Language of document : ECLI:EU:T:2014:678

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

16 juillet 2014(*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises à l’encontre de l’Iran dans le but d’empêcher la prolifération nucléaire – Gel des fonds – Recours en annulation – Entité infra-étatique – Qualité et intérêt pour agir – Recevabilité – Obligation de motivation – Indication et choix de la base juridique – Compétence du Conseil – Principe de prévisibilité des actes de l’Union – Notion d’appui apporté à la prolifération nucléaire – Erreur manifeste d’appréciation – Droits de la défense et droit à une protection juridictionnelle effective – Proportionnalité – Droit de propriété »

Dans l’affaire T‑578/12,

National Iranian Oil Company, établie à Téhéran (Iran), représentée par Me J.‑M. Thouvenin, avocat,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. V. Piessevaux et M. Bishop, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission européenne, représentée par MM. A. Aresu et M. Konstantinidis, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation, d’une part, de la décision 2012/635/PESC du Conseil, du 15 octobre 2012, modifiant la décision 2010/413/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO L 282, p. 58), et, d’autre part, du règlement d’exécution (UE) n° 945/2012 du Conseil, du 15 octobre 2012, mettant en œuvre le règlement (UE) n° 267/2012 concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO L 282, p. 16),

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. M. van der Woude (rapporteur), président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. I. Ulloa Rubio, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 mars 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, National Iranian Oil Company (NIOC), est une entreprise publique iranienne opérant dans le secteur du pétrole brut et du gaz naturel.

2        La présente affaire s’inscrit dans le cadre des mesures restrictives instaurées en vue de faire pression sur la République islamique d’Iran afin que cette dernière mette fin aux activités nucléaires présentant un risque de prolifération et à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires.

3        Le 9 juin 2010, le Conseil de sécurité des Nations unies (ci-après le « Conseil de sécurité ») a adopté la résolution 1929 (2010) (ci-après la « résolution 1929 »), destinée à élargir la portée des mesures restrictives instituées par les résolutions 1737 (2006), 1747 (2007) et 1803 (2008) du Conseil de sécurité et à instaurer des mesures restrictives supplémentaires à l’encontre de la République islamique d’Iran.

4        Le 17 juin 2010, le Conseil européen a souligné qu’il était de plus en plus préoccupé par le programme nucléaire iranien et il s’est félicité de l’adoption de la résolution 1929. Rappelant sa déclaration du 11 décembre 2009, le Conseil européen a invité le Conseil de l’Union européenne à adopter des mesures mettant en œuvre celles prévues dans la résolution 1929 ainsi que des mesures d’accompagnement, en vue de contribuer à répondre, par la voie des négociations, à l’ensemble des préoccupations que continuait de susciter le développement par la République islamique d’Iran de technologies sensibles à l’appui de ses programmes nucléaire et balistique. Ces mesures devaient porter sur le secteur du commerce, le secteur financier, le secteur des transports iraniens et les grands secteurs de l’industrie gazière et pétrolière, ainsi que sur des désignations supplémentaires, en particulier le Corps des gardiens de la révolution islamique

5        Le 26 juillet 2010, le Conseil a adopté la décision 2010/413/PESC, concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant la position commune 2007/140/PESC (JO L 195, p. 39), dont l’annexe II énumère les noms des personnes, et des entités ­– autres que celles désignées par le Conseil de sécurité ou par le comité des sanctions créé par la résolution 1737 (2006), mentionnées à l’annexe I – dont les avoirs sont gelés. Son considérant 22 se réfère à la résolution 1929 et mentionne que cette résolution relève le lien potentiel entre les recettes que l’Iran tire de son secteur de l’énergie et le financement de ses activités nucléaires posant un risque de prolifération.

6        Le 23 janvier 2012, le Conseil a adopté la décision 2012/35/PESC modifiant la décision 2010/413 (JO L 19, p. 22). Selon le considérant 13 de cette décision, les restrictions à l’admission et le gel des fonds et des ressources économiques devraient être appliqués à l’égard d’autres personnes et entités qui fournissent un appui au gouvernement iranien lui permettant de poursuivre des activités nucléaires posant un risque de prolifération ou la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires, en particulier les personnes et entités apportant un soutien financier, logistique ou matériel au gouvernement iranien.

7        L’article 1er, paragraphe 7, sous a), ii), de la décision 2012/35 a ajouté le point suivant à l’article 20, paragraphe 1, de la décision 2010/413, prévoyant le gel des fonds appartenant aux personnes et entités ci-après :

« c) les autres personnes et entités non mentionnées à l’annexe I qui fournissent un appui au gouvernement iranien et les personnes et entités qui leur sont associées, telles qu’énumérées à l’annexe II. »

8        En conséquence, dans le cadre du traité FUE, le Conseil a adopté, le 23 mars 2012, le règlement (UE) n° 267/2012 concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant le règlement (UE) n° 961/2010 (JO L 88, p. 1). En vue de mettre en œuvre l’article 1er, paragraphe 7, sous a), ii), de la décision 2012/35, l’article 23, paragraphe 2, de ce règlement prévoit le gel des fonds des personnes, entités et organismes énumérés à son annexe IX, qui ont été reconnus :

« d) comme étant d’autres personnes, entités ou organismes qui fournissent un appui au gouvernement iranien, notamment un soutien matériel, logistique ou financier, ou qui lui sont associés. »

9        Le 15 octobre 2012, le Conseil a adopté la décision 2012/635/PESC modifiant la décision 2010/413 (JO L 282, p. 58,ci-après la « décision attaquée »). Selon le considérant 16 de cette décision, il convient d’inscrire d’autres noms de personnes et d’entités sur la liste des noms des personnes et entités faisant l’objet de mesures restrictives qui figure à l’annexe II de la décision 2010/413, en particulier les entités détenues par l’État iranien se livrant à des activités dans le secteur du pétrole et du gaz, étant donné qu’elles fournissent une source de revenus substantielle au gouvernement iranien.

10      L’article 1er, paragraphe 8, sous a), de la décision attaquée a modifié l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413, qui prévoit ainsi que feront l’objet de mesures restrictives :

« c) d’autres personnes et entités non mentionnées à l’annexe I qui fournissent un appui au gouvernement iranien et aux entités qui sont leur propriété ou qui sont sous leur contrôle ou les personnes et entités qui leur sont associées, telles qu’énumérées à l’annexe II. »

11      L’article 2 de la décision attaquée a inscrit le nom de la requérante dans le tableau I de l’annexe II de la décision 2010/413 contenant la liste des « Personnes et entités concourant au programme nucléaire ou de missiles balistiques et des personnes et entités appuyant le gouvernement de l’Iran » .

12      En conséquence, le même jour, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) n° 945/2012 mettant en œuvre le règlement n° 267/2012 (JO L 282, p. 16,ci-après le « règlement attaqué »). L’article 1er du règlement attaqué a inscrit le nom de la requérante dans le tableau de l’annexe IX du règlement n° 267/2012 contenant la liste des « Personnes et entités concourant au programme nucléaire ou de missiles balistiques et [des] personnes et entités appuyant le gouvernement de l’Iran ».

13      Le nom de la requérante a été inscrit sur les listes en cause par la décision et le règlement attaqués (ci-après, pris ensemble, les « actes attaqués ») aux motifs suivants :

« Entité détenue et gérée par l’État qui fournit des ressources financières au gouvernement iranien. Le ministre du Pétrole est directeur du conseil d’administration de la NIOC et le ministre adjoint du Pétrole est le directeur général de la NIOC. »

14      Les actes attaqués ont été communiqués à la requérante par lettre du 16 octobre 2012 dans laquelle le Conseil a attiré son attention sur la possibilité de présenter des observations et de lui demander de revoir sa position.

15      Par lettre datée du 26 décembre 2012, la requérante a contesté l’inscription de son nom sur les listes en cause par les actes attaqués et a demandé au Conseil de revoir sa position. En outre, elle lui a également demandé de lui communiquer l’ensemble du dossier sur la base duquel les actes attaqués avaient été adoptés, y compris les preuves sur lesquelles il s’était fondé, ainsi que l’identité du ou des États membres qui avaient proposé cette inscription.

