Language of document : ECLI:EU:T:2001:168

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

20 juin 2001 (1)

«Marque communautaire - Paiement de la taxe de dépôt après l'expiration du délai d'un mois à compter de la présentation de la demande d'enregistrement - Déchéance du droit à l'attribution de la date de la présentation de la demande comme date de dépôt - Conditions d'admission au bénéfice de la restitutio in integrum»

Dans l'affaire T-146/00,

Stefan Ruf , demeurant à Ettlingen (Allemagne),

Martin Stier, demeurant à Pfinztal (Allemagne),

représentés par Mes V. Spitz, A. N. Klinger et A. Gaul, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

parties requérantes,

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. A. von Mühlendahl, D. Schennen, et E. Joly, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles), du 28 mars 2000 (affaire R 198/1998-1), rejetant la demande en restitutio in integrum des requérants, tendant à ce que soit attribuée comme date de dépôt à leur demande d'enregistrement la date de la présentation de cette demande à l'Office,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),

composé de MM. A. W. H. Meij, président, A. Potocki et J. Pirrung, juges,

greffier: M. J. Palacio González, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 30 mai 2000,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 18 septembre 2000,

à la suite de l'audience du 14 mars 2001,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique du litige

1.
    Aux termes de l'article 26 du règlement (CE) n° 40/94, du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié:

«1.    La demande de marque communautaire doit contenir:

a)    une requête en enregistrement d'une marque communautaire;

b)    les indications qui permettent d'identifier le demandeur;

c)    la liste des produits ou des services pour lesquels l'enregistrement est demandé;

d)    la reproduction de la marque.

2.    La demande de marque communautaire donne lieu au paiement d'une taxe de dépôt et, le cas échéant, d'une ou de plusieurs taxes par classe.

3.    La demande de marque communautaire doit satisfaire aux conditions prévues par le règlement d'exécution visé à l'article 140.»

2.
    L'article 27 du règlement n° 40/94 précise:

«La date de dépôt de la demande de marque communautaire est celle à laquelle le demandeur a produit à l'Office [...] des documents qui contiennent les éléments visés à l'article 26, paragraphe 1, sous réserve du paiement de la taxe de dépôt dans un délai d'un mois à compter de la production des documents susvisés.»

3.
    La règle 9, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d'application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1, ci-après le «règlement d'exécution»), dispose que, si la demande ne satisfait pas aux conditions requises pour qu'il lui soit accordé une date de dépôt, au motif, notamment, que la taxe de base pour le dépôt de la demande n'a pas été payée à l'Office dans le délai d'un mois à compter du dépôt de la demande auprès de l'Office, celui-ci informe le demandeur qu'une date de dépôt ne peut être accordée en raison de l'irrégularité.

4.
    La règle 9 du règlement d'exécution prévoit, en son paragraphe 2, que, s'il est remédié aux irrégularités dans un délai de deux mois à compter de la réception de la notification visée ci-dessus, la date de dépôt est déterminée par celle à laquelle il a été remédié à toutes les irrégularités. S'il n'est pas remédié aux irrégularités dans ce délai, la demande n'est pas traitée en tant que demande de marque communautaire.

5.
    Enfin, aux termes de l'article 78, du règlement n° 40/94, intitulé «Restitutio in integrum»:

«1.    Le demandeur ou le titulaire d'une marque communautaire ou toute autre partie à une procédure devant l'Office qui, bien qu'ayant fait preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances, n'a pas été en mesure d'observer un délai à l'égard de l'Office est, sur requête, rétabli dans ses droits si l'empêchement a eu pour conséquence directe, en vertu des dispositions du présent règlement, la perte d'un droit ou celle d'un moyen de recours.

[...]

3.    La requête doit être motivée et indiquer les faits et les justifications invoquées à son appui. Elle n'est réputée présentée qu'après paiement de la taxe de restitutio in integrum.»

Antécédents du litige

6.
    Par l'intermédiaire de leur mandataire, M. S., les requérants ont déposé auprès de l'Office, le 15 avril 1996, une demande d'enregistrement de la marque communautaire figurative «DAKOTA» (n° 227 306).

7.
    Dans l'espace réservé aux taxes sur le formulaire de la demande, les déposants ont précisé que le paiement de la taxe de dépôt serait effectué ultérieurement.

8.
    Par télécopie du 21 mai 1996, l'Office a accusé réception de la demande d'enregistrement.

9.
    Par courrier du 17 juin 1996, M. S. a transmis à l'Office une copie de l'attestation de l'enregistrement de la marque «DAKOTA» auprès de l'Office allemand des brevets (Deutsches Patentamt), ainsi que le mandat des requérants.

