Language of document : ECLI:EU:T:2021:613

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (dixième chambre)

22 septembre 2021 (*)

[Texte rectifié par ordonnance du 17 novembre 2021]

« Dessin ou modèle communautaire – Procédure de nullité – Dessin ou modèle communautaire enregistré représentant des appareils et dispositifs de signalisation – Dessin ou modèle communautaire antérieur – Motif de nullité – Absence de caractère individuel – Déclaration de nullité du dessin ou modèle antérieur – Absence d’incidence – Divulgation du dessin ou modèle antérieur – Utilisateur averti – Degré de liberté du créateur – Absence d’impression globale différente – Article 6 et article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 6/2002 »

Dans l’affaire T‑503/20,

T i D kontrolni sistemi EOOD, établie à Varna (Bulgarie), représentée par Me P. Priparzhenski, avocat,

partie requérante,

contre

[Tel que rectifié par ordonnance du 17 novembre 2021] Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme P. Georgieva et M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Sigmatron EOOD, établie à Sofia (Bulgarie), représentée par Me A. Kostov, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la troisième chambre de recours de l’EUIPO du 30 avril 2020 (affaire R 956/2019-3), relative à une procédure de nullité entre Sigmatron et T i D kontrolni sistemi,

LE TRIBUNAL (dixième chambre),

composé de M. A. Kornezov, président, Mme K. Kowalik‑Bańczyk (rapporteure) et M. G. Hesse, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 10 août 2020,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 18 décembre 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 11 décembre 2020,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 12 avril 2016, la requérante, T i D kontrolni sistemi EOOD, a présenté une demande d’enregistrement d’un dessin ou modèle communautaire à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) n° 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1).

2        Le dessin ou modèle dont l’enregistrement a été demandé et qui est contesté en l’espèce (ci-après le « dessin ou modèle contesté ») est représenté dans les vues suivantes :

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3        Les produits auxquels le dessin ou modèle contesté est destiné à être appliqué relèvent de la classe 10-06 au sens de l’arrangement de Locarno du 8 octobre 1968 instituant une classification internationale pour les dessins et modèles industriels, tel que modifié, et correspondent à la description suivante : « appareils et dispositifs de signalisation, dispositifs de signalisation avec lampes d’alarme, dispositifs de signalisation lumineuse » (ci-après les « dispositifs de signalisation »).

4        Le dessin ou modèle contesté a été enregistré le 12 avril 2016 sous le numéro 3 065 887-0001 et publié au Bulletin des dessins ou modèles communautaires n° 74/2016, du 21 avril 2016.

5        Le 8 mars 2018, l’intervenante, Sigmatron EOOD, a introduit, en vertu de l’article 52 du règlement no 6/2002, une demande en nullité du dessin ou modèle contesté.

6        Les motifs invoqués au soutien de la demande en nullité étaient ceux visés à l’article 25, paragraphe 1, sous b) et d), du règlement n° 6/2002. En particulier, l’intervenante a fait valoir que le dessin ou modèle contesté était dépourvu de nouveauté et de caractère individuel au sens des articles 5 et 6 de ce règlement.

7        Pour étayer sa demande en nullité, l’intervenante s’est fondée sur un dessin ou modèle communautaire antérieur enregistré le 31 juillet 2015 sous le numéro 2 747 527-0001 (ci-après le « dessin ou modèle antérieur ») et publié au Bulletin des dessins ou modèles communautaires n° 157/2015, du 21 août 2015, lequel était représenté comme suit :

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8        Parallèlement à l’examen de la demande en nullité du dessin ou modèle contesté, la troisième chambre de recours de l’EUIPO a, par décision du 26 juin 2018 (affaire R 184/2017-3), confirmé une décision du 2 décembre 2016 de la division d’annulation déclarant la nullité du dessin ou modèle antérieur pour défaut de caractère individuel (ci-après la « décision du 26 juin 2018 »).

9        Par décision du 19 mars 2019, la division d’annulation a fait droit à la demande en nullité du dessin ou modèle contesté au motif qu’il était dépourvu de caractère individuel au sens de l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002.

10      Le 1er mai 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 55 à 60 du règlement n° 6/2002, contre la décision de la division d’annulation.

11      Par décision du 30 avril 2020 (affaire R 956/2019-3, ci-après la « décision attaquée »), la troisième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. En résumé, la chambre de recours a considéré, en premier lieu, que le dessin ou modèle antérieur avait fait l’objet d’une divulgation au public au sens de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 6/2002 dans la mesure où il avait été publié suite à son enregistrement. En second lieu, elle a estimé que, faute de différences suffisantes entre les impressions globales produites par les dessins ou modèles en cause, le dessin ou modèle contesté était dépourvu de caractère individuel au sens de l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’intervenante aux dépens, y compris ceux exposés par elle devant l’EUIPO.

13      En outre, la requérante demande au Tribunal d’ordonner à l’EUIPO de produire tous les éléments de preuve présentés au cours de la procédure devant la division d’annulation puis devant la chambre de recours.

14      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

15      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        déclarer nul le dessin ou modèle contesté ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

16      À titre liminaire, s’agissant de la demande de la requérante tendant à ce que le Tribunal ordonne à l’EUIPO de produire tous les éléments de preuve présentés au cours de la procédure devant la division d’annulation puis devant la chambre de recours, il convient de relever que, conformément à l’article 178, paragraphe 5, du règlement de procédure du Tribunal, l’EUIPO a transmis au Tribunal le dossier de la procédure devant la chambre de recours, lequel inclut les éléments de preuve produits tant devant la division d’annulation que devant la chambre de recours. Dès lors, la demande de la requérante est devenue sans objet et, par suite, il n’y a plus lieu d’y statuer.