16      Le Conseil a répondu par une lettre du 12 mars 2013 à laquelle les pièces suivantes ont été annexées :

–        les propositions présentées par quatre États membres d’inscrire le nom de la requérante sur les listes en cause ;

–        le compte rendu de la réunion du groupe de travail « COMEM » (Moyen-Orient/Golfe) du 9 octobre 2012 ;

–        les notes des 11 et 12 octobre 2012 du secrétariat général du Conseil au Comité des représentants permanents (Coreper)/Conseil et du 12 octobre 2012 du Coreper au Conseil.

17      Dans cette lettre du 12 mars 2013, le Conseil a précisé qu’il ne détenait pas d’autres documents ou informations concernant la requérante. Il a ajouté que l’identité des États membres ayant proposé d’inscrire le nom de la requérante sur les listes en cause était confidentielle et ne pouvait dès lors pas être divulguée, mais que la décision de l’inscrire avait été prise à l’unanimité des membres du Conseil.

 Procédure et conclusions des parties

18      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 décembre 2012, la requérante a introduit le présent recours.

19      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 24 avril 2013, la Commission européenne a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions du Conseil. Par ordonnance du 24 juin 2013, le président de la quatrième chambre a fait droit à cette demande.

20      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la septième chambre à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

21      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les actes attaqués, dans la mesure où ils la concernent ;

–        déclarer le règlement n° 267/2012 inapplicable à son égard ;

–        déclarer la décision attaquée inapplicable à son égard ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

22      Lors de l’audience, la requérante a invoqué à titre subsidiaire un nouveau chef de conclusions, selon lequel les actes contestés doivent, en tout état de cause, être annulés à partir du 20 janvier 2014.

23      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme non fondé, en ce compris le nouveau chef de conclusions invoqué lors de l’audience ;

–        condamner la requérante aux dépens.

24      La Commission, déclarant s’aligner sur les conclusions du Conseil, demande au Tribunal de rejeter le recours comme non fondé dans son ensemble. 

 Sur la recevabilité

25      Le Conseil, sans soulever formellement une exception d’irrecevabilité, invoque l’irrecevabilité du présent recours. Il soutient que la requérante doit être considérée comme une organisation gouvernementale au sens de l’article 34 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), lequel détermine les personnes autorisées à introduire une requête devant la Cour européenne des droits de l’homme et exclut les organisations gouvernementales du prétoire de cette juridiction. Le Conseil fait valoir que la requérante est une entreprise publique entièrement détenue par l’État iranien, que son objet social est d’exercer les droits de propriété de la nation iranienne sur les ressources pétrolières et en gaz naturel de l’Iran (article 4 des statuts de la requérante), que son assemblée générale est composée du président de la République et de six ministres du gouvernement iranien (article 17 des statuts) et qu’elle est en droit d’exproprier les biens appartenant à des personnes privées qui sont nécessaires à son activité (articles 12 à 4 des statuts).

26      En tant qu’émanation de l’État iranien, la requérante n’aurait dès lors pas qualité pour former un recours, afin d’invoquer une violation du droit de propriété ou d’autres droits fondamentaux. À cet égard, le Conseil distingue entre, d’une part, certains droits procéduraux reconnus aux États et, d’autre part, les droits fondamentaux tels que le droit de propriété, dont les États ne sauraient bénéficier.

27      Cette fin de non-recevoir s’appliquerait à l’ensemble des moyens invoqués, car le présent recours vise en réalité à obtenir l’annulation du gel des fonds, lequel constituerait une atteinte – justifiée – au droit de propriété. Peu importerait dès lors que tous les moyens ne se réfèrent pas spécifiquement à ce droit.

28      Selon le Conseil, la ratio legis de l’article 34 de la CEDH réside dans la nature même des droits fondamentaux, dont le respect doit être garanti par l’État à l’égard de personnes physiques et morales relevant de sa juridiction au sens de la CEDH. Un État ou une de ses émanations ne pourraient dès lors pas bénéficier des droits fondamentaux, car un État souverain ne relève pas de la juridiction d’un autre État.

29      Malgré l’absence de disposition expresse similaire dans les traités et la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, le principe selon lequel un État ne bénéficie pas des droits fondamentaux serait transposable dans le système juridique de l’Union européenne, tant en ce qui concerne les États membres que les États tiers, ou les entités qui en émanent. Dès lors, il n’appartiendrait pas aux juridictions de l’Union de régler les litiges entre cette dernière et des États tiers, relatifs aux droits de propriété de ces derniers.

30      La requérante estime que son recours et l’ensemble des moyens qu’elle invoque sont recevables.

31      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, dans ses arrêts du 29 janvier 2013, Bank Mellat/Conseil (T‑496/10, non encore publié au Recueil, sous pourvoi, points 35 à 46), et du 5 février 2013, Bank Saderat Iran/Conseil (T‑494/10, non encore publié au Recueil, sous pourvoi, points 33 à 44), le Tribunal a déjà eu l’occasion de rejeter une argumentation similaire, opposée par le Conseil soutenu par la Commission, relative aux moyens tirés de la violation des droits fondamentaux invoqués par les requérantes dans les deux arrêts en cause, les institutions susvisées faisant valoir que ces dernières étaient des émanations de l’État iranien.

32      En outre, dans l’arrêt du 28 novembre 2013, Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft (C‑348/12 P, non encore publié au Recueil, points 50 et 51), la Cour a écarté l’argument d’irrecevabilité du Conseil et de la Commission selon lequel la requérante dans l’affaire en cause, Kala Naft, en tant qu’émanation de l’État iranien, ne bénéficiait pas de la protection des droits fondamentaux. À cet égard, la Cour a constaté que, dans la mesure où le recours s’inscrivait dans le cadre de l’article 275, second alinéa, TFUE, et où la requérante avait qualité et intérêt à agir contre l’inscription de son nom, cet argument « ne concernait pas la recevabilité du recours ni même d’un moyen, mais avait trait au fond du litige ». La Cour a ainsi confirmé, en substance, qu’une entité qui est une émanation d’un État tiers est recevable, en invoquant le cas échéant les garanties liées aux droits fondamentaux, à former un recours en annulation contre les mesures restrictives adoptées à son égard.

33      En l’espèce, il convient de relever que, à la différence de son argumentation devant le Tribunal dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 25 avril 2012, Manufacturing Support & Procurement Kala Naft/Conseil (T‑509/10, non encore publié au Recueil), Bank Mellat/Conseil et Bank Saderat Iran/Conseil, précités, dans lesquelles il n’avait pas excipé de l’irrecevabilité du recours dans son ensemble, le Conseil ne se limite pas à contester « la possibilité pour la requérante d’invoquer les protections et garanties liées aux droits fondamentaux ». En effet, le Conseil conclut expressément à l’irrecevabilité du présent recours dans son ensemble. 

34      L’argumentation invoquée par le Conseil au soutien de cette fin de non-recevoir ne saurait être accueillie.

35      En effet, il y a lieu de rappeler que le présent recours s’inscrit dans le cadre de l’article 275, second alinéa, TFUE, en combinaison avec l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, en ce qu’il tend à l’annulation de la décision attaquée qui a été adoptée sur le fondement de l’article 29 TUE. L’article 275, second alinéa, TFUE soumet expressément les décisions prévoyant des mesures restrictives à l’encontre de personnes physiques ou morales, adoptées par le Conseil sur la base du titre V, chapitre 2, du traité UE, au contrôle de la légalité dans les conditions prévues à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

36      Or, l’article 263, quatrième alinéa, TFUE confère à toute personne physique ou morale qualité pour agir contre les actes des institutions de l’Union, dès lors que les conditions définies par cette disposition sont réunies, ce qui est le cas en l’espèce et n’est d’ailleurs pas contesté. La requérante justifie ainsi de la qualité pour agir et d’un intérêt à agir contre les actes attaqués en ce qu’ils l’inscrivent sur les listes en cause (voir, en ce sens, arrêt Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft, précité, point 50). À cet égard, il convient en effet de rappeler que la nature individuelle des mesures restrictives adoptées à l’égard d’une personne ouvre, conformément aux termes de l’article 275, deuxième alinéa, TFUE, et de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, l’accès au juge de l’Union (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 23 avril 2013, Gbagbo e.a./Conseil, C‑478/11 P à C‑482/11 P, non encore publié au Recueil, point 58). Partant, dans la mesure où ni les deux articles susmentionnés ni aucune autre disposition du droit primaire de l’Union n’excluent les États tiers de ce droit de recours, une personne morale qui est une émanation d’un État tiers ne saurait se voir dénier le droit de former un recours contre une mesure de gel des fonds adoptée à son égard, en vue d’obtenir le contrôle de la légalité de cette mesure. En effet, une telle solution violerait les dispositions de l’article 263 et de l’article 275, deuxième alinéa, TFUE et serait dès lors contraire au système de protection juridictionnelle institué par le traité FUE, ainsi qu’au droit à un recours effectif consacré par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général M. Bot sous l’arrêt Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft, précité, non encore publiées au Recueil, point 64).

