Language of document : ECLI:EU:T:2007:266

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

12 septembre 2007 (*)

« Clause compromissoire – Deuxième programme-cadre pour des actions de recherche et de développement technologique – Contrats concernant des projets dans le domaine de l’informatique du transport routier et des télécommunications – Absence de justificatifs d’une partie des dépenses déclarées – Résiliation des contrats – Contrats expirés »

Dans l’affaire T‑449/04,

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme M. Patakia, en qualité d’agent, assistée de Mes K. Kapoutzidou et S. Chatzigiannis, avocats,

partie requérante,

contre

Transport Environment Development Systems (Trends), établie à Athènes (Grèce), représentée par Mes V. Christianos et V. Vlassi, avocats,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de la Commission, en vertu d’une clause compromissoire au sens de l’article 238 CE, visant à la condamnation de Trends à rembourser à la Commission une somme de 195 435 euros, majorée des intérêts contractuels ou, à titre subsidiaire, majorée des intérêts de retard,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de M. H. Legal, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. E. Moavero Milanesi, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 18 avril 2007,

rend le présent

Arrêt

 Contrats litigieux

1        Le 10 mars 1992, la Communauté européenne, représentée par la Commission, a conclu avec plusieurs contractants, dont la société civile grecque sans but lucratif Transport Environment Development Systems (Trends), le contrat BATT (Behaviour and Advanced Transport Telematics), portant la référence V2029. Ce contrat a été modifié et remplacé par un autre contrat, signé par la Commission le 3 juin 1994 (ci-après le « contrat BATT »). Trends intervenait dans ce contrat à la fois en qualité de contractante devant exécuter les prestations qui y étaient prévues et en qualité de coordonnatrice du projet.

2        Le 23 juin 1994, la Communauté, représentée par la Commission, a conclu également avec plusieurs contractants, dont Trends, le contrat MIRO (Mobility Impact, Reactions and Opinions), portant la référence V2060. Ce contrat a été modifié et remplacé par un autre contrat, signé par la Commission le 30 décembre 1994 (ci-après le « contrat MIRO »).

3        Ces deux contrats (ci-après les « contrats litigieux ») avaient pour objet la mise en œuvre de projets dans le cadre du programme communautaire dans le domaine de l’informatique du transport routier et des télécommunications [décision 88/416/CEE du Conseil, du 29 juin 1988, concernant un programme communautaire dans le domaine de l’informatique du transport routier et des télécommunications (DRIVE) (JO L 206, p. 1)], qui relève du deuxième programme-cadre pour des actions communautaires de recherche et de développement technologique (1987-1991) [décision 87/516/Euratom, CEE du Conseil, du 28 septembre 1987 (JO L 302, p. 1)].

4        Les contrats litigieux sont rédigés en anglais et, en vertu de leurs articles 11, le contrat BATT est régi par le droit grec et le contrat MIRO est régi par le droit espagnol. Ils comportent quatre annexes chacun, qui en font partie intégrante. Leurs annexes II, détaillant les conditions générales, et leurs annexes IV, détaillant les conditions spéciales pour la concertation, sont identiques, tandis que leurs annexes I, relatives à la partie technique des projets en cause, sont spécifiques à chacun de ces contrats. L’annexe III du contrat BATT, détaillant les conditions spéciales applicables aux contractants des pays de l’AELE, et l’annexe IIIA du contrat MIRO, détaillant les conditions spéciales applicables aux contractants et entités non membres de la Communauté, diffèrent également.

5        L’article 12 des annexes II des contrats litigieux (ci-après les « conditions générales ») contient une clause compromissoire au sens de l’article 238 CE, stipulant que la Cour sera seule compétente pour connaître des litiges survenant au sujet de ces contrats.

6        Selon le point 2.1 des contrats litigieux, le projet visé par le contrat BATT, d’une durée de 36 mois, devait être achevé le 31 décembre 1994 et le projet visé par le contrat MIRO, d’une durée de 16 mois, devait être achevé le 31 mai 1995. Par ailleurs, aux termes de l’article 13 de leurs conditions générales, sauf dispositions contraires, les contrats litigieux étaient réputés prendre fin à la plus récente des dates suivantes : la date de l’approbation par la Commission du dernier rapport technique ou du dernier document exigé par le contrat, la date de présentation du relevé récapitulatif des dépenses ou la date du dernier paiement effectué par la Commission.

7        Aux termes du point 3.2 des contrats litigieux, la Commission s’engageait, à l’égard de Trends, à participer aux dépenses de chacun des projets en cause jusqu’à hauteur de 50 % de ses dépenses remboursables liées au projet, conformément aux articles 8, 22 et 33 des conditions générales, dans la limite d’un plafond de participation, les modalités du versement de la participation financière communautaire par la Commission étant détaillées dans l’article 4 des contrats litigieux. Ce dernier précise que la participation financière prendra tout d’abord la forme d’une avance, puis de paiements périodiques, qui seront effectués en fonction des relevés de dépenses, et enfin d’un paiement final, qui sera débloqué après approbation par la Commission de tous les rapports et autres documents exigés par les contrats litigieux et d’un relevé récapitulatif des dépenses.

8        Ces plafonds de participation étaient exprimés en écus. Toutefois, en application de l’article 2, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1103/97 du Conseil, du 17 juin 1997, fixant certaines dispositions relatives à l’introduction de l’euro (JO L 162, p. 1), il convient de remplacer la référence à l’écu par une référence à l’euro, au taux d’un euro pour un écu. Ainsi, le contrat BATT limitait la participation financière de la Commission à ce projet à 713 000 euros, tandis que le contrat MIRO la limitait à 874 500 euros, les coûts totaux des projets en cause étant estimés à, respectivement, 1 635 000 euros et 1 573 000 euros.

9        Aux termes des points 5.1 à 5.4 des contrats litigieux, Trends s’engageait à présenter à la Commission, par l’intermédiaire du coordinateur de chaque projet, des relevés périodiques de dépenses ainsi qu’un relevé récapitulatif des dépenses dans les trois mois suivant l’achèvement ou l’arrêt des travaux financés par la Commission. Ces relevés devaient être conformes aux stipulations des articles 36 et 37 des conditions générales, qui précisent notamment leurs délais de transmission et les conséquences de leur non-transmission, et être présentés sous la forme et avec les détails prévus à la partie H des conditions générales. Aux termes du formulaire de relevé des dépenses présenté dans cette partie H, en signant ces relevés, les contractants certifiaient notamment que les dépenses déclarées étaient nécessaires à la bonne exécution des travaux et qu’il s’agissait de dépenses réelles entrant dans la définition contractuelle des dépenses remboursables. En outre, en vertu de l’article 38 des conditions générales, les contractants s’engageaient à tenir des livres de compte à jour et à conserver toutes les pièces justificatives des dépenses déclarées à la Commission.

10      Les dépenses remboursables sont définies à la partie D des conditions générales, qui comprend les articles 22 à 33.

11      Le point 22.2 des conditions générales, relatif aux estimations des dépenses et aux virements entre catégories de dépenses, est libellé comme suit :

« Les contractants veilleront à éviter toutes dépenses inutiles ou inutilement élevées et ne devront réaliser aucun profit ni bénéfice sur la participation financière de la Commission. »

12      L’article 23 des conditions générales, relatif aux dépenses remboursables, stipule notamment ce qui suit :

« Sans préjudice des dispositions de l’article 27 [des présentes conditions générales], les dépenses remboursables ne pourront concerner que les coûts réels supportés par les contractants après la date de début effective du contrat et qui sont indispensables à la bonne exécution des travaux définis dans le contrat. Les dépenses remboursables pourront inclure tout ou partie des catégories de dépenses suivantes :

–      dépenses de personnel,

–      frais généraux,

–      […] »

13      Les articles 24 et 25 des conditions générales sont relatifs à ces deux catégories de dépenses remboursables, à savoir, respectivement, les dépenses de personnel et les frais généraux.