17      À l’appui de son recours, la requérante invoque, en substance, deux moyens tirés, le premier, de la violation de l’article 28, paragraphe 1, sous b), ii) et v), du règlement (CE) n° 2245/2002 de la Commission, du 21 octobre 2002, portant modalités d’application du règlement n° 6/2002 (JO 2002, L 341, p. 28) et, le second, de la violation de l’article 6, paragraphe 1, sous b), et de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 28, paragraphe 1, sous b), ii) et v), du règlement n° 2245/2002

18      Par son premier moyen, la requérante soutient que la demande en nullité était irrecevable. Elle explique que, suite à la décision du 26 juin 2018 déclarant la nullité du dessin ou modèle antérieur, ce dernier a disparu, avec effet rétroactif, de l’ordre juridique. Dès lors, à la date de la demande d’enregistrement du dessin ou modèle contesté, l’intervenante n’aurait été titulaire d’aucun dessin ou modèle antérieur protégé et divulgué au public et, partant, susceptible d’être invoqué afin de remettre en cause la nouveauté ou le caractère individuel du dessin ou modèle contesté. Par suite, faute d’avoir comporté, d’une part, des éléments démontrant l’habilitation de l’intervenante à invoquer un dessin ou modèle antérieur comme motif de nullité et, d’autre part, des documents prouvant l’existence d’un dessin ou modèle antérieur, la demande en nullité n’aurait pas rempli les conditions prévues à l’article 28, paragraphe 1, sous b), ii) et v), du règlement n° 2245/2002, de sorte que la chambre de recours aurait dû la rejeter comme irrecevable.

19      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

20      À titre liminaire, il importe de distinguer entre deux cas de nullité d’un dessin ou modèle communautaire enregistré et de préciser lequel de ces deux cas est pertinent en l’espèce.

21      Premièrement, en vertu de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002, un dessin ou modèle communautaire peut être déclaré nul s’il ne remplit pas les conditions fixées aux articles 4 à 9 du même règlement.

22      Lorsque la demande en nullité est fondée sur le fait que le dessin ou modèle communautaire enregistré ne remplit pas les conditions énoncées aux articles 5 et 6 du règlement n° 6/2002, l’article 28, paragraphe 1, sous b), v), du règlement n° 2245/2002 prévoit que cette demande en nullité doit contenir l’indication et la reproduction des dessins ou modèles antérieurs susceptibles de faire obstacle à la nouveauté ou au caractère individuel du dessin ou modèle communautaire enregistré, ainsi que les documents prouvant l’existence de ces dessins ou modèles antérieurs.

23      Deuxièmement, en vertu de l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 6/2002, un dessin ou modèle communautaire peut être déclaré nul s’il est en conflit avec un dessin ou modèle antérieur qui a fait l’objet d’une divulgation au public après la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou après la date de priorité du dessin ou modèle communautaire, si une priorité est revendiquée, et qui est protégé depuis une date antérieure par l’enregistrement d’un dessin ou modèle communautaire ou par une demande d’enregistrement d’un tel dessin ou modèle ou par l’enregistrement d’un dessin ou modèle dans un État membre ou par une demande d’obtention d’un droit afférent.

24      Lorsque la demande en nullité est introduite sur le fondement de l’article 25, paragraphe 1, point d), du règlement n° 6/2002, l’article 28, paragraphe 1, sous b), ii), du règlement n° 2245/2002 prévoit que cette demande en nullité doit contenir la représentation et des précisions sur le dessin ou modèle antérieur sur lequel est fondée ladite demande ainsi que des éléments démontrant que le demandeur est habilité à invoquer le dessin ou modèle antérieur comme motif de nullité en vertu de l’article 25, paragraphe 3, du règlement n° 6/2002.

25      En l’espèce, il ressort des points 17 à 57 de la décision attaquée que celle-ci est fondée exclusivement sur un cas de nullité relevant de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002, à savoir l’absence de caractère individuel du dessin ou modèle contesté au sens de l’article 6, paragraphe 1, sous b), du même règlement. Ainsi, la chambre de recours a choisi de se placer sur le terrain du premier cas de nullité mentionné au point 21 ci-dessus, de sorte que la recevabilité de la demande en nullité était régie par les dispositions de l’article 28, paragraphe 1, sous b), v), du règlement n° 2245/2002, rappelées au point 22 ci-dessus.

26      En conséquence, la chambre de recours devait s’assurer que la demande en nullité contenait les éléments et documents mentionnés à l’article 28, paragraphe 1, sous b), v), du règlement n° 2245/2002. En revanche, eu égard au motif de nullité fondant la décision attaquée, la chambre de recours n’était pas tenue de vérifier que la demande en nullité contenait, en sus, les éléments mentionnés à l’article 28, paragraphe 1, sous b), ii), du règlement n° 2245/2002, lesquels sont exigés uniquement lorsque la demande en nullité est fondée sur l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 6/2002, relatif au second cas de nullité mentionné aux points 23 et 24 ci-dessus.

27      Il s’ensuit que, pour être recevable, la demande en nullité devait, conformément à l’article 28, paragraphe 1, sous b), v), du règlement n° 2245/2002, contenir, d’une part, l’indication et la reproduction du dessin ou modèle antérieur et, d’autre part, les documents prouvant l’existence de ce dessin ou modèle antérieur.

28      À cet égard, premièrement, il est constant que la demande en nullité contenait l’indication et la reproduction du dessin ou modèle antérieur.

29      Deuxièmement, contrairement à ce qu’allègue la requérante, l’existence d’un dessin ou modèle antérieur au sens de l’article 28, paragraphe 1, sous b), v), du règlement n° 2245/2002 n’est pas conditionnée par l’enregistrement du dessin ou modèle invoqué par le demandeur en nullité.

30      En effet, il convient de constater que ni l’article 28, paragraphe 1, sous b), v), du règlement n° 2245/2002 ni les articles 5 et 6 du règlement n° 6/2002 auxquels ledit article renvoie ne font référence à l’enregistrement du dessin ou modèle antérieur. Au contraire, l’article 6 du règlement n° 6/2002 se réfère à « tout dessin ou modèle qui a été divulgué au public » sans aucunement exiger que ce dessin ou modèle soit « enregistré ».

