Language of document : ECLI:EU:T:2021:716

ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)

26 septembre 2018 (*)

« Renvoi préjudiciel – Transports – Transports par route – Règlement (CE) no 561/2006 – Article 19, paragraphe 2, premier alinéa – Sanction administrative visant une infraction commise sur le territoire de l’État membre du siège d’une entreprise, infligée par les autorités compétentes d’un autre État membre, dans lequel cette infraction a été constatée »

Dans l’affaire C‑513/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Amtsgericht Köln (tribunal de district de Cologne, Allemagne), par décision du 31 juillet 2017, parvenue à la Cour le 22 août 2017, dans la procédure engagée par

Josef Baumgartner,

en présence de :

Bundesamt für Güterverkehr,

Staatsanwaltschaft Köln,

LA COUR (septième chambre),

composée de M. A. Rosas (rapporteur), président de chambre, Mme A. Prechal et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général : M. M. Bobek,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

–        pour le Bundesamt für Güterverkehr, par M. A. Marquardt, en qualité d’agent,

–        pour le gouvernement hellénique, par Mmes M. Tassopoulou et D. Tsagkaraki, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement autrichien, par Mme C. Pesendorfer, en qualité d’agent,

–        pour la Commission européenne, par M. G. Braun et Mme J. Hottiaux, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 19, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement (CE) no 561/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, relatif à l’harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route, modifiant les règlements (CEE) no 3821/85 et (CE) no 2135/98 du Conseil et abrogeant le règlement (CEE) no 3820/85 du Conseil (JO 2006, L 102, p. 1).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure sur l’opposition formée par M. Josef Baumgartner contre une amende infligée à celui-ci en sa qualité de représentant de Transporte Josef Baumgartner GmbH & Co KG (ci-après  « la société ») ayant son siège en Autriche, par le Bundesamt für Güterverkehr (Office fédéral du transport de marchandises, Allemagne) en raison de la violation du règlement no 561/2006, qui aurait été commise dans l’État membre du siège de l’entreprise.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

3        Aux termes des considérants 14, 19 et 26 du règlement no 561/2006 :

« (14)      Afin de garantir l’efficacité de l’exécution, il est indispensable que les autorités compétentes soient en mesure, lors des contrôles routiers et après une période transitoire, de s’assurer que les durées de conduite et les temps de repos de la journée en cours et des vingt-huit jours précédents ont été correctement respectés.

[...]

(19)      En vue de l’augmentation des transports internationaux de marchandises et de voyageurs, il est souhaitable que, dans l’intérêt de la sécurité routière et d’un meilleur déroulement des contrôles routiers et des contrôles effectués dans les locaux des entreprises, les durées de conduite, les temps de repos et les pauses commencés dans d’autres États membres ou dans des pays tiers soient pris en compte et qu’il soit établi si les règles pertinentes ont été entièrement et correctement respectées.

[...]

(26)      Les États membres devraient établir des règles concernant les sanctions frappant les infractions au présent règlement et veiller à ce qu’elles soient appliquées. Ces sanctions doivent avoir un caractère effectif, proportionné, dissuasif et non discriminatoire. L’immobilisation possible du véhicule en cas d’infraction grave devrait également figurer dans l’échelle commune des mesures que les États membres peuvent appliquer. Les dispositions du présent règlement relatives aux sanctions ou aux procédures n’affectent pas les règles nationales concernant la charge de la preuve. »


4        L’article 10, paragraphe 5, du règlement no 561/2006 dispose :

« a)      Toute entreprise de transport exploitant des véhicules équipés d’un appareil de contrôle conforme à l’annexe I B du règlement (CEE) no 3821/85 [du Conseil, du 20 décembre 1985, concernant l’appareil de contrôle dans le domaine des transports par route (JO 1985, L 370, p. 8),] et entrant dans le champ d’application du présent règlement :

i)      veille à ce que toutes les données soient téléchargées à partir de l’unité embarquée et de la carte de conducteur aussi régulièrement que l’exige l’État membre et que les données pertinentes soient téléchargées plus fréquemment pour faire en sorte que toutes les activités effectuées par ou pour cette entreprise soient téléchargées ;

ii)      veille à ce que toutes les données téléchargées à partir de l’unité embarquée et de la carte de conducteur soient conservées au moins douze mois après l’enregistrement et qu’au cas où un agent de contrôle en ferait la demande, ces données soient consultables, directement ou à distance, dans les locaux de l’entreprise.