14      Le point 24.1 des conditions générales stipule :

« Les dépenses de personnel seront imputées sur la base du temps effectivement consacré par le personnel des contractants aux travaux faisant l’objet du présent contrat et seront calculées sur la base :

–      des traitements ou salaires bruts réels augmentés des charges sociales et des autres coûts rentrant dans la rémunération, à l’exclusion de la participation aux bénéfices, ou

–      des traitements ou salaires moyens augmentés des charges sociales et des autres coûts précités, conformément à la pratique et aux principes habituellement en vigueur chez le contractant concerné et à condition que ces moyennes ne s’écartent pas sensiblement des traitements ou salaires réels augmentés de ces charges et coûts. »

15      Les points 25.1 et 25.2 des conditions générales stipulent :

« 25.1 Les frais généraux pourront inclure des coûts indirects tels que les frais d’administration et de gestion, l’amortissement des bâtiments et du matériel, les loyers, les frais d’entretien, de téléphone, de chauffage, d’éclairage, d’électricité et de fournitures de bureau, les frais postaux, les frais de formation du personnel et les assurances. Ces coûts indirects seront calculés conformément aux principes, règles et méthodes comptables en vigueur chez les contractants.

25.2      Les frais généraux ne pourront être imputés que sur la base de  principes, règles et méthodes comptables acceptés par la  Commission, et uniquement dans la mesure où :

a)      ils peuvent faire l’objet de vérifications et ne sont pas supérieurs aux coûts réels encourus au cours de l’exercice financier du contractant concerné ;

b)      ils n’incluent aucun coût déjà imputé au présent contrat sous une autre catégorie de dépenses ou mis à la charge d’une autre personne ou d’un autre projet par le contractant concerné. »

16      L’article 33 des conditions générales, relatif aux dépenses non remboursables, prévoit notamment :

« Les coûts suivants ne seront pas considérés comme des dépenses remboursables pouvant être imputées directement ou indirectement à la Commission :

–      la marge bénéficiaire,

–      les dépenses inutiles ou inconsidérées,

–      […] »

17      L’article 38 des conditions générales, relatif à la justification des dépenses, stipule :

« Conformément aux règles et procédures comptables qui leur sont imposées par les lois et règlements en vigueur, les contractants devront tenir des livres de compte à jour et conserver toutes les pièces justificatives des coûts facturés à la Commission telles que les factures, les registres horaires et les documents ayant servi de base au calcul des frais généraux. »

18      S’agissant de la participation financière de la Commission, les points 21.3 et 21.4 des conditions générales précisent :

« 21.3 Si, au moment de l’achèvement ou de l’arrêt des travaux définis dans le contrat, le montant total de la participation financière que la Commission est appelée à verser conformément aux dispositions de la présente annexe s’avère être inférieur au montant des versements déjà effectués, la différence devra être remboursée sans délai par les contractants à la Commission ; le remboursement se fera en [euros].

21.4      Sous réserve de l’article 39 de la présente annexe, les paiements périodiques effectués après réception des relevés de dépenses seront considérés comme des avances jusqu’à l’acceptation, conformément à la procédure définie à l’annexe I, des documents indiqués dans cette même annexe I ou, si de tels documents ne sont pas exigés, jusqu’à l’approbation du rapport final. »

19      S’agissant du contrôle financier, l’article 39 des conditions générales stipule :

« Même après remboursement des dépenses par la Commission, les relevés de dépenses transmis par les contractants pourront faire l’objet de vérification soit par la Commission elle-même, soit par des personnes habilitées par elle à cet effet […] Afin de pouvoir effectuer ces vérifications, la Commission et les personnes habilitées par elle auront accès à tous les livres, documents, papiers ou archives en possession des contractants et concernant les dépenses effectuées dans le cadre du contrat ou pourront, si cela s’avère nécessaire, exiger que cette documentation leur soit remise. Les vérifications pourront avoir lieu pendant toute la durée du contrat et dans les deux ans qui suivent la terminaison ou la résiliation du contrat. La Cour des comptes des Communautés européennes disposera des mêmes droits de contrôle que la Commission. »

20      En outre, l’article 9 des conditions générales précise que, à des fins de contrôle financier, la Cour des comptes des Communautés européennes aura, au même titre que la Commission, accès à l’ensemble des documents relatifs au contrat et pourra les vérifier dans les mêmes conditions que la Commission.

21      Enfin, s’agissant de la résiliation des contrats litigieux, l’article 8 des conditions générales stipule notamment :

« 8.2 La Commission pourra mettre fin au contrat :

[…]

d)      en cas d’inexécution par un ou plusieurs contractants d’une des obligations contractuelles qui leur incombent, dès lors que cette inexécution n’est pas justifiée par des raisons techniques ou économiques valables et que les contractants concernés, mis en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception de respecter leurs obligations contractuelles, ne se sont toujours pas acquittés de celles-ci à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la réception de cette lettre ;

e)      si, pour obtenir la participation financière de la Commission ou tout autre avantage prévu par le contrat, un contractant a fait des déclarations fausses ou incomplètes dont il peut effectivement être tenu pour responsable ;

[…]

La résiliation pour les raisons invoquées [au point 8.2, sous b), e), f), et g),] ne sera possible que moyennant un préavis d’un mois adressé aux contractants par lettre recommandée avec accusé de réception.

[…]

8.4      Sous réserve [du point 21.4] de la présente annexe, en cas de résiliation du contrat sur la base [du point 8.2, sous c) à f),] ci-dessus, la Commission pourra exiger le remboursement de tout ou partie de sa participation financière, en tenant compte, sur une base équitable et raisonnable, de la nature et des résultats des travaux entrepris, ainsi que de leur utilité pour la Commission dans le cadre d’un programme de recherche et de développement technologique de la Communauté.

[…]

8.5      Lorsque le contrat est exécuté par plusieurs contractants, la Commission pourra décider de ne pas mettre fin au contrat lui-même conformément [au point 8.2] de la présente annexe, mais uniquement à la participation du contractant défaillant, à qui les dispositions des articles ci-dessus s’appliqueront selon les modalités que la Commission jugera raisonnables pour ledit contractant. À moins que des raisons valables ne justifient la résiliation du contrat lui-même, la Commission ne mettra fin normalement qu’à la seule participation du contractant défaillant.

[…]

8.6      Les dispositions suivantes du présent contrat resteront applicables nonobstant sa résiliation conformément à l’article 8 :

–      les articles 6, 7, 9, 10 et 12 de la présente annexe ;

–      la partie B [relative à la propriété, l’exploitation et la dissémination des résultats (articles 14 à 20)] de la présente annexe ;

–      les parties F [relative à la justification des dépenses (articles 36 à 38)] et G [relative au contrôle financier (article 39)] de la présente annexe, étant entendu que les relevés de dépenses ne couvriront que la période allant jusqu’à la date à laquelle la résiliation du contrat est devenue effective. »

 Faits à l’origine du litige

22      Trends est une société civile sans but lucratif de droit grec, constituée, conformément à la loi grecque, par contrat du 5 septembre 1991, sous la raison sociale Taseis, et dénommée en anglais Trends (Transport Environment Development Systems). Son siège social est situé à Athènes, en Grèce. Elle a pour associés MM. A. Tillis, M. Kontaratos, G. Argyrakos et K. Petrakis et Mme F. Koutroumpa. Trends a participé à divers projets communautaires de recherche et de développement technologique (RDT), dont les deux projets menés dans le cadre des contrats litigieux.

23      Conformément à l’article 4 des contrats litigieux, la Commission a versé au coordinateur de chaque projet en cause, à titre de participation financière, des sommes s’élevant au total à 405 333 euros dans le cadre du contrat BATT, dont 293 340,25 ont été perçus par Trends, et à 437 250 euros dans le cadre du contrat MIRO, dont 66 040 ont été perçus par Trends.

24      Du 7 au 11 octobre 1996, la Cour des comptes a contrôlé plusieurs contrats auxquels Trends était partie, dont les contrats litigieux, et a constaté que Trends avait, selon elle, commis de graves infractions financières. Selon la Cour des comptes, ces infractions consistaient notamment en une surestimation de ses coûts, en le non-respect de son engagement de financer elle-même une partie des projets en cause et en le non-respect des dispositions légales et fiscales grecques. La Cour des comptes recommandait à la Commission de faire le nécessaire afin de définir le montant des coûts surestimés et de récupérer les montants appropriés pour l’ensemble des contrats communautaires de RDT dont Trends pourrait être titulaire.

25      Du 7 au 10 octobre 1997, l’unité de coordination de la lutte antifraude de la Commission (UCLAF) a effectué un contrôle financier auprès de Trends, qui portait notamment sur les contrats litigieux. Par lettre du 10 mars 1998, l’UCLAF a invité Trends à lui fournir des explications et des informations complémentaires afin qu’elle puisse achever le contrôle financier. Cette lettre était accompagnée d’une liste des informations complémentaires demandées. Par lettre du 24 mars 1998, Trends a répondu notamment en exprimant sa surprise quant à cette demande d’informations complémentaires et en indiquant que tous les éléments nécessaires avaient déjà été fournis au cours du contrôle financier.

