Language of document : ECLI:EU:T:2021:444

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

14 juillet 2021 (*)

« Droit institutionnel – Réglementation concernant les frais et indemnités des députés au Parlement – Indemnité d’assistance parlementaire – Recouvrement des sommes indûment versées – Exception d’illégalité – Droits de la défense – Erreur d’appréciation »

Dans l’affaire T‑740/20,

Marie-Christine Arnautu, demeurant à Paris (France), représentée par Me F. Wagner, avocat,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par MM. N. Görlitz, T. Lazian et Mme M. Ecker, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation, premièrement, de la décision du secrétaire général du Parlement du 21 septembre 2020 relative au recouvrement auprès de la requérante d’une somme de 87 203,46 euros indûment versée au titre de l’assistance parlementaire et, deuxièmement, de la note de débit y afférente du 22 octobre 2020,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de M. D. Spielmann, président, Mme O. Spineanu‑Matei (rapporteure) et M. R. Mastroianni, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

I.      Antécédents du litige

1        La requérante, Mme Marie-Christine Arnautu, a été députée au Parlement européen de 2014 à 2019.

2        Le 4 décembre 2014, le Parlement européen a conclu avec A (ci-après l’« assistant parlementaire ») un contrat d’engagement en qualité d’assistant parlementaire accrédité à temps plein, pour la période allant du 4 décembre 2014 à la fin de la législature (ci-après le « contrat d’engagement »). Ce contrat précisait que A exercerait principalement des fonctions de support administratif et de secrétariat, mais pourrait être également appelé à exécuter des fonctions de rédaction et de conseil.

3        Le 31 décembre 2015, le contrat d’engagement a pris fin à la suite de la démission de l’assistant parlementaire.

4        Précédemment, à savoir le 11 mars 2015, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) avait ouvert une enquête à l’égard de certains députés au Parlement européen et de certains de leurs assistants.

5        Le 7 avril 2017, l’OLAF a informé la requérante qu’elle était personne concernée dans le cadre de cette enquête. Un entretien avec la requérante a eu lieu le 31 mai 2017. Le 7 juin 2018, l’OLAF a invité la requérante à présenter ses observations sur les faits la concernant, ce qu’elle a fait par lettre du 26 juin 2018.

6        Le 7 décembre 2018, l’OLAF a établi son rapport final et ses recommandations et révélé certaines irrégularités concernant les demandes de remboursement des frais d’assistance parlementaire présentées par la requérante en ce qui concerne le contrat d’engagement.

7        Le 11 mars 2020, le secrétaire général du Parlement a informé la requérante de l’ouverture d’une procédure de recouvrement sur le fondement de l’article 68 de la décision du bureau du Parlement des 19 mai et 9 juillet 2008 portant mesures d’application du statut des députés au Parlement (JO 2009, C 159, p. 1, ci-après les « mesures d’application ») et l’a invitée à présenter ses observations dans un délai de deux mois.

8        Par courriel du 6 juin 2020, la requérante a présenté ses observations au secrétaire général du Parlement, accompagnées d’un dossier de 64 pièces destinées à établir la réalité du travail exercé par l’assistant parlementaire. Elle a également demandé à être entendue oralement.

9        Par décision du 21 septembre 2020, le secrétaire général du Parlement a tout d’abord rejeté la demande de la requérante d’être entendue oralement. Il a ensuite estimé que, pour la période allant du 4 décembre 2014 au 31 décembre 2015, à l’exclusion des 9 juillet et 14 décembre 2015, un montant de 87 203,46 euros avait été indûment versé à la requérante au titre de l’assistance parlementaire et devait être recouvré auprès de celle-ci et a chargé l’ordonnateur délégué compétent du Parlement de procéder au recouvrement en cause (ci-après la « décision attaquée »).

10      Le 22 octobre 2020, le directeur général de la direction générale (DG) « Finances » du Parlement, en qualité d’ordonnateur délégué du Parlement, a émis la note de débit no 7000001577, ordonnant le recouvrement de la somme de 87 203,46 euros et invitant la requérante à payer ce montant au plus tard le 22 décembre 2020 (ci-après la « note de débit »).

11      Le 23 octobre 2020, le directeur général de la DG « Finances » du Parlement a communiqué à la requérante la décision attaquée et la note de débit.

II.    Procédure et conclusions des parties

12      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 16 décembre 2020, la requérante a introduit le présent recours.

13      Le 24 mars 2021, le Parlement a déposé un mémoire en défense.

14      Le 31 mars 2021, en application des dispositions de l’article 83, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé qu’un deuxième échange de mémoires n’était pas nécessaire.

15      Le 14 avril 2021, à la demande de la requérante, le Tribunal (cinquième chambre) a, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, invité le Parlement à fournir des documents et des précisions complémentaires. Par lettre du 28 avril 2021, le Parlement a communiqué ces éléments au Tribunal. Par lettre du 26 mai 2021, la requérante a fait part de sa position sur ces éléments.

16      Le Tribunal (cinquième chambre) a décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, de statuer sans phase orale de la procédure.

17      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler la note de débit ;

–        condamner le Parlement aux dépens.

18      Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

III. En droit

19      À l’appui du recours, la requérante soulève trois moyens. Le premier moyen est tiré, par la voie de l’exception, de l’illégalité de l’article 33, paragraphes 1 et 2, des mesures d’application. Le deuxième moyen est tiré d’une violation d’une forme substantielle et des droits de la défense. Le troisième moyen est tiré, en substance, d’erreurs de fait.

A.      Sur le premier moyen, tiré, par la voie de l’exception, de l’illégalité de l’article 33, paragraphes 1 et 2, des mesures d’application

20      La requérante invoque l’illégalité de l’article 33, paragraphes 1 et 2, des mesures d’application (ci-après les « dispositions en cause »), en ce que ces dispositions violeraient les principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime.

21      En premier lieu, les dispositions en cause manqueraient de clarté et de précision. En effet, elles ne définiraient pas la notion d’« assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat » et ne préciseraient pas les activités qu’un assistant parlementaire peut exercer, ni le type de travail (législatif, administratif, politique, relationnel) qu’il peut effectuer. Lesdites dispositions ne seraient claires que concernant l’interdiction qu’elles édictent, celle de couvrir des « frais liés à la sphère privée des députés ». Ces dispositions n’imposeraient en outre pas d’obligation explicite de constituer et de conserver des preuves du travail d’un assistant parlementaire et ne préciseraient ni le délai de conservation de celles-ci, ni la forme et la nature des preuves acceptables. Cela aurait été confirmé par le Tribunal dans ses arrêts du 29 novembre 2017, Montel/Parlement (T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848, point 122), et du 7 mars 2018, Gollnisch/Parlement (T‑624/16, non publié, EU:T:2018:121, point 111), et reconnu par le Parlement lui-même dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 16 mai 2018, Troszczynski/Parlement (T‑626/16, non publié, EU:T:2018:270), comme il en aurait été pris acte dans le procès-verbal d’audience du 1er février 2018 dans cette affaire.

22      La requérante fait en outre valoir que l’article 62 des mesures d’application ne précise pas davantage ce que sont les activités liées à l’exercice du mandat et se limite à interdire l’usage des fonds pour couvrir des frais personnels ou financer des subventions ou dons à caractère politique. L’article 43, sous a), desdites mesures étendrait cette interdiction au financement des contrats établis avec des groupes politiques du Parlement ou des partis politiques. La requérante avance enfin que, à son entrée au Parlement dans le courant du mois de juin 2014, aucune précision complémentaire ne lui a été apportée sur ce qu’il fallait entendre par « assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat », sur le contrôle de l’assistance parlementaire, sur la nature des preuves de travail et leur conservation. À la lumière de ce qui précède, elle estime que la situation est de nature à faire naître une attente légitime dans l’esprit d’un député, qui pourrait considérer que la seule interdiction est celle de « couvrir les frais liés à la sphère privée des députés » et que « l’assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat » lui laisse le soin de choisir, dans le cadre de son mandat, l’activité qu’il entend confier à ses assistants, en fonction de ses propres responsabilités et de l’environnement politique qui est le sien.

