Language of document : ECLI:EU:T:2021:551

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

8 septembre 2021 (*)

« Fonction publique – Agents temporaires – Groupe politique – Licenciement – Erreur manifeste d’appréciation – Détournement de pouvoir – Droit d’être entendu – Égalité de traitement – Devoir de sollicitude – Principe de bonne administration – Responsabilité »

Dans l’affaire T‑156/20,

JA, représenté par Mes T. Bontinck et A. Guillerme, avocats,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par MM. I. Lázaro Betancor et N. Scafarto, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant, d’une part, à l’annulation de la décision du Parlement du 4 juillet 2019 de mettre fin au contrat d’agent temporaire du requérant et, d’autre part, à la réparation du préjudice moral que le requérant aurait prétendument subi du fait de cette décision,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. J. Svenningsen, président, R. Barents et J. Laitenberger (rapporteur), juges,

greffier : M. L. Ramette, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 13 avril 2021,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 1er mai 2017, le requérant, JA, a été recruté par le Parlement européen en tant qu’agent temporaire à durée indéterminée au titre de l’article 2, sous c), du régime applicable aux autres agents (ci-après le « RAA ») pour travailler auprès du groupe politique « Europe des nations et des libertés » (ci-après le « groupe ENL »).

2        À la suite des élections au Parlement qui se sont déroulées entre le 23 et le 26 mai 2019, s’est tenue, le 12 juin 2019, une réunion de certains membres du Parlement visant à constituer un nouveau groupe politique dénommé « Identité et démocratie » (ci-après le « groupe ID »).

3        Le 26 juin 2019 s’est tenue une réunion du bureau du groupe ENL au cours de laquelle il a été décidé que ce groupe serait dissous et que cette dissolution interviendrait le 2 juillet 2019.

4        La déclaration de constitution du groupe ID a été annexée au procès-verbal de la session du Parlement qui s’est tenue le 4 juillet 2019.

5        Selon l’article 4, troisième tiret, de la décision du Bureau du 13 janvier 2014 sur la délégation des pouvoirs de l’autorité investie du pouvoir de nomination et de l’autorité habilitée à conclure des contrats d’engagement (ci-après l’ « AHCC »), en ce qui concerne les agents temporaires visés à l’article 2, sous c), du RAA, les pouvoirs dévolus à l’AHCC par le RAA sont exercés, en cas de dissolution d’un groupe politique, par le secrétaire général du Parlement.

6        Par lettre datée du 4 juillet 2019 et transmise, par courriel, le 25 juillet 2019 (ci-après la « décision attaquée »), l’AHCC compétente, en la personne du secrétaire général du Parlement, a notifié au requérant la fin de son contrat à l’issue d’une période de préavis de trois mois, à compter de la date de la notification de ladite lettre, au motif que le groupe ENL avait été dissous le 2 juillet 2019.

7        Le 1er août 2019, le requérant a introduit une réclamation à l’encontre de la décision attaquée, sur la base de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci‑après le « statut »), laquelle réclamation a été rejetée par l’AHCC le 10 décembre 2019.

 Procédure et conclusions des parties

8        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 mars 2020, le requérant a introduit le présent recours.

9        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 19 mars 2020, le requérant a demandé que l’anonymat lui fût accordé en application de l’article 66 du règlement de procédure du Tribunal. Par décision du 15 juin 2020, le Tribunal a fait droit à cette demande.

10      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner le Parlement au paiement d’une indemnité de 20 000 euros afin de réparer le préjudice subi ;

–        condamner le Parlement aux dépens.

11      Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur les conclusions en annulation

12      À titre liminaire, il y a lieu de relever que, par son recours, le requérant demande l’annulation de la décision attaquée, par laquelle son contrat d’agent temporaire auprès du groupe ENL a été résilié.

13      Quant au chef de conclusions formulé à titre subsidiaire tendant à ce que le Tribunal déclare illégale la décision de dissolution du groupe ENL, il y a lieu de rappeler qu’il n’appartient pas au juge de l’Union de faire des constatations de principe dans le dispositif de ses arrêts (voir, en ce sens, arrêt du 16 décembre 2004, De Nicola/BEI, T‑120/01 et T‑300/01, EU:T:2004:367, points 136 et 137). Toutefois, en l’espèce, ce chef de conclusions doit être compris comme n’étant pas distinct du chef de conclusions tendant à obtenir l’annulation de la décision attaquée, dès lors que le requérant soulève, à titre incident, l’illégalité de la décision de dissolution du groupe ENL au soutien de sa demande d’annulation de la décision attaquée.

14      À l’appui de son recours, le requérant soulève, en substance, six moyens, tirés, le premier, d’une erreur manifeste d’appréciation dans la mesure où, selon lui, en justifiant la décision attaquée par la dissolution du groupe politique ENL, le Parlement a ignoré que ce groupe n’avait pas fait l’objet d’une dissolution, mais d’un simple changement de dénomination pour devenir le groupe politique ID, le deuxième, formulé à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où il devrait être considéré que le groupe politique ENL avait fait l’objet d’une dissolution, de l’illégalité de la décision de dissolution du groupe ENL, le troisième, d’un détournement de pouvoir, le quatrième, d’une violation du droit d’être entendu, le cinquième, d’une violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination, et, le sixième, d’une violation du principe de bonne administration et du devoir de sollicitude.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation

15      Par le premier moyen, le requérant soutient que, en justifiant la décision attaquée par la dissolution du groupe politique ENL, le Parlement a commis une erreur manifeste d’appréciation dans la mesure où, selon lui, ce groupe politique n’a pas fait l’objet d’une dissolution, mais d’un simple changement de dénomination pour devenir le groupe politique ID.