26      Le 3 juin 1998, Trends a saisi le Médiateur européen d’une plainte dirigée contre la Commission, alléguant que les agissements de cette dernière étaient déloyaux et contraires au principe de bonne administration.

27      Par lettre du 12 juin 1998, la Commission a transmis à Trends un résumé des conclusions auxquelles l’UCLAF était parvenue à la suite du contrôle financier effectué en octobre 1997. Cette lettre détaillait également les différentes stipulations contractuelles que Trends avait, selon l’UCLAF, violées. Ainsi, premièrement, Trends aurait violé le point 22.2 et les articles 23 et 33 des conditions générales en présentant à la Commission des relevés de dépenses contenant des dépenses systématiquement surestimées et ne correspondant pas aux dépenses réelles encourues pour la réalisation des projets en cause. Deuxièmement, Trends aurait violé le point 24.1 des conditions générales en ne calculant pas les dépenses de personnel sur la base des salaires et rémunérations bruts réels ou de tout autre frais directement lié à l’affectation des ressources humaines, tel que les charges sociales et les cotisations de retraite. Troisièmement, Trends aurait violé les points 25.1 et 25.2 des conditions générales en ne calculant pas les frais généraux conformément aux conventions comptables habituelles et en déclarant des frais généraux impossibles à contrôler et dépassant largement les coûts réels.

28      La Commission indiquait également dans cette lettre que, considérant ces violations des contrats litigieux, elle avait droit au remboursement du trop-perçu par Trends dans le cadre de ceux-ci. Elle invitait toutefois Trends à lui fournir, dans un délai d’un mois, des pièces justificatives démentant ces conclusions et l’avertissait que, à défaut, elle procéderait à l’établissement d’un ordre de recouvrement pour les montants correspondants.

29      Par lettre du 10 juillet 1998, Trends a répondu à la Commission qu’elle n’avait pas accepté les méthodes de contrôle retenues et qu’elle se réservait le droit de contester les conclusions de l’UCLAF. Elle exprimait également son désaccord avec l’intention de la Commission de résilier les contrats litigieux.

30      Par lettre du 9 septembre 1998, produite par la Commission en réponse à une demande en ce sens du Tribunal, la Commission a informé Trends que, les pièces justificatives de nature à démentir les conclusions du contrôle financier n’ayant pas été produites, il était mis fin à la participation de Trends aux contrats litigieux avec effet au 17 juillet 1998, conformément au point 8.2, sous d), de leurs conditions générales. Elle lui a en outre, notamment, demandé de rembourser les montants indûment versés tels qu’ils étaient spécifiés dans les tableaux joints à la lettre (ci-après les « tableaux récapitulatifs »).

31      Le 26 octobre 1998, la Commission a établi l’ordre de recouvrement n° 98006933A, adressé à Trends, par lequel elle lui réclamait le remboursement de 163 798 euros de trop-perçu dans le cadre du contrat BATT et de 31 637 euros de trop-perçu dans le cadre du contrat MIRO. Cet ordre de recouvrement était également relatif à deux autres contrats auxquels Trends était partie et qui font l’objet de l’affaire T‑448/04, opposant les mêmes parties.

32      Le 29 juin 1999, le Médiateur a rendu ses conclusions, constatant, d’une part, qu’il n’était pas compétent pour examiner le fond du litige et, d’autre part, que la Commission n’avait, en l’espèce, pas fait preuve de mauvaise gestion.

33      Les 13 mai, 2 août, 26 octobre et 29 octobre 1999, ainsi que le 8 février 2000, la Commission a, à nouveau, par lettre recommandée ou télécopie, invité Trends à lui rembourser un montant de 243 481 euros pour les quatre contrats concernés par l’ordre de recouvrement précité.

34      Par lettre du 8 février 2000, adressée à la Commission par télécopie du 9 février 2000, Trends a contesté les conclusions de l’UCLAF, qu’elle jugeait arbitraires, et, par conséquent, sa dette envers la Commission. Elle a également refusé de répondre à la demande de cette dernière sans discussion préalable du litige devant une autorité neutre.

35      Le 5 septembre 2001, la Commission a signifié à Trends une « mise en demeure, invitation à agir et protestation », l’invitant à acquitter le montant réclamé, majoré des intérêts légaux et contractuels ainsi que des intérêts de retard à compter du lendemain de l’échéance fixée par l’ordre de recouvrement précité, à savoir le 1er janvier 1999, et rappelant que, en l’absence de paiement, elle mettrait en œuvre les moyens de droit nécessaires afin de recouvrer ces sommes.

 Procédure et conclusions des parties

36      Par requête déposée au greffe de la Cour le 10 juin 2003, la Commission a introduit le présent recours. Il était dirigé contre Trends et contre ses cinq associés pris individuellement.

37      Par actes séparés déposés au greffe de la Cour le 3 octobre 2003, Trends a soulevé une exception d’irrecevabilité sur le fondement de l’article 91, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, relative aux intérêts réclamés par la Commission à titre principal, et a déposé une demande de retrait des actes de procédure d’un terme qu’elle considérait diffamatoire (ci-après la « demande incidente ») ainsi qu’un mémoire en défense.

38      Le 10 février 2004, la Commission a déposé ses observations sur l’exception d’irrecevabilité et sur la demande incidente. La procédure au fond s’est poursuivie entre la Commission et Trends par l’échange d’une réplique et d’une duplique.

39      Par ordonnance du 8 octobre 2004, la Cour a procédé au renvoi de l’affaire devant le Tribunal, en application de la décision 2004/407/CE, Euratom du Conseil, du 26 avril 2004, portant modification des articles 51 et 54 du protocole sur le statut de la Cour de justice (JO L 132, p. 5).

40      Par ordonnance du 17 février 2006, le Tribunal a rejeté comme irrecevable le recours de la Commission en tant qu’il était dirigé contre les cinq associés de Trends, en condamnant la Commission aux dépens afférents à cette irrecevabilité.

41      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal, a invité les parties à déposer certains documents et leur a posé par écrit des questions. Les parties ont déféré à ces demandes dans les délais impartis, la Commission ayant cependant fourni une des réponses demandées après l’expiration du délai qui avait été fixé par le Tribunal dans sa demande de renseignements. Le lendemain, veille de l’audience, la Commission a en outre déposé au greffe du Tribunal une version corrigée de cette dernière réponse.

42      Par ordonnances du 16 mars 2007, le Tribunal a joint au fond l’exception d’irrecevabilité et la demande incidente et les dépens ont été réservés.

43      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 18 avril 2007. Au cours de l’audience, les parties ont notamment précisé la portée de certaines de leurs conclusions, ce dont le Tribunal a pris acte.

44      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours recevable ;

–        condamner Trends à rembourser à la Commission la somme de 195 435 euros, soit 163 798 euros dans le cadre du contrat BATT et 31 637 euros dans le cadre du contrat MIRO, majorée des intérêts contractuels à compter du versement des montants indûment perçus jusqu’au remboursement intégral de la dette ou, à titre subsidiaire, majorée des intérêts de retard, dus à la Commission en vertu de l’article 94 du règlement (Euratom, CECA, CE) n° 3418/93 de la Commission, du 9 décembre 1993, portant modalités d’exécution de certaines dispositions du règlement financier du 21 décembre 1977 (JO L 315, p. 1), au taux de 5,50 %, à compter du 31 décembre 1998 jusqu’au remboursement intégral de la dette ;

–        condamner Trends aux dépens.

45      Trends conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        citer comme témoin M. A. Tsaousis ;

–        à titre principal, rejeter dans son intégralité le recours de la Commission, en ce qu’il est imprécis et, par conséquent, irrecevable et, subsidiairement, non fondé, tant pour la somme réclamée à titre principal que pour les intérêts réclamés à titre principal ou subsidiaire ;

–        à titre subsidiaire, réduire de 75 % la somme réclamée à titre principal et les intérêts qui seraient éventuellement alloués ;

–        condamner la Commission aux dépens.

46      Dans son exception d’irrecevabilité, Trends conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable en tant qu’il se rapporte à la demande principale concernant les intérêts ;

–        condamner la Commission aux dépens.

