Language of document : ECLI:EU:T:2018:913

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

12 décembre 2018 (*)

« Accès aux documents – Documents relatifs à la correspondance échangée entre la Commission et les entreprises ou fabricants automobiles au sujet du réfrigérant R1234yf utilisé dans les véhicules à moteur – Documents non répertoriés – Moyen nouveau soulevé en cours d’instance – Irrecevabilité – Mesure d’instruction ordonnant la production des documents litigieux conformément à l’article 104 du règlement de procédure – Dérogation au principe du contradictoire – Règlement (CE) no 1049/2001 – Exception relative à la protection des intérêts commerciaux – Intérêt public à la divulgation – Mise en balance – Règlement (CE) no 1367/2006 – Article 6, paragraphe 1 – Intérêt public supérieur à la divulgation d’informations environnementales ou ayant trait aux émissions dans l’environnement – Présomption générale – Refus partiel d’accès – Non-lieu à statuer »

Dans l’affaire T‑498/14,

Deutsche Umwelthilfe eV, établie à Radolfzell (Allemagne), représentée par Mes R. Klinger et R. Geulen, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par Mmes F. Clotuche-Duvieusart et J. Vondung, puis par Mme Clotuche-Duvieusart et M. H. Krämer, en qualité d’agents, assistées initialement de Mes R. Van der Hout et A. Köhler, puis de Mes Van der Hout et C. Wagner, avocats,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation partielle de la décision GESTDEM 2014/547 de la Commission, du 2 juin 2014, confirmant le refus d’accès à l’intégralité des documents relatifs à l’échange de correspondance entre la Commission, d’une part, et les entreprises Honeywell et DuPont ou des constructeurs automobiles, d’autre part, durant la période allant de septembre 2011 à avril 2012 et de septembre 2012 à la fin de janvier 2014, au sujet du réfrigérant R1234yf utilisé dans les véhicules à moteur,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. S. Gervasoni, président, L. Madise (rapporteur) et R. da Silva Passos, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Contexte factuel

1        La présente affaire s’inscrit dans le contexte du débat sur les réfrigérants de substitution, respectueux de l’environnement, destinés à être utilisés dans des véhicules à moteur. Ce débat s’est engagé lors de l’entrée en vigueur de la directive 2006/40/CE du Parlement européen et du Conseil, du 17 mai 2006, concernant les émissions provenant des systèmes de climatisation des véhicules à moteur et modifiant la directive 70/156/CEE du Conseil (JO 2006, L 161, p. 12, ci-après la « directive MAC »).

2        Selon les dispositions de la directive MAC, les États membres ne peuvent plus, depuis le 1er janvier 2011, accorder la réception UE ou la réception nationale à tout type de véhicule équipé d’un système de climatisation conçu pour contenir des gaz à effet de serre fluorés dont le potentiel de réchauffement planétaire (PRP) est supérieur à 150. À compter du 1er janvier 2017, ils doivent, en outre, refuser l’immatriculation et interdire la vente et la mise en circulation des véhicules neufs équipés d’un système de climatisation conçu pour contenir des gaz à effet de serre fluorés d’un dont le PRP est supérieur à 150. La directive MAC a, ainsi, de facto interdit l’utilisation, dans les systèmes de climatisation des véhicules à moteur, du réfrigérant R134a, au motif que son PRP, égal à 1 430, était nettement supérieur à la valeur autorisée par cette directive, et était donc considéré comme étant nocif pour l’environnement.

3        La directive MAC n’a, en revanche, pas imposé l’utilisation future d’un réfrigérant déterminé, mais a laissé à l’industrie automobile le soin de choisir la solution technique appropriée. À cet égard, l’association allemande de l’industrie automobile (VDA) a, en 2009, opté pour l’agent chimique R1234yf en tant que réfrigérant de substitution. Toutefois, en raison de difficultés d’approvisionnement concernant ce réfrigérant, la Commission européenne a accordé un délai supplémentaire pour la mise en conformité avec la directive MAC, en ce sens que l’utilisation du réfrigérant R134a pour les nouveaux types de véhicules a été autorisée jusqu’au 31 décembre 2012, soit au-delà de la date prévue dans la directive MAC. À compter du 1er janvier 2013, les États membres étaient toutefois tenus de ne plus accorder de réception UE ou de réception nationale aux véhicules équipés d’un système de climatisation conçu pour contenir des gaz à effet de serre fluorés dont le PRP était supérieur à 150.

4        En septembre 2012, un constructeur automobile, Daimler AG, à la suite d’une analyse réalisée par ses soins, a mis en évidence que, en cas d’incendie, le réfrigérant R1234yf libérait des gaz hautement toxiques tels que le fluorure d’hydrogène (HF) et le fluorure de carbonyle (COF2) et a exclu l’utilisation de ce réfrigérant pour ses propres véhicules, en continuant donc d’employer le réfrigérant R134a, même pour ses nouveaux modèles de voitures particulières.

5        En décembre 2012, le gouvernement allemand a informé la Commission de son intention d’effectuer de nouveaux essais sur certains modèles de voitures particulières afin de vérifier la sûreté du réfrigérant R1234yf. Dans ce cadre, il a prié la Commission de prolonger de six mois la possibilité d’utiliser le réfrigérant R134a. La Commission n’a pas accédé à cette demande et, en février 2013, a invité les autres États membres à lui faire un rapport de la situation sur leur marché national. À cet égard, quelques États membres ont informé la Commission de problèmes concernant Daimler, au motif que ses voitures particulières n’étaient pas conformes à la directive MAC.

6        En mai 2013, le Kraftfahrt-Bundesamt (office fédéral pour la circulation des véhicules à moteur, Allemagne, ci-après le « KBA »), qui est l’autorité compétente en matière de réception de la République fédérale d’Allemagne ainsi que l’autorité responsable de la sécurité des produits, a octroyé à Daimler, à la suite d’une demande de ce dernier, pour plusieurs de ses modèles de véhicules, l’extension de réceptions existantes au titre de la directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 septembre 2007, établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des systèmes, des composants et des entités techniques destinés à ces véhicules (JO 2007, L 263, p. 1, ci-après la « directive-cadre sur les véhicules à moteur »). Ces véhicules ont bénéficié ainsi de facto d’une dérogation à l’obligation de respecter intégralement les prescriptions de la directive MAC jusqu’au 1er janvier 2017. En 2013, Daimler produisait donc certains modèles de voitures particulières qui n’étaient pas conformes à la réception UE et qui, selon la Commission, ne pouvaient par conséquent être ni vendus ni immatriculés. Le constructeur fabriquait en outre plusieurs modèles de voitures particulières pour lesquels une extension des réceptions existantes avait été accordée, contrairement aux dispositions de la directive MAC.

7        Le 10 juin 2013, la Commission a engagé la procédure EU Pilot 5160/11 à l’encontre de la République fédérale d’Allemagne afin d’établir dans quelle mesure cet État membre avait respecté la directive MAC et la directive-cadre sur les véhicules à moteur.

8        Le 7 août 2013, le KBA a publié un rapport préliminaire des essais d’inflammabilité de véhicules équipés d’un système de climatisation utilisant le réfrigérant R1234yf et des résultats de l’exposition au fluorure d’hydrogène. Le 31 octobre 2013, le KBA a publié un rapport final. Selon ces rapports, publiés et transmis à la Commission, les essais d’inflammabilité et concernant l’exposition au fluorure d’hydrogène dans le cas de véhicules équipés d’un système de climatisation utilisant le réfrigérant R1234yf excluaient tout risque général pour la sécurité en cas d’utilisation de ce réfrigérant, y compris en ce qui concernait son inflammabilité. Il ressortait du dernier rapport que le réfrigérant R1234yf ne s’enflammait que dans des situations extrêmes et que la prise immédiate de mesures par le KBA ne s’imposait donc pas concernant les véhicules à moteur soumis aux essais, puisque la loi sur la sécurité des appareils et des produits, qui transposait la directive 2001/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 3 décembre 2001, relative à la sécurité générale des produits (JO 2002, L 11, p. 4), était respectée.

9        Le Centre commun de recherche de la Commission (JRC) a vérifié les méthodes appliquées par le KBA, les constructeurs automobiles et la société des ingénieurs de l’automobile (Society of Automotive Engineers, SAE) concernant l’utilisation du réfrigérant R1234yf dans les systèmes de climatisation des véhicules à moteur. Un groupe de travail s’est réuni le 20 novembre, le 11 décembre 2013 et le 24 janvier 2014. La requérante, Deutsche Umwelthilfe eV, a également contribué à ces travaux et, lors de la troisième réunion, a présenté son étude la plus récente sur la dangerosité du réfrigérant R1234yf. Selon cette étude, le nouveau réfrigérant R1234yf serait hautement nocif pour la santé, dans la mesure où, en cas d’incendie d’automobiles, il produirait des gaz toxiques tels que le fluorure d’hydrogène (HF) et le fluorure de carbonyle (COF2) et où une exposition de 30 à 60 minutes à une quantité de 42 mg/m3 de fluorure d’hydrogène (50 ppm) pourrait être mortelle pour des humains. De même, des expositions moindres présenteraient des risques non négligeables pour la santé.

10      Le 27 janvier 2014, la Commission a adressé une lettre de mise en demeure à la République fédérale d’Allemagne afin d’engager par la suite, le cas échéant, une procédure d’infraction au titre de l’article 258 TFUE contre elle (procédure NIF 2013/2254). Elle a considéré que l’Allemagne avait enfreint la directive MAC en s’abstenant de prendre des mesures à l’encontre de Daimler à l’aide des moyens et des procédures prévus par la directive-cadre sur les véhicules à moteur, alors que ce constructeur avait mis sur le marché des voitures particulières non conformes au droit de l’Union. Par ailleurs, cet État membre avait, selon elle, également violé la directive MAC en accordant l’extension de réceptions existantes pour certains modèles de voitures particulières de Daimler, permettant ainsi à ce constructeur de contourner les prescriptions de la directive MAC jusqu’au 1er janvier 2017.

