Language of document : ECLI:EU:T:2012:240


DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

16 mai 2012 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale Kindertraum – Marque nationale verbale antérieure Kinder – Motif relatif de refus – Preuve de l’usage de la marque antérieure – Article 42, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 207/2009 – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑580/10,

Harald Wohlfahrt, demeurant à Rothenburg ob der Tauber (Allemagne), représenté initialement par MN. Scholz-Recht, puis par Me G. Huβlein-Stich, et enfin par Me M. Loschelder, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par M. A. Pohlmann, puis par Mme D. Walicka, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Ferrero SpA, établie à Alba (Italie), représentée par Mes F. Jacobacci et L. Ghedina, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 20 octobre 2010 (affaire R 815/2009‑4), relative à une procédure d’opposition entre Ferrero SpA et M. Harald Wohlfahrt,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas (rapporteur), président, V. Vadapalas et K. O’Higgins, juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 22 décembre 2010,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 29 avril 2011,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 4 mai 2011,

vu la décision du 8 juillet 2011 refusant d’autoriser le dépôt d’un mémoire en réplique,

à la suite de l’audience du 15 mars 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 11 juillet 2002, le requérant, M. Harald Wohlfahrt, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Kindertraum.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, des classes 16 et 28 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 16 : « Papier et carton et produits en ces matières, compris dans la classe 16, à savoir cahiers, serviettes, papier à lettres et papier d’emballage, décorations pour cadeaux, emballages et sacs d’emballage, produits de l’imprimerie, papeterie » ;

–        classe 28 : « Décorations pour arbres de Noël ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 75/2003, du 29 septembre 2003.

5        Le 29 décembre 2003, l’intervenante, Ferrero SpA, a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée, notamment, sur la marque nationale verbale antérieure Kinder, enregistrée en Italie sous le numéro 872247, pour des produits relevant, notamment, des classes 16 et 28, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 16 : « Papier et carton et produits en ces matières, non compris dans d’autres classes ; produits de l’imprimerie ; articles pour reliures ; photographies ; papeterie ; adhésifs (matières collantes) pour la papeterie ou le ménage ; matériel pour les artistes ; pinceaux ; machines à écrire et articles de bureau (à l’exception des meubles) ; matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception des appareils) ; matières plastiques pour l’emballage (non comprises dans d’autres classes) ; caractères d’imprimerie ; clichés » ;

–        classe 28 : « Jeux, jouets ; articles de gymnastique et de sport non compris dans d’autres classes ; décorations pour arbres de Noël ».

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement n° 207/2009].

8        Le 27 mai 2009, la division d’opposition a fait droit à l’opposition et a rejeté la demande d’enregistrement de marque communautaire pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

9        Le 22 juillet 2009, le requérant a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 20 octobre 2010 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Elle a tout d’abord considéré que la demande de preuve de l’usage de la marque antérieure présentée par le requérant n’était pas recevable, dès lors que le délai de cinq ans visé à l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 ne s’était pas écoulé à la date de la publication de la demande de marque. Elle a ensuite estimé que, eu égard à la présence dans les signes en conflit de l’élément commun « kinder », au degré moyen de similitude visuelle et de similitude phonétique entre les signes en conflit induit par ledit élément et à l’identité des produits en cause, il existait un risque de confusion entre les signes en conflit, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Conclusions des parties

11      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de la division d’opposition et la décision attaquée ;

–        autoriser l’enregistrement de la marque demandée, y compris pour les produits relevant des classes 16 et 28 ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

13      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        à titre subsidiaire, au cas où la décision attaquée serait annulée, renvoyer l’affaire à la chambre de recours afin qu’elle statue sur l’opposition fondée sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 ;

–        condamner le requérant aux dépens.

14      Lors de l’audience, le requérant s’est désisté du premier chef de conclusions, en tant qu’il a trait à une demande d’annulation de la décision de la division d’opposition, et du deuxième chef de conclusions, ce dont le Tribunal a pris acte dans le procès-verbal d’audience.

 En droit

15      À l’appui de son recours, le requérant invoque, en substance, trois moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, le deuxième, d’un défaut de motivation et du caractère abusif de la demande d’enregistrement de la marque antérieure et, le troisième, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009

16      Le requérant soutient qu’il n’existe aucune disposition concernant l’hypothèse où le délai de cinq ans visé à l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 arriverait à échéance pendant la procédure d’opposition. Cette lacune devrait être comblée par le biais d’une interprétation téléologique, dont il résulterait que l’opposant doit prouver à tout moment, pendant une procédure d’opposition, sur demande du demandeur de marque, et au terme d’un délai de cinq ans, l’usage sérieux de la marque antérieure. En l’espèce, la marque antérieure ayant été enregistrée le 8 juillet 2002, le délai en cause aurait expiré le 8 juillet 2007, de sorte que l’intervenante aurait dû faire un usage sérieux de la marque antérieure à partir de cette dernière date pour pouvoir en conserver les droits. La preuve d’un tel usage n’ayant pas été apportée, l’opposition ne pourrait aboutir.