b)      Aux fins du présent paragraphe, le terme “téléchargées” est interprété conformément à la définition figurant au Chapitre I, point s), de l’annexe I B du règlement (CEE) no 3821/85.

c)      La fréquence maximale à laquelle les données pertinentes sont téléchargées en application du point a) i), est fixée par la Commission conformément à la procédure visée à l’article 24, paragraphe 2. »

5        L’article 19, paragraphes 1 et 2, du règlement no 561/2006 est libellé comme suit :

« 1.       Les États membres établissent des règles concernant les sanctions pour infraction au présent règlement et au règlement (CEE) no 3821/85 et prennent toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce qu’elles soient appliquées. Ces sanctions doivent être effectives, proportionnées, dissuasives et non discriminatoires. Aucune infraction au présent règlement ou au règlement (CEE) no 3821/85 ne donne lieu à plus d’une sanction ou plus d’une procédure. Les États membres notifient à la Commission ces mesures ainsi que le régime des sanctions au plus tard à la date visée à l’article 29, second alinéa. La Commission informe les États membres en conséquence.

2.      Tout État membre permet aux autorités compétentes d’infliger une sanction à une entreprise et/ou à un conducteur pour une infraction au présent règlement constatée sur son territoire et n’ayant pas déjà donné lieu à sanction, même si l’infraction a été commise sur le territoire d’un autre État membre ou d’un pays tiers.

À titre d’exception, lorsqu’est constatée une infraction :

–        qui n’a pas été commise sur le territoire de l’État membre concerné, et

–        qui a été commise par une entreprise établie ou par un conducteur dont le lieu d’emploi se trouve dans un autre État membre ou un pays tiers,

un État membre peut, jusqu’au 1er janvier 2009, au lieu d’imposer une sanction, notifier les faits constitutifs de l’infraction à l’autorité compétente de l’État membre ou du pays tiers dans lequel l’entreprise est établie ou dans lequel le conducteur a son lieu d’emploi. »

6        L’article 13 du règlement no 3821/85, tel que modifié par le règlement (UE) no 1266/2009 de la Commission, du 16 décembre 2009 (JO 2009, L 339, p. 3), prévoyait :

« L’employeur et les conducteurs veillent au bon fonctionnement et à la bonne utilisation, d’une part, de l’appareil de contrôle et, d’autre part, de la carte de conducteur au cas où le conducteur est appelé à conduire un véhicule équipé d’un appareil de contrôle conforme à l’annexe I B. »

7        L’annexe I B, chapitre I, dudit règlement disposait :

« Aux fins de la présente annexe, on entend par :

l)      “carte d’entreprise” : une carte tachygraphique délivrée par les autorités d’un État membre au propriétaire ou au détenteur de véhicules équipés d’un appareil de contrôle.

La carte d’entreprise identifie l’entreprise et permet l’affichage, le téléchargement et l’impression des données stockées dans l’appareil de contrôle verrouillé par cette entreprise ou qui n’a été verrouillé par aucune entreprise ;

[...]

s)      “téléchargement” : la copie, avec signature numérique, d’une partie ou de la totalité d’un ensemble de données stockées sur la mémoire de l’unité embarquée sur le véhicule ou sur la mémoire d’une carte tachygraphique, ces données étant nécessaires pour établir la conformité aux dispositions du règlement (CE) no 561/2006.

