Language of document : ECLI:EU:T:2019:517

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

12 juillet 2019 (*)

« Concurrence – Ententes – Marché des lecteurs de disques optiques – Décision constatant une infraction à l’article 101 TFUE et à l’article 53 de l’accord EEE – Accords collusoires portant sur des appels d’offres relatifs à des lecteurs de disques optiques pour ordinateurs portables et ordinateurs de bureau – Infraction par objet – Droits de la défense – Obligation de motivation – Principe de bonne administration – Amendes – Infraction unique et continue – Lignes directrices de 2006 pour le calcul du montant des amendes »

Dans l’affaire T‑763/15

Sony Optiarc, Inc., établie à Atsugi (Japon),

Sony Optiarc America, Inc., établie à San Jose, Californie (États‑Unis),

représentées par Me R. Snelders, avocat, M. N. Levy et Mme E. Kelly, solicitors,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. M. Farley, A. Biolan, C. Giolito, Mmes F. van Schaik et L. Wildpanner, puis par M. Farley, Mmes van Schaik, Wildpanner et M. A. Dawes, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant, à titre principal, à l’annulation partielle de la décision C(2015) 7135 final de la Commission, du 21 octobre 2015, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire AT.39639 – Lecteurs de disques optiques), et, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de l’amende infligée aux requérantes,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de M. D. Gratsias, président, Mme I. Labucka et M. I. Ulloa Rubio (rapporteur), juges,

greffier : Mme N. Schall, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 2 mai 2018,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Aux termes de la décision C(2015) 7135 final relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire AT.39639 – Lecteurs de disques optiques) (ci-après la « décision attaquée »), concernant des accords collusoires portant sur des appels d’offres relatifs à des lecteurs de disques optiques pour ordinateurs portables et ordinateurs de bureau, organisés par deux fabricants d’ordinateurs, la première requérante, Sony Optiarc, Inc. (anciennement dénommée Sony NEC Optiarc Inc.), est une société par actions de droit japonais. Elle a été fondée le 3 avril 2006 en tant qu’entreprise commune de Sony Corporation et de NEC Corporation, sous la dénomination Sony NEC Optiarc Inc. Chaque société mère a apporté son activité respective dans le secteur des lecteurs de disques optiques (ci-après les « LDO ») à Sony NEC Optiarc. Sony Corporation a acquis 55 % des actions assorties d’un droit de vote de cette entreprise commune, et NEC Corporation, les 45 % restants (décision attaquée, considérant 19).

2        À partir du 2 avril 2007, Sony NEC Optiarc, avec la filiale qu’elle détient à 100 %, Sony NEC Optiarc America, Inc., la seconde requérante, a négocié et obtenu des contrats à la suite d’appels d’offres et a pris des commandes, au moins de la part de Dell, portant sur des LDO. Sony NEC Optiarc et Sony NEC Optiarc America sont désignées ensemble « Sony Optiarc » dans la décision attaquée. Par opposition, « Sony/Optiarc » désigne, dans la décision attaquée, le duo composé de Sony et de Sony Optiarc, qui ont, conjointement, produit des déclarations orales et répondu à des demandes de renseignements de la Commission européenne. Après le 1er septembre 2007, Sony NEC Optiarc a continué à participer aux procédures d’appel d’offres organisées par Dell. Elle était secondée par un employé de Sony Electronics (Singapore) Pte. Ltd, agissant au nom de Sony Optiarc et sur la base de ses instructions (décision attaquée, considérant 21).

3        L’infraction en cause concerne des LDO utilisés dans des ordinateurs personnels (ordinateurs de bureau et ordinateurs portables) (ci-après les « PC ») produits par Dell et Hewlett Packard (ci-après « HP »). Les LDO sont également utilisés dans de nombreux autres appareils à l’usage des consommateurs, tels que des lecteurs de disques compacts ou de disques optiques numériques (ci-après les « DVD »), des consoles de jeu et d’autres appareils électroniques périphériques (décision attaquée, considérant 28). 

4        Les LDO utilisés dans les PC varient selon leur dimension, leurs mécanismes de chargement (fente ou plateau) et les types de disques qu’ils peuvent lire ou enregistrer. Les LDO peuvent être divisés en deux groupes : les lecteurs mi-hauteur (« half-height », ci-après « HH ») pour ordinateurs de bureau et les lecteurs minces pour ordinateurs portables. Le sous-groupe des lecteurs minces regroupe des lecteurs de dimensions différentes. Il y a différents types de lecteurs HH et de lecteurs minces selon leur fonctionnalité technique (décision attaquée, considérant 29).

5        Dell et HP sont les deux principaux fabricants de produits d’origine sur le marché mondial des PC. Dell et HP utilisent des procédures d’appel d’offres classiques menées à l’échelle mondiale impliquant, notamment, des négociations trimestrielles sur un prix au niveau mondial et sur des volumes d’achats globaux avec un petit nombre de fournisseurs présélectionnés de LDO. En règle générale, les questions régionales n’ont joué aucun rôle dans les appels d’offres pour des LDO autres que ceux liés à la demande escomptée pour des régions influençant les volumes d’achats globaux (décision attaquée, considérant 32).

6        Les procédures d’appel d’offres comprenaient des demandes de devis, des demandes de devis électroniques, des négociations en ligne, des enchères électroniques et des négociations bilatérales (hors ligne). À la clôture d’un appel d’offres, les clients attribuaient des volumes aux fournisseurs de LDO participants (à tous ou au moins à la plupart d’entre eux, sauf si un mécanisme d’exclusion était en place) selon les prix qu’ils offraient. Par exemple, l’offre gagnante recevrait de 35 à 45 % de l’attribution totale du marché pour le trimestre en question, la deuxième meilleure offre de 25 à 30 %, la troisième 20 %, etc. Ces procédures d’appel d’offres classiques étaient utilisées par les équipes des clients chargées des appels d’offres dans le but de réaliser un appel d’offres efficace à des prix compétitifs. À cette fin, elles utilisaient toutes les pratiques possibles pour stimuler la concurrence sur les prix entre les fournisseurs de LDO (décision attaquée, considérant 33).

7        En ce qui concerne Dell, elle a principalement réalisé les appels d’offres par voie de négociation en ligne. Celle-ci pouvait avoir une durée déterminée ou s’achever après une période définie, par exemple dix minutes après la dernière offre, lorsque aucun fournisseur de LDO ne faisait de nouvelle offre. Dans certains cas, la négociation en ligne pouvait durer plusieurs heures si l’appel d’offres était plus animé ou si la durée de la négociation en ligne était prolongée afin d’inciter les fournisseurs de LDO à continuer de faire des offres. À l’inverse, même lorsque la durée d’une négociation en ligne était indéterminée et dépendait de l’offre finale, Dell pouvait annoncer à un certain moment la clôture de la négociation en ligne. Dell pouvait décider de passer d’une procédure par « classement uniquement » à une procédure « à l’aveugle ». Dell pouvait annuler la négociation en ligne si l’appel d’offres ou son résultat étaient jugés insatisfaisants et pouvait, à la place, conduire des négociations bilatérales. Le processus de négociation en ligne était supervisé par les gestionnaires mondiaux des acquisitions chargés de ces opérations chez Dell (décision attaquée, considérant 37).

8        En ce qui concerne HP, les principales procédures d’appel d’offres utilisées étaient les demandes de devis et les demandes de devis électroniques. Les deux procédures ont été réalisées en ligne en utilisant la même plateforme. S’agissant, d’une part, des demandes de devis, celles-ci étaient trimestrielles. Elles combinaient des négociations en ligne et des négociations bilatérales hors ligne réparties sur une certaine période de temps, généralement deux semaines. Les fournisseurs de LDO étaient invités à un tour d’appel d’offres ouvert pendant une période déterminée pour soumettre leur devis sur plateforme en ligne ou par courrier électronique. Une fois le premier tour d’enchères écoulé, HP se réunissait avec chaque participant et entamait des négociations sur la base de l’offre du fournisseur de LDO afin d’obtenir la meilleure offre de chaque fournisseur sans divulguer l’identité ou l’offre soumise par les autres fournisseurs de LDO. S’agissant, d’autre part, des demandes de devis électroniques, elles étaient normalement organisées sous la forme d’un appel d’offres inversé. Les soumissionnaires se connectaient alors à la plateforme en ligne à l’heure spécifiée et la vente aux enchères commençait au prix fixé par HP. Les soumissionnaires présentant des offres progressivement réduites étaient informés de leur propre rang chaque fois qu’une nouvelle offre était soumise. À la fin du temps imparti, le fournisseur de LDO ayant entré l’offre la plus basse gagnait la vente aux enchères et les autres fournisseurs étaient classés deuxième et troisième selon leurs offres (décision attaquée, considérants 41 à 44).

 Procédure administrative

9        Le 14 janvier 2009, la Commission a reçu une demande d’immunité au titre de sa communication sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2006, C 298, p. 17, ci-après la « communication sur la coopération ») introduite par Philips. Les 29 janvier et 2 mars 2009, cette demande a été complétée afin d’y inclure, aux côtés de Philips, Lite-On et leur entreprise commune Philips & Lite-On Digital Solutions Corporation (ci-après « PLDS ») (décision attaquée, considérant 54).

10      Le 29 juin 2009, la Commission a envoyé une demande de renseignements à des entreprises actives dans le domaine des LDO (décision attaquée, considérant 55).

11      Le 30 juin 2009, la Commission a accordé une immunité conditionnelle à Philips, à Lite-On et à PLDS (décision attaquée, considérant 56).

12      Le 18 juillet 2012, la Commission a adressé une communication des griefs à treize fournisseurs de LDO, dont les requérantes (ci-après la « communication des griefs »). Elle a indiqué que ces sociétés avaient enfreint l’article 101 TFUE et l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen (EEE, en participant à une entente concernant les LDO s’étendant du 5 février 2004 au 29 juin 2009 consistant à coordonner leur comportement au sujet des appels d’offres organisés par deux fabricants d’ordinateur, Dell et HP.

13      Le 29 octobre 2012, en réponse à la communication des griefs, les requérantes ont présenté ensemble leurs observations écrites.

14      Le 23 novembre 2012, Dell a répondu à la demande de renseignements que lui avait adressée la Commission (décision attaquée, considérant 61).

15      Une audition orale s’est tenue les 29 et 30 novembre 2012 à laquelle ont participé tous les destinataires de la communication des griefs (décision attaquée, considérant 60).

16      Le 14 décembre 2012, la Commission a demandé à toutes les parties de fournir les documents pertinents reçus de Dell et de HP. Toutes les parties ont répondu à ces demandes et chacune a eu accès aux réponses fournies par les autres fournisseurs de LDO (décision attaquée, considérant 62).

17      Le 21 octobre 2015, la Commission a adopté la décision attaquée.

 Décision attaquée

18      Dans la décision attaquée, la Commission a considéré que les participants à l’entente avaient coordonné leur comportement concurrentiel, au moins du 23 juin 2004 au 25 novembre 2008. Elle a précisé que cette coordination s’était faite au moyen d’un réseau de contacts bilatéraux parallèles. Elle a indiqué que les participants à l’entente cherchaient à adapter leurs volumes sur le marché et à faire en sorte que les prix restent à des niveaux plus élevés que ce qu’ils auraient été en l’absence de ces contacts bilatéraux (décision attaquée, considérant 67).

19      La Commission a précisé, dans la décision attaquée, que la coordination entre les participants à l’entente concernait les comptes clients de Dell et de HP, les deux plus importants fabricants de produits d’origine sur le marché mondial des PC. Selon la Commission, en plus des négociations bilatérales avec leurs fournisseurs de LDO, Dell et HP appliquaient des procédures d’appel d’offres standardisées, qui avaient lieu au minimum à chaque trimestre. Elle a relevé que les membres de l’entente utilisaient leur réseau de contacts bilatéraux pour manipuler ces procédures d’appel d’offres, contrecarrant ainsi les tentatives de leurs clients de stimuler la concurrence par les prix (décision attaquée, considérant 68).

20      Selon la Commission, les échanges réguliers d’informations ont notamment permis aux membres de l’entente de posséder une connaissance très fine des intentions de leurs concurrents avant même de s’engager dans la procédure d’appel d’offres, et par conséquent, de prévoir leur stratégie concurrentielle (décision attaquée, considérant 69).

21      La Commission a ajouté que, à intervalles réguliers, les membres de l’entente échangeaient des informations sur les prix concernant des comptes clients particuliers ainsi que des informations sans rapport avec le prix, telles que la production existante et la capacité de fourniture, l’état du stock, la situation au regard de la qualification, le moment de l’introduction de nouveaux produits ou d’améliorations. Elle a relevé que, de plus, les fournisseurs de LDO surveillaient les résultats finaux de procédures d’appel d’offres clôturées, c’est-à-dire le classement, le prix et le volume obtenus (décision attaquée considérant 70).

22      La Commission a également indiqué que, tout en ayant à l’esprit qu’ils devaient garder leurs contacts secrets à l’égard des clients, les fournisseurs utilisaient, pour se contacter, les moyens qu’ils jugeaient être suffisamment aptes à atteindre le résultat souhaité. Elle a précisé que, d’ailleurs, une tentative de convoquer une réunion de lancement pour organiser des réunions multilatérales régulières entre les fournisseurs de LDO avait échoué en 2003 après avoir été révélée à un client. Selon la Commission, à la place, il y a eu des contacts bilatéraux, essentiellement sous forme d’appels téléphoniques et, parfois, aussi par messages électroniques, y compris sur des adresses de courriel privées (hotmail) et des services de messageries instantanées, ou lors de réunions, principalement au niveau des gestionnaires de comptes mondiaux (décision attaquée, considérant 71).

23      La Commission a constaté que les participants à l’entente se contactaient régulièrement et que les contacts, principalement par téléphone, devenaient plus fréquents au moment des procédures d’appel d’offres durant lesquelles intervenaient plusieurs appels par jour entre certains binômes de participants à l’entente. Elle a précisé que, généralement, les contacts entre certains binômes de participants à l’entente étaient significativement plus élevés qu’entre certains autres (décision attaquée, considérant 72).

24      S’agissant du calcul du montant de l’amende infligée aux requérantes, la Commission s’est fondée sur les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement (CE) no 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après les « lignes directrices sur le calcul des amendes »).

25      Tout d’abord, pour déterminer le montant de base de l’amende, la Commission a considéré que, compte tenu des différences considérables dans la durée de participation des fournisseurs et afin de mieux traduire l’incidence réelle de l’entente, il était approprié de recourir à une moyenne annuelle calculée sur la base de la valeur réelle des ventes réalisées par les entreprises durant les mois civils complets de leur participation respective à l’infraction (décision attaquée, considérant 527).

26      La Commission a ainsi expliqué que la valeur des ventes a été calculée sur la base des ventes de LDO destinés aux ordinateurs portables et de bureau facturées aux entités de HP et de Dell situées dans l’EEE (décision attaquée, considérant 528).

27      La Commission a, par ailleurs, considéré que, étant donné que le comportement anticoncurrentiel à l’égard de HP avait commencé plus tard et afin de tenir compte de l’évolution de l’entente, la valeur des ventes pertinente serait calculée séparément pour HP et pour Dell, et deux coefficients multiplicateurs en fonction de la durée seraient appliqués (décision attaquée, considérant 530).

28      En ce qui concerne les requérantes, la participation de Sony Optiarc dans les contacts à l’égard de HP n’ayant pas été établie, la Commission n’a retenu leur responsabilité que pour leur coordination à l’égard de Dell (décision attaquée, considérant 531).