47      Dans sa demande incidente, Trends conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        ordonner à la Commission de supprimer de ses mémoires le terme « atasthalies » (malversations) et de le remplacer par le terme « paratypies » (irrégularités) ;

–        condamner la Commission aux dépens.

48      Dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter l’exception d’irrecevabilité ;

–        condamner Trends aux dépens.

49      Dans ses observations sur la demande incidente, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter la demande incidente ;

–        condamner Trends aux dépens.

50      Au cours de l’audience, Trends a en outre conclu à ce qu’il plaise au Tribunal déclarer irrecevables la réponse de la Commission produite en dehors du délai qui lui était imparti et la réponse qui lui a ensuite été substituée.

 En droit

51      À titre liminaire, il convient de relever que, bien que les clauses compromissoires en cause désignent la Cour, celles-ci doivent être comprises comme désignant la juridiction communautaire compétente en application des règles de répartition des compétences entre les juridictions communautaires (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 17 mars 2005, Commission/AMI Semiconductor Belgium e.a., C‑294/02, Rec. p. I‑2175, points 49, 50 et 52). Or, aux termes de la décision 2004/407, les recours visés à l’article 238 CE relèvent désormais en première instance de la compétence du Tribunal. Le Tribunal est par conséquent compétent pour connaître du présent recours.

1.     Sur la recevabilité du recours et de certaines annexes

 Sur la recevabilité du recours

 Arguments des parties

52      Sans soulever formellement une exception d’irrecevabilité par acte séparé au titre de l’article 114 du règlement de procédure, Trends soutient que le recours est imprécis et qu’il doit donc être rejeté comme irrecevable.

53      La Commission rétorque que son recours est recevable dans son intégralité.

 Appréciation du Tribunal

54      Il ressort, en substance, des mémoires déposés par Trends que, d’une part, l’argumentation qui y est développée tend à démontrer la seule irrecevabilité de la demande d’intérêts présentée à titre principal ou de certains arguments avancés par la Commission, l’essentiel des arguments présentés portant sur l’absence de bien-fondé des demandes de la Commission, et que, d’autre part, le seul élément invoqué par Trends au soutien de sa demande tendant à ce que le recours soit rejeté comme irrecevable est le caractère prétendument imprécis de la demande de la Commission. Celui-ci résulterait du fait que la Commission n’apporterait pas suffisamment d’éléments au soutien de son recours et du fait que la Commission n’aurait pas motivé les montants qu’elle réclame, celle-ci n’ayant pas expliqué les modalités de calcul ayant permis l’établissement des sommes dont le remboursement est demandé, ce qui aurait mis Trends dans l’impossibilité de se défendre et ce qui ne permettrait pas au Tribunal d’exercer le contrôle qui lui incombe.

55      Or, premièrement, le Tribunal constate que, dans sa requête, la Commission indique tant le fondement juridique de sa demande que les sommes dont elle demande le remboursement et les raisons pour lesquelles elle estime que sa demande est fondée. Deuxièmement, l’argumentation portant sur l’insuffisance d’éléments pouvant soutenir le recours de la Commission et sur l’absence d’indication des modalités de calcul a, en réalité, trait à la question du bien-fondé du recours et n’est donc pas pertinente pour en apprécier la recevabilité. Force est, au demeurant, de constater que Trends a bien été mise en mesure de se défendre, celle-ci ayant présenté un mémoire en défense et une duplique indiquant de manière très détaillée en quoi le recours de la Commission ne serait pas fondé.

56      Partant, le recours de la Commission n’est pas imprécis et, par suite, il y a lieu de rejeter le chef de conclusions de Trends tendant à ce que le recours de la Commission soit rejeté comme irrecevable, la question de l’irrecevabilité éventuelle de la demande principale de la Commission relative aux intérêts étant, à ce stade, réservée.

 Sur la recevabilité de certaines annexes

 Arguments des parties

57      Trends fait valoir que les documents produits par la Commission en annexe à sa réplique, en particulier les tableaux récapitulatifs faisant apparaître les sommes réclamées par contrat et par catégorie de coûts ainsi que le rapport établi par l’UCLAF à la suite de son contrôle financier et les documents qui y sont annexés et sur lesquels ce rapport s’appuie, ont été produits par la Commission en violation de l’article 48, paragraphe 1, du règlement de procédure et sont donc irrecevables.

58      La Commission rétorque qu’elle a le droit de produire des documents au stade de la réplique.

 Appréciation du Tribunal

59      Aux termes de l’article 48, paragraphe 1, du règlement de procédure, les parties peuvent encore faire des offres de preuve à l’appui de leur argumentation dans la réplique et la duplique, mais doivent alors motiver le retard apporté à la présentation de celles-ci. Cependant, selon la jurisprudence, la preuve contraire et l’ampliation des offres de preuve fournies à la suite d’une preuve contraire de la partie adverse dans son mémoire en défense ne sont pas visées par la règle de forclusion prévue à l’article 48, paragraphe 1, du règlement de procédure. En effet, cette disposition concerne les offres de preuve nouvelles et doit être lue à la lumière de l’article 66, paragraphe 2, dudit règlement, qui prévoit expressément que la preuve contraire et l’ampliation des offres de preuve restent réservées (arrêts de la Cour du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission, C‑185/95 P, Rec. p. I‑8417, points 71 et 72, et du Tribunal du 5 décembre 2006, Westfalen Gassen Nederland/Commission, T‑303/02, non encore publié au Recueil, point 189).

60      En l’espèce, ont été produits pour la première fois au stade de la réplique le rapport établi par l’UCLAF à la suite de son contrôle financier, accompagné de ses annexes (annexe 23 de la réplique), les tableaux récapitulatifs détaillant, par contrat et par catégories de coûts, les montants réclamés en l’espèce par la Commission (annexes 24 et 25 de la réplique), trois factures pour des services rendus en 1994 et en 1995 dans le cadre du contrat BATT (annexes 26 à 28 de la réplique) ainsi que deux documents relatifs à deux contrats qui ne font pas l’objet du présent litige (annexes 29 et 30 de la réplique).

61      S’agissant du rapport de l’UCLAF, il est constant que la lettre du 12 juin 1998, renvoyant aux conclusions auxquelles l’UCLAF était parvenue et détaillant l’essentiel des griefs formulés par l’UCLAF dans ce rapport à l’égard de Trends à la suite du contrôle financier, a été produite par la Commission en annexe à la requête.

62      S’agissant des annexes de ce rapport et des tableaux récapitulatifs, il faut relever à titre liminaire que ces annexes comportent différents courriers qui ont été échangés entre la Commission et Trends ainsi que des tableaux de chiffres détaillés, indiquant notamment les dépenses qui auraient été déclarées par Trends, les dépenses acceptées lors du contrôle financier et les montants dont Trends serait redevable. Or, tout d’abord, ces courriers concernent, pour l’essentiel, les préparatifs et le suivi du contrôle financier effectué par l’UCLAF, questions qui avaient déjà été abordées par la Commission dans sa requête. Certains des courriers annexés au rapport de l’UCLAF ont d’ailleurs déjà été produits par la Commission en annexe à sa requête. Ensuite, la Commission a produit en annexe à sa requête l’ordre de recouvrement, en date du 26 octobre 1998, qui indique, d’une part, dans la case intitulée « Justification de l’ordre de recouvrement », qu’il s’agit du contrôle financier effectué du 7 au 10 octobre 1997 et, d’autre part, le fait qu’il a pour objet de recouvrer les sommes versées en excédent notamment dans le cadre des deux contrats litigieux, les sommes correspondant aux contrats visés étant identifiables. Enfin, figurent également en annexe à la requête deux tableaux détaillant pour chaque contrat en cause les intérêts de retard à verser et qui, par conséquent, indiquent également le montant total dû par Trends pour chacun des contrats litigieux.

63      Le rapport de l’UCLAF, ses annexes et les tableaux récapitulatifs, joints pour la première fois à la réplique, ne constituent donc pas des offres de preuve nouvelles, comme Trends le prétend, mais l’ampliation de preuves qui avaient déjà été produites par la Commission au stade de la requête, ampliation qui vise à répondre en détail à l’argumentation développée par Trends dans son mémoire en défense ou à présenter de manière plus détaillée la composition des sommes dont le remboursement est demandé. Il s’ensuit que les documents joints par la Commission aux annexes 23 à 25 de sa réplique sont recevables.