11      Le 7 mars 2014, la Commission a publié le rapport scientifique et technique du JRC relatif à l’analyse des aspects de sécurité concernant l’utilisation du réfrigérant R1234yf dans les systèmes de climatisation des véhicules à moteur. Ce rapport a constaté que, eu égard au cadre légal en vigueur en matière de sécurité générale des produits, aucun élément ne permettait de conclure à l’existence d’un risque grave pour la sécurité concernant l’utilisation du réfrigérant R1234yf dans les systèmes de climatisation des véhicules à moteur, dans des conditions d’utilisation normales et prévisibles. Le rapport du JRC a ainsi confirmé le rapport final du KBA.

12      Le 1er avril 2014, le rapport du JRC a été examiné par les États membres au sein du comité technique pour les véhicules à moteur. L’avis de la République fédérale d’Allemagne, selon lequel des analyses supplémentaires concernant le réfrigérant R1234yf étaient nécessaires, a été confirmé. Il a par ailleurs été constaté que tous les constructeurs automobiles, sauf Daimler, avaient trouvé des solutions techniques permettant de garantir la sécurité générale. Aucun autre État membre n’a exprimé de préoccupations en matière de sécurité. La Commission a confirmé qu’aucune autre mesure réglementaire ne serait proposée.

13      La demande d’accès aux documents de la requérante s’inscrit dans le contexte décrit ci-dessus. En effet, ainsi que l’explique la Commission, les documents demandés concernent, entre autres, l’état d’avancement de la mise en application de la directive MAC et sont également liés à l’infraction présumée reprochée à la République fédérale d’Allemagne.

 Antécédents du litige

14      Le 30 janvier 2014, la requérante, une association de protection de l’environnement et des consommateurs ayant la capacité d’ester en justice, a sollicité l’accès à l’échange de correspondances entre la Commission, d’une part, et les entreprises Honeywell et DuPont ou des constructeurs automobiles, d’autre part, ayant eu lieu entre septembre 2011 et avril 2012 inclus, ainsi qu’entre septembre 2012 et la fin de janvier 2014, au sujet du réfrigérant R1234yf. Cette demande a été enregistrée par la direction générale (DG) « Entreprises et Industrie » de la Commission sous le numéro GESTDEM 2014/547.

15      Le 3 février 2014, la DG « Entreprises et Industrie » a accusé réception de la demande et, le 10 février 2014, a prié la requérante d’en préciser l’objet.

16      Par courrier électronique du 11 février 2014, la requérante a précisé sa demande en indiquant qu’elle souhaitait obtenir l’accès à l’ensemble de la correspondance et des courriers électroniques ainsi qu’à toute autre correspondance enregistrée et archivée sous forme écrite (imprimée ou numérique), telle que, par exemple, des procès-verbaux de discussions. Elle a ajouté que, par « Commission européenne », elle visait la DG « Entreprises et Industrie », la DG « Action pour le climat » de la Commission, le JRC et le vice-président de la Commission, M. Tajani, ainsi que le cabinet de ce dernier.

17      Par courrier électronique du 4 mars 2014, la DG « Entreprises et Industrie » a informé la requérante qu’elle devait prolonger le délai de réponse à sa demande au titre de l’article 7, paragraphe 3, du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), étant donné que certaines parties des documents demandés provenaient de tiers, qui devaient être consultés, ainsi que des autres services de la Commission. À cet égard, la DG « Action pour le climat » a informé la DG « Entreprises et Industrie » qu’elle ne disposait d’aucune correspondance avec les entreprises indiquées. Le JRC a répondu séparément à la requérante.

18      Par courrier du 28 mars 2014 (ci-après la « décision initiale »), la DG « Entreprises et Industrie » de la Commission a indiqué à la requérante qu’elle avait établi une liste de 98 documents se référant uniquement à la correspondance entre la DG « Entreprises et Industrie » ou le vice‑président, M. Tajani et son cabinet, d’une part, et les entreprises Honeywell et DuPont ou les constructeurs automobiles, d’autre part. La liste des 98 documents a été communiquée à la requérante. En outre, la Commission, sur la base de son examen et en tenant compte également des observations des tiers concernés, a octroyé à la requérante l’accès complet à 88 des 98 documents, ainsi qu’un accès partiel à l’un de ces documents, à savoir le document no 34.

19      En revanche, la Commission a refusé l’accès aux documents nos 10, 26, 46 et 65 en invoquant l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, à savoir la protection d’intérêts commerciaux. Elle a invoqué cette même exception en ce qui concernait la partie du document no 34 qui n’avait pas été divulguée. En outre, elle a refusé l’accès aux documents nos 74, 76, 80, 88 et 90, portant tous sur la correspondance entre Daimler et la Commission, en invoquant l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, à savoir la protection des objectifs des activités d’enquête. Enfin, la Commission a également examiné, au regard de l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001, la possibilité d’accorder l’accès partiel à certains des documents refusés. Cependant, à l’exception du document no 34, elle a refusé un tel accès partiel.

20      Le 9 avril 2014, la requérante a, notamment, introduit, au titre de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, une demande confirmative d’accès aux documents.

21      Cette demande confirmative portait, premièrement, sur les documents répertoriés par la Commission et dont l’accès avait été refusé ou accordé partiellement (voir point 19 ci-dessus) et, deuxièmement, sur des documents non répertoriés par la Commission, mais dont l’existence ressortait, selon la requérante, des documents auxquels cette dernière avait eu accès. En effet, dans sa demande confirmative, la requérante soulignait que les documents nos 12, 16, 27, 28, 34, 37, 45, 73, 84, qui lui avaient été communiqués, contenaient des références à des réunions entre les entreprises Honeywell et DuPont et des représentants de la Commission et que les documents nos 8, 48, 52, 84, 91, auxquels elle avait également eu accès, portaient sur des discussions entre des constructeurs automobiles et la Commission au cours de la période pertinente. Plus précisément, la requérante faisait valoir, d’une part, qu’il ressortait des indications claires, contenues dans les documents susmentionnés qui lui avaient été communiqués, que des notes avaient été prises lors des rencontres, mentionnées dans ces documents, entre la Commission et les entreprises Honeywell et DuPont ou entre la Commission et des constructeurs automobiles. D’autre part, la requérante soutenait qu’il était invraisemblable que la Commission n’eût pas documenté lesdites rencontres. Enfin, la requérante justifiait sa demande en invoquant l’existence d’un intérêt public supérieur à l’accès aux documents en question, résultant de l’importance de rendre public tant les dangers liés à l’utilisation du réfrigérant R1234yf que les problématiques soulevées par la transposition de la directive MAC.

22      Par décision GESTDEM 2014/547, du 2 juin 2014 (ci-après la « décision attaquée »), le secrétariat général de la Commission a, notamment, confirmé la décision initiale de la DG « Entreprises et Industrie » contenue dans le courrier du 28 mars 2014 et refusé à la requérante l’accès aux documents indiqués au point 19 ci-dessus pour les mêmes raisons que celles qu’elle avait déjà indiquées dans ledit courrier. En outre, la requérante a été informée du fait que la Commission n’avait pas trouvé d’autres documents que ceux répertoriés.

 Procédure et conclusions des parties

23      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 juillet 2014, la requérante a introduit le présent recours.

24      Dans le mémoire en défense déposé au greffe du Tribunal le 29 septembre 2014, la Commission a demandé la suspension de la procédure dans l’attente du prononcé de la décision de la Cour mettant fin à l’instance dans l’affaire Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe (C‑673/13 P, EU:C:2016:889).

25      Le 4 novembre 2014, la requérante a déposé la réplique au greffe du Tribunal.

26      Par ordonnance du 25 novembre 2014, le président de la deuxième chambre du Tribunal, les parties entendues, a ordonné, en application de l’article 77, sous d), du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, la suspension de la procédure dans la présente affaire dans l’attente de la décision de la Cour mettant fin à l’instance dans l’affaire Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe (C‑673/13 P, EU:C:2016:889).

27      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté, par décision du 7 octobre 2016, à la neuvième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

28      Le 23 novembre 2016, la Coura rendu son arrêtCommission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe (C‑673/13 P, EU:C:2016:889).

29      Le 30 janvier 2017, la Commission a déposé la duplique au greffe du Tribunal.

30      Par une mesure d’organisation de la procédure du 17 mai 2017, la requérante a été invitée à présenter ses observations sur les conséquences éventuelles à tirer, dans le cadre de la présente affaire, de l’arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe (C‑673/13 P, EU:C:2016:889), ce qu’elle a fait le 26 mai 2017.

31      Par décision du président du Tribunal du 14 juin 2017, un juge de la formation de jugement a été remplacé.

32      Le 4 décembre 2017, par le biais d’une mesure d’organisation de la procédure adoptée conformément à l’article 89 du règlement de procédure du Tribunal, le Tribunal a posé des questions aux parties, lesquelles ont répondu dans le délai imparti.

33      Par ordonnance du 14 décembre 2017, prise en application de l’article 91, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, le Tribunal a ordonné à la Commission de produire, dans un délai fixé par le greffe du Tribunal, les documents nos 10, 26, 46 et 65 ainsi que la version intégrale du document no 34, auxquels la Commission avait refusé de donner accès dans la décision attaquée. Dans cette ordonnance, le Tribunal a précisé que, conformément à l’article 104 du règlement de procédure, les documents à produire par la Commission ne seraient pas communiqués à la requérante. Le 16 janvier 2018, la Commission a produit devant le Tribunal les documents en question.

34      Le 18 décembre 2017, la Commission a informé le Tribunal que, le 22 mars 2017, elle avait adopté une nouvelle décision sur la demande d’accès aux documents de la requérante. En raison de cette décision certaines parties du document no 34 initialement occultées avaient été rendues publiques. La Commission a, en outre, informé le Tribunal que la nouvelle version dudit document avait été communiquée à la requérante le 24 mars 2017.

