Language of document : ECLI:EU:T:2010:218



ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

26 mai 2010 (*)

« Référé – Demande de mesures provisoires – Exigences de forme – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑15/10 R,

Mariyus Noko Ngele, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par MF. Sabakunzi, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. A. Bordes, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet, en substance, une demande visant à faire déclarer l'illégitimité de l'activité du Centre pour le développement de l’entreprise (CDE) en Belgique, à interdire à la Commission et ses agents de mener des relations financières avec le CDE ou de reconnaître la légitimité du CDE et à condamner la Commission a payer une somme au requérant au cas la Commission reconnaît cette légitimité,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

Faits à l’origine du litige, procédure et conclusions du requérant

1        Le requérant, M. Mariyus Noko Ngele, soutient être le détenteur d’une créance de 200 000 euros sur le Centre de développement industriel (CDI), cédée par un employé de ce dernier en 2007.

2        Selon le requérant, le CDI aurait été remplacé par une « organisation internationale fictive appelée le Centre pour le développement de l’entreprise (CDE) […] sans qu’aucune loi belge ne l’ait reconnue pour mener ses activités en Belgique ».

3        Toujours selon le requérant, la Commission européenne a des relations avec le Centre pour le développement de l’entreprise (CDE), de telle sorte que des agents de la Commission empêchent le requérant de pouvoir réclamer sa créance sur le CDI.

4        Le requérant serait personnellement impliqué dans certains litiges mettant en cause des agents de la Commission, devant les juridictions belges.

5        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 25 janvier 2010, le requérant a introduit un recours en indemnité tendant à l’obtention de dommages et intérêts à la suite des fautes commises par les agents de la Commission.

6        Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le même jour, le requérant a introduit la présente demande en référé contre la Commission ainsi que contre un ancien membre de la Commission et contre trois fonctionnaires de la Commission.

7        Le requérant conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        dire pour droit que le CDE n’a jamais remplacé le CDI et qu’il n’a pas d’existence légale, régulière et de personnalité juridique en Belgique ;

–        interdire à la Commission et à ses agents de mener des actions financières avec une organisation internationale fictive avant que cette dernière n’ait rempli les conditions requises pour son établissement et l’exercice de son activité sur le territoire belge ;

–        condamner la Commission et ses agents à ne plus reconnaître la légalité du CDE en Belgique ;

–        condamner la Commission à lui payer une somme d’un million d’euros au cas où elle aurait reconnu publiquement la légalité du CDE en Belgique ;

–        dire pour droit que le jugement à intervenir sera exécutoire nonobstant tout recours ;

–        condamner la Commission aux dépens et à l’indemnité de procédure évaluée à 3 000 euros.

8        La Commission conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal de rejeter la demande en référé comme étant manifestement irrecevable et, en tout état de cause, manifestement dépourvue de tout fondement en droit. La Commission soulève aussi l’irrecevabilité manifeste du recours en responsabilité présenté au principal.

 En droit

9        Les compétences du Tribunal sont celles énumérées à l’article 256 TFUE, tel que précisé par l’article 51 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et par l’article 1er de l’annexe I dudit statut. En application de ces dispositions, le Tribunal est compétent pour connaître des litiges relatifs à la réparation des dommages causés par les institutions de l’Union européenne ou par leurs agents dans l’exercice de leurs fonctions, au titre des articles 268 TFUE et 340 TFUE, et pour prescrire les mesure provisoires nécessaires, au titre de l’article 279 TFUE.

10      Il convient de relever que le requérant a dirigé sa demande tendant à obtenir des mesures provisoires, fondée sur l’article 279 TFUE, contre, d’une part, la Commission en tant qu’institution de l’Union européenne, et, d’autre part, un ancien membre de la Commission ainsi que trois fonctionnaires de celle-ci.

11      En ce qui concerne la demande en référé dirigée contre l’ancien membre de la Commission et contre les trois fonctionnaires de la Commission, il convient de rappeler que les actions en responsabilité non contractuelle, et les demandes en référé s’y rapportant, peuvent uniquement être dirigées contre l’Union ou ses institutions (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 22 mars 1990, Le Pen, C‑201/89, Rec. p. I‑1183, point 11).

12      Il en résulte que la présente demande en référé doit être déclarée irrecevable en tant qu’elle est dirigée contre des personnes autres que la Commission.