10.
    Par lettre du 19 décembre 1996, M. S. a fait parvenir un nouveau mandat à l'Office, à la demande de celui-ci.

11.
    Le 5 février 1997, M. S. a constaté que la taxe de dépôt n'avait pas été acquittée.

12.
    Le 12 février 1997, le compte de l'Office a été crédité du montant de la taxe de dépôt, soit 975 écus, majoré de 200 écus représentant la taxe de restitutio in integrum.

13.
    Par lettre du 18 mars 1997, M. S. a présenté une requête en restitutio in integrum «aux fins de l'attribution d'une date de dépôt». Au soutien de cette demande, M. S. a fait valoir que la taxe de dépôt avait été acquittée tardivement en raison de l'inadvertance d'une de ses assistantes, Mme C.

14.
    Par courrier du 4 septembre 1997, M. S. s'est enquis de l'état d'avancement de l'examen des demandes en restitutio in integrum qu'il avait présentées au titre du dossier «DAKOTA» et de sept autres demandes d'enregistrement.

15.
    L'Office a informé les requérants, par courrier du 24 octobre 1997, que leur demande d'enregistrement avait reçu la date de dépôt du 12 février 1997, date du paiement de la taxe de dépôt.

16.
    Par décision du 8 octobre 1998, l'examinateur a rejeté la demande en restitutio in integrum.

17.
    Le 27 novembre 1998, les requérants ont formé auprès de l'Office, sur le fondement de l'article 59 du règlement n° 40/94, un recours tendant à l'annulation de cette décision.

18.
    Ce recours a été rejeté par décision du 28 mars 2000 de la première chambre de recours (ci-après la «Décision»).

Conclusions des parties

19.
    Les requérants concluent à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    annuler la Décision;

-    ordonner à l'Office d'attribuer à la demande d'enregistrement de marque communautaire n° 227 306 la date de dépôt du 15 avril 1996;

-    citer comme témoins M. S., le prédécesseur de celui-ci, et Mme C;

-    condamner le défendeur aux dépens.

20.
    L'Office conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours;

-    condamner les requérants aux dépens.

21.
    Au cours de l'audience de plaidoiries, les requérants se sont désistés du deuxième chef de leurs conclusions, ce dont le Tribunal prend acte.

Sur les conclusions en annulation

22.
    Les moyens articulés au soutien du recours sont tirés, respectivement, de l'incompatibilité de l'article 27 du règlement n° 40/94 avec certaines conventions internationales concernant la protection de la propriété industrielle, de l'omission par le défendeur de signaler d'office aux requérants l'existence du délai d'un mois imparti par l'article 27 du règlement n° 40/94 pour le paiement de la taxe de dépôt, de la violation de l'article 78 du règlement n° 40/94 et, enfin, de la violation de la règle 9, paragraphe 1, du règlement d'exécution, en application de laquelle l'Office devait informer les requérants qu'une date de dépôt ne pouvait être accordée à leur demande d'enregistrement en raison du défaut de paiement de la taxe de dépôt dans le délai imparti.

23.
    Il convient de préciser au préalable que le présent recours vise uniquement à l'annulation de la Décision, en ce que celle-ci a rejeté la demande en restitutio in integrum des requérants tendant, en substance, à ce que soit attribuée comme datede dépôt à leur demande d'enregistrement celle de sa présentation à l'Office, soit le 15 avril 1996.

24.
    Eu égard à cette précision, le Tribunal estime opportun d'examiner en premier lieu le quatrième moyen.

Sur le quatrième moyen, pris de la violation de la règle 9 du règlement d'exécution

Arguments des parties

25.
    Les requérants allèguent que, en vertu de la règle 9, paragraphe 2, du règlement d'exécution, la date de dépôt de la demande d'enregistrement est déterminée par celle à laquelle il a été remédié aux irrégularités signalées par l'Office, dans les deux mois à compter de la réception de cette communication. Toutefois, l'Office n'ayant pas, en l'espèce, procédé à une telle notification, il ne pouvait pas retenir comme date de dépôt celle du paiement de la taxe de dépôt.

26.
    L'Office répond que la notification prévue par la règle 9, paragraphe 2, du règlement d'exécution a pour objet, non pas de conserver la date de dépôt de la demande d'enregistrement, mais de prévenir la réalisation immédiate et de plein droit de la conséquence découlant du défaut de régularisation de cette demande, à savoir que celle-ci n'est pas traitée en tant que demande de marque communautaire.