35      Le 8 mai 2018, par le biais d’une mesure d’organisation de la procédure, adoptée conformément à l’article 89, du règlement de procédure, le Tribunal a invité les parties à présenter leurs observations sur la persistance de l’objet du litige, s’agissant des parties du document no 34 rendues publiques. La Commission a déféré à cette demande dans le délai imparti. Elle a fait valoir qu’il était opportun que le Tribunal constate d’office que, s’agissant des parties du document no 34 rendues accessibles à la requérante par décision du 22 mars 2017, le recours était devenu sans objet et qu’il n’y avait plus lieu de statuer. En revanche, la requérante n’a pas présenté ses observations dans le délai imparti.

36      Le Tribunal (neuvième chambre) a décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, de statuer sans phase orale de la procédure.

37      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

38      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur l’étendue du litige

39      Ainsi qu’il ressort des points 19 et 22 ci‑dessus, par la décision attaquée la Commission a refusé, d’une part, l’accès aux documents nos 10, 26, 46 et 65 et à certaines parties du document no 34, en invoquant l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, à savoir la protection d’intérêts commerciaux. D’autre part, elle a refusé l’accès aux documents nos 74, 76, 80, 88 et 90, portant tous sur la correspondance entre Daimler et la Commission, en invoquant l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/200, à savoir la protection des objectifs des activités d’enquête. De plus, elle a refusé l’accès à d’autres documents, dont l’existence ressortirait, selon la requérante, des indications contenues dans les documents nos 8, 12, 16, 27, 28, 34, 37, 45, 48, 52, 73, 84, 91 et 92, qui lui ont été communiqués. Ce refus était motivé par le fait que ces prétendus documents n’existaient pas et que, en tout état de cause, la Commission ne les possédait pas.

40      Nonobstant la formulation ambiguë des conclusions du recours, tendant à l’annulation de l’intégralité de la décision attaquée, la demande en annulation vise uniquement, ainsi que la requérante le précise et comme la Commission le comprend, la partie de la décision attaquée où est refusé l’accès aux documents nos 10, 26, 46 et 65 et au passage occulté du document no 34 (ci-après les « documents répertoriés »). La demande en annulation vise également la partie de cette décision qui mentionne le refus d’accès à d’autres documents non répertoriés dans la liste communiquée à la requérante (ci-après les « documents non répertoriés »), mais dont l’existence ressortirait, selon la requérante, des documents nos 8, 12, 16, 27, 28, 34, 37, 45, 48, 52, 73, 84, 91 et 92.

41      Il s’ensuit que la partie de la décision attaquée où est refusé l’accès aux documents nos 74, 76, 80, 88 et 90, portant tous sur la correspondance entre Daimler et la Commission, en application de l’exception, afférente à la protection des objectifs des activités d’enquête, prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, n’est pas visée par le présent recours.

42      Le recours a donc pour objet l’annulation partielle de la décision attaquée en ce qu’elle refuse, d’une part, l’accès à une partie des documents répertoriés et, d’autre part, l’accès aux documents non répertoriés.

43      À cet égard, ainsi que le souligne à juste titre la Commission, l’annulation partielle d’un acte du droit de l’Union n’est possible que pour autant que les éléments dont l’annulation est demandée soient séparables du reste de l’acte (voir arrêt du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 38 et jurisprudence citée).

44      Dans la mesure où les éléments de la décision attaquée dont la requérante demande l’annulation sont, à l’évidence, séparables du reste de celle-ci, une annulation partielle de la décision attaquée serait possible, en l’espèce, si le recours devait s’avérer fondé.

 Sur la décision attaquée en ce qu’elle concerne les documents non répertoriés

45      Ainsi qu’il a été rappelé aux points 21 et 40 ci-dessus, la requérante demande l’accès aux documents non répertoriés, qui n’apparaissent pas dans la liste de 98 documents qui lui a été communiquée. Dans la réplique, la requérante fait valoir que l’existence des documents non répertoriés ressortirait des documents nos 8, 12, 16, 27, 28, 34, 37, 45, 48, 52, 73, 84, 91 et 92 auxquels elle a eu accès. Afin de contester le refus d’accès aux documents en question, la requérante soutient, d’une part, que tant le principe de transparence, fixé à l’article 11, paragraphe 2, TUE, que les normes et principes que la Commission elle-même s’est engagée à respecter, dans son livre blanc sur la gouvernance européenne (JO 2001, C 287, p. 1), ainsi que dans sa Communication intitulée « Communication de la Commission vers une culture renforcée de consultation et de dialogue – Principes généraux et normes minimales applicables aux consultations engagées par la Commission avec les parties intéressées » [COM(2002) 704 final], imposent à cette institution d’élaborer des documents de consultation qui soient clairs et précis et comportent des informations sur les questions examinées, sur les mécanismes de consultation utilisés, sur les parties consultées et les raisons de la consultation, ainsi que sur les facteurs qui influencent la formulation des politiques. Selon la requérante, ces principes généraux d’une politique de consultation transparente ne sont pas compatibles avec l’affirmation de la Commission selon laquelle il n’est pas obligatoire de prendre des notes lors d’une rencontre avec des représentants d’intérêts. D’autre part, la requérante fait valoir que les contacts entre la Commission et les représentants de l’industrie ont dû intervenir dans le cadre d’une procédure de consultation régulière. En effet, autrement, la Commission aurait enfreint l’obligation d’indépendance à laquelle elle est tenue en vertu de l’article 245, paragraphe 1, et de l’article 17, paragraphe 3, troisième alinéa, TUE. La requérante en déduit que ces contacts ou consultations ont dû être formalisés dans des documents écrits (notes, procès-verbaux, etc.).

46      La Commission, après avoir rappelé que le refus d’accès aux documents non répertoriés est justifié par le fait que ces documents n’existent pas et qu’ils ne sont, en tout état de cause, pas en sa possession, précise que, au regard de la jurisprudence de la Cour, son affirmation bénéficie d’une présomption de légalité.

47      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 76 du règlement de procédure, toute requête doit indiquer l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués (voir arrêts du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission, T‑306/12, EU:T:2014:816, point 107 et jurisprudence citée, et du 4 juin 2015, Versorgungswerk der Zahnärztekammer Schleswig-Holstein/BCE, T‑376/13, EU:T:2015:361, point 23 et jurisprudence citée).

48      Selon une jurisprudence constante, cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent de façon cohérente et compréhensible du texte de la requête même. Si ce texte peut être étayé et complété sur des points spécifiques par des renvois à des passages déterminés de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la requête, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels dans la requête. Il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (voir ordonnance du 9 janvier 2015, Internationaler Hilfsfonds/Commission, T‑482/12, non publiée, EU:T:2015:19, point 38 et jurisprudence citée).

49      Il en résulte que, dans l’examen de la conformité de la requête avec les exigences de l’article 76 du règlement de procédure, le contenu de la réplique est, par hypothèse, dépourvu de pertinence. En particulier, la recevabilité, admise par la jurisprudence, des moyens et des arguments avancés dans la réplique à titre d’ampliation des moyens contenus dans la requête ne saurait être invoquée dans le but de pallier un manquement, intervenu lors de l’introduction du recours, aux exigences de l’article 76 du règlement de procédure, sauf à vider cette dernière disposition de toute portée (voir, en ce sens et par analogie, ordonnance du 9 janvier 2015, Internationaler Hilfsfonds/Commission, T‑482/12, non publiée, EU:T:2015:19, point 39 et jurisprudence citée).

50      De surcroît, l’article 84 du règlement de procédure dispose que la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite, à moins qu’ils ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure (arrêt du 11 mai 2017, Deza/ECHA, T‑115/15, EU:T:2017:329, points 206).

51      Enfin, il y a lieu, d’ajouter que, les exigences de l’article 76 du règlement de procédure étant d’ordre public, il appartient au Tribunal de soulever d’office un moyen pris de l’inobservation de ces exigences (voir arrêt du 14 février 2012, Italie/Commission, T‑267/06, non publié, EU:T:2012:69, point 37 et jurisprudence citée).

52      C’est ainsi que, afin de respecter le principe du contradictoire, les parties ont été invitées, par le biais d’une mesure d’organisation de la procédure, adoptée le 4 décembre 2017, au sens de l’article 89, du règlement de procédure (voir point 32 ci-dessus), à prendre position sur la question de la recevabilité du recours en ce qu’il conclut à l’annulation de la partie de la décision attaquée où est refusé l’accès aux documents non répertoriés. Les parties ont répondu à cette invitation dans le délai imparti.

53      Plus précisément, la requérante fait valoir à cet égard que les documents non répertoriés, mentionnés aux points 44 à 54 de la réplique, sont mentionnés dans la partie de la requête exposant les moyens. Cela ressortirait des indications qui, formulés aux points 44 à 49 de la requête, font référence au contenu et à la date des documents litigieux. Ainsi, le recours serait conforme aux exigences minimales requises par l’article 76 du règlement de procédure.

54      La Commission soutient, d’une part, que la « partie B » de la requête, exposant les moyens du recours, ne contient aucun développement au soutien des conclusions en annulation de la décision attaquée en ce qu’elle refuse l’accès aux documents non répertoriés et, d’autre part, que les considérations formulées dans la réplique ne sont pas de nature à étayer ces conclusions en annulation.