[...] »


 Le droit allemand

8        L’article 2, paragraphe 5, deuxième phrase, de la Verordnung zur Durchführung des Fahrpersonalgesetzes (règlement mettant en œuvre la loi relative aux équipages des transports routiers, ci-après la « Fahrpersonalverordnung ») prévoit, en substance, que, en ce qui concerne les véhicules relevant du champ d’application du règlement no 561/2006, l’entrepreneur doit faire en sorte que toutes les données des cartes de conducteur soient téléchargées au plus tard 28 jours après l’enregistrement dans l’entreprise.

9        L’article 5 du Gesetz über Ordnungswidrigkeiten (loi relative aux infractions administratives, ci-après l’« OWiG ») dispose :

« À moins que la loi n’en dispose autrement, ne peuvent être sanctionnées que les infractions commises dans le champ d’application territorial de la présente loi ou en dehors de celui-ci, sur un navire ou dans un aéronef autorisé à porter le drapeau ou la marque de nationalité de la République fédérale d’Allemagne. »

10      L’article 9 de l’OWiG énonce, en substance, que le représentant d’une personne physique ou morale peut être sanctionné pour des faits remplissant les conditions d’une infraction commise par la personne représentée.

 Le litige au principal et la question préjudicielle

11      Lors d’un contrôle routier effectué le 19 novembre 2015 en Allemagne, les autorités compétentes ont constaté deux infractions au règlement no 561/2006 sur l’un des véhicules appartenant à la société.

12      D’une part, les données de la carte de conducteur n’avaient pas été téléchargées dans le délai fixé à l’article 10, paragraphe 5, sous a), i) du règlement no 561/2006, lu en combinaison avec l’article 2, paragraphe 5, de la Fahrpersonalverordnung. D’autre part, la carte d’entreprise n’avait pas été introduite dans l’appareil de contrôle dudit véhicule.

13      Le 15 février 2016, M. Baumgartner, en tant que représentant de la société, a été invité à prendre position sur les griefs ainsi reprochés. Sans réaction de l’intéressé, l’Office fédéral du transport de marchandises a décidé de lui infliger une amende de 406,25 euros pour ces deux infractions.

14      M. Baumgartner a formé opposition à cette décision devant ledit office, en contestant la compétence territoriale de celui-ci pour sanctionner les infractions constatées.

15      M. Baumgartner a soutenu que, en vertu de l’article 2, paragraphe 5, deuxième phrase, de la Fahrpersonalverordnung, l’obligation de télécharger les données de la carte de conducteur et de placer un verrouillage d’entreprise n’est imposée qu’au siège de l’entreprise. La société étant établie en Autriche, M. Baumgartner considère que l’infraction reprochée a été commise en dehors du champ d’application territorial de l’article 5 de l’OWiG.

16      Dans la décision de renvoi, l’Amtsgericht Köln (tribunal de district de Cologne, Allemagne), qui est appelé à statuer sur l’opposition formée par M. Baumgartner, observe que l’Oberlandesgericht Köln (tribunal régional supérieur de Cologne, Allemagne), dans une ordonnance du 31 juillet 2017, avait, dans une affaire similaire, retenu l’interprétation de la réglementation nationale exposée au point précédent.

17      Par ailleurs, dans cette ordonnance, l’Oberlandesgericht Köln (tribunal régional supérieur de Cologne) aurait refusé de reconnaître aux autorités allemandes un pouvoir de sanction fondé sur l’article 19, paragraphe 2, du règlement no 561/2006.

18      Tout en reconnaissant que le règlement no 561/2006 était directement applicable, répondant ainsi à la notion de « loi », au sens de l’expression « [à] moins que la loi n’en dispose autrement », qu’emploie l’article 5 de l’OWiG, l’Oberlandesgericht Köln (tribunal régional supérieur de Cologne) aurait considéré que l’article 19, paragraphe 2, dudit règlement devait être interprété en ce sens que l’État membre ayant constaté une infraction habilitait les autorités d’un autre État membre à sanctionner celle-ci, indépendamment du lieu où elle avait été commise, de telle sorte que l’Office fédéral du transport de marchandises n’était pas compétent, en l’occurrence, pour sanctionner lui-même l’infraction constatée.