29      Ensuite, la Commission a décidé que, dès lors que les accords de coordination des prix comptaient, de par leur nature même, parmi les infractions les plus graves à l’article 101 TFUE et à l’article 53 de l’accord EEE, et que l’entente s’étendait au moins à l’EEE, le pourcentage appliqué au titre de la gravité en l’espèce serait de 16 % pour tous les destinataires de la décision attaquée (décision attaquée, considérant 544).

30      Par ailleurs, la Commission a indiqué que, eu égard aux circonstances de l’espèce, elle avait décidé d’ajouter un montant additionnel à des fins dissuasives de 16 % (décision attaquée, considérants 554 et 555).

31      En outre, la Commission a réduit le montant de l’amende infligée aux requérantes de 3 % pour tenir compte du fait qu’elles n’avaient pas connaissance de la partie de l’infraction unique et continue afférente à HP, afin de refléter de manière appropriée et suffisante la nature moins grave de leur comportement (décision attaquée, considérant 561).

32      Le dispositif de la décision attaquée, pour autant qu’il concerne les requérantes, se lit comme suit :

« Article 1er

Les entreprises suivantes ont enfreint l’article 101 TFUE et l’article 53 de l’accord EEE en participant, durant les périodes indiquées, à une infraction unique et continue, composée de plusieurs infractions distinctes, dans le secteur des lecteurs de disques optiques couvrant l’ensemble de l’EEE, qui a consisté en des accords de coordination des prix :

[...]

g)       Sony Optiarc Inc. du 25 juillet 2007 au 29 octobre 2008, Sony Optiarc America Inc. du 25 juillet 2007 au 31 octobre 2007, pour leur coordination à l’égard de Dell

Article 2

Les amendes suivantes sont infligées pour l’infraction visée à l’article 1er :

[...]

g)       Sony Optiarc Inc.: 9 782 000 euros, dont 5 433 000 euros solidairement responsable avec Sony Optiarc America Inc ».

 Procédure et conclusions des parties

33      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 31 décembre 2015, les requérantes ont introduit le présent recours.

34       La Commission a déposé son mémoire en défense le 25 mai 2016.

35      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure.

36      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 2 mai 2018.

37      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en ce qu’elle les concerne ;

–         à titre subsidiaire, réduire le montant de l’amende qui leur a été infligée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

38      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–         condamner les requérantes aux dépens.

 En droit

39      Les requérantes soulèvent deux moyens au soutien du présent recours, le premier étant relatif, en substance, à l’existence d’une infraction à l’article 101, paragraphe 1, TFUE et, le second, soulevé à titre subsidiaire, au calcul du montant de l’amende infligée.

 Sur le premier moyen, tiré de l’existence d’erreurs de fait et de droit en ce qui concerne le constat d’une infraction à l’article 101, paragraphe 1, TFUE

40      En substance, les arguments développés par les requérantes dans le cadre du premier moyen peuvent ainsi être articulés en quatre branches. Premièrement, la décision attaquée serait entachée d’erreurs de fait et de droit en ce que la Commission a conclu que Sony Optiarc avait commis une infraction « par objet » à l’article 101 TFUE et à l’article 53 de l’accord EEE. En effet, la Commission n’indiquerait, dans la décision attaquée, aucun élément permettant de prouver que, contrairement à plusieurs autres destinataires de la décision attaquée, les requérantes ont participé à un « trucage » des enchères ou à des accords visant à nuire à la concurrence. Deuxièmement, ce serait à tort que la Commission a considéré que Sony Optiarc avait participé à une infraction « unique et continue ». Troisièmement, la Commission se serait abstenue, dans la décision attaquée, de prendre en considération de manière adéquate des éléments de preuve à décharge. Quatrièmement, la conclusion figurant dans la décision attaquée, selon laquelle Sony Optiarc a participé à des « infractions distinctes », violerait ses droits de la défense, ne serait pas prouvée et serait entachée d’un défaut de motivation.

 Sur la première branche, tirée de l’absence de preuve de la participation des requérantes à une restriction de la concurrence « par objet »

41      À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il ressort de l’article 2 du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101] et [102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), ainsi que d’une jurisprudence constante, que, dans le domaine du droit de la concurrence, en cas de litige sur l’existence d’une infraction, il appartient à la Commission de rapporter la preuve des infractions qu’elle constate et d’établir les éléments de preuve propres à démontrer, à suffisance de droit, l’existence des faits constitutifs d’une infraction. À cet effet, elle doit réunir des éléments de preuve suffisamment précis et concordants pour établir que l’infraction alléguée a eu lieu (voir arrêt du 8 septembre 2016, Goldfish e.a./Commission, T‑54/14, EU:T:2016:455, point 90 et jurisprudence citée).

42      Lorsque la Commission se fonde, dans le cadre de l’établissement d’une infraction aux articles 101 et 102 TFUE, sur des éléments de preuve documentaires, il incombe aux entreprises concernées non pas simplement de présenter une alternative plausible à la thèse de la Commission, mais bien de soulever l’insuffisance des preuves retenues dans la décision attaquée pour établir l’existence de l’infraction. Il doit être considéré que, lorsque la Commission se fonde sur des éléments de preuve directs, il appartient aux entreprises concernées de démontrer que ces éléments de preuve sont insuffisants. Il a déjà été jugé qu’un tel renversement de la charge de la preuve ne violait pas la présomption d’innocence (voir arrêt du 8 septembre 2016, Goldfish e.a./Commission, T‑54/14, EU:T:2016:455, point 91 et jurisprudence citée).

43      Toutefois, chacune des preuves apportées par la Commission ne doit pas nécessairement répondre à ces critères en ce qui concerne chaque élément de l’infraction. Il suffit que le faisceau d’indices invoqué par l’institution, apprécié globalement, réponde à cette exigence (voir arrêt du 8 septembre 2016, Goldfish e.a./Commission, T‑54/14, EU:T:2016:455, point 92 et jurisprudence citée).

44      En effet, les indices invoqués par la Commission dans la décision afin de prouver l’existence d’une violation de l’article 101, paragraphe 1, TFUE par une entreprise doivent être appréciés non pas isolément, mais dans leur ensemble (voir arrêt du 8 septembre 2016, Goldfish e.a./Commission, T‑54/14, EU:T:2016:455, point 93 et jurisprudence citée).

45      Il convient également de tenir compte du fait que les activités anticoncurrentielles se déroulent de manière clandestine et que, partant, dans la plupart des cas, l’existence d’une pratique ou d’un accord anticoncurrentiel doit être inférée d’un certain nombre de coïncidences et d’indices qui, considérés ensemble, peuvent constituer, en l’absence d’une autre explication cohérente, la preuve d’une violation des règles de la concurrence (voir arrêt du 8 septembre 2016, Goldfish e.a./Commission, T‑54/14, EU:T:2016:455, point 94 et jurisprudence citée).

46      Le seul critère pertinent pour apprécier les preuves librement produites réside dans leur crédibilité. Selon les règles généralement applicables en matière de preuve, la crédibilité et, partant, la valeur probante d’un document dépendent de son origine, des circonstances de son élaboration, de son destinataire et du caractère sensé et fiable de son contenu. Il convient, notamment, d’accorder une grande importance à la circonstance qu’un document a été établi en ce qui concerne directement les faits ou par un témoin direct de ces faits. En outre, il convient de rappeler que le seul fait que l’information a été fournie par des entreprises ayant formé une demande tendant à bénéficier de la communication sur la coopération de 2006 ne met pas en cause sa valeur probante (voir arrêt du 8 septembre 2016, Goldfish e.a./Commission, T‑54/14, EU:T:2016:455, point 95 et jurisprudence citée).

47      Selon une jurisprudence constante, aucune disposition, ni aucun principe général du droit de l’Union européenne n’interdit à la Commission de se prévaloir, à l’encontre d’une entreprise, des déclarations d’autres entreprises incriminées. Si tel n’était pas le cas, la charge de la preuve de comportements contraires aux articles 101 et 102 TFUE, qui incombe à la Commission, serait insoutenable et incompatible avec la mission de surveillance de la bonne application de ces dispositions qui lui est attribuée par le TFUE (voir arrêt du 8 septembre 2016, Goldfish e.a./Commission, T‑54/14, EU:T:2016:455, point 96 et jurisprudence citée).

48      Une certaine méfiance à l’égard de dépositions volontaires des principaux participants à une entente illicite est compréhensible, dès lors que ces participants pourraient minimiser l’importance de leur contribution à l’infraction et maximiser celle des autres. Néanmoins, compte tenu de la logique inhérente à la procédure prévue par la communication sur la coopération de 2006, le fait de demander le bénéfice de son application en vue d’obtenir une réduction du montant de l’amende ne crée pas nécessairement une incitation à présenter des éléments de preuve déformés quant aux autres participants à l’entente incriminée. En effet, toute tentative d’induire la Commission en erreur pourrait remettre en cause la sincérité ainsi que la complétude de la coopération de l’entreprise et, partant, mettre en danger la possibilité pour celle-ci de tirer pleinement bénéfice de ladite communication (voir arrêt du 8 septembre 2016, Goldfish e.a./Commission, T‑54/14, EU:T:2016:455, point 97 et jurisprudence citée).

49      En particulier, il y a lieu de considérer que le fait pour une personne d’avouer qu’elle a commis une infraction et d’admettre ainsi l’existence de faits qui dépassent ceux dont l’existence pouvait être déduite de manière directe des documents en question implique a priori, en l’absence de circonstances particulières de nature à indiquer le contraire, que cette personne a pris la résolution de dire la vérité. Ainsi, les déclarations allant à l’encontre des intérêts du déclarant doivent, en principe, être considérées comme des éléments de preuve particulièrement fiables (voir arrêt du 8 septembre 2016, Goldfish e.a./Commission, T‑54/14, EU:T:2016:455, point 98 et jurisprudence citée).

50      Néanmoins, les déclarations faites par des entreprises concernées dans le cadre de demandes tendant au bénéfice de la communication sur la coopération de 2006 doivent être appréciées avec prudence et, en général, ne sauraient être considérées comme des éléments de preuve particulièrement fiables si elles n’ont pas été corroborées par d’autres éléments (voir arrêt du 8 septembre 2016, Goldfish e.a./Commission, T‑54/14, EU:T:2016:455, point 99 et jurisprudence citée).

51      En effet, selon une jurisprudence constante, la déclaration d’une entreprise à laquelle il est reproché d’avoir participé à une entente, dont l’exactitude est contestée par plusieurs autres entreprises inculpées, ne peut être considérée comme constituant une preuve suffisante de l’existence d’une infraction commise par ces dernières sans être étayée par d’autres éléments de preuve (voir arrêt du 8 septembre 2016, Goldfish e.a./Commission, T‑54/14, EU:T:2016:455, point 100 et jurisprudence citée).

52      En ce qui concerne, comme en l’espèce, l’hypothèse d’un échange d’informations entre concurrents, un tel échange poursuit un objet anticoncurrentiel lorsqu’il est susceptible d’éliminer les incertitudes quant au comportement envisagé par les entreprises concernées (arrêt du 4 juin 2009, T-Mobile Netherlands e.a., C‑8/08, EU:C:2009:343, point 43).

53      Il y a lieu de présumer, sous réserve de la preuve contraire, qu’il incombe aux opérateurs intéressés de rapporter que les entreprises participant à la concertation et qui demeurent actives sur le marché tiennent compte des informations échangées avec leurs concurrents pour déterminer leur comportement sur ce marché (arrêt du 4 juin 2009, T‑Mobile Netherlands e.a., C‑8/08, EU:C:2009:343, point 51).

54      En outre, il convient de rappeler que, pour apprécier si une pratique concertée est prohibée par l’article 101, paragraphe 1, TFUE, la prise en considération de ses effets concrets est superflue lorsqu’il apparaît que celle-ci a pour objet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur de l’Union. La distinction entre « infractions par objet » et « infractions par effet » tient à la circonstance que certaines formes de collusion entre entreprises peuvent être considérées, de par leur nature même, comme nuisibles au bon fonctionnement du jeu normal de la concurrence (arrêt du 4 juin 2009, T-Mobile Netherlands e.a., C‑8/08, EU:C:2009:343, point 29).

55      Dans ces conditions, il n’est pas nécessaire d’examiner les effets d’une pratique concertée dès lors que l’objet anticoncurrentiel de cette dernière est établi (arrêt du 4 juin 2009, T-Mobile Netherlands e.a., C‑8/08, EU:C:2009:343, point 30).

56      À cet égard, le critère juridique essentiel pour déterminer si un accord comporte une restriction de la concurrence « par objet » réside dans la constatation qu’un tel accord présente, en lui-même, un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence pour considérer qu’il n’y a pas lieu d’en rechercher les effets (voir arrêt du 27 avril 2017, FSL e.a./Commission, C‑469/15 P, EU:C:2017:308, point 104 et jurisprudence citée).

57      Dans ce cadre, il convient de s’attacher à la teneur des dispositions de l’accord en cause, aux objectifs qu’il vise à atteindre ainsi qu’au contexte économique et juridique dans lequel il s’insère (voir arrêt du 27 avril 2017, FSL e.a./Commission, C‑469/15 P, EU:C:2017:308, point 105 et jurisprudence citée).

58      Pour des accords ayant pour objet la fixation des prix, qui constituent des violations particulièrement graves de la concurrence, l’analyse du contexte économique et juridique dans lequel la pratique s’insère peut, dès lors, se limiter à ce qui s’avère strictement nécessaire en vue de conclure à l’existence d’une restriction de la concurrence par objet (voir arrêt du 27 avril 2017, FSL e.a./Commission, C‑469/15 P, EU:C:2017:308, point 107 et jurisprudence citée).

59      Enfin, il y a lieu de rappeler qu’un système d’échange d’informations portant sur des ventes effectuées par les concurrents, diffusées selon une périodicité rapprochée et de manière systématique, atténue ou supprime le degré d’incertitude sur le fonctionnement du marché et qu’il est, dès lors, de nature à altérer la concurrence (voir, en ce sens, arrêt du 28 mai 1998, Deere/Commission, C‑7/95 P, EU:C:1998:256, points 89 et 90).

60      C’est au regard de cette jurisprudence qu’il convient d’analyser si les contacts énoncés dans la décision attaquée sont suffisants pour établir l’existence d’une infraction par objet.

61      À cet égard, les requérantes soutiennent que, concernant sept cas de partage d’informations sur les dix-sept allégués contre Sony Optiarc (contacts nos 66, 67, 70, 73, 76, 78 et 105), la Commission ne satisfait pas à son obligation de rapporter la preuve et viole les droits de la défense de Sony Optiarc, et la décision attaquée n’est pas motivée. En outre, au moins quatre des dix-sept cas de partage d’informations allégués contre Sony Optiarc (contacts nos 73, 76, 78 et 98) ne seraient pas étayés par des éléments prouvant que cette dernière a procédé à un quelconque partage d’informations. De plus, neuf des dix-sept cas de partage d’informations allégués contre Sony (contacts nos 63, 66, 67, 76, 78, 95, 98, 101 et 105) porteraient sur des informations anciennes non susceptibles, à la lumière des « conditions réelles du fonctionnement et de la structure du ou des marchés en question », de réduire sensiblement l’incertitude ou de nuire d’une autre manière à la concurrence future. Les huit autres allégations formulées contre Sony Optiarc (contacts nos 62, 65, 70, 73, 88, 89, 100 et 116) porteraient sur des communications qui, dans un certain sens, concernent d’une manière ou d’une autre le futur. Aucune de ces allégations n’aurait trait à des informations pouvant être raisonnablement considérées comme susceptibles d’éliminer ou de réduire sensiblement l’incertitude quant au comportement qui serait adopté ultérieurement sur le marché.