55      À cet égard, il convient d’écarter les arguments de la requérante rappelés au point 53 ci-dessus, selon lesquels les points 44 et suivantsde la requête doivent être interprétés comme faisant référence aux documents non répertoriés. En effet, d’une part, les points 44 et suivants ne contiennent aucune référence explicite à ces documents non répertoriés concernant les procès-verbaux de possibles réunions entre les entreprises Honeywell et DuPont et des représentants de la Commission et dont l’existence ressortirait des documents déjà communiqués à la requérante. D’autre part, lesdits points, qui figurent dans la « partie B » de la requête, ne sauraient être examinés en faisant abstraction des précisions contenues aux points 22 et suivants de la requête, sous le titre « Illégalité matérielle de la décision de la Commission », qui développent l’argumentation au soutien du premier moyen du recours et dont il ressort que les documents auxquels l’accès a été, selon la requérante, illégalement refusé, au regard de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement (CE) no 1367/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 6 septembre 2006, concernantl’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (JO 2006, L 264, p. 13), sont uniquement les documents répertoriés nos 10, 26, 46 et 65 ainsi que les passages occultés du document no 34.

56      Ainsi, il importe d’observer que la requête, même considérée dans son ensemble, ne contient aucune argumentation au soutien d’une demande d’annulation de la partie de la décision attaquée lui refusant l’accès aux documents non répertoriés. La requête se borne à faire référence à ces prétendus documents dans le contexte du rappel des faits. C’est uniquement dans la réplique que la requérante explique clairement qu’elle vise l’annulation de la décision attaquée en ce qu’elle refuse l’accès aux documents non répertoriés et qu’elle développe une argumentation à cet égard (voir point 45 ci‑dessus). La requérante soulève donc un moyen nouveau en cours d’instance.

57      Or, s’il est certes admis, conformément à la jurisprudence rappelée au point 49 ci-dessus, qu’un requérant développe ses moyens dans la réplique, ce droit est néanmoins conditionné par le fait que les moyens en question soient au moins énoncés dans la requête. Dès lors que c’est uniquement au stade de la réplique que la requérante soulève ce moyen et que celui-ci ne se fonde pas sur des éléments qui se sont révélés après l’introduction du recours, il y a lieu de l’écarter comme étant tardif et, partant, irrecevable.

58      Dans la mesure où le moyen soulevé dans la réplique et rappelé au point 45 ci‑dessus est le seul que la requérante invoque au soutien de sa conclusion en annulation de la partie de la décision attaquée qui refuse l’accès aux documents non répertoriés, force est de constater que la requête n’est pas étayée en ce qui concerne lesdites conclusions et ne répond donc pas aux exigences minimales visées à l’article 76 du règlement de procédure.

59      Le fait que, tant dans la défense que dans la duplique, la Commission développe une argumentation pour justifier le refus d’accès aux documents non répertoriés, ne fait pas obstacle à ce que le Tribunal relève d’office que le recours, en ce qu’il conclut à l’annulation de la partie de la décision attaquée ayant refusé l’accès aux documents non répertoriés, ne répond pas aux exigences minimales posées par le statut de la Cour de justice de l’Union européenne et par le règlement de procédure et doit donc être rejeté comme irrecevable.

60      Il convient d’ajouter que, en tout état de cause, les arguments rappelés au point 45 ci‑dessus, invoqués par la requérante dans la réplique pour étayer la conclusion en annulation de la partie de la décision attaquée ayant refusé l’accès aux documents non répertoriés, ne sont pas fondés.

61      À cet égard, tout d’abord, il importe de rappeler que le droit d’accès aux documents des institutions au sens de l’article 2, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001 ne concerne que les documents existants et en possession de l’institution concernée (arrêt du 2 octobre 2014, Strack/Commission, C‑127/13 P, EU:C:2014:2250, point 38). En effet, le règlement no 1049/2001, conformément à son article 2, paragraphe 3, s’applique aux seuls « documents détenus par une institution, c’est-à-dire, établis ou reçus par elle et en sa possession » (arrêt du 25 avril 2007, WWF European Policy Programme/Conseil, T‑264/04, EU:T:2007:114, point 75).

62      Par ailleurs, le droit d’accès du public à un document des institutions ne vise que des documents et non pas des informations entendues de manière plus générale et n’implique pas pour les institutions le devoir de répondre à toute demande de renseignements d’un particulier. En effet, l’accès aux éléments d’information ne peut être assuré que si ces éléments figurent dans des documents, ce qui présuppose l’existence de ceux-ci (voir, en ce sens, arrêt du 25 avril 2007, WWF European Policy Programme/Conseil, T‑264/04, EU:T:2007:114, point 76 et jurisprudence citée).

63      En outre, conformément à la présomption de légalité qui s’attache aux actes de l’Union, l’inexistence d’un document auquel l’accès a été demandé est présumée lorsqu’une affirmation en ce sens est faite par l’institution concernée. Il s’agit néanmoins d’une présomption simple que le demandeur d’accès peut renverser par tous moyens, sur la base d’indices pertinents et concordants [arrêt du 25 juin 2002, British American Tobacco (Investments)/Commission, T‑311/00, EU:T:2002:167, point 35 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt du 12 octobre 2000, JT’s Corporation/Commission, T‑123/99, EU:T:2000:230, point 58].

64      De surcroît, si, en vertu du principe de bonne administration, la Commission est tenue à un devoir d’assistance prévu à l’article 6, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, ce devoir doit se comprendre en ce sens que, lorsque la demande n’est pas suffisamment précise, quelles qu’en soient les raisons, l’institution doit prendre contact avec le demandeur afin de définir au mieux les documents demandés. Ce devoir d’assistance est fondamental pour assurer l’effet utile du droit d’accès défini par le règlement no 1049/2001. Toutefois, si, malgré les précisions données, le demandeur persiste à demander l’accès à un document inexistant, l’institution est fondée à rejeter la demande d’accès en raison de l’inexistence de son objet (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 26 octobre 2011, Dufour/BCE, T‑436/09, EU:T:2011:634, points 30 et 31 et jurisprudence citée).

65      En l’espèce, il s’agit ainsi d’apprécier si la requérante a fourni des indices pertinents et concordants susceptibles de démontrer l’existence et la détention par la Commission des documents non répertoriés.

66      En premier lieu, dans la mesure où, par lettre du 10 février 2014 (voir point 15 ci‑dessus), la Commission a invité la requérante à préciser l’objet de sa demande initiale et a contacté ses directions et services concernés par cette demande (voir point 17 ci-dessus), afin de repérer tous les documents visés par ladite demande, cette institution a respecté son devoir d’assistance visé à l’article 6, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001. D’ailleurs, la Commission a clairement indiqué, dans la décision attaquée, que, même au terme de nouvelles recherches approfondies, elle n’avait trouvé aucun nouveau document s’ajoutant aux 98 documents déjà répertoriés dans la première décision du 26 mars 2014.

67      En deuxième lieu, la simple affirmation selon laquelle les documents nos 8, 12, 16, 27, 28, 34, 37, 45, 48, 52, 73, 84, 91 et 92 font référence à des réunions envisagées ou à des notes prises lors de ces réunions, ne saurait suffire à elle‑seule pour démontrer, d’une part, que des réunions ont effectivement eu lieu à chaque fois et, d’autre part, que des documents relatifs à ces prétendues réunions existent et sont détenus par la Commission.

68      À cet égard, certes, la Commission précise que le fait que des réunions mentionnées dans les documents auxquels la requérante fait référence puissent avoir eu lieu n’implique pas que la Commission ait pris des notes lors desdites réunions. La Commission fait notamment valoir, à juste titre, que les documents nos 8, 12 et 92, communiqués à la requérante (correspondant aux annexes A.16, A.7, A.15 de la requête), ne démontrent pas que des réunions entre elle et les parties concernées ont effectivement eu lieu. De même, la Commission souligne, à bon droit, que le document no 16, communiqué à la requérante (correspondant à l’annexe A.8 de la requête), ne contient aucun élément permettant d’affirmer qu’une réunion a effectivement eu lieu, a été prévue ou a simplement été proposée. S’agissant des documents nos 27, 84 et 91, communiqués à la requérante (correspondant aux annexes A.9, A.19 et A.20 de la requête), la Commission affirme que ces documents font référence à des documents rendus accessibles à la requérante avant ou après les réunions auxquelles les documents en question font référence et qui sont les seuls documents existants. Or, rien dans les écritures de la requérante ne permet de renverser une telle affirmation. S’agissant des documents nos 34, 37 et 73 (correspondant aux annexes A.11, A.12 et A.14 de la requête), communiqués à la requérante, la Commission soutient, sans être contredite par la requérante sur ce point, qu’ils contiennent eux‑mêmes un résumé des positions examinées lors des réunions auxquelles ces documents font référence.

69      Il s’ensuit que, contrairement à ce que prétend la requérante et ainsi que le fait valoir à juste titre la Commission, il ne ressort pas des documents nos 8, 12, 16, 27, 34, 37, 73, 84, 91 et 92que d’autres documents non répertoriés existent et sont détenus par la Commission.

70      S’agissant des documents nos 28, 45, 48 et 52, communiqués à la requérante (correspondant aux annexes A.10, A.13, A.17 et A.18 de la requête), en dépit de l’absence de précisions de la Commission sur ces documents, il s’avère tout de même possible de constater qu’ils ne permettent pas davantage de renverser l’affirmation de la Commission selon laquelle il n’y a pas d’autres documents concernés par la demande d’accès de la requérante. En effet, le document no 28 contient une simple demande d’organisation d’une réunion, le document no 45contient une référence à une « minute » dont la publication et, ainsi, la divulgation au public était prévue pour la fin de janvier 2013. Le document no 48fait référence à une réunion. Cependant, il ne ressort pas de ce document que cette réunion a réellement eu lieu, ni davantage qu’elle a donné lieu à l’élaboration de documents écrits. Enfin, le document no 52fait référence à la simple possibilité de prévoir une réunion.

71      Il ressort de ce qui précède que, contrairement à ce qu’affirme la requérante, les documents qu’elle mentionne ne constituent pas des indices permettant de démontrer que d’autres documents, non répertoriés dans la liste qui lui a été communiquée, existent et sont détenus par la Commission.