31      En outre, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 3, sous a), du règlement n° 6/2002, un dessin ou modèle est défini comme « l’apparence d’un produit ou d’une partie de produit que lui confèrent, en particulier, les caractéristiques des lignes, des contours, des couleurs, de la forme, de la texture et/ou des matériaux du produit lui-même et/ou de son ornementation ». Ainsi, ce n’est que l’apparence d’un produit en tant que telle qui est le critère déterminant d’un dessin ou modèle au sens du règlement n° 6/2002 et non la forme juridique sous laquelle cette apparence est protégée. Il s’ensuit que le fait que le dessin ou modèle antérieur, auparavant enregistré, ait été déclaré nul par la décision du 26 juin 2018 est sans pertinence en l’espèce, pour autant qu’il remplisse les caractéristiques d’un dessin ou modèle telles qu’établies à l’article 3, sous a), du règlement n° 6/2002 [voir, par analogie, arrêt du 21 mai 2015, Senz Technologies/OHMI – Impliva (Parapluies), T‑22/13 et T‑23/13, EU:T:2015:310, point 24].

32      Or, en l’espèce, la requérante ne conteste aucunement que le dessin ou modèle antérieur satisfait à la définition d’un dessin ou modèle énoncée à l’article 3, sous a), du règlement n° 6/2002. À cet égard, il y a lieu de constater que le dessin ou modèle antérieur confère aux dispositifs de signalisation les caractéristiques de leurs lignes, de leurs contours, de leurs angles et de leur forme, de sorte qu’il correspond à l’apparence de ces dispositifs. Par ailleurs, la requérante ne conteste pas davantage que la demande en nullité contenait des documents relatifs au dessin ou modèle antérieur.

33      Dans ces conditions, l’intervenante justifiait, dans sa demande en nullité, de l’existence d’un dessin ou modèle antérieur susceptible de faire obstacle à la nouveauté ou au caractère individuel du dessin ou modèle contesté.

34      Il s’ensuit que la demande en nullité contenait l’ensemble des éléments et documents mentionnés à l’article 28, paragraphe 1, sous b), v), du règlement n° 2245/2002. Par conséquent, la chambre de recours, qui a fait droit à cette demande, n’a pas commis d’erreur en considérant, implicitement mais nécessairement, que ladite demande était recevable.

35      Enfin, s’agissant de l’argument de la requérante tiré de l’absence de divulgation d’un dessin ou modèle antérieur, il y a lieu de rappeler que l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 6/2002 mentionne expressément la publication comme l’un des modes de divulgation au public d’un dessin ou modèle, de sorte que cette publication peut constituer la preuve de l’existence et de l’antériorité de la divulgation au public du dessin ou modèle contesté [voir, en ce sens, arrêt du 15 octobre 2015, Promarc Technics/OHMI – PIS (Pièce de porte), T‑251/14, non publié, EU:T:2015:780, point 22].

36      Or, en l’espèce, il est constant que, comme cela a été relevé au point 7 ci-dessus, le dessin ou modèle antérieur a été publié le 21 août 2015 à la suite de son enregistrement. En outre, la requérante ne conteste pas que cette publication pouvait raisonnablement être connue des milieux spécialisés du secteur concerné. Dès lors, le dessin ou modèle antérieur doit être réputé avoir été divulgué au public conformément à l’article 7 du règlement n° 6/2002, et ce à une date antérieure à la date de dépôt de la demande d’enregistrement du dessin ou modèle contesté, à savoir le 12 avril 2016, conformément à l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002.

37      Dans ces conditions, l’argument de la requérante tiré de l’absence de divulgation d’un dessin ou modèle antérieur ne saurait être accueilli.

38      Partant, le premier moyen doit être écarté.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 6, paragraphe 1, sous b),et de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002

39      Par son second moyen, la requérante soutient, en substance, que, en considérant que le dessin ou modèle contesté était dépourvu de caractère individuel, la chambre de recours a violé l’article 6, paragraphe 1, sous b), et l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002.

40      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

41      Ainsi qu’il a été rappelé au point 21 ci-dessus, il résulte de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002 qu’un dessin ou modèle communautaire peut être déclaré nul s’il ne remplit pas les conditions fixées aux articles 4 à 9 du même règlement.

42      En vertu de l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement no 6/2002, un dessin ou modèle communautaire enregistré est considéré comme présentant un caractère individuel si l’impression globale qu’il produit sur l’utilisateur averti diffère de celle que produit sur un tel utilisateur tout dessin ou modèle qui a été divulgué au public avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou, si une priorité est revendiquée, avant la date de priorité.

43      L’article 6, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 précise en outre que, pour apprécier ce caractère individuel, il doit être tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle.

44      L’appréciation du caractère individuel d’un dessin ou modèle communautaire procède, en substance, d’un examen en quatre étapes. Cet examen consiste à déterminer, premièrement, le secteur des produits auxquels le dessin ou modèle est destiné à être incorporé ou auxquels il est destiné à être appliqué, deuxièmement, l’utilisateur averti desdits produits selon leur finalité et, en référence à cet utilisateur averti, le degré de connaissance de l’art antérieur ainsi que le niveau d’attention aux similitudes et aux différences dans la comparaison des dessins ou modèles, troisièmement, le degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle, dont l’influence sur le caractère individuel est en proportion inverse, et, quatrièmement, en tenant compte de celui-ci, le résultat de la comparaison, directe si possible, des impressions globales produites sur l’utilisateur averti par le dessin ou modèle contesté et par tout dessin ou modèle antérieur divulgué au public, pris individuellement [voir arrêt du 13 juin 2019, Visi/one/EUIPO – EasyFix (Porte-affichette pour véhicules), T‑74/18, EU:T:2019:417, point 66 et jurisprudence citée].

45      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si le dessin ou modèle contesté présente un caractère individuel.