62      En outre, les requérantes soulignent que la décision attaquée renvoie simplement, dans une note en bas de page, à une décision rendue en matière de concentration pour affirmer l’existence d’un oligopole sur le marché en cause.

63      En ce qui concerne la question de l’existence d’un oligopole sur le marché en cause, il y a lieu de relever que la Commission a indiqué, au considérant 446 de la décision attaquée, que l’exigence d’indépendance interdisait tout contact direct ou indirect par lequel une entreprise influence la conduite de ses concurrents sur le marché ou leur divulgue ses décisions ou délibérations concernant sa propre conduite sur le marché. Elle a précisé, audit considérant, qu’une telle exigence s’appliquait d’autant plus lorsque l’échange d’informations concerne une importante concentration oligopolistique sur un marché comme le marché des LDO.

64      En note en bas de page no 818 audit considérant, il est renvoyé à la décision de la Commission du 2 mars 2004 (affaire COMP/M.3349 – Toshiba/Samsung/JV) indiquant que, à la suite de l’autorisation par la Commission d’une entreprise commune entre Toshiba et Samsung dans le secteur des LDO, 80 % de la production totale de LDO sera fournie par quatre principaux producteurs.

65      Cette dernière décision a été prise à une période correspondant à celle relative aux faits de la présente espèce. La décision attaquée pouvait donc se contenter d’effectuer un renvoi à cette décision. C’est donc à tort que les requérantes soutiennent que la décision attaquée ne comporte aucune évaluation des éléments constitutifs d’un oligopole entre les fournisseurs de LDO.

66      En ce qui concerne les contacts, le Tribunal estime opportun de les examiner dans l’ordre dans lequel ils apparaissent à l’annexe I de la décision attaquée.

–       Considérant 206 de la décision attaquée (contact no 62)

67      Le considérant 206 de la décision attaquée traite du contact considéré par la Commission comme marquant le point de départ de la période d’infraction en ce qui concerne les requérantes. Selon ce considérant, un courriel interne de PLDS du 25 juillet 2007 a indiqué que PLDS a reçu des informations de Hitachi LG Data Storage (ci-après « HLDS ») et de Sony Optiarc concernant des Combo BD SATA HH demandés par Dell. Ledit courriel indique notamment : « j’ai également confirmé que Sony [Optiarc] approchait Dell pour le T 1 pour des Combo BD SATA HH, le prix qu’elle prévoit de proposer est d’environ 150 USD/T 1 ».

68      Selon les requérantes, dans la communication des griefs, cette allégation était exposée au sujet d’une enchère du 17 juillet 2007 portant sur des Combo SATA HH. D’une part, les requérantes avancent que, en formulant cette allégation dans la décision attaquée, la Commission a violé les droits de la défense de Sony Optiarc, car elle a modifié substantiellement la nature de l’allégation telle qu’elle apparaissait dans la communication des griefs, privant ainsi Sony Optiarc de la possibilité de se défendre avec efficacité au cours de la procédure administrative. D’autre part, en tout état de cause, la Commission n’étayerait pas son assertion, figurant dans la décision attaquée, selon laquelle cette allégation révèle que le comportement de Sony Optiarc a eu un objet anticoncurrentiel. Quand bien même cette information aurait été obtenue auprès de Sony Optiarc, rien n’autoriserait à considérer que cette information, qui ne concernerait qu’une intention générale d’entrer à un prix approximatif pour un produit unique que Sony Optiarc n’aurait en réalité jamais vendu à Dell, réduirait sensiblement l’incertitude sur le marché.

69      La Commission conteste les arguments des requérantes.

70      Les requérantes soutiennent que la Commission a violé leurs droits de la défense en évoquant, dans la décision attaquée, un courriel du 25 juillet 2007 relatif à des Combo BD SATA HH alors qu’elle évoquait, dans la communication des griefs, une enchère du 17 juillet 2007 portant sur ses Combo SATA HH. En outre, l’information selon laquelle Sony Optiarc s’employait à exercer une concurrence pour obtenir de Dell le marché portant sur les Combo BD SATA HH avec un prix situé autour d’environ 150 dollars serait une information imprécise, pour un produit que Sony Optiarc n’aurait finalement pas vendu à Dell et, en conséquence, cette information n’aurait pu réduire sensiblement l’incertitude sur le marché.

71      À cet égard, il convient de rappeler que le respect des droits de la défense dans toute procédure susceptible d’aboutir à des sanctions, notamment à des amendes ou à des astreintes, constitue un principe fondamental du droit de l’Union, qui doit être observé, même s’il s’agit d’une procédure à caractère administratif (arrêts du 29 juin 2006, SGL Carbon/Commission, C‑308/04 P, EU:C:2006:433, point 94, et du 24 septembre 2009, Erste Group Bank e.a./Commission, C‑125/07 P, C‑133/07 P et C‑137/07 P, EU:C:2009:576, point 270).

72      Le règlement no 1/2003 prévoit l’envoi aux parties d’une communication des griefs qui doit énoncer, de manière claire, tous les éléments essentiels sur lesquels la Commission se fonde à ce stade de la procédure. Une telle communication des griefs constitue la garantie procédurale appliquant le principe fondamental du droit de l’Union, qui exige le respect des droits de la défense dans toute procédure susceptible d’aboutir au prononcé d’une sanction. Ce principe exige notamment que la communication des griefs adressée par la Commission à une entreprise à laquelle elle envisage d’infliger une sanction pour violation des règles de concurrence contienne les éléments essentiels retenus à l’encontre de cette entreprise, tels que les faits reprochés, la qualification qui leur est donnée et les éléments de preuve sur lesquels la Commission se fonde, afin que cette entreprise soit en mesure de faire valoir utilement ses arguments dans le cadre de la procédure administrative engagée à son égard (voir arrêt du 2 février 2012, Dow Chemical/Commission, T‑77/08, non publié, EU:T:2012:47, point 110 et jurisprudence citée).

73      Toutefois, cette indication peut être donnée de manière sommaire et la décision finale ne doit pas nécessairement être une copie exacte de la communication des griefs (arrêt du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission, 100/80 à 103/80, EU:C:1983:158, point 14), car cette communication constitue un document préparatoire, dont les appréciations de fait et de droit ont un caractère purement provisoire (voir, en ce sens, arrêt du 17 novembre 1987, British American Tobacco et Reynolds Industries/Commission, 142/84 et 156/84, EU:C:1987:490, point 70).

74      Ainsi, les droits de la défense ne sont violés du fait d’une discordance entre la communication des griefs et la décision finale qu’à la condition qu’un grief retenu dans celle-ci n’ait pas été exposé dans celle-là d’une manière suffisante pour permettre aux destinataires de se défendre (voir arrêt du 8 juillet 2004, Mannesmannröhren-Werke/Commission, T‑44/00, EU:T:2004:218, point 98 et jurisprudence citée).

75      À cet égard, l’obligation de la Commission, dans le cadre d’une communication des griefs, se limite à exposer les griefs avancés et à énoncer, de manière claire, les faits sur lesquels elle se fonde ainsi que la qualification qui leur est donnée, afin que les destinataires de celle-ci puissent se défendre utilement (voir arrêt du 8 juillet 2004, Mannesmannröhren-Werke/Commission, T‑44/00, EU:T:2004:218, point 99 et jurisprudence citée).

76      La qualification juridique des faits retenue dans la communication des griefs ne peut être, par définition, que provisoire, et une décision ultérieure de la Commission ne saurait être annulée au seul motif que les conclusions définitives tirées de ces faits ne correspondent pas de manière précise à cette qualification intermédiaire. En effet, la Commission doit entendre les destinataires d’une communication des griefs et, le cas échéant, tenir compte de leurs observations visant à répondre aux griefs retenus en modifiant son analyse, précisément pour respecter leurs droits de la défense (voir arrêt du 8 juillet 2004, Mannesmannröhren-Werke/Commission, T‑44/00, EU:T:2004:218, point 100 et jurisprudence citée).

77      En l’espèce, il résulte des explications données par la Commission, non contredite par les requérantes sur ce point, que celle-ci se référait, dans la communication des griefs, à une enchère du 17 juillet 2007 portant sur des Combo SATA HH et que c’est en prenant en compte la réponse de Sony Optiarc à ladite communication qu’elle s’est référée, dans la décision attaquée, à des Combo BD SATA HH évoqués dans un courriel de PLDS du 25 juillet 2007.

78      D’une part, ainsi qu’il vient d’être rappelé, la décision attaquée ne saurait être une copie exacte de la communication des griefs et la Commission peut être amenée à tenir compte des réponses apportées par ses destinataires.

79      D’autre part, il y a lieu de relever que les requérantes ont bien eu l’occasion de présenter leurs arguments en ce qui concerne le Combo BD SATA HH évoqués dans le courriel de PLDS du 25 juillet 2007. En effet, dans la communication des griefs, ce courriel était référencé en tant que « contact no 71 ». Or, dans leur réponse à la communication des griefs, les requérantes ont indiqué, concernant ce contact no 71 relatif au courriel de PLDS, qu’il n’y avait aucune preuve que ce contact ait pu avoir un effet anticoncurrentiel.

80      Les requérantes ne sauraient donc soutenir que la décision attaquée a porté atteinte à leurs droits de la défense à cet égard.

81      En outre, il importe de relever que les requérantes ne nient pas l’existence du contact mentionné dans le courriel de PLDS, puisqu’elles ne nient explicitement l’existence, ainsi qu’il résulte des titres du plan adopté dans leur requête, d’un partage d’information de la part de Sony Optiarc qu’en ce qui concerne les contacts nos 73, 76, 78 et 98, mais soutiennent seulement que l’information indiquant que Sony Optiarc avait approché Dell pour lui vendre des Combo BD SATA HH à prix « d’environ 150 USD/T 1 » est une information non susceptible de réduire l’incertitude sur le marché, car imprécise.

82      Ainsi, deuxièmement, à cet égard, il suffit de constater que l’annonce d’un prix « d’environ 150 USD/T 1 » est une information suffisamment précise pour être utile et, plus spécifiquement, de nature à réduire de manière appréciable l’incertitude entre les concurrents en ce qui concerne leurs futures intentions concernant l’enchère en question.

83      L’argument des requérantes tenant au fait que Sony Optiarc n’a finalement pas vendu le produit en question à Dell n’est pas non plus pertinent. En effet, en tout état de cause, le courriel du 25 juillet 2007 d’HLDS montre que celle-ci considérait Sony Optiarc comme un concurrent dans cette enchère.

84      Il importe de relever qu’il s’agit en l’espèce d’un échange d’informations concernant un prix futur. Or, des accords ayant pour objet la fixation de prix constituent des violations particulièrement graves de la concurrence (voir point 58 ci-dessus).

85      En outre, il convient de relever que, selon la Cour, si l’offre sur un marché est fortement concentrée, l’échange de certaines informations peut être, selon notamment le type d’informations échangées, de nature à permettre aux entreprises de connaître la position et la stratégie commerciale de leurs concurrents sur le marché, faussant ainsi la rivalité sur ce marché et augmentant la probabilité d’une collusion, voire facilitant celle‑ci (arrêt du 23 novembre 2006, Asnef-Equifax et Administración del Estado, C‑238/05, EU:C:2006:734, point 58).

86      En l’espèce, le marché était particulièrement concentré puisqu’il s’agissait, ainsi qu’il vient d’être relevé, d’un oligopole.

87      Partant, les requérantes n’ont réussi à présenter aucun argument susceptible de remettre en cause les constatations exposées au considérant 206 de la décision attaquée.

–       Considérant 207 de la décision attaquée (contact no 63)

88      Selon le considérant 207 de la décision attaquée, en août 2007, Sony Optiarc a eu des contacts avec HLDS et a communiqué sur les prix pratiqués au premier trimestre de 2008, au cours duquel elle a répondu à une demande d’offre de Dell. Ledit considérant indique que, selon le courriel interne de PLDS du 17 août 2007, celle-ci est « parvenue à parler avec Sony Optiarc et elle a affirmé que leur [prix proposé dans le cadre de la] demande de devis (à savoir pour le DVDRW SATA à chargement par fente mince de 12,7 mm) est d’environ 43 USD pour le T 1 ; Sony [Optiarc] est la deuxième source attribuée après [Toshiba Samsung Storage Technology Corporation] (qui est la première source), Sony [Optiarc] pense que TSST a un prix inférieur au leur, Sony [Optiarc] pense que le prix de TSST pour le T 1 est d’environ 38-39 USD ».

89      Selon les requérantes, le courriel indique clairement que le contenu concerne un prix qui n’est pas précis (« environ 43 USD ») pour une demande de devis déjà achevée (« la deuxième source attribuée »). Or, tout prix proposé au cours d’une demande de devis aurait fait l’objet d’une érosion importante au cours de la procédure de négociation en ligne, et toute information obtenue avant la négociation en ligne aurait été rapidement rendue obsolète par les informations mises à disposition par Dell. En outre, un courriel du 15 octobre 2007 de PLDS indiquerait que Sony Optiarc a baissé son prix pour ce lecteur pour le ramener à une « fourchette comprise entre 37 et 38 USD » à la demande de Dell. Partant, rien ne permettrait de conclure que le partage de cette information généralisée au sujet de prix proposés antérieurement dans le cadre d’un devis avait un objet anticoncurrentiel.

90      La Commission conteste les arguments des requérantes.

91      Il importe de relever que, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, dans le cadre des négociations en ligne organisées par Dell, un prix concernant une négociation passée pouvait être utile.

92      En effet, ainsi qu’il est exposé aux considérants 136 et 137 de la décision attaquée, les règles d’enchères requéraient, dans la quasi-totalité des cas, que l’enchère d’ouverture soit égale au prix le plus bas offert lors de la précédente négociation pour le même produit, ainsi que l’attestent des documents produits par la Commission en annexe de son mémoire, ce qui permettait d’éliminer une grande incertitude quant au déroulement des enchères, notamment parce que la connaissance des anciens prix et classements pouvait être combinée à d’autres informations échangées, telles que les intentions en matière de classement et d’offres lors des procédures à venir.

93      Ainsi, il est indiqué dans les règles de passation de marché de Dell publiées en décembre 2007 : « Offre de départ : pour participer à cette négociation internet, votre offre d’ouverture pour février doit être égale ou inférieure à votre actuel prix de janvier, l’offre d’ouverture de mars doit être égale ou inférieure à votre offre de clôture de février ». Dell a également indiqué, dans une réponse du 30 septembre 2009 à une demande d’information de la Commission, que les invitations à soumissionner étaient normalement envoyées aux fournisseurs avant les enchères, et qu’il y était presque toujours indiqué que l’offre de départ requise était l’offre de prix la plus basse de la précédente négociation pour le même produit.

94      En outre, comme le relève la Commission, plusieurs pièces du dossier démontrent également que les concurrents maintenaient régulièrement leurs prix précédents lors d’offres ultérieures.