72      Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante visant à faire valoir que les consultations menées par la Commission doivent être transparentes à l’égard tant des parties directement impliquées que du public en général et que, pour ce faire, les documents de consultation doivent contenir certaines informations, telles que les questions examinées, les mécanismes de consultation utilisés, les parties consultées et les raisons de la consultation, ainsi que les facteurs susceptibles d’influencer la formulation des politiques. En effet, ces arguments, d’une part, ne sauraient constituer des indices susceptibles de renverser la présomption de légalité qui s’attache à l’affirmation de la Commission selon laquelle les documents non répertoriés n’existent pas et, d’autre part, ne sauraient impliquer l’obligation pour la Commission de créer des documents inexistants dans le seul but de respecter le principe de transparence et d’accorder à la requérante un droit d’accès. Ni le principe de transparence, ni l’article 11 du règlement no 1049/2001, ni l’obligation d’assistance prévue à l’article 6, paragraphe 2, de ce règlement, ne sauraient obliger une institution à créer un document qui lui a été demandé et qui n’existe pas (voir, en ce sens, arrêt du 2 octobre 2014, Strack/Commission, C‑127/13 P, EU:C:2014:2250, point 46).

73      Ainsi, la décision attaquée n’est pas entachée d’illégalité en ce qu’elle rejetterait la demande d’accès aux documents non répertoriés, dont l’existence n’a pas été établie.

74      Le recours, en ce qu’il vise à l’annulation de la décision attaquée pour la partie concernant les documents non répertoriés, dont l’existence ressortirait, selon la requérante, des documents répertoriés nos 8, 12, 16, 27, 28, 34, 37, 45, 48, 52, 73, 84, 91 et 92, même à le considérer recevable, devrait donc, en tout état de cause, être rejeté comme non fondé.

 Sur la décision attaquée en ce qu’elle refuse l’accès aux documents répertoriés

 Sur la persistance de l’objet du litige

75      Dans la duplique, la Commission a affirmé qu’elle était en train d’examiner si, au regard de la jurisprudence (arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889), il « [était] justifié de donner accès à des passages supplémentaires du document no 34 ». Elle a précisé qu’elle « n’a[vait] pas encore évalué cette question de manière définitive ni pris de décision sur ce point [et qu’] elle inform[erait] le Tribunal du résultat de cet examen aussi rapidement que possible ».

76      Par le biais d’une mesure d’organisation de la procédure, le Tribunal a demandé à la Commission d’indiquer si elle avait examiné la possibilité de divulguer les passages occultés du document no 34, au regard de l’arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe (C‑673/13 P, EU:C:2016:889),et, dans l’affirmative, de lui communiquer le résultat de son examen (voir point 35 ci-dessus).

77      Le 18 décembre 2017, la Commission a informé le Tribunal qu’elle avait examiné la décision attaquée à la lumière de la jurisprudence citée aux points 75 et 76 ci-dessus et qu’elle avait constaté qu’une partie des informations occultées auparavant dans le document no 34 devait être considérée comme portant sur des « informations […] [ayant] trait à des émissions dans l’environnement », au sens de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006. Elle a, ainsi, informé le Tribunal que, par décision du 22 mars 2017, elle avait octroyé à la requérante l’accès à des informations du document en question initialement occultées, bien que cela portât atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées et qu’elle avait maintenu le refus d’accès aux informations qui, n’ayant pas trait à des émissions dans l’environnement, portaient atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises concernées. Enfin, la Commission a indiqué au Tribunal que la nouvelle version publique du document no 34 avait été transmise à la requérante le 24 mars 2017 (voir point 34 ci-dessus).

78      Selon une jurisprudence constante, l’objet du litige doit perdurer, tout comme l’intérêt à agir, jusqu’au prononcé de la décision juridictionnelle sous peine de non-lieu à statuer, ce qui suppose que le recours soit susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (voir arrêts du 21 décembre 2016, Commission/Hansestadt Lübeck, C‑524/14 P, EU:C:2016:971, point 26 et jurisprudence citée, et du 27 février 2015, Breyer/Commission T‑188/12, EU:T:2015:124, point 27 et jurisprudence citée).

79      Après avoir invité les parties à présenter leurs observations sur les conséquences que le Tribunal devait tirer de l’adoption par la Commission d’une nouvelle décision s’agissant du document no 34, conformément à l’article 131, paragraphe 1, du règlement de procédure (voir point 35 ci-dessus), il y a lieu de constater d’office que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer en ce qui concerne les parties dudit document qui ont été rendues publiques.

80      Dans ces conditions, l’examen du bien‑fondé du recours ne portera que sur les autres documents répertoriés ainsi que sur les parties du document no 34 pour lesquelles la Commission a maintenu le refus d’accès.

 Sur le fond

81      À l’appui de son recours visant les documents mentionnés au point 80 ci‑dessus, la requérante soulève, en substance, deux moyens, tirés, l’un, à titre principal, de la violation de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006 et, l’autre, à titre subsidiaire, de la violation de l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001.

82      Par son premier moyen, la requérante soulève l’illégalité de la décision attaquée au regard de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006. Elle fait valoir que, dans la mesure où les documents litigieux contiennent des informations qui ont trait à des émissions dans l’environnement, la Commission aurait dû appliquer cette disposition et divulguer lesdits documents, même si leur divulgation risquait de porter atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, protégés par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

83      Par son second moyen, la requérante soutient, en substance, que la Commission lui a refusé l’accès aux documents litigieux sans procéder à une mise en balance des intérêts en jeu et, ainsi, sans établir si l’intérêt du public à la divulgation des documents litigieux, garanti par l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001, devait prévaloir sur l’exigence, visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, de protéger les intérêts commerciaux des entreprises concernées.

84      La Commission conteste les arguments de la requérante.

–       Sur le premier moyen

85      Dans le cadre de son premier moyen, la requérante soutient que, lors de l’adoption de la décision attaquée, la Commission a omis, à tort, d’apprécier la possibilité d’appliquer l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006, qui contiendrait une présomption irréfragable en vertu de laquelle il existe un intérêt public supérieur à la divulgation de documents présentant des informations ayant trait à des émissions dans l’environnement. À ce titre, elle souligne, d’une part, que la Commission a exclu, à tort, que les documents litigieux aient contenu des informations ayant trait à des émissions dans l’environnement au sens de ladite disposition, telle qu’elle est interprétée par la jurisprudence. D’autre part, la requérante fait valoir que, selon la jurisprudence, la divulgation de tels types de documents doit être accordée même si cela risque de porter atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée. En effet, l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006 constituerait une règle d’interprétation de l’article 4, paragraphe 2, premier et deuxième tirets, du règlement no 1049/2001. Dans la réplique, la requérante souligne, premièrement, qu’elle a fondé la demande initiale sur le règlement no 1367/2006, deuxièmement, que, conformément à l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001, elle n’était pas obligée de justifier sa demande et, troisièmement, que la Commission devait apprécier d’office l’application du règlement no 1367/2006 compte tenu de la nature des informations contenues dans les documents litigieux.

86      La Commission affirme que, lors de l’adoption de la décision attaquée, elle n’a pas examiné si l’accès aux documents litigieux pouvait être accordé à la requérante en vertu de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006. À cet égard, elle fait valoir, d’abord, que l’absence d’un tel examen est justifiée par le fait que la requérante n’avait fondé ni sa demande initiale d’accès aux documents, ni sa demande confirmative sur une telle disposition et qu’elle n’était pas tenue d’examiner d’office l’applicabilité de cette disposition. Ensuite, elle rappelle que, dans le cadre d’un recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE, la légalité d’un acte s’apprécie en fonction des éléments de fait et de droit existant au moment de l’adoption de celui-ci et fait référence aux arrêts du 28 mars 2000, Port/Commission (T‑251/97, EU:T:2000:89, point 38), et du 11 septembre 2002, Alpharma/Conseil (T‑70/99, EU:T:2002:210, point 248 et jurisprudence citée). Enfin, elle explique, devant le Tribunal, d’une part, les motifs pour lesquels le règlement no 1367/2006 n’était pas applicable en l’espèce, à savoir que les documents litigieux ne relèvent pas de la définition de documents contenant des informations ayant trait à des émissions dans l’environnement au sens de son article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006, tel qu’il est interprété par la jurisprudence. D’autre part, elle expose les motifs pour lesquels, à supposer même que ledit règlement fût applicable, la divulgation des documents litigieux aurait dû, en tout état de cause, être refusée, à savoir le fait que les documents litigieux étaient étroitement liés à une procédure en manquement pendante devant la Cour et rentraient dans la catégorie des documents visés par l’exception relative à la protection des activités d’enquête, prévue à l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006, qui rendait inopérante la présomption d’existence d’un intérêt public supérieur pouvant justifier leur divulgation.

87      À titre liminaire, il importe de rappeler que, en vertu de l’article 15, paragraphe 3, TFUE, tout citoyen de l’Union et toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre ont un droit d’accès aux documents des institutions, organes et organismes de l’Union sous réserve des principes et des conditions qui sont fixés conformément à la procédure législative ordinaire. Le règlement no 1049/2001 vise, comme l’indiquent le considérant 4 et l’article 1er de celui-ci, à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible (voir arrêt du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 40 et jurisprudence citée).

88      Certes, le droit d’accès aux documents est soumis à des limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé. En particulier, et en conformité avec son considérant 11, le règlement no 1049/2001 prévoit, à son article 4, un régime d’exceptions autorisant les institutions à refuser l’accès à un document dans le cas où la divulgation de ce dernier porterait atteinte à l’un des intérêts protégés par cet article (voir arrêt du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:49, point 74 et jurisprudence citée).

89      Néanmoins, dès lors que de telles exceptions dérogent au principe de l’accès le plus large possible du public aux documents, elles doivent être interprétées et appliquées strictement (voir arrêt du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:49, point 75 et jurisprudence citée).