16      Le Parlement conteste l’argumentation du requérant.

17      À titre liminaire, il convient de souligner que le contrat d’emploi litigieux était un contrat d’agent temporaire conclu au titre de l’article 2, sous c), du RAA. Un tel contrat est, par nature, lié à la durée du mandat de la personne ou de l’entité auprès de laquelle l’intéressé exerce ses fonctions, de sorte qu’il y a lieu de considérer que la dissolution d’un groupe politique du Parlement met, en principe, fin à cette relation d’emploi. Le contrat d’emploi litigieux ayant été résilié pour ce motif, il convient d’examiner si le groupe ENL a bien été dissous en l’espèce.

18      Premièrement, comme l’explique le Parlement, un groupe politique est composé de députés élus qui peuvent décider librement de se regrouper, une fois élus, en fonction de leurs affinités politiques, conformément à l’article 33, paragraphe 1, du règlement intérieur du Parlement. Il en résulte que l’existence d’un groupe politique est intrinsèquement et nécessairement liée au mandat démocratique du Parlement, établi pour une durée de cinq ans, conformément à l’article 14, paragraphe 3, TUE. Cette période quinquennale commence à l’ouverture de la première session tenue après une élection et expire à l’ouverture de la première session tenue après l’élection suivante. Les groupes politiques émanent des députés qui les constituent et permettent de structurer le fonctionnement du Parlement. Ils ne peuvent cependant pas être considérés comme des entités juridiques distinctes de leurs membres et, partant, de leurs mandats respectifs. Pour cette raison, tous les groupes politiques sont automatiquement dissous à la fin de la législature qui marque l’expiration du mandat des députés qui les composent. S’il est vrai qu’ils peuvent éventuellement être reconstitués en début de nouvelle législature, une telle reconstitution s’opère nécessairement en fonction des résultats des élections et des convergences politiques que les membres décident de privilégier dans la nouvelle législature et qui ne sont pas liés par des choix pris, le cas échéant, par les mêmes membres ou par d’autres membres pendant la législature précédente. Il n’y a pas, comme l’indique à juste titre le Parlement, de continuité d’existence automatique des groupes politiques d’une législature à une autre. Dès lors, pour pouvoir exister ou continuer à exister, un groupe politique donné doit être constitué ou reconstitué à chaque nouvelle législature.

19      Comme le mentionne le Parlement, conformément à l’article 33, paragraphes 5 à 7, du règlement intérieur du Parlement, au début de chaque nouvelle législature, le président du Parlement reçoit les déclarations de constitution des différents groupes politiques, indiquant la dénomination du groupe, comportant une déclaration politique qui établit l’objectif du groupe et contenant le nom de ses membres et des membres de son bureau. La constitution des groupes politiques est annoncée ensuite par le président en séance plénière avec un effet juridique rétroactif à compter de la date de la déclaration de leur constitution. Cette déclaration est annexée au procès-verbal de la période de session au cours de laquelle l’annonce de la constitution du groupe politique est faite.

20      Ainsi, le procès-verbal de la séance inaugurale du Parlement du 4 juillet 2019 fait apparaître que la totalité des groupes politiques, et notamment le groupe ID, ont été constitués lors du début de la législature, ce qui confirme que les précédents groupes politiques en activité pendant la législature précédente ont bien été dissous.

21      Deuxièmement, la discontinuité des groupes politiques entre deux législatures, c’est-à-dire la dissolution automatique de l’ensemble des groupes politiques à la fin de chaque législature, doit être distinguée de la dissolution d’un groupe politique spécifique en cours de législature. C’est le cas par exemple lorsque ledit groupe politique ne remplit plus les conditions nécessaires à son existence, lesquelles conditions sont visées à l’article 33, paragraphe 2, du règlement intérieur du Parlement. Dans ce cas précis, conformément à l’article 33, paragraphe 7, dudit règlement, la dissolution du groupe politique concerné fait l’objet d’une proclamation par le président du Parlement en séance plénière.

22      Troisièmement, sur le plan financier, comme l’explique le Parlement, bien que les groupes politiques soient de simples groupements de membres permettant le bon fonctionnement des travaux du Parlement et non pas des entités juridiques distinctes des députés qui les composent, ils disposent d’une certaine autonomie budgétaire et administrative nécessaire à leur fonctionnement.

23      Pour cette raison, le Parlement finance les groupes politiques par l’octroi de dotations annuelles provenant de la ligne budgétaire 400. Le point 1.3.2 de la réglementation régissant l’utilisation des crédits de la ligne budgétaire 400 du Bureau du 30 juin 2003, adoptée sur la base de l’article 34, paragraphe 3, du règlement intérieur du Parlement, précise que, en cas de dissolution d’un groupe politique, son ancien président est responsable de l’arrêt définitif des comptes à la date de la dissolution. Le groupe politique doit également transmettre au président du Parlement, dans un délai de trois mois après la date officielle de la dissolution, un rapport sur l’utilisation des crédits de l’exercice écoulé. À la suite de l’établissement des états financiers à la date de la dissolution du groupe, l’actif et le passif de ce dernier sont réalisés sous le contrôle conjoint de l’ancien président du groupe et du secrétaire général du Parlement ou de son représentant. L’actif net, y compris tout actif fixe, est remboursé au Parlement.

24      À ce propos, il est également prévu, aux termes du point 2.1.1 de cette réglementation, que l’année des élections européennes, le premier exercice budgétaire débute le 1er janvier et se termine le 30 juin, le second exercice débute le 1er juillet et se termine le 31 décembre. En revanche, aux termes du point 2.1.6 de ladite réglementation, aux fins du calcul du report lors des années électorales, pour les groupes qui continuent d’exister après les élections, les deux exercices budgétaires semestriels sont globalisés et considérés comme un seul, ce qui permet aux groupes reconstitués d’avoir une continuité administrative et financière.

