Language of document : ECLI:EU:T:2014:773

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

11 septembre 2014 (*)

« Subventions – Importations de papier fin couché originaire de Chine – Méthodologie – Calcul de l’avantage – Erreur manifeste d’appréciation – Spécificité – Durée d’amortissement – Traitements fiscaux préférentiels – Mesures compensatoires – Préjudice – Détermination de la marge bénéficiaire – Définition du produit concerné – Industrie communautaire – Lien de causalité »

Dans l’affaire T‑444/11,

Gold East Paper (Jiangsu) Co. Ltd, établie à Jiangsu (Chine),

Gold Huasheng Paper (Suzhou Industrial Park) Co. Ltd, établie à Jiangsu,

représentées par Mes V. Akritidis, Y. Melin et F. Crespo, avocats,

parties requérantes,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. J.‑P. Hix, en qualité d’agent, assisté initialement de Mes G. Berrisch, A. Polcyn, avocats, et de Mme N. Chesaites, barrister, puis de M. B. O’Connor, solicitor, et de MS. Gubel, avocat,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission européenne, représentée par MM. J.‑F. Brakeland, M. França et Mme A. Stobiecka-Kuik, en qualité d’agents,

et par

Cepifine AISBL, établie à Bruxelles (Belgique),

Sappi Europe SA, établie à Bruxelles,

Burgo Group SpA, établie à Altavilla Vicentina (Italie),

Lecta SA, établie à Luxembourg (Luxembourg),

représentées par Mes L. Ruessmann et W. Berg, avocats,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d’annulation du règlement d’exécution (UE) n° 452/2011 du Conseil, du 6 mai 2011, instituant un droit antisubvention définitif sur les importations de papier fin couché originaire de la République populaire de Chine (JO L 128, p. 18), dans la mesure où il concerne les requérantes,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. O. Czúcz, président, Mme I. Labucka (rapporteur) et M. D. Gratsias, juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 12 novembre 2013,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        L’article 2, sous d), du règlement (CE) n° 597/2009 du Conseil, du 11 juin 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de la Communauté européenne (ci-après le « règlement de base »), dispose que « le terme ‘préjudice’ s’entend, sauf indication contraire, d’un préjudice important causé à une industrie communautaire, d’une menace de préjudice important pour une industrie communautaire ou d’un retard important à la création d’une industrie communautaire […] »

2        L’article 4 du règlement de base, intitulé « Subventions passibles de mesures compensatoires », se lit comme suit :

« 1.      Les subventions ne sont passibles de mesures compensatoires que lorsqu’elles sont spécifiques au sens des paragraphes 2, 3 et 4.

2.      Pour déterminer si une subvention est spécifique à une entreprise, à une industrie ou à un groupe d’entreprises ou d’industries (ci-après dénommés ‘certaines entreprises’) relevant de la juridiction de l’autorité qui accorde la subvention, les principes suivants sont applicables :

a)      dans les cas où l’autorité qui accorde la subvention ou la législation applicable limite expressément à certaines entreprises la possibilité de bénéficier de la subvention, il y a spécificité ;

b)      dans les cas où l’autorité qui accorde la subvention ou la législation applicable subordonne à des critères ou à des conditions objectifs le droit de bénéficier de la subvention et le montant de celle-ci, il n’y a pas spécificité, à condition que le droit de bénéficier de la subvention soit automatique et que lesdits critères ou conditions soient strictement observés ;

c)      si, nonobstant toute apparence de non-spécificité résultant de l’application des principes énoncés [sous] a) et b), il existe des raisons de croire que la subvention peut en fait être spécifique, d’autres facteurs peuvent être pris en considération. Ces facteurs sont les suivants : utilisation d’un programme de subventions par un nombre limité de certaines entreprises, utilisation dominante par certaines entreprises, octroi à certaines entreprises de montants de subvention disproportionnés, et la manière dont l’autorité qui accorde la subvention a exercé un pouvoir discrétionnaire dans la décision d’accorder une subvention. À cet égard, il est tenu compte en particulier des renseignements sur la fréquence avec laquelle des demandes concernant une subvention ont été refusées ou approuvées et les raisons de ces décisions.

Aux fins [des dispositions figurant sous] b), on entend par ‘critères ou conditions objectifs’ des critères ou conditions neutres, qui ne favorisent pas certaines entreprises par rapport à d’autres et qui sont de caractère économique et d’application horizontale, comme le nombre de salariés ou la taille de l’entreprise.

Les critères ou conditions doivent être clairement énoncés dans la législation, dans la réglementation ou dans d’autres documents officiels, de manière à pouvoir être vérifiés.

Dans l’application du premier alinéa, [sous] c), il est tenu compte de l’importance de la diversification des activités économiques dans la juridiction de l’autorité qui accorde la subvention ainsi que de la période pendant laquelle le programme de subventions a été appliqué.

3.      Une subvention qui est limitée à certaines entreprises situées à l’intérieur d’une région géographique déterminée relevant de la juridiction de l’autorité qui accorde la subvention est spécifique. La fixation ou la modification de taux d’imposition d’application générale par les autorités publiques de tous niveaux qui sont habilitées à le faire n’est pas réputée être une subvention spécifique aux fins du présent règlement.

4.      Indépendamment des dispositions des paragraphes 2 et 3, les subventions suivantes sont réputées être spécifiques :

a)      les subventions subordonnées, en droit ou en fait, soit exclusivement, soit parmi plusieurs autres conditions, aux résultats à l’exportation, y compris celles énumérées, à titre d’exemple, à l’annexe I ;

b)       les subventions subordonnées, soit exclusivement, soit parmi plusieurs autres conditions, à l’utilisation de produits nationaux de préférence à des produits importés.

Aux fins [des dispositions figurant sous] a), les subventions sont considérées comme subordonnées en fait aux résultats à l’exportation lorsque les faits démontrent que l’octroi d’une subvention, sans avoir été juridiquement subordonné aux résultats à l’exportation, est en fait lié aux exportations ou aux recettes d’exportation effectives ou prévues. Le simple fait qu’une subvention est accordée à des entreprises qui exportent n’est pas, pour cette seule raison, considéré comme une subvention à l’exportation au sens de la présente disposition.

5.      Toute détermination de spécificité en vertu des dispositions du présent article est clairement étayée par des éléments de preuve positifs. »

3        L’article 6 du règlement de base, intitulé « Calcul de l’avantage conféré au bénéficiaire », se lit comme suit :

« Le calcul de l’avantage conféré au bénéficiaire est effectué en appliquant les règles suivantes :

a)      une prise de participation des pouvoirs publics au capital social d’une entreprise n’est pas considérée comme conférant un avantage, à moins que l’investissement ne puisse être jugé incompatible avec la pratique habituelle concernant les investissements, y compris pour ce qui est de la fourniture de capital-risque, des investisseurs privés sur le territoire du pays d’origine et/ou d’exportation ;

b)      un prêt des pouvoirs publics n’est pas considéré comme conférant un avantage, à moins qu’il n’existe une différence entre le montant que l’entreprise bénéficiaire paie sur le prêt des pouvoirs publics et le montant qu’elle paierait sur un prêt commercial comparable qu’elle pourrait effectivement obtenir sur le marché. Dans ce cas, l’avantage correspond à la différence entre ces deux montants ;

c)      une garantie de prêt accordée par les pouvoirs publics n’est pas considérée comme conférant un avantage, à moins qu’il n’existe une différence entre le montant que l’entreprise bénéficiaire de la garantie paie sur le prêt garanti par les pouvoirs publics et le montant qu’elle paierait sur un prêt commercial comparable en l’absence de cette garantie. Dans ce cas, l’avantage correspond à la différence entre ces deux montants, ajustée pour tenir compte des différences de commissions ;

d)      la fourniture de biens ou de services ou l’achat de biens par les pouvoirs publics ne sont pas considérés comme conférant un avantage, à moins que la fourniture ne s’effectue moyennant une rémunération moins qu’adéquate ou que l’achat ne s’effectue moyennant une rémunération plus qu’adéquate. L’adéquation de la rémunération est déterminée par rapport aux conditions existantes du marché pour le bien ou service en question dans le pays de fourniture ou d’achat, y compris le prix, la qualité, la disponibilité, la qualité marchande, le transport et autres conditions d’achat ou de vente.

S’il n’existe pas, dans le pays de fourniture ou d’achat, pour le produit ou le service en question, de conditions du marché pouvant être utilisées comme références appropriées, les règles suivantes s’appliquent :

i)      les conditions et modalités qui prévalent dans le pays concerné sont ajustées, sur la base des coûts, des prix et autres facteurs réels disponibles dans ce pays, d’un montant approprié reflétant les conditions normales du marché ; ou

ii)      le cas échéant, il est fait appel aux conditions et aux modalités qui prévalent sur le marché d’un autre pays ou sur le marché mondial, et auxquelles le bénéficiaire peut accéder. »

4        L’article 7, paragraphe 3, du règlement de base, sous le titre « Dispositions générales concernant le calcul », dispose :

« Lorsque la subvention peut être mise en rapport avec l’acquisition, présente ou future, d’actifs immobilisés, le montant de la subvention passible de mesures compensatoires est calculé en étalant cette dernière sur une période correspondant à la durée d’amortissement normale de ces biens dans l’industrie concernée.

Le montant ainsi calculé qui est imputable à la période d’enquête, y compris la partie correspondant aux immobilisations acquises avant cette période, est réparti conformément aux dispositions du paragraphe 2.

Pour les biens qui ne se déprécient pas, la subvention est assimilée à un prêt sans intérêt et est régie par les dispositions de l’article 6, [sous] b). »

5        L’article 8 du règlement de base, intitulé « Détermination du préjudice », prévoit :

« 1.      La détermination de l’existence d’un préjudice se fonde sur des éléments de preuve positifs et comporte un examen objectif :

a)      du volume des importations faisant l’objet de subventions et de l’effet de ces importations sur les prix des produits similaires sur le marché de la Communauté ; et

b)      de l’incidence de ces importations sur l’industrie communautaire.

2.      En ce qui concerne le volume des importations faisant l’objet de subventions, on examinera s’il y a eu augmentation notable des importations faisant l’objet de subventions soit en quantités absolues, soit par rapport à la production ou à la consommation dans la Communauté. En ce qui concerne l’effet des importations faisant l’objet de subventions sur les prix, on examinera s’il y a eu, pour les importations faisant l’objet de subventions, sous-cotation notable du prix par rapport au prix d’un produit similaire de l’industrie communautaire ou si ces importations ont, d’une autre manière, pour effet de déprimer sensiblement les prix ou d’empêcher dans une mesure notable des hausses de prix qui, sans cela, se seraient produites. Aucun ni même plusieurs de ces facteurs ne constituent nécessairement une base de jugement déterminante.

3.      Lorsque les importations d’un produit en provenance de plus d’un pays font simultanément l’objet d’enquêtes en matière de droits compensateurs, les effets de ces importations ne peuvent faire l’objet d’une évaluation cumulative que si :

a)      le montant de la subvention passible de mesures compensatoires établi en relation avec les importations en provenance de chaque pays est supérieur au niveau de minimis au sens de l’article 14, paragraphe 5, et si le volume des importations en provenance de chaque pays n’est pas négligeable ; et

b)      une évaluation cumulative des effets des importations est appropriée, compte tenu des conditions de concurrence entre les produits importés et des conditions de concurrence entre les produits importés et le produit communautaire similaire.

4.      L’examen de l’incidence des importations faisant l’objet de subventions sur l’industrie communautaire concernée comporte une évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents qui influent sur la situation de cette industrie, y compris le fait pour une industrie de ne pas encore avoir surmonté entièrement les effets de pratiques passées de subventionnement ou de dumping ; l’importance du montant de la subvention passible de mesures compensatoires ; la diminution effective et potentielle des ventes, des bénéfices, de la production, de la part de marché, de la productivité, du rendement des investissements ou de l’utilisation des capacités ; les facteurs qui influent sur les prix dans la Communauté, les effets négatifs, effectifs et potentiels sur les flux de liquidités, les stocks, l’emploi, les salaires, la croissance, l’aptitude à mobiliser les capitaux ou les investissements et, dans le cas de l’agriculture, l’utilisation accrue des programmes de soutien des pouvoirs publics. Cette liste n’est pas exhaustive et aucun ni même plusieurs de ces facteurs ne constituent nécessairement une base de jugement déterminante.

5.      Il doit être démontré, à l’aide de tous les éléments de preuve pertinents présentés en relation avec le paragraphe 1, que les importations faisant l’objet de subventions causent un préjudice. En l’occurrence, cela implique la démonstration que le volume et/ou le prix visés au paragraphe 2 ont un impact sur l’industrie communautaire au sens du paragraphe 4 et que cet impact est tel qu’on peut le considérer comme important.

6.      Les facteurs connus, autres que les importations faisant l’objet de subventions, qui causent simultanément un préjudice à l’industrie communautaire sont aussi examinés de manière à ce que le préjudice causé par ces autres facteurs ne soit pas attribué aux importations faisant l’objet de subventions au sens du paragraphe 5. Les facteurs qui peuvent être considérés comme pertinents à cet égard comprennent le volume et le prix des importations ne faisant pas l’objet de subventions, la contraction de la demande ou les modifications de la configuration de la consommation, les pratiques commerciales restrictives des producteurs de pays tiers et communautaires et la concurrence entre ces mêmes producteurs, l’évolution des techniques ainsi que les résultats à l’exportation et la productivité de l’industrie communautaire.

7.      L’effet des importations faisant l’objet de subventions est évalué par rapport à la production communautaire du produit similaire lorsque les données disponibles permettent d’identifier cette production séparément sur la base de critères tels que les procédés de production, les ventes et les bénéfices des producteurs. S’il n’est pas possible d’identifier séparément cette production, les effets des importations faisant l’objet de subventions sont évalués par examen de la production du groupe ou de la gamme de produits le plus étroit, comprenant le produit similaire, pour lequel les renseignements nécessaires peuvent être fournis.

8.      La détermination concluant à une menace de préjudice important se fonde sur des faits et non pas seulement sur des allégations, des conjectures ou de lointaines possibilités. Le changement de circonstances qui créerait une situation où la subvention causerait un préjudice doit être clairement prévisible et imminent.

Pour déterminer l’existence d’une menace de préjudice important, il convient d’examiner, entre autres, des facteurs tels que :

a)      la nature des subventions en question et les effets commerciaux qu’elles sont susceptibles d’entraîner ;

b)      un taux d’accroissement notable des importations faisant l’objet de subventions sur le marché communautaire dénotant la probabilité d’une augmentation substantielle des importations ;

c)      la capacité suffisante et librement disponible de l’exportateur ou l’augmentation imminente et substantielle de cette capacité dénotant la probabilité d’une augmentation substantielle des exportations faisant l’objet de subventions vers la Communauté, compte tenu de l’existence d’autres marchés d’exportation pouvant absorber des exportations additionnelles ;

d)      l’arrivée d’importations à des prix qui pourraient déprimer sensiblement les prix intérieurs ou empêcher dans une mesure notable des hausses de prix et accroîtraient probablement la demande de nouvelles importations ;

e)      les stocks du produit faisant l’objet de l’enquête.

Aucun de ces facteurs ne constitue nécessairement une base de jugement déterminante, mais la totalité des facteurs considérés doit amener à conclure que d’autres exportations faisant l’objet de subventions sont imminentes et qu’un préjudice important se produira si des mesures de protection ne sont pas prises. »

6        L’article 9, paragraphe 1, du règlement de base, sous le titre « Définition de l’industrie communautaire », dispose :

« 1.      Aux fins du présent règlement, on entend par ‘industrie communautaire’ l’ensemble des producteurs communautaires de produits similaires ou ceux d’entre eux dont les productions additionnées constituent une proportion majeure, au sens de l’article 10, paragraphe 6, de la production communautaire totale de ces produits ; toutefois :

a)      lorsque des producteurs sont liés aux exportateurs ou aux importateurs ou sont eux-mêmes importateurs du produit faisant prétendument l’objet de subventions, l’expression ‘industrie communautaire’ peut être interprétée comme désignant le reste des producteurs ;

b)      dans des circonstances exceptionnelles, le territoire de la Communauté peut, pour ce qui est de la production en question, être divisé en deux marchés compétitifs ou plus et les producteurs à l’intérieur de chaque marché peuvent être considérés comme constituant une industrie distincte si :

i)      les producteurs à l’intérieur d’un tel marché vendent la totalité ou la quasi-totalité de leur production du produit en question sur ce marché ; et

ii)       la demande sur ce marché n’est pas satisfaite dans une mesure substantielle par les producteurs du produit en question établis ailleurs dans la Communauté.

Dans ces circonstances, il peut être conclu à l’existence d’un préjudice, même si une proportion majeure de l’industrie communautaire totale n’est pas lésée, à condition que les importations faisant l’objet de subventions se concentrent sur ce marché isolé et que, en outre, les importations faisant l’objet de subventions causent un préjudice aux producteurs de la totalité ou de la quasi-totalité de la production à l’intérieur de ce marché. »

7        L’article 10, paragraphe 6, du règlement de base, sous le titre « Ouverture de la procédure », dispose :

« Une enquête n’est ouverte conformément au paragraphe 1 que s’il a été déterminé, en se fondant sur un examen du degré de soutien ou d’opposition à la plainte exprimé par les producteurs communautaires du produit similaire, que la plainte a été présentée par l’industrie communautaire ou en son nom. La plainte est réputée avoir été déposée par l’industrie communautaire ou en son nom si elle est soutenue par des producteurs communautaires dont les productions additionnées constituent plus de 50 % de la production totale du produit similaire par la partie de l’industrie communautaire exprimant son soutien ou son opposition à la plainte. Toutefois, il n’est pas ouvert d’enquête lorsque les producteurs communautaires soutenant expressément la plainte représentent moins de 25 % de la production totale du produit similaire de l’industrie communautaire. »

8        L’article 14, paragraphe 2, du règlement de base, sous le titre « Clôture de la procédure sans imposition de mesures », dispose :

« Lorsque, après consultations, aucune mesure de défense ne se révèle nécessaire et si aucune objection n’a été exprimée au sein du comité consultatif, l’enquête ou la procédure est close. Dans tous les autres cas, la Commission soumet immédiatement au Conseil un rapport sur les résultats des consultations, assorti d’une proposition de clôture de la procédure. La procédure est réputée close si, dans un délai d’un mois, le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, n’en a pas décidé autrement. »

9        L’article 15, paragraphe 1, du règlement de base, sous le titre « Imposition de droits définitifs », dispose :

« Lorsqu’il ressort de la constatation définitive des faits qu’il existe une subvention passible de mesures compensatoires et un préjudice en résultant et que l’intérêt de la Communauté nécessite une action conformément à l’article 31, un droit compensateur définitif est imposé par le Conseil, statuant sur proposition de la Commission présentée après consultation du comité consultatif.

La proposition est adoptée par le Conseil, à moins qu’il ne décide, en statuant à la majorité simple, de la rejeter dans un délai d’un mois à partir de sa présentation par la Commission.

Lorsque des droits provisoires sont en vigueur, une proposition de mesures définitives est soumise au plus tard un mois avant l’expiration de ces droits.