23      En deuxième lieu, la requérante soutient que le Parlement a manqué de diligence en laissant subsister durant de nombreuses années des imprécisions et des lacunes importantes quant à la notion d’« assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat », quant aux obligations des députés de constituer et de conserver un dossier de preuves du travail de leurs assistants parlementaires et quant à la procédure à suivre dans le cadre de l’article 68 des mesures d’application. L’imprécision initiale et le caractère lacunaire des mesures d’application ainsi que le manque de diligence du Parlement seraient d’ailleurs confirmés par la décision du bureau du Parlement du 26 octobre 2015 modifiant les mesures d’application du statut des députés au Parlement (JO 2015, C 397, p. 2, ci-après la « décision du bureau de 2015 »), dont l’objet aurait été de clarifier certaines dispositions et de combler des lacunes. En outre, la notion d’« assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat parlementaire » n’aurait été précisée que récemment, dans une brochure éditée par le Parlement à la fin de l’année 2018 et destinée aux assistants accrédités. L’imprécision initiale des mesures d’application et leur clarification tardive attesteraient d’un défaut de diligence du Parlement, constitutif d’une atteinte au principe de sécurité juridique, du fait de l’introduction d’éléments d’incertitude et d’un défaut de clarté dans la réglementation applicable.

24      En troisième lieu, la requérante avance que les mesures d’application ne réglementaient pas la procédure de contrôle de l’assistance parlementaire et n’avaient pas formalisé le régime de preuves acceptables, ni fixé les règles de constitution et de conservation des preuves. Le Tribunal se serait ensuite substitué au Parlement pour apporter des spécifications complémentaires dans ses arrêts du 29 novembre 2017, Bilde/Parlement (T‑633/16, non publié, EU:T:2017:849), du 29 novembre 2017, Montel/Parlement (T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848), du 7 mars 2018, Le Pen/Parlement (T‑140/16, non publié, EU:T:2018:122), et du 7 mars 2018, Gollnisch/Parlement (T‑624/16, non publié, EU:T:2018:121), auxquels le secrétaire général du Parlement fait d’ailleurs référence dans la décision attaquée. Ce faisant, le Tribunal n’aurait pas interprété le droit, mais légiféré. Partant, il aurait été porté atteinte à l’intangibilité de l’article 33 des mesures d’application.

25      En quatrième lieu, la requérante allègue que les règles en vigueur ne lui ont pas garanti la prévisibilité des situations et des relations juridiques relevant du droit de l’Union européenne. Elle estime ainsi que l’absence d’intangibilité de la réglementation en matière d’assistance parlementaire entraîne un manque de prévisibilité.

26      Le Parlement conteste l’argumentation de la requérante.

27      Il convient de rappeler que le principe de sécurité juridique fait partie des principes généraux du droit de l’Union et a pour corollaire celui de la protection de la confiance légitime. Ce principe exige, notamment, que les règles de droit soient claires, précises et prévisibles dans leurs effets, en particulier lorsqu’elles peuvent avoir sur les individus et les entreprises des conséquences défavorables (voir arrêt du 11 juin 2015, Berlington Hungary e.a., C‑98/14, EU:C:2015:386, point 77 et jurisprudence citée), afin que les intéressés puissent s’orienter dans des situations et des relations juridiques relevant de l’ordre juridique de l’Union (voir arrêt du 28 février 2019, Alfamicro/Commission, C‑14/18 P, EU:C:2019:159, point 75 et jurisprudence citée).

28      Néanmoins, la portée de la notion de prévisibilité dépend dans une large mesure du contenu du texte dont il s’agit, du domaine qu’il couvre ainsi que du nombre et de la qualité de ses destinataires. La prévisibilité de la loi ne s’oppose pas à ce que la personne concernée soit amenée à recourir à des conseils éclairés pour évaluer, à un degré raisonnable dans les circonstances de la cause, les conséquences pouvant résulter d’un acte déterminé (voir arrêt du 27 novembre 2018, Mouvement pour une Europe des nations et des libertés/Parlement, T‑829/16, EU:T:2018:840, point 69 et jurisprudence citée).

29      En outre, le principe de sécurité juridique ne s’oppose pas à ce que le droit de l’Union attribue un pouvoir d’appréciation à l’administration compétente ou à ce qu’il utilise des notions juridiques indéterminées qui doivent être interprétées et appliquées au cas d’espèce par ladite administration, sans préjudice du contrôle du juge de l’Union (voir arrêt du 27 novembre 2018, Mouvement pour une Europe des nations et des libertés/Parlement, T‑829/16, EU:T:2018:840, point 70 et jurisprudence citée).

30      Par ailleurs, les exigences du principe de sécurité juridique ne sauraient être comprises comme imposant qu’une norme utilisant une notion juridique indéterminée mentionne les différentes hypothèses concrètes dans lesquelles elle est susceptible de s’appliquer, dans la mesure où toutes ces hypothèses ne peuvent pas être déterminées à l’avance par le législateur (voir arrêt du 27 novembre 2018, Mouvement pour une Europe des nations et des libertés/Parlement, T‑829/16, EU:T:2018:840, point 71 et jurisprudence citée).

31      Enfin, s’agissant du principe de protection de la confiance légitime, il doit être rappelé que, selon une jurisprudence constante, le droit de se prévaloir de ce principe appartient à tout justiciable à l’égard duquel une institution de l’Union, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître à son égard des espérances fondées. Constituent de telles assurances, quelle que soit la forme sous laquelle ils sont communiqués, des renseignements précis, inconditionnels et concordants. En revanche, nul ne peut invoquer une violation de ce principe en l’absence desdites assurances (voir arrêt du 13 septembre 2017, Pappalardo e.a./Commission, C‑350/16 P, EU:C:2017:672, point 39 et jurisprudence citée).

32      C’est à l’aune de ces considérations qu’il convient d’examiner si les griefs avancés par la requérante permettent de considérer que les dispositions en cause enfreignent les principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime.

1.      Sur l’absence alléguée de clarté et de précision des dispositions en cause

33      S’agissant des dispositions pertinentes en l’espèce, il convient, tout d’abord, de rappeler que l’article 33, paragraphe 1, seconde phrase, des mesures d’application, intitulé « Prise en charge des frais d’assistance parlementaire », dispose que le Parlement prend en charge les frais effectivement engagés et résultant entièrement et exclusivement de l’engagement d’un ou de plusieurs assistants. L’article 33, paragraphe 2, desdites mesures précise que seuls peuvent être pris en charge les frais correspondant à l’assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat parlementaire des députés, ces dépenses ne pouvant en aucun cas couvrir des frais liés à la sphère privée des députés.

34      Ensuite, en ce qui concerne l’utilisation des fonds, l’article 62, paragraphe 1, des mesures d’application, intitulé « Principe de l’utilisation des fonds », précise que les montants versés en vertu desdites mesures, sur la base des dispositions de son titre I, chapitres 4, 5 et 6, sont exclusivement réservés au financement d’activités liées à l’exercice du mandat des députés et ne peuvent couvrir des frais personnels ou financer des subventions ou dons à caractère politique. En outre, l’article 43 desdites mesures, intitulé « Frais non remboursables », dispose, sous a), que les sommes versées en application du chapitre 5 de celles-ci, relatif à l’assistance de collaborateurs personnels, ne peuvent servir directement ou indirectement à financer des contrats établis avec des groupes politiques du Parlement ou des partis politiques.

35      Enfin, l’article 68, paragraphe 1, des mesures d’application, intitulé « Répétition de l’indu », prévoit que toute somme indûment versée en application desdites mesures donne lieu à répétition et que le secrétaire général du Parlement donne des instructions en vue du recouvrement de ces sommes auprès du député concerné. L’article 68, paragraphe 2, des mesures d’application énonce que toute décision en matière de recouvrement est prise en veillant à l’exercice effectif du mandat du député et au bon fonctionnement du Parlement, le député concerné ayant été entendu préalablement par le secrétaire général du Parlement.

36      Force est dès lors de constater que, d’une part, l’article 33 des mesures d’application énonce clairement et avec précision l’obligation pour le Parlement de prendre en charge les frais d’assistance parlementaire et les conditions de celle-ci. Il découle en particulier de cet article qu’il ne s’agit que des frais « effectivement engagés », « résultant entièrement et exclusivement de l’engagement » d’assistants et correspondant « à l’assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat ». L’article 62, paragraphe 1, et l’article 43, sous a), des mesures d’application confirment ces deux conditions de nécessité et de lien direct. D’autre part, l’article 68 desdites mesures établit avec précision et clarté l’obligation pour le Parlement de récupérer les sommes indûment versées en vertu des mesures d’application ainsi que les conditions entourant cette obligation. Il en ressort notamment que c’est le secrétaire général du Parlement qui est compétent pour décider de cette récupération et que le député concerné doit être entendu préalablement à celle-ci.