37      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, la fin de non-recevoir soulevée à l’encontre du présent recours doit être rejetée.

 Sur le fond

38      À l’appui de son recours, la requérante invoque une série de moyens qu’il convient de regrouper afin de les examiner de la manière suivante. Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 296 TFUE, en ce que le règlement attaqué omettrait de préciser la base juridique sur laquelle il a été adopté. Le deuxième moyen est tiré de l’absence de base juridique appropriée du règlement attaqué. Le troisième moyen est tiré de l’illégalité de l’article 23, paragraphe 2, sous d), du règlement n° 267/2012, ainsi que de l’article 20, paragraphe 2, sous c), de la décision 2010/413, telle que modifiée par la décision attaquée. Le quatrième moyen est tiré d’erreurs de droit, d’une erreur de fait et d’une erreur d’appréciation. Le cinquième moyen est tiré d’une violation de l’obligation de motivation, des droits de la défense, du principe de bonne administration et du droit à une protection juridictionnelle effective. Le sixième moyen est tiré de la violation du principe de proportionnalité et du droit de propriété.

 Sur le premier moyen tiré du défaut de motivation du règlement attaqué

39      La requérante fait valoir que le Conseil a violé l’obligation de motivation imposée par l’article 296 TFUEen s’abstenant d’indiquer, dans le règlement attaqué, la base juridique tirée du traité FUE qui l’autoriserait à adopter des règlements d’exécution selon la procédure prévue à l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012.

40      La requérante rappelle que l’obligation d’indiquer la base juridique d’un acte relève de l’obligation de motivation, justifiée notamment par le contrôle juridictionnel qui doit pouvoir être exercé par le juge de l’Union, et que l’impératif de sécurité juridique requiert que tout acte visant à créer des effets juridiques emprunte sa force obligatoire à une disposition du droit de l’Union qui doit expressément être indiquée comme base légale et qui prescrit la forme juridique dont l’acte doit être revêtu (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 1er octobre 2009, Commission/Conseil, C‑370/07, Rec. p. I‑8917, points 38, 39 et 42).

41      Le Conseil conteste toute violation de l’obligation de motivation relative à la base juridique. Il fait valoir que le règlement attaqué a été adopté sur la base de l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012, dont il comporte la mention.

42      En effet, les visas qui figurent dans le règlement attaqué comprennent deux mentions. Ils se réfèrent, d’une part, de manière générale au traité FUE et, d’autre part, au « règlement n° 267/2012 […] et notamment [à] son article 46, paragraphe 2 ». Or, selon cette dernière disposition, « [l]orsque le Conseil décide d’appliquer à une personne physique ou morale, à une entité ou à un organisme les mesures visées à l’article 23, paragraphes 2 et 3, il modifie l’annexe IX [du règlement n° 267/2012] ».

43      Dans la mesure où l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012 attribue ainsi explicitement compétence au Conseil pour mettre en œuvre l’article 23, paragraphes 2 et 3, du même règlement, le visa du règlement attaqué indique dès lors clairement la base juridique habilitant le Conseil à adopter des mesures restrictives à l’égard d’une personne ou d’une entité, telles que celles prises à l’égard de la requérante.

44      Il convient de préciser cependant que la question de la motivation, qui concerne une formalité substantielle, est distincte de celle du bien-fondé de cette motivation (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 15 décembre 2005, Italie/Commission, C‑66/02, Rec. p. I‑10901, point 26, et du 16 novembre 2011, Bank Melli Iran/Conseil, C‑548/09 P, Rec. p. I‑11381, point 88). La question de savoir si le Conseil pouvait effectivement s’attribuer des compétences d’exécution ne concerne donc pas la motivation du règlement attaqué, mais relève de l’appréciation de la légalité des motifs invoqués et sera examinée ci-après dans le cadre du deuxième moyen.

45      Le premier moyen doit dès lors être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de l’absence de base juridique appropriée du règlement attaqué

46      La requérante invoque l’absence de base juridique appropriée du règlement attaqué. Elle soulève, à cet égard, une exception d’illégalité, au titre de l’article 277 TFUE, à l’encontre de l’article 46 du règlement n° 267/2012, qui constitue la base juridique du règlement attaqué.

47      La requérante estime que le Conseil est uniquement compétent pour adopter des mesures restrictives à l’égard de personnes ou d’entités, sur la base de l’article 215 TFUE. En effet, cet article, qui est expressément mentionné dans le règlement n° 267/2012 comme étant la base juridique dudit règlement, n’habiliterait pas le Conseil à s’affranchir de la procédure qu’il prévoit. En s’attribuant une compétence d’exécution, à l’article 46 du règlement n° 267/2012, le Conseil aurait ainsi porté atteinte au pouvoir d’initiative de la Commission, en enfreignant les dispositions de l’article 215 TFUE, qui prévoient qu’une mesure restrictive ne peut être adoptée que sur l’initiative conjointe de la Commission et du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. En outre, dans la mesure où le règlement n° 267/2012 omettrait de mentionner l’article 291, paragraphe 2, TFUE, le Conseil aurait violé l’obligation de motivation.

48      La requérante en déduit que l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012 est illégal et qu’il doit être déclaré inapplicable à son égard.

49      Le Conseil estime que ce deuxième moyen manque de clarté et qu’il ne répond pas aux exigences de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal.

50      Sur le fond, le Conseil soutient que l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012 lui confère des compétences d’exécution, en application de l’article 291, paragraphe 2, TFUE. Le règlement n° 267/2012 trouverait sa base juridique dans l’article 215 TFUE, mentionné dans les visas dudit règlement.

51      Au vu de l’argumentation développée tant par la requérante que par le Conseil, il y a lieu de vérifier, d’abord, la régularité de l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012, au regard des dispositions de l’article 215 TFUE et de l’article 291, paragraphe 2, TFUE (voir points 52 à 83 ci-après). Ensuite, il conviendra d’examiner si l’absence de mention de l’article 291 TFUE, parmi les visas du règlement n° 267/2012, doit être considérée comme une violation de l’obligation de motivation, entachant la régularité de l’article 46, paragraphe 2, dudit règlement (voir points 84 à 87 ci-après).

 Sur la régularité de l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012, au regard des dispositions de l’article 215 TFUE et de l’article 291, paragraphe 2, TFUE.

52      Aux termes de l’article 291, paragraphe 2, TFUE, « [l]orsque des conditions uniformes d’exécution des actes juridiquement contraignants de l’Union sont nécessaires, ces actes confèrent des compétences d’exécution à la Commission ou, dans des cas spécifiques dûment justifiés et dans les cas prévus aux articles 24 et 26 [TUE], au Conseil ».

53      En l’espèce, il convient dès lors de vérifier d’abord si le Conseil était en droit, en matière de mesures restrictives prévues sur la base de l’article 215 TFUE, de recourir aux dispositions de l’article 291, paragraphe 2, TFUE, ou s’il devait, au contraire, suivre la procédure instituée par l’article 215, paragraphe 1, TFUE, aux fins de l’adoption de mesures restrictives individuelles à l’égard de personnes ou d’entités (voir points 54 à 56 ci-après). Ensuite, si le recours à l’article 291, paragraphe 2, TFUE s’avère justifié, il y aura encore lieu d’examiner si l’attribution au Conseil de la compétence d’exécution en matière de gel des fonds répondait aux conditions énoncées par cet article (voir points 57 à 83 ci-après).