25      En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que le groupe ENL a formellement décidé de sa dissolution définitive lors de la réunion du Bureau du groupe du 26 juin 2019. Ensuite, le 1er juillet 2019, le groupe ENL a informé le président ainsi que le secrétaire général du Parlement de sa dissolution définitive en fin de législature, prenant effet à partir du 2 juillet 2019. À la suite de cette annonce, dans le cadre de sa liquidation financière, le groupe ENL, en application de la réglementation précitée, a procédé au remboursement de son actif net au début du mois d’octobre 2019 après avoir soumis au président du Parlement un rapport sur l’utilisation des crédits jusqu’à la date de la dissolution du groupe ainsi que la liste des transactions financières réalisées à partir du 2 juillet 2019 concernant la liquidation des activités du groupe.

26      Il découle ainsi de ce qui précède que, contrairement à ce qu’allègue le requérant, il ne fait pas de doute qu’une dissolution du groupe ENL a bien été mise en œuvre en l’espèce.

27      Ce constat n’est pas infirmé par les différents arguments soulevés par le requérant.

28      Dans un premier argument, le requérant estime qu’aucune annonce de dissolution du groupe ENL n’a été faite lors de la première session plénière de la législature, contrairement aux termes de l’article 33 du règlement intérieur du Parlement, de sorte que, selon le requérant, il n’y aurait pas eu de dissolution dudit groupe.

29      À cet égard, comme l’explique le Parlement, il y a lieu de rappeler que l’article 33, paragraphes 3 et 7, du règlement intérieur du Parlement réglemente le cas spécifique de la dissolution d’un groupe politique ne remplissant plus les conditions nécessaires à son existence en cours de législature. C’est le cas par exemple quand un groupe politique ne comporte plus le nombre minimal de députés européens ou parce que ceux-ci n’ont pas été élus dans le nombre minimal d’États membres. Or, le Tribunal relève, à la suite du Parlement, que la dissolution du groupe ENL ne s’inscrit pas dans ce contexte. En effet, la dissolution du groupe, telle qu’elle a lieu pour tous les groupes politiques en fin de législature, était à la fois automatique et définitive. Il était donc normal, contrairement à ce que le requérant prétend, que le groupe politique ENL n’ait pas fait l’objet d’une annonce formelle de dissolution par le président du Parlement lors de la première session plénière de la législature.

30      Le premier argument doit donc être rejeté.

31      Dans un deuxième argument, le requérant estime qu’il n’y a pas eu dissolution du groupe ENL, mais un simple changement de dénomination du groupe ENL au groupe ID. Le requérant note d’ailleurs que les deux groupes sont désignés, à des fins administratives, par le même code, soit l’« unité no 58 ». Cela démontrerait que les deux entités ne sont pas distinctes.

32      À cet égard, il y a lieu de constater, à la suite du Parlement, que la circonstance que le code administratif du groupe politique ENL ait été réutilisé pour le groupe politique ID par les services gestionnaires des bases de données du Parlement ne contredit pas le fait qu’une dissolution du groupe ENL a bien été mise en œuvre, comme il a été constaté au point 26 ci-dessus. En tout état de cause, qui plus est, le Parlement indique que la réutilisation de ce code relevait d’une erreur entre-temps corrigée et que le groupe ENL est dorénavant classé comme « service no 75 ».

33      Le deuxième argument doit donc également être rejeté.

34      Dans un troisième argument, le requérant affirme que la publication au Moniteur belge, attestant que l’association « Mouvement pour une Europe des nations et des libertés » a fait l’objet d’un changement de dénomination et non d’une dissolution, démontre que, de manière similaire, le groupe ENL n’a pas été dissous, mais a simplement changé de dénomination, comme cela résulterait par ailleurs d’une autre publication sur le site de l’autorité des partis politiques européens.

35      À cet égard, comme le fait observer le Parlement, cette publication porte sur des entités distinctes du groupe politique ENL, à savoir sur des partis politiques, et est donc sans pertinence pour déterminer si le groupe ENL a bien été dissous.

36      En effet, il y a lieu de constater que les groupes politiques sont différents des partis politiques européens. Ainsi qu’il ressort de l’article 34 du règlement intérieur du Parlement, ces derniers ont leur propre personnalité juridique tandis que les groupes sont des organes structurant et facilitant le fonctionnement intérieur du Parlement. Dès lors, les conclusions que le requérant essaie de tirer d’une prétendue comparaison entre groupe politique et parti politique européens ne sont pas pertinentes.

37      Le troisième argument doit donc être rejeté.

38      Dans un quatrième argument, le requérant fait référence au caractère quasi identique des organigrammes et de la structuration des secrétariats des groupes ENL et ID. Selon le requérant, la grande majorité des agents du groupe ENL a continué à travailler au même poste auprès du groupe ID, leurs contrats n’ayant fait l’objet que d’un avenant modifiant la dénomination de leur employeur. Cela démontre, selon lui, qu’il n’y a pas eu dissolution du groupe politique ENL, mais une continuité entre le groupe politique ENL et le groupe politique ID.

39      À cet égard, il y a lieu de constater que cet argument est inopérant dans la mesure où, à supposer même que la totalité du personnel du groupe politique ENL ait été recrutée aux mêmes postes dans le nouveau groupe ID, cela n’infirmerait pas le fait que le groupe politique ENL a bien été dissous, comme il a été constaté au point 26 ci-dessus. La décision de répliquer un modèle d’organisation déterminé ou de recruter des collaboratrices et des collaborateurs ayant déjà servi pendant la législature précédente relevait des membres du Parlement élus pour la nouvelle législature. Ces membres n’étaient pas liés par les choix des membres du Parlement élus pour la législature précédente.