64      Il en va de même des factures produites aux annexes 26 à 28 de la réplique, qui visent uniquement à étayer l’argument, avancé par la Commission dans sa requête, selon lequel Trends avait commis des irrégularités financières. Ces factures sont d’ailleurs produites par la Commission en annexe à sa réplique, au soutien de son argumentation selon laquelle, contrairement à ce que Trends avance, elle n’aurait pas fourni de pièces justificatives conformes aux conditions imposées par ses statuts, ce qui démontrerait l’existence de certains des manquements contractuels qui lui sont reprochés.

65      Quant aux annexes 29 et 30 de la réplique, elles sont relatives à des contrats qui ne font pas l’objet du présent litige et ne se rattachent pas à une preuve qui avait déjà été produite par la Commission au stade de la requête. En outre, la Commission n’explique pas pourquoi ces documents ont été produits en annexe à sa réplique ni quelle serait leur pertinence pour la solution du cas d’espèce. Les annexes 29 et 30 de la réplique doivent donc être écartées.

66      Au vu des circonstances de l’espèce, le Tribunal considère qu’il convient à présent d’examiner, à la lumière des considérations qui précèdent, le bien-fondé de la demande incidente et du recours, la question de la recevabilité des réponses tardives de la Commission étant, à ce stade, réservée.

2.     Sur la demande incidente

 Arguments des parties

67      En vertu d’un principe général commun aux droits des États membres réprimant l’emploi de termes méprisants à l’égard de la partie adverse au cours de la procédure devant les juridictions communautaires, Trends demande au Tribunal d’ordonner à la Commission de supprimer de ses actes de procédure le terme « atasthalies », qui renverrait au dol et serait disproportionné et diffamatoire, et de le remplacer par le terme plus neutre de « paratypies ».

68      La Commission rétorque que la demande incidente doit être rejetée, le terme utilisé étant neutre.

 Appréciation du Tribunal

69      Il n’appartient pas aux juridictions communautaires de restreindre la liberté d’expression dont bénéficient les parties, dans la limite du respect des règles déontologiques (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 décembre 2004, De Nicola/BEI, T‑120/01 et T‑300/01, RecFP p. I‑A‑365 et II‑1671, point 314). Or, le terme auquel Trends se réfère n’excède pas les limites de ce que permet la déontologie. La demande incidente doit donc être rejetée comme non fondée.

3.     Sur la demande de remboursement de la Commission

 Sur le droit applicable et la nature des contrats litigieux

 Arguments des parties

70      La Commission fait valoir que, bien que les droits grec et espagnol soient applicables aux contrats litigieux, le Tribunal doit trancher le litige sur la base des clauses contractuelles, suffisantes en l’espèce, interprétées sur la base de la volonté des parties contractantes, de la bonne foi et des règles qui régissent la gestion des fonds communautaires. Le Tribunal ne pourrait en toute hypothèse s’appuyer sur les dispositions de droit national que pour compléter ces règles contractuelles et communautaires et à condition qu’elles concordent avec celles-ci et soient compatibles avec les objectifs des actions communautaires concernées (conclusions de l’avocat général M. Lentz sous l’arrêt de la Cour du 8 avril 1992, Commission/Feilhauer, C‑209/90, Rec. p. I‑2613, I‑2622), les contrats litigieux n’étant pas des contrats synallagmatiques de droit civil, mais des contrats de subvention de droit public. Le fait qu’il puisse s’agir de contrats d’adhésion ne serait pas pertinent et Trends ne saurait donc tirer argument de leur nature pour prétexter une mauvaise compréhension de ceux-ci. Cela étant, à supposer même que les contrats litigieux soient exclusivement régis par les dispositions du Astikos Kodikas (code civil grec) relatives à l’enrichissement sans cause, l’issue du litige n’en serait pas modifiée.

71      Trends rétorque, tout d’abord, que le Tribunal doit trancher le litige sur la base du droit national applicable au contrat contenant la clause par laquelle il est saisi et que, dès lors que les contrats litigieux sont incomplets et ambigus, il y a lieu de s’en remettre à ce droit national. Le droit fiscal national, en tant que loi de police, serait de toute façon applicable. Elle fait observer, ensuite, que les contrats litigieux sont des contrats synallagmatiques et, en particulier pour ce qui est de leurs conditions générales, des contrats d’adhésion. Ainsi, le contrat BATT étant régi par le droit grec, il devrait en tout état de cause être interprété conformément au droit grec. La Commission estimerait d’ailleurs que la présente espèce est intégralement régie par le droit grec. Enfin, la Commission soutiendrait à tort que les conséquences juridiques découlant des dispositions du code civil grec relatives à l’enrichissement sans cause sont identiques à celles découlant de l’application des contrats litigieux. En tout état de cause, la Commission n’aurait pas démontré l’existence d’un enrichissement sans cause de Trends lors de la signification de la requête. L’obligation de restitution serait donc éteinte en vertu de l’article 909 du code civil grec.

 Appréciation du Tribunal

72      Selon la jurisprudence, les litiges nés lors de l’exécution d’un contrat doivent être tranchés principalement sur la base des clauses contractuelles, les parties demeurant tenues de remplir leurs obligations contractuelles quelle que soit la nature du contrat en cause (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 16 mai 2001, Toditec/Commission, T‑68/99, Rec. p. II‑1443, point 77, et du 15 mars 2005, GEF/Commission, T‑29/02, Rec. p. II‑835, point 108).

73      Il en résulte, d’une part, que la qualification d’un contrat n’a pas d’incidence sur la solution d’un litige contractuel dès lors que les clauses contractuelles fixent les règles relatives aux questions litigieuses. Il n’y a donc pas lieu, à ce stade, de déterminer la nature des contrats litigieux. D’autre part, l’interprétation d’un contrat au regard du droit qui lui est applicable ou du droit communautaire ne se justifie qu’en cas de doute sur le contenu de ce contrat. Or, ces doutes ne peuvent apparaître que lors de l’analyse au fond des conditions qu’il pose. En l’espèce, c’est donc en appréciant le bien-fondé de la demande de la Commission que le Tribunal déterminera si et, le cas échéant, dans quelle mesure, il est nécessaire de se référer à certaines dispositions du droit grec, du droit espagnol ou du droit communautaire afin d’apprécier la portée des obligations stipulées par les contrats litigieux.

 Sur l’existence de la créance de la Commission

 Observations liminaires

74      La Commission fait valoir, en substance, que, aux termes du point 8.2, sous e), et du point 8.5 des conditions générales, elle peut résilier les contrats litigieux à l’égard d’un contractant dès lors que ce contractant, dans le but d’obtenir le financement communautaire prévu, a fait des déclarations fausses ou incomplètes dont il peut être tenu pour responsable. Elle pourrait alors exiger le remboursement intégral ou partiel des montants versés à ce contractant, en vertu du point 8.4 des conditions générales. En l’espèce, le contrôle financier effectué par l’UCLAF aurait confirmé l’existence d’irrégularités financières déjà constatées par la Cour des comptes lors d’un contrôle précédent et Trends n’aurait fourni aucune pièce justificative permettant de démentir les conclusions de ce contrôle, qui aurait établi que Trends a perçu 163 798 euros en excédent dans le cadre du contrat BATT et 31 637 euros en excédent dans le cadre du contrat MIRO. En vertu du point 8.4 des conditions générales, Trends serait donc tenue de rembourser la somme de 195 435 euros, majorée des intérêts contractuels et des intérêts de retard.

75      La Commission fonde ainsi sa demande de remboursement sur le point 8.4 des conditions générales. Or, cette clause, applicable en cas de résiliation des contrats de manière générale ou en cas de résiliation des contrats à l’égard d’un contractant donné, porte uniquement sur les conséquences d’une telle résiliation. Afin de vérifier le bien-fondé du recours de la Commission, il appartient donc au Tribunal de vérifier, tout d’abord, si la Commission pouvait effectivement procéder à la résiliation des contrats litigieux à l’égard de Trends et, partant, il lui appartient de vérifier si les contrats litigieux étaient encore en cours lorsque la Commission a souhaité les résilier, cette dernière condition étant un préalable nécessaire à la possibilité de résiliation. Ce n’est que dans l’affirmative qu’il appartiendrait, ensuite, au Tribunal de vérifier si les agissements que la Commission reproche à Trends, motivant la résiliation des contrats litigieux, sont effectivement établis, si la Commission a établi que Trends avait perçu des sommes en excédent, à quel montant cet excédent s’élève et, enfin, si cette créance éventuelle peut être majorée d’intérêts.