–       Sur l’applicabilité de l’article 291 TFUE dans le domaine des mesures restrictives fondées sur l’article 215 TFUE

54      En premier lieu, il convient de rappeler que l’article 40, premier alinéa, TUE souligne que la mise en œuvre de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) n’affecte pas l’application des procédures et l’étendue respective des attributions des institutions prévues par les traités pour l’exercice des compétences de l’Union visées aux articles 3 TFUE à 6 TFUE. Or, force est de constater que ni l’article 215 TFUE ni aucune autre disposition du droit primaire ne s’opposent à ce qu’un règlement adopté sur le fondement de l’article 215 TFUE confère des compétences d’exécution à la Commission ou au Conseil dans les conditions définies à l’article 291, paragraphe 2, TFUE, lorsque des conditions uniformes d’exécution de certaines mesures restrictives prévues par ce règlement sont nécessaires. En particulier, il ne ressort pas de l’article 215, paragraphe 2, TFUE que les mesures restrictives individuelles prises à l’encontre de personnes physiques ou morales, de groupes ou d’entités non étatiques doivent être adoptées selon la procédure prévue à l’article 215, paragraphe 1, TFUE. Partant, en l’absence de toute indication limitant la possibilité de conférer des compétences d’exécution, l’application des dispositions de l’article 291, paragraphe 2, TFUE ne saurait être écartée en matière de mesures restrictives fondées sur l’article 215, paragraphe 2, TFUE.

55      En second lieu, il convient de relever que la procédure prévue par l’article 215, paragraphe 1, TFUE, dans laquelle le Conseil statue sur proposition conjointe du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et de la Commission, peut s’avérer inadaptée aux fins de l’adoption de simples mesures d’exécution. En revanche, l’article 291, paragraphe 2, TFUE, en ouvrant une option entre l’attribution d’une compétence d’exécution à la Commission ou, sous certaines conditions particulières, au Conseil, permet de prévoir une procédure d’exécution plus efficace, adaptée au type de mesure à exécuter et à la capacité d’action de chaque institution. Ainsi les considérations ayant conduit les auteurs du traité FUE à autoriser, à l’article 291, paragraphe 2, TFUE, l’attribution de compétences d’exécution valent tant en ce qui concerne la mise en œuvre des actes fondés sur l’article 215, paragraphe 2, TFUE qu’en ce qui concerne la mise en œuvre d’autres actes juridiquement contraignants.

56      Pour l’ensemble de ces raisons, le Conseil n’était en l’espèce pas tenu de suivre la procédure prévue par l’article 215, paragraphe 1, TFUE pour adopter des mesures individuelles de gel des fonds, mais était en droit de prévoir des compétences afin de mettre en œuvre l’article 23, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 267/2012, conformément aux dispositions de l’article 291, paragraphe 2, TFUE.

–       Sur la conformité de l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012 aux conditions énoncées à l’article 291, paragraphe 2, TFUE

57      Dans la mesure où le recours à l’article 291, paragraphe 2, TFUE peut être justifié dans le domaine des mesures restrictives, il convient de vérifier si cet article permettait au Conseil de se réserver le pouvoir d’exécuter l’article 23, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 267/2012.

58      Aux termes des dispositions de l’article 291, paragraphe 2, TFUE, les compétences d’exécution des actes juridiquement contraignants de l’Union sont conférées, en principe, à la Commission, sous le contrôle des États membres, selon les modalités régies par l’article 291, paragraphe 3, TFUE ou, dans deux cas particuliers, au Conseil. En effet, il ressort expressément de l’article 291, paragraphe 2, TFUE qu’un règlement de base ne peut attribuer des compétences d’exécution au Conseil que dans deux types de situations clairement circonscrites, à savoir, d’une part, « dans des cas spécifiques dûment justifiés » et, d’autre part, dans « les cas prévus aux articles 24 [TUE]et 26 [TUE] ».

59      En l’espèce, le Conseil estime qu’il s’est légitimement réservé, à l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012, la compétence d’exécution de l’article 23, paragraphes 2 et 3, dudit règlement, dans la mesure où il s’agissait d’un cas spécifique dûment justifié. Il convient dès lors d’examiner si cette condition était remplie, en vérifiant, d’une part, si le Conseil se trouvait en présence d’un cas spécifique (voir points 60 à 73 ci-après) et, d’autre part, si cette spécificité était dûment justifiée (voir points 74 à 82 ci-après).

60      S’agissant de la première de ces deux exigences, relative à la spécificité du cas en question, il convient de rappeler que les règlements, tels que le règlement n° 267/2012, prévoyant des mesures restrictives sur la base de l’article 215 TFUE, visent à mettre en œuvre dans le champ d’application du traité FUE des décisions de gel des fonds adoptées par le Conseil, statuant à l’unanimité au titre de l’article 29 TUE, dans le cadre de la PESC.

61      À cet égard, la Cour a jugé que l’article 215 TFUE prévoyait explicitement une passerelle entre les actions de l’Union comportant des mesures économiques relevant du traité FUE et les objectifs du traité UE en matière de PESC, établissant ainsi un lien avec les décisions relevant de la PESC (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 19 juillet 2012, Parlement/Conseil, C‑130/10, non encore publié au Recueil, point 59).

62      Dans la mesure où l’article 215 TFUE a pour objet d’établir un tel lien avec les décisions relevant de la PESC, le règlement n° 267/2012, fondé sur cet article, ainsi que les règlements d’exécution modifiant l’annexe IX dudit règlement, s’inscrivent également dans la poursuite des objectifs et la mise en œuvre des actions de l’Union dans le domaine de la PESC.

63      Or, dans le cadre du traité UE, il ressort de la combinaison de l’article 24, paragraphe 1, second alinéa, TUE, de l’article 29 TUE et de l’article 31, paragraphe 1, TUE que le Conseil a, en règle générale, vocation à exercer le pouvoir décisionnel dans le domaine de la PESC, en statuant à l’unanimité (voir, en ce sens, arrêt Parlement /Conseil, précité, point 47).

64      Certes, la règle générale selon laquelle le Conseil est l’autorité compétente dans le domaine de la PESC ne s’oppose pas en tant que telle à ce que, dans le champ d’application du traité FUE, des compétences d’exécution en matière de mesures restrictives soient conférées à la Commission, conformément aux dispositions de l’article 291, paragraphe 2, TFUE, comme en témoigne notamment l’article 45 du règlement n° 267/2012.

65      Toutefois, en l’espèce, le Conseil a pu estimer, sans excéder les limites de son pouvoir d’appréciation, que l’exécution de l’article 23, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 267/2012, relatif au gel des fonds, présentait des caractéristiques spécifiques justifiant qu’il se réserve la compétence d’exécution, à l’article 46, paragraphe 2, dudit règlement.

66      Premièrement, en raison de la finalité, de la nature et de l’objet mêmes de telles mesures, l’adoption de mesures de gel des fonds à l’égard d’une personne, d’une entité ou d’un organisme, sur la base des critères énoncés à l’article 23, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 267/2012 – lesquels visent en substance certaines catégories d’activités ou de comportements liés aux activités de prolifération nucléaire ou susceptibles de favoriser la poursuite de telles activités – se rattache plus étroitement à la mise en œuvre de la PESC qu’à l’exercice des compétences conférées à l’Union par le traité FUE.

67      En particulier, dans la mesure où, en sanctionnant certaines personnes ou entités ou certains organismes en raison d’activités ou de comportements définis à l’article 23 du règlement n° 267/2012, les mesures de gel des fonds tendent à faire pression sur un État tiers, en l’occurrence la République islamique d’Iran, afin qu’elle mette fin à ses activités de prolifération nucléaire, ces mesures participent directement de la conduite de la PESC. Partant, l’exécution de telles mesures, par l’adoption de mesures individuelles de gel des fonds, relève davantage du pouvoir d’action spécifique du Conseil au titre de la PESC plutôt que de la compétence d’exécution de principe de la Commission, au titre de l’article 291, paragraphe 2, TFUE, en particulier dans les domaines économiques relevant du traité FUE.