40      Aussi, le quatrième argument doit être écarté.

41      Dans un cinquième argument, le requérant explique qu’il n’existe pas de rupture d’idéologie entre les groupes ENL et ID, car leurs valeurs et leurs objectifs seraient strictement les mêmes.

42      À cet égard, il y a lieu de déclarer cet argument inopérant dans la mesure où, à supposer que les deux groupes partagent effectivement la même idéologie, cet élément ne contredirait pas le fait que le groupe politique ENL a bien été dissous, comme il a été démontré au point 26 ci-dessus. S’il est vrai qu’un groupe politique est caractérisé par une affinité politique entre ses membres, il est également vrai que, compte tenu de la liberté du mandat des membres du Parlement, aucun membre du Parlement n’est obligé de rejoindre un groupe politique déterminé. La continuité des affinités politiques de certains membres ne saurait donc déterminer une pérennité organisationnelle des groupes politiques.

43      Le cinquième argument doit donc également être écarté.

44      Dans un sixième argument, soulevé dans la réplique, le requérant prétend que, en procédant à l’évaluation d’une ancienne collègue du groupe ENL, le secrétaire général et le secrétaire général adjoint du groupe ID ont agi en tant que notateurs et AHCC du groupe ENL, ce qui confirmerait la continuité administrative entre les groupes ENL et ID.

45      À cet égard, il convient d’observer que cet argument, qui semble résulter d’une erreur de l’administration, n’infirme pas le fait que le groupe ENL a bien été dissous, comme il a été constaté au point 26 ci-dessus.

46      Le sixième argument doit donc être rejeté et, partant, le premier moyen dans sa totalité.

47      Enfin, le requérant demande au Tribunal, dans la réplique, d’adopter une mesure d’organisation de la procédure, en vertu de l’article 89, paragraphe 3, sous d), du règlement de procédure, consistant en une demande de production de la déclaration du groupe politique ENL du 24 juin 2015 ainsi que d’un document établissant la structure et la composition du secrétariat du groupe ID en début de législature.

48      À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il revient au Tribunal d’apprécier l’utilité des mesures d’organisation de la procédure et des mesures d’instruction (arrêt du 19 juin 2018, Le Pen/Parlement, T‑86/17, non publié, EU:T:2018:357, point 206).

49      En vertu de l’article 88, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsqu’une demande de mesure d’organisation de la procédure est formulée après le premier échange, la partie qui présente la demande doit exposer les raisons pour lesquelles elle n’a pas pu la présenter antérieurement. En l’espèce, force est de constater que la demande du requérant n’intervient qu’au stade de la réplique et qu’il n’indique aucunement les raisons pour lesquelles il n’a pas pu présenter cette demande au stade de la requête (voir, en ce sens, arrêt du 19 juin 2018, Le Pen/Parlement, T‑86/17, non publié, EU:T:2018:357, points 207 à 209).

50      En tout état de cause, le Parlement indique, à juste titre, qu’il a fourni tout document qui pouvait se révéler nécessaire afin d’apprécier la légalité de la décision attaquée et de démontrer le processus de dissolution du groupe ENL et que, par souci de transparence, il fournit également, dans la duplique, un organigramme actuel du groupe ID.

51      En outre, les documents sollicités par le requérant ne sont pas utiles pour démontrer l’absence de dissolution du groupe ENL, comme il ressort de l’examen des arguments précités.

52      Il y a donc lieu de rejeter la demande de production de documents.

 Sur le deuxième moyen, soulevé à titre subsidiaire, tiré de l’illégalité de la décision de dissolution du groupe ENL

53      Le requérant estime, à titre subsidiaire, que, s’il devait être considéré que le groupe politique ENL a bien fait l’objet d’une dissolution, la décision d’une telle dissolution serait illégale. Par conséquent, il y aurait lieu d’annuler la décision attaquée. Il soulève ainsi, à titre subsidiaire, une exception d’illégalité de la décision de dissolution du groupe ENL.

54      Le Parlement conteste l’argumentation du requérant.

55      Premièrement, le requérant allègue que la décision de dissolution du groupe ENL était illégale en soutenant une nouvelle fois que ladite décision devrait plutôt être qualifiée de changement de nomination ou de réorganisation du groupe politique.

56      Or, à cet égard, et comme il a été démontré ci-dessus, il ne fait pas de doute qu’il y a bien eu une dissolution du groupe ENL et non un simple changement de dénomination de ce groupe.

57      En outre, à l’appui de son exception d’illégalité, le requérant ne précise pas la norme de droit que le groupe ENL aurait violé en prenant cette décision de dissolution.

58      Deuxièmement, le requérant indique que le fait que la décision de dissolution n’ait pas été publiée ou qu’elle ne lui ait pas été transmise rendrait ladite décision illégale en ce qu’elle priverait du droit d’accès au juge ceux qui souhaiteraient éventuellement former un recours contre ladite décision.

59      Cet argument doit également être écarté. Indépendamment de la question de savoir si une quelconque norme de droit exige la publication ou la transmission au requérant de la décision de dissolution du groupe politique, il y a lieu de constater que le requérant a été informé de la décision de dissolution du groupe ENL, puisque cet élément figure dans la décision attaquée. Rien ne s’opposait à ce qu’il demande ensuite à l’administration du Parlement des explications approfondies concernant cette décision pour mieux comprendre le mécanisme de dissolution d’un groupe politique et pour ensuite la contester. La requérante a d’ailleurs, et en tout état de cause, contesté à titre incident la légalité de ladite décision de dissolution dans le cadre du présent recours.

60      Troisièmement, le requérant affirme que la dissolution du groupe ENL est constitutive d’un détournement de pouvoir.

61      Le requérant n’a pas explicité ce reproche dans le cadre du deuxième moyen, mais dans le cadre du troisième moyen.