 Sur la question préalable de la possibilité de résilier les contrats litigieux

76      Ainsi qu’il ressort du point 6 ci-dessus, l’article 13 des conditions générales prévoit que, sauf dispositions contraires, les contrats litigieux prennent fin à la plus récente des dates suivantes : la date d’approbation par la Commission du dernier rapport technique, la date d’approbation par la Commission du dernier document exigé par le contrat, la date de présentation du relevé récapitulatif des dépenses ou la date du dernier paiement effectué par la Commission. C’est à la lumière de ces stipulations qu’il convient de vérifier si, lorsque la Commission a considéré que la résiliation des contrats litigieux est devenue effective, à savoir le 17 juillet 1998, ces contrats étaient encore en cours. Les parties ont été interrogées à ce sujet par le Tribunal dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure. Au cours de l’audience, il a à nouveau été demandé aux parties d’indiquer notamment si les évènements mentionnés par l’article 13 des conditions générales étaient déjà survenus lorsque les contrats litigieux ont été résiliés à l’égard de Trends ou si, au contraire, un de ces évènements n’était pas survenu.

–       Arguments des parties

77      Dans sa réponse à la question écrite du Tribunal, la Commission a fait valoir que, lorsque la lettre du 12 juin 1998 a été envoyée à Trends, les contrats litigieux étaient encore en cours. L’article 13 des conditions générales ne viserait que des situations dans lesquelles les contrats litigieux ont été exécutés de manière complète ou ont expiré d’une autre manière que du fait d’une résiliation pour faute. Cette dernière serait d’ailleurs visée par une clause spécifique des conditions générales. L’article 13 des conditions générales ne serait ainsi pas applicable en l’espèce. Retenir une interprétation contraire aurait pour effet d’admettre qu’un paiement qui, par la suite, s’avérerait être le dernier, pourrait être assimilé à un acte mettant fin au contrat, ce qui ne pourrait être admis.

78      Lors de l’audience, la Commission a confirmé sa position selon laquelle les évènements indiqués à l’article 13 des conditions générales montrent que l’expiration des contrats litigieux ne peut intervenir qu’après que ces contrats aient été entièrement exécutés. Elle a ajouté qu’un échange de courrier entre les parties, en particulier la lettre de Trends jointe à l’annexe 9 de la requête, démontrerait que les contrats litigieux étaient encore en cours lorsqu’il a été procédé à leur résiliation.

79      Dans sa réponse à la question écrite du Tribunal, Trends a fait valoir que les derniers paiements visés par l’article 13 des conditions générales ont eu lieu le 12 avril 1996 pour le contrat BATT et le 15 décembre 1995 pour le contrat MIRO. L’approbation des derniers rapports techniques aurait eu lieu à la même période, dans la mesure où la Commission n’aurait pas achevé les paiements ou n’aurait pas utilisé les études préparées si les derniers rapports n’avaient pas été approuvés. De plus, les relevés récapitulatifs des dépenses auraient également été présentés à la même période. Trends en déduit que la Commission ne peut fonder son recours sur le point 8.2 des conditions générales.

80      Lors de l’audience, Trends a confirmé que les études visées par l’article 13 des conditions générales avaient été remises à la Commission et que les travaux prévus aux contrats litigieux avaient été terminés. Elle a ajouté, s’agissant du contrat BATT dans le cadre duquel elle agissait également en tant que coordinateur, avoir reçu le 21 mai 1996 la confirmation définitive de la Commission, qui permettrait de démontrer que toutes les obligations contractuelles avaient été exécutées. Quant aux lettres auxquelles la Commission se réfère pour soutenir la position selon laquelle les contrats litigieux ont bien été résiliés, elles n’auraient aucune valeur juridique.

–       Appréciation du Tribunal

81      Ainsi que cela a été indiqué au point 76 ci-dessus, il convient de vérifier si les contrats litigieux étaient toujours en cours lorsqu’ils ont été résiliés.

82      À cet égard, le Tribunal constate, en premier lieu, qu’il est constant que les projets en cause ont été exécutés. Trends a d’ailleurs affirmé lors de l’audience que toutes les études visées par les contrats litigieux avaient été remises à la Commission et que l’ensemble des travaux avaient été exécutés, sans être contredite sur ces points par la Commission. Par ailleurs, la Commission n’allègue pas que Trends a manqué à des obligations contractuelles autres que celles qui sont détaillées dans la lettre du 12 juin 1998, qui sont toutes liées à la seule nécessité de ne déclarer à la Commission que des dépenses réelles et justifiables (voir point 27 ci-dessus).

83      En deuxième lieu, la Commission indique dans sa requête que les derniers versements effectués au titre des contrats litigieux ont respectivement eu lieu le 12 avril 1996 (contrat BATT) et le 15 décembre 1995 (contrat MIRO) et que les ordres de paiement correspondants sont datés des 12 avril 1996 et 14 décembre 1995.

84      Certes, comme le fait valoir la Commission, la notion de dernier paiement visée par l’article 13 des conditions générales ne peut pas s’entendre d’un versement effectué par la Commission qui, par la suite, s’avérerait avoir été le dernier. Au contraire, il résulte du point 21.2, sous a) à c), des conditions générales, qui détaille les modalités du versement de la contribution financière de la Commission, que les paiements de la Commission consistent, premièrement, dans le versement d’une avance, dont le montant figure à l’article 4 des contrats litigieux, deuxièmement, dans le versement de paiements périodiques, dans les deux mois suivant l’approbation par la Commission des rapports d’avancement des travaux et des relevés de dépenses qui s’y rapportent, et, troisièmement, dans le versement du paiement final, en principe une retenue égale à un maximum de 10 % de la contribution financière communautaire totale ajustée du reste des sommes dues, dans les deux mois suivant l’approbation par la Commission du relevé récapitulatif des dépenses, du dernier rapport technique et du dernier document exigé par le contrat.

85      La notion de dernier paiement visée par l’article 13 des conditions générales ne peut donc s’entendre que de ce dernier paiement auquel le point 21.2, sous c), des conditions générales fait référence, lequel intervient nécessairement après le paiement de l’avance et les paiements périodiques. Il y a donc lieu de vérifier si les paiements auxquels la Commission se réfère constituent les derniers paiements visés par l’article 13 et le point 21.2, sous c), des conditions générales.

86      À cet égard, premièrement, il ressort du dossier que, parmi les ordres de paiement relatifs aux contrats litigieux, joints par la Commission à sa requête, les ordres de paiement respectivement datés du 12 avril 1996 (contrat BATT) et du 14 décembre 1995 (contrat MIRO) indiquent expressément qu’ils ont pour objet le paiement final relatif à chacun de ces contrats. Le montant du dernier versement effectué dans le cadre du contrat MIRO correspond d’ailleurs exactement à 10 % de la participation financière totale maximale que la Commission s’était engagée à verser en vertu du point 3.2 de ce contrat, soit 87 450 euros.

87      Deuxièmement, plusieurs lettres de la Commission, produites par Trends en annexe de son mémoire en défense, montrent également que les ordres de paiement auxquels la Commission se réfère étaient bien relatifs au dernier paiement visé par l’article 13 et le point 21.2, sous c), des conditions générales. Ainsi, tout d’abord, s’agissant du contrat BATT, par lettre du 15 février 1996, la Commission a adressé à Trends le relevé final consolidé des dépenses, établi sur la base des différents relevés qui lui ont été présentés au cours de l’exécution du contrat et reflétant la position finale de la Commission, et a demandé à Trends de faire en sorte que chaque partie au projet le contresigne et de le renvoyer à la Commission dans un délai de deux semaines, afin que, à la réception de ce document, le paiement final puisse être préparé, l’absence de réaction à ce document valant approbation. Cette lettre indiquait que ce paiement final s’élèverait à 65 233 euros et c’est effectivement le versement de cette somme qui a été ordonné par l’ordre de paiement du 12 avril 1996. La Commission a d’ailleurs ensuite informé Trends, par lettre du 20 mai 1996, que la procédure de paiement avait été enclenchée et que le paiement final de 65 233 euros allait être exécuté, tout en lui rappelant que les articles 7 et 8 du contrat et l’article 7 des conditions générales restaient en vigueur même après la fin du contrat. Enfin, s’agissant du contrat MIRO, par lettre du 23 octobre 1995 adressée à Trends, le gestionnaire financier du projet a informé Trends qu’il avait notamment reçu de la part de la Commission le relevé final consolidé des dépenses et que le paiement de la retenue finale de 10 % allait être exécuté. Pour ce contrat également, c’est effectivement le versement de cette somme qui a été ordonné par l’ordre de paiement du 14 décembre 1995.