37      Certes, premièrement, comme la requérante l’indique, et comme le Tribunal a effectivement déjà eu l’occasion de le constater, les dispositions en cause n’imposent pas d’obligation explicite de constituer et de conserver des preuves du travail d’un assistant parlementaire (voir, en ce sens, arrêts du 29 novembre 2017, Montel/Parlement, T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848, point 122 ; du 29 novembre 2017, Bilde/Parlement, T‑633/16, non publié, EU:T:2017:849, point 118, et du 16 mai 2018, Troszczynski/Parlement, T‑626/16, non publié, EU:T:2018:270, point 118). Toutefois, il résulte de la logique de l’article 33 des mesures d’application ainsi que de l’économie générale de celles-ci qu’il appartient aux députés qui demandent la prise en charge financière de leurs frais d’assistance parlementaire de prouver qu’ils satisfont aux conditions posées par cet article (voir, en ce sens, ordonnances du 28 novembre 2018, Le Pen/Parlement, C‑303/18 P, non publiée, EU:C:2018:962, point 67, et du 21 mars 2019, Gollnisch/Parlement, C‑330/18 P, non publiée, EU:C:2019:240, point 88).

38      Ainsi, la jurisprudence a considéré que, dans l’hypothèse d’un contrôle ayant trait à l’utilisation des frais d’assistance parlementaire, le député concerné devait être en mesure de prouver que les montants perçus avaient été utilisés afin de couvrir les dépenses effectivement engagées et résultant entièrement et exclusivement de l’engagement d’un ou de plusieurs assistants, comme le prévoit l’article 33, paragraphe 1, seconde phrase, des mesures d’application (voir, en ce sens, ordonnances du 21 mars 2019, Gollnisch/Parlement, C‑330/18 P, non publiée, EU:C:2019:240, point 90 et jurisprudence citée, et du 21 mai 2019, Le Pen/Parlement, C‑525/18 P, non publiée, EU:C:2019:435, point 98). À ce titre, la jurisprudence a également précisé qu’il devait notamment pouvoir produire des pièces justifiant d’une utilisation conforme aux mesures d’application, de sorte qu’il lui incombait de les conserver, et ce même en l’absence de disposition du droit de l’Union explicite imposant de conserver les traces de la relation de travail entre le député et son assistant (voir, en ce sens, arrêts du 29 novembre 2017, Montel/Parlement, T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848, point 122 ; du 7 mars 2018, Gollnisch/Parlement, T‑624/16, non publié, EU:T:2018:121, point 111 ; du 7 mars 2018, Le Pen/Parlement, T‑140/16, non publié, EU:T:2018:122, point 65 et jurisprudence citée).

39      Partant, il convient de rejeter l’argument selon lequel les dispositions en cause manqueraient de clarté et de précision en ce qu’elles n’imposeraient pas d’obligation de constituer et de conserver des preuves de travail d’un assistant parlementaire, ni ne fixeraient de délai de conservation des éléments de preuve en cause.

40      Deuxièmement, quant à l’allégation selon laquelle les mesures d’application ne précisent ni la nature du travail d’assistance parlementaire, ni la forme ou la nature des preuves de travail acceptables, il y a lieu de relever, en premier lieu, que, s’agissant de la nature du travail d’assistance parlementaire, les dispositions en cause définissent ce travail en précisant que les frais d’assistance parlementaire pouvant être pris en charge sont ceux « résultant entièrement et exclusivement de l’engagement » d’assistants et correspondant « à l’assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat ». Cette définition est suffisamment précise, en ce qu’elle comporte les principes généraux qui doivent guider les députés dans le choix du travail à confier à leurs assistants parlementaires. L’article 62, paragraphe 1, des mesures d’application confirme que les fonds versés sont exclusivement réservés « au financement d’activités liées à l’exercice du mandat des députés » et précise qu’ils ne peuvent couvrir des frais personnels ou financer des subventions ou dons à caractère politique. L’article 43, sous a), desdites mesures spécifie que les sommes versées aux députés ne peuvent servir directement ou indirectement à financer des contrats établis avec des groupes politiques du Parlement ou des partis politiques.

41      Ainsi, une interprétation téléologique de l’article 33, paragraphe 2, combiné à l’article 62 et à l’article 43, sous a), des mesures d’application conduit à considérer que ledit article 33, paragraphe 2, doit être interprété en ce sens que, si, conformément à sa seconde phrase, les frais d’assistance parlementaire ne peuvent en aucun cas couvrir des frais liés à la sphère privée des députés, il ne saurait en être déduit que ces derniers frais seraient les seuls à ne pas se rattacher nécessairement et directement à l’exercice du mandat, de sorte que les dépenses résultant de la participation de l’assistant parlementaire à toutes les activités publiques du député seraient éligibles. Il est, en effet, indispensable que l’activité de l’assistant parlementaire ait un lien direct et nécessaire avec l’exercice du mandat (voir, en ce sens, arrêt du 19 juin 2018, Le Pen/Parlement, T‑86/17, non publié, EU:T:2018:357, point 110), ce qui ne paraît pas pouvoir être le cas s’agissant des frais liés à des activités de nature politique réalisées par le député européen dans le cadre d’autres mandats ou fonctions qu’il assumerait au niveau national.

42      Par ailleurs, dans le mémoire en défense, le Parlement fait valoir qu’une liste des dépenses pouvant être prises en charge dans le cadre de l’assistance parlementaire, adoptée par le bureau du Parlement le 5 juillet 2010 et mise à la disposition des députés en début de législature, précise la notion d’assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat de député européen. Cette liste prévoit notamment que sont irrecevables les dépenses ayant trait à toute tâche en rapport avec un sujet sans lien avec l’activité parlementaire du député européen. À la demande de la requérante, le Tribunal a invité le Parlement à préciser le statut de cette liste et les circonstances de sa communication aux députés. Force est de constater, à la lumière des documents fournis par le Parlement, que ladite liste a bien été adoptée par le bureau du Parlement lors de sa réunion du 5 juillet 2010. Certes, le Parlement n’a pas établi que cette liste aurait été communiquée à la requérante en début de législature ou que celle-ci en aurait eu connaissance. Cependant, en tout état de cause, peu importe en l’espèce que la requérante ait ou non eu connaissance de ladite liste, dans la mesure où elle a été en mesure de préciser, dans le contrat d’engagement, les tâches assignées à l’assistant parlementaire.

43      Il doit être ainsi constaté que les termes des dispositions en cause sont suffisamment précis et clairs afin de définir les limites de l’obligation de prise en charge des frais d’assistance parlementaire par le Parlement.

44      En second lieu, s’agissant des preuves de travail acceptables, il doit être considéré que, faute d’indication contraire, la preuve que la demande de prise en charge financière satisfait aux conditions posées par les mesures d’application est libre (voir, en ce sens, ordonnance du 21 mars 2019, Gollnisch/Parlement, C‑330/18 P, non publiée, EU:C:2019:240, point 100). Il n’était dès lors pas nécessaire que les mesures d’application spécifient la forme ou la nature des preuves recevables.

45      Troisièmement, si, comme la requérante le soutient, les mesures d’application ne prévoient pas le détail de la procédure de contrôle, il n’en demeure pas moins que l’article 68 de celles-ci donne compétence au secrétaire général du Parlement pour prendre des décisions relatives à la récupération des sommes indûment versées, en application desdites mesures, à un député. Il prévoit également que le député concerné doit être entendu et que, en adoptant sa décision, le secrétaire général du Parlement doit veiller à l’exercice effectif du mandat du député et au bon fonctionnement du Parlement. De plus, l’article 72, paragraphes 2 et 3, des mesures d’application prévoit que, en cas de désaccord avec la décision dudit secrétaire général, le député concerné peut s’adresser aux questeurs puis, en cas de désaccord avec la décision de ces derniers, au bureau du Parlement. Partant, il convient de considérer que la procédure de contrôle établie par l’article 68 des mesures d’application est suffisamment claire et précise.