Appréciation du Tribunal

27.
    Le quatrième moyen revient en réalité à contester la légalité, non pas de la Décision, laquelle, ainsi que l'Office l'a relevé à bon droit, n'est pas contestée dans le cadre du présent litige, mais de la décision de l'Office, contenue dans sa lettre du 24 octobre 1997, d'attribuer à la demande d'enregistrement des requérants la date de dépôt du 12 février 1997.

28.
    De fait, la règle 9 du règlement d'exécution ne prévoit pas les modalités d'application de l'article 78 du règlement n° 40/94, pertinent en l'espèce. Elle définit une procédure spécifique de régularisation des demandes d'enregistrement permettant aux déposants d'obtenir comme date de dépôt celle à laquelle ils ont remédié aux irrégularités entachant leur demande.

29.
    Dès lors que le quatrième moyen n'est pas de nature à soutenir les conclusions en annulation des requérants, il n'y a pas lieu pour le Tribunal d'entreprendre l'examen de son bien-fondé.

Sur le premier moyen, pris de l'incompatibilité de l'article 27 du règlement n° 40/94 avec certaines conventions internationales concernant la protection de la propriété industrielle

Arguments des parties

30.
    Les requérants se réfèrent à l'article 4, point A, paragraphe 3, de la convention d'union de Paris pour la protection de la propriété industrielle, du 20 mars 1883, telle que révisée ultérieurement, et à l'article 87, paragraphe 3, de la convention de Munich du 5 octobre 1973 sur la délivrance de brevets européens, selon lesquels, par dépôt national régulier, on doit entendre tout dépôt qui suffit à établir la date à laquelle la demande a été déposée, quel que soit le sort ultérieur de cette demande.

31.
    Les requérants en déduisent que la date de dépôt d'une demande est déterminée indépendamment du sort ultérieur de celle-ci et, donc, du paiement de la taxe de dépôt. Il en va également ainsi dans le cadre du traité de Washington du 19 juin 1970, relatif à la coopération en matière de brevets.

32.
    L'Office répond, en substance, qu'aucun texte de droit international unitaire ne réglemente les délais prescrits pour le paiement de la taxe de dépôt, ni les conséquences juridiques d'un paiement effectué hors délai ou de l'omission de ce paiement.

Appréciation du Tribunal

33.
    La convention d'union de Paris pour la protection de la propriété industrielle, précitée, ne contient pas de règles matérielles régissant les conditions d'attribution des dates de dépôt. En effet, il découle de son article 4, point A, paragraphe 2, que la régularité des dépôts est déterminée par le droit de chacun des pays de l'union ou par les traités bilatéraux ou multilatéraux conclus entre eux.

34.
    Par ailleurs, il résulte des dispositions des articles 78, paragraphe 2, et 90, paragraphe 3, de la convention de Munich sur la délivrance de brevets européens, précitée, que la taxe de dépôt doit être acquittée au plus tard un mois après le dépôt de la demande, faute de quoi, la demande de brevet européen est réputée retirée.

35.
    Enfin, le traité de Washington relatif à la coopération en matière de brevets, précité, comporte, ainsi que les requérants le relèvent eux-mêmes au point 52 de leur requête, un renvoi exprès à la convention d'union de Paris pour la protection de la propriété industrielle, précitée.

36.
    Il ne se dégage donc pas des conventions internationales invoquées, à supposer celles-ci pertinentes, un principe avec lequel l'article 27 du règlement n° 40/94 devrait être considéré comme incompatible.

37.
    Il y a donc lieu de rejeter le premier moyen.

Sur le deuxième moyen, pris de l'omission par le défendeur d'informer d'office les requérants de l'existence du délai d'un mois imparti pour le paiement de la taxe de dépôt

Arguments des parties

38.
    Les requérants reprochent à l'Office de ne pas avoir attiré l'attention de M. S. sur le délai de paiement de la taxe de dépôt. Une notification conforme à la règle 9 du règlement d'exécution était d'autant plus nécessaire au cours de la période initiale d'application du règlement n° 40/94 que son article 27 contient des dispositions inédites.

39.
    L'Office était tenu à une obligation d'information, conformément à une application par analogie de l'article 139 du code de procédure civile allemand. Une violation de cette disposition est un vice substantiel de procédure de nature à enfreindre l'article 3, paragraphe 1, de la loi fondamentale de la République fédérale d'Allemagne.