Aucune mesure n’est instituée s’il est procédé à la suppression de la ou des subventions ou s’il est démontré que celles-ci ne confèrent plus d’avantage aux exportateurs concernés.

Le montant du droit compensateur ne doit pas excéder le montant total de la subvention passible de mesures compensatoires établi et il doit être inférieur à ce montant si ce droit moindre suffit pour éliminer le préjudice causé à l’industrie communautaire. »

10      L’article 28 du règlement de base, intitulé « Défaut de coopération », se lit comme suit :

« 1.      Lorsqu’une partie intéressée refuse l’accès aux informations nécessaires, ne les fournit pas dans le délai prévu par le présent règlement ou fait obstacle de façon significative à l’enquête, des conclusions préliminaires ou finales, positives ou négatives, peuvent être établies sur la base des données disponibles.

S’il est constaté qu’une partie intéressée a fourni un renseignement faux ou trompeur, ce renseignement n’est pas pris en considération, et il peut être fait usage des faits disponibles.

Les parties concernées doivent normalement être informées des conséquences d’un refus de coopération.

2.      Le fait de ne pas fournir une réponse sur support informatique n’est pas considéré comme un refus de coopération, à condition que la partie concernée démontre que la présentation de la réponse dans les formes requises pourrait entraîner une charge et des coûts supplémentaires excessifs.

3.      Lorsque les informations présentées par une partie intéressée ne sont pas les meilleures à tous égards, elles ne sont pas pour autant ignorées, à condition que les insuffisances éventuelles ne rendent pas excessivement difficile l’établissement de conclusions raisonnablement correctes, que les informations soient fournies en temps utile, qu’elles soient contrôlables et que la partie ait agi au mieux de ses possibilités.

4.      Si des éléments de preuve ou des renseignements ne sont pas acceptés, la partie qui les a communiqués est informée immédiatement des raisons de leur rejet et il lui est donné la possibilité de fournir des explications complémentaires dans le délai fixé. Si ces explications ne sont pas jugées satisfaisantes, les raisons du rejet des éléments de preuve ou des renseignements en question sont communiquées et indiquées dans les conclusions rendues publiques.

5.      Si les conclusions, y compris celles qui concernent le montant de la subvention passible de mesures compensatoires, sont fondées sur les dispositions du paragraphe 1, notamment sur les renseignements fournis dans la plainte, ces renseignements, lorsque cela est possible et compte tenu du délai imparti pour l’enquête, sont vérifiés par référence à d’autres sources indépendantes disponibles, telles que les listes de prix publiées, les statistiques d’importation officielles et les relevés douaniers ou par référence aux renseignements obtenus d’autres parties concernées au cours de l’enquête. Ces informations peuvent comprendre des données pertinentes liées au marché mondial ou à d’autres marchés représentatifs, le cas échéant.

6.      Si une partie intéressée ne coopère pas ou ne coopère que partiellement et que, de ce fait, des renseignements pertinents ne sont pas communiqués, il peut en résulter pour ladite partie une situation moins favorable que si elle avait coopéré. »

11      Par sa communication 98/C 394/04 (JO 1998, C 394, p. 6), la Commission des Communautés européennes a publié des lignes directrices relatives au calcul du montant des subventions dans le cadre des enquêtes antisubvention (ci-après les « lignes directrices »).

12      Les lignes directrices, sous le titre « F. Période d’enquête pour le calcul de la subvention : imputation contre répartition », prévoient notamment :

« b)      Dénominateur utilisé aux fins de la répartition du montant de la subvention

Une fois établi, le montant de la subvention imputable à la période d’enquête est réparti selon un dénominateur qui peut être le volume des ventes ou des exportations du produit en question afin d’obtenir le montant par unité.

[…] »

 Antécédents du litige

13      Les requérantes, Gold East Paper (Jiangsu) Co. Ltd (ci‑après « GE ») et Gold Huasheng Paper (Suzhou Industrial Park) Co. Ltd (ci‑après « GHS »), sont des sociétés liées du groupe Asia Pulp and Paper China (ci‑après le « groupe APP ») qui produisent en Chine du papier fin couché qu’elles exportent vers l’Union européenne.

 Enquête

14      Le papier fin couché a fait l’objet de deux enquêtes distinctes, qui ont été effectuées en parallèle. Premièrement, une enquête antidumping a conduit à l’adoption du règlement d’exécution (UE) n° 451/2011 du Conseil, du 6 mai 2011, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations de papier fin couché originaire de la République populaire de Chine (JO L 128, p. 1, ci-après le « règlement instituant un droit antidumping définitif »). Deuxièmement, une enquête antisubvention a conduit à l’adoption du règlement d’exécution (UE) n° 452/2011 du Conseil, du 6 mai 2011, instituant un droit antisubvention définitif sur les importations de papier fin couché originaire de la République populaire de Chine (JO L 128, p. 18, ci‑après le « règlement attaqué »).

15      Le 17 avril 2010, un avis de la Commission relatif à l’ouverture d’une procédure antisubvention concernant les importations de papier fin couché originaire de la République populaire Chine a fait l’objet d’une publication au Journal officiel de l’Union européenne (JO C 99, p. 30).

16      Le 8 juillet 2010, les requérantes ont présenté leurs réponses au questionnaire antisubvention que leur avait adressé la Commission. Cette dernière a procédé à des vérifications sur place de ces réponses dans les locaux des requérantes, entre le 15 et le 21 septembre 2010.

17      Le 3 février 2011, la Commission a envoyé aux requérantes un document d’information détaillant les faits et considérations essentiels en raison desquels elle envisageait de proposer au Conseil de l’Union européenne l’institution d’un droit compensateur définitif sur les exportations des requérantes vers l’Union.

18      Par une lettre du 3 mars 2011, les requérantes ont communiqué leurs observations sur le document d’information définitif.

19      Le 10 mars 2011, les requérantes ont assisté à une réunion avec les responsables du dossier dans les locaux de la Commission, en présence du conseiller-auditeur.

20      Le 16 mars 2011, la Commission a envoyé une lettre aux requérantes, dans laquelle elle éclaircissait certains points de ses constatations.

21      Le 25 mars 2011, la Commission a procédé à une audition à laquelle assistaient les requérantes, en présence du conseiller-auditeur.

22      Le 28 mars 2011, les requérantes ont présenté une lettre résumant les griefs exposés lors de l’audition du 25 mars 2011 et répondant aux observations formulées par la Commission ainsi qu’aux questions posées par celle-ci lors de cette réunion.

23      Le 29 mars 2011, les requérantes ont envoyé une lettre au conseiller‑auditeur, résumant les points soulevés lors de l’audition du 25 mars 2011, en particulier au sujet de leurs droits de la défense.

 Règlement attaqué

24      Le 6 mai 2011, le règlement attaqué a été adopté par le Conseil.

25      L’article 1er, paragraphes 1 et 2, du règlement attaqué a institué un droit compensateur définitif de 12 % sur les importations dans l’Union de papier fin couché fabriqué par les requérantes.

 Procédure et conclusions des parties

26      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 août 2011, les requérantes ont introduit le présent recours.

27      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 10 novembre 2011, la Commission a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions du Conseil.

28      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 1er décembre 2011, Cepifine AISBL, association européenne des fabricants de papier fin, Sappi Europe SA, Burgo Group SA et Lecta SA (ci-après, prises ensemble, les « intervenantes privées ») ont demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions du Conseil. Dans ses observations, déposées le 24 janvier 2012, le Conseil n’a pas soulevé d’objections à l’encontre de cette intervention.

29      Par ordonnance du 23 janvier 2012, le président de la troisième chambre du Tribunal a admis l’intervention de la Commission. Celle-ci a déposé son mémoire dans le délai imparti.

30      Les requérantes ont sollicité le 8 février 2012 le traitement confidentiel à l’égard des intervenantes privées de certains éléments contenus dans leurs mémoires et leurs annexes respectives. Elles ont produit une version non confidentielle de ces différents actes de procédure.

31      Par ordonnance du 8 mars 2012, le président de la troisième chambre a autorisé les intervenantes privées à intervenir à l’audience au soutien des conclusions du Conseil. Dans la même ordonnance, le président de la troisième chambre a réservé, d’une part, la décision de savoir si les requérantes recevraient le rapport d’audience en vue d’identifier les éléments pouvant être considérés comme confidentiels, et, d’autre part, la décision de savoir si les intervenantes privées recevraient une version provisoire non confidentielle pour présenter leurs observations éventuelles sur la demande de traitement confidentiel.

32      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale.

33      Les parties principales au litige ainsi que les parties intervenantes ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 12 novembre 2013.

34      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler le règlement attaqué, dans la mesure où il les concerne ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

35      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

36      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

37      Les intervenantes privées soutiennent les conclusions du Conseil.

 En droit

38      À l’appui de leur recours, les requérantes invoquent en substance dix moyens, tirés :

–        le premier, de la violation de l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base ;

–        le deuxième, de la violation de l’article 6, sous d), et de l’article 28 du règlement de base, ainsi que de l’article 4 du même règlement ;

–        le troisième, de la violation de l’article 4 du règlement de base ;

–        le quatrième, de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement de base ;

–        le cinquième, de la violation de l’article 6, sous b), du règlement de base ;

–        le sixième, de la violation de l’article 14, paragraphe 2, du règlement de base ;

–        le septième, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, du règlement de base ;

–        le huitième, de la violation de l’article 2, sous d), et de l’article 15 du règlement de base ;

–        le neuvième, de la violation de l’article 8, de l’article 9, paragraphe 1, et de l’article 10, paragraphe 6, du règlement de base ;

–        le dixième, de la violation de l’article 8, paragraphes 1 et 6, du règlement de base.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base

39      Il ressort de l’intitulé du présent moyen que les requérantes invoquent une violation de l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base. Il convient cependant de constater que, en substance, elles soulèvent également une violation de l’article 7, paragraphes 1 et 2, du règlement de base. Or, selon la jurisprudence, il convient d’interpréter les moyens d’une partie requérante par leur substance plutôt que par leur qualification (arrêt de la Cour du 15 décembre 1961, Fives Lille Cail e.a./Haute Autorité, 19/60, 21/60, 2/61 et 3/61, Rec. p. 559).

40      Dès lors, il y a lieu d’examiner non seulement le grief tiré de la violation de l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base, mais également le grief tiré de la violation de l’article 7, paragraphes 1 et 2, du même règlement.

41      Le Tribunal estime opportun d’examiner, d’abord, le grief tiré de la violation de l’article 7, paragraphes 1 et 2, du règlement de base en ce que le règlement attaqué comporte l’utilisation d’un dénominateur inadéquat pour le calcul du montant de la subvention et, ensuite, le grief tiré de la violation de l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base, relatif à l’effet de la méthodologie suivie par les institutions sur le pourcentage de subvention.

42      Les requérantes soutiennent, en premier lieu, que l’article 7, paragraphes 1 et 2, du règlement de base est violé en raison de l’utilisation par le Conseil d’un dénominateur inadéquat.

43      Le Conseil aurait erronément utilisé le chiffre d’affaires représentant le total des ventes des requérantes comme dénominateur pour le calcul du montant de la subvention. Elles allèguent que le total des subventions dont elles ont bénéficié a été exprimé de manière erronée en tant que pourcentage de leur chiffre d’affaires total et non comme résultat du calcul du montant de subvention passible de mesures compensatoires reçu par unité du produit concerné, converti ensuite en pourcentage du prix caf (coût, assurance et fret) du produit vendu à l’Union.

44      Il convient, tout d’abord, de rappeler que l’article 7, paragraphe 2, du règlement de base dispose que, « [l]orsque la subvention n’est pas accordée par référence aux quantités fabriquées, produites, exportées ou transportées, le montant de la subvention passible de mesures compensatoires est déterminé en répartissant, de façon adéquate, la valeur de la subvention totale sur le niveau de production, de vente ou d’exportation du produit en question au cours de la période d’enquête ».

45      Il ressort des dispositions figurant sous le titre « b) Dénominateur utilisé aux fins de la répartition du montant de la subvention », qui figure lui-même sous le titre « F. Période d’enquête pour le calcul de la subvention : imputation contre répartition » des lignes directrices, que, « [u]ne fois établi, le montant de la subvention imputable à la période d’enquête est réparti selon un dénominateur qui peut être le volume des ventes ou des exportations du produit en question afin d’obtenir le montant par unité ».

46      Eu égard à ce qui précède, il y a lieu d’examiner le grief des requérantes.

47      Au considérant 369 du règlement attaqué, le Conseil a rejeté le grief déjà soulevé par les requérantes lors de l’enquête en soulignant ce qui suit :

« [D]’après les constatations effectuées, à une seule exception près, aucun des régimes de subvention passibles de mesures compensatoires n’était subordonné aux résultats à l’exportation et n’avait été accordé par référence aux quantités fabriquées, produites, exportées ou transportées. Par conséquent, le montant de la subvention a été réparti sur le chiffre d’affaires total des entreprises du groupe APP, conformément à l’article 7, paragraphe 2, du règlement de base, qui dispose ce qui suit : ‘Lorsque la subvention n’est pas accordée par référence aux quantités fabriquées produites, exportées ou transportées, le montant de la subvention passible de mesures compensatoires est déterminé en répartissant, de façon adéquate, la valeur de la subvention totale sur le niveau de production, de vente ou d’exportation du produit en question au cours de la période d’enquête’. Comme la subvention n’est pas liée à la production d’un quelconque produit particulier ou aux exportations, le chiffre d’affaires total des ventes de l’entreprise est le dénominateur le plus approprié. À cet égard, il convient d’observer que ce chiffre d’affaires a été déterminé de manière à refléter aussi exactement que possible la valeur des produits vendus par la société bénéficiaire. »

48      Il ressort dudit considérant que le Conseil a pris en compte l’une des solutions prévues par l’article 7, paragraphe 2, du règlement de base, à savoir le niveau de vente du produit en question, et a justifié la raison pour laquelle la répartition du montant de la subvention sur le chiffre d’affaires total des ventes de l’entreprise, et non pas pour un produit unique, était adéquate dans les circonstances d’espèce.

49      En soutenant qu’il était inapproprié de répartir la valeur de la subvention sur le chiffre d’affaires total des ventes des requérantes, les requérantes soutiennent en réalité que le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation.

50      Quant à la prétendue obligation de calculer un montant de subvention par unité, sur la base de l’article 7, paragraphe 1, du règlement de base, il y a lieu de relever, comme l’a fait le Conseil à juste titre, que, premièrement, aucune des subventions en cause passibles de mesures compensatoires n’a été accordée par unité. Deuxièmement, aucune de ces subventions n’était limitée au produit concerné. Troisièmement, une seule de ces subventions, qui concernait GHS, était subordonnée aux résultats à l’exportation, en l’occurrence un prix décerné pour le maintien de la croissance, avec une marge de subvention de 0,05 %.

51      Partant, il y a lieu de constater qu’un calcul par unité n’aurait pas été approprié en l’espèce, contrairement à ce que prétendent les requérantes.

52      Quant à l’affirmation des requérantes selon laquelle le taux du droit ad valorem doit être calculé en recourant à la valeur caf des exportations du produit concerné en tant que dénominateur, il y a lieu de rappeler, tout d’abord, que les subventions en cause ont été accordées à la société dans son ensemble et ne visaient pas les exportations vers l’Union, ensuite, que tous les produits que produisait la société étaient pareillement subventionnés et, enfin, que les requérantes n’allèguent pas que les subventions passibles de mesures compensatoires étaient subordonnées aux exportations ou limitées au produit concerné.

53      Il en ressort que la valeur caf des exportations du produit concerné n’aurait pas été un dénominateur adéquat en l’espèce, contrairement à ce qu’affirment les requérantes.

54      Quant au recours au chiffre d’affaires, les requérantes affirment, en premier lieu, qu’il ne s’agit pas d’un dénominateur adéquat, étant donné que ce chiffre est en principe inférieur à la valeur caf, puisqu’il n’inclut pas l’ensemble des frais de fret et d’assurances compris dans le prix caf. Les requérantes ajoutent que leur chiffre d’affaires relatif aux ventes à l’exportation est très faible [confidentiel] (1).

55      Dans sa lettre du 16 mars 2011, la Commission a expliqué qu’elle n’avait pas utilisé le chiffre d’affaires correspondant aux ventes des requérantes à l’exportation, dont il est fait état dans leurs états financiers, mais le chiffre d’affaires total des requérantes, y compris les ajustements du chiffre d’affaires à l’exportation, « afin de faire en sorte que le chiffre d’affaires reflète la valeur totale des ventes du produit concerné (et non le montant des frais de travail à façon) ».

56      Partant, il y a lieu de rejeter ce grief.

57      Les requérantes soutiennent, en second lieu, que la méthodologie suivie par la Commission a gonflé artificiellement le pourcentage de subvention, parce que le chiffre d’affaires réel des requérantes, [confidentiel] est inférieur à la valeur caf des produits exportés. Selon les requérantes, il s’agit d’une violation de l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base.

58      Selon l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base, le montant du droit compensateur ne doit pas excéder le montant total de la subvention passible de mesures compensatoires et doit être inférieur à ce montant si ce droit moindre suffit pour éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union, ce qui correspond à la règle dite du « droit moindre ».

59      Les requérantes ont proposé, lors de l’enquête, leur propre méthodologie. Au cours de la procédure devant le Tribunal, elles réitèrent leur argumentation à cet égard.

60      Il ressort du considérant 369 du règlement attaqué que « la méthode proposée [par les requérantes] n’est pas représentative, étant donné qu’elle mélange chiffre d’affaires et unités produites pour le produit concerné uniquement, tout en ignorant les unités des autres produits fabriqués ».

61      Il y a lieu de constater que, en l’espèce, les requérantes ne répondent pas aux arguments du Conseil. En premier lieu, il y a lieu de relever, à cet égard, que les requérantes n’abordent pas l’argument du Conseil selon lequel leur méthode mélange les données relatives au chiffre d’affaires et celles relatives aux unités. En deuxième lieu, elles ne contestent pas que leur méthode mélange les prix de vente réels (ventes sur le marché intérieur) et [confidentiel] (ventes à l’exportation) lors du calcul de la part du chiffre d’affaires se rapportant au produit concerné. En troisième lieu, elles n’abordent pas l’argument du Conseil selon lequel la méthode proposée impliquait, au stade de sa cinquième étape, de répartir le montant artificiellement réduit de la subvention pour les ventes à l’exportation du produit concerné [confidentiel], mais sur le prix caf que cette société facturait pour les ventes à destination de l’Union. En quatrième lieu, elles n’abordent pas l’argument selon lequel les subventions devaient être réparties sur l’ensemble des ventes, et non seulement sur les ventes du produit concerné, comme elles le revendiquent, afin de les répartir équitablement sur leurs ventes, les subventions n’étant pas limitées au produit concerné.

62      Par conséquent, il y a lieu de constater que les requérantes restent en défaut d’apporter des éléments suffisants pour priver de plausibilité les appréciations des faits retenues dans le règlement attaqué concernant le dénominateur. Or, une telle preuve est requise afin d’établir qu’une institution de l’Union a commis une erreur manifeste d’appréciation de nature à justifier l’annulation d’un acte (voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 10 mars 2009, Aker Warnow Werft et Kvaerner/Commission, T‑68/05, Rec. p. II‑355, point 42, et la jurisprudence citée).