90      S’agissant des informations environnementales détenues par les institutions et organes de l’Union, le règlement no 1367/2006 poursuit l’objectif, conformément à son article 1er, d’en garantir une mise à disposition et une diffusion systématiques aussi larges que possible (voir arrêt du 13 juillet 2017, Saint-Gobain Glass Deutschland/Commission, C‑60/15 P, EU:C:2017:540, point 64 et jurisprudence citée).

91      Si, conformément à l’article 3 du règlement no 1367/2006, le règlement no 1049/2001, et notamment l’article 4 de ce dernier, s’applique, en principe, à toutes les demandes d’accès à de telles informations environnementales détenues par des institutions de l’Union, l’article 6 du règlement no 1367/2006 ajoute des règles plus spécifiques concernant ces demandes qui, en partie, favorisent et, en partie, restreignent l’accès aux documents (voir arrêt du 13 juillet 2017, Saint-Gobain Glass Deutschland/Commission, C‑60/15 P, EU:C:2017:540 point 65 et jurisprudence citée).

92      Selon le considérant 15 du règlement no 1367/2006, les exceptions prévues dans le règlement no 1049/2001 doivent s’appliquer sous réserve des dispositions plus spécifiques du règlement no 1367/2006 relatives aux demandes d’accès aux informations environnementales. Ce dernier règlement constitue une lex specialis au regard du règlement no 1049/2001 en remplaçant, modifiant ou précisant certaines des dispositions de ce dernier règlement lorsque la demande d’accès vise des « informations environnementales » ou des informations « ayant trait à des émissions dans l’environnement » (voir, en ce sens, arrêts du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 53, et du 9 septembre 2011, LPN/Commission, T‑29/08, EU:T:2011:448, points 105 et 107).

93      La jurisprudence a précisé que l’application des exceptions consacrées à l’article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement no 1049/2001, est écartée si la divulgation du document en cause est justifiée par un intérêt public supérieur (voir arrêt du 24 mai 2011, NLG/Commission, T‑109/05 et T‑444/05, EU:T:2011:235, point 147 et jurisprudence citée).

94      Conformément à l’article 6, paragraphe 1, première phase, du règlement no 1367/2006, c’est dans le cadre des exceptions prévues à l’article 4, paragraphe 2, premier et troisième tirets, du règlement no 1049/2001 que la divulgation des informations ayant trait à des émissions dans l’environnement est réputée présenter un intérêt public supérieur (voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 54).

95      S’agissant de la définition de la notion d’« informations ayant trait à des émissions dans l’environnement » au sens de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006, la Cour a jugé, premièrement, que cette notion ne doit pas être interprétée restrictivement, deuxièmement, qu’elle ne doit pas être limitée aux informations se rapportant à des émissions provenant d’installations industrielles telles que des usines et des centrales, troisièmement, qu’elle ne couvre pas seulement les informations se rapportant à des émissions effectives dans l’environnement et, quatrièmement, que cette notion doit être comprise comme visant les données permettant au public de savoir ce qui est effectivement rejeté dans l’environnement, ou bien ce qui le sera de manière prévisible, dans des conditions normales ou réalistes d’utilisation du produit ou de la substance en cause, correspondant à celles pour lesquelles l’autorisation de mise sur le marché de ce produit ou de cette substance est octroyée et prévalant dans la zone où ledit produit ou ladite substance est destiné à être utilisé (voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, points 55, 70, 73 et 79).

96      Dans l’arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe (C‑673/13 P, EU:C:2016:889, points 79 et 80), la Cour a donc estimé que la notion d’« informations ayant trait à des émissions dans l’environnement » incluait :

a)       les indications relatives à la nature, à la composition, à la quantité, à la date et au lieu des émissions effectives ou prévisibles, dans des conditions normales ou réalistes, d’utilisation du produit ou de ladite substance en cause ;

b)       les informations permettant au public de contrôler si l’évaluation des émissions effectives ou prévisibles, sur la base de laquelle l’autorité compétente a autorisé le produit ou la substance en cause, est correcte ;

c)       les données relatives aux incidences de ces émissions sur l’environnement.

97      En outre, dans l’arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe (C‑673/13 P, EU:C:2016:889), la Cour a rappelé qu’il ressortait en substance du considérant 2 du règlement no 1367/2006 que l’accès aux informations environnementales garanti par ce règlement visait notamment à favoriser une participation plus efficace du public au processus décisionnel, de manière à renforcer l’obligation des instances compétentes de rendre des comptes dans le cadre de la prise de décision en vue de sensibiliser l’opinion publique et d’obtenir son adhésion aux décisions adoptées. Partant, pour pouvoir s’assurer que les décisions prises par les autorités compétentes en matière environnementale sont fondées et participer efficacement au processus décisionnel en matière environnementale, le public doit avoir accès aux informations lui permettant de vérifier si les émissions ont été correctement évaluées et doit être mis en mesure de raisonnablement comprendre la manière dont l’environnement risque d’être affecté par lesdites émissions (voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 80).

98      Enfin, la Cour a précisé que la notion d’informations ayant trait à des émissions dans l’environnement ne saurait inclure toute information présentant un quelconque lien, même direct, avec des émissions dans l’environnement autrement elle épuiserait en grande partie la notion d’« information environnementale » au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous d), du règlement no 1367/2006. Une telle interprétation priverait ainsi de tout effet utile la possibilité, prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, pour les institutions de refuser la divulgation d’informations environnementales au motif notamment qu’une telle divulgation porterait atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée et mettrait en péril l’équilibre que le législateur de l’Union a voulu assurer entre l’objectif de transparence et la protection de ces intérêts. Elle porterait également une atteinte disproportionnée à la protection du secret professionnel garantie par l’article 339 TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe, C‑673/13 P, EU:C:2016:889, point 81).

99      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’apprécier si la décision attaquée, ayant refusé l’accès aux documents litigieux en application de l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, relative à la protection des intérêts commerciaux des entreprises concernées, n’est pas entachée d’illégalité.

100    En l’espèce, premièrement, il convient de relever que, dans la décision attaquée, la Commission a motivé le refus d’accès de la manière qui suit. D’abord, elle a estimé que les documents nos 10, 26, 46 et 65 ainsi que les passages occultés du document no 34 contenaient des informations commerciales extrêmement sensibles. Ensuite, elle a indiqué que ces documents contenaient des avis, des évaluations et des propositions de constructeurs automobiles et de producteurs de réfrigérants concernant l’application de la directive MAC sur les systèmes de climatisation des véhicules à moteur, poursuivant l’objectif de limiter les émissions d’hydrofluorocarbure provenant desdits systèmes installés sur les véhicules de tourisme et les véhicules utilitaires légers. En outre, elle a souligné que l’objectif de la directive MAC devait être atteint par une interdiction progressive de l’utilisation d’hydrofluorocarbure à effet de serre élevé dans les systèmes de climatisation installés sur les véhicules à moteur. De plus, elle a affirmé que la présence du réfrigérant R1234yf sur le marché et la violation éventuelle de la directive MAC étaient à l’origine des discussions entre la Commission elle-même et les entreprises qui produisaient ce réfrigérant ou l’utilisaient dans les véhicules qu’elles fabriquaient. De surcroît, elle a précisé que les documents en question décrivaient des stratégies de marché des entreprises, expliquaient les difficultés de mise en œuvre de la directive MAC et d’utilisation du réfrigérant en cause et comportaient, dans certains cas, des propositions d’améliorations qui découlaient des particularités des entreprises et des modèles de véhicules concernés par la directive, ainsi qu’une décision en faveur d’un nouveau réfrigérant. Enfin, elle a considéré que la divulgation desdits documents portait atteinte à la capacité d’adaptation et à la stabilité des entreprises ainsi qu’à leurs plans à moyen terme de mise en œuvre de la directive dans le cadre de la production future de véhicules et de réfrigérants et a conclu que l’accès à ces documents devait être refusé en application de l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001.

101    Deuxièmement, il importe d’observer que ni la décision initiale ni la décision attaquée ne contiennent des motifs en ce qui concerne l’applicabilité, aux documents en cause, du règlement no 1367/2006. Elles ne permettent pas davantage d’établir si un examen de l’applicabilité du règlement no 1367/2006 a été effectué ou non par la Commission. C’est uniquement, a posteriori, dans le mémoire en défense, que la Commission explique que, lors de l’adoption de la décision attaquée, elle n’a pas examiné l’applicabilité du règlement no 1367/2006, au motif que la requérante ne l’avait invoqué ni dans la demande initiale ni dans la demande confirmative et qu’il n’y avait pas de raisons d’examiner d’office l’applicabilité de ce règlement.

102    Or, il y a lieu de noter que, contrairement à ce qu’affirme la Commission, la requérante avait fondé sa demande initiale d’accès aux documents tant sur le règlement no 1049/2001 que sur le règlement no 1367/2006. En outre, une demande confirmative d’accès aux documents s’inscrit dans la continuité d’une demande initiale, ainsi que cela ressort de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, selon lequel, en cas de refus total ou partiel, le demandeur peut adresser, dans un délai de quinze jours ouvrables suivant la réception de la réponse de l’institution, une demande confirmative tendant à ce que celle-ci révise sa position.

103    De surcroît, l’objet de la demande confirmative de la requérante, à savoir l’« accès à des documents relatifs à l’évaluation du réfrigérant R1234yf » est, en substance, le même que celui de la demande initiale, sauf en ce qui concerne le nombre de documents demandés, au motif que la demande confirmative porte nécessairement sur les documents refusés à la suite de la demande initiale d’accès. En effet, lorsque la requérante utilise, dans l’objet de sa demande confirmative, l’expression « demande confirmative en vertu du règlement no 1049/2001 », elle se réfère au fait qu’il s’agit d’une demande introduite au sens de l’article 7, paragraphe 2, dudit règlement. Cela ressort tant du libellé du premier paragraphe de la demande confirmative que de l’exposé des faits contenu dans la requête. Il ne saurait être inféré de l’utilisation d’une telle expression que la requérante a entendu implicitement renoncer à fonder sa demande d’accès aux documents litigieux sur le règlement no 1367/2006. La Commission ne saurait donc soutenir que la requérante n’avait pas invoqué, au soutien de sa demande confirmative d’accès aux documents litigieux, le règlement no 1367/2006.