17      L’OHMI et l’intervenante contestent l’argumentation du requérant.

18      À cet égard, il suffit de relever que l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, qui est applicable aux marques antérieures nationales en vertu du paragraphe 3 de ce même article, ne prévoit l’obligation pour l’opposant de fournir, sur requête du demandeur, la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure que « pour autant qu’à [la date de la publication de la demande d’enregistrement] la marque antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins ». Par conséquent, lorsque la marque antérieure invoquée à l’appui d’une opposition est enregistrée depuis moins de cinq ans avant la publication de la demande d’enregistrement d’une marque communautaire, la preuve de l’usage sérieux ne peut pas encore être exigée et la marque antérieure doit être réputée avoir été utilisée [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 30 juin 2004, BMI Bertollo/OHMI − Diesel (DIESELIT), T‑186/02, Rec. p. II‑1887, points 67 et 68, et du 15 septembre 2009, Royal Appliance International/OHMI – BSH Bosch und Siemens Hausgeräte (Centrixx), T‑446/07, non publié au Recueil, point 17].

19      En l’espèce, il est constant que, à la date de la publication de la demande de marque, le 29 septembre 2003, la marque nationale antérieure, qui a été enregistrée le 8 juillet 2002, n’avait pas été enregistrée depuis cinq ans au moins.

20      C’est donc sans commettre d’erreur que la chambre de recours a estimé que la demande de preuve de l’usage de la marque antérieure n’était pas recevable.

21      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument relatif à un prétendu vide juridique qui affecterait le règlement n° 207/2009, lequel devrait être comblé par une interprétation téléologique. En effet, si, certes, le règlement n° 207/2009 ne contient aucune disposition concernant l’hypothèse où le délai de cinq ans arriverait à son terme pendant la procédure d’opposition, il n’en demeure pas moins qu’il ressort explicitement de l’article 42, paragraphe 2, dudit règlement, ainsi que le confirme la jurisprudence visée au point 18 ci-dessus, que la demande de preuve de l’usage de la marque antérieure ne peut être effectuée que sous réserve que celle-ci ait été enregistrée depuis cinq ans au moins à la date de la publication de la demande de marque. Ce faisant, le législateur de l’Union a fixé explicitement un critère concernant la recevabilité des demandes de preuve de l’usage qui ne se réfère qu’à la date de publication de la demande de marque et qui est indépendant de la question de savoir si la procédure d’opposition est en cours ou non.

22      Quant aux références faites par le requérant aux dispositions du droit allemand et du droit italien, elles ne sont pas pertinentes dès lors que le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national [arrêts du Tribunal du 5 décembre 2002, Sykes Enterprises/OHMI (REAL PEOPLE, REAL SOLUTIONS), T‑130/01, Rec. p. II‑5179, point 31 ; du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec. p. II‑3829, point 47, et du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec. p. II‑4891, point 70], et que, en tout état de cause, le libellé du règlement n° 207/2009 est clair et ne nécessite aucune interprétation se fondant sur de telles dispositions.

23      Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’un défaut de motivation et du caractère abusif de l’enregistrement de la marque antérieure

24      Le requérant soutient que la décision de la chambre de recours est entachée d’un défaut de motivation, étant donné qu’elle ne contient aucun développement relatif à l’objection tirée d’une demande d’enregistrement abusive qui avait été soulevée dans le recours contre la décision de la division d’opposition. Selon lui, l’intervenante n’a aucun intérêt réel à la protection, pour les produits relevant des classes 16 et 28, du terme « kinder » et son unique but serait de monopoliser ce terme et d’en empêcher toute utilisation par les tiers. La marque antérieure constituerait donc un abus de droit.

25      L’OHMI et l’intervenante réfutent l’argumentation du requérant.

26      À titre liminaire, il convient de relever que, par l’argumentation avancée au soutien du présent moyen, le requérant invoque, en substance, tant un défaut de motivation de la décision attaquée que le caractère abusif de l’enregistrement de la marque antérieure.

27      Concernant, en premier lieu, le défaut de motivation de la décision attaquée, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 75, première phrase, du règlement nº 207/2009, les décisions de l’OHMI doivent être motivées.