63      Puisque les requérantes n’ont pas démontré que le Conseil aurait commis une erreur dans le calcul du montant de la subvention passible de mesures compensatoires, le grief tiré de la violation de l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base doit, par conséquent, être rejeté.

64      Il ressort de l’ensemble de ce qui précède que les présents griefs ne sont pas fondés et que le premier moyen doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 6, sous d), de l’article 28 et de l’article 4 du règlement de base

65      Le présent moyen comporte deux branches.

66      La première branche est prise d’une violation de l’article 6, sous d), et de l’article 28 du règlement de base en ce que la Commission a utilisé Taïwan en tant que point de référence pour établir si l’attribution par la Chine de droits relatifs à l’utilisation des sols avait conféré un avantage aux requérantes.

67      La seconde branche est prise d’une violation de l’article 4 du règlement de base en ce que les institutions de l’Union auraient dû conclure qu’il n’existait pas le moindre élément prouvant la spécificité de l’acquisition par les requérantes de droits relatifs à l’utilisation des sols.

 Sur la première branche, portant sur l’utilisation de Taïwan en tant que référence appropriée

68      Il ressort des considérants 260 à 262 du règlement attaqué que la Commission était tenue d’utiliser une référence extérieure, en application de l’article 6, sous d), ii), du règlement de base, étant donné qu’il n’existait pas de véritable marché foncier en Chine ni aucune autre référence privée disponible par rapport à laquelle elle pouvait déterminer les conditions normales prévalant sur le marché des droits relatifs à l’utilisation des sols en question.

69      À titre liminaire, il y a lieu d’observer que les requérantes ne contestent plus en l’espèce l’utilisation par les institutions de l’Union d’une référence extérieure pour établir si l’attribution de droits relatifs à l’utilisation des sols conférait un avantage aux requérantes. Dans leurs observations sur le document d’information finale de la Commission du 3 février 2011 (ci-après le « document d’information finale »), le gouvernement chinois et les requérantes étaient encore d’avis qu’il existait un marché foncier en Chine et que les prix fonciers chinois dans le nouveau district de Zhenjiang et à Suzhou (Chine) constituaient une référence appropriée.

70      La question qui se pose est de savoir si la Commission, en retenant Taïwan en tant que point de référence, a fait un choix manifestement erroné.

71      Il convient de rappeler que, dans le domaine des mesures de défense commerciale, les institutions communautaires disposent d’un large pouvoir d’appréciation en raison de la complexité des situations économiques, politiques et juridiques qu’elles doivent examiner (arrêts du Tribunal du 5 juin 1996, NMB France e.a./Commission, T‑162/94, Rec. p. II‑427, point 72 ; du 29 janvier 1998, Sinochem/Conseil, T‑97/95, Rec. p. II‑85, point 51, et du 17 juillet 1998, Thai Bicycle/Conseil, T‑118/96, Rec. p. II‑2991, point 32).

72      Le choix du pays de référence s’inscrit dans le cadre du pouvoir d’appréciation dont les institutions disposent dans l’analyse de situations économiques complexes.

73      L’exercice de ce pouvoir n’est toutefois pas soustrait au contrôle juridictionnel. En effet, conformément à une jurisprudence constante, le juge de l’Union, dans le cadre de ce contrôle, vérifie le respect des règles de procédure, l’exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou l’absence de détournement de pouvoir (arrêt de la Cour du 7 mai 1987, NTN Toyo Bearing e.a./Conseil, 240/84, Rec. p. 1809, point 19 ; voir arrêt Thai Bicycle/Conseil, point 71 supra, point 33, et la jurisprudence citée).

74      S’agissant en particulier du choix du pays de référence, il convient de vérifier si les institutions de l’Union n’ont pas omis de prendre en considération des éléments essentiels en vue d’établir le caractère adéquat du pays choisi et si les éléments du dossier ont été examinés avec toute la diligence requise.

75      En l’espèce, les requérantes soutiennent, en premier lieu, que les institutions n’ont pas utilisé le meilleur point de référence dont elles disposaient, à savoir le prix des terrains dans l’État indien du Maharashtra (Inde), mais le prix d’achat de terrain en pleine propriété à Taïwan (voir considérants 356 et 357 du règlement attaqué), lequel est inadéquat en ce qui concerne les prix de droits relatifs à l’utilisation des sols dans la province de Jiangsu durant la période 1995-2000, période au cours de laquelle le PIB dans la province de Jiangsu était égal à celui de l’Afrique subsaharienne et où Taïwan était une économie ouverte.

76      Le Conseil considère que le fait que Taïwan soit une économie de marché ouverte est, en l’espèce, hors de propos dans la mesure où la Commission est tenue de choisir une référence qui reflète les conditions normales du marché et, comme il est signalé au considérant 356 du règlement attaqué, « il est normal qu’un pays n’ayant pas une économie de marché ait un PIB moins élevé ».

77      En deuxième lieu, les requérantes font valoir que la Commission n’a pas garanti la comparabilité entre la province de Jiangsu et Taïwan choisi comme point de référence dès lors que, en se fondant sur la situation actuelle, elle a estimé que Taïwan et la province de Jiangsu étaient semblables, alors que l’État du Maharashtra était moins développé. Elles soulèvent à cet égard que la Commission n’a pas examiné l’argument des requérantes selon lequel un point de référence adéquat pour le prix que les requérantes auraient dû payer pour leurs droits d’utilisation des sols devait tenir compte des conditions du marché au moment de leur octroi et non des conditions actuelles du marché, notamment en ce qui concerne les infrastructures et la densité de la population urbaine. À l’appui de leur argumentation, les requérantes invoquent le rapport de l’organe d’appel de l’OMC du 18 mai 2011 dans l’affaire « Communautés européennes et certains États membres – Mesures affectant le commerce des aéronefs civils gros porteurs » (WT/DS316/AB/R) (ci-après l’« affaire CE-Airbus »).

78      Le Conseil fait valoir que les institutions de l’Union ont évalué les deux critères sur lesquels se sont fondées les requérantes pour proposer l’utilisation de l’État du Maharashtra en tant que référence extérieure, à savoir la densité de population et le PIB, mais il en ressortait que l’État du Maharashtra n’était pas comparable à la province du Jiangsu.

79      Le Conseil estime que l’affirmation des requérantes selon laquelle la Commission n’a pas tenu compte des conditions du marché au moment où la subvention a été octroyée au cours de l’enquête est dépourvue de tout fondement en ce que la Commission a utilisé Taïwan comme référence extérieure. Il rappelle, tout d’abord, que la Commission ne pouvait se fier aux seules données financières, ensuite, que le PIB et la densité de la population ne sauraient être les seuls facteurs décisifs et, enfin, que d’autres facteurs, tels que la distance et l’absence de caractéristiques communes entre l’Inde et la Chine, ont été pris en considération.

80      Les considérants pertinents du règlement attaqué concernant Taïwan se lisent comme suit :

« (356)      […] La Commission considère que Taïwan […] constitue une référence extérieure appropriée compte tenu de l’ensemble des éléments du dossier : i) le niveau de développement économique et la structure économique de Taïwan et des provinces chinoises où sont établis les producteurs-exportateurs ayant coopéré ; ii) la proximité géographique de ces deux provinces chinoises avec Taïwan ; iii) le développement important des infrastructures à Taïwan et dans ces deux provinces chinoises ; iv) les liens économiques étroits et les échanges commerciaux transfrontaliers intenses entre Taïwan et la [Chine] ; v) la densité de population similaire des provinces chinoises concernées et de Taïwan ; vi) la similarité entre les types de terrains et de transactions utilisés pour construire la référence pertinente se rapportant à Taïwan et les types observés en [Chine] ; vii) les caractéristiques démographiques, linguistiques et culturelles communes à Taïwan et à la [Chine]. Il convient d’ajouter que les provinces du Jiangsu et du Shandong sont considérées comme les plus importantes provinces manufacturières de la [Chine]. Bien que le PIB par habitant de ces deux provinces chinoises ne soit pas identique à celui de Taïwan, il a progressé rapidement au cours des dernières années ; en d’autres termes, le retard par rapport à Taïwan est en train d’être comblé.

En outre, des données récentes suggèrent que le PIB réel de la [Chine] et de Taïwan présente des taux de croissance similaires […]. Cela étant, il importe d’observer que la comparaison exacte effectuée entre le PIB d’un pays qui n’a pas une économie de marché (la [Chine]) et le PIB d’une économie de marché bien établie (Taïwan) n’est pas un élément décisif, dans la mesure où il est normal qu’un pays n’ayant pas une économie de marché ait un PIB moins élevé. En outre, de nombreux autres facteurs, tels que les règles en matière d’urbanisme ou les politiques environnementales, peuvent exercer une influence sur l’offre et la demande de terrains à usage industriel. La vraie question est celle de savoir quelles seraient les ‘conditions du marché existantes’ en ce qui concerne les droits d’utilisation des sols si la [Chine] était une véritable économie de marché ; or, tout porte à croire qu’elles seraient très proches de celles observées à Taïwan.

(357) Compte tenu de ce qui précède, il est considéré que le point de référence choisi répond aux exigences formulées par l’organe d’appel de l’OMC au paragraphe 103 de son rapport concernant l’affaire États-Unis – Bois de construction IV : ‘le point de repère choisi doit, néanmoins, se rapporter, se référer ou être lié aux conditions du marché existantes dans ce pays, et doit refléter le prix, la qualité, la disponibilité, la qualité marchande, le transport et autres conditions d’achat ou de vente, comme l’exige l’article 14 d)’. En effet, la totalité des conditions de Taïwan se rapportent aux conditions en vigueur sur le marché dans les deux provinces chinoises. Les terrains sont disponibles dans des zones dont la densité est similaire, la proximité géographique de ces zones garantit qu’il s’agit de terrains de qualité similaire, et le fait que Taïwan et les deux provinces chinoises partagent la même langue et la même culture, ont une économie axée sur les exportations et d’importants secteurs manufacturiers confirme que le prix, la qualité marchande et les autres conditions d’achat ou de vente des terrains sont très semblables. »

81      Il y a lieu d’observer, à cet égard, que les requérantes ne contestent ni la pertinence ni l’exactitude des facteurs supplémentaires retenus par les institutions, au considérant 356 du règlement attaqué, pour établir que Taïwan était la référence appropriée.

82      Le considérant concernant l’Inde dans le règlement attaqué se lit comme suit :

« (361) Comme expliqué au considérant 359, il n’existe pas de véritable marché foncier en Chine. C’est pourquoi il n’est pas approprié d’utiliser les prix chinois actuels des droits d’utilisation des sols. Les producteurs-exportateurs ont fondé leur affirmation selon laquelle il serait possible d’utiliser comme référence les prix fonciers de l’État du Maharashtra sur une comparaison avec cet État du point de vue du PIB par habitant et de la densité de la population à l’époque de l’achat des droits d’utilisation des sols. Comme indiqué précédemment, la Commission estime que le PIB par habitant et la densité de la population ne sauraient être les seuls facteurs décisifs lors du choix d’un pays ou d’une région aux fins de l’application d’une référence extérieure. Quoi qu’il en soit, la méthode proposée par les producteurs-exportateurs ayant coopéré n’est pas cohérente avec leurs affirmations. Au cours de la période d’enquête, Bombay, la capitale [de l’État du] du Maharashtra et, de loin, la zone la plus développée de l’État, affichait un revenu par habitant de 2 675 USD (128 000 INR), qui est en fait inférieur à la moyenne nationale chinoise de 3 529 USD […], sans parler du PIB par habitant des [provinces] très développées du Shandong et du Jiangsu (respectivement 5 255 USD et 6 550 USD). La densité de la population ne constitue pas non plus, en soi, un facteur décisif mais, à titre d’information, il convient de préciser qu’elle était de 314 habitants/km2 [dans l’État du] Maharashtra, de 736 habitants/km2 [dans la province de] Jiangsu et de 600 habitants/km2 [dans la province de] Shandong, autrement dit elle ne se situait pas au même niveau. Par ailleurs, d’autres facteurs, tels que la distance et l’absence de caractéristiques communes entre l’Inde et la Chine permettent de conclure que la référence constituée par [l’État du] Maharashtra ne se rapporte pas, ne se réfère pas et n’est pas liée aux conditions en vigueur sur le marché chinois. Pour les raisons exposées au considérant 357, la Commission reste d’avis que les prix des terrains à Taïwan constituent une référence extérieure bien plus appropriée. »

83      Il ressort du considérant qui précède que les institutions de l’Union se sont livrées à un examen approfondi de la proposition alternative au choix de Taïwan comme pays de référence. En effet, les institutions de l’Union ont examiné le PIB ainsi que la densité de la population en Inde, comme cela était proposé par les requérantes. En outre, les institutions de l’Union ont exposé de manière convaincante les motifs pour lesquels l’Inde n’avait pas été retenue comme pays de référence.

84      Toutefois, il y a lieu de rappeler, à ce sujet, que les requérantes ont bien précisé que la Commission n’avait pas examiné leur argument selon lequel un point de référence adéquat pour le prix que les requérantes auraient dû payer pour leurs droits d’utilisation des sols devait tenir compte des conditions du marché au moment de leur octroi et non des conditions actuelles du marché. À l’appui de leur argumentation, les requérantes invoquent le rapport de l’organe d’appel de l’OMC dans l’affaire CE-Airbus.

85      Premièrement, l’argument des requérantes portant sur l’application de la solution retenue dans l’affaire CE-Airbus au cas d’espèce ne saurait prospérer. Il y a lieu d’observer, comme l’a fait le Conseil à juste titre, que cette affaire ne concernait pas le choix de la référence extérieure appropriée pour établir le montant de l’avantage conféré.

86      Deuxièmement, il y a lieu d’observer que les requérantes n’allèguent pas que le fait que la Commission n’a pas examiné leur argument les a empêchées de faire connaître utilement leur point de vue et a porté atteinte à leurs droits de la défense.

87      Troisièmement, l’affirmation selon laquelle la Commission aurait dû tenir compte des conditions du marché dans le pays de référence au moment de l’octroi des droits d’utilisation des sols, en l’occurrence pendant la période allant de l’année 1995 à l’année 2000, et non des conditions actuelles, en vigueur au moment de l’enquête, ne saurait être retenue.

88      Force est de constater que les requérantes contestent, en substance, l’interprétation faite par des institutions de l’Union des termes « conditions existantes » figurant à l’article 6, sous d), du règlement de base.

89      Aux termes de l’article 6, sous d), du règlement de base :

« […] L’adéquation de la rémunération est déterminée par rapport aux conditions existantes du marché pour le bien ou service en question dans le pays de fourniture ou d’achat, y compris le prix, la qualité, la disponibilité, la qualité marchande, le transport et autres conditions d’achat ou de vente.

S’il n’existe pas, dans le pays de fourniture ou d’achat, pour le produit ou le service en question, de conditions du marché pouvant être utilisées comme références appropriées, les règles suivantes s’appliquent :

[…]

ii)      le cas échéant, il est fait appel aux conditions et aux modalités qui prévalent sur le marché d’un autre pays ou sur le marché mondial, et auxquelles le bénéficiaire peut accéder. »

90      Il ne ressort pas des termes de cet article que la Commission était obligée de tenir compte des conditions du marché dans le pays de référence au moment de l’octroi des droits d’utilisation des sols plutôt que des conditions actuelles.

91      Par conséquent, il ressort de tout ce qui précède que le grief, tiré de la violation de l’article 6, sous d), du règlement de base, doit être rejeté.

92      S’agissant de la prétendue violation de l’article 28 du règlement de base, intitulé « Défaut de coopération », il y a lieu de constater que ce grief n’est, à l’évidence, pas étayé. Au point 45 de la requête, les requérantes font simplement valoir que, « en choisissant Taïwan dans l’enquête comme étant le meilleur point de référence existant, la Commission n’a pas garanti la comparabilité […] violant [ainsi] l’article 28 (recours aux meilleures données disponibles) ».

93      Il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, la requête introductive d’instance doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autre information à l’appui. La requête doit, de ce fait, expliciter en quoi consiste le moyen sur lequel le recours est fondé, de sorte que sa seule énonciation abstraite ne répond pas aux exigences du règlement de procédure (arrêts du Tribunal du 12 janvier 1995, Viho/Commission, T‑102/92, Rec. p. II‑17, point 68 ; du 14 mai 1998, Mo och Domsjö/Commission, T‑352/94, Rec. p. II‑1989, point 333, et du 12 octobre 2011, Association belge des consommateurs test-achats/Commission, T‑224/10, Rec. p. II‑7177, point 71). Dès lors que les requérantes n’ont nullement explicité leur grief tiré de la violation de l’article 28 du règlement de base, ce grief doit être déclaré irrecevable.

94      À titre surabondant, l’article 28 du règlement de base autorise les institutions à recourir aux données disponibles, sans toutefois les contraindre à recourir aux meilleures données disponibles.

95      Partant, il y a lieu de rejeter la première branche du deuxième moyen.

 Sur la seconde branche, portant sur la prétendue absence d’élément prouvant la spécificité

96      Les requérantes considèrent, en substance, qu’il n’existe pas le moindre élément prouvant la spécificité de l’acquisition par elles-mêmes de droits relatifs à l’utilisation des sols, de sorte que les institutions auraient commis une erreur manifeste d’appréciation des faits de l’espèce et violé l’article 4 du règlement de base en tirant une conclusion différente.

97      Les considérants du règlement attaqué, concernant la spécificité de la subvention en matière de droits d’utilisation des sols, se lisent comme suit :

« (252) Il a été demandé au [gouvernement chinois] de fournir des informations sur les critères d’éligibilité permettant d’obtenir la subvention et sur son utilisation, afin de déterminer dans quelle mesure la subvention est limitée à certaines entreprises et si elle est spécifique au sens de l’article 4 du règlement de base. Le [gouvernement chinois] n’a pas transmis ces informations. La Commission, consciente de l’exigence de l’article 4, paragraphe 5, du règlement de base, selon laquelle toute détermination de spécificité ‘est clairement étayée’ par des éléments de preuve positifs, a donc dû fonder ses conclusions sur les faits disponibles, conformément à l’article 28 du règlement de base. Il convient de noter que l’article 28, paragraphe 6, dispose que ‘[s]i une partie intéressée ne coopère pas ou ne coopère que partiellement et que, de ce fait, des renseignements pertinents ne sont pas communiqués, il peut en résulter pour ladite partie une situation moins favorable que si elle avait coopéré’. Les faits considérés incluaient les éléments suivants :

(253) la preuve de la spécificité fournie par les plaignants ;

(254)      les conclusions (voir considérants 77 et 78) selon lesquelles des subventions spécifiques sont octroyées à l’industrie du papier par l’intermédiaire d’un plan sectoriel spécifique, à savoir le plan papetier ; à cet égard, il convient de noter que les articles 7 à 11 du plan précité énoncent des règles spécifiques relatives à la planification industrielle en précisant quel type d’industries papetières doivent être établies dans les diverses régions géographiques du pays ;

(255) la preuve (voir considérant 76) que l’industrie du papier est une ‘industrie à encourager’ (décision n° 40) ;

(256) les conclusions (voir considérants 260 à 262) selon lesquelles il n’existe pas de véritable marché foncier en Chine ;

(257) les conclusions des producteurs-exportateurs ayant coopéré, confirmées dans l’enquête antidumping parallèle, selon lesquelles des terrains leur ont été attribués en vue de la réalisation de leurs projets papetiers […]

(258) Compte tenu de ce qui précède, et en l’absence de toute coopération de la part du [gouvernement chinois], les éléments de preuve existants montrent que les subventions accordées aux entreprises du secteur du papier ne sont pas disponibles de façon générale et sont donc spécifiques au sens de l’article 4, paragraphe 2, [sous] a), du règlement de base. Vu le défaut de coopération du [gouvernement chinois], rien ne suggère que la possibilité de bénéficier de la subvention soit subordonnée à des critères ou conditions objectifs, au sens de l’article 4, paragraphe 2, [sous] b), du règlement de base.