 Sur le secteur concerné et la nature des produits en cause

46      Au point 26 de la décision attaquée, la chambre de recours a défini le secteur concerné comme étant celui des installations industrielles et énergétiques comprenant des sous-stations électriques à haute ou moyenne tension. Elle a également constaté que les produits en cause étaient des dispositifs de signalisation lumineuse susceptibles d’alerter les opérateurs de service en cas d’anomalies dans le fonctionnement normal de ces installations.

47      La requérante ne conteste pas cette définition du secteur concerné et de la nature des produits en cause.

 Sur l’utilisateur averti

48      En ce qui concerne l’interprétation de la notion d’utilisateur averti, il y a lieu de considérer que la qualité d’« utilisateur » implique que la personne concernée utilise le produit dans lequel est incorporé le dessin ou modèle en conformité avec la finalité à laquelle ce même produit est destiné. Le qualificatif « averti » suggère en outre que, sans être un concepteur ou un expert technique, l’utilisateur connaît les différents dessins ou modèles existant dans le secteur concerné, dispose d’un certain degré de connaissances quant aux éléments que ces dessins ou modèles comportent normalement et, du fait de son intérêt pour les produits concernés, fait preuve d’un niveau d’attention relativement élevé lorsqu’il les utilise [arrêt du 22 juin 2010, Shenzhen Taiden/OHMI – Bosch Security Systems (Équipement de communication), T-153/08, EU:T:2010:248, points 46 et 47 ; voir également arrêt du 20 octobre 2011, PepsiCo/Grupo Promer Mon Graphic, C-281/10 P, EU:C:2011:679, point 59].

49      La notion d’utilisateur averti doit donc être comprise comme une notion intermédiaire entre celle de consommateur moyen, applicable en matière de marques, auquel il n’est demandé aucune connaissance spécifique et qui en général n’effectue pas de rapprochement direct entre les marques en conflit, et celle d’homme du métier, applicable dans le domaine des brevets, expert doté de compétences techniques approfondies et faisant preuve d’un niveau d’attention très élevé. Ainsi, la notion d’utilisateur averti peut s’entendre comme désignant un utilisateur doté non d’une attention moyenne, mais d’une vigilance particulière, que ce soit en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré [voir, en ce sens, arrêts du 20 octobre 2011, PepsiCo/Grupo Promer Mon Graphic, C‑281/10 P, EU:C:2011:679, point 53, et du 7 novembre 2013, Budziewska/OHMI – Puma (Félin bondissant), T‑666/11, non publié, EU:T:2013:584, point 32].

50      En l’espèce, au point 46 de la décision attaquée, la chambre de recours a défini l’utilisateur averti comme une personne qui connaît les dispositifs de signalisation destinés aux salles d’opération et leurs caractéristiques, à savoir le fait qu’ils présentent un panneau avant doté de commutateurs et de signaux d’alarme et un panneau arrière muni de connecteurs.

51      Par ailleurs, aux points 47 à 51 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que l’attention de l’utilisateur averti serait attirée par le panneau avant, seule partie visible lors de l’utilisation normale des dispositifs de signalisation, à l’exclusion de la partie interne, du panneau arrière et des panneaux latéraux de ces dispositifs. En conséquence, elle a estimé que la comparaison des impressions globales produites par les dessins ou modèles en cause devait être effectuée au regard de la représentation frontale des dispositifs de signalisation.

52      La requérante reproche toutefois à la chambre de recours de ne pas s’être prononcée sur la question de savoir si l’utilisateur averti était, en l’espèce, un « utilisateur moyen », dépourvu de connaissances spécifiques, ou un spécialiste en électronique, c’est-à-dire un expert doté de compétences techniques et faisant preuve d’un niveau d’attention « très élevé ». Elle considère que l’utilisateur averti des dispositifs de signalisation est un spécialiste en électronique et qu’il fait preuve d’un niveau d’attention très élevé. Elle en déduit que l’attention de cet utilisateur se portera davantage sur les caractéristiques techniques du panneau arrière, muni de connecteurs, que sur l’apparence globale des dispositifs de signalisation. Par conséquent, elle considère c’est à tort que la chambre de recours a estimé que l’attention de l’utilisateur averti serait attirée par le panneau avant.

53      À cet égard, il y a lieu de relever, premièrement, qu’il résulte de la jurisprudence citée au point 49 ci-dessus que l’utilisateur averti ne saurait être assimilé ni à un consommateur moyen ni à un expert. Il s’ensuit que la requérante ne saurait utilement reprocher à la chambre de recours de ne pas avoir déterminé si l’utilisateur averti était, en l’espèce, un « utilisateur moyen » ou un spécialiste expert en électronique. Pour les mêmes raisons, elle n’est pas fondée à soutenir que l’utilisateur averti des dispositifs de signalisation est un spécialiste ou un expert en électronique.

54      Deuxièmement, il résulte également de la jurisprudence citée aux points 48 et 49 ci-dessus que l’utilisateur averti est doté d’une vigilance particulière, que ce soit en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré, de sorte que le niveau d’attention de cet utilisateur est déjà, par nature, relativement élevé [voir également arrêt du 29 avril 2020, Bergslagernas Järnvaru/EUIPO – Scheppach Fabrikation von Holzbearbeitungsmaschinen (Outil pour fendre le bois), T‑73/19, non publié, EU:T:2020:157, point 75]. Pour autant, dans la mesure où l’utilisateur averti est, en l’espèce, un opérateur faisant face, durant son service, aux dispositifs de signalisation installés dans les tableaux de contrôle de sous-stations électriques à haute tension, il ne fait pas nécessairement preuve d’un niveau d’attention « très élevé », à l’image d’un expert.

