro

Berardis

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 décembre 2014.

Signatures

Table des matières


Cadre juridique

Dispositions du traité CECA

Dispositions du traité CE

Règlement n° 1/2003

Règlement n° 773/2004

Communication de la Commission sur certains aspects du traitement des affaires de concurrence résultant de l’expiration du traité CECA

Objet du litige

Présentation de la requérante et antécédents du litige

Première décision

Développements postérieurs à la notification de la première décision

Décision modificative

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur le premier moyen, tiré d’un excès de pouvoir et de la violation de la loi par la Commission, en raison du caractère incomplet de la décision adoptée de manière collégiale

Sur les deuxième et troisième moyens, tirés, pour l’un, du défaut de pouvoir et de l’incompétence manifeste de la Commission, y compris en raison de l’inexistence de la base juridique de la décision attaquée, du fait de l’extinction du traité CECA, et, pour l’autre, d’un excès de pouvoir et de la violation de la loi, du fait de l’utilisation du règlement n° 1/2003 aux fins de l’application des règles de concurrence relevant du traité CECA

Sur le choix de la base juridique de la décision attaquée

Sur la compétence de la Commission pour constater et sanctionner une infraction à l’article 65, paragraphe 1, CA, après l’expiration du traité CECA, sur la base du règlement n° 1/2003

Sur le quatrième moyen, tiré d’un excès de pouvoir et d’une application erronée, contradictoire et inexacte du droit, du fait de la violation des règles de procédure prévues par les règlements nos 1/2003 et 773/2004, l’entière procédure suivie par la Commission étant, en conséquence, incomplète, incohérente et illégale

Sur le cinquième moyen, tiré d’un excès de pouvoir pour défaut d’instruction et absence de motivation, la définition du marché en cause ainsi que les conditions et les effets de la prétendue entente étant, en conséquence, erronés, contradictoires et illogiques

Sur l’étendue du marché géographique

Sur l’instruction insuffisante et le défaut de motivation en ce qui concerne les conditions et les effets de l’entente

Sur le sixième moyen, tiré de la violation de la loi pour absence d’instruction, en ce qu’IRO est tenue pour responsable d’une entente anticoncurrentielle au cours de la période 1989-1996 en l’absence de tout élément probant

Sur le septième moyen, tiré de la violation des principes d’égalité de traitement, de confiance légitime, de proportionnalité et d’adéquation dans la détermination du montant de la sanction

Observations liminaires

Sur l’existence de circonstances atténuantes et sur la violation du principe de confiance légitime

Sur la violation des principes de proportionnalité, d’égalité de traitement et d’adéquation dans la détermination du montant de la sanction

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’italien.