62      Selon la jurisprudence, la notion de détournement de pouvoir se réfère au fait, pour une autorité administrative, d’avoir usé de ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés (voir arrêt du 10 mai 2005, Italie/Commission, C‑400/99, EU:C:2005:275, point 38 et jurisprudence citée).

63      Or, selon une jurisprudence constante, il n’y a détournement de pouvoir que s’il apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, que l’acte attaqué a été pris dans le but exclusif, ou tout au moins déterminant, d’atteindre des fins autres que celles excipées ou d’éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 17 janvier 2013, Gollnisch/Parlement, T‑346/11 et T‑347/11, EU:T:2013:23, point 172 et jurisprudence citée, et du 7 mars 2018, Le Pen/Parlement, T‑140/16, non publié, EU:T:2018:122, point 76).

64      À cet égard, le requérant semble tout d’abord indiquer, dans la requête, que le groupe ENL a fait usage de ses pouvoirs afin de dissimuler une simple mesure de changement de dénomination en une dissolution de groupe politique.

65      Puis, dans la réplique, le requérant allègue que le groupe ENL a mis en œuvre sa propre dissolution « pour s’éviter de respecter les procédures de licenciement » prévues dans le RAA, selon lesquelles le groupe ENL aurait dû présenter un motif réel de licenciement.

66      À cet égard, il y a lieu de relever que l’argumentation du requérant repose sur de pures spéculations.

67      Comme il a été mentionné ci-dessus, l’existence des groupes politiques est déterminée par les législatures. Aussi, les groupes politiques sont dissous en fin de législature. Dans le cas d’espèce, il y a eu de surcroît une décision explicite de dissolution du groupe politique ENL.

68      Force est de constater que le groupe politique ENL n’a pas été reconstitué en début de législature suivante, selon la volonté des députés réélus et nouvellement élus.

69      Le requérant n’apporte pas, à cet égard, d’indices objectifs, pertinents et concordants susceptibles de démontrer qu’une telle décision visait, en particulier à contourner les procédures de licenciement prévues dans le RAA ou à dissimuler un simple changement de dénomination ou une réorganisation du groupe.

70      Quatrièmement, le requérant invoque que la décision attaquée était illégale en raison d’une violation de son droit d’être entendu. Toutefois, le requérant n’explique pas dans quelle mesure une telle violation permettrait de démontrer que la décision de dissolution du groupe politique ENL était illégale. En effet, comme il a déjà été constaté au point 57 ci-dessus, le requérant ne précise pas la norme de droit que le groupe ENL aurait violée en prenant cette décision de dissolution.

71      Enfin, cinquièmement, le requérant indique qu’à la fois l’intérêt du service et ses bonnes évaluations plaidaient pour son maintien en poste dans le groupe politique ID.

72      À cet égard, dans le cadre de l’examen de l’exception d’illégalité, il y a lieu de constater que ces éléments ne sont pas susceptibles de démontrer que la décision de dissolution du groupe ENL était illégale.

73      Il découle de ce qui précède que le deuxième moyen, soulevé à titre subsidiaire, doit être écarté.

 Sur le troisième moyen, tiré d’un détournement de pouvoir

74      Dans le troisième moyen, le requérant allègue qu’il ressort des éléments de contexte présentés et de l’analyse effectuée sous le premier moyen que le groupe politique ENL a fait usage de ses pouvoirs afin de déguiser une simple mesure de changement de dénomination, couplée à l’agrandissement du groupe, en une dissolution de groupe politique.

75      Ce faisant, selon le requérant, le groupe ENL et le Parlement ont fait usage de la procédure de dissolution d’un groupe politique dans un but autre que celui prévu dans le règlement intérieur du Parlement.

76      Partant, selon le requérant, la décision attaquée est entachée d’un détournement de pouvoir et doit être annulée.

77      Le Parlement conteste l’argumentation du requérant.

78      À l’instar du Parlement, le Tribunal estime que les reproches faits par le requérant dans le cadre du troisième moyen ne portent pas sur la décision attaquée, à savoir une décision individuelle de licenciement d’un collaborateur du groupe ENL, mais sur la décision de dissolution du groupe ENL.

79      Il y a lieu de constater, à cet égard, que les reproches du requérant portant à la fois sur l’existence et la légalité de la décision de dissolution du groupe ENL, et notamment l’allégation relative à un détournement de pouvoir, ont déjà tous été écartés dans le cadre de l’analyse des deux premiers moyens.

80      Le troisième moyen doit donc être rejeté.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation du droit d’être entendu

81      Par le quatrième moyen, le requérant estime que l’AHCC compétente en l’espèce, à savoir le secrétaire général du Parlement, a violé son droit d’être entendu préalablement à la décision attaquée.

82      Le Parlement conteste cette argumentation.

83      Premièrement, il convient de constater que le Parlement ne conteste pas que le requérant n’a pas été entendu par le secrétaire général du Parlement.

84      Deuxièmement, il y a lieu de rappeler que le droit d’être entendu garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours de la procédure administrative et avant l’adoption de toute décision susceptible d’affecter de manière défavorable ses intérêts (voir arrêt du 22 novembre 2012, M., C‑277/11, EU:C:2012:744, point 87 et jurisprudence citée).

85      Ce droit a notamment pour objet, afin d’assurer une protection effective de la personne concernée, que cette dernière puisse corriger une erreur ou faire valoir les éléments pertinents relatifs à sa situation personnelle qui militent dans le sens que la décision soit prise, ne soit pas prise ou qu’elle ait tel ou tel contenu (arrêt du 11 décembre 2014, Boudjlida, C‑249/13, EU:C:2014:2431, point 37).