55      Troisièmement, il y a lieu de rappeler que, dans le cadre du système prévu par le règlement n° 6/2002, l’apparence constitue l’élément déterminant d’un dessin ou modèle [arrêt du 21 septembre 2017, Easy Sanitary Solutions et EUIPO/Group Nivelles, C‑361/15 P et C‑405/15 P, EU:C:2017:720, point 62] et que le droit des dessins ou modèles vise à protéger l’apparence d’un produit et non sa conception ou ses caractéristiques [voir, en ce sens, arrêt du 21 novembre 2013, El Hogar Perfecto del Siglo XXI/OHMI – Wenf International Advisers (Tire-bouchon), T‑337/12, EU:T:2013:601, point 52]. Il s’ensuit que le caractère individuel d’un dessin ou modèle doit être apprécié au regard de l’apparence du produit représenté par ce dessin ou modèle et non au regard des caractéristiques techniques du produit en tant que telles. Dès lors, la requérante n’est pas fondée à soutenir que l’attention de l’utilisateur averti se porterait davantage sur les caractéristiques techniques des dispositifs de signalisation que sur l’apparence de ces dispositifs.

56      Quatrièmement, il y a lieu de rappeler que l’impression globale produite par un dessin ou modèle évoquée à l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement no 6/2002 concerne une impression globale visuelle produite par les caractéristiques visibles dudit dessin ou modèle [arrêt du 13 juin 2017, Ball Beverage Packaging Europe/EUIPO – Crown Hellas Can (Canettes), T‑9/15, EU:T:2017:386, point 76]. Il s’ensuit que les caractéristiques non visibles du produit, qui ne se rapportent pas à son apparence, ne peuvent être prises en compte pour déterminer si le dessin ou modèle contesté peut faire l’objet d’une protection [arrêt du 9 septembre 2014, Biscuits Poult/OHMI – Banketbakkerij Merba (Biscuit), T‑494/12, EU:T:2014:757, point 29]. De même, les parties du produit représenté par un dessin ou modèle qui sont en dehors du champ de vision immédiat de l’utilisateur, telles que les éléments se trouvant sur les parties latérales ou arrière du produit, n’ont en principe pas d’impact majeur sur la perception de l’utilisateur averti [voir, en ce sens, arrêts du 22 juin 2010, Équipement de communication, T-153/08, EU:T:2010:248, point 65, et du 6 octobre 2011, Industrias Francisco Ivars/OHMI – Motive (Réducteur mécanique de vitesse), T‑246/10, non publié, EU:T:2011:578, point 26].

57      Or, en l’espèce, la requérante ne conteste pas que ni la partie interne des dispositifs de signalisation, ni leur panneau arrière, ni leurs panneaux latéraux ne sont visibles par l’utilisateur averti lorsque celui-ci utilise ces dispositifs en conformité avec leur finalité. En effet, ainsi qu’il a été relevé au point 54 ci-dessus, l’utilisateur averti fait face aux dispositifs de signalisation installés dans les tableaux de contrôle de sous-stations électriques à haute tension. Ainsi, l’utilisateur averti d’un dispositif de signalisation ne peut voir que le panneau avant puisque, d’une part, la partie interne de ce dispositif est recouverte par ce panneau et, d’autre part, le panneau arrière et les panneaux latéraux sont dissimulés du fait de l’encastrement dudit dispositif dans des tableaux de contrôle.

58      Il s’ensuit que la chambre de recours a pu, à bon droit, considérer que seul le panneau avant attirerait l’attention de l’utilisateur averti lors de l’utilisation des dispositifs de signalisation et que, par suite, la comparaison des impressions globales produites par les dessins ou modèles en cause devait être effectuée au regard de la représentation frontale des dispositifs de signalisation.

59      Partant, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en ce qui concerne la définition de l’utilisateur averti et sa perception des dessins ou modèles en cause.

 Sur le degré de liberté du créateur

60      Selon la jurisprudence, le degré de liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle est défini à partir, notamment, des contraintes liées aux caractéristiques imposées par la fonction technique du produit ou d’un élément du produit, ou encore des prescriptions légales applicables au produit. Ces contraintes conduisent à une normalisation de certaines caractéristiques, devenant alors communes à plusieurs dessins ou modèles appliqués au produit concerné [arrêt du 18 mars 2010, Grupo Promer Mon Graphic/OHMI – PepsiCo (Représentation d’un support promotionnel circulaire), T‑9/07, EU:T:2010:96, point 67].

61      La liberté du créateur est, dans ce contexte, un facteur qui permet plutôt de nuancer l’appréciation du caractère individuel du dessin ou modèle contesté, et non un facteur autonome déterminant la distance requise entre deux dessins ou modèles pour que l’un d’eux puisse se prévaloir d’un caractère individuel. Autrement dit, le facteur relatif au degré de liberté du créateur peut renforcer ou, a contrario, nuancer la conclusion quant à l’impression globale produite sur l’utilisateur averti par chaque dessin ou modèle en cause [voir arrêt du 6 juin 2019, Porsche/EUIPO – Autec (Véhicules motorisés), T‑209/18, EU:T:2019:377, point 48 et jurisprudence citée].

62      Partant, plus la liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle est grande, moins les différences mineures entre les dessins ou modèles comparés suffisent à produire une impression globale différente sur l’utilisateur averti. À l’inverse, plus la liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle est restreinte, plus les différences mineures entre les dessins ou modèles comparés suffisent à produire une impression globale différente sur l’utilisateur averti. Ainsi, un degré élevé de liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle renforce la conclusion selon laquelle les dessins ou modèles comparés, ne présentant pas de différences significatives, produisent une même impression globale sur l’utilisateur averti [voir arrêt du 10 septembre 2015, H&M Hennes & Mauritz/OHMI – Yves Saint Laurent (Sacs à main), T-525/13, EU:T:2015:617, point 29 et jurisprudence citée].

63      Par ailleurs, le degré de liberté du créateur est considéré comme étant élevé ou très élevé lorsqu’il est possible d’imaginer diverses configurations pour un même produit, lorsque le produit peut être réalisé dans une très grande variété de formes, de couleurs ou de matériaux ou encore lorsque les contraintes de nature fonctionnelle concernant la présence de certains éléments essentiels ne sont pas susceptibles d’influer, dans une mesure significative, sur la forme et l’aspect général du produit, celui-ci pouvant revêtir diverses formes et être aménagé de diverses manières [voir arrêt du 13 juin 2019, Porte-affichette pour véhicules, T‑74/18, EU:T:2019:417, point 79 et jurisprudence citée].