95      Ainsi, un courriel interne de PLDS, daté du 6 novembre 2007, indique un prix proposé par Sony Optiarc pour un certain produit pour le mois de janvier 2008, et qu’« elle ne bougera probablement pas son prix pour février 2008 et mars 2008 ». Un courriel interne d’HLDS du 23 juin 2008 indique qu’elle proposera le même prix pour un certain produit pour les mois de septembre et d’octobre 2008. Le considérant 336 de la décision attaquée relève qu’un courriel interne de HLDS datant d’octobre 2007 indique concernant des DVD-ROM que « le prix de départ actuel (13,70 USD) est susceptible d’être maintenu sans ajustement durant l’enchère ». Enfin, le considérant 208 de la décision attaquée souligne qu’un courriel interne de HLDS datant d’août 2007 indique qu’« étant donné que le premier tour d’enchères sera clôturé cette semaine, nous demandons que le prix soit ajusté sur le prix que PLDS a offert lors de la précédente enchère ». Un courriel interne de PLDS datant du 30 octobre 2008 indique : « Voici les résultats pour le lecteur-graveur de DVD minces à chargement par plateau de 12,7 mm : PLDS : 24,60 USD (4e), TSST : 24,19 USD (1re) (même prix qu’en décembre 2008), HLDS : 24,23 USD (2e) (même prix qu’en décembre 2008), Optiarc : 24,25 USD (3e) (même prix qu’en décembre 2008). » Également, un courriel de PLDS du 19 juin 2008 compare les prix de HLDS, de Sony Optiarc et de PLDS pour les mois d’août et de septembre 2008.

96      Il importe encore de relever que, dans un courriel interne du 29 mai 2008, PLDS a qualifié les résultats des enchères, concernant les classements et les prix des concurrents, d’« informations sensibles secrètes ».

97      Les requérantes ne sauraient donc soutenir valablement qu’une information sur un prix ou un classement d’une enchère déjà clôturée n’était pas susceptible d’éliminer une grande incertitude quant au déroulement des enchères futures.

98      En ce qui concerne précisément le contact no 63, s’il peut être constaté que l’information mentionnant un prix à « environ 43 USD » s’est révélée être, au final, peu utile, étant donné que le prix a été ramené, à la demande de Dell, à une « fourchette de 37‑38 USD », selon ce qui est indiqué dans le courriel de PLDS du 15 octobre 2007 auquel renvoient les requérantes, il n’en reste pas moins que cette circonstance ne saurait remettre en cause le fait que ce contact avait un objet anticoncurrentiel. 

99      En outre, en tout état de cause, rien n’indique que Dell soit souvent intervenue pour modifier aussi sensiblement les prix.

100    Enfin, dans le courriel de PLDS auquel renvoient les requérantes, PLDS indique, d’une part, qu’elle a discuté avec Sony Optiarc et HLDS, et, d’autre part, qu’elle a été avertie que Sony Optiarc avait réduit son prix. Ce courriel apparaît donc comme un fort indice que Sony Optiarc partageait des informations sur les prix avec ses concurrents.

–       Considérant 210 de la décision attaquée (contact no 65)

101    Selon ce considérant, HLDS et PLDS « ont conféré de la stratégie de soumissionnement […] avec Sony Optiarc avant et après » des négociations en ligne organisées par Dell pour des « LDO DVDRW HH, DVD-ROM, Combo et minces » en septembre 2007. Ledit considérant cite plusieurs éléments, dont un courriel interne de PLDS du 17 septembre 2007 indiquant : « Optiarc : Optiarc continue à utiliser le modèle de NEC pour le DVDRW mince, ils persisteront pour obtenir la 2e place », des relevés téléphoniques de PLDS faisant état de conversations téléphoniques avec Sony Optiarc le 17 septembre 2007 et un courriel interne de HLDS du 18 septembre 2007 indiquant : « J’ai bien informé PLDS et Optiarc que [HLDS] suggérerait un prix agressif ».

102    Selon les requérantes, l’information selon laquelle Sony Optiarc a fait part de son intention de continuer à ambitionner la deuxième place, ou qu’elle a reçu de HLDS l’information qu’elle « suggérerait un prix agressif », a été rapidement supplantée au cours de la négociation en ligne par les informations communiquées par le système d’enchères organisé par Dell. En outre, déclarer son intention de proposer des prix agressifs serait susceptible d’inciter à proposer des prix plus agressifs et donc à réduire les prix.

103    La Commission conteste les arguments des requérantes.

104    Quant au contact no 65, les requérantes ne prétendent pas que ce n’est pas Sony Optiarc qui a donné des informations relatives à sa stratégie à PLDS, mais soutiennent seulement, d’une part, que ces informations ont été rapidement supplantées par les informations communiquées par le système d’enchères organisé par Dell et, d’autre part, que ces informations ont en fait renforcé la concurrence, en ce sens qu’elles ont tiré les prix vers le bas.

105    En ce qui concerne l’argument tenant au fait que Dell divulguerait des informations par le biais du système d’enchères qu’elle avait mis en place, il convient de constater que, si cet argument est récurrent dans la requête, les requérantes, en tout état de cause, n’ont apporté aucun élément susceptible de l’étayer.

106    En ce qui concerne l’argument selon lequel les informations données par Sony Optiarc auraient en fait renforcé la concurrence, il convient de rappeler qu’une entreprise qui poursuit, malgré la concertation avec ses concurrents, une politique plus ou moins indépendante sur le marché peut simplement tenter d’utiliser l’entente à son profit (arrêt du 28 février 2002, Cascades/Commission, T‑308/94, EU:T:2002:47, point 230). En tout état de cause, la seule divulgation d’informations commerciales sensibles à des concurrents constitue une pratique prohibée, dès lors qu’elle élimine l’incertitude relative au comportement futur d’un concurrent et influence ainsi, directement ou indirectement, la stratégie du destinataire des informations (voir arrêt du 16 septembre 2013, Wabco Europe e.a./Commission, T‑380/10, EU:T:2013:449, point 124 et jurisprudence citée).

107    C’est donc également à tort que les requérantes soutiennent que le contact no 65 n’est pas révélateur d’une infraction à la concurrence.

–       Annexe I de la décision attaquée (contacts nos 66, 67, 70, 73, 76 et 78)

108    Les contacts nos 66, 67, 70, 73, 76 et 78 ne figurent qu’à l’annexe I de la décision attaquée. Ces contacts, n’apparaissant pas ainsi dans les motifs de la décision, ne sont pas des éléments sur lesquels la Commission a fondé sa décision. Dès lors, l’argumentation des requérantes, en ce qui concerne ces contacts, doit être rejetée comme étant inopérante.

–       Considérants 216 à 219 de la décision attaquée (contact no 88 figurant à l’annexe I)

109    Selon les considérants 216 à 219 de la décision attaquée, Sony Optiarc a noué des contacts anticoncurrentiels avec TSST et avec PLDS « afin de conférer de la stratégie à adopter au cours de la prochaine négociation en ligne inversée de Dell » pour les DVDRW minces le 18 février 2008. Ces considérants renvoient notamment à trois courriels. Un courriel interne de Sony Optiarc du 14 février 2008, également adressé à Quanta, indique que « TSST a mentionné qu’elle mènerait les prix mais qu’elle ne voulait pas 60 % du marché total disponible car elle rencontr[ait] des soucis d’approvisionnement. (Elle souhaite cibler 30 % du marché total disponible – deuxième place). PLDS a indiqué qu’elle ne se montrerait pas agressive sur les prix et chercherait peut-être seulement à obtenir les 10 % du marché total disponible au cours d’une négociation hors ligne ». Un courriel interne de PLDS du 14 février 2008 indique « Veuillez trouver les informations demandées à propos de la négociation en ligne pour le DVDRW mince (négociation en ligne inversée) […] Optiarc a affirmé avoir besoin de volume pour amortir son investissement car son lecteur était prêt à être expédié pour le T 3 de l’exercice social 2007/2008 mais elle n’était pas sûre de parvenir au prix de départ de 23,50 USD ». Un courriel interne de Sony Optiarc du 19 février 2008, également adressé à Quanta, communique les résultats de la négociation en ligne tant pour TSST que pour PLDS et indique : « Nous avons informé […] qu’il sera très difficile pour nous de nous aligner sur les prix de PLDS et nous avons proposé le prix de 25,75 USD qui est notre offre de prix pour demander au moins 10 % du marché total disponible ».

110    Selon les requérantes, d’une part, les déclarations concernant les intentions de TSST et de PLDS (« TSST […] mènerait les prix mais […] qu’elle ne voulait pas 60 % du marché total disponible » et « PLDS […] ne se montrerait pas agressive sur les prix ») n’étaient pas suffisamment précises pour fournir des indications utiles sur leur stratégie en matière de prix et, d’autre part, la procédure en temps réel de la « négociation en ligne inversée » les aurait rendues inoffensives. Quoiqu’il en soit, les informations reçues par TSST et par PLDS auraient été inexactes, puisque malgré leurs prétendues intentions de ne pas soumettre d’offres agressives, elles se sont classées respectivement première et seconde. Par ailleurs, Dell aurait communiqué à Sony Optiarc le prix de PLDS apparaissant lors de la négociation en ligne, et toute indication antérieure concernant l’« agressivité » de PLDS aurait été sans importance dans le cadre d’une discussion entre Sony Optiarc et Dell. À cet égard, le courriel de Sony Optiarc du 19 février 2008 confirmerait que cette dernière n’était pas en mesure de s’aligner sur le prix de PLDS.

111    La Commission conteste les arguments des requérantes.

112    Ces contacts visent une négociation en ligne inversée prévue le 18 février 2008. Dans une telle négociation, selon l’explication donnée par les requérantes, les règles étaient différentes de celles régissant les négociations en ligne habituelles, notamment en ce que Dell proposait un prix bas, puis l’augmentait jusqu’à ce qu’un fournisseur l’accepte.

113    Ainsi, le courriel interne de PLDS du 14 février 2008 montre que Sony Optiarc avait fait savoir qu’elle n’accepterait pas le prix de départ, mais tenterait quand même d’obtenir le marché.

114    Le courriel interne de Sony Optiarc du 14 février 2008 montre que Sony Optiarc avait obtenu des informations commerciales sensibles de PLDS et de TSST, puisqu’il donne des informations sur des objectifs de parts de marché et de classement. À cet égard, l’argument des requérantes, selon lequel les informations reçues par TSST et par PLDS auraient été inexactes, puisque malgré leurs prétendues intentions de ne pas soumettre d’offres agressives, elles se sont classées respectivement première et seconde, doit être rejeté, étant donné que ce qui importe est que les concurrents s’étaient engagés, avant même l’offre, dans des discussions anticoncurrentielles sur leurs stratégies. Que les concurrents ne se soient pas tenus à ce qu’ils avaient annoncé ou que Dell ait finalement demandé à Sony Optiarc de proposer un autre prix ne saurait remettre en cause le fait que ces contacts avaient un objet anticoncurrentiel (voir point 106 ci-dessus).

115    Quant au courriel interne de Sony Optiarc du 19 février 2008, il y a notamment lieu de relever qu’il donne à Quanta son prix et la part de marché qu’il vise pour une négociation future.

116    Il y a donc lieu de constater que ces trois courriels avaient un objet anticoncurrentiel.

117    Or, ainsi qu’il a été rappelé au point 55 ci-dessus, il n’est pas nécessaire d’examiner les effets d’une pratique concertée dès lors que l’objet anticoncurrentiel de cette dernière est établi (arrêt du 4 juin 2009, T‑Mobile Netherlands e.a., C‑8/08, EU:C:2009:343, point 30). En l’espèce, la Commission n’avait donc pas à démontrer l’effet concret des contacts sur le résultat des négociations en ligne.

118    Il y a donc lieu de conclure que le contact no 88 est susceptible de participer à un faisceau d’indices.

–       Considérant 220 de la décision attaquée (contact no 89 figurant à l’annexe I)

119    Selon le considérant 220 de la décision attaquée, Sony Optiarc a partagé avec PLDS une information concernant une négociation en ligne du 4 mars 2008 relative à des SATA minces. Ledit considérant expose qu’il résulte des termes d’un courriel interne de PLDS du 28 février 2008 que l’information obtenue de la part de Sony Optiarc (« Optiarc a dit qu’ils vérifiaient avec les fournisseurs de composants pour essayer de réduire le coût ») était susceptible d’influencer les décisions sur les prix de PLDS.

120    Les requérantes soutiennent que la Commission ne démontre pas, dans la décision attaquée, comment un tel partage d’informations a pu donner naissance à un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence pour être qualifié d’anticoncurrentiel par objet au simple motif que PLDS a fait circuler cette information en interne.

121    La Commission conteste les arguments des requérantes.

122    Il y a d’abord lieu de rejeter l’argument des requérantes selon lequel la Commission a considéré, dans la décision attaquée, que la preuve que l’information concernant Sony Optiarc était utile résultait du fait que PLDS l’a relatée en interne.

123    En effet, ainsi qu’il vient d’être exposé au point 119 ci‑dessus, ce sont des « termes » mêmes du courriel que la Commission déduit que l’information obtenue de la part de Sony Optiarc était susceptible d’influencer les décisions sur les prix de PLDS. Or, force est de constater que les termes « Optiarc a dit qu’ils vérifiaient avec les fournisseurs de composants pour essayer de réduire le coût » constituent déjà une information claire, relative à des prix futurs, susceptible d’être utile aux concurrents.

124    Si la Commission a indiqué, dans la décision attaquée, que la circulation de cette information en interne ne faisait que renforcer son caractère pertinent, en liaison avec les informations, plus précises, provenant de TSST et de HLDS, elle ne fait pas ainsi, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, de cette circulation l’élément de preuve le plus déterminant.

125    À cet égard, il convient de se reporter à l’ensemble du courriel :

« Veuillez trouver les informations nécessaires pour la négociation en ligne du 4 mars 2008 relative aux SATA minces pour le T 2 de l’exercice social 2008/2009 Veuillez noter que : 1) TSST veut toujours être numéro un. Préparé à descendre sous les 25,20 USD. 2) HLDS ont affirmé qu’il n’y a pas de marge pour baisser les prix, mais ont aussi dit que leur direction peut toujours faire descendre le prix au cours de l’appel d’offres même. Comme ils n’ont que 10 % du marché total disponible pour avril 2008, je m’attends à ce qu’ils fassent une offre pour se classer 2e pour le T 2 de l’exercice social 2008/2009. 3) Optiarc a dit qu’ils vérifiaient avec les fournisseurs de composants pour essayer de réduire le coût. Information supplémentaire : Optiarc a proposé dans son devis le prix de 24,80 USD pour le T 3 de l’exercice social 2008/2009 pour le DVDRW SATA mince à chargement par plateau ».

126    Comme le soutient la Commission, même si l’information selon laquelle Sony Optiarc cherchait à baisser les prix après avoir procédé à des vérifications auprès de fournisseurs de composants était plus générale que les informations fournies par TSST et HLDS, elle constitue un contact anticoncurrentiel préalable à une enchère. Combinée aux informations relatives aux autres concurrents, l’information relative à Sony Optiarc a réduit l’incertitude concernant le futur comportement de celle‑ci.

127    En outre, il y a lieu de relever que les « informations supplémentaires » données en fin de courriel révèlent que Sony Optiarc a complété ses informations sur la future enchère par des informations sur ses anciens prix.

128    Or, ainsi qu’il a été exposé aux points 92 et suivants ci‑dessus, une information sur un prix d’une enchère déjà clôturée était très utile pour démarrer une enchère future.

129    Dès lors, il y a lieu de constater que c’est à juste titre que la Commission a considéré que l’information obtenue de la part de Sony Optiarc était susceptible d’influencer les décisions sur les prix de PLDS.