88      Troisièmement, les tableaux Excel relatifs aux contrats litigieux, annexés à l’annexe 10 du rapport de l’UCLAF et détaillant, par catégories de coûts, notamment les sommes déclarées par Trends, les sommes considérées comme justifiées lors du contrôle financier et les sommes versées à Trends, indiquent expressément, sur la ligne totalisant les paiements reçus par Trends dans le cadre de chacun de ces contrats, qu’il s’agit à la fois des avances, des paiements périodiques et du paiement final. À cet égard, il importe de souligner qu’il ne peut s’agir d’indications stéréotypées, dans la mesure où un autre tableau similaire annexé au rapport de l’UCLAF, portant sur un contrat qui ne fait pas l’objet du présent litige, indique sur la même ligne, s’agissant des paiements reçus, que seule l’avance a été versée. De surcroît, aucune des parties n’a fait valoir que les éléments indiqués dans ces tableaux étaient erronés.

89      Quatrièmement, dans un document daté du 12 novembre 1997, également produit en annexe 10 du rapport de l’UCLAF, et qui a été établi par la Commission, il est aussi précisé, s’agissant des contrats litigieux, que le paiement final a été effectué. Il ne peut pas davantage s’agir d’une inscription stéréotypée, dans la mesure où, s’agissant d’un autre contrat, il est indiqué expressément dans le même document que le second paiement périodique et le paiement final sont en cours, mais n’ont pas encore été effectués.

90      Cinquièmement, dans un tableau joint à l’annexe 8 du rapport de l’UCLAF, il est également indiqué, dans la liste des paiements effectués en faveur de Trends, que, tant pour le contrat BATT que pour le contrat MIRO, les paiements finaux ont été effectués respectivement le 21 mai 1996 et le 15 février 1996.

91      Force est donc de constater que les versements ordonnés par les ordres de paiement des 12 avril 1996 et 14 décembre 1995 constituent bien les derniers paiements visés par l’article 13 et le point 21.2, sous c), des conditions générales et qu’il ne s’agit pas simplement, comme la Commission le sous-entend, de paiements qui se sont ensuite simplement avérés être les derniers.

92      Quant aux dates auxquelles ces versements ont été effectués, il convient de relever que les dates des 12 avril 1996 et 14 décembre 1995 qui apparaissent sur les ordres de paiement en cause correspondent en réalité aux dates auxquelles ces documents ont été imprimés, et non aux dates auxquelles les paiements ordonnés ont été effectués. En réalité, il ressort de l’ordre de paiement final relatif au contrat BATT qu’il n’a été signé par l’ordonnateur que le 22 avril 1996, la date correspondante s’agissant du contrat MIRO étant toutefois illisible.

93      Dans ces circonstances, considérant les dates d’envoi des lettres mentionnées au point 87 ci-dessus, les délais administratifs inhérents à l’exécution d’ordres de paiement et les dates apparaissant dans le tableau joint à l’annexe 8 du rapport de l’UCLAF, qui n’a pas été contesté par les parties, il y a lieu de retenir les dates des 21 mai 1996 et 15 février 1996 comme étant les dates auxquelles les derniers paiements visés par l’article 13 et le point 21.2, sous c), des conditions générales ont été effectués respectivement pour le contrat BATT et pour le contrat MIRO.

94      En troisième lieu, s’agissant des autres évènements visés par l’article 13 des conditions générales, si les parties n’ont pas été en mesure d’indiquer les dates auxquelles ils seraient survenus, elles n’ont pas davantage fait valoir qu’un de ces évènements n’était pas survenu, ainsi que cela ressort de leur argumentation exposée aux points 77 à 80 ci-dessus. Au contraire, Trends a affirmé, sans être contredite sur ce point par la Commission, que les rapports techniques et les relevés récapitulatifs des dépenses ainsi que les études visées par l’article 13 des conditions générales avaient été remis à la Commission.

95      En toute hypothèse, il ressort des contrats litigieux que les évènements visés à l’article 13 des conditions générales, autres que le dernier paiement effectué par la Commission, ne peuvent en réalité se produire que préalablement à ce dernier paiement. En effet, aux termes du point 21.2, sous c), des conditions générales, le dernier paiement, qui a en l’espèce été effectué pour chacun des contrats litigieux, ainsi qu’il résulte des points 82 à 91 ci-dessus, ne peut intervenir qu’après l’approbation du relevé récapitulatif des dépenses et donc, par hypothèse, après la présentation de celui-ci, après l’approbation du dernier rapport technique et après l’approbation du dernier document exigé par le contrat.

96      À cet égard, il y a lieu de relever que la notion de dernier document exigé par le contrat ne peut être comprise comme étant une référence faite aux pièces justificatives des dépenses déclarées. En effet, leur production n’est pas exigée par les contrats litigieux. Ainsi, d’une part, l’article 5 des contrats litigieux et les articles 36 et 37 des conditions générales se limitent à exiger que les contractants fournissent des relevés de dépenses, mais n’imposent pas que ces relevés soient accompagnés des pièces justificatives correspondantes. D’autre part, l’article 38 des conditions générales se limite à imposer aux contractants de conserver ces pièces justificatives.

97      De plus, certes, aux termes du point 36.4 des conditions générales, les contractants doivent fournir à la Commission, à sa demande, tous les détails relatifs aux relevés de dépenses dont elle aura besoin pour assurer la bonne gestion du contrat et, aux termes de l’article 39 des conditions générales, la Commission peut exiger que ces pièces justificatives lui soient remises dans le cadre d’un contrôle financier. Cependant, il ne peut en être déduit que ces pièces justificatives constituent des documents exigés par le contrat au sens de l’article 13 des conditions générales dans la mesure où il appartient à la Commission de les demander si elle l’estime nécessaire.

98      En quatrième lieu, le fait que le contrôle financier prévu à l’article 39 des conditions générales n’ait pas été effectué n’empêche pas plus le contrat concerné de prendre fin, cet article stipulant expressément que ce contrôle peut être exécuté dans les deux ans suivant la fin du contrat. De même, si le contrôle financier peut conduire à la résiliation du contrat, il peut également être sans effet sur celle-ci, dans la mesure où il peut également être effectué après la fin du contrat, que celle-ci résulte de son expiration ou de sa résiliation.

99      Ainsi, au vu des éléments qui précèdent, il y a lieu de constater que le paiement final effectué le 21 mai 1996 et le paiement final effectué le 15 février 1996 ont bien mis fin respectivement au contrat BATT et au contrat MIRO, conformément à l’article 13 de leurs conditions générales.

100    L’interprétation des contrats litigieux défendue par la Commission, selon laquelle l’article 13 de leurs conditions générales ne serait pas applicable en l’espèce, ne peut être retenue.

101    Premièrement, comme le fait justement observer la Commission, la résiliation des contrats litigieux est visée par d’autres clauses que celles relatives à la fin des contrats. Ainsi, le point 2.2 des contrats litigieux prévoit que les contractants pourront mettre fin au contrat dans les conditions prévues au point 8.2 des conditions générales, relatif à la résiliation de ces contrats. Toutefois, ces stipulations n’excluent pas que les contrats litigieux puissent prendre fin ou expirer du fait d’autres circonstances.

102    Deuxièmement, certes, il peut être admis que des contrats ne puissent pas expirer avant d’avoir été complètement exécutés. Cependant, en l’espèce, force est tout d’abord de constater, à la lecture des contrats litigieux, que ceux-ci sont considérés comme étant complètement exécutés dès lors que l’ensemble des actes prévus à l’article 13 des conditions générales et, par hypothèse, des actes qui les précèdent nécessairement, tels que la remise de rapports relatifs à l’état d’avancement des travaux, ont été exécutés. Or, il a été constaté précédemment que tel était le cas en l’espèce. De plus, comme il a déjà été indiqué au point 98 ci-dessus, les contrats litigieux ne prévoient pas qu’ils ne peuvent pas prendre fin avant que le contrôle financier ait été exécuté et que le contractant concerné ait produit tous les documents demandés dans le cadre de celui-ci ou ait réussi à justifier, lors de ce contrôle, l’ensemble des dépenses déclarées pour lesquelles il a bénéficié du financement communautaire prévu au contrat.