68      Deuxièmement, l’attribution de la compétence d’exécution au Conseil en ce qui concerne les mesures de gel des fonds prévues par l’article 23, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 27/267 se justifie également par la nécessité d’assurer la cohérence entre la liste figurant à l’annexe II de la décision 2010/413 et celle figurant à l’annexe IX du règlement n° 267/2012. À cet égard, il convient de rappeler que l’adoption d’une mesure de gel des fonds au titre de l’article 23, paragraphes 2 ou 3, de ce dernier règlement, à l’égard d’une personne ou d’une entité, vise à mettre en œuvre, dans le champ d’application du traité FUE, la mesure de gel des fonds correspondante adoptée à l’égard de cette personne ou de cette entité, sur la base de l’article 20, paragraphe 1, sous b), de la décision 2010/413. Dans l’économie de la décision 2010/413 et du règlement n° 267/2012, l’inscription du nom d’une personne ou d’une entité sur la liste figurant à l’annexe II de la décision 2010/413 constitue ainsi, en principe, une condition de l’inscription de son nom sur la liste figurant à l’annexe IX du règlement n° 267/2012.

69      Dans ce contexte, le Conseil pouvait légitimement se réserver la compétence d’exécuter l’article 23, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 267/2012, en vue d’assurer la cohérence des procédures d’adoption des mesures de gel des fonds ainsi que des conclusions de l’autorité compétente dans le cadre, respectivement, de la décision 2010/413 et du règlement n° 267/2012, tant lors de l’inscription initiale du nom d’une personne ou d’une entité sur les listes en cause que lors du réexamen par l’institution compétente de cette inscription, au regard en particulier des observations et des éléments de preuve éventuellement fournis par l’intéressé. Cette exigence de cohérence et de coordination entre les deux procédures n’était dès lors guère conciliable avec l’attribution à la Commission de compétences d’exécution de l’article 23 du règlement n° 267/2012.

70      Troisièmement, le Conseil a précisé, sans être contredit par la Commission, que celle-ci n’avait pas accès aux données des services de renseignement des États membres qui pouvaient s’avérer nécessaires, notamment aux fins du réexamen à intervalles réguliers de la liste comportant les noms des personnes et des entités inscrites à l’annexe IX du règlement n° 267/2012. En effet, les mesures de gel des fonds sanctionnent notamment certaines activités ou certains comportements illicites, qui sont définis à l’article 23, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 267/2012 et dont l’existence ne peut généralement être établie qu’avec l’aide de ces services.

71      Au regard des trois caractéristiques examinées aux points 66 à 70 ci-dessus, les mesures de gel des fonds se distinguent des autres mesures restrictives prévues par le règlement n° 267/2012, interdisant ou restreignant certaines activités économiques ou financières, telles que l’exportation ou l’importation de certains biens et technologies, le financement de certaines entreprises, les transferts de fonds ou de services financiers et les transports, et pour lesquelles l’article 45 du règlement n° 267/2012 confère des compétences d’exécution à la Commission.

72      Enfin, il convient d’observer que la Cour a rejeté, au point 109 de l’arrêt Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft, précité, un moyen tiré de l’incompétence du Conseil pour adopter des mesures de gel des fonds à l’égard de Kala Naft, telles que prévues notamment par la décision 2010/413 sur le fondement de l’article 29 TUE, par un règlement d’exécution fondé sur l’article 291, paragraphe 2, TFUE et sur le règlement (CE) n° 423/2007 du Conseil, du 19 avril 2007, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO L 103, p. 1), et par le règlement n° 961/2010, fondé sur l’article 215 TFUE et remplacé et abrogé par le règlement n° 267/2012, en relevant en substance que ces dispositions des traités donnaient au Conseil la compétence pour adopter les mesures litigieuses.

73      Il y a dès lors lieu de constater que le Conseil a pu raisonnablement considérer que les mesures de gel des fonds en cause présentaient un caractère spécifique justifiant qu’il se réserve la compétence d’exécution à l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012.

74      S’agissant de la seconde condition énoncée à l’article 291, paragraphe 2, TFUE, relative à la nécessité de justifier l’existence d’un cas spécifique, il convient de rappeler, tout d’abord, que, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver un acte faisant grief, qui constitue un corollaire du principe du respect des droits de la défense, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si l’acte est bien fondé ou s’il est éventuellement entaché d’un vice permettant d’en contester la validité devant le juge de l’Union et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte (voir arrêt de la Cour du 15 novembre 2012, Conseil/Bamba, C‑417/11 P, non encore publié au Recueil, point 49, et la jurisprudence citée).

75      La motivation exigée par l’article 296 TFUE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre à l’intéressé de connaître les justifications des mesures prises et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (arrêt Conseil/Bamba, précité, point 50).

76      Cependant, la motivation doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et au contexte dans lequel il a été adopté. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où le caractère suffisant d’une motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (arrêt Conseil/Bamba, précité, points 53 et 54 ; arrêts du Tribunal du 12 décembre 2006, Organisation des Modjahedines du peuple d’Iran/Conseil, T‑228/02, Rec. p. II‑4665, point 141, et du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, T‑390/08, Rec. p. II‑3967, point 82).

77      En l’espèce, il convient d’observer que le Conseil n’a pas expressément déclaré, dans le règlement n° 267/2012, qu’il se réservait la compétence d’exécution en raison de la spécificité des mesures de gel des fonds, découlant tant de leur nature que des contraintes liées au type d’informations indispensables à leur mise en œuvre. Toutefois, il n’en demeure pas moins que la justification de la réserve d’exécution effectuée en faveur du Conseil, à l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012 ressort d’une lecture combinée des considérants et des dispositions dudit règlement, dans le contexte de l’articulation des dispositions pertinentes du traité UE et du traité FUE, en matière de gel des fonds.

78      Premièrement, le Conseil s’est explicitement référé, au considérant 28 du règlement n° 267/2012, à l’exercice de sa compétence en matière de « désignation des personnes soumises aux mesures de gel [des fonds] » ainsi qu’à sa propre intervention dans le cadre de la procédure de révision des décisions d’inscription en fonction des observations ou des nouveaux éléments de preuve reçus de la part des personnes concernées.

79      Deuxièmement, il ressort des dispositions de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012, relatives au gel des fonds, que ces mesures visent à sanctionner certaines catégories d’activités et de comportements susceptibles de favoriser directement ou indirectement les activités de prolifération nucléaire de l’Iran, en vue d’exercer une pression sur l’Iran. Le considérant 14 du règlement n° 267/2012 précise à cet égard que, « [e]u égard aux tentatives de contournement des sanctions par l’Iran […], tous les fonds et ressources économiques appartenant à, en possession de, détenus ou contrôlés par les personnes, entités ou organismes énumérés aux annexes I et II de la décision 2010/413/PESC doivent être gelés sans délai, y compris ceux des entités qui leur auraient succédé, créées dans le but de contourner les mesures prévues dans le présent règlement ».

80      Ainsi, eu égard à l’objet et à la nature des mesures de gel des fonds, tant les dispositions de l’article 23, paragraphe 2, que celles du préambule du règlement n° 267/2012 font apparaître de manière succincte, mais compréhensible, que la mise en œuvre des mesures de gel des fonds à l’égard de personnes ou d’entités relève davantage du domaine d’action du Conseil dans le cadre de la PESC, plutôt que des mesures de nature économique que la Commission a, en règle générale, vocation à adopter dans le domaine du traité FUE (voir point 67 ci-dessus).

81      Troisièmement, il ressort des considérants 11 et suivants du règlement n° 267/2012 que ce dernier met en œuvre les modifications de la décision 2010/413 introduites par la décision 2012/35 (voir point 6 ci-dessus). La nécessité d’assurer la cohérence entre la liste des noms des personnes et des entités désignées contenue à l’annexe II de la décision 2010/413 et celle contenue à l’annexe IX du règlement n° 267/2012 ressort également explicitement de la lecture des considérants des règlements d’exécution dudit règlement, notamment du considérant 2 du règlement attaqué, énonçant qu’il convenait d’ajouter le nom d’autres personnes et entités sur la liste figurant à l’annexe IX du règlement n° 267/2012, « compte tenu de la situation en Iran et conformément à la décision [attaquée] », laquelle avait ajouté le nom de ces mêmes personnes et entités à l’annexe II de la décision 2012/35 (voir point 9 ci-dessus).