64      En l’espèce, au point 40 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que le degré de liberté du créateur était élevé dans la mesure où les dispositifs de signalisation pouvaient être conçus de diverses manières et où leur apparence n’était soumise à aucune limitation technique autre que leur composition, à l’avant, d’un panneau doté de commutateurs et d’un dispositif avertisseur et, à l’arrière, d’un panneau muni de connecteurs. La chambre de recours a relevé que les dispositifs de signalisation pouvaient avoir une apparence différente, notamment en ce qui concerne leur forme, leur taille, l’agencement de leurs éléments et l’ornementation utilisée.

65      La requérante soutient toutefois que le degré de liberté du créateur est significativement limité. En effet, les dimensions des dispositifs de signalisation seraient normalisées et le boîtier désigné par le dessin ou modèle contesté – d’une taille de 96 mm sur 96 mm avec une ouverture de 90 mm sur 90 mm – aurait une dimension standard communément acceptée. De plus, l’apparence des panneaux avant et arrière, et notamment la forme des champs lumineux, serait déterminée par des exigences légales et des contraintes spécifiques découlant de la fonction technique des dispositifs de signalisation.

66      Pour démontrer l’existence de limitations à la liberté du créateur, la requérante se fonde sur différents documents qu’elle a produits devant l’EUIPO puis devant le Tribunal. Dans ces conditions, il y a lieu d’examiner si, au vu des explications de la requérante et des éléments produits, l’existence de telles limitations à la liberté du créateur est établie.

67      En premier lieu, la requérante se prévaut de la norme internationale IEC 61554:1999 intitulée « Appareils montés en tableaux - Instruments de mesure électriques - Dimensions pour le montage en tableaux ». Elle soutient que cette norme impose des dimensions standard contraignantes en ce qui concerne le boîtier extérieur des dispositifs de signalisations en cause.

68      À cet égard, il y a lieu de relever, d’abord, que, selon le document apporté au dossier par la requérante, la norme internationale IEC 61554:1999 n’était en principe valide que jusqu’en 2010. Ensuite, cette norme précise qu’elle prend la forme d’une recommandation internationale. Enfin, à supposer même qu’elle soit généralement suivie et s’impose en pratique aux créateurs, ladite norme permet, en tout état de cause, d’utiliser des dimensions variées pour le boîtier extérieur des dispositifs de signalisation, ainsi que l’a relevé la chambre de recours au point 33 de la décision attaquée.

69      En deuxième lieu, la requérante invoque un extrait du cahier des charges d’une procédure d’appel d’offres lancée par la société bulgare Electricity System Operator EAD. Elle fait valoir que ce cahier des charges impose un gabarit inférieur ou égal à 100 mm sur 100 mm pour les dispositifs de signalisation ainsi que la division du panneau avant en six champs indicateurs, ce qui traduirait les exigences techniques auxquelles les négociants de ces dispositifs devraient se conformer en Bulgarie.

70      À cet égard, il convient de constater que, comme l’EUIPO l’explique devant le Tribunal, ce cahier des charges se borne à prévoir une surface minimale pour chaque champ lumineux ainsi que les dimensions maximales du boîtier des dispositifs de signalisation (hauteur inférieure ou égale à 100 mm ; largeur inférieure ou égale à 100 mm ; profondeur inférieure ou égale à 150 mm). Par suite, c’est à juste titre que la chambre de recours a indiqué, au point 36 de la décision attaquée, que ledit cahier des charges n’établissait que les exigences techniques minimales imposées par la société Electricity System Operator, sans imposer une forme particulière du boîtier. De plus, il y a lieu d’ajouter que ce cahier des charges ne prévoit pas davantage une division du panneau avant en six champs indicateurs.

71      En troisième lieu, la requérante produit un extrait du catalogue de produits de la société allemande Bopla Gehause Systeme GmbH. Il ressortirait de ce catalogue que cette société commercialiserait depuis plus de vingt ans des boîtiers dont l’apparence serait identique au dessin ou modèle contesté, ce qui témoignerait de la normalisation des caractéristiques des dispositifs de signalisation.

72      À cet égard, il convient d’observer que, comme la chambre de recours l’a relevé aux points 34 et 35 de la décision attaquée, cet extrait de catalogue, au demeurant non daté, présente différents boîtiers aux formes diverses, sans qu’aucun d’entre eux ne comporte un panneau avant divisé en six sections à l’image du panneau avant des boîtiers représentés par les dessins ou modèles en cause. Ainsi, à titre d’exemples, l’EUIPO se réfère pertinemment aux produits suivants :

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73      En quatrième lieu, la requérante fait état de la norme européenne EN 60073:2002 intitulée « Principes fondamentaux et de sécurité pour les interfaces homme-machines, le marquage et l’identification. Principes de codage pour les indicateurs et les organes de commande », transposant la norme internationale IEC 60073:2002 et elle-même transposée en tant que norme bulgare BDS EN 60073:2002. La requérante explique que ces normes introduisent des exigences relatives à la catégorie et à la forme (rectangulaire ou carrée) des champs lumineux du panneau avant des dispositifs de signalisation ainsi que des exigences techniques relatives au raccordement des indicateurs lumineux.

74      À cet égard, il y a lieu de constater que, comme la chambre de recours l’a relevé au point 37 de la décision attaquée, la norme internationale EN 60073:2002 revêt également la forme d’une recommandation et n’était en principe valide que jusqu’en 2007.