19      Toutefois, selon la juridiction de renvoi, l’article 19, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement no 561/2006 doit être interprété en ce sens que cette disposition habilite les États membres à sanctionner des infractions audit règlement constatées sur leur territoire, même si ces infractions ont été commises sur le territoire d’un autre État membre.

20      Ladite juridiction considère que cette interprétation est corroborée par l’article 19, paragraphe 2, second alinéa, du règlement no 561/2006. En vertu de cette disposition, lorsqu’une infraction qui n’avait pas été commise sur son territoire était constatée, un État membre pouvait, jusqu’au 1er janvier 2009, au lieu d’infliger une sanction, notifier les faits constitutifs de celle-ci à l’autorité compétente de l’État membre ou du pays tiers dans lequel l’entreprise était établie ou dans lequel le conducteur avait son lieu d’emploi.

21      Dans ces conditions, l’Amtsgericht Köln (tribunal de district de Cologne) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 19, paragraphe 2, [premier alinéa], du règlement no 561/2006 doit-il être interprété en ce sens que seul l’État membre sur le territoire duquel une entreprise est établie peut infliger une sanction à ladite entreprise ou à un dirigeant de celle-ci, au titre des articles 30, 9 et 130 de l’[OWiG], en raison d’une infraction administrative commise au siège de l’entreprise ? Ou les autres États membres sont–ils également habilités à sanctionner l’infraction administrative si celle-ci a été constatée sur leur territoire ? »

 Sur la question préjudicielle

22      Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 19, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement no 561/2006 doit être interprété en ce sens qu’il habilite directement les autorités compétentes d’un État membre à infliger une sanction à une entreprise ou à un dirigeant de celle-ci pour une infraction audit règlement constatée sur son territoire, même si cette infraction a été commise sur le territoire d’un autre État membre, dans lequel cette entreprise a son siège.

23      Selon une jurisprudence constante de la Cour, il y a lieu, pour l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (voir, en ce sens, arrêt du 20 décembre 2017, Vaditrans, C‑102/16, EU:C:2017:1012, point 20 et jurisprudence citée).

24      En vertu de l’article 19, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement no 561/2006, tout État membre permet aux autorités compétentes d’infliger une sanction à une entreprise et/ou à un conducteur pour une infraction à ce règlement constatée sur son territoire et n’ayant pas déjà donné lieu à sanction, même si l’infraction a été commise sur le territoire d’un autre État membre ou d’un pays tiers.

25      Cependant, ainsi que l’ont relevé le gouvernement autrichien et la Commission dans leurs observations, les interprétations retenues par la juridiction de renvoi, d’une part, et par le requérant au principal, d’autre part, sont admissibles sur un plan grammatical, dès lors que ladite disposition ne mentionne pas de manière univoque quel est l’État membre dont dépendent les « autorités compétentes ».

26      La Cour a déjà considéré que l’article 19, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement no 561/2006 prévoit explicitement la possibilité, pour les autorités compétentes d’un État membre, d’infliger une sanction à une entreprise et/ou à un conducteur pour une infraction à ce règlement, même si cette infraction a été commise sur le territoire d’un autre État membre ou d’un pays tiers (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2016, Eurospeed, C‑287/14, EU:C:2016:420, point 33).

27      Par ailleurs, la Cour a jugé que, outre l’amélioration des conditions de travail du personnel du secteur routier, le règlement no 561/2006 poursuit également l’objectif d’améliorer la sécurité routière en général (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2016, Eurospeed, C‑287/14, EU:C:2016:420, point 39).

28      En vue de cet objectif et afin de garantir l’effectivité de l’exécution des dispositions du règlement no 561/2006, ainsi que le confirme le considérant 14 de ce dernier, il est indispensable que les autorités compétentes soient en mesure, lors des contrôles routiers et après une période transitoire, de s’assurer que les durées de conduite et les temps de repos de la journée en cours et des vingt-huit jours précédents ont été correctement respectés.