(259) En conséquence, la subvention devrait être considérée comme passible de mesures compensatoires. »

98      Il y a lieu d’observer, à cet égard, que les requérantes ne contestent pas les conclusions figurant aux considérants 252 à 259 du règlement attaqué qui ont conduit les institutions de l’Union à conclure que les droits relatifs à l’utilisation des sols attribués par le gouvernement chinois étaient spécifiques.

99      Les requérantes font simplement remarquer que les droits relatifs à l’utilisation des sols « sont disponibles à [l’égard de] toutes les sociétés en Chine, sans distinction […] puisque la vente [de ces droits] ne vise pas, en droit ou en pratique, à octroyer un avantage à une entreprise, une industrie ou un groupe d’entreprises ou d’industries » et qu’ils « [sont] toujours vendu[s] au plus offrant ou, lorsqu’il n’y a pas suffisamment de soumissionnaires ou lorsque les offres sont trop basses, il n’est pas procédé à la vente ».

100    Ces remarques ne sont pas de nature à pouvoir remettre en cause les conclusions des institutions de l’Union.

101    Les requérantes affirment que les éléments de preuve qu’elles ont présentés à la Commission au cours de l’enquête démontraient qu’« il existe, en Chine, un système unique et unifié régissant la vente et l’achat de droits relatifs à l’utilisation des sols couvrant l’ensemble du territoire chinois et que toutes les ventes sont réalisées selon des procédures non discriminatoires d’appels d’offres, de ventes aux enchères ou d’inscription sur des listes ».

102    Par ailleurs, les requérantes estiment avoir fourni toutes les preuves relatives à l’achat et à la vente des droits d’utilisation des sols en Chine, à savoir les mécanismes régissant les droits d’utilisation des sols et les règles relatives à la détermination de la valeur applicable lors des ventes.

103    Ces arguments, dès lors que les requérantes se contentent de plaider au moyen d’annexes, doivent être déclarés irrecevables en application de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure. En effet, il y a lieu de rappeler à cet égard que, si le corps de la requête peut être étayé et complété, sur des points spécifiques, par des renvois à des extraits de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la requête, ne saurait pallier l’absence d’éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui doivent figurer dans la requête (ordonnance du Tribunal du 21 mai 1999, Asia Motor France e.a./Commission, T‑154/98, Rec. p. II‑1703, point 49).

104    Les requérantes font valoir que la discussion du Conseil sur la spécificité de la subvention ne satisfait pas aux normes en vigueur en matière d’examen et de motivation dès lors que la Commission a fondé son appréciation sur le motif que le gouvernement chinois n’avait pas fourni d’informations sur les critères d’éligibilité permettant d’obtenir la subvention et sur son utilisation (voir considérant 252 du règlement attaqué), sans toutefois identifier le type d’informations qu’il n’aurait pas fourni.

105    Cet argument ne saurait prospérer, puisque le considérant 248 du règlement attaqué, qui reprend le point 226 du document d’information finale, décrivait les éléments de preuve que la Commission avait cherché en vain à obtenir de la Chine.

106    En effet, il ressort dudit considérant :

« D’après la plainte, le [gouvernement chinois] aurait octroyé des droits relatifs à l’utilisation des sols aux exportateurs ayant coopéré en échange d’une rémunération moins qu’adéquate. En réponse à cette allégation, le [gouvernement chinois] a communiqué le texte de la loi sur l’administration des sols et les dispositions n° 39, du 28 septembre 2007, sur l’attribution, aux fins de construction, de droits d’utilisation des sols appartenant à l’État dans le cadre d’appels d’offres et d’enchères statiques ou dynamiques. Le [gouvernement chinois] a refusé de fournir la moindre donnée concernant les prix réels des droits d’utilisation des sols, les prix planchers de référence des terrains (qui, d’après leurs affirmations, existeraient), les modalités d’évaluation de ces prix ainsi que la méthodologie suivie en cas d’expropriation des précédents utilisateurs par l’État. »

107    Le considérant 252 du règlement attaqué a valeur de conclusion à l’égard des dispositions du règlement attaqué intitulées « Attribution de droits relatifs à l’utilisation des sols », de sorte qu’il ne doit, par conséquent, pas contenir une description des types d’informations que le gouvernement chinois n’aurait pas fourni.

108    Les requérantes soutiennent que l’enquête n’a pas été en mesure de prouver que la situation dans le nouveau district de Zhenjiang et dans le parc industriel de Suzhou était différente de celle existant en dehors de ces zones pour ce qui concerne l’octroi et le coût de droits relatifs à l’utilisation des sols.

109    Il y a lieu de relever, à cet égard, comme l’a fait à juste titre le Conseil, que les observations sur la spécificité régionale sont hors de propos dès lors que les institutions de l’Union n’ont pas conclu que l’attribution de droits d’utilisation des sols était spécifique à ces régions.

110    Il ressort de tout ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter la seconde branche du présent moyen.

111    Par conséquent, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen dans son ensemble.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 4 du règlement de base

112    Le Conseil a constaté, au considérant 125 du règlement attaqué :

« Le régime d’exonération des dividendes versés aux entreprises résidentes s’applique aux entreprises résidentes en Chine, qui sont actionnaires d’autres entreprises résidentes en Chine. Les premières bénéficient d’une exonération fiscale de certains dividendes versés par les secondes. »

113    Il ressort du considérant 127 du règlement attaqué que « [c]e régime confère un avantage à toutes les sociétés résidentes qui sont actionnaires d’autres sociétés résidentes en Chine ».

114    Selon le considérant 129 du règlement attaqué :

« La déclaration de revenus des producteurs-exportateurs ayant coopéré fait état d’un montant exonéré de l’impôt sur les bénéfices. Ce montant figure sous ‘Dividendes, bonus et autres revenus provenant de prises de participation des sociétés résidentes éligibles’ conformément aux conditions de l’annexe 5 de la déclaration fiscale (déclaration annuelle des avantages fiscaux). Aucun impôt sur les bénéfices n’a été acquitté sur ces montants par les entreprises concernées. »

115    Le Conseil a considéré, en premier lieu, que ce régime était spécifique au sens de l’article 4, paragraphe 2, sous a), du règlement de base, « étant donné que la législation, en vertu de laquelle agit l’autorité compétente, a limité le bénéfice de ce régime aux sociétés résidentes en Chine, qui perçoivent des dividendes d’autres sociétés résidentes en Chine, par opposition aux entreprises qui investissent dans des entreprises étrangères » (voir considérant 132 du règlement attaqué).

116    En second lieu, au considérant 133 du règlement attaqué, le Conseil a considéré :

« [D]ans la mesure où l’ensemble des régimes fiscaux susmentionnés qui relèvent du chapitre 4 de la loi chinoise relative à l’impôt sur les bénéfices sont réservés exclusivement aux industries et projets importants soutenus ou encouragés par l’État, ainsi que le précise l’article 25, ce régime est également spécifique, parce qu’il est réservé uniquement à certaines entreprises et industries classées comme à encourager, telles que l’industrie du papier couché. En effet, d’après l’analyse de la Commission, le Conseil des affaires de l’État, dans sa décision n° 40 (article 14) et dans les lignes directrices relatives à la restructuration industrielle, établit les principes et la classification permettant de déterminer qu’une entreprise doit être encouragée. En outre, dans ce cas, il n’existe pas de critères objectifs limitant l’éligibilité ni d’éléments de preuve définitifs permettant de conclure que le droit de bénéficier de la subvention est automatique, conformément à l’article 4, paragraphe 2, [sous] b), du règlement de base. En effet, bien que les visites organisées chez les producteurs-exportateurs aient permis de recueillir certaines dispositions administratives, le défaut de coopération du [gouvernement chinois] n’a pas permis d’établir l’existence de tels critères objectifs. »

117    En l’espèce, les requérantes soutiennent, en premier lieu, que le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que le régime fiscal chinois en cause était spécifique en ce que l’autorité compétente en a limité le bénéfice aux entreprises résidentes en Chine qui percevaient des dividendes d’autres entreprises résidentes en Chine, par opposition aux entreprises qui investissaient dans des entreprises étrangères.

118    Force est de constater que les requérantes sont d’avis que les institutions ont commis une erreur manifeste d’appréciation dans le cadre de l’application de l’article 4, paragraphe 2, sous a), du règlement de base, qui dispose que, « dans le cas où l’autorité qui accorde la subvention ou la législation applicable limite expressément à certaines entreprises la possibilité de bénéficier de la subvention, il y a spécificité ».

119    À ce titre, les requérantes font valoir que le régime fiscal permet d’éviter une double imposition en Chine en ce que les dividendes perçus par une société résidente, s’ils sont versés par une société résidente également soumise à la compétence fiscale de la Chine, peuvent être déduits des revenus imposables. En revanche, si les dividendes proviennent d’investissements étrangers qui ne relèvent pas de la compétence fiscale de la Chine, ces dividendes ne peuvent être déduits des revenus imposables.

120    À titre d’information, il y a lieu de rappeler que le Conseil a indiqué, au considérant 338 du règlement attaqué, que, « [e]n réponse à l’affirmation selon laquelle cette incitation [fiscale qui entraîne l’abandon de recettes publiques] vise à éviter une double imposition, il convient de préciser que, même si l’accord SMC ne limite pas la possibilité, pour un membre de l’OMC, de prendre des mesures en vue d’éviter la double imposition (voir accord SMC, annexe I, note 59), cette disposition est un ‘moyen de défense affirmatif’ et aucun élément de preuve concret n’a été fourni pour étayer l’allégation selon laquelle, par exemple, les dividendes des entreprises résidentes et non résidentes sont traités de manière différente en raison d’obligations juridiques incombant à la [Chine] en vertu de conventions bilatérales sur la double imposition conclues avec des pays tiers ».

121    En l’espèce, il y a lieu d’observer, comme l’a fait le Conseil à juste titre, que les requérantes ne fournissent, dans le cadre du présent recours, aucune preuve écrite ou commentaire susceptible d’étayer leur allégation selon laquelle « le régime fiscal [en cause] vise à éviter la double imposition en Chine ».

122    Cette allégation doit dès lors être déclarée irrecevable en application de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure.

123    À titre surabondant, il y a lieu de relever que l’article 26 de la loi chinoise relative à l’impôt sur les bénéfices (ci-après la « LRIB ») relève du chapitre 4 de ladite loi, portant sur les traitements fiscaux préférentiels. Si, comme le font valoir les requérantes, le régime fiscal en cause vise effectivement « à éviter la double imposition », il est néanmoins curieux de constater que l’article 26 de la LRIB ne figure pas dans un autre chapitre de ladite loi.

124    Les requérantes affirment, en second lieu, que le Conseil n’a fourni aucune explication en ce qui concerne la raison pour laquelle il a conclu que l’ensemble des régimes relevant du chapitre 4 de la LRIB étaient réservés aux industries à encourager. Elles ajoutent que l’article 26 de la LRIB n’exclut vraiment pas d’industries de l’exonération en cause et que l’article 25 de ladite loi est dénué de pertinence en l’espèce.

125    Le Conseil, soutenu par la Commission, fait valoir que les requérantes ne fournissent aucune explication, dans leur requête, concernant la raison pour laquelle l’article 26 de la LRIB ne doit pas être lu à la lumière de l’article 25 de la LRIB, mais se contentent de renvoyer aux explications fournies à la Commission durant l’enquête.

126    À cet égard, il y a lieu de constater que les requérantes estiment, dans leur réplique, que les institutions ont commis une erreur d’interprétation des articles 25 et 26 de la LRIB. Le fait que ces deux articles s’inscrivent tous deux dans un même chapitre, à savoir le chapitre 4, intitulé « Traitement fiscal préférentiel », n’induit pas, selon elles, que les limites applicables au régime préférentiel de l’impôt sur le revenu en vertu de l’article 25 de la LRIB s’appliquent également à l’exonération prévue par l’article 26 de ladite loi. Elles ont précisé, lors de l’audience, que l’article 25 de la LRIB ne sert pas d’article-parapluie dans le chapitre 4 susmentionné et que les articles 25 et 26 de la LRIB doivent, par conséquent, être lus séparément. Contrairement à ce que prétend le Conseil, il ne s’agit pas, selon elles, d’un nouvel argument, mais d’une ampliation d’un argument existant.

127    Il y a lieu de constater que les requérantes se contentent de renvoyer aux explications fournies à la Commission durant l’enquête et ne fournissent aucun élément de preuve à l’appui de leur argumentation.

128    Dans leur réplique, les requérantes font également valoir que, au considérant 133, le règlement attaqué retient une lecture de l’article 26 de la LRIB qui se fonde sur la seule allégation selon laquelle les autorités chinoises n’auraient pas coopéré (dernière phrase du considérant 133).

129    Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu d’examiner l’analyse du lien entre les articles 25 et 26 de la LRIB faite par les institutions de l’Union, pour déterminer si elles ont retenu une lecture erronée de l’article 26 de la LRIB qui trouve son origine dans le prétendu défaut de coopération des autorités chinoises.

130    L’article 25 de la LRIB prévoit qu’« [u]n impôt préférentiel sur les bénéfices est accordé aux industries et aux projets importants dont le développement est soutenu et encouragé par l’État ».

131    L’article 26 de la LRIB se lit comme suit :

« Les bénéfices suivants sont exonérés d’impôts :

[…]

2)      Dividendes, bonus et autres revenus provenant de prises de participation des sociétés résidentes éligibles. »

132    Il ressort du point 111 du document d’information finale, entériné au considérant 133 du règlement attaqué, que la Commission a exposé son analyse du lien entre les articles 25 et 26 de la LRIB dans les termes suivants :

« En outre, dans la mesure où l’ensemble des régimes fiscaux susmentionnés qui relèvent du chapitre 4 de la loi chinoise relative à l’impôt sur les bénéfices sont réservés exclusivement aux industries et projets importants soutenus ou encouragés par l’État, ainsi que le précise l’article 25, ce régime est également spécifique, parce qu’il est réservé uniquement à certaines entreprises et industries classées comme à encourager, telles que l’industrie du papier couché. En effet, d’après l’analyse de la Commission, le Conseil des affaires de l’État, dans sa décision n° 40 (article 14) et dans les lignes directrices relatives à la restructuration industrielle, établit les principes et la classification permettant de déterminer qu’une entreprise doit être encouragée. En outre, dans ce cas, il n’existe pas de critères objectifs limitant l’éligibilité ni d’éléments de preuve définitifs permettant de conclure que le droit de bénéficier de la subvention est automatique, conformément à l’article 4, paragraphe 2, [sous] b), du règlement de base. En effet, bien que les visites organisées chez les producteurs-exportateurs aient permis de recueillir certaines dispositions administratives, le défaut de coopération du [gouvernement chinois] n’a pas permis d’établir l’existence de tels critères objectifs. »

133    Il ressort du point 109 du document d’information finale, entériné au considérant 131 du règlement attaqué, que le gouvernement chinois n’a pas communiqué d’informations concernant les critères objectifs d’éligibilité :

« Il a été demandé au [gouvernement chinois] de fournir des informations sur les critères d’éligibilité permettant d’obtenir cette subvention et sur son utilisation, afin de déterminer dans quelle mesure la subvention est limitée à certaines entreprises et si elle est spécifique au sens de l’article 4 du règlement de base. Le [gouvernement chinois] n’a pas transmis ces informations. La Commission, consciente de l’exigence de l’article 4, paragraphe 5, du règlement de base, selon laquelle toute détermination de spécificité ‘est clairement étayée’ par des éléments de preuve positifs, a donc dû fonder ses conclusions sur les faits disponibles, conformément à l’article 28 du règlement de base. »

134    Les observations du gouvernement chinois, du 3 mars 2011, sur le document d’information finale ont été entérinées au considérant 339 du règlement attaqué :

« Il a également été affirmé que ce régime n’a absolument aucun lien avec les entreprises et les industries classées comme étant ‘à encourager’, mais s’applique, par définition, à toutes les entreprises résidentes. Le [gouvernement chinois a] également déclaré que l’article 2, paragraphe 2, de l’accord SMC prévoit que la fixation de taux d’imposition d’application générale n’est pas réputée être une subvention spécifique. Il a affirmé que les critères d’éligibilité à ce régime sont objectifs et définis en détail, que le droit d’en bénéficier est automatique et que, donc, le régime ne peut être considéré comme spécifique au sens de l’article 2, paragraphe 1, [sous] b), de l’accord SMC et de l’article 4, paragraphe 2, [sous] b), du règlement de base. »

135    En l’absence de preuve positive à l’appui de leurs affirmations faites dans leurs observations du 3 mars 2011, les institutions de l’Union ont tranché, au considérant 340 du règlement attaqué, la question relative au caractère spécifique du régime de subvention, comme suit :

« Ces arguments ont dû être rejetés. À ce propos, il est rappelé que les dispositions juridiques qui définissent ce régime font partie du chapitre 4 ‘Traitement fiscal préférentiel’ de la loi relative à l’impôt sur les bénéfices, lequel prévoit des incitations fiscales spécifiques pour des industries et des projets importants soutenus ou encouragés par l’État. Comme expliqué précédemment, dans ces conditions, les avantages découlant de ce régime sont spécifiques au sens de l’article 4, paragraphe 2, [sous] a), du règlement de base. L’enquête n’a pas permis de trouver des critères objectifs visant à limiter l’éligibilité ni d’éléments de preuve définitifs permettant de conclure que le droit de bénéficier de la subvention est automatique. Pour ce qui est de l’invocation des dispositions de l’article 2, paragraphe 2, de l’accord SMC, il est observé que le régime en cause ne concerne pas la fixation de taux d’imposition d’application générale, mais l’existence d’une exonération fiscale applicable à certains types de revenus émanant de certains types d’entreprises ».

136    Il y a lieu de rappeler qu’il incombait aux requérantes de fournir des éléments de preuve a contrario. Toutefois, il ressort de leurs observations sur le document d’information finale que les requérantes n’ont pas été en mesure de fournir des éléments de preuve de nature à priver de plausibilité les appréciations des faits retenues dans le règlement attaqué.