–       Considérant 222 de la décision attaquée (contact no 95 figurant à l’annexe I)

130    Selon le considérant 222 de la décision attaquée, Sony Optiarc, à l’instar d’autres concurrents, a échangé des informations pour le mois de mars 2008 concernant sa part totale de marché attribuée et son « volume des flux tirés » pour des DVDRW SATA à chargement par fente. La Commission a relevé que la part totale de marché attribuée indiquait quel pourcentage du volume offert était attribué à chaque soumissionnaire (décision attaquée, considérant 33). Elle a précisé que les flux tirés correspondaient au nombre de produits LDO de la part attribuée qui ont été réellement vendus (décision attaquée, considérant 142). Selon le considérant 222 de la décision attaquée, un courriel interne de PLDS du 4 avril 2008 indique : « Comme nous en avons conféré hier, je suis certain que quelqu’un ne dit pas la vérité et il s’agit très probablement d’Optiarc : - Compte rendu des 3 fournisseurs actuels pour mars 2008 : -rapport entre le marché total disponible et les quantités visés Optiarc 60 % 20k 99 % Teac 30 % 25k 83 % Panasonic 10 % TBC TBC Très haute probabilité pour que Optiarc mente ».

131    Les requérantes avancent que des données sur les flux tirés ne pouvaient, en l’absence de données relatives à la capacité totale de fabrication des fournisseurs, constituer des informations utiles, d’autant qu’il s’agissait, en l’espèce, de données inexactes.

132    La Commission conteste les arguments des requérantes.

133    L’argument des requérantes selon lequel des données sur les flux tirés ne pouvaient être utiles en l’absence de données relatives à la capacité totale de fabrication apparaît être remis en cause par les courriels cités par la Commission, témoignant de l’utilité des informations relatives aux parts totales de marché attribuées et aux flux tirés.

134    Ainsi, un courriel de PLDS du 30 avril 2008 indique : « Juste vérifié avec TSST, ils n’ont pas informé qu’ils vont [EOL] le DVDCombo HH, le message qu’ils ont envoyé est qu’ils peuvent seulement accepter 45 % de marché total disponible au maximum ». Un courriel de PLDS du 17 juin 2008 indique « HLDS vient juste de clôturer ses négociations avec Dell concernant le marché total disponible d’août et de septembre 2008 pour les DVDRW HH et les DVDROM HH, lLes résultats sont les suivants », cite divers prix et divers marchés totaux disponibles et conclut : « Nous avons besoin d’un miracle pour avoir plus de marchés totaux disponibles avec des prix plus élevés ! ». Enfin, selon un courriel de PLDS du 14 février 2008 concernant une future négociation en ligne : « J’ai parlé à TSST ; a mentionné qu’elle serait chef de file en matière de prix, mais qu’elle ne voulait pas 60 % du marché total disponible ».

135    Quant au caractère prétendument inexact des données fournies par Sony Optiarc, il y a lieu de constater que, en tout état de cause, il ne saurait suffire à remettre en cause le fait que ces contacts avaient un objet anticoncurrentiel (voir point 114 ci-dessus).

136    Dès lors, les informations données par Sony Optiarc apparaissent comme susceptibles d’avoir aidé les participants à l’entente à mieux prévoir le futur comportement des concurrents sur le marché et à tirer des conclusions pour leur propre comportement.

–       Considérant 229 de la décision attaquée (contact no 98 figurant à l’annexe I)

137    Selon le considérant 229 de la décision attaquée, il résulte notamment de deux courriels internes de PLDS des 23 et 30 avril 2008 que PLDS s’était engagée avec Sony Optiarc dans un échange d’informations sensibles pour une négociation en ligne à venir. Le courriel du 23 avril 2008 énumère des informations relatives à plusieurs concurrents et indique concernant Sony Optiarc « à confirmer < 150 USD. Dell a observé que le prix est trop élevé, aucune chance ». Le courriel de PLDS du 30 avril 2008 indique ce qui suit ;

« Comme promis, voici des infos de Sony Optiarc : – prêt à l’envoi : octobre 2008 – Dell lui a demandé d’évoluer vers septembre 2008 – De ce fait, le montant des commandes qu’Optiarc est tenue d’honorer est tel, concernant les LDO BD, qu’elle connaît actuellement des freins à la production. »

138    Les requérantes avancent que les termes du courriel du 30 avril 2008 (« Dell a observé ») suggèrent fortement que cette information provenait de Dell et que la Commission admet que les informations figurant dans le courrier du 23 avril 2008 provenaient de Dell.

139    La Commission conteste les arguments des requérantes.

140    En ce qui concerne le premier courriel, la décision attaquée indique elle-même que Dell était la source des informations. Cependant, l’indication « à confirmer » peut laisser penser que PLDS entendait pouvoir confirmer cette information auprès de Sony Optiarc.

141    La preuve d’un contact entre PLDS et Sony Optiarc semble apparaître également dans le second courriel, en raison de l’expression « voici des infos d’Optiarc ». Cette expression pourrait cependant avoir une autre signification et indiquerait simplement « au sujet d’Optiarc ».

142    Ainsi, il ne peut être que supposé sur le fondement de ces deux courriels, en particulier lus ensemble, que PLDS et Sony Optiarc ont échangé des informations.

143    Quant à l’utilité de ces informations, dans l’hypothèse où elles ont été transmises par Sony Optiarc, comme le relève la Commission, il ne peut qu’être constaté que savoir que Sony Optiarc subissait des contraintes de production permettait à ses concurrents d’en déduire qu’elle ne se montrerait pas trop agressive lors des appels d’offres à venir. Une telle information était ainsi susceptible de réduire l’incertitude quant au futur comportement des concurrents. 

144    Il y a donc lieu de conclure que le contact no 98 est susceptible de participer à un faisceau d’indices.

–       Considérants 233 à 236 de la décision attaquée (contact no 100 figurant à l’annexe I)

145    Selon les considérants 233 à 236 de la décision attaquée, les gestionnaires de compte de HLDS, de TSST, de PLDS et de Sony Optiarc ont organisé au début du mois de juin 2008 des contacts téléphoniques au sujet de la négociation en ligne organisée par Dell pour les prix des DVDRW HH et des DVD-ROM HH pour les mois d’août et de septembre 2008. Ces considérants renvoient notamment à plusieurs courriels internes de HLDS et de PLDS et à des déclarations orales de PLDS.

146    Les requérantes soulignent que Sony Optiarc n’a pas participé à la négociation en ligne pour les lecteurs DVD-ROM HH, et que la Commission admet, dans la décision attaquée, qu’aucun accord n’a été conclu entre Sony Optiarc et un autre fournisseur en ce qui concerne la négociation en ligne portant sur les lecteurs DVDRW HH. Concernant ce second produit, l’allégation de la Commission, dans la décision attaquée, renvoyant à cet égard à un courriel interne de PLDS du 2 juin 2008, selon laquelle Sony Optiarc « a divulgué son prix envisagé de 18,88 USD » serait erronée, ce prix étant celui proposé précédemment par Sony Optiarc pour l’intégralité du troisième trimestre, couvrant les mois d’août, de septembre et d’octobre 2008. Il s’agirait ainsi d’une information ancienne et inexacte. D’ailleurs, Sony Optiarc aurait baissé son prix à 18,78 USD pour le mois de septembre et à 18,73 USD pour le mois d’octobre 2008.

147    La Commission conteste les arguments des requérantes.

148    Le courriel du 2 juin 2008, cité par les parties, qui concerne une enchère s’étant tenue le 5 juin 2008 concernant des lecteurs DVDRW HH pour le troisième trimestre de 2008, indique, d’une part, que Sony Optiarc proposait un prix de 18,88 USD et, d’autre part, que celui-ci « a indiqué qu’elle visait la 3e, voire la 2e place ».

149    En ce qui concerne le prix, les requérantes soutiennent qu’il s’agissait d’une information ancienne, car il s’agissait en fait du prix proposé pour l’enchère précédente, et inexacte, car Sony Optiarc a finalement proposé des prix inférieurs pour les mois de septembre et d’octobre 2008.

150    Or, il ne saurait, d’abord, être considéré qu’il s’agissait d’une information ancienne, puisque, ainsi qu’il a déjà été expliqué, le prix final proposé par un participant lors de l’enchère précédente servait généralement de point de départ de son prix pour la nouvelle enchère. Partant, le prix ne saurait non plus être considéré comme inexact, en ce sens qu’il n’était pas définitif.

151    En ce qui concerne la déclaration de Sony Optiarc relative au classement qu’elle visait, il résulte du point 96 ci-dessus que l’information d’un classement pour une enchère passée pouvait être utile. Tel est le cas, a fortiori, d’un objectif de classement pour une enchère à venir.

152    Dès lors, il y a lieu de considérer que ledit courriel faisait partie d’un système d’échange d’informations portant sur des ventes effectuées par les concurrents visant à atténuer le degré d’incertitude, au sens de la jurisprudence citée au point 59 ci-dessus.

–       Considérants 237 à 241 de la décision attaquée (contact no 101 figurant dans l’annexe I)

153    Selon les considérants 237 à 241 de la décision attaquée, PLDS, HLDS, TSST et Sony Optiarc ont échangé des informations sur les prix au cours de la période allant du 20 juin au 11 juillet 2008 en ce qui concerne les négociations bilatérales avec Dell pour des approvisionnements en DVDRW HH prévus en octobre 2008. Ces considérants renvoient essentiellement à deux courriels de PLDS. Le courriel de PLDS du 20 juin 2008 indique : « Entendu qu’Optiarc a obtenu 35 % du marché total disponible pour avoir réduit un prix d’environ 0,10 USD (soit 18,68 USD)[…] mais dans quelle mesure est-ce vrai ? […] selon HLDS, il a entendu […] HLDS réfléchit à la façon d’inverser la situation ». Un second courriel indique : « Optiarc a dit qu’ils avaient d’abord proposé 18,70 USD et qu’ils avaient reçu 35 % du marché total disponible, [Dell] voulait par la suite réduire leur marché total disponible à 25 % mais Optiarc a refusé et a augmenté son prix à 18,73$ et a obtenu 30 % du marché total disponible, Optiarc a dit [qu’il avait été] appelé concernant notre prix de 18,73 USD, c’est la raison pour laquelle il a aligné le prix, je ne crois pas à l’histoire d’Optiarc car nous avions proposé un prix plus bas de 18,70 USD and on m’a dit que nous obtiendrons un marché total disponible de 5 %, HLDS a proposé un prix de 18,73 USD et Ricky m’a aussi dit qu’il obtiendra 5 % du marché total disponible[…] il se passe quelque chose de louche ici ». Ces considérants renvoient également à la déclaration orale de PLDS indiquant qu’« aux dires [d’un employé d’HLDS], il a reçu certaines des informations à propos de HLDS de la part d’Optiarc, il nous a dit que le devis était une déduction d’Optiarc et non une information reçue de la part de HLDS ».

154    Les requérantes soutiennent que le courriel de PLDS du 20 juin 2008 n’énonce que des informations anciennes et vagues (« Entendu qu’Optiarc a obtenu 35 % du marché total disponible pour avoir réduit le prix ») et suggère que les informations en cause étaient peut‑être une rumeur (« mais dans quelle mesure est‑ce vrai ? »). Elles ajoutent que, bien que la déclaration de clémence de PLDS indique que les informations relatives à HLDS étaient une hypothèse de Sony Optiarc, le courriel du 20 juin 2008 suggère plutôt que PLDS a contacté directement HLDS (« Selon HLDS, il a entendu […] HLDS réfléchit à la façon d’inverser la situation »).

155    La Commission conteste les arguments des requérantes.

156    Contrairement à ce que soutient la Commission, le premier courriel ne fait pas clairement apparaître que les informations échangées proviennent de Sony Optiarc.

157    Quant au second courriel, PLDS indique que les informations attribuées à Sony Optiarc ne sont pas fiables et qu’elles sont même au contraire trompeuses (« Je ne crois pas à l’histoire d’Optiarc »). Elles ne sauraient donc être considérées comme étant de nature à constituer un élément de preuve de contacts anticoncurrentiels.

158    Toutefois, que Sony Optiarc ait peut-être tenté, à certaines occasions, de tromper les autres participants à l’entente ne saurait remettre en cause la réalité et l’utilité de sa participation à certains autres contacts (voir point 106 ci-dessus).

159    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que le contact no 101 n’est pas susceptible de participer à un faisceau d’indices.

–       Annexe I de la décision attaquée (contact no 105)

160    Le contact no 105 concerne divers courriels relatifs à une demande d’offre de prix pour le quatrième trimestre de l’exercice social 2008/2009 pour des LDO minces.

161    Selon les requérantes, soit les informations ont probablement été fournies par Dell (courriel de PLDS du 18 juin 2008 et courriels d’HLDS des 19 et 23 juin 2008), soit elles portaient sur des hypothèses (courriel de PLDS du 20 juin 2008), soit elles étaient relatives à des prix déjà proposés (courriel de PLDS du 11 juillet 2008). En outre, cette demande de devis se serait soldée par un échec pour Sony Optiarc, Dell ne l’ayant pas choisie comme fournisseur, les informations ne seraient en conséquence d’aucune utilité pour une future négociation en ligne qui, contrairement à la demande de devis, fixerait réellement les prix et les conditions pour le produit et les mois concernés.

162    La Commission conteste les arguments des requérantes.

163    Il convient de constater que la date de l’attribution de l’enchère en question ne ressort pas des éléments du dossier, mais les parties s’accordent sur le fait que certaines informations ont été échangées avant, et d’autres après cette attribution.

164    En ce qui concerne les informations échangées avant cette attribution, le courriel interne de PLDS du 20 juin 2008 indique ce qui suit :

« Deux fournisseurs sont invités, à savoir HLDS et Optiarc. Optiarc a indiqué à leur direction que HLDS allait “très probablement” estimer le prix à environ 40 USD dans son devis. La direction de HLDS est très intéressée à l’idée d’avoir ce projet. Donc, dites-moi lequel d’eux souhaitez-vous qu’il ait le projet ! »

165    Il résulte des termes de ce courriel que, même si l’information n’est pas absolument avérée, il révèle un degré élevé de certitude (« très probablement »). Il s’agit donc d’une information utile, de nature à réduire l’incertitude en ce qui concerne le prix qui serait proposé par Sony Optiarc.

166     En ce qui concerne les informations échangées après cette attribution, la Commission renvoie au courriel de PLDS du 11 juillet 2008, lequel indique ce qui suit :

« Optiarc[…] Optiarc a dit qu’elle présentait une offre à 41 USD (je pensais que son prix était inférieur à 41 USD, mais supérieur à 40 USD). HLDS. 40 USD offerts […]. Très bon espoir d’obtenir le slot d’application. […] a indiqué aux deux que la concurrence a offert 38 USD. IMPACT : PLDS doit être en mesure d’avoir un prix de vente de 40 USD au T 4 de l’exercice social 2008/2009 en dégageant un bénéfice. »

167    Comme le souligne la Commission, ce courriel démontre le fait que PLDS ajustait son prix de vente sur la base des informations fournies par Optiarc. Ce courriel illustre ainsi le fait que des informations obtenues par le biais des contacts avaient une incidence sur les comportements des concurrents.