46      Il résulte de ce qui précède que le grief selon lequel les dispositions en cause manquent de précision et de clarté doit être rejeté.

2.      Sur le prétendu défaut de diligence du Parlement pour clarifier les dispositions en cause

47      Le principe de sécurité juridique impose que, lorsqu’une institution a créé, en méconnaissance du devoir de diligence qui lui incombe, une situation de caractère équivoque, du fait de l’introduction d’éléments d’incertitude et d’un défaut de clarté dans la réglementation applicable, il lui appartient de clarifier ladite situation (voir, en ce sens, arrêts du 9 juillet 1970, Commission/France, 26/69, EU:C:1970:67, points 28 à 32, et du 22 avril 2016, France/Commission, T‑56/06 RENV II, EU:T:2016:228, point 47).

48      En l’espèce, il ne saurait être reproché au Parlement d’avoir manqué à son devoir de diligence en ne clarifiant pas la situation applicable. En effet, ainsi qu’il découle de ce qui précède, les dispositions en cause ne manquent ni de précision ni de clarté (voir point 46 ci-dessus). Ainsi, l’assistance parlementaire dont les frais peuvent être pris en charge est bien définie par les mesures d’application. De même, l’obligation, pour un député demandant une prise en charge des frais d’assistance parlementaire, de prouver qu’il satisfait aux conditions posées par l’article 33 des mesures d’application découle de la logique de cet article ainsi que de l’économie générale desdites mesures (voir point 36 ci-dessus). Par ailleurs, l’obligation de pouvoir produire des pièces justifiant d’une utilisation conforme aux contrats conclus avec des assistants parlementaires a été constatée par le juge de l’Union dès l’arrêt du 22 décembre 2005, Gorostiaga Atxalandabaso/Parlement (T‑146/04, EU:T:2005:584). La procédure de recouvrement est également encadrée à suffisance par les articles 68 et 72 des mesures d’application. Dans ces conditions, il convient d’écarter l’argument par lequel la requérante soutient que le Parlement n’a pas, dès l’origine, défini ce qui constituait l’assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat, ni édicté d’obligation pour le député de constituer et de conserver un dossier de preuve de travail de ses assistants parlementaires et établi un cadre réglementaire, dont le député serait avisé en début de mandat, ni arrêté une procédure précise devant le secrétaire général du Parlement dans le cadre de l’article 68 des mesures d’application.

49      Partant, il y a également lieu de rejeter l’argument de la requérante selon lequel, en adoptant la décision du bureau de 2015 et en éditant, à la fin de l’année 2018, une brochure à destination des assistants accrédités, le Parlement aurait tardivement clarifié une réglementation qui aurait comporté depuis son adoption des imprécisions et des lacunes importantes, manquant ainsi à son devoir de diligence et portant atteinte au principe de sécurité juridique. En effet, il ressort de l’examen du dispositif de la décision du bureau de 2015 qu’elle n’a pas modifié les dispositions en cause. En outre, concernant la brochure éditée par le Parlement en 2018 et qui, selon la requérante, aurait précisé la notion d’assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat parlementaire, il suffit de constater qu’il ne s’agit que d’un document informatif émanant de la DG « Personnel » du Parlement, destiné aux assistants parlementaires accrédités, et non aux députés, et que, s’il doit être lu à la lumière des dispositions applicables, en particulier des dispositions en cause, il ne saurait constituer un acte ayant précisé lesdites mesures.

50      Il s’ensuit que le grief concernant un prétendu défaut de diligence du Parlement pour clarifier les dispositions en cause doit être rejeté.

3.      Sur la prétendueabsence d’intangibilité des dispositions en cause et l’absence alléguée de garantie de la prévisibilité des situations et des relations juridiques

51      Il convient de rappeler que le principe de sécurité juridique vise à garantir la prévisibilité des situations et des relations juridiques relevant du droit de l’Union. À cette fin, il est essentiel que les institutions respectent l’intangibilité des actes qu’elles ont adoptés et qui affectent la situation juridique et matérielle des sujets de droit, de sorte qu’elles ne pourront modifier ces actes que dans le respect des règles de compétence et de procédure (voir arrêt du 4 mai 2016, Andres e.a./BCE, T‑129/14 P, EU:T:2016:267, point 35 et jurisprudence citée).

52      En l’espèce, force est de constater, d’une part, que les dispositions en cause n’ont pas fait l’objet de modification pendant la période concernée par la décision attaquée, comme il est établi au point 49 ci-dessus.

53      À cet égard, il convient aussi de souligner que, bien que l’article 14 de la réglementation concernant les frais et indemnités des députés au Parlement européen, qui était auparavant d’application, ait un libellé différent des dispositions en cause, ledit article 14 mettait déjà en place un système de prise en charge des frais d’assistance parlementaire suivant lequel la charge de la preuve incombait au député. Partant, les arrêts du 22 décembre 2005, Gorostiaga Atxalandabaso/Parlement (T‑146/04, EU:T:2005:584), du 24 mars 2011, Dover/Parlement (T‑149/09, non publié, EU:T:2011:119), et du 10 octobre 2014, Marchiani/Parlement (T‑479/13, non publié, EU:T:2014:866), bien qu’ils portent sur la réglementation précédemment applicable, demeurent pertinents sous le régime actuel des mesures d’application, contrairement à ce qu’affirme la requérante, dès lors qu’ils confirment que la charge de la preuve d’une utilisation régulière des montants perçus à titre de remboursement des frais d’assistance incombe au député.

54      D’autre part, c’est à tort que la requérante prétend que, en interprétant les dispositions en cause, le juge de l’Union aurait légiféré. En effet, l’interprétation que le juge de l’Union donne d’une règle du droit de l’Union éclaire et précise, si besoin est, la signification et la portée de cette règle, telle qu’elle doit ou aurait dû être comprise et appliquée depuis le moment de sa mise en vigueur. Il en résulte que la règle ainsi interprétée peut et doit être appliquée même à des rapports juridiques nés et constitués avant l’arrêt du juge de l’Union, si, par ailleurs, les conditions permettant de porter devant les juridictions compétentes un litige relatif à l’application de ladite règle se trouvent réunies (voir, en ce sens, arrêts du 12 novembre 2020, Gollnisch/Parlement, C‑676/19 P, non publié, EU:C:2020:916, point 48 et jurisprudence citée, et du 12 juillet 2011, Commission/Q, T‑80/09 P, EU:T:2011:347, point 164). Il ne saurait dès lors être considéré, comme le soutient en substance la requérante, que, en interprétant les dispositions en cause, le juge de l’Union se serait substitué au Parlement et aurait fait œuvre législative.

55      Il s’ensuit que le grief relatif à l’absence d’intangibilité des dispositions en cause et, partant, celui pris de ce que les règles en vigueur n’auraient pas garanti à la requérante la prévisibilité des situations et des relations juridiques doivent être écartés. Par voie de conséquence, doivent être rejetés l’illégalité desdites dispositions, invoquée par la voie de l’exception, et le premier moyen dans son intégralité.

B.      Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation d’une forme substantielle et des droits de la défense

56      La requérante fait valoir que le Parlement a violé une forme substantielle et ses droits de la défense. Elle reproche au Parlement de l’avoir simplement entendue dans le cadre d’une procédure écrite et de ne pas l’avoir auditionnée, malgré la demande qu’elle a faite en ce sens dans son courriel du 6 juin 2020, alors que le Parlement a auditionné des élus dans des procédures de recouvrement antérieures. Elle aurait ainsi été privée de l’opportunité de répondre de vive voix aux objections du Parlement et, dans ce cadre, de fournir, si nécessaire, des pièces.

57      Le Parlement conteste l’argumentation de la requérante.

58      Selon une jurisprudence constante, le respect des droits de la défense, dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci, constitue un principe fondamental du droit de l’Union et exige que la personne concernée soit mise en mesure de faire connaître utilement son point de vue au sujet des éléments qui pourraient être retenus à sa charge dans l’acte à intervenir (voir ordonnance du 21 mars 2019, Gollnisch/Parlement, C‑330/18 P, non publiée, EU:C:2019:240, point 59 et jurisprudence citée).