86      Le droit d’être entendu implique également que l’administration prête toute l’attention requise aux observations ainsi soumises par l’intéressé en examinant, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce (voir arrêt du 22 novembre 2012, M., C‑277/11, EU:C:2012:744, point 88 et jurisprudence citée).

87      Ledit droit doit ainsi permettre à l’administration d’instruire le dossier de manière à prendre une décision en pleine connaissance de cause et de motiver cette dernière de manière appropriée, afin que, le cas échéant, l’intéressé puisse valablement exercer son droit de recours (voir, par analogie, arrêt du 11 décembre 2014, Boudjlida, C‑249/13, EU:C:2014:2431, point 59).

88      Toutefois, il doit également être souligné que, selon une jurisprudence constante, une violation du droit d’être entendu n’entraîne l’annulation de la décision prise au terme de la procédure administrative en cause que si, en l’absence de cette irrégularité, cette procédure pouvait aboutir à un résultat différent (arrêts du 10 septembre 2013, G. et R., C‑383/13 PPU, EU:C:2013:533, point 38, et du 24 avril 2017, HF/Parlement, T‑584/16, EU:T:2017:282, point 157 ; voir, également, arrêt du 9 septembre 2015, De Loecker/SEAE, F‑28/14, EU:F:2015:101, point 127 et jurisprudence citée).

89      De plus, pour établir que tel est le cas, la partie requérante doit expliquer quels sont les arguments et les éléments qu’elle aurait fait valoir si ses droits de la défense avaient été respectés et démontrer, le cas échéant, que ces arguments et éléments auraient pu conduire dans son cas à un résultat différent [voir arrêt du 3 juillet 2019, PT/BEI, T‑573/16, EU:T:2019:481, point 269 (non publié) et jurisprudence citée].

90      Cependant, il ne saurait être imposé à une partie requérante qui invoque la violation de ses droits de la défense de démontrer que la décision de l’institution de l’Union concernée aurait eu un contenu différent, mais uniquement qu’une telle hypothèse n’était pas entièrement exclue (voir arrêt du 18 juin 2020, Commission/RQ, C‑831/18 P, EU:C:2020:481, point 106 et jurisprudence citée).

91      L’appréciation de cette question doit, en outre, être effectuée en fonction des circonstances de fait et de droit spécifiques de chaque espèce (voir, en ce sens, arrêt du 10 septembre 2013, G. et R., C‑383/13 PPU, EU:C:2013:533, point 40).

92      Troisièmement, et à la lumière de la jurisprudence citée aux points 88 à 91 ci-dessus, il y a donc lieu d’examiner si le requérant a démontré, dans ses écritures, qu’il ne pouvait être entièrement exclu que, s’il avait été entendu, la décision attaquée aurait eu un contenu différent. En effet, il ressort de cette même jurisprudence que la charge de la preuve repose, à cet égard, sur le requérant.

93      Par un premier argument, le requérant estime que, s’il avait été entendu, il aurait pu démontrer à l’AHCC que le groupe politique ENL n’avait pas été réellement dissous et que le motif de dissolution ne s’appliquait qu’à quelques agents isolés.

94      À cet égard, il ressort de ce qui précède que le groupe ENL a bien été dissous et que la requérante n’est pas parvenue à démontrer que ladite dissolution serait illégale. Le Tribunal relève, par ailleurs, que les éléments avancés par le requérant au stade contentieux correspondent, en substance, à ceux développés dans la réclamation. Or, dans la décision de rejet de la réclamation, l’AHCC a répondu auxdits arguments, tout en maintenant sa décision de résilier le contrat du requérant.

95      L’AHCC compétente, à savoir le secrétaire général du Parlement, agissait, à cet égard, en compétence liée.

96      Contrairement à ce qu’affirme le requérant, la dissolution d’un groupe politique a, en principe, pour effet que les contrats de tous les agents temporaires recrutés pour exercer des fonctions auprès de ce groupe doivent être résiliés. Certes, en l’espèce, certains anciens collaborateurs du groupe ENL ont par la suite été engagés par le groupe ID. Toutefois, cette circonstance n’est pas de nature à démontrer que la décision attaquée aurait pu avoir un contenu différent si le requérant avait pu faire valoir ses observations sur les conséquences résultant de la dissolution du groupe ENL, avant l’adoption de la décision attaquée, laquelle dissolution est le motif retenu par l’AHCC pour justifier la résiliation du contrat du requérant.

97      Le premier argument doit donc être écarté.

98      Par un second argument, le requérant rappelle que les fonctions qu’il occupait au sein du groupe politique ENL existaient toujours dans l’organigramme du groupe politique ID. Le requérant affirme que, s’il avait été entendu, il aurait été en mesure de démontrer à l’AHCC que son maintien en poste se justifiait particulièrement au vu de sa longue expérience, de ses excellents rapports d’évaluation annuelle et de sa connaissance pratique des dossiers. Selon le requérant, il ne peut être exclu que, si ces informations avaient été formulées auprès de l’AHCC avant que la décision attaquée ne soit prise, elles auraient influencé le sens de la décision.

99      Cette argumentation ne saurait prospérer.

100    En effet, il convient de souligner que l’objet du présent litige était la décision de résilier le contrat du requérant, à la suite de la dissolution du groupe ENL.

101    Or, la décision du groupe ID de ne pas recruter le requérant était indépendante de cette décision de résiliation du contrat du requérant.

102    À cet égard, il y a lieu de relever que le groupe politique ID disposait d’un pouvoir discrétionnaire pour choisir les collaborateurs qu’il souhaitait engager pour exercer des fonctions auprès de lui, selon la méthode qu’il jugeait appropriée. Ce pouvoir discrétionnaire est justifié notamment par la nature spécifique des fonctions exercées auprès d’un groupe politique et par la nécessité de maintenir, dans un tel environnement politique, des rapports de confiance mutuelle entre ce groupe et les agents temporaires recrutés (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 29 avril 2004, Parlement/Reynolds, C‑111/02 P, EU:C:2004:265, points 50 et 51). Un tel rapport de confiance mutuelle est supposé exister avec le groupe politique dans sa globalité (voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2013, L/Parlement, T‑317/10 P, EU:T:2013:413, point 64).