168    Il y a donc lieu de conclure que le contact no 105 est susceptible de participer à un faisceau d’indices.

–       Considérants 257 à 259 de la décision attaquée (contact no 116 figurant à l’annexe I)

169    Selon les considérants 257 à 259 de la décision attaquée, HLDS, PLDS et Sony Optiarc ont échangé des informations avant une négociation en ligne de Dell qui a eu lieu le 30 octobre 2008. Lesdits considérants renvoient notamment à un courriel interne de Sony Optiarc, également adressé à Quanta, du 28 octobre 2008, et à un courriel interne de HLDS du 29 octobre 2008. Le courriel de Sony Optiarc indique que « PLDS lancera son modèle rafraîchi en janvier 2009 au prix de 25 USD (elle utilisera ce prix comme prix de départ pour janvier 2009) ». Quant au courriel de HLDS du 29 octobre 2008, il indique ce qui suit :

« Négociation en ligne minces [...] – Rapport concernant la tendance de S – Ils envisagent de participer à une [négociation] concernant des DVD-W à chargement par plateau/fente de 12,7 mm seulement, mais il ne faut s’attendre à aucun ajustement agressif des prix [...] Comme [les prix] ont été mentionnés par le personnel de la société S, il est possible qu’elle modifie sa position dans la négociation en ligne proprement dite. Je vais donc surveiller leurs mouvements dans cette négociation. »

170    Les requérantes soutiennent, quant au premier courriel de Sony Optiarc, qui évoque un « modèle actualisé » de PLDS avec un « prix de départ » de « 25 USD », que l’information relative à ce prix, c’est-à-dire un prix de départ, n’était pas susceptible d’éliminer ou de réduire sensiblement l’incertitude liée au comportement futur sur les prix, puisqu’il était courant que le prix chute de manière importante au cours des négociations en ligne. Les requérantes soulignent que ce prix de 25 USD ne correspondait d’ailleurs ni à l’offre de départ, ni à l’offre finale de PLDS, puisque le prix avait été ramené de 25,20 à 24,60 USD. Quant au second courriel, de HLDS, qui indique que Sony Optiarc prévoyait « de participer à une [négociation] concernant des DVD-W à chargement par plateau/fente de 12,7 mm », mais qu’il ne fallait s’attendre « à aucun ajustement agressif des prix », ces informations n’auraient pas été susceptibles de réduire sensiblement ou d’éliminer l’incertitude liée au comportement de Sony Optiarc, HLDS observant dans le courriel qu’« il [était] possible que [Sony Optiarc] modifie sa position dans la négociation en ligne proprement dite ».

171    La Commission conteste les arguments des requérantes.

172    Il importe d’abord de relever que le courriel de Sony Optiarc du 28 octobre 2008 constitue un partage d’informations direct à un concurrent, puisqu’il a été envoyé non seulement en interne, mais aussi à Quanta.

173    Ensuite, il convient de rejeter l’argument des requérantes selon lequel le prix de 25 USD n’était pas fiable et n’était pas un prix final. En effet, d’une part, il est logique que, dans le cadre d’une procédure de soumissionnement, un prix puisse évoluer. D’autre part, le fait que le prix communiqué à un concurrent puisse ne pas être le prix final ne saurait modifier la nature anticoncurrentielle de cette information.

174    Il en va de même en ce qui concerne le courriel de HLDS du 29 novembre 2008. Ce n’est pas parce que Sony Optiarc pouvait encore éventuellement modifier sa position dans la négociation en ligne que la communication de cette position n’a pas faussé cette négociation en réduisant l’incertitude quant à ladite position.

175    Il s’ensuit que la Commission a pu, sans commettre d’erreurs et sans violer son obligation de motivation, conclure, au regard des éléments de preuve et des indices pouvant être retenus, pris dans leur ensemble, que les requérantes avaient participé à une infraction « par objet » à l’article 101 TFUE.

 Sur la deuxième branche, tirée d’un défaut de preuves d’une infraction « unique et continue »

176    En substance, les requérantes indiquent, premièrement, que, selon la jurisprudence, la Commission a l’obligation d’évaluer avec précision si la période séparant deux manifestations d’un comportement infractionnel est suffisamment brève pour établir que ces manifestations constituent une infraction au caractère véritablement continu. Or, la Commission n’aurait pas procédé à cette évaluation. Deuxièmement, la Commission n’aurait pas démontré que Sony Optiarc avait connaissance de l’existence d’un objectif commun et entendait y contribuer. Troisièmement, rien ne prouverait que Sony Optiarc ait pris part « dans pratiquement toutes les enchères » à un partage « systématique » des intentions futures (décision attaquée, considérants 109 et 110). Quatrièmement, contrairement aux autres fournisseurs de LDO, Sony Optiarc n’a rien fait pour tenter de dissimuler son comportement et a, au contraire, parfois participé de manière agressive aux enchères. Cinquièmement, la Commission ne tiendrait pas compte du fait qu’elle n’allègue, pour la même période, que dix-sept contacts contre Sony Optiarc, alors qu’elle en allègue 51 contre HLDS, 30 contre TSST et 58 contre PLDS.

177    La Commission conteste les arguments des requérantes.

178    Il y a lieu de rappeler que l’existence d’une infraction unique et continue ne signifie pas nécessairement qu’une entreprise participant à l’une ou à l’autre de ses manifestations puisse être tenue pour responsable de l’ensemble de cette infraction. Encore faut-il que la Commission démontre que cette entreprise connaissait les activités anticoncurrentielles à l’échelle européenne des autres entreprises ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir. La seule identité d’objet entre un accord auquel a participé une entreprise et une entente globale ne suffit pas pour imputer à cette entreprise la participation à l’entente globale. En effet, l’article 101, paragraphe 1, TFUE ne s’applique pas à moins qu’il y ait une concordance de volontés entre les parties concernées (arrêts du 10 octobre 2014, Soliver/Commission, T‑68/09, EU:T:2014:867, point 62, et du 9 septembre 2015, Toshiba/Commission, T‑104/13, EU:T:2015:610, point 52).

179    Dès lors, ce n’est que si l’entreprise, lorsqu’elle participe à un accord, a su ou aurait dû savoir que, ce faisant, elle s’intégrait dans une entente globale que sa participation à l’accord concerné peut constituer l’expression de son adhésion à cette même entente (arrêts du 20 mars 2002, Sigma Tecnologie/Commission, T‑28/99, EU:T:2002:76, point 45 ; du 16 novembre 2011, Low & Bonar et Bonar Technical Fabrics/Commission, T‑59/06, non publié, EU:T:2011:669, point 61, et du 30 novembre 2011, Quinn Barlo e.a./Commission, T‑208/06, EU:T:2011:701, point 144). Autrement dit, il doit être établi que ladite entreprise entendait contribuer, par son propre comportement, aux objectifs communs poursuivis par l’ensemble des participants et qu’elle avait connaissance des comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par d’autres entreprises dans la poursuite des mêmes objectifs, ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir et qu’elle était prête à en accepter le risque (arrêts du 10 octobre 2014, Soliver/Commission, T‑68/09, EU:T:2014:867, point 63, et du 9 septembre 2015, Toshiba/Commission, T‑104/13, EU:T:2015:610, point 53).

180    L’entreprise concernée doit ainsi connaître la portée générale et les caractéristiques essentielles de l’entente globale (arrêts du 10 octobre 2014, Soliver/Commission, T‑68/09, EU:T:2014:867, point 64, et du 9 septembre 2015, Toshiba/Commission, T‑104/13, EU:T:2015:610, point 54).

181    Lorsque tel est le cas, il ne saurait être tenu compte de la circonstance qu’une entreprise n’a pas participé à tous les éléments constitutifs d’une entente ou qu’elle a joué un rôle mineur dans les aspects auxquels elle a participé que lors de l’appréciation de la gravité de l’infraction et, le cas échéant, de la détermination du montant de l’amende (arrêts du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, EU:C:1999:356, point 90 ; du 14 mai 1998, Buchmann/Commission, T‑295/94, EU:T:1998:88, point 121, et du 10 octobre 2014, Soliver/Commission, T‑68/09, EU:T:2014:867, point 65).

182    En l’espèce, il ressort de la décision attaquée que, selon la Commission, l’entente était composée d’un réseau régulier et clairement visible de contacts collusoires, en grande partie bilatéraux, s’inscrivant dans un plan d’ensemble. Tous les destinataires auraient partagé leurs futures intentions sur la stratégie concernant le prix ou le classement lors des appels d’offres à venir. Les parties auraient, en outre, coordonné leur comportement durant les procédures de soumissionnement et contrôlé régulièrement et systématiquement les résultats des précédentes procédures. En conséquence, les parties auraient été en mesure de déterminer à l’avance les paramètres de leurs concurrents lors des appels d’offres et n’auraient pas forcément eu besoin de faire des enchères aussi agressives pour atteindre une position souhaitée (décision attaquée, considérant 354). Dès lors, la Commission a conclu, dans la décision attaquée, que les destinataires de ladite décision poursuivaient un objectif unique, à savoir fausser le jeu normal de la concurrence lors des appels d’offres pour des LDO organisés par Dell et HP en définissant des paramètres tels que le prix et le classement dictant l’attribution de volume ainsi qu’en échangeant d’autres informations commercialement sensibles (décision attaquée, considérant 355).

183    En outre, la Commission a souligné, dans la décision attaquée, que les différents contacts collusoires portaient sur le même produit, avaient un contenu similaire, avaient été mis en œuvre pendant toute la période de l’entente, impliquaient dans une large mesure les mêmes parties, avaient une portée mondiale et poursuivaient le même objectif consistant à fausser le jeu normal de la concurrence pour les marchés des LDO de Dell et de HP. La Commission a conclu, dans la décision attaquée, que ces circonstances affichaient clairement un lien de complémentarité et constituaient des indices objectifs de l’existence d’un plan global adopté par un groupe uniforme d’entreprises (décision attaquée, considérant 354).

184    À titre liminaire, il importe de relever que, comme il a été constaté dans le cadre de l’examen de la première branche du présent moyen, la Commission a pu, sans commettre d’erreurs et sans violer son obligation de motivation, conclure, au regard des éléments de preuve et des indices pouvant être retenus, pris dans leur ensemble, que les requérantes avaient participé à une infraction « par objet » à l’article 101 TFUE.

185    Il convient également de relever que les requérantes ne remettent pas en cause la décision attaquée en ce qu’il y est conclu à l’existence d’une infraction unique et continue, mais considèrent que la Commission n’a pas établi à suffisance de droit que Sony Optiarc avait participé à ladite infraction.

186    Premièrement, en ce qui concerne l’argument des requérantes selon lequel la Commission n’a pas évalué si les périodes séparant les contacts étaient suffisamment brèves pour établir une infraction continue, il y a lieu de rappeler que le fait que la preuve de l’existence d’une infraction continue n’a pas été apportée pour certaines périodes déterminées ne fait pas obstacle à ce que l’infraction soit regardée comme ayant été constituée durant une période globale plus étendue que celles-ci dès lors qu’une telle constatation repose sur des indices objectifs et concordants. Dans le cadre d’une infraction s’étendant sur plusieurs années, le fait que les manifestations de l’entente interviennent à des périodes différentes, pouvant être séparées par des laps de temps plus ou moins longs, demeure sans incidence sur l’existence de cette entente, pour autant que les différentes actions qui font partie de cette infraction poursuivent une seule finalité et s’inscrivent dans le cadre d’une infraction à caractère unique et continu (arrêt du 21 septembre 2006, Technische Unie/Commission, C‑113/04 P, EU:C:2006:593, point 169).

187    En l’espèce, il y a lieu de relever qu’il résulte de ce qui précède que les requérantes ont participé à de nombreux contacts sur une période de quinze mois. La plupart des contacts n’étaient espacés que d’un mois et les requérantes ont parfois participé à plusieurs contacts au cours du même mois. La plus grande période sans contact avérée n’est que de trois mois (entre juillet et octobre 2008).

188    Deuxièmement, en ce qui concerne l’argument des requérantes selon lequel la Commission n’a pas démontré dans la décision attaquée que Sony Optiarc avait connaissance de l’existence d’un objectif commun et entendait y contribuer, il suffit de se reporter aux considérants 373 et 374 de la décision attaquée.

189    Ainsi, au considérant 373 de ladite décision, la Commission a relevé qu’un courriel interne de PLDS du 20 juin 2007 démontrait que Sony Optiarc avait transmis à PLDS des informations qu’elle avait reçues de TSST : « Selon les ressources, TSST a encore réservé 40 % pour les DVD & DVDRW SATA HH, ce point a également été [confirmé] par les gestionnaires de compte de HLDS et de Sony Optiarc ». À cet égard, il convient de rappeler que, dans les affaires concernant des infractions aux règles de la concurrence, la prise en compte des éléments antérieurs à la période pertinente n’est pas exclue, dans la mesure où de tels éléments peuvent, notamment, servir à construire une image globale de la situation et à corroborer l’interprétation des autres preuves (voir arrêt du 23 janvier 2014, Gigaset/Commission, T‑395/09, non publié, EU:T:2014:23, point 67 et jurisprudence citée).

190    La Commission a, en outre, indiqué audit considérant 373 que le fait que Sony Optiarc partageait des informations avec ses concurrents ressortait également d’un courriel de HLDS du 23 juin 2008, dans lequel il est indiqué que « SNO [Sony Optiarc] vérifie également les niveaux de prix des sociétés T[SST] et P[LDS] ».

191    Selon le considérant 374 de la décision attaquée, un courriel interne de Sony Optiarc du 14 février 2008 démontre qu’elle s’est engagée dans des contacts avec TSST et PLDS et qu’elle a également transmis des informations sensibles à Quanta. En outre, selon ce considérant, des courriels internes de HLDS et de PLDS en date des 18 septembre et 25 juillet 2007 confirment que Sony Optiarc s’est engagée dans des contacts anticoncurrentiels.

192    Enfin, dans sa déclaration orale, PLDS a indiqué que HLDS, TSST et Optiarc « à un certain moment, […] lui [avaient] dit qu’elles avaient parlé l’une à l’autre ».

193    Au surplus, il peut être relevé que les requérantes ne se sont jamais distanciées publiquement de l’entente, ni ne l’ont dénoncée aux entités administratives, ce qui a eu pour effet d’encourager la continuation de l’infraction et compromis sa découverte. Cette complicité constitue un mode passif de participation à l’infraction qui est donc de nature à engager la responsabilité de l’entreprise dans le cadre d’un accord unique (voir, en ce sens, arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 84).

194    C’est donc à juste titre que la Commission a retenu au considérant 374 de la décision attaquée que Sony Optiarc, en s’engageant dans ces différents contacts, savait ou pouvait raisonnablement prévoir que ces contacts n’étaient pas isolés, mais étaient unis par le même objectif et participaient à une large entente sur les LDO, constituée d’un plus large réseau de contacts parallèles.

195    Troisièmement, en ce qui concerne l’argument des requérantes selon lequel la Commission n’a pas prouvé que Sony Optiarc avait pris part « dans pratiquement toutes les enchères » à un partage « systématique » des intentions futures, étant donné qu’il résulte de ce qui précède que les requérantes avaient l’intention de contribuer à l’objectif commun et avaient connaissance de la portée générale et des caractéristiques essentielles de l’entente ou pouvaient raisonnablement les avoir prévues, il n’incombait pas à la Commission de prouver que Sony Optiarc avait participé à toutes les enchères. À cet égard, le fait que Sony Optiarc aurait pu ne pas avoir participé à certaines discussions ne saurait suffire à la disculper.

196    Quatrièmement, en ce qui concerne l’argument des requérantes selon lequel Sony Optiarc n’aurait rien fait pour tenter de dissimuler son comportement, et a au contraire parfois participé de manière agressive aux enchères, il convient de relever que le fait que Sony Optiarc n’ait pas tenté ou réussi à dissimuler son comportement dans la même mesure que les autres participants à l’entente ne saurait avoir d’incidence sur la qualification de son comportement anticoncurrentiel.