28      Selon la jurisprudence, les institutions ne sont pas obligées, dans la motivation des décisions qu’elles sont amenées à prendre, de prendre position sur tous les arguments que les intéressés invoquent devant elles. Il suffit qu’elles exposent les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision [arrêt du Tribunal du 12 novembre 2008, Shaker/OHMI – Limiñana y Botella (Limoncello della Costiera Amalfitana shaker), T‑7/04, Rec. p. II‑3085, point 81].

29      En l’espèce, il y a lieu de relever tout d’abord que la chambre de recours a, dans la décision attaquée, et plus particulièrement aux considérants 8 à 21 de celle-ci, exposé les faits et les considérations juridiques qui l’ont amenée à rejeter le recours du requérant.

30      Il doit être souligné ensuite que, dans le cadre d’une procédure d’opposition, il n’appartient pas à la division d’opposition ou, le cas échéant, à la chambre de recours d’examiner l’éventuel caractère abusif de l’enregistrement invoqué à l’appui de l’opposition ou l’intérêt que porterait le titulaire de celui-ci. En effet, ni l’article 8 du règlement n° 207/2009, lequel concerne les motifs relatifs de refus d’une marque, ni aucune disposition dudit règlement ne prévoit de base juridique pour que l’OHMI rejette une opposition au motif que la marque nationale antérieure invoquée constitue un abus de droit. D’ailleurs, aucune disposition ne permet à l’OHMI d’apprécier le bien-fondé d’un enregistrement national, que ce soit, notamment, au regard de son caractère abusif ou de l’intérêt que peut avoir son titulaire à procéder à un tel enregistrement pour certains produits.

31      Il s’ensuit que la chambre de recours n’était pas obligée de répondre dans la décision attaquée à l’allégation du requérant, soulevée dans le cadre de son recours contre la décision de la division d’opposition, selon laquelle l’enregistrement de la marque antérieure était abusif, étant donné que celle-ci était manifestement dénuée de toute pertinence dans le cadre dudit recours.

32      Au demeurant, il convient de tenir compte de la motivation plus détaillée concernant ladite allégation figurant dans la décision de la division d’opposition. En effet, compte tenu de la continuité fonctionnelle entre divisions d’opposition et chambres de recours, dont atteste l’article 64, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 [arrêt du Tribunal du 10 juillet 2006, La Baronia de Turis/OHMI – Baron Philippe de Rothschild (LA BARONNIE), T‑323/03, Rec. p. II‑2085, points 57 et 58], la décision de la division d’opposition ainsi que sa motivation font partie du contexte dans lequel la décision attaquée a été adoptée, contexte qui est connu du requérant et qui permet au juge d’exercer pleinement son contrôle de légalité. Or, en l’espèce, il y a lieu de relever, d’une part, que la division d’opposition a indiqué dans sa décision que l’allégation du requérant devait être rejetée en raison de l’absence de base légale pour rejeter une opposition sur la base des circonstances alléguées par le requérant et, d’autre part, que la chambre de recours a validé, ainsi qu’il ressort d’une lecture d’ensemble de la décision attaquée, les appréciations de la division d’opposition.

33      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la décision n’est entachée d’aucun défaut de motivation.

34      Concernant, en second lieu, le caractère abusif de l’enregistrement de la marque antérieure, il suffit de relever que l’argumentation du requérant s’y rapportant doit être rejetée comme dénuée de tout fondement pour les motifs exposés au point 30 ci-dessus. Au surplus, il ne ressort pas du dossier que l’enregistrement en cause serait abusif.

35      Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

36      Le requérant estime qu’il n’existe pas de risque de confusion entre les signes en conflit, en raison du caractère descriptif du terme « kinder » pour une partie du public italien et, donc, de son caractère distinctif extrêmement faible. À cet égard, il fait valoir que c’est à tort que la chambre de recours a retenu que ce terme ne serait pas compris dans un sens descriptif, étant donné que, dans une partie de l’Italie, la langue allemande est également une langue officielle, à l’instar de l’italien. À l’appui de son argumentation, le requérant se fonde également sur des décisions antérieures de l’OHMI.

37      L’OHMI et l’intervenante contestent cette argumentation.

38      À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

39      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

40      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

41      En l’espèce, le requérant ne conteste pas les appréciations de la chambre de recours concernant la circonstance que le public pertinent est le grand public italien, que le risque de confusion doit être apprécié par rapport au public italien et que les produits en cause sont identiques.