103    Or, à cet égard, le requérant ne saurait reprocher au secrétaire général du Parlement de ne pas l’avoir entendu sur les raisons qui, selon lui, auraient justifié son recrutement par le groupe ID, étant donné qu’un tel recrutement relevait de la compétence de l’AHCC du groupe politique et non pas de celle du secrétaire général du Parlement.

104    C’est d’ailleurs à tort que le requérant évoque un « maintien en poste » puisque, de toute évidence son poste au sein du groupe ENL avait disparu, à la suite de la dissolution dudit groupe.

105    Partant, il résulte de ce qui précède que le requérant n’a pas démontré que, s’il avait été entendu, il ne serait pas entièrement exclu que la décision attaquée aurait pu avoir un contenu différent.

106    Le quatrième moyen doit, en conséquence, être rejeté.

 Sur le cinquième moyen, tiré de la violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination

107    Dans la première branche du cinquième moyen, le requérant invoque une violation du principe d’égalité de traitement en ce qu’il a fait l’objet d’une décision de licenciement contrairement à d’autres agents du secrétariat du groupe ENL qui ont vu leur contrat se poursuivre au sein du groupe ID par le biais d’un avenant de transfert.

108    Le requérant allègue que, si la dissolution du groupe était réelle, chaque agent du groupe ENL aurait dû recevoir une décision de licenciement.

109    Le Parlement conteste l’argumentation du requérant.

110    À cet égard, et comme l’indique à juste titre le Parlement, il convient de noter qu’une partie du personnel employé au sein des secrétariats des groupes politiques est embauchée en tant qu’agents temporaires sur la base de l’article 2, sous c), du RAA. Les agents temporaires travaillant pour un groupe politique déterminé devraient voir leur contrat prendre fin à la fin de chaque législature, en même temps que la fin du mandat des députés et que la dissolution du groupe auquel ils sont affectés.

111    Cependant, dans la pratique, le Parlement mentionne, à juste titre, que les contrats de certains agents sont reconduits. Cela est par exemple le cas si le groupe politique dans lequel ces agents sont affectés est reconstitué en début de législature et décide de reconduire les contrats de certains agents pour la nouvelle législature. Dans ces cas de figure, le nouvel engagement est formalisé par un avenant à l’ancien contrat, afin de préserver la continuité des droits que ces agents ont acquis, par exemple l’âge de départ en retraite ou le taux annuel d’accroissement des droits à pension, et ce par sollicitude envers l’agent.

112    Le Parlement a d’ailleurs expliqué que ce souci de continuité s’appliquait également dans le contexte de la dissolution définitive d’un groupe politique en fin de législature pour les agents qui sont engagés par un groupe différent.

113    Au demeurant, lorsqu’un agent change de groupe politique à n’importe quel moment de la législature, la pratique du Parlement est également de « réaffecter » ou de « transférer » la personne d’un groupe à l’autre par la voie d’un avenant.

114    Comme l’explique le Parlement, il a mis en œuvre, dans un esprit de sollicitude, cette possibilité de « réaffectation », par voie d’avenant, d’un agent d’un groupe politique à un autre, en faisant usage de la possibilité d’appliquer par analogie aux agents temporaires l’article 7, paragraphe 1, du statut, en vertu de l’article 10, paragraphe 1, du RAA.

115    Dans le cas d’espèce, les anciens agents du groupe ENL recrutés au sein du groupe ID ayant déjà fait l’objet d’un recrutement au sein du Parlement, leur « réaffectation » ou « transfert » au sein du groupe ID a pu être possible par voie d’avenant, et ce afin de préserver la continuité des droits qu’ils avaient acquis, ce qui leur évitait de devoir signer un nouveau contrat impliquant une nouvelle période de stage et d’autres conséquences défavorables découlant d’un engagement auprès d’un groupe différent.

116    Cependant, et comme il a déjà été expliqué aux points 100 à 104 ci-dessus, la sollicitude de l’administration dans ce cas ne concerne que la forme contractuelle de l’engagement, sans qu’il soit loisible pour le Parlement d’imposer à un nouveau groupe la réaffectation des agents provenant d’un autre groupe.

117    Dès lors, l’embauche par le groupe ID de certains anciens agents du groupe ENL et leur réaffectation éventuelle au sein du groupe ID ne pourraient être vues comme un manquement au principe d’égalité de traitement, le nouveau groupe pouvant choisir librement les collaborateurs dont il souhaite s’entourer (voir, en ce sens, arrêt du 24 février 2010, P/Parlement, F‑89/08, EU:F:2010:11, point 41).

118    En outre, et en tout état de cause, le requérant invoque l’inégalité de traitement en tant qu’élément circonstanciel visant à appuyer son allégation quant à un simple changement de dénomination du groupe ENL et l’absence de réelle dissolution, ce qui ne correspond pas à la réalité, ainsi qu’il a été démontré aux points 17 à 46 ci-dessus.

119    La première branche du cinquième moyen doit donc être écartée.

120    Dans la seconde branche du cinquième moyen, le requérant allègue, à titre plus subsidiaire, avoir fait l’objet, dans la décision attaquée, d’une discrimination fondée sur l’opinion politique.