137    Les requérantes ont fait valoir, au point 2.3 de leurs observations sur le document d’information finale, les éléments suivants :

« Il n’existe […] aucune ‘preuve concrète et indéniable’ d’un lien entre le régime d’imposition en cause et l’article 25 selon lequel la non-imposition des dividendes distribués par des entreprises résidentes serait exclusivement accordée aux programmes encouragés. Bien au contraire, il ressort du libellé des dispositions précitées de la loi relative à l’impôt sur les bénéfices que le régime en question est appliqué de manière générale et sans distinction dans toute la Chine sur la base de critères objectifs, à savoir l’origine des dividendes. La Commission se trompe par conséquent en qualifiant ce régime de spécifique. »

138    Au regard de tout ce qui précède, il apparaît que les requérantes restent à défaut d’apporter des éléments suffisants pour priver de plausibilité les appréciations des faits retenues dans le règlement attaqué concernant le lien entre les articles 25 et 26 de la LRIB. Dès lors, les institutions de l’Union n’ayant commis aucune erreur d’appréciation dans le cadre de l’application de l’article 4 du règlement de base, il y a lieu de rejeter ce grief.

139    Il ressort de tout ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement de base

140    Les requérantes soutiennent que, au regard de l’interprétation qu’elles ont retenue de l’article 7, paragraphe 3, du règlement de base, les institutions de l’Union ont, en substance, commis une erreur manifeste d’appréciation en retenant que la durée d’amortissement normale dans l’industrie concernée était de 15 ans, dès lors qu’elles n’ont pas utilisé la durée d’amortissement figurant dans les livres comptables des requérantes et qu’elles n’avaient pas de raison de chercher d’autres sources pour établir la durée d’amortissement en se référant aux durées d’amortissement en vigueur dans l’industrie de l’Union.

141    À cet égard, les requérantes font remarquer que la Commission a pour pratique constante de calculer la durée d’amortissement dans l’industrie concernée sur la base de la durée d’amortissement utilisée par les exportateurs concernés, mais pas en se référant à la pratique d’autres personnes intéressées.

142    Ainsi, les requérantes font valoir que la durée d’amortissement normale dans l’industrie concernée aurait dû être fixée à [confidentiel] ans, selon une moyenne arithmétique, et de [confidentiel] ans, selon une moyenne pondérée. Les requérantes contestent qu’une moyenne soit établie entre la durée d’amortissement en Chine et la durée d’amortissement en vigueur chez les producteurs de l’Union ou dans l’industrie de l’Union.

143    Par ailleurs, les requérantes estiment que, dans son mémoire en défense, le Conseil a donné une explication différente de celle de la Commission lors de l’enquête et que, en conséquence, il était difficile de déterminer la référence prise en compte pour calculer la durée d’amortissement.

144    Le Conseil soutient que, pour calculer la durée d’amortissement applicable à l’industrie du papier, la Commission a recouru à la moyenne arithmétique des durées d’amortissement signalées par les producteurs ayant coopéré et les producteurs de l’Union, donnant comme résultat une durée moyenne de 15 ans (voir considérant 344 du règlement attaqué).

145    Le Conseil fait valoir que les requérantes se contentent de reproduire les arguments avancés lors de l’enquête, qu’elles n’ont pas signalé une durée d’amortissement de [confidentiel] ans, mais une durée allant de [confidentiel] à [confidentiel] ans, et qu’elles ne démontrent pas que les institutions de l’Union ont suivi une pratique constante au cours de périodes antérieures, laquelle ne crée en outre pas d’obligations juridiques d’évaluer tous les cas futurs de la même façon.

146    Il y a lieu de relever que les requérantes contestent la base du calcul de la durée d’amortissement, d’une part, et le résultat du calcul, d’autre part.

147    Premièrement, en ce qui concerne la base du calcul de la durée d’amortissement, il convient de rappeler que l’article 7, paragraphe 3, du règlement de base prévoit :

« Lorsque la subvention peut être mise en rapport avec l’acquisition, présente ou future, d’actifs immobilisés, le montant de la subvention passible de mesures compensatoires est calculé en étalant cette dernière sur une période correspondant à la durée d’amortissement normale de ces biens dans l’industrie concernée. »

148    Il ressort de cette disposition que la durée d’amortissement des biens est établie dans l’industrie concernée, à savoir l’industrie du papier fin couché, laquelle ne saurait être représentée uniquement par les requérantes.

149    Ainsi qu’il ressort du considérant 344 du règlement attaqué :

« La durée d’amortissement déclarée par APP est établie à des fins comptables et financières. Des durées différentes ont été communiquées par d’autres producteurs-exportateurs ayant coopéré et par l’industrie de l’Union. Aux fins du calcul en question, conformément à ses pratiques habituelles et à l’article 7, paragraphe 3, du règlement de base, la Commission a donc fixé à 15 ans la durée de vie utile des équipements, ce qui correspond à une durée d’amortissement ‘normale’ dans l’industrie concernée. »

150    À cet égard, la circonstance que les institutions ont pris en compte l’industrie de l’Union ainsi que les producteurs-exportateurs ayant coopéré ne saurait être qualifiée d’erreur manifeste d’appréciation des institutions de l’Union.

151    Il y a lieu de considérer que, si les institutions de l’Union devaient calculer la durée d’amortissement normale sur la seule base des informations comptables ou financières des requérantes, il en résulterait que cette durée serait élevée par rapport à la réalité, ce qui aurait pour conséquence une diminution du montant de la subvention.

152    S’agissant de la pratique décisionnelle de la Commission, invoquée par les requérantes à l’appui de leur argumentation, il convient de relever que celle-ci ne sert pas de cadre juridique pour la détermination de la durée d’amortissement normale, la Commission disposant, dans le domaine des mesures de défense commerciale, d’un large pouvoir d’appréciation dans l’exercice duquel elle n’est pas liée par les appréciations qu’elle a portées antérieurement.

153    Toutefois, il y a lieu de souligner que la Commission est tenue de respecter les principes généraux de droit, parmi lesquels figure le principe d’égalité de traitement qui implique qu’elle ne peut traiter des situations comparables de manière différente ou des situations différentes de manière identique, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 28 juin 1990, Hoche, C‑174/89, Rec. p. I‑2681, point 25, et la jurisprudence citée).

154    Il résulte de l’examen des exemples fournis par les requérantes que la Commission a pu calculer la durée d’amortissement normale de différentes manières. Dans l’affaire ayant donné lieu au règlement (CE) n° 1599/1999 du Conseil, du 12 juillet 1999, instituant un droit compensateur définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les fils en aciers inoxydables d’un diamètre égal ou supérieur à un millimètre originaires de l’lnde et clôturant la procédure concernant les importations de fils en aciers inoxydables d’un diamètre égal ou supérieur à un millimètre originaires de la République de Corée (JO L 189, p. 1), la Commission a calculé la durée d’amortissement normale sur la base de tous les producteurs-exportateurs indiens ayant coopéré (considérant 25). Dans l’affaire ayant donné lieu à la décision n° 842/2002/CECA de la Commission, du 21 mai 2002, portant modification de la décision n° 284/2000/CECA instituant un droit compensateur définitif sur les importations de certains produits laminés plats, en fer ou en aciers non alliés, d’une largeur de 600 mm ou plus, non plaqués ni revêtus, enroulés, simplement laminés à chaud, originaires, entre autres, de l’Inde et portant acceptation d’un engagement (JO L 134, p. 18), la Commission a calculé la durée d’amortissement normale sur la base de l’industrie du produit concerné (considérant 23). Enfin, dans l’affaire ayant donné lieu au règlement (CE) n° 713/2005 du Conseil, du 10 mai 2005, instituant un droit compensateur définitif sur les importations de certains antibiotiques à large spectre originaires de l’Inde (JO L 121, p. 1), la durée d’amortissement normale a été calculée sur la base du secteur des antibiotiques (considérant 105).

155    Dans la décision 90/266/CEE de la Commission, du 13 juin 1990, acceptant un engagement donné par le gouvernement thaïlandais en liaison avec la procédure antisubvention concernant les importations de roulements à billes dont le plus grand diamètre extérieur n’excède pas 30 millimètres, originaires de Thaïlande (JO L 152, p. 59), invoquée par le Conseil à titre d’exemple, la Commission a rejeté la durée d’amortissement indiquée par les exportateurs thaïlandais et a préféré se fonder sur la durée d’amortissement signalée par les producteurs de l’Union (considérant 43).

156    Il ressort de ce qui précède que, en réalité, la pratique de la Commission consiste à calculer la durée d’amortissement normale des biens selon plusieurs références et non uniquement sur la base d’éléments produits par les requérantes. Dans ces circonstances, les institutions de l’Union n’ont pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en prenant en compte l’industrie de l’Union.

157    Deuxièmement, en ce qui concerne le résultat du calcul de la durée d’amortissement des biens en cause, il ressort du considérant 344 du règlement attaqué que la durée d’amortissement normale a été fixée à 15 ans.

158    Or, force est de constater que les requérantes ne fournissent aucune explication à l’appui de leur argument selon lequel la Commission aurait commis une erreur manifeste d’appréciation dans le calcul de la durée d’amortissement normale des biens en cause.

159    En effet, les requérantes se contentent d’alléguer que les institutions de l’Union auraient commis une erreur manifeste d’appréciation dès lors qu’elles auraient fixé la durée d’amortissement normale à 15 ans.

160    En tout état de cause, il y a lieu de considérer tout d’abord que cet argument repose sur une prémisse erronée dès lors que la Commission a pris en compte les autres producteurs-exportateurs ayant coopéré ainsi que l’industrie de l’Union dans le calcul de la durée d’amortissement des biens en cause, à savoir des machines et des équipements.

161    Ensuite, il convient de rappeler que la Commission dispose d’une marge d’appréciation quant à la détermination du mode de calcul afin de fixer la durée d’amortissement normale à 15 ans, qui correspond en l’espèce à la moyenne arithmétique.

162    Il y a lieu de préciser que la moyenne arithmétique est calculée sur la base du nombre d’unités multiplié par la durée d’amortissement, le tout divisé par le nombre total d’unités.

163    Ainsi que le relève le Conseil, pour leurs machines et leurs équipements, les requérantes ont fait état de durées d’amortissement respectivement de [confidentiel] et de [confidentiel] ans pour GHS et de [confidentiel] ans pour GE.

164    En comparaison, un autre producteur-exportateur ayant coopéré à l’enquête a fait état d’une durée d’amortissement de 10 et de 20 ans.

165    Le Conseil relève également à juste titre que l’industrie de l’Union a fait état de durées d’amortissement de 10 à 20 ans en ce qui concerne les machines.

166    Ainsi, il résulte de ce qui précède que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en fixant la durée d’amortissement normale à 15 ans, soit une durée supérieure à la moyenne arithmétique.

167    Enfin, l’argument des requérantes selon lequel la durée moyenne d’amortissement normale devrait être fixée à [confidentiel] ans selon une moyenne arithmétique, et de [confidentiel] ans, selon une moyenne pondérée est erroné.

168    En effet, la durée d’amortissement ne peut atteindre [confidentiel] ou [confidentiel] ans dès lors que, d’une part, les institutions de l’Union ont pris en compte l’industrie de l’Union qui, sur la base des informations transmises durant l’enquête, a fait état d’une durée d’amortissement normale de 10 à 20 ans, et d’autre part, la somme des durées d’amortissement des machines et des équipements produites par les requérantes est inférieure à la durée qu’elles tentent de faire valoir, que celle-ci soit calculée sur la base d’une moyenne arithmétique ou d’une moyenne pondérée.

169    En conséquence, les institutions n’ont pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en considérant que la durée d’amortissement normale devait être fixée à 15 ans.

170    Partant, le quatrième moyen doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’article 6, sous b), du règlement de base

171    Les requérantes soutiennent que les institutions de l’Union ont violé l’article 6, sous b), du règlement de base et ont commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que les requérantes bénéficiaient de prêts préférentiels, dès lors qu’elles auraient dû comparer les taux d’intérêt pratiqués par les banques détenues par l’État avec ceux que les requérantes auraient obtenus sur le marché. À ce titre, les requérantes estiment que les institutions de l’Union n’ont pas examiné si elles bénéficiaient d’une quelconque garantie ou d’un soutien de l’État à des conditions plus favorables que celles du marché.

172    Les requérantes font valoir que les institutions de l’Union auraient arbitrairement retenu à leur égard la note BB, en recourant à l’indice de l’agence de notation financière Bloomberg, plutôt que la note A1 qui leur était attribuée par l’agence Moody’s. À cet égard, les requérantes estiment que le fait qu’elles bénéficient d’une excellente solvabilité leur permet d’obtenir des financements à des taux intéressants auprès des banques chinoises.

173    Le Conseil soutient que la plupart des grandes banques chinoises sont détenues par l’État et ne peuvent déterminer librement les taux d’intérêt qu’elles pratiquent. Pour ces raisons, elles n’effectuent pas d’analyses du risque systémique et les taux d’intérêt, que les exportateurs auraient pu obtenir sur le marché chinois, ne sauraient constituer de taux de référence valables pour calculer le montant des subventions octroyées aux producteurs-exportateurs au moyen de ces prêts préférentiels.

174    Le Conseil fait remarquer que les institutions de l’Union ont jugé raisonnable de construire un taux de référence approprié en appliquant les taux chinois ajustés, mais qu’elles n’ont pas pu recourir à cette méthode en raison de l’absence de communication d’informations relatives aux politiques de prêt des banques chinoises et aux modalités d’attribution de prêts aux producteurs-exportateurs.

175    Le Conseil fait valoir que les institutions de l’Union ont appliqué l’indice de l’agence Bloomberg en tenant compte du taux d’intérêt qui aurait pu être accordé aux requérantes en l’absence de traitement préférentiel, alors que l’agence Moody’s a établi sa notation en ayant pris en compte le soutien des politiques des pouvoirs publics.

176    À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que l’article 6, sous b), du règlement de base dispose :

« Le calcul de l’avantage conféré au bénéficiaire est effectué en appliquant les règles suivantes :

[…]

b)      un prêt des pouvoirs publics n’est pas considéré comme conférant un avantage, à moins qu’il n’existe une différence entre le montant que l’entreprise bénéficiaire paie sur le prêt des pouvoirs publics et le montant qu’elle paierait sur un prêt commercial comparable qu’elle pourrait effectivement obtenir sur le marché. Dans ce cas, l’avantage correspond à la différence entre ces deux montants. »

177    L’article 28, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de base dispose :

« Lorsqu’une partie intéressée refuse l’accès aux informations nécessaires, ne les fournit pas dans un délai prévu par le présent règlement ou fait obstacle de façon significative à l’enquête, des conclusions préliminaires ou finales, positives ou négatives, peuvent être établies sur la base des faits disponibles. »

178    À cet égard, il convient de constater que le gouvernement chinois a fourni des renseignements limités sur l’actionnariat et la propriété des banques en Chine, alors que le marché financier chinois est caractérisé par l’intervention des pouvoirs publics en ce que la plupart des grandes banques sont détenues par l’État (voir considérant 84 du règlement attaqué).

179    En effet, le gouvernement chinois s’est contenté de renvoyer aux rapports annuels des banques chinoises, lesquels ne sont pas suffisamment détaillés pour l’enquête de la Commission.

180    Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que, à la suite de la demande de la Commission, le gouvernement chinois n’a fourni aucune information sur la structure du contrôle exercé par les pouvoirs publics dans les banques chinoises (banques stratégiques ou autres banques) et la défense des stratégies ou des intérêts des pouvoirs publics en ce qui concerne l’industrie papetière (voir considérant 85, premier et troisième alinéas, du règlement attaqué).

181    Il convient également de constater que, à la suite de la demande de la Commission, le gouvernement chinois n’a fourni aucune précision ni justification sur les prêts octroyés par les banques commerciales, qu’il s’agisse de prêts préférentiels ou d’autres prêts spécifiques (voir considérant 87, second alinéa, du règlement attaqué).

182    Il y a lieu d’indiquer que le gouvernement chinois n’a communiqué aucune donnée sur le système bancaire chinois (voir considérant 88 du règlement attaqué).

183    Par ailleurs, il y a lieu de relever que le gouvernement chinois ainsi que les producteurs-exportateurs ayant coopéré n’ont pas fourni de données relatives aux politiques de prêt des banques chinoises ni sur les modalités d’attribution des prêts aux producteurs-exportateurs (voir considérant 99 du règlement attaqué).

184    Il y a lieu de constater que les requérantes ne contestent pas ce qui précède.

185    Les requérantes ne contestent pas davantage le fait que les banques chinoises ne peuvent fixer librement les taux d’intérêt et n’effectuent pas d’analyses du risque systémique de leur marché financier.

186    En effet, elles se contentent de faire valoir que les institutions auraient commis une erreur manifeste d’appréciation dès lors qu’elles n’ont pas comparé les taux pratiqués par les banques détenues par l’État avec ceux que les requérantes auraient obtenus sur le marché.

187    Or, il résulte de ce qui précède que, lors de l’enquête, la Commission a fondé son appréciation sur la base des données disponibles, à savoir les rapports annuels des banques chinoises, une étude de 2006 sur le secteur bancaire en Chine effectuée par la Deutsche Bank et les quelques renseignements transmis par le gouvernement chinois, les banques chinoises ou les producteurs-exportateurs ayant coopéré.

188    Ainsi, il y a lieu de constater que les institutions de l’Union n’ont pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en ce qui concerne l’existence d’un avantage sur les prêts accordés par les banques chinoises, dès lors que lesdites banques sont contrôlées par les pouvoirs publics et exercent des prérogatives de puissance publique (voir considérant 85 du règlement attaqué) et que le gouvernement chinois encadre le flottement des taux d’intérêt au moyen de règles spécifiques (voir considérant 87 du règlement attaqué).

189    Il ressort du considérant 89 du règlement attaqué :

« [L]a Commission conclut que le marché financier en Chine est faussé par l’intervention des pouvoirs publics et qu’il est fort probable que les taux d’intérêt pratiqués par les banques non détenues par l’État et par les autres institutions financières soient alignés sur les taux fixés par les pouvoirs publics. Par conséquent, les taux d’intérêt pratiqués par les banques non détenues par l’État et par les autres institutions financières ne peuvent être considérés comme des taux commerciaux de référence appropriés, lorsqu’il s’agit de déterminer si les prêts des pouvoirs publics confèrent un avantage. »

190    Par ailleurs, force est de constater que les requérantes ne produisent aucun élément de preuve ni argument et se contentent de simples allégations sur le fait que les prêts accordés par les banques chinoises ne constituent pas un avantage.

191    Il convient de considérer que, sur la base des données disponibles, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en ce qu’elle s’est référencée à la note BB de l’agence Bloomberg, qui correspond aux obligations à caractère spéculatif.

192    En effet, il ressort du considérant 324 du règlement attaqué que « les informations contenues dans [les rapports de notation de crédit présentés par le groupe APP] confirment en fait les conclusions de la Commission selon lesquelles la situation financière actuelle des exportateurs est le résultat d’un marché faussé, ce qui explique pourquoi il n’était pas possible d’accepter telle quelle la note de crédit [A1 de l’agence Moody’s] des exportateurs chinois ».

193    Force est de constater que, à l’appui de leur moyen, les requérantes ne tentent pas de démontrer que, en l’absence d’un marché faussé, elles conserveraient leur situation financière actuelle.