197    Quant au comportement parfois agressif de Sony Optiarc dans le cadre de certaines enchères, le fait qu’elle puisse avoir tenté d’exploiter l’entente à son propre avantage ne signifie pas qu’elle n’a pas participé à l’infraction unique et continue (voir points 106 et 114 ci-dessus).

198    Cinquièmement, en ce qui concerne l’argument des requérantes selon lequel la Commission ne tiendrait pas compte, dans la décision attaquée, du fait qu’elle n’allègue que dix-sept contacts contre Sony Optiarc, il convient de constater qu’il résulte de l’annexe I de la décision attaquée que la Commission a relevé trente-et-un contacts se rapportant à Dell au cours de la période de participation de Sony Optiarc à l’entente. Selon cette annexe, HLDS a participé à vingt‑deux contacts, TSST à dix‑huit contacts et PLDS à tous les contacts. Même en prenant en compte le fait que certains des contacts ne sont pas absolument avérés (voir ci‑dessus points 67 et suivants), le nombre de contacts de Sony Optiarc, contrairement à ce que prétendent les requérantes, ne saurait être qualifié de mineur.

199    Il s’ensuit qu’aucun des arguments des requérantes ne permet de remettre en cause la conclusion de la Commission selon laquelle l’infraction à laquelle les requérantes ont participé est une infraction unique et continue.

200    Partant, la deuxième branche du premier moyen doit être rejetée.

 Sur la troisième branche, tirée d’une absence de prise en compte des éléments à décharge

201    Les requérantes avancent que la Commission a méconnu ou n’a pas suffisamment tenu compte des éléments de preuve contemporains des faits invoqués par Sony Optiarc, montrant que cette dernière a rivalisé avec agressivité au cours des appels d’offres en cause (contact no 101). Même lorsque la Commission ne méconnaît pas les éléments de preuve à décharge, elle omettrait d’interpréter les doutes en faveur de Sony Optiarc (contact no 98). [Req point 73]

202    La Commission conteste les arguments des requérantes.

203    Les arguments des requérantes, qui reviennent en substance à soutenir que la Commission n’a pas tenu compte du fait que Sony Optiarc recherchait parfois uniquement son propre intérêt, doivent être rejetés. En effet, ainsi qu’il a déjà été souligné, le fait que Sony puisse avoir tenté d’exploiter l’entente à son propre avantage ne signifie pas qu’elle n’a pas participé à l’infraction unique et continue.

204    Partant, la troisième branche du premier moyen doit être rejetée.

 Sur la quatrième branche, tirée d’une violation des droits de la défense, d’une absence de preuve et d’un défaut de motivation

205    Selon les requérantes, la conclusion de la décision attaquée, selon laquelle Sony a participé à des « infractions distinctes », viole les droits de la défense, n’est pas prouvée et est viciée par un défaut de motivation.

–       Sur la violation des droits de la défense

206    Les requérantes avancent que l’assertion faite au considérant 352 de la décision attaquée selon laquelle chaque manifestation du comportement adopté à l’égard des clients concernés ou chaque groupe de contacts bilatéraux a eu pour objet de restreindre la concurrence et constitue en conséquence une infraction à l’article 101, paragraphe 1, TFUE est nouvelle et n’a pas été soulevée par la Commission au cours de la procédure administrative. Selon les requérantes, puisque la Commission entendait modifier son appréciation du caractère anticoncurrentiel du comportement de Sony Optiarc, elle aurait dû mettre Sony Optiarc en mesure d’exercer son droit d’être entendue en adressant une communication des griefs supplémentaire à cette dernière, lui permettant ainsi de faire valoir son point de vue sur la nouvelle qualification juridique des faits retenue par la Commission. À défaut, la Commission ne saurait à présent s’en prévaloir, de sorte qu’en s’en prévalant malgré tout, la décision attaquée manquerait aux droits de la défense de Sony Optiarc.

207    La Commission conteste les arguments des requérantes.

208    Il convient d’examiner, au regard des principes rappelés aux points 71 et suivants ci-dessus, si Sony Optiarc a clairement été informée, dans la communication des griefs, que la Commission considérait que l’infraction unique et continue était constituée de différents accords bilatéraux.

209    Il convient d’abord de relever que nombreux étaient les éléments, dans la communication des griefs, indiquant à Sony Optiarc que la Commission considérait que l’entente était constituée de différents accords. Ainsi, notamment, le considérant 301 de ladite communication indique que « l’orchestration des soumissions [...] a finalement débouché, dans certains cas, sur des accords directs au sens de l’article 101 TFUE » et relève que les contacts bilatéraux « constituent à tout le moins des pratiques concertées » au sens de cet article. Le considérant 308 de la communication des griefs évoque l’« écheveau d’infractions dans cette affaire ». Le considérant 353 de la communication des griefs vise les principaux aspects de « l’écheveau d’accords et de pratiques concertées qui peuvent être qualifiés de restrictions de concurrence ». Le considérant 354 de la communication des griefs avance que cet « écheveau d’accords et/ou de pratiques concertées » avait pour objet de restreindre la concurrence.

210    Il convient ensuite de rappeler que, selon la jurisprudence, une violation de l’article 101 TFUE peut résulter non seulement d’un acte isolé, mais également d’une série d’actes ou bien encore d’un comportement continu. Cette interprétation ne saurait être contestée au motif qu’un ou plusieurs éléments de cette série d’actes ou de ce comportement continu pourraient également constituer en eux-mêmes une violation dudit article 101 TFUE (arrêt du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, EU:C:1999:356, point 81).

211    La notion d’infraction unique et continue suppose un ensemble de comportements adoptés par différentes parties poursuivant un même but économique anticoncurrentiel (voir, en ce sens, arrêts du 24 octobre 1991, Rhône-Poulenc/Commission, T‑1/89, EU:T:1991:56, points 125 et 126).

212    Il résulte ainsi de la notion même de l’infraction unique et continue qu’elle suppose un « ensemble de comportements ». Les requérantes ne peuvent donc prétendre que la Commission a modifié ses conclusions en retenant, en sus d’une infraction unique et continue, plusieurs « contacts bilatéraux », étant donné que ce sont justement ces contacts bilatéraux qui constituent ladite infraction unique.

213    Il n’y avait donc aucune incohérence, au considérant 352 de la décision attaquée, en ce que la Commission y a indiqué que les contacts constituaient des infractions individuelles et répondaient simultanément aux critères d’une infraction unique et continue.

214    En outre, tous les contacts bilatéraux retenus à la charge des requérantes étaient mentionnés dans la communication des griefs. À cet égard, il en est donné une liste récapitulative au considérant 275 de ladite communication.

215    D’ailleurs, ainsi que le fait valoir la Commission, sans être contredite sur ce point par les requérantes, celles-ci ont contesté chaque contact séparément et en détail dans leur réponse à la communication des griefs et sont parvenues à convaincre la Commission de ne pas maintenir ses allégations relatives à certains contacts bilatéraux.

216    Dans ces circonstances, les requérantes ne sauraient prétendre que la décision attaquée contient une infraction supplémentaire ou distincte de celle retenue dans la communication des griefs.

217    Dès lors, les arguments des requérantes relatifs à une violation des droits de la défense doivent être rejetés.

–       Sur l’absence de preuve

218    Les requérantes avancent qu’aucun des contacts allégués ne constitue une infraction « par objet » soit parce que la source des informations prétendument partagées n’est pas claire ou n’est pas corroborée, soit parce que les conclusions auxquelles parvient la décision attaquée reposent sur de la spéculation ou sur des inférences qui ne sauraient être retenues, soit encore parce que les informations en cause n’étaient pas susceptibles, dans les circonstances considérées, de produire un effet anticoncurrentiel.

219    À cet égard, il résulte des première et deuxième branches que les requérantes ont participé à une infraction « unique et continue » « par objet ». Eu égard à la définition de la notion d’infraction « unique et continue » rappelée au point 211 ci‑dessus, la Commission n’avait pas à démontrer que chacun des contacts constituait une infraction « par objet ».

–       Sur le défaut de motivation

220    Selon les requérantes, la décision attaquée est viciée par un défaut de motivation, puisque la Commission n’y indique pas pourquoi elle a considéré que Sony Optiarc avait participé à « plusieurs infractions distinctes ». Les motifs ayant poussé la Commission à retenir, dans la décision attaquée, la qualification d’infraction « unique et continue » ne seraient pas conformesà l’assertion faite, à l’article 1er de ladite décision, selon laquelle l’infraction « unique et continue » était « composée de plusieurs infractions distinctes ». En outre, cette incohérence ne serait pas résolue par la brève allusion à des infractions distinctes au considérant 352 de ladite décision. En particulier, la Commission se serait abstenue d’expliquer, dans la décision attaquée, pour chaque comportement censé avoir constitué une « infraction distincte », sa nature et sa portée, et, notamment, s’il constituait un accord ou une pratique concertée au sens de l’article 101 TFUE et les raisons et les éléments de preuve au soutien de chaque qualification.

221    La Commission conteste les arguments des requérantes.

222    Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée à l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées par l’acte au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 14 juillet 2016, Parker Hannifin Manufacturing et Parker-Hannifin/Commission, T‑146/09 RENV, EU:T:2016:411, point 82 et jurisprudence citée).

223    Il n’en demeure pas moins que, aux fins de la motivation d’une décision adoptée pour assurer l’application des règles de concurrence, la Commission est tenue, en vertu de l’article 296 TFUE, de mentionner, à tout le moins, les faits et les considérations revêtant une importance essentielle dans l’économie de sa décision, permettant ainsi à la juridiction compétente et aux parties intéressées de connaître les conditions dans lesquelles elle a fait application du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 2 février 2012, Denki Kagaku Kogyo et Denka Chemicals/Commission, T‑83/08, non publié, EU:T:2012:48, point 91).

224    En outre, la motivation doit être logique et, notamment, ne pas présenter de contradiction interne entravant la bonne compréhension des raisons sous-tendant cet acte (voir, en ce sens, arrêts du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 169, et du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 151).

225    Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que le principe de protection juridictionnelle effective, principe général du droit de l’Union qui est aujourd’hui exprimé à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et qui correspond, dans le droit de l’Union, à l’article 6, paragraphe 1, de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (voir arrêt du 10 juillet 2014, Telefónica et Telefónica de España/Commission, C‑295/12 P, EU:C:2014:2062, point 57 et jurisprudence citée), implique que le dispositif d’une décision adoptée par la Commission, constatant des violations aux règles de la concurrence, soit particulièrement clair et précis et que les entreprises tenues pour responsables et sanctionnées soient en mesure de comprendre et de contester l’attribution de cette responsabilité et l’imposition de ces sanctions, telles qu’elles ressortent des termes dudit dispositif.

226    En effet, il convient de rappeler que c’est par le dispositif des décisions que la Commission indique la nature et l’étendue des infractions qu’elle sanctionne. Il doit être relevé que, en principe, s’agissant précisément de la portée et de la nature des infractions sanctionnées, c’est le dispositif, et non les motifs, qui importe. C’est uniquement dans le cas d’un manque de clarté des termes utilisés dans le dispositif qu’il convient de l’interpréter en ayant recours aux motifs de la décision. Comme l’a estimé le juge de l’Union, en vue de définir les personnes faisant l’objet d’une décision constatant une infraction, il convient de s’en tenir au dispositif de cette décision, lorsque celui-ci ne prête pas au doute (arrêts du 16 décembre 1975, Suiker Unie e.a./Commission, 40/73 à 48/73, 50/73, 54/73 à 56/73, 111/73, 113/73 et 114/73, EU:C:1975:174, point 315, et du 11 décembre 2003, Adriatica di Navigazione/Commission, T‑61/99, EU:T:2003:335, point 43).

227    En l’espèce, ainsi qu’il vient d’être relevé, il n’y a aucune incohérence, au considérant 352 de la décision attaquée, en ce que la Commission y a indiqué que les contacts constituaient des infractions individuelles et répondaient simultanément aux critères d’une infraction unique et continue (voir point 213 ci-dessus).

228    Dès lors, il n’y a pas non plus d’incohérence entre ces considérants et l’article 1er de la décision attaquée selon lequel l’infraction unique et continue consistait en plusieurs infractions distinctes.

229    Ainsi qu’il ressort de ce qui précède, la Commission a clairement exposé la portée et la nature du comportement des requérantes, qu’elle a considéré comme étant constitutif d’une violation de l’article 101 TFUE, ainsi que les éléments de preuve étayant ces conclusions.

230    En outre, si l’article 101 TFUE distingue la notion de « pratique concertée » de celle d’« accords entre entreprises » ou de « décisions d’associations d’entreprises », c’est dans le dessein d’appréhender, sous les interdictions de cette disposition, différentes formes de coordination et de collusion entre entreprises. Dès lors, une qualification précise de la nature de la coopération en cause au principal, consistant en un échange d’informations entre concurrents, ne serait pas susceptible de modifier l’analyse juridique qui s’impose en vertu de l’article 101 TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2006, Asnef-Equifax et Administración del Estado, C‑238/05, EU:C:2006:734, point 32).

231    Les requérantes ont ainsi pu comprendre les motifs sous-tendant la décision et, ainsi qu’il résulte de ce qui précède, ont pu formuler devant le Tribunal des arguments détaillés pour chacun des contacts pour lesquels la Commission a conclu à leur implication.

232    Il y a donc lieu de considérer que la Commission a satisfait aux obligations lui incombant en vertu de l’article 296 TFUE et, partant, de rejeter la quatrième branche du premier moyen.

233    Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de constater que les requérantes n’ont pas établi que la Commission aurait commis une erreur en concluant qu’elles ont participé à une infraction unique et continue par objet et, en conséquence, de rejeter le premier moyen dans son ensemble.

 Sur le second moyen, présenté à titre subsidiaire et tiré de ce que la fixation du montant de l’amende est entachée d’erreurs de fait et de droit, ainsi que d’une insuffisance de motivation

234    À titre subsidiaire, les requérantes soutiennent, en premier lieu, que la Commission, en opérant une « double comptabilisation » au détriment de Sony Optiarc dans la décision attaquée, a violé les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité ainsi que les lignes directrices sur le calcul des amendes. En second lieu, la Commission aurait manqué aux principes d’égalité de traitement et de proportionnalité, à l’article 23, paragraphe 3, du règlement no 1/2003, et aux lignes directrices sur le calcul des amendes en ne tenant pas compte de la participation bien plus réduite de Sony Optiarc par rapport aux autres destinataires de ladite décision.

 Sur la première branche, tirée d’une « double comptabilisation » au détriment de Sony Optiarc

235    En substance, les requérantes avancent que la Commission a infligé une amende à Sony Optiarc en se fondant sur des recettes réalisées auprès de Dell qui avaient été reversées à Quanta en vertu des accords de partage des recettes en vigueur entre Sony Optiarc et Quanta au cours de la période pertinente. Ces recettes représentaient au moins 36 % de la valeur annuelle des ventes réalisées auprès de Dell attribuées à Sony Optiarc, à savoir un minimum de 9 956 911 euros environ, sur un total de 28 014 950 euros. Le montant de l’amende infligée aux requérantes aurait été fixé à environ 3 480 096 euros de plus que ne l’aurait été le montant si ces recettes avaient été, comme elles auraient dû l’être, exclues de la valeur annuelle des ventes de Sony Optiarc. En prenant doublement en considération une part très substantielle des recettes, la décision attaquée serait contraire aux principes d’égalité de traitement et de proportionnalité, ainsi que les lignes directrices sur le calcul des amendes. Les requérantes ajoutent que les arrêts du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission (C‑389/10 P, EU:C:2011:816), et du 19 mai 2010, KME Germany e.a./Commission (T‑25/05, non publié, EU:T:2010:206), cités par la Commission dans sa décision attaquée, sont inapplicables, d’une part, parce l’affaire KME Germany a abordé la détermination du montant des amendes en appliquant une méthodologie antérieure aux lignes directrices sur le calcul des amendes en cause dans la présente espèce, et d’autre part, parce que l’affaire KME Germany ne portait pas sur une double comptabilisation de recettes affectées pour deux participants à la même infraction alléguée. Enfin, les requérantes soutiennent que, dans une décision antérieure, la Commission a utilisé une méthode de calcul visant à éviter tout risque de double comptabilisation des ventes réalisées par les participants à l’entente concernée.