82      Dans ces conditions, il y a lieu de constater que les raisons spécifiques ayant motivé l’attribution de compétences d’exécution au Conseil à l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012 ressortaient de manière suffisamment compréhensible des dispositions pertinentes et du contexte de ce règlement.

83      Pour l’ensemble de ces motifs, cette réserve de compétence d’exécution, dans le domaine circonscrit des mesures de gel des fonds prévues en particulier à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012, répond aux deux exigences cumulatives découlant de l’article 291, paragraphe 2, TFUE (voir point 59 ci-dessus).

 Sur la régularité de l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012, au regard de l’obligation de motivation

84      Par ailleurs, pour apprécier la régularité de l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012, il convient encore de vérifier si, en omettant de mentionner l’article 291, paragraphe 2, TFUE dans le visa de ce règlement, le Conseil a violé l’obligation de motivation en ce qui concerne la base légale de l’article 46, paragraphe 2 (voir point 51 ci‑dessus).

85      Dans la mesure où, d’une part, le règlement n° 267/2012, et notamment son article 46, paragraphe 2, trouve sa base juridique dans l’article 215 TFUE qui est mentionné dans le visa dudit règlement, et où, d’autre part, les circonstances spécifiques requises par l’article 291, paragraphe 2, TFUE pour l’attribution d’une compétence d’exécution au Conseil ressortent de façon suffisamment compréhensible de ce règlement, ce dernier ne saurait être considéré comme entaché d’une violation de l’obligation de motivation.

86      Malgré l’absence de mention de l’article 291, paragraphe 2, TFUE, les dispositions générales et finales du règlement n° 267/2012, placées dans le contexte de l’articulation des compétences attribuées respectivement par le traité UE et le traité FUE, permettent de comprendre que le Conseil se réserve, à l’article 46, paragraphe 2, dudit règlement, la compétence d’exécuter les dispositions de l’article 23, paragraphes 2 et 3, dudit règlement, conformément aux conditions énoncées à l’article 291, paragraphe 2, TFUE, qui régit l’attribution de compétences d’exécution aux institutions de l’Union. En effet, ces dispositions du règlement n° 267/2012 définissent, entre autres aspects, le rôle à jouer par la Commission, le Conseil et les États membres dans l’exécution de ce règlement. S’agissant notamment de la mise à jour de ses annexes, les articles 45 et 46 du règlement n° 267/2012 précisent clairement les pouvoirs attribués respectivement à la Commission et au Conseil.

87      Il s’ensuit que le Conseil n’a pas violé l’obligation de motivation en omettant de mentionner l’article 291, paragraphe 2, TFUE dans les visas du règlement n° 267/2012.

88      Pour l’ensemble de ces motifs, il y a lieu de constater que l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012 n’est entaché ni d’une violation de l’article 215 TFUE ou de l’article 291, paragraphe 2, TFUE, ni d’une violation de l’article 296 TFUE.

89      L’exception d’illégalité soulevée à l’encontre de l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012 et, partant, le deuxième moyen tiré de l’absence de base juridique appropriée du règlement attaqué doivent dès lors être rejetés.

 Sur le troisième moyen, tiré de l’illégalité alléguée de l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413 et de l’article 23, paragraphe 2, sous d), du règlement n° 267/2012

90      La requérante soulève une exception d’illégalité, au titre de l’article 277 TFUE, à l’encontre des dispositions de l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413, tel que modifié par l’article 1er, paragraphe 8, de la décision attaquée, ainsi que de l’article 23, paragraphe 2, sous d), du règlement n° 267/2012 (voir points 8 et 10 ci-dessus).

91      Le Conseil excipe de l’irrecevabilité, au regard de l’article 275 TFUE, de l’exception d’illégalité soulevée à l’encontre de l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413. Il rappelle d’abord que, selon l’article 275, premier alinéa , TFUE, « [l]a Cour de justice de l’Union européenne n’est pas compétente en ce qui concerne les dispositions relatives à la [PESC], ni en ce qui concerne les actes adoptés sur leur base ». Le Conseil fait valoir ensuite que l’article 275, deuxième alinéa, TFUE ne confère compétence au juge de l’Union que pour contrôler la légalité des décisions individuelles instaurant des mesures restrictives à l’égard des personnes, et non pour contrôler des décisions de portée générale.

92      Cette interprétation de l’article 275, deuxième alinéa, TFUE ne saurait toutefois être retenue. En effet, l’article 275, deuxième alinéa, TFUE prévoit explicitement que, par dérogation aux dispositions du premier alinéa de cet article, le juge de l’Union est compétent pour « se prononcer sur les recours, formés dans les conditions prévues à l’article 263, quatrième alinéa, [TFUE] concernant le contrôle de la légalité des décisions prévoyant des mesures restrictives à l’encontre de personnes physiques ou morales adoptées par le Conseil sur la base du titre V, chapitre 2, du traité [UE] ».

93      L’article 275, deuxième alinéa, TFUE vise ainsi l’ensemble des décisions du Conseil relatives à des mesures restrictives à l’encontre de personnes physiques ou morales, relevant du titre V, chapitre 2, du traité UE, sans distinguer selon qu’il s’agit de décisions de portée générale ou de décisions individuelles. En particulier, il n’exclut pas la possibilité de contester, par la voie d’une exception, la légalité d’une disposition de portée générale, à l’appui d’un recours en annulation formé contre une mesure restrictive individuelle.

94      Il en résulte que les décisions du Conseil prévoyant des mesures restrictives à l’égard de personnes physiques ou morales, qui sont soumises au contrôle de légalité exercé par le juge de l’Union en vertu de l’article 275 TFUE, comprennent aussi bien des dispositions de portée générale telles que celles prévues par l’article 1er, paragraphe 8, sous a), de la décision attaquée, modifiant l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413 (voir point 10 ci-dessus), que des dispositions de portée individuelle telles que celles de l’article 2 de la décision attaquée, modifiant l’annexe II de la décision 2010/413, en y ajoutant notamment le nom de la requérante (voir point 11 ci-dessus).

95      Cette analyse est d’ailleurs confirmée par la jurisprudence qui, en examinant l’intensité du contrôle juridictionnel exercé sur les règles générales définissant les conditions légales entourant l’adoption de mesures restrictives (voir points 106 et 107 ci-après), a ainsi implicitement admis la compétence du juge de l’Union pour contrôler la légalité de telles règles (voir arrêts du Tribunal du 12 juin 2013, HTTS/Conseil, T‑128/12 et T‑182/12, non publié au Recueil, point 46, et du 6 septembre 2013, Bateni/Conseil, T‑42/12 et T‑181/12, non publié au Recueil, point 43, et la jurisprudence citée).

96      Partant, le Tribunal est compétent pour examiner la légalité des dispositions de l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413, telles que modifiées par la décision attaquée.

97      La fin de non-recevoir invoquée par le Conseil à l’encontre de l’exception d’illégalité soulevée contre ces dispositions doit dès lors être rejetée.

98      Sur le fond, la requérante invoque l’illégalité du critère juridique consistant en la fourniture d’un appui au gouvernement iranien, tel que défini à l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413, telle que modifiée par la décision attaquée, ainsi qu’à l’article 23, paragraphe 2, sous d), du règlement n° 267/2012 (ci-après le « critère litigieux »), et sur lequel se fonde l’inscription de son nom sur les listes en cause. La requérante invoque, d’une part, la violation des valeurs de l’État de droit, du droit de propriété et du principe de proportionnalité (voir points 99 à 129 ci-après) et, d’autre part, une incohérence dans la formulation du critère litigieux par la réglementation applicable (voir points 130 à 132 ci-après).

 Sur la violation alléguée des valeurs de l’État de droit, du droit de propriété et du principe de proportionnalité 

99      La requérante soutient que ce critère est contraire aux valeurs de liberté et de l’État de droit consacrées à l’article 2 TUE, auxquelles les décisions adoptées dans le domaine de la PESC doivent être conformes en vertu des articles 21 TUE et 23 TUE. Elle allègue que le pouvoir exorbitant et inconditionnel de sanctionner toute personne ou entité fournissant un appui au gouvernement iranien permettrait de sanctionner de manière arbitraire tout contribuable ou fonctionnaire iranien, un avocat inscrit à un barreau européen défendant certaines entités publiques iraniennes devant le Tribunal, un juge interne rendant des décisions favorables à une telle entité ou une entreprise acheminant par voie postale la requête de cette entité.