13      En ce qui concerne la demande visant la Commission, dès lors que le non-respect du règlement de procédure du Tribunal constitue une fin de non-recevoir d’ordre public, il appartient au juge des référés d’examiner d’office, in limine litis, si les dispositions applicables de ce règlement ont été respectées (ordonnances du président du Tribunal du 7 mai 2002, Aden e.a./Conseil et Commission, T‑306/01 R, Rec. p. II‑2387, point 43, et du 2 août 2006, BA.LA. Di Lanciotti Vittorio e.a./Commission, T‑163/06 R, non publiée au Recueil, point 35).

14      À cet égard, l’article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure dispose que les demandes de mesures provisoires doivent spécifier l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent. Ainsi, le sursis à exécution et les autres mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s’il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu’ils sont urgents en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts du requérant, qu’ils soient prononcés et produisent leurs effets avant même la décision principale. Ces conditions sont cumulatives, de sorte que les mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l’une d’elles fait défaut [ordonnance du président de la Cour du 14 octobre 1996, SCK et FNK/Commission, C‑268/96 P(R), Rec. p. I‑4971, point 30].

15      En outre, en vertu de l’article 104, paragraphe 3, du règlement de procédure, la demande doit notamment être présentée par acte séparé. Conformément à l’article 44, paragraphe 1, sous c), de ce même règlement, toute requête doit indiquer l’objet du litige et contenir un exposé sommaire des moyens invoqués.

16      Il découle d’une lecture combinée de ces dispositions du règlement de procédure qu’une demande relative à des mesures provisoires doit, à elle seule, permettre à la partie défenderesse de préparer ses observations et au juge des référés de statuer sur la demande, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’une telle demande soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celle-ci se fonde ressortent d’une façon cohérente et compréhensible du texte même de la requête en référé. Si ce texte peut être étayé et complété sur des points spécifiques par des renvois à des passages déterminés de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la demande en référé, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels dans celle-ci [ordonnances du président du Tribunal du 15 janvier 2001, Stauner e.a./Parlement et Commission, T‑236/00 R, Rec. p. II‑15, point 34, et Aden e.a./Conseil et Commission, précitée, point 52 ; voir également ordonnance du président de la Cour du 30 avril 2010, Ziegler/Commission, C‑113/09 P(R), non publiée au Recueil, point 13].

17      En l’espèce, s’agissant de la condition relative à la justification des mesures à première vue en fait et en droit (fumus boni juris), force est de relever que le requérant ne consacre aucun argument à la nécessité des mesures provisoires demandées, au regard de la description factuelle et juridique qu’il a fournie. Il ne mentionne, en particulier, aucune disposition du droit de l’Union que la Commission aurait violée et s’abstient, a fortiori, de préciser le lien de causalité entre cette prétendue violation et les préjudices invoqués.

18      Il est notamment impossible de comprendre, à la lecture de la demande de mesures provisoires, la relation entre les mesures provisoires demandées, tendant en substance à interdire à la Commission de contacter le CDE ou de reconnaître sa légitimité, et la réparation demandée par le requérant, fondée sur une créance prétendument détenue par le requérant sur le CDI, entité qui aurait été remplacée par le CDE.

19      À titre surabondant, il y a lieu de constater que le requérant ne se prononce pas non plus sur la condition relative à l’urgence. Il se borne à faire référence aux dommages prétendument subis par lui et à invoquer des litiges pendants devant les juridictions belges, sans exposer en quoi un préjudice grave et irréparable serait en cause.

20      Dans ce contexte, le requérant semble invoquer un préjudice financier ainsi qu’un préjudice moral et psychologique. S’agissant du préjudice financier concernant sa prétendue créance de 200 000 euros, le requérant s’abstient de fournir le moindre élément concernant sa situation financière. En ce qui concerne le préjudice moral et psychologique invoqué, il semble l’imputer au comportement des seules juridictions belges, dans la mesure où celles-ci ont rejeté ses différentes requêtes ou ont donné suite à des procédures engagés contre lui devant les autorités judiciaires nationales.

21      Partant, la présente demande en référé ne satisfait manifestement pas aux exigences de l’article 104, paragraphes 2 et 3, du règlement de procédure et doit donc être rejetée comme irrecevable, sans qu’il soit nécessaire d’examiner l’objection de la Commission concernant la recevabilité du recours principal.

22      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la demande en référé doit être rejetée.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      La demande en référé est rejetée.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 26 mai 2010.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : le français.