194    Partant, il y a lieu de rejeter le cinquième moyen.

 Sur le sixième moyen, tiré de la violation de l’article 14, paragraphe 2, du règlement de base

195    Dans le cadre de leur sixième moyen, les requérantes soutiennent, en substance, que l’institution de mesures compensatoires n’était pas nécessaire dès lors que les subventions avaient déjà été compensées par le rejet de leur demande tendant à bénéficier du statut de société opérant dans les conditions d’une économie de marché dans le cadre du règlement instituant un droit antidumping définitif. En conséquence, l’enquête aurait dû être clôturée en vertu de l’article 14, paragraphe 2, du règlement de base.

196    À cet égard, les requérantes font valoir, d’une part, que, si aucun droit compensateur n’avait été institué à leur égard, le niveau du droit global serait resté le même, plafonné au niveau de la marge de préjudice, et, d’autre part, que, selon l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base, relatif à la règle dite du droit moindre, le montant du droit de 20 % institué au titre du règlement établissant un droit antidumping définitif devrait rester le même, que les droits compensateurs soient instaurés ou non. Ainsi, la Commission aurait été tenue de présenter au Conseil une proposition de clôture de l’enquête antisubvention.

197    Le Conseil soutient que l’article 14, paragraphe 2, du règlement de base ne contraint pas les institutions à choisir entre les mesures antidumping et antisubvention et ne prescrit aucune règle quant aux modalités selon lesquelles ces deux types de mesures peuvent être combinés de façon appropriée, dès lors que ces mesures n’excèdent pas le montant total du dumping et des subventions établies ou la marge de préjudice en vertu de l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base.

198    À cet égard, le Conseil fait valoir que les requérantes reconnaissent qu’il n’y a pas de risque que les enquêtes parallèles antidumping et antisubvention aient une incidence injuste sur elles.

199    Premièrement, quant à la prétendue irrecevabilité du présent moyen, soulevée par le Conseil, il y a lieu de relever que les requérantes ont précisé, aussi bien dans l’objet du recours que dans leurs conclusions en annulation, qu’elles se limitaient à contester la légalité du droit antisubvention définitif imposé en ce qu’il les concernait.

200    Dans ces circonstances, il y a lieu d’interpréter le présent recours en annulation en ce sens qu’il ne vise que l’annulation partielle du règlement attaqué, dans la mesure où il impose un droit antisubvention définitif aux requérantes.

201    À la lumière de tout ce qui précède, il y a lieu d’examiner le sixième moyen.

202    Il ressort du considérant 6 du règlement attaqué :

« Les analyses du préjudice réalisées dans la présente enquête antisubvention et dans l’enquête antidumping parallèle sont identiques, puisque la définition de l’industrie de l’Union, les producteurs représentatifs de l’Union et la période d’enquête sont les mêmes dans les deux enquêtes. De ce fait, les observations sur les aspects liés au préjudice qui ont été formulées dans ces deux procédures ont été prises en considération dans les deux. »

203    Il convient de préciser, à cet égard, que les deux enquêtes concernent le même produit, à savoir le papier fin couché originaire de Chine.

204    Dans le cadre du règlement attaqué, le Conseil a institué des mesures antisubvention (considérant 490 du règlement attaqué), pour lesquelles il a été tenu compte des marges de subvention établies et du montant du droit nécessaire pour éliminer le préjudice subi (considérant 491 du règlement attaqué), afin de couvrir les coûts de production de l’industrie de l’Union et de réaliser un bénéfice avant impôt que l’industrie de l’Union pourrait raisonnablement escompter dans des conditions normales de concurrence (considérant 492 du règlement attaqué).

205    À ce titre, le Conseil a considéré que le bénéfice indicatif des plaignants devait refléter l’investissement initial élevé nécessaire ainsi que les risques encourus dans cette industrie à forte intensité capitalistique et qu’une marge bénéficiaire correspondant à 8 % du chiffre d’affaires pouvait être considérée comme le minimum que l’industrie de l’Union aurait pu escompter en l’absence des subventions préjudiciables (considérant 494 du règlement attaqué) et que, sur cette base, un prix non préjudiciable du produit similaire a été calculé pour les producteurs de l’Union. Celui-ci a été obtenu en ajoutant la marge bénéficiaire de 8 % au coût de production (considérant 495 du règlement attaqué).

206    Ainsi, le Conseil a considéré qu’un droit compensateur définitif devait être institué sur les importations du produit concerné au niveau de la marge la plus faible (subvention ou préjudice), selon la règle du droit moindre. En l’espèce, le taux de ce droit compensateur devait donc être fixé au niveau des marges de subvention constatées, à savoir 12 %, conformément à l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base (considérant 498 du règlement attaqué).

207    Le Conseil a également estimé que, s’agissant des autres régimes de subventions, compte tenu de la règle du droit moindre appliquée dans le cas présent et du montant de subvention constaté au cours de l’enquête parallèle, il n’a pas été jugé nécessaire de poursuivre l’examen visant à déterminer si et dans quelle mesure les mêmes subventions étaient neutralisées deux fois lorsque des droits antidumping et des droits compensateurs étaient institués simultanément sur le même produit importé (considérant 500 du règlement attaqué).

208    Dans le cadre du règlement instituant un droit antidumping définitif, le Conseil a considéré que le coût de l’investissement avait été pris particulièrement en considération et il a été estimé que le bénéfice indicatif établi sur cette dernière base rendait compte de l’investissement initial élevé nécessaire et des risques encourus dans cette industrie à forte intensité capitalistique en l’absence d’importations faisant l’objet d’un dumping ou de subventions. En conséquence, un bénéfice indicatif de 8 % a été considéré comme étant le niveau que l’industrie pourrait atteindre en l’absence d’importations faisant l’objet d’un dumping (considérant 158 du règlement instituant un droit antidumping définitif).

209    Le Conseil a conclu qu’un droit définitif devrait être institué sur les importations à un niveau correspondant à la marge la plus faible constatée selon la règle du droit moindre, le taux de droit devant être fixé en l’espèce au niveau du préjudice constaté (considérant 160 du règlement instituant un droit antidumping définitif).

210    Le Conseil a rappelé que, conformément à l’article 9, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1225/2009 du Conseil, du 30 novembre 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part des pays non membres de la Communauté européenne (JO L 343, p. 51, rectificatif JO 2010, L 7, p. 22, ci-après le « règlement antidumping de base »), il a été jugé nécessaire de déterminer si et dans quelle mesure les montants de subventions et les marges de dumping découlaient de la même situation (considérant 161 du règlement instituant un droit antidumping définitif).

211    Le Conseil a considéré que le niveau d’élimination du préjudice était inférieur aux marges de dumping définitives, mais supérieur aux marges de subvention définitives. Le Conseil a donc convenu d’instituer un droit compensateur définitif correspondant au niveau des marges de subvention définitives, puis un droit antidumping définitif jusqu’à concurrence du niveau approprié d’élimination du préjudice (considérant 164 du règlement instituant un droit antidumping définitif).

212    Interrogé lors de l’audience sur la raison pour laquelle les institutions de l’Union avaient choisi de se concentrer d’abord sur la subvention et ensuite sur le dumping, le Conseil a précisé que les subventions pouvaient être un facteur de dumping, le dumping en revanche n’entraînait pas la subvention.

213    Le Conseil a estimé que, conformément à l’article 14, paragraphe 1, du règlement antidumping de base, le droit antidumping ne serait pas institué dans la mesure nécessaire pour se conformer à la règle du droit moindre (considérant 165 du règlement instituant un droit antidumping définitif).

214    L’article 1, paragraphe 2, du règlement instituant un droit antidumping définitif prévoit que le taux de ce droit atteint 20 %.

215    L’article 1, paragraphe 3, du règlement instituant un droit antidumping définitif prévoit que le droit antidumping ne sera pas perçu à hauteur de 12 % pour les requérantes, dans la mesure où le montant correspondant est perçu conformément au règlement attaqué.

216    L’article 1, paragraphe 4, du règlement instituant un droit antidumping définitif prévoit que le taux du droit antidumping à instituer s’élève à 8 %.

217    En premier lieu, il ressort de tout ce qui précède que l’article 14, paragraphe 2, du règlement de base ne contraint pas les institutions à choisir entre les mesures antidumping et les mesures antisubvention et il ne prescrit aucune règle quant aux modalités selon lesquelles ces deux types de mesures peuvent être combinés de façon appropriée, comme l’expose à juste titre le Conseil, soutenu par la Commission. Toutefois, les mesures ne doivent pas excéder le montant total du dumping et des subventions établis ou la marge de préjudice, en vertu de l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base ou de l’article 9, paragraphe 4, du règlement antidumping de base. Par ailleurs, il n’incombe pas à la Commission de proposer au Conseil une clôture de l’enquête au motif que l’institution de droits compensateurs était indifférente dès lors que la marge de préjudice serait restée inchangée.

218    En deuxième lieu, puisque la marge totale de subvention établie pour les requérantes était de 12 %, pour une marge totale de dumping de 43,5 %, et que les droits compensateurs (12 %) et les droits antidumping (8 %) définitifs sont plafonnés au niveau de la marge de préjudice commune, soit 20 %, il y a lieu de constater que les mesures instituées n’excèdent pas le niveau des subventions, du dumping ou du préjudice établi à la suite des enquêtes.

219    En troisième lieu, la différence entre les marges de dumping et de subvention (31,5 %) étant supérieure au montant des droits antidumping (8 %), la question d’un recoupement entre les droits compensateurs et les droits antidumping ne se pose pas davantage, contrairement à ce qu’allèguent les requérantes.

220    Par conséquent, il y a lieu de rejeter le sixième moyen comme non fondé.

 Sur le septième moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, du règlement de base

221    Le septième moyen comporte deux branches.

222    La première branche est prise d’une violation de l’article 3, paragraphe 2, du règlement antidumping de base et de l’article 8, paragraphe 1, du règlement de base en ce que la Commission a exclu de l’évaluation du préjudice un des cinq producteurs de l’Union ayant coopéré à l’enquête, et ce sans fournir de justification.

223    La seconde branche est prise d’une violation de l’article 3, paragraphe 2, du règlement antidumping de base et de l’article 8, paragraphe 1, du règlement de base en ce que la Commission a invoqué les données transmises par quatre producteurs représentatifs, et non les données concernant l’industrie de l’Union dans son ensemble, lorsqu’elle a évalué ce qu’il convient d’appeler les indicateurs microéconomiques.

224    À titre liminaire, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 8, paragraphe 1, du règlement de base, « [l]a détermination de l’existence d’un préjudice se fonde sur des éléments de preuve positifs et comporte un examen objectif[, d’une part,] du volume des importations faisant l’objet de subventions et de l’effet de ces importations sur les prix des produits similaires sur le marché de la Communauté et[, d’autre part,] de l’incidence de ces importations sur l’industrie communautaire ».

225    Il doit être rappelé que, selon une jurisprudence constante, dans le domaine de la politique commerciale commune, et tout particulièrement en matière de mesures de défense commerciale, les institutions de l’Union disposent d’un large pouvoir d’appréciation en raison de la complexité des situations économiques, politiques et juridiques qu’elles doivent examiner [voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 4 octobre 1983, Fediol/Commission, 191/82, Rec. p. 2913, point 26 ; du 27 septembre 2007, Ikea Wholesale, C‑351/04, Rec. p. I‑7723, point 40 ; du 3 septembre 2009, Moser Baer India/Conseil, C‑535/06 P, Rec. p. I‑7051, point 85, et du Tribunal du 18 septembre 2012, Since Hardware (Guangzhou)/Conseil, T‑156/11, point 134].

226    Selon une jurisprudence constante, la détermination du préjudice suppose l’appréciation de questions économiques complexes. Dans cet exercice, les institutions disposent d’un large pouvoir d’appréciation [arrêt de la Cour du 7 mai 1991, Nakajima/Conseil, C‑69/89, Rec. p. I‑2069, point 86 ; arrêts du Tribunal du 28 septembre 1995, Ferchimex/Conseil, T‑164/94, Rec. p. II‑2681, point 131, et du 14 mars 2007, Aluminium Silicon Mill Products/Conseil, T‑107/04, Rec. p. II‑669, point 43, et Since Hardware (Guangzhou)/Conseil, point 225 supra, point 135].

227    Le juge de l’Union doit donc limiter son contrôle à la vérification du respect des règles de procédure, de l’exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits et de l’absence de détournement de pouvoir [arrêts du Tribunal Ferchimex/Conseil, point 226 supra, point 67 ; du 28 octobre 1999, EFMA/Conseil, T‑210/95, Rec. p. II‑3291, point 57 ; Aluminium Silicon Mill Products/Conseil, point 226 supra, point 43, et Since Hardware (Guangzhou)/Conseil, point 225 supra, point 136].

228    Par ailleurs, il appartient aux requérantes de produire les éléments de preuve permettant au Tribunal de constater que le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation dans l’évaluation du préjudice [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 28 octobre 2004, Shanghai Teraoka Electronic/Conseil, T‑35/01, Rec. p. II‑3663, point 119, et du 4 octobre 2006, Moser Baer India/Conseil, T‑300/03, Rec. p. II‑3911, point 140, et la jurisprudence citée ; arrêt Since Hardware (Guangzhou)/Conseil, point 225 supra, point 137].

 Sur la première branche, portant sur la prétendue absence de justification de l’exclusion d’un producteur finlandais aux fins de l’évaluation du préjudice

229    En premier lieu, les requérantes soutiennent que, bien qu’elle n’ait pas procédé à un échantillonnage, la Commission a restreint l’analyse de plusieurs indicateurs de préjudice catalogués comme microéconomiques, en ce que seuls les quatre plaignants ont été contrôlés et considérés comme étant représentatifs de l’industrie de l’Union. À ce titre, la Commission n’aurait pas justifié l’exclusion d’un producteur finlandais.

230    Les requérantes font valoir que, en ne tenant pas compte dans l’évaluation du préjudice d’un des producteurs de l’Union présentant des tendances positives et en ne considérant comme représentatifs que les quatre producteurs plaignants, la Commission n’a pas procédé à un « examen objectif » des faits qui lui ont été soumis au sens décrit par l’organe d’appel de l’OMC.

231    Le Conseil soutient que la Commission n’a pas négligé la coopération du producteur finlandais en cause dès lors que, en ce qui concerne l’analyse des indicateurs de préjudice microéconomiques, celui-ci n’a jamais communiqué les données nécessaires, et que, en ce qui concerne l’analyse des indicateurs de préjudice macroéconomiques, les données concernant ledit producteur étaient couvertes par les informations communiquées par Cepifine.

232    Le Conseil fait valoir que la production du producteur finlandais en cause ne représentait tout au plus que 1,4 % de la production de l’industrie de l’Union et que les chiffres communiqués, même s’ils indiquaient une certaine tendance positive, ne pouvaient pas contredire l’analyse du préjudice à l’égard de l’ensemble des producteurs de l’Union.

233    Le Conseil soulève le fait qu’un échantillonnage ne peut être réalisé que si les entreprises ayant choisi de coopérer sont si nombreuses qu’il n’est pas possible de mener une enquête auprès de chacune d’entre elles. En tout état de cause, les entreprises ayant coopéré étaient représentatives de l’industrie de l’Union.

234    À la lumière de ce qui précède, il convient de déterminer si, comme les requérantes le soutiennent, la Commission n’a effectivement pas procédé à un examen de l’évaluation du préjudice en se fondant sur des éléments de preuve objectifs, en ce qu’elle a exclu un producteur finlandais de l’industrie de l’Union présentant des données positives.

235    À cet égard, les requérantes produisent une lettre, envoyée le 18 mars 2010, dans laquelle la Commission a demandé au producteur finlandais en cause de présenter ses observations et à laquelle ce dernier a répondu par une lettre du 30 avril 2010 dont il ressort qu’il n’a pas subi de préjudice. À ce titre, les requérantes ont fait valoir, lors de l’enquête, que la Commission ne pouvait négliger sans motif raisonnable la coopération de ce producteur.

236    Il convient de relever que, dans le cadre des affaires antisubvention, le Conseil et la Commission dépendent de la coopération volontaire des parties pour leur fournir les informations nécessaires dans les délais impartis (voir, par analogie, arrêt du Tribunal EFMA/Conseil, point 227 supra, point 71).

237    Ainsi que le relèvent les requérantes, il est mentionné au considérant 13 du règlement attaqué que « [d]eux groupes de producteurs-exportateurs chinois, Cepifine, les quatre producteurs plaignants de l’Union et un autre producteur de l’Union, treize importateurs et négociants indépendants, cinq utilisateurs et une association du secteur de l’impression ont répondu aux questionnaires et ont transmis des observations ».

238    Or, il ressort du considérant 53 du règlement attaqué que seuls quatre producteurs de l’Union se sont manifestés dans les délais fixés dans l’avis d’ouverture.

239    Il ressort du considérant 389 du règlement attaqué que, « [a]ux fins de la présente enquête, l’industrie de l’Union a été définie au niveau des producteurs de l’Union représentant la production totale de l’Union, [qu’ils] aient ou non soutenu la plainte ou coopéré à l’enquête ».

240    Il ressort du considérant 372 du règlement attaqué que, « [p]endant la période d’enquête, le produit similaire était fabriqué par quatorze producteurs connus et plusieurs autres très petits producteurs de l’Union » et que, « [d]’après les estimations, les données fournies par Cepifine couvrent 98 % de la production des producteurs de l’Union ».

241    Au regard de ce qui précède, la situation du producteur finlandais en cause a été prise en compte en ce qui concerne les indicateurs macroéconomiques dès lors que les données transmises par Cepifine représentaient 98 % de la production des producteurs-exportateurs de l’Union.

242    Toutefois, en ce qui concerne les indicateurs microéconomiques, lesquels ne peuvent être appréciés que sur transmission des données par les entreprises individuelles, il convient de constater que le producteur finlandais en cause n’a pas répondu dans les délais fixés par l’avis d’ouverture.

243    Ainsi, la circonstance que le producteur finlandais n’a pas répondu ne saurait constituer une omission dans le cadre d’un examen concret fondé sur des éléments de preuve objectifs de l’évaluation du préjudice.

244    Partant, le présent grief doit être rejeté.

245    En second lieu, les requérantes soutiennent que les institutions n’ont pas satisfait aux exigences de motivation au regard de l’article 296 TFUE et de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

246    Le Conseil considère que, en ce qui concerne le défaut de motivation du règlement attaqué, les requérantes n’apportent aucun élément probant.

247    Au regard de l’examen effectué dans le cadre du premier grief de la première branche, il y a lieu de conclure que les dispositions tant de l’article 296 TFUE que de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux n’ont pas davantage été méconnues.

248    Partant, le présent grief doit être rejeté.

249    En conséquence, la première branche du présent moyen devrait être rejetée.

 Sur la seconde branche, portant sur les modalités de la prétendue évaluation des indicateurs de préjudice microéconomiques basée sur quatre producteurs représentatifs de l’Union

250    En premier lieu, les requérantes soutiennent que le Conseil a défini l’industrie de l’Union comme étant constituée des quatorze membres de Cepifine alors que, dans le cadre de son enquête, l’analyse de la Commission a été restreinte à l’appréciation de la situation des quatre producteurs représentatifs pour ce qui concerne certains indicateurs de préjudice.