59      Toutefois, le droit d’être entendu n’implique pas nécessairement l’obligation de mettre la personne intéressée en mesure de s’exprimer oralement (voir ordonnance du 21 mars 2019, Gollnisch/Parlement, C‑330/18 P, non publiée, EU:C:2019:240, point 60 et jurisprudence citée).

60      Partant, le droit d’être entendu dont bénéficie le député concerné, en particulier en vertu de l’article 68, paragraphe 2, des mesures d’application, exige qu’il doive pouvoir faire connaître utilement son point de vue au secrétaire général du Parlement avant l’adoption d’une éventuelle décision de recouvrement, cette obligation étant respectée en mettant ce député en mesure de présenter ses observations à cet égard par écrit ou par oral (arrêt du 7 mars 2018, Gollnisch/Parlement, T‑624/16, non publié, EU:T:2018:121, point 95).

61      Contrairement à ce que semble suggérer la requérante, l’article 68, paragraphe 2, des mesures d’application ne saurait être interprété comme exigeant que le député soit nécessairement auditionné par le secrétaire général du Parlement (arrêts du 29 novembre 2017, Montel/Parlement, T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848, point 102 ; du 29 novembre 2017, Bilde/Parlement, T‑633/16, non publié, EU:T:2017:849, point 98, et du 28 novembre 2018, Le Pen/Parlement, T‑161/17, non publié, EU:T:2018:848, point 78).

62      En l’espèce, il n’est pas contesté que, le 11 mars 2020, le secrétaire général du Parlement a informé la requérante de l’ouverture d’une procédure de recouvrement sur le fondement de l’article 68 des mesures d’application et l’a invitée à présenter ses observations. Il est également constant que la requérante a donné suite à cette invitation et a communiqué au Parlement, par courriel du 6 juin 2020, ses observations ainsi qu’un dossier de 64 pièces.

63      Dans ces conditions, force est de constater que la requérante a été valablement mise en mesure de faire valoir son point de vue.

64      Cette conclusion n’est pas remise en cause par le fait que, dans la jurisprudence, il a été reconnu que des circonstances particulières pouvaient rendre nécessaire l’audition du député concerné (voir, en ce sens, ordonnances du 21 mars 2019, Gollnisch/Parlement, C‑330/18 P, non publiée, EU:C:2019:240, point 61, et du 7 novembre 2019, Le Pen/Parlement, C‑38/19 P, non publiée, EU:C:2019:952, point 42 et jurisprudence citée).

65      À cet égard, force est de constater que la requérante n’avance aucun élément susceptible de constituer un indice permettant, conformément à la jurisprudence citée au point 64 ci-dessus, de constituer une circonstance particulière justifiant son audition.

66      Les appréciations qui précèdent ne sont pas non plus remises en cause par le fait que, dans le cadre d’autres procédures ayant conduit au recouvrement auprès de députés de sommes indûment versées, le secrétaire général du Parlement a procédé à une audition desdits députés. En effet, ainsi qu’il ressort de ce qui précède, le droit d’être entendu peut être respecté tant par une audition de la personne concernée que par la possibilité qui lui est offerte de présenter des observations écrites (voir, en ce sens, arrêts du 29 novembre 2017, Bilde/Parlement, T‑633/16, non publié, EU:T:2017:849, point 104 ; du 19 juin 2018, Le Pen/Parlement, T‑86/17, non publié, EU:T:2018:357, point 102, et du 28 novembre 2018, Le Pen/Parlement, T‑161/17, non publié, EU:T:2018:848, point 84).

67      Il résulte de tout ce qui précède que le deuxième moyen doit être rejeté.

C.      Sur le troisième moyen, tiré, en substance, d’erreurs de fait

1.      Sur la recevabilité

a)      Sur la recevabilité du troisième moyen

68      Le Parlement fait valoir que, si la requête comporte un chapitre IV, séparé des chapitres consacrés aux autres moyens de droit et intitulé « La preuve du travail conforme à l’article 33 des MASD et à la jurisprudence est rapportée », la requérante n’indique pas le moyen de droit sur lequel elle entend se fonder, de sorte que la requête ne serait pas conforme à l’article 76, sous d), du règlement de procédure.

69      À cet égard, force est de constater qu’il ressort sans ambiguïté de la requête que, par son argumentation, la requérante invoque des erreurs qu’aurait commises le secrétaire général du Parlement en examinant les éléments qui lui avaient été soumis et qu’elle expose les motifs pour lesquels elle considère que ces éléments constituent des preuves de travail de l’assistant parlementaire.

70      Il peut d’ailleurs être relevé que le Parlement admet, en substance, que la requête ne peut être comprise qu’en ce sens et qu’il a au demeurant pu valablement présenter sa défense.

71      Partant, il convient d’écarter la fin de non-recevoir soulevée par le Parlement.

b)      Sur la recevabilité de certains éléments de preuve

72      Le Parlement fait valoir que l’annexe no 1 de la requête consiste en une liste d’inventaire qui énumère d’autres documents censés prouver la réalité du travail de l’assistant parlementaire, mais qui n’auraient pas été mis à la disposition du Parlement et du Tribunal, et qui n’auraient pas non plus été communiqués en tant que tels au secrétaire général du Parlement préalablement à l’adoption de la décision attaquée. Il soutient dès lors que cette annexe et les documents auxquels elle se réfère devraient être écartés.

73      À cet égard, il convient de préciser que, selon une jurisprudence constante, la légalité d’une décision doit être appréciée par le juge de l’Union en fonction des éléments dont l’institution pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (voir, en ce sens, arrêt du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C‑290/07 P, EU:C:2010:480, point 91, et ordonnance du 3 mars 2016, AgriCapital/OHMI, C‑440/15 P, non publiée, EU:C:2016:144, point 23). Nul ne saurait ainsi se prévaloir devant le juge de l’Union d’éléments de fait qui n’ont pas été avancés au cours de la procédure administrative (voir arrêt du 3 octobre 2017, PM/ECHA, T‑656/16, non publié, EU:T:2017:686, point 36 et jurisprudence citée).

74      L’annexe en cause est intitulée « Liste d’inventaire Enquête OF/2015/0290 – Échantillon de documents traités par [A] encore conservés à Bruxelles [(Belgique)] ». Elle énumère des documents qui ont été remis par la requérante à l’OLAF en 2017 dans le cadre de l’enquête évoquée au point 4 ci-dessus. La requérante soutient que ces documents sont depuis restés en possession de l’OLAF, à Bruxelles. C’est la raison pour laquelle seule cette liste d’inventaire, et non les documents qu’elle énumère, a été communiquée le 6 juin 2020 au secrétaire général du Parlement. Ainsi qu’il ressort de l’annexe de la décision attaquée, celui-ci a qualifié cette liste de document qui ne démontrait pas un travail fourni par l’assistant parlementaire en relation avec le mandat de la requérante et ne l’a pas retenu comme élément de preuve acceptable.

75      Il convient d’observer que l’annexe en cause, à savoir la liste d’inventaire en tant que telle, constitue un élément dont le secrétaire général du Parlement disposait au moment où il a pris la décision attaquée. Partant, cette annexe doit être considérée recevable.

76      Quant aux documents énumérés par la liste d’inventaire, il y a lieu de constater qu’ils ne constituent pas des pièces produites par la requérante et annexées à sa requête. Ces documents n’ont en outre pas été invoqués par la requérante au soutien de l’argumentation développée dans sa requête. Partant, en tant qu’elle concerne ces documents, la fin de non-recevoir soulevée par le Parlement doit également être rejetée.

2.      Sur le fond

77      La requérante soutient, en substance, que la décision attaquée est entachée de plusieurs erreurs de fait.

78      En premier lieu, la requérante rappelle qu’elle a fait le choix d’un certain type d’activités et de travail pour l’assistant parlementaire, couvrant notamment le tri et l’annotation des revues et des courriers reçus, l’achat de la presse, la reprogrammation des téléphones auprès de la direction générale de l’innovation et du support technologique (ITEC), le dépôt de remboursements à la Caisse des membres du Parlement, l’organisation de réunions, de déjeuners ou de conférences, la réservation d’hôtels et de chauffeurs, la réalisation de photocopies et les relations téléphoniques avec le service Club 2000 d’Air France, de Thalys et de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF). Elle fait valoir que les preuves de travail qu’elle fournit sont conformes à cette description du travail et aux exigences de l’article 33 des mesures d’application et de la jurisprudence de la Cour. À cette fin, elle se réfère à la nature de ses propres fonctions aux niveaux national et européen durant la période d’exécution du contrat d’engagement et à la brochure à destination des assistants parlementaires accrédités éditée par le Parlement en 2018. Elle cite aussi à cet effet des extraits du questionnaire de l’OLAF auquel elle a répondu le 27 juin 2018. Ces extraits concernent le respect par l’assistant parlementaire de son obligation statutaire de résidence à Bruxelles, sa présence effective sur son lieu d’affectation et sa prise de congés, l’effectivité de son travail d’assistant parlementaire et ses activités extérieures au cours de la période d’assistance parlementaire.