29      Ainsi que l’a relevé l’Office fédéral du transport de marchandises dans ses observations, en vue d’une mise en œuvre efficace du règlement no 561/2006 dans l’intérêt de la sécurité routière, il n’est pas seulement nécessaire de contrôler le respect des dispositions de ce règlement, mais il convient également que les États membres puissent infliger des sanctions effectives, proportionnées et dissuasives en cas de constatation d’une infraction, ainsi que le prévoit l’article 19, paragraphe 1, de ce règlement.

30      En outre, il y a lieu de constater que, eu égard au caractère transfrontalier des activités de transport par route, une interprétation de l’article 19, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement no 561/2006, selon laquelle les États membres permettent à leurs autorités compétentes d’infliger une sanction pour une infraction constatée sur leur territoire, même si cette infraction a été commise sur le territoire d’un autre État membre ou d’un pays tiers, est plus à même de répondre aux objectifs poursuivis par ce règlement.

31      En revanche, une interprétation de l’article 19, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement no 561/2006 selon laquelle un État membre ayant constaté une infraction commise sur le territoire d’un autre État membre ou d’un pays tiers devrait permettre, au moyen d’une autorisation, aux autorités compétentes d’un autre État membre de sanctionner cette infraction, quel que soit le lieu de la commission de celle-ci, ne saurait répondre auxdits objectifs.

32      À cet égard, la Cour a déjà jugé qu’un État membre sur le territoire duquel une infraction au règlement no 561/2006 a été commise est, en tout état de cause, habilité à sanctionner celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2016, Eurospeed, C‑287/14, EU:C:2016:420, point 33), de telle sorte qu’il n’est pas requis qu’une autorisation soit donnée par une autorité compétente d’un autre État membre.

33      L’interprétation exposée au point 31 du présent arrêt reviendrait à habiliter les autorités compétentes d’un État membre à sanctionner une infraction qui n’a été ni commise ni constatée sur le territoire de cet État membre. Or, il ne saurait être présumé que le législateur de l’Union ait entendu accorder un tel champ d’application à l’article 19, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement no 561/2006.

34      Au surplus, s’agissant de l’article 19, paragraphe 2, second alinéa, du règlement no 561/2006, cette disposition prévoyait, à titre d’exception, que lorsque avait été constatée une infraction qui n’avait pas été commise sur le territoire de l’État membre concerné, et qui avait été commise par une entreprise établie ou par un conducteur dont le lieu d’emploi se trouvait dans un autre État membre ou un pays tiers, l’État membre concerné par cette infraction pouvait notifier les faits constitutifs de l’infraction à l’autorité compétente de l’État membre ou du pays tiers dans lequel l’entreprise était établie ou dans lequel le conducteur avait son lieu d’emploi. Cette disposition est fondée sur l’hypothèse selon laquelle l’État membre concerné, qui pouvait, jusqu’au 1er janvier 2009, « au lieu d’imposer une sanction », notifier ces faits, était l’État membre sur le territoire duquel l’infraction avait été constatée.

35      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question posée que l’article 19, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement no 561/2006 doit être interprété en ce sens qu’il habilite directement les autorités compétentes d’un État membre à infliger une sanction à une entreprise ou à un dirigeant de celle-ci pour une infraction audit règlement constatée sur son territoire et n’ayant pas déjà donné lieu à sanction, même si cette infraction a été commise sur le territoire d’un autre État membre, dans lequel cette entreprise a son siège.

 Sur les dépens

36      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) dit pour droit :

L’article 19, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement (CE) no 561/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, relatif à l’harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route, modifiant les règlements (CEE) no 3821/85 et (CE) no 2135/98 du Conseil et abrogeant le règlement (CEE) no 3820/85 du Conseil, doit être interprété en ce sens qu’il habilite directement les autorités compétentes d’un État membre à infliger une sanction à une entreprise ou à un dirigeant de celle-ci pour une infraction audit règlement constatée sur son territoire et n’ayant pas déjà donné lieu à sanction, même si cette infraction a été commise sur le territoire d’un autre État membre, dans lequel cette entreprise a son siège.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.