251    Les requérantes font valoir que certains indicateurs de préjudice, à savoir les indicateurs microéconomiques, concernent un nombre restreint de producteurs, c’est-à-dire les quatre plaignants et le producteur finlandais en cause, lesquels sont les seuls à avoir répondu au questionnaire.

252    Selon les requérantes, cette méthodologie a créé une image faussée du préjudice en ce qu’elle ne correspond ni à la situation d’un sous-groupe de producteurs, ni à celle des quatorze membres de Cepifine. En effet, la Commission ne saurait procéder à une évaluation du préjudice subi par l’industrie de l’Union pour ce qui concerne certains indicateurs, d’une part, et se limiter à une évaluation du préjudice subi par une partie représentative seulement des producteurs pour ce qui concerne d’autres indicateurs, d’autre part.

253    Les requérantes estiment que les critères utilisés par la Commission pour classer les indicateurs de préjudice dans les catégories macroéconomiques et microéconomiques ne sont pas logiques. Par ailleurs, elles font valoir que le règlement attaqué ne fournit aucun motif ni aucune explication à cet égard.

254    Le Conseil soutient que l’industrie de l’Union a été définie comme l’ensemble des producteurs de l’Union représentant la production totale de l’Union, dont font partie les quatorze membres de Cepifine.

255    Le Conseil fait valoir que l’article 8, paragraphe 1, du règlement de base n’interdit pas d’analyser différents indicateurs de préjudice à l’égard de différents sous-ensembles de producteurs de l’Union.

256    Le Conseil considère que l’analyse satisfait aux critères énoncés à l’article 8, paragraphe 1, du règlement de base, tant en ce qui concerne les indicateurs de préjudice microéconomiques qu’en ce qui concerne les indicateurs de préjudice macroéconomiques.

257    Le Conseil estime que la distinction établie entre les critères de préjudice macroéconomiques et microéconomiques est logique et repose sur des considérations pratiques, notamment la disponibilité des données.

258    Il doit être relevé que, dans le cadre du présent moyen, les requérantes ne contestent ni la pertinence des facteurs et des indices économiques qui ont été retenus par les institutions lors de l’évaluation du préjudice subi par l’industrie de l’Union, ni l’analyse qui en a été faite par la Commission, telle qu’elle résulte des considérants 389 et 390 du règlement attaqué.

259    Il convient de rappeler que les requérantes contestent la classification des indicateurs et la méthodologie utilisée par la Commission.

260    L’article 8, paragraphe 4, du règlement de base prévoit :

« L’examen de l’incidence des importations faisant l’objet de subventions sur l’industrie communautaire concernée comporte une évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents qui influent sur la situation de cette industrie, y compris le fait pour une industrie de ne pas encore avoir surmonté entièrement les effets de pratiques passées de subventionnement ou de dumping ; l’importance du montant de la subvention passible de mesures compensatoires, la diminution effective et potentielle des ventes, des bénéfices, de la production, de la part de marché, de la productivité, du rendement des investissements ou de l’utilisation des capacités ; les facteurs qui influent sur les prix dans la Communauté, les effets négatifs, effectifs et potentiels sur les flux de liquidités, les stocks, l’emploi, les salaires, la croissance, l’aptitude à mobiliser les capitaux ou les investissements et, dans le cas de l’agriculture, l’utilisation accrue des programmes de soutien des pouvoirs publics. Cette liste n’est pas exhaustive et aucun ni même plusieurs de ces facteurs ne constituent nécessairement une base de jugement déterminante. »

261    En ce qui concerne les facteurs macroéconomiques, il ressort du considérant 389 du règlement attaqué que « la Commission a pour pratique constante d’évaluer les facteurs macroéconomiques permettant de déterminer le préjudice subi au niveau de l’ensemble de l’industrie de l’Union […], l’industrie de l’Union a été définie comme comprenant les producteurs de l’Union qui représentent la production totale […], qu’ils aient ou non coopéré à l’enquête ».

262    À cet égard, il ressort du considérant 385 du règlement attaqué que « [l]es éléments macroéconomiques (production, capacité de production, utilisation des capacités, volume des ventes, parts de marché, croissance et importance du montant des subventions passibles de mesures compensatoires) ont été évalués au niveau de l’ensemble de l’industrie de l’Union, sur la base des informations fournies par Cepifine ».

263    En ce qui concerne les facteurs microéconomiques, il ressort du considérant 390 du règlement attaqué que ces facteurs « sont analysés au niveau des producteurs de l’Union représentatifs, qu’ils soutiennent ou non la plainte ».

264    À cet égard, il ressort du considérant 386 du règlement attaqué que « [l]’analyse des éléments microéconomiques a été réalisée au niveau des producteurs de l’Union (prix unitaires moyens, emploi, salaires, productivité, stocks, rentabilité, flux de liquidités, investissements, rendement des investissements, aptitude à mobiliser les capitaux) sur la base des informations qu’ils ont transmises, dûment vérifiées ».

265    Il convient de rappeler que, dans le cadre des affaires antisubvention, le Conseil et la Commission dépendent de la coopération volontaire des parties pour leur fournir des informations nécessaires dans les délais impartis (voir point 236 ci-dessus).

266    Il résulte de ce qui précède que, conformément à l’article 8, paragraphe 4, du règlement de base, la Commission a effectué une analyse des différents critères au regard de l’industrie de l’Union, en ce qui concerne les indicateurs macroéconomiques, et au regard des entreprises individuelles, en ce qui concerne les indicateurs microéconomiques.

267    En effet, les indicateurs macroéconomiques ont été appréciés sur la base des informations transmises par Cepifine, laquelle couvre 98 % de la production des producteurs de l’Union.

268    Par ailleurs, les indicateurs microéconomiques, reposant sur la disponibilité des informations transmises par les entreprises individuelles, ont été évalués sur la base de la transmission de données effectuée par les quatre producteurs plaignants représentatifs, à l’exclusion du producteur finlandais en cause qui ne s’est pas manifesté dans les délais fixés.

269    Dans le cadre de leur pouvoir d’appréciation, aucune obligation découlant du règlement de base n’impose aux institutions de l’Union une classification des critères macroéconomiques et microéconomiques ou une interdiction de constituer des sous-groupes de producteurs, dès lors que la Commission procède à un examen objectif fondé sur des éléments de preuve eux-mêmes objectifs, tel qu’il a été réalisé en l’espèce.

270    Ainsi, force est de constater que les requérantes ne produisent, à l’appui de leur grief, aucun élément de nature à démontrer que la classification des indicateurs de préjudice et la méthodologie de la Commission n’ont pas permis de procéder à un examen concret fondé sur des éléments de preuve objectifs.

271    Partant, le grief doit être rejeté.

272    En deuxième lieu, les requérantes font valoir que la Commission aurait dû procéder à un échantillonnage.

273    Il ressort du considérant 28 du règlement de base qu’« [i]l est essentiel de procéder par échantillonnage lorsque le nombre de parties ou de transaction concernées est important afin de permettre que les enquêtes puissent être menées à terme dans les délais fixés ».

274    Or, ainsi que le relève le Conseil, la Commission n’était pas tenue dans la présente espèce de recourir à la méthode de l’échantillonnage (voir point 233 ci-dessus).

275    En effet, en vertu de la marge d’appréciation des institutions de l’Union, telle qu’elle est reconnue par la jurisprudence, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation dès lors que seuls quatre producteurs représentatifs ont contribué à l’enquête.

276    Partant, le grief doit être rejeté.

277    En troisième lieu, force est de constater que les requérantes se contentent d’invoquer le fait que le règlement attaquée est entaché d’un défaut de motivation sans pour autant apporter un quelconque élément de nature à caractériser une prétendue violation de l’article 296 TFUE.

278    Ainsi, le grief doit être rejeté.

279    Partant, la seconde branche doit être rejetée.

280    Par conséquent, il y a lieu de rejeter le septième moyen dans son ensemble.

 Sur le huitième moyen, tiré de la violation de l’article 2, sous d), et de l’article 15 du règlement de base

281    En premier lieu, les requérantes font remarquer au Tribunal que « ce n’est que très tard au cours de la procédure [qu’elles] ont eu connaissance de la méthodologie que la Commission avait suivie pour arriver à une marge bénéficiaire cible de 8 % ».

282    À supposer qu’il s’agisse d’un argument, les requérantes ne démontrent pas que cette prétendue tardiveté leur a été préjudiciable pour faire connaître utilement leur point de vue et a porté atteinte à leurs droits de la défense.

283    Partant, et pour autant que les requérantes entendent, en substance, se prévaloir d’une violation des droits de la défense, il y a lieu de rejeter ce grief.

284    En deuxième lieu, les requérantes soutiennent que la Commission a violé l’article 2, sous d), et l’article 15 du règlement de base dès lors qu’elle a retenu un bénéfice indicatif à hauteur de 8 %.

285    Il y a lieu de rappeler que l’article 2, sous d), du règlement de base dispose que « le terme ‘préjudice’ s’entend, sauf indication contraire, d’un préjudice important causé à une industrie communautaire, d’une menace de préjudice important pour une industrie communautaire ou d’un retard important à la création d’une industrie communautaire ».

286    L’article 15, paragraphe 1, du règlement de base dispose « le montant du droit compensateur ne doit pas excéder le montant total de la subvention passible de mesures compensatoires établi et il doit être inférieur à ce montant, si ce droit moindre suffit à éliminer le préjudice causé à l’industrie [de l’Union] ».

287    Il résulte de la lecture desdits articles que la marge bénéficiaire devant être retenue par le Conseil pour calculer le prix indicatif de nature à éliminer le préjudice en cause doit être limitée à la marge bénéficiaire que l’industrie de l’Union pourrait raisonnablement escompter dans des conditions normales de concurrence, en l’absence des importations faisant l’objet de subventions (considérant 494 du règlement attaqué). Il ne serait pas conforme à l’article 2, sous d), et à l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base d’accorder à l’industrie de l’Union une marge bénéficiaire qu’elle n’aurait pas pu attendre en l’absence de subventions (voir, par analogie, arrêt EFMA/Conseil, point 227 supra, point 60).

288    Les requérantes font valoir que le bénéfice indicatif a été calculé sur la base de ce qui a été considéré comme constituant un rendement adéquat du capital (investi) pour l’industrie papetière de l’Union plutôt que sur la marge réellement réalisable en l’absence d’importation faisant l’objet de subventions, celle-ci devant être limitée à la marge bénéficiaire que l’industrie de l’Union pourrait raisonnablement escompter dans des conditions normales de concurrence.

289    La question ne consisterait pas à savoir si une marge bénéficiaire cible de 8 % est suffisante pour couvrir les investissements et les risques encourus, mais à savoir si une telle marge bénéficiaire est réalisable en l’absence des importations faisant l’objet de subventions. Il y a lieu de comprendre cet argument en ce qu’il porte sur une erreur manifeste d’appréciation dans le calcul de la marge bénéficiaire.

290    Le Conseil soutient qu’il existe un lien entre le rendement adéquat du capital d’une industrie en particulier et les bénéfices qui peuvent être réalisés dans des conditions de marché normales et non faussées, en ce que les secteurs industriels à forte intensité de capital, qui nécessitent des investissements initiaux élevés, n’investiront que s’ils peuvent escompter un retour suffisant.

291    Ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, s’agissant de l’évaluation d’une situation économique complexe, le Conseil jouit d’un large pouvoir d’appréciation dans la détermination de la marge bénéficiaire appropriée. Le juge de l’Union doit donc limiter son contrôle à vérifier le respect des règles de procédure, l’exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits et l’absence de détournement de pouvoir (arrêts EFMA/Conseil, point 227, supra, point 57, et Ferchimex/Conseil, point 226 supra, point 67).

292    Au regard de ce qui précède, il convient d’examiner si le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation dans le calcul de la marge bénéficiaire.

293    Il convient de rappeler qu’il appartient aux requérantes de produire des éléments de preuve qui permettent au Tribunal de constater que le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation au sens de la jurisprudence [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal Shanghai Teraoka Electronic/Conseil, point 228 supra, point 119, et Moser Baer India/Conseil, point 228 supra, point 140, et la jurisprudence citée ; arrêt Since Hardware (Guangzhou)/Conseil, point 225 supra, point 137].

294    Il ressort du considérant 494 du règlement attaqué :

« Le bénéfice indicatif mentionné dans la plainte et la demande présentée ultérieurement par le plaignant ont été examinés sur la base des réponses au questionnaire et des visites de vérification auprès des producteurs représentatifs de l’Union. Il a été estimé que le bénéfice indicatif devait refléter l’investissement initial élevé nécessaire et les risques encourus dans cette industrie à forte densité capitalistique en l’absence d’importations faisant l’objet d’un dumping ou de subventions. Le coût des investissements en machines a également été pris en considération. Il a été estimé qu’une marge bénéficiaire correspondant à 8 % du chiffre d’affaires pouvait être considérée comme le minimum que l’industrie de l’Union aurait pu escompter en l’absence de subventions préjudiciables. »

295    Il convient de constater que les requérantes contestent uniquement le fait que, dans le calcul de la marge bénéficiaire, la Commission a intégré des considérations relatives à la couverture des investissements et des risques encourus.

296    Il convient de relever que, lorsqu’elles utilisent la marge d’appréciation que leur confère le règlement de base, les institutions ne sont pas tenues d’expliquer en détail et à l’avance les critères qu’elles envisagent d’appliquer dans chaque situation, même dans le cas où elles posent de nouvelles options de principe (arrêt Thai Bicycle/Conseil, point 71 supra, point 68 ; voir, en ce sens et par analogie, arrêts de la Cour du 5 octobre 1988, Brother Industries/Conseil, 250/85, Rec. p. 5683, points 28 et 29, et Nakajima/Conseil, point 226 supra, point 118).

297    En l’espèce, il y a lieu de relever que la Commission a tenu compte de plusieurs critères tels que les réponses au questionnaire, le coût de l’investissement, les risques encourus, la circonstance que l’industrie est à forte intensité capitalistique et l’exclusion des ventes à l’exportation d’une société faisant partie d’un producteur-exportateur ayant coopéré.

298    Ainsi que le relève le Conseil, les requérantes « ne prétendent […] pas que l’un quelconque de ces facteurs soit entaché d’erreur ou non fiable ».

299    Il convient de constater que les requérantes ne contestent pas l’assertion du Conseil selon laquelle « il existe de toute évidence un lien entre le rendement adéquat du capital d’une industrie en particulier et les bénéfices qui peuvent être réalisés dans des conditions de marché normales et non faussées ».

300    Toutefois, elles font valoir que l’objectif de l’imposition de droits antisubvention n’est pas de rétablir un prix à un niveau normal et non faussé, mais de le rétablir au niveau qui aurait pu être atteint en l’absence des importations faisant l’objet de subventions.

301    Aucun élément ne permet de conclure que la Commission aurait poursuivi l’objectif d’imposer des droits compensateurs afin de rétablir un prix à un niveau normal et non faussé.

302    Les requérantes font valoir que, au point 356 de la plainte antisubvention, Cepifine affirme que les fabricants européens au sein de l’association auraient pu escompter un bénéfice de 5 % en l’absence des importations faisant l’objet de subventions.

303    Il ne ressort toutefois pas davantage de cette plainte que la Commission a imposé des droits compensateurs dans l’objectif de rétablir un prix à un niveau normal et non faussé.

304    Dans le cadre de leur pouvoir d’appréciation, les institutions de l’Union ont considéré que le montant de la marge bénéficiaire, à hauteur de 8 %, a pu être atteint en l’absence des importations faisant l’objet de subventions.

305    Ainsi, il y a lieu de considérer que la Commission a clairement établi que le bénéfice indicatif de 8 % était considéré comme étant le niveau que l’industrie pourrait atteindre en l’absence d’importations faisant l’objet de subventions (voir point 294 ci-dessus).

306    En tout état de cause, force est de constater que les requérantes se contentent de renvoyer aux éléments de preuve figurant dans le dossier administratif de l’affaire et ne fournissent aucun élément de nature à caractériser une quelconque erreur manifeste d’appréciation des institutions de l’Union en ce qu’elles auraient imposé des droits compensateurs dans le seul objectif de rétablir un prix à un niveau normal et non faussé.

307    Partant, le grief doit être rejeté.

308    En troisième lieu, à l’appui de leur argumentation, les requérantes font valoir que, au cours de l’année 2005, soit avant la période d’enquête, la marge bénéficiaire moyenne des plaignants s’élevait à 2 %, alors que la marge pour calculer le bénéficie indicatif s’élevait à 2,88 % en 2009, soit au cours de la période d’enquête.

309    Le Conseil fait valoir que les institutions de l’Union n’ont pas pu s’appuyer sur les bénéfices réalisés par l’industrie de l’Union pendant la période considérée, car le secteur en cause enregistrait des pertes exceptionnelles imputables à des problèmes structurels. Il ressort du dossier que les requérantes n’ont pas contesté ces considérations.

310    Le considérant 416 du règlement attaqué mentionne :

« Les quatre producteurs représentatifs de l’Union ont subi des pertes de 2006 à 2008, et la situation financière ne s’est assainie qu’en 2009, lorsque le prix sur le marché mondial de la pâte à papier, principale matière première, a connu un effondrement exceptionnel sous l’effet du ralentissement de l’activité économique. La baisse du prix de la pâte à papier (20 %), jugée anormalement forte, a donc directement contribué à l’amélioration de la situation financière pendant la période d’enquête. Il y a lieu de noter que, depuis la période d’enquête, le prix de la pâte à papier est revenu au niveau enregistré avant ladite période. »

311    Le considérant 457 du règlement attaqué mentionne :

« L’enquête a toutefois révélé que l’industrie de l’Union avait subi des pertes au cours de la période considérée, notamment en 2008, malgré la restructuration des producteurs, parce que […] l’industrie de l’Union n’était toujours pas parvenue à porter ses prix à des niveaux dépassant ses coûts. Cette situation était essentiellement due à la pression sur les prix exercée par les importations faisant l’objet de subventions, qui ont entrainé une sous-cotation des prix de l’industrie de l’Union. »

312    Il ressort du considérant 444 du règlement attaqué qu’« il a été conclu que la soudaine poussée des importations à bas prix faisant l’objet de subventions en provenance de [Chine] avait eu un impact négatif sur la situation économique de l’industrie de l’Union ».

313    Au regard de ce qui précède, il y a lieu de considérer que le montant de la marge bénéficiaire moyenne des plaignants, au cours de l’année 2005, tel qu’il est invoqué par les requérantes, ne suffit pas à lui seul à établir que le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation dans la détermination de la marge bénéficiaire en l’absence des importations en cause avant la période d’enquête (voir, en ce sens, arrêt EFMA/Conseil, point 227 supra, point 89).

314    Partant, le grief doit être rejeté.

315    Il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter le huitième moyen.

 Sur le neuvième moyen, tiré de la violation de l’article 8, de l’article 9, paragraphe 1, et de l’article 10, paragraphe 6, du règlement de base

316    À titre liminaire, il convient de relever que les requérantes ne contestent pas que le papier fin couché utilisé par les machines à imprimer à feuilles n’est pas interchangeable avec les rouleaux pour presses à bobines.

317    Il convient également de relever que les requérantes ne contestent pas que les rouleaux utilisés par les presses à bobines ne sont pas interchangeables avec les rouleaux pour machines à imprimer à feuilles.