100    L’absence alléguée de volonté du Conseil d’abuser de ce pouvoir exorbitant ne permettrait pas de justifier l’attribution d’un tel pouvoir par le critère litigieux, lequel méconnaîtrait ainsi les valeurs fondamentales de l’Union susmentionnées. De surcroît, cette intention affichée du Conseil serait démentie en pratique. En effet, bien que le Conseil affirme que le critère litigieux cible le financement du programme nucléaire iranien par le régime iranien et ne vise pas le peuple iranien, le Conseil appliquerait ce critère aux personnes et aux entités fournissant un appui, notamment financier, au gouvernement iranien, sans que ces personnes soient impliquées dans le programme nucléaire en cause. Cela atteindrait durement l’économie iranienne dans son ensemble et, en conséquence, le peuple iranien.

101    En outre, le critère litigieux serait également contraire au droit de propriété et au principe de proportionnalité, consacrés respectivement à l’article 17 et à l’article 52, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux. En effet, ce critère permettrait de porter atteinte au droit de propriété, indépendamment du comportement des personnes et des entités sanctionnées, et sans que le Conseil soit tenu de justifier le caractère adéquat et nécessaire de cette atteinte, dans la poursuite de l’objectif visant à ce que l’Iran cesse son activité relative à la prolifération nucléaire.

102    De plus, la limitation apportée au droit de propriété par une mesure de gel des fonds fondée sur le critère litigieux ne saurait être considérée comme « prévue par la loi », au sens de l’article 52, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux. En effet, ce critère serait tellement large que l’adoption de mesures de gel des fonds serait imprévisible. À cet égard, la requérante fait grief au Conseil d’appliquer le critère litigieux indépendamment du comportement des personnes et des entités concernées, sans vérifier si celles-ci contribuent au programme nucléaire iranien. Or, selon la Cour européenne des droits de l’homme, « [l]a loi doit user de termes assez clairs pour indiquer à tous de manière suffisante en quelles circonstances et sous quelles conditions elle habilite la puissance publique à prendre [des mesures] » (voir Cour eur. D. H., arrêt Weber et Saravia c. Allemagne du 29 juin 2006, requête n° 54934/00, § 93 à 95).

103    Le Conseil fait valoir que l’argumentation de la requérante est contradictoire et manque de clarté. Elle ne répondrait pas aux exigences de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure.

104    Quant à la question de savoir si l’argumentation de la requérante est fondée, le Conseil fait valoir que le pouvoir que lui confère le critère litigieux n’est ni exorbitant ni arbitraire.

105    À titre liminaire, il convient de rappeler que les mesures de gel des fonds prises à l’encontre d’une personne ou d’une entité, sur la base des dispositions relatives à la PESC, constituent des mesures préventives ciblées, qui visent à lutter contre les menaces pour la paix et la sécurité internationale, dans le cadre de la mise en œuvre de résolutions du Conseil de sécurité. Leur adoption s’inscrit dans le cadre strict des conditions légales définies par une décision adoptée sur la base de l’article 29 TUE et par un règlement fondé sur l’article 215, paragraphe 2, TFUE mettant en œuvre cette décision dans le champ d’application du traité FUE. Par leur nature conservatoire ainsi que par leur finalité préventive, ces mesures se distinguent notamment des sanctions pénales. En l’occurrence, les mesures restrictives contre l’Iran visent à prévenir le développement de la prolifération nucléaire en faisant pression sur la République islamique d’Iran pour qu’elle mette fin à ses activités présentant un risque de prolifération nucléaire. Il n’en demeure pas moins que de telles mesures affectent lourdement les droits et libertés des personnes ou des entités concernées (voir, en ce sens, arrêts HTTS/Conseil, précité, point 42, et Bateni/Conseil, précité, point 39).

106    Pour délimiter l’étendue du pouvoir d’appréciation du Conseil et l’intensité du contrôle juridictionnel sur l’exercice de ce pouvoir, la jurisprudence distingue entre, d’une part, les règles générales définissant les conditions légales entourant l’adoption de mesures restrictives – telles que celles énoncées, en l’espèce, par le critère litigieux – et, d’autre part, l’adoption, sur la base d’un examen individuel, de décisions de gel des fonds en application de ces conditions légales, à l’égard de personnes et d’entités déterminées, en l’occurrence par l’inscription du nom de ces personnes et de ces entités à l’annexe II de la décision 2010/413 et à l’annexe IX du règlement n° 267/2012 (voir, en ce sens, arrêts HTTS/Conseil, précité, point 45, et Bateni/Conseil, précité, point 42).

107    En ce qui concerne la définition générale et abstraite des critères juridiques entourant l’adoption des mesures restrictives, le Conseil dispose d’un large pouvoir d’appréciation. Les règles de portée générale définissant ces critères font ainsi l’objet d’un contrôle juridictionnel restreint en ce qui concerne plus spécialement l’appréciation des considérations d’opportunité sur lesquelles les mesures restrictives sont fondées (voir, en ce sens, arrêts HTTS/Conseil, précité, point 46, et Bateni/Conseil, précité, point 43, et la jurisprudence citée).

108    Il n’en demeure pas moins que les juridictions de l’Union doivent assurer un contrôle, en principe complet, de la légalité de l’ensemble des actes de l’Union au regard des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l’ordre juridique de l’Union, y compris lorsque de tels actes visent à mettre en œuvre des résolutions adoptées par le Conseil de sécurité au titre du chapitre VII de la charte des Nations unies (arrêts de la Cour du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, non encore publié au Recueil, point 97, et Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft, précité, point 65).

109    En l’espèce, il appartient au Tribunal d’effectuer son contrôle portant sur la légalité du critère juridique litigieux, contestée par voie d’exception par la requérante, conformément au standard de contrôle décrit aux points 107 et 108 ci-dessus.

110    En effet, la requérante souligne à bon droit que le large pouvoir d’appréciation dont dispose le Conseil, pour définir les critères juridiques entourant l’adoption de mesures restrictives, ne l’autorise pas à enfreindre les valeurs de l’État de droit, ni les principes et les droits consacrés par la charte des droits fondamentaux.

111    Il y a dès lors lieu de vérifier si le critère litigieux est conforme au principe de la prévisibilité des actes de l’Union (voir points 112 à 123 ci-après), s’il répond au principe selon lequel toute limitation apportée à un principe général du droit, en l’occurrence au droit de propriété, doit être prévue par la loi (voir point 124 ci-après) et s’il est conforme au principe de proportionnalité et ne viole pas le droit de propriété (voir points 125 à 128 ci-après).

112    En premier lieu, selon une jurisprudence bien établie, le principe de sécurité juridique, qui constitue un principe général du droit de l’Union, exige notamment que les règles de droit soient claires, précises et prévisibles dans leurs effets, en particulier lorsqu’elles peuvent avoir sur les individus et les entreprises des conséquences défavorables (arrêt de la Cour du 18 novembre 2008, Förster, C‑158/07, Rec. p. I‑8507, point 67). Une sanction, même de caractère non pénal, ne peut être infligée que si elle repose sur une base légale claire et non ambigüe (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 18 novembre 1987, Maizena e.a., 137/85, Rec. p. 4587, point 14). Le principe de sécurité juridique implique notamment que toute réglementation de l’Union, en particulier lorsqu’elle impose ou permet d’imposer des sanctions, soit claire et précise, afin que les personnes concernées puissent connaître sans ambiguïté les droits et obligations qui en découlent et prendre leurs dispositions en conséquence (arrêt du Tribunal du 5 avril 2006, Degussa/Commission, T‑279/02, Rec. p. II‑897, point 66).

113    Cette exigence d’une base juridique claire et précise a également été consacrée dans le domaine des mesures restrictives (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 décembre 2013, Nabipour e.a./Conseil, T‑58/12, non publié au Recueil, point 107).