104    Ainsi, la Commission avait été saisie, par la requérante, de la question de l’applicabilité du règlement no 1367/2006.

105    De plus, il ressort de la lecture de la décision initiale et de la décision confirmative que la Commission a refusé l’accès aux documents litigieux sur la base des mêmes motifs que ceux indiqués dans la décision initiale, à savoir l’application de l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, relative à la protection des intérêts commerciaux. Ainsi, la Commission ne saurait soutenir qu’elle devait procéder à un examen du droit d’accès de la requérante sur des fondements juridiques différents, selon qu’il s’agissait de la demande initiale ou bien de la demande confirmative de cette dernière.

106    Dès lors, il convient d’apprécier si l’absence d’examen de l’applicabilité du règlement no 1367/2006, ainsi que cela a été indiqué au point 101 ci‑dessus, est susceptible d’entraîner l’annulation de la décision attaquée.

107    À cet égard, par le biais d’une mesure d’instruction, il a été ordonné à la Commission de produire devant le Tribunal les documents litigieux (voir point 33 ci-dessus).

108    En effet, certes, en général, lorsqu’il s’agit de vérifier si la Commission a procédé à une correcte mise en balance des intérêts en jeu au sens du règlement no 1049/2001, il n’est pas nécessaire de demander à l’institution de produire les documents en cause devant le Tribunal (voir, en ce sens, arrêt du 28 novembre 2013, Jurašinović/Conseil, C‑576/12 P, EU:C:2013:777, points 28 et 29). Toutefois, une telle demande est nécessaire, en l’espèce, au motif qu’il s’agit d’apprécier si, au regard de leur contenu, les documents litigieux rentrent dans la catégorie de ceux visés par le règlement no 1367/2006, à savoir, notamment, s’ils contiennent des informations ayant trait à des émissions dans l’environnement. Cet examen est analogue à celui qu’il convient d’effectuer lorsqu’il s’agit de déterminer si des documents, auxquels l’accès a été refusé, relèvent d’une des exceptions visées à l’article 4, du règlement no 1049/2001 (voir, en ce sens, arrêt du 28 novembre 2013, Jurašinović/Conseil, C‑576/12 P, EU:C:2013:777, point 27).

109    En l’espèce, premièrement, il importe de rappeler que, conformément aux précisions fournies par la Cour, dans son arrêt du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe (C‑673/13 P, EU:C:2016:889, points 79 et 80), la notion d’« informations ayant trait à des émissions dans l’environnement » inclut tout d’abord, les indications relatives à la nature, à la composition, à la quantité, à la date et au lieu des émissions effectives ou prévisibles, dans des conditions normales ou réalistes, d’utilisation du produit ou de ladite substance en cause, ensuite, les informations permettant au public de contrôler si l’évaluation des émissions effectives ou prévisibles, sur la base de laquelle l’autorité compétente a autorisé le produit ou la substance en cause, est correcte et, enfin, les données relatives aux incidences de ces émissions sur l’environnement (voir point 96 ci-dessus).

110    Deuxièmement, il convient de relever que, certes, ainsi que la Commission elle‑même le précise, la demande de la requérante s’inscrit dans le contexte du débat sur les réfrigérants de substitution, respectueux de l’environnement, destinés à être utilisés dans les véhicules à moteur afin de respecter les dispositions de la directive MAC concernant les émissions provenant des systèmes de climatisation des véhicules à moteur (voir point 1 ci-dessus). Toutefois, cette circonstance n’est pas suffisante pour considérer que les documents litigieux entrent dans la catégorie de ceux visés par le règlement no 1367/2006.

111    Troisièmement, il convient de constater que, ainsi que l’indique la Commission dans la décision attaquée, les documents litigieux contiennent, notamment, des avis, des appréciations, des propositions de constructeurs automobiles et de producteurs de réfrigérants concernant les problématiques liées à la disponibilité du réfrigérant en cause, les difficultés d’adaptation de leur production aux dispositions de la directive MAC et les possibilités de dérogations envisageables ou souhaitées, et les demandes formulées afin que la Commission assure le respect des dispositions de cette directive par tous les constructeurs. Ces documents ne contiennent pas des données permettant de comprendre dans quelle mesure et pendant combien de temps les sujets concernés recourront à l’un ou l’autre réfrigérant et contribueront ou non à accroître le pourcentage de risque d’émissions dans l’environnement que l’un ou l’autre réfrigérant est susceptible de produire en cas d’accident de voitures.

112    Les « évaluations et propositions de constructeurs automobiles et de producteurs de réfrigérants à propos de l’application de la directive MAC », contenues dans les documents en cause, ne permettent pas d’apprécier ce qui est effectivement libéré dans l’environnement ou ce qui le sera de manière prévisible, dans des conditions normales ou réalistes d’utilisation du réfrigérant en question. En effet, ils ne contiennent pas d’informations sur l’existence, la nature, la composition, la quantité, la date et le lieu d’émissions effectives ou prévisibles, dans des conditions normales ou réalistes, d’utilisation du réfrigérant en cause.

113    Ainsi que l’a précisé la Cour, la notion d’information ayant trait à des émissions dans l’environnement ne saurait inclure toute information présentant un quelconque lien, même direct, avec des émissions dans l’environnement. S’il en allait autrement, elle épuiserait en grande partie la notion d’« information environnementale » au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous d), du règlement no 1367/2006. Une telle interprétation priverait ainsi de tout effet utile la possibilité, prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, pour les institutions de refuser la divulgation d’informations environnementales, au motif notamment qu’une telle divulgation porterait atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée et mettrait en péril l’équilibre que le législateur de l’Union a voulu assurer entre l’objectif de transparence et la protection de ces intérêts (voir point 98 ci-dessus).

114    De surcroît, il importe de noter que les documents en question ne sont pas davantage de nature à fournir au public des informations lui permettant de vérifier, conformément à la jurisprudence rappelée au point 109 ci-dessus, si l’évaluation des émissions effectives ou prévisibles, sur la base de laquelle l’autorité compétente autorise le produit ou la substance en cause, est correcte, ni ne lui fournissent l’occasion de participer au processus décisionnel de manière à renforcer l’obligation des instances compétentes de rendre compte de leur décisions. Enfin, les documents litigieux ne fournissent pas davantage d’informations concrètes concernant l’incidence des émissions dans l’environnement, liées à l’utilisation du réfrigérant en cause.

115    Il y a lieu de conclure que, en dépit du contexte juridique et factuel dans lequel la demande d’accès aux documents s’inscrit, les documents en question ne concernent pas des informations ayant trait à des émissions dans l’environnement au sens de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006, tel qu’il est interprété par la jurisprudence.

116    Il s’ensuit que l’absence d’examen, dans la décision attaquée, de l’applicabilité du règlement no 1367/2006 n’est pas de nature à entraîner l’annulation de cette décision.

117    Le premier moyen, visant à faire valoir que la décision attaquée était illégale du fait de la violation de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006, doit donc être rejeté.

–       Sur le second moyen

118    Par son second moyen, ainsi qu’il a été rappelé au point 83 ci-dessus, la requérante fait valoir que la Commission n’a pas procédé à une mise en balance des intérêts en jeu dans le cadre de la décision attaquée. Selon la requérante, la Commission n’aurait pas apprécié si l’intérêt du public à la divulgation des documents litigieux, garanti par l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001, devait prévaloir sur l’exigence, visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, de protéger les intérêts commerciaux des entreprises concernées.

119    À titre liminaire, il convient de rappeler que le principe de l’accès le plus large possible du public aux documents n’en est pas moins soumis à certaines limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé. En effet, le règlement no 1049/2001, notamment en son considérant 11 et en son article 4, prévoit un régime d’exceptions imposant aux institutions et aux organismes de ne pas divulguer des documents dans le cas où la divulgation porterait atteinte à l’un de ces intérêts (voir arrêt du 5 février 2018, Pari Pharma/EMA, T‑235/15, EU:T:2018:65, point 66 et jurisprudence citée).

120    Dès lors que les exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 dérogent au principe de l’accès le plus large possible du public aux documents, elles doivent être interprétées et appliquées strictement (voir arrêt du 5 février 2018, Pari Pharma/EMA, T‑235/15, EU:T:2018:65, point 67 et jurisprudence citée).

121    En outre, la seule circonstance qu’un document concerne un intérêt protégé par une exception au droit d’accès prévue à l’article 4 du règlement no 1049/2001 ne saurait suffire à justifier l’application de cette dernière (voir arrêts du 3 juillet 2014, Conseil/in’t Veld, C‑350/12 P, EU:C:2014:2039, point 51 et jurisprudence citée, et du 13 avril 2005, Verein für Konsumenteninformation/Commission, T‑2/03, EU:T:2005:125, point 69 et jurisprudence citée).

122    Le régime des exceptions prévu à l’article 4 du règlement n° 1049/2001, et notamment au paragraphe 2 de celui-ci, est fondé sur une mise en balance des intérêts qui s’opposent dans une situation donnée, à savoir, d’une part, les intérêts qui seraient favorisés par la divulgation des documents concernés et, d’autre part, ceux qui seraient menacés par cette divulgation. La décision prise sur une demande d’accès à des documents dépend de la question de savoir quel est l’intérêt qui doit prévaloir dans le cas d’espèce (voir arrêt du 5 février 2018, Pari Pharma/EMA, T‑235/15, EU:T:2018:65, point 68 et jurisprudence citée).