318    Il n’est pas davantage contesté par les requérantes que les rouleaux pour presses à bobines peuvent être utilisés sur les machines à imprimer à feuilles dotées de la technologie CutStar.

319    Les requérantes contestent la définition du produit concerné en ce que les institutions ont exclu les rouleaux pour presses à bobines et ont conclu qu’ils n’étaient pas interchangeables avec les rouleaux à couper.

320    Le Conseil soutient que les rouleaux pour presses à bobines doivent être exclus de la définition du produit concerné, parce que les différents types de papier présentent des caractéristiques physiques distinctes.

321    Le Conseil fait valoir que les différents types de papier ne sont pas interchangeables et que les institutions de l’Union ont défini le produit concerné comme étant le papier pour machines à feuilles, qu’il s’agisse de feuilles de papier ou de rouleaux utilisables avec les machines CutStar.

322    Ainsi, il convient d’examiner, pour caractériser l’interchangeabilité des produits, si les rouleaux pour presses à bobines peuvent être utilisés sur les machines à imprimer à feuilles dotées de la technologie CutStar et si les rouleaux pour machines à imprimer à feuilles peuvent être utilisés dans les presses à bobines.

323    Il ressort du considérant 19 du règlement attaqué que les requérantes ont fait valoir que « les rouleaux pour presses à bobines et ceux faisant l’objet de la présente enquête (rouleaux à couper et feuilles) présent[aient] les mêmes caractéristiques techniques et physiques fondamentales et ne se distingu[aient] pas les uns des autres ».

324    À cet égard, les requérantes affirment avoir produit en annexe à la requête « des éléments de preuves concluants dont il ressort que les presses équipées du système CutStar peuvent utiliser les deux types de rouleaux ».

325    Aux termes du considérant 17 du règlement attaqué :

« Le [papier fin couché] est un papier ou carton de haute qualité, généralement utilisé pour imprimer du matériel de lecture tel que des magazines, des catalogues, des rapports annuels et des annuaires. Le produit concerné se présente sous la forme de feuilles ou de rouleaux pour machines à imprimer à feuilles (de type ‘CutStar’). Les rouleaux pour presses à feuilles (rouleaux à couper) sont conçus pour être coupés avant impression et sont donc considérés comme substituables aux feuilles et en concurrence directe avec celles-ci. »

326    Le considérant 18 du règlement attaqué mentionne que les rouleaux pour presses à bobines, exclus du produit concerné, sont « en général directement placés sur les machines et ne sont pas précoupés ».

327    Or, force est de constater que les requérantes se bornent à alléguer que les institutions de l’Union auraient commis une erreur manifeste d’appréciation dans la définition du produit concerné sans toutefois apporter d’élément à l’appui de leur argumentation.

328    En effet, les requérantes n’apportent aucun élément de nature à démontrer que le papier fin couché en rouleaux pourrait être utilisé sur les presses à bobines, que ce soit au regard des caractéristiques physiques ou techniques, telles que la résistance à l’arrachage, ou de l’interchangeabilité du point de vue économique.

329    Selon une jurisprudence constante, la définition du produit concerné dans le cadre d’une enquête antisubvention a pour objet d’aider à l’élaboration de la liste des produits qui, le cas échéant, feront l’objet de l’imposition des droits compensateurs. Aux fins de cette opération, les institutions de l’Union peuvent tenir compte de plusieurs facteurs, tels que, notamment, les caractéristiques physiques, techniques et chimiques des produits, leur usage, leur interchangeabilité, la perception qu’en a le consommateur, les canaux de distribution, le processus de fabrication, les coûts de production et la qualité [voir, par analogie, arrêts du Tribunal du 13 septembre 2010, Whirlpool Europe/Conseil, T‑314/06, Rec. p. II‑5005, point 138 ; du 17 décembre 2010, EWRIA e.a./Commission, T‑369/08, Rec. p. II‑6283, point 82, et du 10 octobre 2012, Gem-Year et Jinn-Well Auto-Parts (Zhejiang)/Conseil, T‑172/09, point 59].

330    Aux termes du considérant 20 du règlement attaqué :

« [L]’enquête a confirmé que le papier pour presses à bobines et celui pour machines à feuilles présentaient des caractéristiques techniques et physiques distinctes, telles que l’humidité et la rigidité. L’enquête a en outre confirmé que les caractéristiques techniques énumérées au considérant 18 [étaient] propres aux rouleaux pour presses à bobines. En raison de ces différences, le papier pour presses à bobines et celui pour machines à feuilles ne peuvent être utilisés sur le même type de machines à imprimer et ne sont pas interchangeables. Il convient d’observer que toutes les parties ont admis que les deux types de papier se différenciaient par leur résistance de surface et leur résistance à la traction. »

331    Or, il ressort du considérant 35 du règlement attaqué que « les considérants 18 et 20 énoncent d’autres critères qui n’ont pas été remis en question par le producteur-exportateur concerné ».

332    Il convient de relever que la détermination du produit similaire n’a pas été contestée.

333    Partant, les dispositions du règlement de base relatives à la définition du produit concerné n’ont pas été méconnues, de sorte que le présent grief doit être rejeté.

334    En ce qui concerne la définition de l’industrie de l’Union et la qualité pour agir au titre de la procédure antisubvention, les requérantes font valoir que la définition erronée du produit concerné a été utilisée aux fins de définir l’industrie de l’Union fabriquant le produit similaire et d’évaluer le préjudice subi par cette industrie.

335    Aux termes du considérant 374 du règlement attaqué :

« Comme mentionné au considérant 19, une partie intéressée a allégué que le [papier fin couché] pour presses à bobines aurait dû être inclus dans le champ de la présente enquête. Sur cette base, la partie a soutenu que l’industrie de l’Union n’aurait pas qualité pour agir en tant que plaignante dans la présente procédure. Cependant, à la lumière des conclusions exposées aux considérants 22 et 25, à savoir que le [papier fin couché] pour presses à bobines et [celui] pour machines à feuilles sont deux produits différents, cet argument a dû être rejeté. »

336    Ainsi que le relève le Conseil, le moyen ne mériterait d’être examiné que si la définition du produit concerné était erronée.

337    Or, il résulte de ce qui précède que les institutions de l’Union n’ont pas commis d’erreur manifeste d’appréciation dans la définition du produit concerné.

338    Ainsi, le présent grief est privé de sa prémisse.

339    Au surplus, force est de constater que les requérantes se bornent à alléguer que les institutions de l’Union auraient méconnu l’article 9, paragraphe 1, l’article 10 et l’article 6, paragraphe 4, du règlement de base, sans toutefois apporter d’éléments à l’appui de leur argumentation.

340    Partant, le présent grief doit être rejeté.

341    En ce qui concerne la méconnaissance de l’article 296 TFUE, les requérantes font valoir que les institutions de l’Union n’ont pas satisfait à leur obligation de motivation du règlement attaqué dès lors que le silence desdites institutions sur l’interchangeabilité des deux produits en cause, lorsqu’ils sont utilisés sur des machines dotées d’un équipement du type CutStar, a empêché les requérantes de défendre efficacement devant le Tribunal leur allégation selon laquelle le système CutStar rend interchangeables les rouleaux pour presses à bobines et les rouleaux à couper et de contester une décision importante qui avait une incidence considérable sur la qualité pour agir et l’évaluation du préjudice ainsi que sur le résultat de l’enquête.

342    Il convient de rappeler que la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (voir arrêt de la Cour du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, Rec. p. I‑8947, point 147, et la jurisprudence citée).

343    À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé de la motivation, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux (voir arrêt Elf Aquitaine/Commission, point 342 supra, point 146, et la jurisprudence citée).

344    Ainsi, dans le cadre de décisions individuelles, il ressort d’une jurisprudence constante que l’obligation de motiver une décision individuelle a pour but, outre de permettre un contrôle judiciaire, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est éventuellement entachée d’un vice permettant d’en contester la validité (voir arrêt Elf Aquitaine/Commission, point 342 supra, point 148, et la jurisprudence citée).

345    Il convient de considérer que le grief tiré de la circonstance selon laquelle le règlement attaqué ne serait pas motivé ou serait insuffisamment motivé en raison de l’éventuel silence des institutions de l’Union sur l’interchangeabilité des produits en cause n’est/pas fondé.

346    En effet, les institutions de l’Union ont examiné la circonstance selon laquelle le papier fin couché en feuilles ou en rouleaux pour machines à feuilles et les rouleaux pour presses à bobines constituaient des groupes différents et n’étaient pas interchangeables (considérant 20 du règlement attaqué), tant du point de vue des caractéristiques physiques et techniques, le considérant 20 du règlement attaqué confirmant le considérant 18 du règlement attaqué, notamment en ce qui concerne la résistance à l’arrachage ainsi que la rigidité comme critères distinctifs pertinents (considérants 18, 35 et 40 du règlement attaqué), que d’un point de vue économique (considérant 22 du règlement attaqué).

347    Ainsi, les institutions de l’Union n’ont pas violé l’article 296 TFUE dans la mesure où les requérantes pouvaient clairement identifier les éléments pris en compte dans le règlement attaqué pour conclure au défaut d’interchangeabilité des rouleaux à couper pour machines à feuilles et des rouleaux pour presses à bobines.

348    Partant, le grief doit être rejeté.

349    En conséquence, il résulte de tout ce qui précède que le neuvième moyen doit être rejeté.

 Sur le dixième moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphes 1 et 6, du règlement de base

350    Premièrement, les requérantes font valoir que, en vertu du principe de non-imputation, le règlement attaqué est entaché d’un défaut de motivation dès lors que les institutions de l’Union n’ont pas fourni d’explications pertinentes, ni une motivation suffisante en ce qui concerne le fait que le prix non préjudiciable n’excédait pas ce qui était nécessaire pour éliminer le préjudice causé par les importations faisant l’objet de subventions et/ou de dumping.

351    Or, il convient de relever que les institutions de l’Union ont clairement motivé le résultat du test de non-imputation dès lors qu’elles ont procédé à l’évaluation de l’incidence d’autres facteurs sur le préjudice, tels que l’évolution de la consommation sur le marché de l’Union (considérants 445 à 448 du règlement attaqué), du prix des matières premières (considérants 449 à 451 du règlement attaqué), des résultats à l’exportation de l’industrie de l’Union (considérants 452 et 453 du règlement attaqué), des importations en provenance d’autres pays tiers (considérants 454 à 456 du règlement attaqué), ainsi que la surcapacité structurelle (considérants 457 et 458 du règlement attaqué).

352    Ainsi, il y a lieu de considérer que les institutions de l’Union ont clairement motivé le fait que les autres facteurs ne pouvaient se voir imputer le préjudice causé par les importations faisant l’objet de subventions et/ou de dumping et que, par conséquent, le prix non préjudiciable avait été déterminé afin de ne pas excéder ce qui était nécessaire pour éliminer le préjudice causé par ces importations.

353    Les requérantes font également valoir que les institutions de l’Union ne se sont pas assurées que le préjudice imputable à des facteurs autres que le dumping et les subventions n’était pas entré en ligne de compte dans la détermination du niveau du droit institué à l’encontre de leurs importations, alors qu’incombait auxdites institutions la charge de démontrer qu’elles avaient procédé à une analyse de non-imputation.

354    Il y a lieu de constater que les requérantes font simplement remarquer que le niveau des droits institués s’élève à 20 % et que le prix non préjudiciable sur la base duquel ce taux a été calculé a été obtenu en ajoutant une marge bénéficiaire de 8 % aux coûts de production.

355    Ainsi que le relève le Conseil, les requérantes ne contestent pas dans son principe l’approche adoptée par les institutions de l’Union concernant le bénéfice indicatif et ne contestent pas non plus que celui-ci soit fixé au niveau que l’industrie de l’Union pourrait réaliser en l’absence d’importations faisant l’objet de subventions.

356    À cet égard, il convient de rappeler que les requérantes ne contestent pas la fiabilité de ces éléments.

357    Il convient ainsi de relever que les requérantes ne contestent pas le niveau des droits institués dès lors qu’elles se contentent de rappeler le calcul de la marge de préjudice tel qu’il est mentionné au considérant 499 du règlement attaqué.

358    En tout état de cause, il y a lieu de rappeler que les institutions de l’Union, conformément à l’article 8, paragraphe 6, du règlement de base, ont examiné l’incidence des autres facteurs connus susceptibles d’avoir causé un préjudice à l’industrie de l’Union et ont constaté qu’aucun d’entre eux n’était de nature à rompre le lien de causalité établi entre les importations en provenance de Chine faisant l’objet d’un dumping et le préjudice subi par l’industrie de l’Union (considérants 445 à 458 du règlement attaqué). Ainsi, les institutions de l’Union ont rempli les conditions nécessaires pour prendre les mesures en cause.

359    Partant, le grief doit être rejeté.

360    Deuxièmement, les requérantes soutiennent que les institutions de l’Union ont sommairement rejeté toutes les causes de préjudice qui leur avaient été présentées lors de l’enquête et autres que les importations faisant l’objet de subventions.

361    À cet égard, les requérantes se contentent de faire valoir, à titre d’exemple, que le préjudice subi ne peut être imputé en totalité aux importations en provenance de Chine dès lors que, en présence d’une perte de part de marché de 5 % au cours de la période d’enquête, les importations chinoises n’ont augmenté que de 3 %, ce qui signifie qu’un autre concurrent a gagné la part de marché perdue par l’industrie de l’Union à hauteur de 2 %. Ainsi, les requérantes ne sont pas les seules responsables de la perte de part de marché et du préjudice en résultant.

362    Dans la mesure où il s’agit d’un argument des requérantes, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, le Conseil et la Commission ont l’obligation d’examiner si le préjudice qu’ils entendent retenir découle effectivement des importations qui ont fait l’objet de subventions et d’écarter tout préjudice découlant d’autres facteurs (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 11 juin 1992, Extramet Industrie/Conseil, C‑358/89, Rec. p. I‑3813, point 16, et arrêt du Tribunal du 25 octobre 2011, CHEMK et KF/Conseil, T‑190/08, Rec. p. II‑7359, point 188).

363    Il convient également de rappeler que la question de savoir si des facteurs autres que les importations faisant l’objet de subventions ont contribué au préjudice subi par l’industrie de l’Union suppose l’évaluation de questions économiques complexes pour laquelle les institutions de l’Union disposent d’un large pouvoir d’appréciation, ce qui implique que le juge de l’Union ne peut exercer qu’un contrôle restreint sur cette évaluation (voir, par analogie, arrêt CHEMK et KF/Conseil, point 363 supra, point 189).

364    Par ailleurs, il appartient aux requérantes de produire les éléments de preuve permettant au Tribunal de constater que le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation dans l’évaluation du préjudice [voir arrêts Shanghai Teraoka Electronic/Conseil, point 228 supra, point 119 ; Moser Baer India/Conseil, point 228 supra, point 140, et la jurisprudence citée, et Since Hardware (Guangzhou)/Conseil, point 225 supra, point 137].

365    Il y a lieu de déduire de cette jurisprudence que l’évaluation du préjudice prend en compte toutes les conditions de détermination dudit préjudice, le lien de causalité inclus.

366    Or, les requérantes se bornent à formuler de simples allégations, de surcroît à titre d’exemple.

367    Ainsi, force est de constater que les requérantes ne produisent aucun élément de preuve à l’appui de leur argument de nature à démontrer que les institutions de l’Union auraient commis une erreur d’appréciation dans la détermination du lien de causalité.

368    À titre surabondant, ainsi que le relève le Conseil, il convient de constater que les requérantes ne contestent pas les conclusions tirées des considérants 454 et 455 du règlement attaqué selon lesquels les importations en provenance d’autres pays tiers n’ont pas contribué au préjudice important subi par l’industrie de l’Union.

369    Troisièmement, en ce qui concerne la dégradation des résultats à l’exportation de l’industrie de l’Union, les requérantes contestent l’affirmation des institutions de l’Union selon laquelle cette dégradation n’est pas la cause principale du préjudice subi par les producteurs et, par conséquent, ne rompt pas le lien de causalité.

370    Ainsi que le relève le Conseil, les résultats à l’exportation de l’industrie de l’Union ont atténué les effets préjudiciables des importations faisant l’objet de subventions.

371    En effet, le considérant 452 du règlement attaqué mentionne notamment :

« Comme les exportations jouent un rôle non négligeable dans le maintien d’un taux élevé d’utilisation des capacités permettant de couvrir les importants coûts fixes des investissements en machines, il a été considéré qu’en dépit de la dégradation des résultats à l’exportation elles avaient eu un effet globalement positif. Il est donc estimé que, même si la détérioration globale de la situation de l’industrie de l’Union est susceptible de s’expliquer en partie par la baisse des activités à l’exportation, celles-ci ont par ailleurs atténué les pertes subies sur le marché de l’Union et ne sont, par conséquent, pas de nature à [rompre] le lien de causalité établi entre les importations faisant l’objet de subventions en provenance de [Chine] et le préjudice subi par l’industrie de l’Union. »

372    À cet égard, force est de constater que les requérantes ne produisent aucun élément de preuve de nature à démontrer que les institutions de l’Union auraient commis une erreur d’appréciation dans la détermination du lien de causalité.

373    Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le dixième moyen dans son ensemble.

374    Il s’ensuit que le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

375    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il y a lieu de les condamner à supporter, outre leurs propres dépens, ceux exposés par le Conseil, Cepifine, Sappi Europe, Burgo Group et Lecta, conformément aux conclusions de ces derniers.

376    La Commission supportera ses propres dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Gold East Paper (Jiangsu) Co. Ltd et Gold Huasheng Paper (Suzhou Industrial Park) Co. Ltd supporteront, outre leurs propres dépens, ceux exposés par le Conseil de l’Union européenne, Cepifine AISBL, Sappi Europe SA, Burgo Group SpA et Lecta SA.

3)      La Commission européenne supportera ses propres dépens.

Czúcz

Labucka

Gratsias

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 septembre 2014.

Signatures

Table des matières


Cadre juridique

Antécédents du litige

Enquête

Règlement attaqué

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 6, sous d), de l’article 28 et de l’article 4 du règlement de base

Sur la première branche, portant sur l’utilisation de Taïwan en tant que référence appropriée

Sur la seconde branche, portant sur la prétendue absence d’élément prouvant la spécificité

Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 4 du règlement de base

Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement de base

Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’article 6, sous b), du règlement de base

Sur le sixième moyen, tiré de la violation de l’article 14, paragraphe 2, du règlement de base

Sur le septième moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, du règlement de base

Sur la première branche, portant sur la prétendue absence de justification de l’exclusion d’un producteur finlandais aux fins de l’évaluation du préjudice

Sur la seconde branche, portant sur les modalités de la prétendue évaluation des indicateurs de préjudice microéconomiques basée sur quatre producteurs représentatifs de l’Union

Sur le huitième moyen, tiré de la violation de l’article 2, sous d), et de l’article 15 du règlement de base

Sur le neuvième moyen, tiré de la violation de l’article 8, de l’article 9, paragraphe 1, et de l’article 10, paragraphe 6, du règlement de base

Sur le dixième moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphes 1 et 6, du règlement de base

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’anglais.


1 Données confidentielles occultées.