79      En deuxième lieu, la requérante maintient que le secrétaire général a commis des erreurs dans l’appréciation des périodes de présence de l’assistant parlementaire à Bruxelles et de leur pertinence pour établir la réalisation d’un travail conforme aux exigences de l’article 33 des mesures d’application.

80      La requérante fait valoir, en substance, que les déplacements répétés de l’assistant parlementaire entre Paris et Bruxelles, réalisés à sa demande, et la présence avérée de celui-ci à Bruxelles à quatorze reprises entre le 4 décembre 2014 et le 31 décembre 2015 apportent la preuve d’un travail effectif et continu pour toute la durée du contrat d’engagement.

81      Elle affirme à cet égard que la plupart des tâches attribuées à l’assistant parlementaire étaient exécutables dans les locaux du Parlement, n’ont pas laissé de traces écrites, mais ont présenté un lien direct et nécessaire avec l’exercice du mandat de la requérante.

82      La requérante soutient en outre que les présences de l’assistant parlementaire à Bruxelles et son travail effectif sont dûment établis par plusieurs factures et avoirs relatifs à ses déplacements, les attestations de huit députés européens de nationalité française et un courriel du responsable des ressources humaines du groupe politique « Europe des Nations et des Libertés » à l’époque des faits. Elle estime que c’est abusivement que le secrétaire général du Parlement met en doute la réalité de ces présences physiques. Elle fait en outre valoir que c’est erronément que ledit secrétaire général a estimé que les attestations et le courriel produits ne constituaient pas des preuves directes du travail de l’assistant parlementaire en relation avec le mandat de la requérante.

83      En troisième lieu, la requérante met en avant certains messages électroniques annexés à sa requête, qui établiraient la réalité d’un travail d’assistance parlementaire conforme aux mesures d’application et qui auraient été erronément rejetés par le secrétaire général du Parlement dans la décision attaquée. La requérante en conclut qu’elle apporte effectivement la preuve de la présence de l’assistant parlementaire à ses côtés pendant toute la durée du contrat d’engagement, dans les locaux du Parlement, pour l’accompagner dans ses obligations et remplir diverses fonctions pratiques et administratives. Les messages électroniques produits apporteraient la preuve que l’assistant parlementaire était destinataire des informations nécessaires au bon exercice des activités qui lui étaient confiées, accomplissant les démarches et fournissant les informations demandées par elle.

84      En quatrième lieu, la requérante estime que la période de congés payés pris par l’assistant parlementaire entre le 24 juillet et le 31 août 2015 aurait dû être exclue du champ du recouvrement, conformément à l’arrêt du 29 novembre 2017, Montel/Parlement (T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848, point 122).

85      Le Parlement estime que, lorsqu’il analyse les nombreuses pièces qui lui sont soumises comme preuves d’un travail conforme aux mesures d’application, son secrétaire général est amené à faire des appréciations complexes et que, dès lors, le contrôle exercé par le juge de l’Union sur celles-ci doit être restreint. Par ailleurs, il conteste que son secrétaire général ait commis des erreurs manifestes dans le cadre de son appréciation des éléments fournis par la requérante.

86      Avant d’examiner les arguments avancés par la requérante concernant les appréciations du secrétaire général du Parlement à l’égard des éléments qu’elle a fournis en l’espèce, il convient de déterminer l’intensité du contrôle du juge sur les appréciations portées par le Parlement dans le cadre d’une décision de répétition de l’indu adoptée sur le fondement de l’article 68 des mesures d’application, à l’égard des éléments de preuve produits pour démontrer la réalité du travail d’un assistant parlementaire.

a)      Sur l’intensité du contrôle du juge sur les appréciations portées par le Parlement dans le cadre d’une décision de répétition de l’indu adoptée sur le fondement de l’article 68 des mesures d’application

87      Dans le cadre du contrôle de légalité des actes de l’Union, le juge de l’Union exerce, en principe, un contrôle entier sur la légalité au fond de l’acte, à savoir un contrôle qui porte tant sur les motifs de droit et de fait de l’acte que sur son contenu. Dans ce cas, le juge de l’Union vérifie notamment la validité des appréciations de fait effectuées par l’auteur de l’acte.

88      Toutefois, en cas d’appréciations complexes, les autorités de l’Union disposent, dans certains domaines du droit de l’Union, d’un large pouvoir d’appréciation, de telle sorte que le contrôle du juge de l’Union à l’égard de ces appréciations doit se limiter à examiner si l’exercice d’un tel pouvoir n’est pas entaché d’une erreur manifeste ou d’un détournement de pouvoir ou encore si ces autorités n’ont pas manifestement dépassé les limites de leur pouvoir d’appréciation (arrêt du 28 janvier 2016, Heli-Flight/AESA, C‑61/15 P, non publié, EU:C:2016:59, point 101).

89      Or, il y a lieu de considérer que l’analyse des éléments de preuve produits par un député, dans le cadre d’une procédure mise en œuvre sur le fondement de l’article 68 des mesures d’application, aux fins de démontrer que l’utilisation des sommes versées au titre de l’assistance parlementaire est conforme auxdites mesures, ne nécessite pas de procéder à des appréciations complexes de situations économiques ou de l’exercice des responsabilités politiques attribuées par les traités, dans le cadre desquels le juge de l’Union reconnaît aux institutions un large pouvoir d’appréciation. Il s’agit en effet uniquement pour le Parlement d’apprécier si les éléments produits sont pertinents et d’examiner s’ils démontrent une telle utilisation conforme.

90      Il s’ensuit que, contrairement à ce qu’avance le Parlement, le contrôle du Tribunal sur les appréciations portées par le Parlement dans le cadre d’une décision de répétition de l’indu adoptée sur le fondement de l’article 68 des mesures d’application ne saurait être limité à examiner si ladite décision n’est pas entachée d’une erreur manifeste ou d’un détournement de pouvoir ou si le Parlement n’a pas manifestement dépassé les limites de son pouvoir d’appréciation.

b)      Sur les appréciations du secrétaire général du Parlement à l’égard des éléments fournis

1)      Sur le type de travail demandé à l’assistant parlementaire

91      La requérante fait valoir, à titre général, que le travail qui a été confié à l’assistant parlementaire et les preuves qui en ont été fournies satisfont aux exigences de l’article 33 des mesures d’application et à la jurisprudence de la Cour. Elle fait à cet égard référence à la diversité de ses propres fonctions aux niveaux national et européen, aux précisions apportées par la brochure éditée par le Parlement en 2018 quant aux tâches pouvant être confiées à un assistant parlementaire et au questionnaire de l’OLAF auquel elle a répondu dans le courant du mois de juin 2018, sans toutefois préciser en quoi ces éléments soutiennent son argumentation.

92      Il y a tout d’abord lieu de rappeler que, conformément à l’article 33, paragraphe 2, des mesures d’application, seuls peuvent être pris en charge, comme il est établi aux points 40 et 41 ci-dessus, les frais correspondant à l’assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat parlementaire des députés.

93      Par ailleurs, comme il est établi au point 49 ci-dessus, la brochure éditée par le Parlement en 2018 à destination des assistants parlementaires accrédités est un document purement informatif, qui n’a pas de valeur juridique autonome et qui ne saurait dès lors être utilisé pour compléter ou interpréter l’article 33 des mesures d’application.