121    Le Parlement conteste l’argumentation du requérant.

122    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, dans le domaine politique, l’existence d’un lien de confiance est une notion large qui recouvre, notamment, le constat du partage d’une idéologie politique commune. Partant, l’expression d’une opinion politique divergente de celle du groupe politique auprès duquel l’intéressé exerce des fonctions est susceptible de constituer un motif valable de résiliation du contrat (voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2013, L/Parlement, T‑317/10 P, EU:T:2013:413, point 69), sans que cela constitue une discrimination fondée sur l’opinion politique de celui-ci.

123    En tout état de cause, l’article 1er quinquies, paragraphe 1, du statut, applicable par analogie aux agents temporaires en vertu de l’article 10, paragraphe 1, du RAA, interdit toute discrimination telle que fondée sur les opinions politiques. Le paragraphe 5 dudit article prévoit un aménagement de la charge de la preuve dès lors qu’une personne, s’estimant lésée par le non-respect à son égard du principe d’égalité de traitement, établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte. Dans ce cas, il incombe à l’institution de prouver qu’il n’y a pas eu violation de ce principe.

124    Cependant, la jurisprudence a également précisé que la partie requérante devait à tout le moins mettre en avant des éléments permettant de conforter sa thèse avant que ne puisse se poser la question de l’aménagement de la charge de la preuve (voir, en ce sens, arrêt du 15 février 2011, Barbin/Parlement, F‑68/09, EU:F:2011:11, points 99 et suivants).

125    Or, en l’espèce, le requérant n’apporte aucun élément constitutif d’un commencement de preuve permettant d’étayer ses accusations.

126    La seconde branche du cinquième moyen doit donc être écartée et, partant, le cinquième moyen dans sa totalité.

127    Il y a lieu de rappeler également, comme il a été développé aux points 47 à 52 ci-dessus, que la demande du requérant visant à ce que le Parlement produise l’organigramme du secrétariat du groupe politique ID et sa composition, une demande qu’il réitère dans le cadre du cinquième moyen, est irrecevable et, en tout état de cause, que les documents sollicités ne sont pas nécessaires aux fins de l’instruction du présent recours.

 Sur le sixième moyen, tiré d’une violation du principe de bonne administration et du devoir de sollicitude

128    Le requérant allègue que le Parlement a manqué à son devoir de sollicitude et a violé le principe de bonne administration en ce que le groupe ENL ne lui aurait jamais mentionné son intention de le licencier pour cause de dissolution du groupe et ne lui aurait prodigué aucune information complémentaire par la suite jusqu’à la réception, le 25 juillet 2019, de la décision de résiliation de son contrat.

129    Le Parlement conteste cette argumentation.

130    Selon la jurisprudence, le devoir de sollicitude de l’administration à l’égard de ses agents reflète l’équilibre des droits et obligations réciproques que le statut a créés dans les relations entre l’autorité publique et les agents du service public. Ce devoir ainsi que le principe de bonne administration impliquent notamment que, lorsqu’elle statue à propos de la situation d’un fonctionnaire, l’autorité prenne en considération l’ensemble des éléments qui sont susceptibles de déterminer sa décision et que, ce faisant, elle tienne compte non seulement de l’intérêt du service, mais aussi de celui du fonctionnaire concerné (arrêt du 19 février 2013, BB/Commission, F‑17/11, EU:F:2013:14, point 61).

131    En l’espèce, le Tribunal observe que le requérant ne prouve pas que le Parlement a omis de prendre en considération certains éléments de sa situation personnelle dans le cadre de la décision attaquée.

132    En outre, il y a lieu de constater que ni la circonstance qu’il n’ait pas été prévenu de son licenciement, à supposer que cela soit le cas, ni la circonstance que le Parlement ait tardé à lui notifier cette décision, ni le manque d’informations portant sur les conditions de prestation de son préavis, ni la clôture, selon lui prématurée, de son compte personnel, ne sont susceptibles de remettre en cause la décision attaquée qui est induite, comme il a été mentionné ci-dessus, par la dissolution du groupe politique ENL et par le fait qu’il n’a pu trouver un autre emploi au sein du Parlement.

133    Aucune violation du devoir de sollicitude ni du principe de bonne administration ne saurait donc être reprochée au Parlement en l’espèce.

134    Il y a donc lieu de rejeter le sixième moyen et, partant, la demande d’annulation de la décision attaquée.

 Sur la demande indemnitaire

135    Le requérant sollicite le versement d’une somme de 20 000 euros au titre du préjudice moral.

136    En effet, le requérant invoque la responsabilité de l’Union en raison du dommage que la décision attaquée lui aurait causé, à savoir le fait de l’avoir plongé dans un état d’incompréhension et d’insécurité certain.

137    Le Parlement conteste l’argumentation du requérant.

138    Le Tribunal constate, à la suite du Parlement, que la demande indemnitaire du requérant est étroitement liée à sa demande d’annulation de la décision attaquée.

139    Or, en vertu d’une jurisprudence constante, les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice matériel ou moral doivent être rejetées lorsqu’elles présentent, comme en l’espèce, un lien étroit avec les conclusions en annulation qui doivent, elles-mêmes, être rejetées comme étant irrecevables ou non fondées (voir, en ce sens, arrêts du 6 mars 2001, Connolly/Commission, C‑274/99 P, EU:C:2001:127, point 129 ; du 14 septembre 2006, Commission/Fernández Gómez, C‑417/05 P, EU:C:2006:582, point 51, et du 30 avril 2014, López Cejudo/Commission, F‑28/13, EU:F:2014:55, point 105).

140    La demande d’annulation de la décision attaquée ayant été rejetée, la demande indemnitaire, qui est étroitement liée à cette demande, doit donc être également rejetée.

141    Partant, il y a lieu de rejeter le recours dans sa totalité.

 Sur les dépens

142    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions du Parlement.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      JA est condamné aux dépens.

Svenningsen

Barents

Laitenberger

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 septembre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : le français.