103    Ensuite, l’interprétation avancée par la Commission est clairement contraire aux stipulations contractuelles. En effet, elle revient à considérer que, si un contractant ne produit pas les justificatifs demandés dans le cadre d’un contrôle financier, il n’a pas complètement exécuté le contrat et que le contrat ne peut pas prendre fin, quand bien même l’ensemble des évènements prévus à l’article 13 des conditions générales seraient survenus.

104    Enfin, l’interprétation proposée par la Commission est également contraire au principe de sécurité juridique. Ainsi, d’une part, retenir cette interprétation permettrait une remise en vigueur rétroactive d’un contrat préalablement expiré du seul fait que, dans le cadre d’un contrôle financier qui serait effectué dans le délai de deux ans suivant la fin du contrat, le contractant contrôlé refuserait de produire les documents demandés par la Commission. D’autre part, cette interprétation impliquerait que le contrôle financier prévu à l’article 39 des conditions générales puisse être exécuté sans limitation de temps, dans la mesure où, le refus de production de document signifiant que le contrat n’a pas été complètement exécuté, et n’a donc pas pris fin, le délai de deux ans suivant la fin du contrat, marquant la limite dans laquelle ce contrôle financier peut être effectué, n’aurait, rétroactivement, pas pu commencer à courir. Cela ne correspond d’ailleurs manifestement pas à la volonté des parties exprimée par la signature des contrats litigieux, ces derniers prévoyant expressément une limite temporelle après laquelle le contrôle financier visé par l’article 39 des conditions générales ne peut plus intervenir.

105    Les contrats litigieux avaient donc bien expiré avant que la Commission n’ait décidé de leur résiliation à l’égard de Trends.

106    Le fait que les parties aient pu, dans certains courriers échangés au cours de l’année 1998, considérer que tel n’était pas le cas ne permet pas d’infirmer cette conclusion. D’une part, une erreur commise par les parties quant à une circonstance factuelle, deux années après les faits, ne saurait lier le Tribunal et ne saurait davantage permettre de remettre en cause la valeur probante des très nombreux éléments du dossier, généralement établis au moment des faits, qui montrent clairement que les contrats litigieux ont expiré aux dates respectives du 21 mai 1996 (contrat BATT) et du 15 février 1996 (contrat MIRO), ainsi qu’il résulte de l’analyse développée ci-dessus.

107    D’autre part, en toute hypothèse, aucune des lettres auxquelles les parties renvoient n’est concluante s’agissant du fait que les contrats litigieux auraient encore été en cours le 17 juillet 1998.

108    Premièrement, la lettre de Trends du 24 mars 1998, jointe à l’annexe 9 de la requête, n’a pas la portée que la Commission lui confère. En effet, il ressort de cette lettre qu’elle ne porte pas sur les seuls contrats litigieux, mais sur l’ensemble des contrats qui ont fait l’objet du contrôle financier effectué par l’UCLAF. Ainsi, le fait que Trends y mentionne de manière générale que la Commission aurait, de manière arbitraire, retenu certains paiements et que cette attitude affecte sa participation aux programmes de recherche en cours ne permet pas de conclure que Trends considérait que les contrats litigieux étaient alors encore en cours.

109    Deuxièmement, il est vrai que, dans sa lettre du 9 septembre 1998, la Commission indique à Trends qu’elle met fin à sa participation aux contrats litigieux et qu’elle n’effectuera plus d’autre paiement en sa faveur. Cependant, cette lettre fait notamment suite à la lettre de la Commission du 12 juin 1998, qui se contentait de mentionner l’obligation de remboursement qui s’imposait à Trends, sans indiquer qu’il serait mis fin à sa participation aux contrats litigieux. De plus, lors de l’audience, la Commission n’a pas exclu que la formulation relative à la suspension des paiements puisse être une formulation stéréotypée. Considérant en outre le fait que cette lettre a été établie plus de deux ans après l’achèvement des projets en cause et que, ainsi qu’il ressort du rapport de l’UCLAF, le contrôle financier auquel elle se réfère n’a pas porté sur les seuls contrats litigieux, mais également sur plus d’une dizaine d’autres contrats auxquels Trends, ou la société Trends Europe Ltd, était partie et qui en étaient à des degrés de réalisation différents, la lettre du 9 septembre 1998 ne permet pas de remettre en cause la valeur probante des éléments et des documents analysés aux points 82 à 90 ci-dessus.

110    Troisièmement, la lettre de Trends du 10 juillet 1998, dans le cadre de laquelle la lettre du 9 septembre 1998 s’inscrit également, n’est pas davantage concluante à cet égard. Certes, Trends y conteste les conclusions du contrôle financier et y exprime son désaccord avec l’intention de la Commission de procéder à la résiliation des contrats litigieux. Cependant, il convient de rappeler que la lettre du 12 juin 1998, à laquelle cette lettre répond, ne mentionne pas que la Commission a l’intention de procéder à la résiliation des contrats litigieux. Ainsi, et pour les raisons déjà exposées au point précédent, cette lettre n’est pas non plus en mesure de remettre en cause la valeur probante des éléments et des documents analysés aux points 82 à 90 ci-dessus.

111    Les contrats BATT et MIRO ayant donc expiré respectivement le 21 mai 1996 et le 15 février 1996, la Commission ne pouvait les résilier avec effet au 17 juillet 1998. Par suite, la Commission n’est, en l’espèce, pas fondée à se prévaloir du point 8.4 des conditions générales, applicable uniquement en cas de résiliation des contrats litigieux, pour obtenir le remboursement des sommes qui auraient été versées à Trends en excédent.

112    Le fait que, dans sa réplique, la Commission indique également de manière incidente que, par son recours, elle demande l’exécution de l’obligation de remboursement à laquelle Trends s’est contractuellement engagée en vertu du point 21.3 des conditions générales, est sans incidence. En effet, cette clause contractuelle n’est même pas mentionnée par la Commission dans sa requête, requête qui, au contraire, expose clairement que la Commission fonde son recours sur la seule obligation de remboursement découlant du point 8.4 des conditions générales. Dès lors, l’argumentation que la Commission développe de manière accessoire dans sa réplique à propos du point 21.3 des conditions générales est une argumentation qui modifie le fondement même de l’obligation de remboursement à laquelle Trends serait tenue et qui doit donc être regardée comme constituant un moyen nouveau dont l’invocation est interdite en cours d’instance (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 14 octobre 1999, Atlanta/Communauté européenne, C‑104/97 P, Rec. p. I‑6983, point 27). Elle est, de ce fait, irrecevable, celle-ci ne se fondant sur aucun élément de droit ou de fait qui se serait révélé pendant la procédure (voir, en ce sens, arrêt Atlanta/Communauté européenne, précité, point 29).

113    Enfin, le fait que les paiements réalisés par la Commission puissent, à l’issue d’un contrôle financier tel que celui-ci effectué en l’espèce par l’UCLAF, être requalifiés de simples avances en vertu du point 21.4 des conditions générales n’est pas davantage pertinent. Il est vrai qu’il peut effectivement en découler une obligation de remboursement pour le contractant concerné. Cependant, pour les raisons déjà exposées précédemment, il ne peut être admis qu’un tel contrôle puisse avoir pour effet de remettre en vigueur un contrat ayant préalablement expiré. Il s’ensuit que, même si un tel contrôle révélait qu’un contractant a perçu des sommes en excédent, la Commission ne serait pas pour autant fondée à se prévaloir du point 8.4 des conditions générales, qui n’est applicable que dans les cas de résiliation d’un contrat. De surcroît, retenir une interprétation du point 21.4 des conditions générales selon laquelle la requalification des paiements en avances empêcherait rétroactivement l’expiration des contrats litigieux ne peut pas non plus être acceptée, pour les mêmes raisons que celles déjà exposées aux points 102 à 104 ci-dessus.

114    Partant, le recours doit être rejeté comme non fondé, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur les exceptions d’irrecevabilité soulevées et la demande d’audition de témoin présentée par Trends.

 Sur les dépens

115    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de Trends. Trends ayant cependant succombé sur sa demande incidente, il y a lieu de la condamner aux dépens afférents à celle-ci, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La demande incidente est rejetée.

3)      La Commission supportera les dépens, à l’exception de ceux afférents à la demande incidente.

4)      Transport Environment Development Systems (Trends) supportera les dépens afférents à la demande incidente.

Legal

Wiszniewska-Białecka

Moavero Milanesi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 septembre 2007.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       H. Legal


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* Langue de procédure : le grec.