123    Il y a lieu de relever que, pour justifier le refus d’accès à un document, il ne suffit pas, en principe, que ce document relève d’une activité ou d’un intérêt mentionné à l’article 4 du règlement n° 1049/2001, l’institution concernée devant également démontrer comment l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par une exception prévue à cet article et que le risque d’atteinte à cet intérêt est raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (voir arrêts du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:496, point 76 et jurisprudence citée, et du 5 février 2018, Pari Pharma/EMA, T‑235/15, EU:T:2018:65, point 69 et jurisprudence citée).

124    Quant au concept d’intérêts commerciaux, il ressort de la jurisprudence que toute information relative à une société et à ses relations d’affaires ne saurait être considérée comme relevant de la protection qui doit être garantie aux intérêts commerciaux conformément à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, sauf à tenir en échec l’application du principe général consistant à conférer au public le plus large accès possible aux documents détenus par les institutions (voir arrêts du 9 septembre 2014, MasterCard e.a./Commission, T‑516/11, non publié, EU:T:2014:759, point 81 et jurisprudence citée, et du 5 février 2018, Pari Pharma/EMA, T‑235/15, EU:T:2018:65, point 70 et jurisprudence citée).

125    Ainsi, afin d’appliquer l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, il est nécessaire de démontrer que les documents litigieux contiennent des éléments susceptibles, du fait de leur divulgation, de porter atteinte aux intérêts commerciaux d’une personne morale. Il en est ainsi lorsque, notamment, les documents demandés contiennent des informations commerciales sensibles relatives, notamment, aux stratégies commerciales des entreprises concernées ou à leurs relations commerciales, ou lorsque ceux-ci contiennent des données propres à l’entreprise qui mettent en avant son expertise (voir arrêt du 5 février 2018, Pari Pharma/EMA, T‑235/15, EU:T:2018:65, point 71 et jurisprudence citée).

126    C’est à la lumière de la jurisprudence mentionnée aux points 119 à 125 ci-dessus ainsi que du contexte juridique et factuel de l’espèce que doivent être analysés les arguments de la requérante, rappelés au point 118 ci-dessus, visant à contester la légalité de la décision attaquée au regard de l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001. En particulier, le Tribunal doit s’assurer que la Commission a suffisamment démontré que, même s’il existait une exception qui devait être protégée, il n’y avait pas un intérêt supérieur justifiant la divulgation des documents en cause. Une telle démonstration est en effet essentielle pour conférer un effet utile à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001.

127    En l’espèce, comme il a été rappelé au point 100 ci-dessus, la Commission a estimé que les documents litigieux contenaient des informations commerciales sensibles. Elle a précisé que ces documents contenaient des avis, des évaluations et des propositions de constructeurs automobiles et de producteurs de réfrigérants concernant l’application de la directive MAC et qu’ils décrivaient des stratégies de marché des entreprises, qu’ils expliquaient les difficultés de mise en œuvre de la directive et d’utilisation du réfrigérant en cause et qu’ils comportaient, dans certains cas, des propositions d’améliorations qui découlaient des particularités des entreprises et des modèles de véhicules concernés par la directive MAC. Elle a donc considéré que la divulgation desdits documents portait atteinte à la capacité d’adaptation et à la stabilité des entreprises ainsi qu’à leurs plans à moyen terme de mise en œuvre de la directive dans le cadre de la production future de véhicules et de réfrigérants et en a conclu que l’accès auxdits documents devait être refusé en application de l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001.

128    L’examen des documents litigieux a permis au Tribunal de relever premièrement, que la Commission a analysé chaque document, deuxièmement, que les appréciations qu’elle a effectuées dans la décision attaquée à propos du contenu des documents étaient correctes et, troisièmement, qu’elle a fourni des explications concrètes sur la question de savoir de quelle manière l’accès à ces documents pouvait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001. Ces documents contiennent effectivement des informations commerciales sensibles relatives, notamment, aux stratégies commerciales des entreprises concernées ou à leurs relations commerciales, ainsi qu’il ressort également des considérations déjà exposées au point 111 ci-dessus.

129    S’agissant de la mise en balance des intérêts commerciaux des entreprises avec un intérêt public supérieur justifiant la divulgation des documents litigieux, sous le titre « Absence d’intérêt public supérieur à la publication » de la décision attaquée, la Commission a examiné la possibilité d’écarter l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, pour le cas où un intérêt public supérieur justifiait la divulgation des documents en question. À cet égard, la Commission a indiqué qu’elle était consciente de la fonction sociale de protection et de représentation des intérêts des consommateurs et des intérêts environnementaux de la requérante, chargée de contrôler si les États membres mettaient en œuvre les décisions de la Commission, qu’elle n’ignorait pas les avis des tiers relatifs à l’utilisation dudit réfrigérant et qu’elle était au courant du fait que le réfrigérant R1234yf faisait encore l’objet d’une évaluation de substance dans le cadre du règlement (CE) no 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2006, concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) no 793/93 du Conseil et le règlement (CE) no 1488/94 de la Commission ainsi que la directive 76/769/CEE du Conseil et les directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission (JO 2006, L 396, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE (JO 2008, L 353, p. 1). Toutefois, la Commission a précisé que les enquêtes liées à la demande de la requérante se trouvaient dans une phase sensible qui requérait un degré élevé de confiance entre les parties et, ainsi, que la publication des documents litigieux aurait porté atteinte à l’application correcte et à l’objectif final de la directive MAC qui était de contribuer aux mesures de protection du climat de l’Union en vue de la protection de l’environnement. Par conséquent, elle a considéré que l’intérêt supérieur était celui tendant à protéger l’intérêt commercial visé à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001. Enfin, elle a précisé que cette conclusion s’appuyait sur le fait que les documents en question concernaient une procédure administrative et non pas un acte administratif pour lequel la Cour avait accordé un accès étendu.

130    Il ressort de ce qui précède que, dans le cadre de la décision attaquée, la Commission a pris en compte l’intérêt public à la divulgation des documents en cause, lié à l’exigence, recherchée par la requérante, consistant à protéger et à représenter les intérêts des consommateurs et les intérêts environnementaux. Cependant, elle a estimé à bon droit, que, en l’espèce, il convenait de protéger les intérêts commerciaux des entreprises concernées, conformément à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

131    En effet, d’une part, contrairement à ce que soutient la requérante ainsi que cela a été précisé aux points 111 et 112 ci-dessus, non seulement les documents en cause ne permettent pas d’apprécier ce qui est effectivement libéré dans l’environnement ou qui le sera de manière prévisible, mais ils ne contiennent pas davantage d’informations pour apprécier d’éventuels risques pour la santé ou l’environnement, liés à l’utilisation des réfrigérants R1234yf ou R134a. Ils contiennent des informations sur des stratégies de marché générales de quelques entreprises concernées et sur leurs plans à moyen terme de mise en œuvre de la directive MAC dans le cadre de la production future de véhicules et de réfrigérants.

132    D’autre part, l’argument de la requérante visant à faire valoir que, en présence d’une décision en faveur d’un réfrigérant qui comporte un potentiel de gaz à effet de serre aussi considérable, l’action politique de la Commission doit être publiquement vérifiée pour s’assurer qu’un éventuel reproche fondé sur la prise d’influence par le secteur industriel peut être écarté, ne saurait prospérer.

133    En effet, premièrement, compte tenu de la phase sensible dans laquelle se trouvaient les enquêtes menées par la Commission et liées à la demande d’accès aux documents de la requérante, il était nécessaire, comme le souligne la Commission, de garder un degré élevé de confiance avec ses interlocuteurs pour recueillir le plus grand nombre d’informations sur la mise en œuvre de la directive MAC. Deuxièmement, sur la base du contenu des documents en cause, force est de constater que ces derniers ne contiennent pas d’informations permettant à la requérante de découvrir une quelconque « prise d’influence par les secteurs industriels » sur l’action politique de la Commission. En revanche, la divulgation des informations contenues dans les documents litigieux aurait porté atteinte aux intérêts commerciaux des entreprises ayant fourni à la Commission les informations relatives à leurs stratégies de marché liées au respect des prescriptions de la directive MAC et, par conséquent, aurait porté atteinte à l’objectif poursuivi par la Commission de contrôler et d’assurer la mise en œuvre de ladite directive. C’est donc sans commettre d’erreur que la Commission a estimé qu’aucun intérêt public supérieur ne justifiait de faire prévaloir la divulgation des documents litigieux sur la protection des intérêts commerciaux des entreprises concernées.

134    Il y a donc lieu de conclure que, contrairement à ce qu’affirme la requérante, la Commission a procédé, même si c’est d’une manière succincte, à la mise en balance des intérêts en jeu et, sans commettre d’erreur, a refusé l’accès aux documents litigieux en considérant, en substance, que le risque d’une atteinte à la protection des intérêts commerciaux des entreprises concernées était raisonnablement prévisible et non purement hypothétique, conformément à la jurisprudence citée au point 123 ci‑dessus, et que la divulgation aurait porté atteinte également à l’objectif consistant à assurer la mise en œuvre de la directive MAC.

135    Par conséquent, il convient de rejeter le second moyen comme non fondé.

136    Compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, il n’y a plus lieu de statuer sur la demande d’annulation de la décision attaquée en ce qu’elle concerne les parties initialement occultées du document no 34 qui ont été rendues publiques par la suite. Pour le surplus, il convient de rejeter le recours en partie comme irrecevable et en partie comme non fondé.

 Sur les dépens

137    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé en l’essentiel de ses conclusions, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Il n’y a plus lieu de statuer sur la demande d’annulation de la décision GESTDEM 2014/547 de la Commission, du 2 juin 2014, en ce qu’elle concerne les parties initialement occultées du document no 34 qui, par la suite, ont été rendues publiques.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      Deutsche Umwelthilfe eV est condamnée aux dépens.

Gervasoni

Madise

da Silva Passos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 décembre 2018.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.