75      De plus, à supposer même que la norme européenne EN 60073:2002 soit généralement suivie et s’impose en pratique aux créateurs, il convient d’observer que, s’il est vrai que cette norme établit des principes généraux quant à la signification de certains indicateurs visuels en fonction de leur forme et de leur couleur, elle n’a toutefois pas pour effet de limiter significativement la liberté du créateur dans les circonstances de l’espèce. En effet, d’une part, ainsi que la chambre de recours l’a en substance relevé au point 38 de la décision attaquée, les dessins ou modèles en cause, tels qu’ils sont présentés, déterminent la forme et la couleur (blanche ou gris clair) des champs indicateurs lorsque ces derniers sont éteints mais ne préjugent pas de la couleur de ces champs indicateurs lorsque ceux-ci sont activés et émettent un signal lumineux. D’autre part, comme l’EUIPO l’explique devant le Tribunal, la norme européenne EN 60073:2002 n’introduit pas de préconisations concrètes quant à la taille et à l’agencement des indicateurs lumineux et, en particulier, n’impose pas que ces indicateurs lumineux aient la même taille ou soient répartis en six sections disposées sur le panneau avant et entourées d’un cadre fin. Il s’ensuit que ladite norme permet l’utilisation de divers indicateurs lumineux, sans égard à la forme ou à l’agencement du panneau avant des dispositifs de signalisation.

76      En cinquième lieu, la requérante fait état d’exigences techniques spécifiques. D’une part, s’agissant du panneau avant, elle explique que la fonction d’avertissement et d’alerte des dispositifs de signalisation, notamment en cas de survenance d’incidents, impose une lecture rapide du signal lumineux par l’utilisateur puis une réaction rapide de sa part au moyen d’un bouton d’alarme visible et facile d’accès. D’autre part, s’agissant du panneau arrière, elle indique que ce dernier doit comporter des connecteurs permettant de raccorder le dispositif de signalisation à d’autres dispositifs.

77      À cet égard, il y a lieu d’observer d’emblée que, compte tenu de la conclusion figurant au point 58 ci-dessus, seule l’apparence des panneaux avant des dispositifs de signalisation est pertinente pour apprécier le degré de liberté du créateur. Or, comme le relève l’EUIPO, la requérante ne démontre pas que la nécessité pour l’utilisateur averti de lire rapidement le signal lumineux émis par les dispositifs de signalisation en cas de survenance d’incidents et de réagir rapidement à ce signal déterminerait la forme, la couleur, l’agencement ou l’ornementation des panneaux avant de ces dispositifs. Au contraire, les différents exemples de dessins ou modèles qui figurent dans le dossier attestent de la possibilité de variations en ce qui concerne la forme, la couleur, l’agencement et l’ornementation des éléments composant les dispositifs de signalisation.

78      Dans ces conditions, eu égard à la jurisprudence rappelée au point 63 ci-dessus, c’est à juste titre que la chambre de recours a indiqué, au point 40 de la décision attaquée, que les caractéristiques des dispositifs de signalisation n’étaient pas uniquement imposées par leur fonction technique et que, en conséquence, le degré de liberté du créateur était élevé.

 Sur la comparaison des impressions globales produites par les dessins ou modèles en cause

79      Selon une jurisprudence constante, le caractère individuel d’un dessin ou modèle résulte d’une impression globale de différence, ou d’absence de « déjà vu », du point de vue de l’utilisateur averti, par rapport à toute antériorité au sein du patrimoine des dessins ou modèles, sans tenir compte de différences demeurant insuffisamment marquées pour affecter ladite impression globale, bien qu’excédant des détails insignifiants, mais en ayant égard à des différences suffisamment marquées pour créer des impressions d’ensemble dissemblables [voir arrêt du 16 février 2017, Antrax It/EUIPO – Vasco Group (Thermosiphons pour radiateurs), T-828/14 et T-829/14, EU:T:2017:87, point 53 et jurisprudence citée].

80      En l’espèce, la chambre de recours a constaté, aux points 51 à 56 de la décision attaquée, que les panneaux avant des dessins ou modèles en cause présentaient uniquement certaines différences mineures ou peu frappantes et que, dès lors, les dessins ou modèles en cause ne différaient pas significativement dans leur partie la plus visible. Elle a donc conclu, au point 57 de la décision attaquée, que le dessin ou modèle contesté ne présentait pas de caractère individuel.

81      La requérante fait cependant valoir que les dessins ou modèles en cause présentent certaines différences en ce qui concerne leurs panneaux avant, leurs panneaux latéraux et leurs panneaux arrière et que, par suite, ils produisent des impressions globales différentes sur l’utilisateur averti.

82      S’agissant des panneaux arrière et latéraux, il convient d’emblée de relever que, compte tenu de la conclusion figurant au point 58 ci-dessus, ces panneaux ne sont pas pertinents pour apprécier l’impression globale produite sur l’utilisateur averti par les dessins ou modèles en cause.

83      S’agissant des panneaux avant, il convient de rappeler les vues pertinentes des dessins ou modèles en cause :

Dessin ou modèle contesté

Dessin ou modèle antérieur

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84      Force est de constater que le panneau avant de chacun des dessins ou modèles en cause, d’une part, est divisé en six sections délimitées par l’intersection d’une ligne verticale et de deux lignes horizontales et, d’autre part, comporte de petits éléments verbaux et figuratifs placés dans la partie inférieure.

85      Compte tenu de ces similitudes, la chambre de recours a estimé, au point 56 de la décision attaquée, que, confronté à l’un ou à l’autre des dessins ou modèles en cause une fois le dispositif de signalisation installé dans un tableau de contrôle, l’utilisateur averti reconnaîtrait le même panneau avant.

86      Cependant, la requérante objecte, premièrement, que les similitudes constatées, telles que la forme rectangulaire du panneau avant et la division de ce dernier en six sections au moyen d’une ligne verticale et de deux lignes horizontales, résultent d’exigences techniques et de prescriptions légales limitant la liberté du créateur.

87      À cet égard, il résulte des points 65 à 78 ci-dessus que la requérante n’a pas démontré que l’agencement du panneau avant était contraint par des exigences techniques ou des prescriptions légales. Par conséquent, les similitudes constatées entre les dessins ou modèles litigieux ne résultent pas d’une limitation de la liberté du créateur.