40.
    Enfin, les requérants font valoir que l'Office rappelle désormais, sur les accusés de réception des demandes d'enregistrement, le délai imparti pour le paiement de la taxe de dépôt et les conséquences du non-respect de ce délai. Or, l'Office étant tenu de respecter le principe d'égalité de traitement, il ne saurait appliquer aux requérants un traitement moins favorable que celui dont font désormais l'objet les déposants actuels.

41.
    L'Office objecte que, contrairement au droit allemand, le règlement n° 40/94 ne prévoit pas de rappel de l'obligation de payer la taxe de dépôt. Aussi l'Office ne s'estime-t-il pas tenu d'y procéder, indépendamment de l'impossibilité pour les requérants de se référer à des règles de procédure nationales.

42.
    Au cours de l'audience de plaidoiries, l'Office a précisé que sa nouvelle pratique consiste simplement à attirer l'attention des déposants sur leur obligation de payer la taxe de dépôt.

Appréciation du Tribunal

43.
    Il ressort de la description de son système de vérification des délais, exposé dans le cadre du deuxième moyen examiné ci-dessous, que M. S. a donné à ses collaborateurs l'instruction générale de veiller à l'observation du délai d'un mois fixé par l'article 27 du règlement n° 40/94 pour le paiement de la taxe de dépôt.

44.
    L'obligation de payer la taxe de dépôt dans ce délai étant ainsi connue du mandataire des requérants, l'irrégularité alléguée, à la supposer avérée, est en toutétat de cause dépourvue de pertinence, de même que, par voie de conséquence, le grief tiré de la violation du principe d'égalité de traitement.

45.
    Le deuxième moyen doit donc être rejeté comme inopérant.

Sur le troisième moyen, pris de la violation de l'article 78 du règlement n° 40/94

Arguments des parties

46.
    Les requérants estiment avoir fait preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances au sens de l'article 78, paragraphe 1, du règlement n° 40/94. C'est donc à tort que l'Office a refusé de les rétablir dans leurs droits et d'attribuer la date de dépôt du 15 avril 1996 à leur demande d'enregistrement.

47.
    Les procédures appliquées au sein du bureau de M. S. pour garantir le respect des délais de paiement excluent en principe toute erreur. Les délais applicables aux demandes d'enregistrement sont notés sur la couverture intérieure de chaque dossier et sur une fiche agrafée au recto de la couverture extérieure. Cette fiche porte le numéro du dossier et une date correspondant à quatorze jours avant l'expiration du délai. Elle est marquée d'un grand point rouge apparent lorsque le dépassement du délai de paiement emporte déchéance de droits. Dans une telle hypothèse, les dossiers sont classés dans une armoire séparée.

48.
    Les délais de paiement sont également repris dans des fichiers composés de 365 fiches journalières mentionnant le numéro des dossiers et les coordonnées des titulaires. Trois mois avant l'expiration d'un délai, le numéro de dossier correspondant est noté sur l'une de ces fiches.

49.
    Sous le contrôle par sondage de M. S., une assistante vérifie chaque jour ouvrable l'armoire contenant les dossiers soumis à des délais, ainsi que les fichiers, ces dossiers étant suivis jusqu'à ce que soient confirmés tant l'exécution que le montant du paiement. En outre, les échéances sont notées et contrôlées sur des calendriers par M. S. lui-même et ses collaborateurs. Enfin, M. S. a donné à ses collaborateurs l'instruction générale d'assurer le respect du délai d'un mois imparti par l'article 27 du règlement n° 40/94 pour le paiement de la taxe de dépôt.

50.
    En définitive, le défaut de paiement, en l'espèce, de la taxe de dépôt dans le délai imparti procède exclusivement d'une erreur isolée de Mme C., assistante spécialisée recrutée en 1972 par le prédécesseur de M. S. et considérée comme une collaboratrice fiable. L'intéressée a placé dans le dossier «DAKOTA» le chèque établi pour acquitter la taxe de dépôt, puis déposé par mégarde le dossier dans la pile des dossiers allemands en instance de paiement, auxquels s'appliquent des délais tout différents. Le dossier «DAKOTA» a été découvert dans la mauvaise pile à l'occasion d'un contrôle de routine et il a été alors constaté que le délai de paiement de la taxe de dépôt était expiré.

51.
    Enfin, il y a lieu d'atténuer, en l'espèce, la rigueur des conditions posées par l'article 78 du règlement n° 40/94, afin de tenir compte de la charge de travail excessive et des contraintes en matière d'organisation que les représentants des déposants ont subies lors de l'entrée en vigueur dudit règlement.