42      Quant à la comparaison des signes en conflit, le requérant n’avance, dans la requête, aucun grief visant à réfuter spécifiquement l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle ces signes présenteraient un degré moyen de similitude sur les plans visuel et phonétique. Dans sa réponse, l’OHMI a d’ailleurs constaté, à juste titre, que le requérant ne conteste pas les similitudes visuelle et phonétique des signes. Interrogé à cet égard lors de l’audience, au cours de laquelle il a développé une argumentation se référant à ladite appréciation, le requérant a renvoyé aux considérations figurant aux points 33 et 34 de la requête. Or, par celles-ci, le requérant se limite à se référer à des décisions antérieures de l’OHMI et à soutenir que, comme dans les affaires concernées par ces décisions, la marque demandée forme un mot unique, dont l’élément principal serait la seconde partie (« traum »), laquelle serait, contrairement à l’avis de la chambre de recours, composée non pas de deux mais d’une seule syllabe, qui serait porteuse de la signification décisive de cette marque. Force est de constater que, telles que présentées dans la requête, ces considérations ne comportent aucune argumentation visant à démontrer en quoi la chambre de recours aurait considéré à tort que les signes en conflit sont similaires sur les plans visuel et phonétique. Il n’est d’ailleurs pas fait référence à cette notion dans l’argumentation relative au troisième moyen. Partant, la requête ne satisfait pas aux exigences minimales établies par l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et par l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal pour qu’un grief soit recevable, ces dernières dispositions étant applicables en matière de propriété intellectuelle, conformément à l’article 130, paragraphe 1, et à l’article 132, paragraphe 1, de ce même règlement. En tout état de cause, le fait, évoqué par le requérant, que la marque demandée puisse être perçue comme un tout n’est pas en mesure de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours, laquelle est fondée, en particulier, sur la similitude issue de l’identité de la partie initiale, en l’occurrence « kinder », des signes en conflit. Il en va de même, par identité de motifs, de l’affirmation selon laquelle l’élément « traum » comporterait une syllabe et non deux, comme l’a relevé la chambre de recours, cette affirmation étant au demeurant erronée. Quant à l’affirmation selon laquelle ledit élément serait la partie principale de la marque demandée, elle est réfutée par la circonstance que le consommateur attache normalement plus d’importance à la partie initiale des mots. Au surplus, il doit être constaté qu’aucun élément du dossier ne permet d’invalider les appréciations de la chambre de recours concernant la comparaison des signes.

43      C’est au regard de ces rappels et considérations qu’il convient d’examiner si c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion.

44      À cet égard, il doit être rappelé que la chambre de recours a en substance considéré que, eu égard à la présence dans les signes en conflit de l’élément commun « kinder », au degré moyen de similitude visuelle et de similitude phonétique entre les signes en conflit induit par ledit élément et à l’identité des produits en cause, il existait un risque de confusion entre les signes en conflit.

45      Le requérant conteste l’existence d’un tel risque, en faisant valoir, en substance, que le terme « kinder », composant la marque antérieure, est descriptif, et donc pourvu d’un caractère distinctif très faible, de sorte que la protection dont devrait bénéficier cette marque serait réduite.

46      Force est de constater que cette argumentation n’est pas fondée.

47      En effet, le terme « kinder » est un terme de la langue allemande signifiant « enfants ».

48      Aussi, même si ce terme pourrait être compris par un public germanophone comme une référence aux enfants, il doit être considéré que, pour le public pertinent, lequel est composé du grand public italien, ainsi que l’a en substance relevé la chambre de recours sans être contestée à cet égard par le requérant, ce terme n’a aucune signification.

49      Le fait, allégué par le requérant, que, dans la province italienne de Bolzano, la langue allemande soit également une langue officielle et qu’une partie de la population italienne soit germanophone est sans influence à cet égard. En effet, il ressort du dossier que le nombre total d’habitants de la province en cause ne représente qu’environ 1 % du nombre total des habitants de l’Italie et que, de surcroît, environ 30 % d’entre eux ne sont pas germanophones. C’est donc à bon droit que la chambre de recours a relevé qu’un très faible pourcentage de la population italienne était germanophone. Il s’ensuit que le public pertinent est, dans sa très grande majorité, italophone, de sorte que, pour ce dernier, le terme « kinder » ne sera pas descriptif.