88      Deuxièmement, la requérante observe que les lignes horizontales et verticale divisant chacun des dessins ou modèles n’ont pas la même épaisseur. En particulier, les deux lignes horizontales seraient plus étroites dans le dessin ou modèle antérieur que dans le dessin ou modèle contesté. Par ailleurs, les cadres des panneaux avant présenteraient des différences de couleurs.

89      À cet égard, la chambre de recours a relevé à juste titre, au point 52 de la décision attaquée, que la différence d’épaisseur entre les lignes horizontales des dessins ou modèles en cause n’était pas significative et ne contribuait pas à produire des impressions d’ensemble différentes. Il y a lieu d’ajouter qu’il en va de même des nuances dans les couleurs des cadres des panneaux avant, jugées non frappantes par la chambre de recours au point 53 de la décision attaquée.

90      Troisièmement, la requérante indique que les éléments verbaux et figuratifs placés dans les coins inférieurs gauche et droit des panneaux avant des dessins ou modèles en cause ne sont pas identiques. Ainsi, le dessin ou modèle contesté comporterait les inscriptions « IP supply », « UP supply », « Ackn » et « LSB 6 » ainsi que la représentation stylisée d’une flèche pointant vers la gauche. En revanche, le dessin ou modèle antérieur montrerait des inscriptions, telles que « T&D Engineering » et « T&D », « ACK » et « Engineering », et des signes, notamment des ovales et des cercles de couleur.

91      À cet égard, il y a lieu de constater que, comme la chambre de recours l’a indiqué à juste titre au point 54 de la décision attaquée, les éléments verbaux et figuratifs présents sur les panneaux avant sont des détails mineurs à peine visibles.

92      Quatrièmement, la requérante soutient que la présence du logo et du nom du détenteur de chacun des dessins ou modèles en cause empêcherait tout risque de confusion dans l’esprit de l’utilisateur averti.

93      À cet égard, il y a lieu d’observer que, contrairement à une marque, un dessin ou modèle n’a pas pour fonction d’indiquer l’origine commerciale du produit. De plus, l’utilisateur averti est conscient que les fabricants utilisent normalement des marques afin d’indiquer l’origine commerciale de leurs produits. Dès lors, c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé, au point 55 de la décision attaquée, que la présence des logos et des noms des détenteurs des dessins ou modèles en cause ne constituait pas une différence significative [voir, en ce sens, arrêt du 14 juin 2011, Sphere Time/OHMI – Punch (Montre attachée à une lanière), T-68/10, EU:T:2011:269, point 82].

94      Cinquièmement, la requérante fait valoir, en substance, que, à supposer même que les différences entre les dessins ou modèles en cause puissent être qualifiées de mineures, les connaissances techniques et le niveau élevé d’attention de l’utilisateur averti lui permettraient encore de distinguer entre les dessins ou modèles en cause.

95      À cet égard, il importe de rappeler que, lorsque, comme en l’espèce, il existe un degré élevé de liberté du créateur, des différences mineures existant entre les dessins ou modèles en conflit ne suffisent pas à produire une impression globale différente entres lesdits dessins ou modèles [voir, en ce sens, arrêt du 29 novembre 2018, Sata/EUIPO – Zhejiang Auarita Pneumatic Tools (Pistolet à peinture), T‑651/17, non publié, EU:T:2018:855, point 45].

96      Sixièmement, la requérante fait valoir que les produits représentés par les dessins ou modèles en cause sont en concurrence sur le marché bulgare, qui est très limité, et qu’ils sont conformes aux exigences techniques des utilisateurs, à savoir les cinq entreprises de vente et de transport d’électricité présentes sur ce marché.

97      À cet égard, il suffit de répondre que, dans le cadre de l’examen du caractère individuel d’un dessin ou modèle, la requérante ne saurait utilement se prévaloir d’une tendance générale en matière de design [arrêt du 29 octobre 2015, Roca Sanitario/OHMI – Villeroy & Boch (Robinet à commande unique), T-334/14, non publié, EU:T:2015:817, points 48 et 49], a fortiori lorsque, comme en l’espèce, la tendance alléguée est limitée à un seul État membre.

98      Dans ces conditions, il convient de conclure que, contrairement à ce que soutient la requérante, l’impression globale produite sur l’utilisateur averti par le dessin ou modèle contesté ne diffère pas de celle produite par le dessin ou modèle antérieur.

99      Il s’ensuit que la chambre de recours a conclu, à juste titre, que le dessin ou modèle contesté ne présentait pas de caractère individuel au sens de l’article 6, paragraphe 1, sous b, du règlement n° 6/2002.

100    Par ailleurs, s’agissant de l’argument de la requérante tiré de ce que le dessin ou modèle contesté présente un caractère nouveau au sens de l’article 5, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002, il doit être écarté comme inopérant dans la mesure où les conditions de nouveauté et de caractère individuel sont distinctes et cumulatives et où le non-respect de l’une d’entre elles est susceptible d’entraîner, à lui seul, la nullité du dessin ou modèle en cause [voir, en ce sens, arrêt du 10 juin 2020, L. Oliva Torras/EUIPO – Mecánica del Frío (Attelages pour véhicules), T-100/19, EU:T:2020:255, points 54 et 55 et jurisprudence citée].

101    Partant, le second moyen doit être écarté.

102    Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté.

103    Dans ces conditions, la chambre de recours ayant déjà, dans la décision attaquée, déclaré la nullité du dessin ou modèle contesté, il n’est pas nécessaire de statuer sur le deuxième chef de conclusions de l’intervenante demandant au Tribunal de déclarer la nullité de ce dessin ou modèle [voir, par analogie, arrêt du 26 février 2016, Mederer/OHMI – Cadbury Netherlands International Holdings (Gummi Bear-Rings), T‑210/14, non publié, EU:T:2016:105, points 14, 92 et 93].

 Sur les dépens

104    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (dixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      T i D kontrolni sistemi EOOD est condamnée aux dépens.

Kornezov

Kowalik-Bańczyk

Hesse

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 22 septembre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : le bulgare.