94      Il convient également de préciser que les tâches confiées à un assistant parlementaire et les frais d’assistance parlementaire pouvant être pris en charge au titre de l’article 33 des mesures d’application ne sauraient dépendre, comme le laisse entendre la requérante, de la nature et de l’éventuelle diversité de ses propres fonctions. Il est à cet égard complètement indifférent que la requérante assume des fonctions politiques et électives au niveau national. Comme cela a été établi au point 41 ci-dessus, il découle en effet très clairement de l’article 33, paragraphe 2, des mesures d’application que seules des tâches nécessaires et directement liées à l’exercice du mandat de député au Parlement européen peuvent être prises en charge dans le cadre du remboursement des frais d’assistance parlementaire.

95      Enfin, en ce qui concerne le questionnaire auquel la requérante a répondu le 27 juin 2018 dans le cadre de l’enquête menée par l’OLAF, qu’elle invoque dans sa requête, il y a lieu de relever que ce document manque de pertinence en l’espèce. Même si la procédure de recouvrement au terme de laquelle la décision attaquée a été adoptée a bel et bien été lancée à la suite des conclusions de l’enquête de l’OLAF, le secrétaire général du Parlement n’a pris la décision attaquée que sur la base des éléments qui lui ont été directement transmis par la requérante, à l’exclusion de ceux contenus dans le rapport de l’OLAF, tel que le questionnaire qui est invoqué par la requérante. En tout état de cause, ce document et les extraits que la requérante a produit dans la requête ne sont pas de nature à démontrer que l’assistant parlementaire a effectivement réalisé un travail satisfaisant aux exigences de l’article 33 des mesures d’application.

2)      Sur les présences de l’assistant parlementaire à Bruxelles

96      La requérante maintient en substance que les déplacements répétés de l’assistant parlementaire à Bruxelles, tels qu’établis par les factures et les déclarations qu’elle produit, sont de nature à démontrer qu’il lui a prêté, pendant toute la durée du contrat d’engagement, une assistance nécessaire et directement liée à l’exercice de son mandat de députée européenne, conformément à l’article 33, paragraphe 2, des mesures d’application. Elle estime dès lors que le secrétaire général du Parlement a commis une erreur d’appréciation en considérant qu’il n’était pas possible d’admettre les éléments liés à ces déplacements à titre de preuve du travail effectué par l’assistant parlementaire en lien avec le mandat de la requérante.

97      Il convient tout d’abord de préciser que A a été recruté en tant qu’assistant parlementaire accrédité à Bruxelles. Conformément à l’article 20 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne, auquel il était soumis en vertu de l’article 127 du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne, A était tenu, pour la durée du contrat d’engagement, de résider au lieu de son affectation ou à une distance telle de celui-ci qu’il ne soit pas gêné dans l’exercice de ses fonctions. Partant, il ne peut être déduit, comme le suggère la requérante, du seul fait que l’assistant parlementaire se soit rendu à Bruxelles à la demande de la requérante à quatorze reprises au cours des treize mois de sa période d’engagement en qualité d’assistant parlementaire qu’il a réalisé un travail effectif conforme aux mesures d’application pendant toute cette période. Une telle déduction est en outre contradictoire avec l’affirmation de la requérante selon laquelle la plupart des tâches confiées à l’assistant parlementaire étaient exécutables dans les locaux du Parlement par des démarches qui ne laissaient pas de trace écrite. Selon cette affirmation, la présence de l’assistant parlementaire dans les locaux du Parlement aurait en effet été requise, vu les tâches qui lui étaient confiées, de façon nettement plus régulière qu’à l’occasion de quatorze déplacements en l’espace de treize mois.

98      Pour le surplus, il y a lieu de rappeler, comme cela a déjà été établi au point 37 ci-dessus, qu’il ressort de l’économie générale de l’article 33 des mesures d’application qu’il revient au député, dans le cadre du contrôle des frais d’assistance parlementaire, de prouver les tâches réalisées par l’assistant parlementaire et de démontrer leur caractère nécessaire et directement lié à l’exercice de son mandat parlementaire. Ainsi, la seule présence physique de l’assistant parlementaire dans les locaux du Parlement européen, à Bruxelles ou à Strasbourg, durant les jours concernés, même dûment établie, fût-ce à la demande de la requérante, et quelle que soit sa fréquence, ne peut suffire pour établir la réalité de l’exécution de tâches conformes à l’article 33 des mesures d’application (voir, en ce sens, arrêts du 29 novembre 2017, Montel/Parlement, T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848, point 213, et du 19 juin 2018, Le Pen/Parlement, T‑86/17, non publié, EU:T:2018:357, point 115). Il est en effet requis d’établir en outre que, à l’occasion de ces déplacements, des tâches en lien avec l’exercice du mandat parlementaire ont effectivement été réalisées.

99      Or, d’une part, les factures et les avoirs que produit la requérante (pièces nos 10 et 13 à 26) établissent simplement la réalité de déplacements entre Paris et Bruxelles et entre Paris et Strasbourg, mais ne démontrent pas que des tâches liées au mandat de la requérante ont été réalisées à l’occasion de ces déplacements.

100    D’autre part, les déclarations de députés français ayant exercé un mandat au Parlement durant la même législature que la requérante (pièces nos 2 à 8) attestent uniquement de la présence de l’assistant parlementaire aux côtés de la requérante dans les locaux du Parlement et ne font pas état de la réalité d’un travail conforme à l’article 33 des mesures d’application.

101    En revanche, les déclarations contenues dans les pièces nos 9 et 64 concernent non seulement la présence de l’assistant parlementaire à Bruxelles et à Strasbourg, mais traitent également des tâches qu’il effectuait et des fonctions qu’il assumait auprès de la requérante. La pièce no 9 consiste en une déclaration de B, qui était alors responsable des ressources humaines au sein du groupe parlementaire « Europe des Nations et des Libertés », dont faisait partie la requérante lorsque cette dernière déclaration a été rédigée. Elle présente toutefois un caractère vague et ne permet pas de déterminer à suffisance la nature et l’effectivité du travail réalisé par l’assistant parlementaire auprès de la requérante. La pièce no 64 contient une déclaration de C, député français au Parlement européen entre 2014 et 2019. Cette déclaration demeure cependant vague et générale dans la description du travail effectué par l’assistant parlementaire et l’évocation de ses présences aux côtés de la requérante. Il apparaît en outre que la déclaration de C repose en partie sur des témoignages indirects et des informations qui lui ont été rapportées par d’autres députés ou l’assistant parlementaire lui-même. Partant, c’est à bon droit que le secrétaire général du Parlement a décidé d’écarter les pièces nos 9 et 64.

102    À la lumière de ce qui précède, il y a lieu de considérer que le secrétaire général du Parlement n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant que la seule présence physique de l’assistant parlementaire à Bruxelles ou à Strasbourg, dans les locaux du Parlement, ne suffisait pas à établir la réalité de tâches en lien avec le mandat de la requérante conformément à l’article 33 des mesures d’application et en écartant les pièces produites par la requérante en vue d’établir une telle présence.

3)      Sur les messages électroniques

103    La requérante soutient que les différents messages électroniques qu’elle produit en annexe à la requête sont de nature à établir la réalité d’un travail parlementaire conforme à l’article 33 des mesures d’application et que le secrétaire général du Parlement a commis une erreur d’appréciation en les écartant.

104    Il y a lieu de relever que, par son argumentation visant à démontrer la réalité du travail de l’assistant parlementaire, la requérante entend, en substance, remettre en cause les appréciations effectuées par le secrétaire général du Parlement concernant le caractère probant des courriers électroniques qu’elle a produits dans le cadre de la procédure de recouvrement qui a conduit à l’adoption de ladite décision.

105    À cet égard, il convient de relever que, dans la décision attaquée, le secrétaire général du Parlement a considéré que seuls trois des courriers électroniques produits par la requérante étaient acceptables comme éléments de preuve de la prestation effective par l’assistant parlementaire d’une assistance nécessaire et directement liée à l’exercice de son mandat parlementaire, en conformité avec l’article 33 des mesures d’application. Les deux premiers (pièces nos 59 bis et 60) établissaient le transfert à la requérante d’articles de presse relatifs à des sujets économiques, et le troisième (pièce n° 43) concernait le transfert à la requérante d’un tableau kilométrique pour obtenir le remboursement des frais de voyage par les services compétents de l’administration du Parlement. Le secrétaire général du Parlement a rejeté l’ensemble des autres documents au motif, en substance, de leur inaptitude à constituer, en tant que tels, des preuves du travail fourni par l’assistant parlementaire. Il convient de déterminer si, en considérant que ces autres documents produits ne démontraient pas l’existence d’une assistance parlementaire conforme à l’article 33 des mesures d’application, le secrétaire général du Parlement a commis une erreur d’appréciation.