236    La Commission conteste les arguments des requérantes.

237    Selon les explications fournies par les requérantes, dans le cadre des accords conclus entre Quanta et Sony Optiarc, Quanta concevait et fabriquait des produits LDO qui étaient ensuite vendus sous la marque Sony Optiarc. Les contrats et les commandes des clients étaient formellement conclus avec Sony Optiarc, et c’est cette dernière qui était payée par les clients.

238    Dès lors, l’argument des requérantes selon lequel la Commission a comptabilisé deux fois les ventes faites à Dell est peu intelligible, étant donné que c’est Sony qui percevait les recettes auprès de Dell.

239    En tout état de cause, il convient de rappeler que, aux termes du paragraphe 13 des lignes directrices sur le calcul des amendes, en vue de déterminer le montant de base de l’amende à infliger, la Commission utilisera la valeur des ventes de biens ou services, réalisées par l’entreprise, en relation directe ou indirecte avec l’infraction.

240    Dans la détermination du montant des amendes pour infraction au droit de la concurrence, la Commission doit non seulement prendre en compte la gravité de l’infraction et les circonstances particulières de l’espèce, mais aussi le contexte dans lequel ladite infraction a été commise et veiller au caractère dissuasif de son action, surtout pour les types d’infractions particulièrement nuisibles pour la réalisation des objectifs de l’Union (voir arrêt du 5 avril 2006, Degussa/Commission, T‑279/02, EU:T:2006:103, point 272 et jurisprudence citée).

241    La gravité des infractions doit être établie en fonction d’un grand nombre d’éléments, tels que les circonstances particulières de l’affaire, son contexte et la portée dissuasive des amendes, et ce sans qu’ait été établie une liste contraignante ou exhaustive de critères devant obligatoirement être pris en compte (arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 241).

242    De plus, le Tribunal a déjà indiqué que la Commission n’était pas obligée dans chaque cas d’établir quelles étaient les ventes individuelles qui ont été affectées par l’entente. Une telle obligation n’a jamais été imposée par les juridictions de l’Union et rien n’indique que la Commission avait l’intention de s’imposer une telle obligation dans les lignes directrices sur le calcul des amendes (arrêt du 16 juin 2011, Team Relocations e.a./Commission, T‑204/08 et T‑212/08, EU:T:2011:286, point 64).

243    Enfin, il convient de rappeler que le fait de ne pas bénéficier d’une infraction ne saurait constituer une circonstance atténuante, sous peine de faire perdre à l’amende infligée son caractère dissuasif (voir arrêt du 14 décembre 2006, Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, T‑259/02 à T‑264/02 et T‑271/02, EU:T:2006:396, point 489 et jurisprudence citée).

244    En l’espèce, quand la Commission a recherché la valeur des ventes de biens auxquels l’infraction se rapportait directement ou indirectement au sens du paragraphe 13 des lignes directrices sur le calcul des amendes, il était logique qu’elle utilise les ventes directes des requérantes à Dell en tant que base pour calculer le montant de l’amende.

245    À cet égard, la méthode préconisée par les requérantes, consistant à déduire des recettes perçues par Sony Optiarc auprès de Dell les recettes reversées à Quanta en vertu des accords en vigueur entre Sony Optiarc et Quanta au cours de la période pertinente pour éviter une « double comptabilisation », nonobstant le fait que les requérantes expliquent ne pas être en mesure de fournir les chiffres précis à cet égard, compromettrait l’efficacité de l’interdiction des ententes, car il suffirait alors aux entreprises de s’associer à un participant à l’entente pour réduire le montant de leur amende.

246    En outre, il résulte du premier moyen que le comportement des requérantes n’a pas été fondamentalement différent de celui des autres destinataires de la décision attaquée, tant en ce qui concerne le fait d’avoir échangé des informations notamment sur les prix qu’en ce qui concerne la fréquence de ces échanges.

247    La décision attaquée n’a donc, à cet égard, porté atteinte ni aux principes d’égalité de traitement et de proportionnalité, ni aux lignes directrices sur le calcul des amendes.

248    En ce qui concerne l’argument des requérantes relatif aux arrêts du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission (C‑389/10 P, EU:C:2011:816), et du 19 mai 2010, KME Germany e.a./Commission (T‑25/05, non publié, EU:T:2010:206), il y a lieu de relever que, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, la Commission n’a pas entendu se fonder, au considérant 539 de la décision attaquée, sur ces arrêts pour justifier son choix d’utiliser les ventes directes des requérantes à Dell comme base de calcul du montant de l’amende. En effet, les raisons justifiant le choix d’utiliser les ventes directes de LDO facturées aux entités de Dell sont expliquées aux considérants 527 à 531 de la décision attaquée. La référence faite à ces arrêts au considérant 539 de la décision attaquée était seulement une réponse à des arguments spécifiques soulevés par les requérantes au cours de la procédure administrative, dans laquelle celles-ci ont fait valoir que le montant de l’amende qui leur a été infligée ne devait être calculé qu’en se référant aux recettes qu’elles ont conservées, en excluant les recettes reversées à Quanta.

249    Enfin, en ce qui concerne l’argument des requérantes selon lequel, dans une décision antérieure, la Commission aurait utilisé des méthodes de calcul visant à éviter tout risque de double comptabilisation des ventes réalisées par les participants à l’entente concernée, il suffit de rappeler que la Commission est en droit d’adresser, à chaque entreprise pour laquelle une infraction est établie, une décision constatant cette infraction et lui infligeant une sanction. Des arguments tirés d’une comparaison de la situation du destinataire d’une telle décision avec la situation d’autres entreprises (qu’elles soient ou non destinataires de la même décision) ne sauraient, en aucun cas, remettre en question la légalité de la décision en ce qu’elle constate et sanctionne une infraction effectivement établie (arrêt du 14 décembre 2006, Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, T‑259/02 à T‑264/02 et T‑271/02, EU:T:2006:396, point 139). Cela est d’autant plus le cas, en l’espèce, que la décision à laquelle les requérantes renvoient n’a aucun lien direct avec la présente affaire.

250    Dès lors, l’ensemble des arguments des requérantes relatifs à la première branche du second moyen doivent être rejetés.

 Sur la deuxième branche, tirée de l’absence de prise en compte de la participation bien plus réduite de Sony Optiarc à l’infraction

251    Les requérantes soutiennent que, dans la mesure où la décision attaquée a omis de prendre en considération le comportement substantiellement plus réduit de Sony par rapport à celui de certains autres destinataires, elle a manqué aux principes d’égalité de traitement et de proportionnalité, à l’article 23, paragraphe 3, du règlement no 1/2003 et aux lignes directrices sur le calcul des amendes. Premièrement, ce serait à tort que la Commission s’est abstenue d’appliquer un coefficient plus faible au titre de la gravité, ou une réduction plus importante au titre des circonstances atténuantes, pour tenir compte du fait que Sony Optiarc n’avait pas participé à l’infraction alléguée à l’égard de HP. Les requérantes soulignent que, bien que la décision ait appliqué à Sony une réduction de 3 % au titre des circonstances atténuantes pour tenir compte de sa non-participation à l’infraction alléguée concernant HP, cette réduction ne correspond, par équivalence, qu’à une réduction de tout au plus 0,48 % du coefficient de gravité et du montant supplémentaire, c’est-à-dire à une différenciation extrêmement limitée et insuffisante pour tenir compte de la non-participation à l’un des deux volets de l’infraction unique alléguée. Deuxièmement, ce serait à tort que la Commission s’est abstenue d’appliquer un coefficient de gravité plus faible ou une réduction plus importante au titre des circonstances atténuantes pour rendre compte du fait que Sony Optiarc avait participé de manière plus réduite à l’infraction alléguée à l’égard de Dell. En effet, un examen attentif des éléments de preuve révélerait que Sony n’a pas participé à tous les aspects constitutifs du comportement anticoncurrentiel.

252    La Commission conteste les arguments des requérantes.

253    En premier lieu, en ce qui concerne l’argument des requérantes selon lequel la Commission se serait abstenue d’appliquer un coefficient plus faible au titre de la gravité, ou une réduction plus importante au titre des circonstances atténuantes, pour tenir compte du fait que Sony Optiarc n’avait pas participé à l’infraction alléguée à l’égard de HP, force est de constater que, lors de la détermination de la valeur des ventes, la Commission a pris en considération uniquement les ventes des requérantes liées à Dell et a exclu celles liées à HP.

254    Or, lors de la fixation du montant des amendes, chaque entreprise est évaluée par rapport à l’infraction à laquelle elle a participé. En l’espèce, le coefficient de gravité de 16 % est lié à la gravité du comportement des requérantes en ce qui concerne uniquement les ventes de LDO à Dell et ne présente aucun lien avec l’infraction alléguée concernant HP.

255    En outre, la Commission a réduit le montant de l’amende infligée aux requérantes de 3 % pour tenir compte, selon les termes du considérant 561 de la décision attaquée, du fait qu’elles n’avaient pas connaissance de la partie de l’infraction unique et continue afférente à HP afin de refléter de manière appropriée et suffisante la nature moins grave de leur comportement.

256    À cet égard, l’allégation des requérantes selon laquelle la réduction de 3 % correspond à une réduction effective de 0,48 % du coefficient de gravité appliqué à la valeur des ventes et du montant additionnel est dénuée de fondement. En effet, le coefficient de gravité et le montant additionnel concernent la gravité du comportement des requérantes au regard des ventes à Dell et n’ont aucun rapport avec le fait que la Commission n’a pas établi la responsabilité des requérantes au sujet des contacts concernant HP.

257    Si les requérantes avaient été jugées responsables d’avoir participé à une entente en ce qui concerne les produits vendus à HP, la base de la valeur des ventes aurait été nettement supérieure et la somme finale de l’amende infligée aurait été plus élevée.

258    En second lieu, en ce qui concerne l’argument des requérantes selon lequel la Commission se serait abstenue d’appliquer un coefficient de gravité plus faible ou une réduction plus importante au titre des circonstances atténuantes pour rendre compte du fait que Sony avait participé de manière plus réduite à l’infraction alléguée à l’égard de Dell, les requérantes avancent, premièrement, qu’elles n’ont participé à aucun accord de manipulation de soumissions d’offres ou de fixation des prix, deuxièmement, qu’elles ont participé à un nombre bien moins important d’occurrences de comportement prétendument anticoncurrentiel que les autres destinataires de la décision attaquée, troisièmement, qu’elles n’ont pas agi dans la clandestinité et, quatrièmement, qu’elles étaient perçues par les autres participants comme un concurrent menant une politique de prix agressive.

259    Premièrement, il résulte de ce qui précède que les requérantes ont participé à des échanges d’informations sensibles portant notamment sur les prix ou fourchettes de prix, les volumes de marchandises et les classements de certains participants aux enchères. Or, selon le paragraphe 23 des lignes directrices sur le calcul des amendes, les accords horizontaux de fixation de prix comptent, de par leur nature même, parmi les restrictions de concurrence les plus graves et doivent être sévèrement sanctionnés.

260    Deuxièmement, il résulte également de ce qui précède que la fréquence de la participation des requérantes à ces échanges n’est pas moindre par rapport à celle des autres destinataires. En tout état de cause, le fait que d’autres destinataires aient pu avoir davantage de contacts bilatéraux que les requérantes n’atténue en rien la gravité de l’infraction commise par les requérantes.

261    Troisièmement, le fait que la Commission n’ait pas conclu que les requérantes avaient agi de manière clandestine est dénué de pertinence pour la gravité de l’infraction qui a été commise et ne peut servir à justifier une réduction du montant de l’amende.

262    Quatrièmement, il y a lieu de constater que, à aucun moment durant leur participation à l’entente, les requérantes n’ont cherché à se distancier ouvertement de l’entente. Ainsi qu’il a été rappelé au point 197 ci‑dessus, le fait que Sony Optiarc puisse avoir tenté d’exploiter l’entente à son propre avantage ne signifie pas qu’elle n’a pas participé à l’infraction unique et continue.

263    Dès lors, l’ensemble des arguments des requérantes relatifs à la seconde branche du second moyen doivent être rejetés.

264    Il y a donc lieu de rejeter le second moyen dans son ensemble.

265    Compte tenu de tout ce qui précède, l’ensemble des demandes présentées dans le cadre du présent recours doivent être rejetées.

 Sur les dépens

266    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il y a lieu de les condamner à supporter leurs propres dépens ainsi que ceux de la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Sony Optiarc, Inc. et Sony Optiarc America, Inc. supporteront leurs propres dépens ainsi que ceux de la Commission européenne.

Gratsias

Labucka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 juillet 2019.

Signatures


Table des matières


Antécédents du litige

Procédure administrative

Décision attaquée

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur le premier moyen, tiré de l’existence d’erreurs de fait et de droit en ce qui concerne le constat d’une infraction à l’article 101, paragraphe 1, TFUE

Sur la première branche, tirée de l’absence de preuve de la participation des requérantes à une restriction de la concurrence « par objet »

– Considérant 206 de la décision attaquée (contact no 62)

– Considérant 207 de la décision attaquée (contact no 63)

– Considérant 210 de la décision attaquée (contact no 65)

– Annexe I de la décision attaquée (contacts nos 66, 67, 70, 73, 76 et 78)

– Considérants 216 à 219 de la décision attaquée (contact no 88 figurant à l’annexe I)

– Considérant 220 de la décision attaquée (contact no 89 figurant à l’annexe I)

– Considérant 222 de la décision attaquée (contact no 95 figurant à l’annexe I)

– Considérant 229 de la décision attaquée (contact no 98 figurant à l’annexe I)

– Considérants 233 à 236 de la décision attaquée (contact no 100 figurant à l’annexe I)

– Considérants 237 à 241 de la décision attaquée (contact no 101 figurant dans l’annexe I)

– Annexe I de la décision attaquée (contact no 105)

– Considérants 257 à 259 de la décision attaquée (contact no 116 figurant à l’annexe I)

Sur la deuxième branche, tirée d’un défaut de preuves d’une infraction « unique et continue »

Sur la troisième branche, tirée d’une absence de prise en compte des éléments à décharge

Sur la quatrième branche, tirée d’une violation des droits de la défense, d’une absence de preuve et d’un défaut de motivation

– Sur la violation des droits de la défense

– Sur l’absence de preuve

– Sur le défaut de motivation

Sur le second moyen, présenté à titre subsidiaire et tiré de ce que la fixation du montant de l’amende est entachée d’erreurs de fait et de droit, ainsi que d’une insuffisance de motivation

Sur la première branche, tirée d’une « double comptabilisation » au détriment de Sony Optiarc

Sur la deuxième branche, tirée de l’absence de prise en compte de la participation bien plus réduite de Sony Optiarc à l’infraction

Sur les dépens


*      Langue de procédure : l’anglais.