50      Les considérations précédentes ne sont pas remises en cause par la référence faite par le requérant à des décisions antérieures de l’OHMI. En effet, il ressort de la jurisprudence que l’OHMI est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union. Si, eu égard aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, l’OHMI doit prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes doit toutefois être conciliée avec le respect du principe de légalité. Par ailleurs, pour des raisons de sécurité juridique et, précisément, de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. C’est ainsi qu’un tel examen doit avoir lieu dans chaque cas concret (voir arrêt de la Cour du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, non encore publié au Recueil, points 73 à 77, et la jurisprudence citée). En l’espèce, aucun élément ne permet de considérer que c’est à tort que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les signes en conflit. Dans ces conditions, le requérant ne saurait utilement invoquer, aux fins d’infirmer cette conclusion, des décisions antérieures de l’OHMI prétendument contraires à la décision attaquée.

51      Au demeurant, ainsi que l’a relevé l’OHMI, il ressort en substance de ces décisions que le terme « kinder » n’est pas compris par la majorité des consommateurs moyens italiens, voire, pour l’une d’entre elles, qu’il bénéficie d’un caractère distinctif. En outre, si dans deux de ces décisions un risque de confusion a été écarté, c’est en raison soit de la dissemblance existant entre les signes en conflit pour l’une, soit de celle existant entre les produits en cause pour l’autre, tel n’étant pas le cas en l’espèce. Ces décisions ne sauraient donc utilement étayer le raisonnement du requérant.

52      Quant à la référence faite par le requérant à une décision du Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne) du 20 septembre 2007, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, la légalité des décisions des chambres de recours s’apprécie uniquement sur la base du règlement n° 207/2009, tel qu’interprété par le juge de l’Union [arrêts du Tribunal du 3 juillet 2003, Best Buy Concepts/OHMI (BEST BUY), T‑122/01, Rec. p. II‑2235, point 41 ; du 15 septembre 2005, Citicorp/OHMI (LIVE RICHLY), T‑320/03, Rec. p. II‑3411, point 95, et du 12 mars 2008, Suez/OHMI (Delivering the essentials of life), T‑128/07, non publié au Recueil, point 32].

53      Enfin, l’allégation du requérant selon laquelle la marque antérieure se heurterait à l’objection tirée de la circonstance qu’elle est susceptible d’annulation, parce qu’elle pourrait être déclarée nulle sur demande présentée en vertu de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, pour défaut de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement, doit être écartée comme dépourvue de toute pertinence, dès lors que l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 ne concerne que la nullité des marques communautaires et non celle des marques nationales.

54      À titre surabondant, il convient de souligner que, même à supposer que l’argumentation du requérant concernant le caractère distinctif du terme « kinder » (voir points 36 et 45 ci-dessus) soit fondée, les conclusions de la chambre de recours ne sauraient être infirmées. En effet, la reconnaissance d’un caractère faiblement distinctif de la marque antérieure n’empêche pas de constater l’existence d’un risque de confusion. En effet, si le caractère distinctif de la marque antérieure doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion, il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés [voir arrêt du Tribunal du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, Rec. p. II‑5213, point 70, et la jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, ordonnance de la Cour du 15 janvier 2010, Messer Group/Air Products and Chemicals et OHMI, C‑579/08 P, non publiée au Recueil, point 68]. Le raisonnement contraire conduirait à neutraliser le facteur tiré de la similitude des signes en conflit au profit d’un critère fondé sur le caractère distinctif de leur élément commun, auquel serait alors accordée une importance excessive (voir, en ce sens, arrêt PAGESJAUNES.COM, précité, point 71, et la jurisprudence citée). Or, à supposer même que l’élément « kinder », qui est commun aux deux signes en conflit et compose la marque antérieure, puisse être considéré comme descriptif des produits couverts par ladite marque et que, par conséquent, celle-ci soit elle-même considérée comme faiblement distinctive, l’identité entre les produits en cause ainsi que le degré moyen de similitude visuelle et de similitude phonétique entre les signes en conflit, lesquels ont été constatés par la chambre de recours et n’ont pas été contestés par le requérant, considérés cumulativement, s’avèrent suffisants pour pouvoir conclure à l’existence d’un risque de confusion [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 15 mars 2006, Athinaiki Oikogeniaki Artopoiia/OHMI – Ferrero (FERRÓ), T‑35/04, Rec. p. II‑785, point 69 ; du 28 juin 2011, ATB Norte/OHMI – Bricocenter Italia (Affiliato BRICO CENTER), T‑483/09, non publié au Recueil, point 64, et du 24 janvier 2012, Indo Internacional/OHMI – Visual (VISUAL MAP), T‑260/08, non publié au Recueil, point 46].

55      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté ainsi que, par voie de conséquence, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

56      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Harald Wohlfahrt est condamné aux dépens.

Papasavvas

Vadapalas

O’Higgins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 mai 2012.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.