52.
    Selon l'Office, la restitutio in integrum peut être accordée en présence d'une erreur exceptionnelle, comme le dépôt par inadvertance d'un dossier sur une pile, survenue dans le fonctionnement par ailleurs régulier du bureau d'un mandataire.

53.
    En revanche, la restitutio in integrum est exclue dans l'hypothèse où le délai n'aurait pas été respecté même si cette erreur n'avait pas été commise. Or, l'inadvertance alléguée de Mme C. n'a pas pu, à elle seule, être à l'origine du dépassement du délai de paiement de la taxe de dépôt. L'erreur de l'intéressée aurait dû être immédiatement détectée à l'aide de la fiche au repère rouge mentionnant le délai et, au plus tard, lors du classement du dossier «DAKOTA» dans l'armoire appropriée. En outre, il est peu probable que ce dossier n'ait été découvert dans la mauvaise pile qu'en février 1997. Enfin, la présence du chèque dans le dossier «DAKOTA» aurait dû être relevée lorsque ce dossier a été présenté à M. S. à l'occasion des correspondances échangées avec l'Office.

54.
    Les mandataires professionnels chargés de représenter les tiers devant l'Office devaient, selon ce dernier, se montrer d'autant plus vigilants que la nouvelle procédure d'enregistrement des marques communautaires était inhabituelle.

Appréciation du Tribunal

55.
    L'erreur alléguée de Mme C. constitue un empêchement au sens de l'article 78 du règlement n° 40/94. Cet empêchement a eu pour conséquence directe, en vertu des dispositions de ce même règlement, la perte du droit des requérants d'obtenir comme date de dépôt de leur demande d'enregistrement le 15 avril 1996, date de la présentation de cette demande à l'Office.

56.
    Toutefois, il ne saurait être admis que l'empêchement à l'origine de l'absence de paiement de la taxe de dépôt dans le délai imparti ait pu uniquement procéder, ainsi que le soutiennent les requérants, du placement par Mme C. du dossier «DAKOTA» dans la pile des dossiers nationaux en instance.

57.
    En effet, le système de vérification des délais en vigueur au sein du bureau de M. S. aurait dû normalement permettre la prompte détection de cette erreur.

58.
    L'attention des collaborateurs de M. S. aurait dû être attirée, dès le classement du dossier, par la fiche au repère rouge qui devait être agrafée sur la couverture extérieure du dossier et mentionner le délai de paiement de la taxe de dépôt.

59.
    Sauf à considérer qu'il n'ait pas été respecté, le système de vérification des délais de M. S. excluait par ailleurs toute possibilité que le dossier «DAKOTA» puissedemeurer jusqu'au 5 février 1997 en instance de classement dans la mauvaise pile, soit pendant une période de près de dix mois à compter de la présentation de la demande d'enregistrement.

60.
    Enfin, l'erreur alléguée de Mme C. aurait dû normalement être découverte à l'occasion de chacune des correspondances dont le dossier «DAKOTA» a fait l'objet avec l'Office, dès le 21 mai 1996, puis les 17 juin et 19 décembre 1996.

61.
    Il n'apparaît donc pas qu'il ait été fait preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances au sens de l'article 78 du règlement n° 40/94.

62.
    À cet égard, la charge de travail exceptionnelle et les contraintes en matière d'organisation que les requérants allèguent avoir subies en raison de l'entrée en vigueur du règlement n° 40/94 sont dépourvues de pertinence.

63.
    Il y a donc lieu de rejeter le troisième moyen.

64.
    Il résulte de l'ensemble des développements qui précèdent que le recours doit être rejeté dans son intégralité.

Sur la demande d'audition de témoins

65.
    Il apparaît, au vu de l'ensemble des développements ci-dessus, que le Tribunal a pu utilement se prononcer sur la base des conclusions, moyens et arguments développés au cours de la procédure tant écrite qu'orale et au vu des documents produits.

66.
    Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter la demande d'audition de témoins présentée par les requérants au troisième chef de leurs conclusions.

Sur les dépens

67.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Les requérants ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions du défendeur.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête:

1)     Le recours est rejeté.

2)    Les requérants sont condamnés aux dépens.

Meij
Potocki
Pirrung

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 juin 2001.

Le greffier

Le président

H. Jung

A. W. H. Meij


1: Langue de procédure: l'allemand.