106    Premièrement, plusieurs courriers électroniques (pièces nos 27, 28, 30 à 37, 48, 49, 53 à 55, 57 et 61) concernent des démarches administratives liées à l’entrée en fonction de l’assistant parlementaire, telles que la signature du contrat d’engagement, la mise à disposition de matériel informatique, l’organisation d’une visite médicale ou l’obtention d’un token et d’autres échanges de nature administrative avec les services du Parlement.

107    S’agissant de ces courriels, le secrétaire général du Parlement a estimé qu’il s’agissait d’une série d’éléments qui confirmaient le recrutement et l’encadrement de A en tant qu’assistant parlementaire accrédité de la requérante, mais qu’aucun de ces documents ne démontrait en soi un travail lié au mandat exécuté par A pour le compte de la requérante.

108    Cette appréciation est exempte d’erreur. En effet, lesdits courriers électroniques se limitent à indiquer, en substance, que l’assistant parlementaire a bien entamé l’exécution du contrat d’engagement à Bruxelles et qu’il a ensuite eu des échanges de nature administrative ou pratique avec les divers services de son employeur, le Parlement. En revanche, aucun de ces courriels ne démontre que l’assistant parlementaire a effectivement accompli des tâches nécessaires et directement liées à l’exercice du mandat de députée européenne de la requérante, conformément à l’article 33 des mesures d’application.

109    Deuxièmement, un autre ensemble de courriers électroniques (pièces nos 36, 39, 44 à 46, 59, 59 bis et 60) concerne des échanges entre l’assistant parlementaire et la requérante, dans le cadre desquels il lui transférait des articles de presse. Le secrétaire général du Parlement a accepté les pièces nos 59 bis et 60, qui établissaient le transfert d’articles de presse relatifs à des sujets économiques, en tant que preuves du travail exécuté par l’assistant parlementaire. En revanche, les autres documents n’ont pas été acceptés, au motif qu’ils apparaissaient comme étant liés à des sujets de politique nationale française, en particulier à des questions internes au parti politique français « Front national ».

110     La requérante soutient que la transmission d’articles de presse sur divers sujets politiques, économiques ou autres fait partie du travail demandé à l’assistant parlementaire, de même que, compte tenu des fonctions de la requérante, l’envoi d’informations sur le Front national, et elle fait valoir que ces messages sont la preuve d’un travail de l’assistant parlementaire en relation avec l’exercice de son mandat de députée européenne. Toutefois, il convient de constater qu’aucune argumentation circonstanciée visant à démontrer que l’appréciation du secrétaire général du Parlement serait erronée n’est avancée.

111    En outre, la requérante suggère que toute transmission d’articles de presse liés à l’une de ses fonctions politiques, que ce soit au niveau européen, au niveau national, par exemple comme conseiller municipal et métropolitain à Nice, ou au niveau de son parti, par exemple comme vice-présidente du Front national et membre de son bureau exécutif, de son bureau politique et de sa commission nationale d’investitures, constitue la preuve d’un travail conforme à l’article 33 des mesures d’application. Pourtant, comme cela a été établi aux points 41 et 94 ci-dessus, seules les tâches nécessaires et directement liées à l’exercice du mandat de député au Parlement européen, à l’exclusion de tout autre mandat ou fonction politique, peuvent être prises en charge dans le cadre du remboursement des frais d’assistance parlementaire.

112    Or, force est de constater que, hormis les articles contenus dans les pièces nos 59 bis et 60, les autres articles de presse transférés concernent exclusivement des sujets de politique nationale française et des questions internes au Front national, sans lien évident, ni direct avec le mandat de députée européenne de la requérante. Partant, c’est à bon droit que les courriels opérant la transmission de ces derniers articles ont été écartés par le secrétaire général du Parlement dans la décision attaquée.

113    Troisièmement, plusieurs courriers électroniques (pièces nos 40, 41, 47, 50, 51, 56, 58 et 62) concernent le transfert de titres de transport, notamment de billets de train, entre la requérante et l’assistant parlementaire. Il s’agit essentiellement de courriels par lesquels l’assistant parlementaire transfère à la requérante ses propres titres de transport, relatifs à des déplacements qu’il a lui-même réservés et effectués (pièces nos 40, 41, 50, 51 et 58). Il s’agit également de messages que se sont échangés l’assistant parlementaire et la requérante quant aux modalités précises de leurs déplacements (pièces nos 47, 56 et 62). Le secrétaire général du Parlement a écarté ces documents, estimant qu’ils ne démontraient pas que l’assistant parlementaire avait effectivement fourni une assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat de députée européenne de la requérante. La requérante fait valoir, sans toutefois avancer d’argumentation circonstanciée en ce sens, que le secrétaire général du Parlement a commis une erreur d’appréciation, car ces documents apporteraient la preuve d’un travail en tant qu’assistant parlementaire en relation avec l’exercice de son mandat.

114    Or force est de constater que ces documents indiquent seulement que l’assistant parlementaire a réalisé des démarches en vue de se rendre à plusieurs reprises à Bruxelles et qu’il en a avisé la requérante, sans toutefois établir que ces déplacements ont donné lieu à des activités ou à des tâches liées au mandat de députée européenne de la requérante. Il n’est pas davantage établi que l’assistant parlementaire aurait réalisé des réservations de billets de train pour la requérante en vue de déplacements liés à l’exercice de son mandat de députée européenne. Il y a dès lors lieu de considérer que ces documents ne démontrent pas un travail effectif de l’assistant parlementaire en lien avec le mandat de la requérante. Partant, c’est à bon droit que ces documents ont été écartés par le secrétaire général du Parlement dans la décision attaquée.

115    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le secrétaire général du Parlement n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant que, sauf en ce qui concerne les journées des 9 juillet et 14 décembre 2015, les courriers électroniques produits par la requérante n’apportent pas la preuve, requise par l’article 33, paragraphe 2, des mesures d’application, d’un travail de l’assistant parlementaire nécessaire et directement lié à l’exercice de son mandat durant la période du contrat d’engagement.

4)      Sur la période de congés

116    La requérante fait valoir que c’est à tort que le secrétaire général du Parlement a décidé de ne pas exclure la période de congés payés pris par l’assistant parlementaire entre le 24 juillet et le 31 août 2015 du champ de la procédure de recouvrement. Elle invoque à cet effet l’arrêt du 29 novembre 2017, Montel/Parlement (T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848), lequel serait pertinent dès lors qu’elle estime avoir apporté la preuve d’un travail effectif de l’assistant parlementaire pour toute la durée du contrat d’engagement.

117    Il y a lieu de rappeler que la décision du Tribunal, dans son arrêt du 29 novembre 2017, Montel/Parlement (T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848, point 214), d’exclure une période de congés payés du champ de la décision de recouvrement était subordonnée à l’existence de preuves d’un travail conforme aux mesures d’application pour les périodes antérieures et postérieures à cette période de congés.

118    Or, il découle des points 91 à 115 ci-dessus que c’est à bon droit que le secrétaire général du Parlement a estimé que la preuve d’un travail effectif de l’assistant parlementaire n’était apportée que pour les journées des 9 juillet et 14 décembre 2015, et non pour toute la durée du contrat d’engagement, ni même pour les seules périodes antérieures et postérieures à la période de congés, comme l’a exigé le Tribunal dans son arrêt du 29 novembre 2017, Montel/Parlement (T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848, point 214). Une telle preuve ne saurait suffire pour considérer que les sommes versées à l’assistant parlementaire au cours de ses congés ne peuvent pas faire l’objet d’une récupération. Partant, le secrétaire général du Parlement n’a pas commis d’erreur d’appréciation en n’excluant pas la période de congés du champ de la procédure de recouvrement.

119    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, le troisième moyen doit être rejeté et, partant, le recours dans son intégralité.

IV.    Sur les dépens

120    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

121    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions du Parlement.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Mme Marie-Christine Arnautu supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par le Parlement européen.

Spielmann

Spineanu-Matei

Mastroianni

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 juillet 2021.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

S. Papasavvas


*      Langue de procédure : le français.