114    En l’espèce, la requérante estime, en substance, que le critère litigieux ne répond pas à l’exigence de prévisibilité, dans la mesure où il vise tout appui au gouvernement iranien, sans exiger que les personnes ou les entités concernées soient impliquées dans des activités de prolifération nucléaire.

115    Il y a lieu d’admettre que, par sa formulation très large, le critère juridique litigieux confère un pouvoir d’appréciation au Conseil. Toutefois, contrairement aux allégations de la requérante, ce pouvoir n’est pas arbitraire, ni discrétionnaire, pour les raisons suivantes.

116    Premièrement, la Cour européenne des droits de l’homme a jugé que l’existence de termes vagues dans la disposition n’entraînait pas nécessairement une violation de l’article 7 de la CEDH et le fait qu’une loi confère un pouvoir d’appréciation ne se heurte pas en soi à l’exigence de prévisibilité, à condition que l’étendue et les modalités d’exercice d’un tel pouvoir se trouvent définies avec une netteté suffisante, eu égard au but légitime en jeu, pour fournir à l’individu une protection adéquate contre l’arbitraire (voir Cour eur. D. H., arrêt Margareta et Roger Andersson c. Suède du 25 février 1992, série A n° 226, § 75). À ce sujet, outre le texte de la loi elle-même, la Cour européenne des droits de l’homme tient compte de la question de savoir si les notions indéterminées utilisées ont été précisées par une jurisprudence constante et publiée (voir Cour eur. D. H., arrêt G. c. France du 27 septembre 1995, série A n° 325-B, § 25).

117    En outre, la Cour a notamment mis en exergue que, selon cette jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, l’exigence de prévisibilité qui accompagne le principe de légalité des peines – lequel impose que la loi définisse clairement les infractions et les peines – ne s’oppose pas à ce que la loi attribue un pouvoir d’appréciation dont l’étendue et les modalités d’exercice se trouvent définies avec une netteté suffisante (arrêt de la Cour du 22 mai 2008, Evonik Degussa/Commission, C‑266/06 P, non publié au Recueil, point 45). Ces principes jurisprudentiels sont également applicables en ce qui concerne les mesures restrictives qui, bien qu’elles ne visent pas en principe à sanctionner des infractions, mais constituent des mesures préventives, affectent lourdement les droits et libertés des personnes concernées (voir point 105 ci-dessus).

118    Deuxièmement, le critère litigieux s’inscrit dans un cadre juridique clairement délimité par les objectifs poursuivis par la réglementation régissant les mesures restrictives à l’encontre de l’Iran. À cet égard, le considérant 13 de la décision 2012/35, laquelle a inséré ce critère à l’article 20, paragraphe 1, de la décision 2010/413 (voir point 7 ci-dessus), précise expressément que le gel des fonds doit être appliqué à l’égard des personnes et des entités « qui fournissent un appui au gouvernement iranien lui permettant de poursuivre des activités nucléaires posant un risque de prolifération ou la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires, en particulier les personnes apportant un soutien financier, logistique ou matériel au gouvernement iranien ». L’article 23, paragraphe 2, sous d), du règlement n° 267/2012 énonce également que cet appui peut être « matériel, logistique ou financier ».

119    Le critère litigieux ne vise donc pas toute forme d’appui au gouvernement iranien, mais vise les formes d’appui qui, par leur importance quantitative ou qualitative, contribuent à la poursuite des activités nucléaires iraniennes. Interprété, sous le contrôle du juge de l’Union, en relation avec l’objectif consistant à faire pression sur le gouvernement iranien afin de le contraindre à mettre fin à ses activités présentant un risque de prolifération nucléaire, le critère litigieux définit ainsi de manière objective une catégorie circonscrite de personnes et d’entités susceptibles de faire l’objet de mesures de gel des fonds.

120    En effet, à la lumière de la finalité des mesures de gel des fonds, mentionnée au point 119 ci-dessus, il ressort sans ambiguïté du critère litigieux que celui-ci vise de manière ciblée et sélective des activités propres à la personne ou à l’entité concernée et qui, même si elles n’ont en tant que telles aucun lien direct ou indirect avec la prolifération nucléaire, sont cependant susceptibles de la favoriser, en fournissant au gouvernement iranien des ressources ou des facilités d’ordre matériel, financier ou logistique lui permettant de poursuivre les activités de prolifération.

121    Ainsi, contrairement à l’interprétation proposée par la requérante, le critère litigieux ne saurait couvrir le simple fait de s’acquitter d’obligations légales, notamment payer des impôts, être un fonctionnaire iranien, fournir des prestations à une entreprise publique iranienne ou être un avocat représentant une telle entreprise devant le Tribunal.

122    Troisièmement, il convient de rappeler que le pouvoir d’appréciation conféré au Conseil par le critère litigieux est contrebalancé par une obligation de motivation et des droits procéduraux renforcés. En effet, il ressort de la jurisprudence que, dans les cas où les institutions de l’Union disposent d’un pouvoir d’appréciation, le respect des garanties conférées par l’ordre juridique de l’Union dans les procédures administratives revêt une importance d’autant plus fondamentale. Parmi ces garanties figurent, notamment, l’obligation pour l’institution compétente d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce, le droit de l’intéressé de faire connaître son point de vue ainsi que celui de voir motiver la décision de façon suffisante (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, Rec. p. I‑5469, point 14). À cet égard, la Cour a en particulier souligné que, lorsque des observations étaient formulées par la personne visée par des mesures restrictives au sujet de l’exposé des motifs, l’autorité compétente de l’Union avait l’obligation d’examiner, avec soin et impartialité, le bien-fondé des motifs allégués, à la lumière de ces observations et des éventuels éléments à décharge joints à celles-ci (arrêt Commission e.a./Kadi, précité, point 114).

123    Pour l’ensemble de ces raisons, il y a lieu de constater que le critère litigieux limite le pouvoir d’appréciation du Conseil, en instaurant des critères objectifs, et garantit le degré de prévisibilité requis par le droit de l’Union (voir, par analogie, arrêt Evonik Degussa/Commission, précité, point 58).

124    En deuxième lieu, dans ces circonstances, dans la mesure où l’adoption de mesures de gel des fonds sur la base du critère litigieux est prévue par les dispositions pertinentes de la décision 2010/413 et du règlement n° 267/2012, l’atteinte au droit de propriété résultant de l’application de ce critère est conforme à la disposition de l’article 52, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux, énonçant que toute limitation de l’exercice des droits et libertés reconnus par ladite charte doit être prévue par la loi.

125    En troisième lieu, l’argument de la requérante selon lequel le critère litigieux enfreindrait le droit de propriété et le principe de proportionnalité, dans la mesure où il permettrait au Conseil d’adopter des mesures de gel des fonds à l’égard d’une personne ou d’une entité indépendamment du comportement de cette dernière et sans démontrer le caractère adéquat et nécessaire d’une telle mesure, ne saurait être accueilli. En effet, ainsi qu’il a déjà été constaté ci-dessus, le critère litigieux implique la prise en considération des conséquences de l’activité propre de l’intéressé et délimite ainsi le pouvoir d’appréciation du Conseil (voir points 120 et 121 ci-dessus).

126    En outre, selon la jurisprudence, le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union, exige que les actes des institutions ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et que les inconvénients ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (arrêt Maizena e.a., précité, point 15).

127    En l’espèce, eu égard à l’importance primordiale du maintien de la paix et de la sécurité internationale, le Conseil a pu estimer, sans dépasser les limites de son pouvoir d’appréciation, que les atteintes au droit de propriété qui résulteraient de l’application du critère litigieux étaient appropriées et nécessaires, aux fins d’exercer une pression sur le gouvernement iranien afin de le contraindre à cesser ses activités de prolifération nucléaire (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 13 mars 2012, Melli Bank/Conseil, C‑380/09 P, non encore publié au Recueil, point 61).

128    Partant, de telles atteintes ne sauraient être considérées, au regard des objectifs poursuivis, comme une intervention démesurée et intolérable qui porterait atteinte à la substance du droit de propriété (voir, en ce sens, arrêt Bank Melli Iran/Conseil, précité, points 114 et 115).

129    Pour l’ensemble de ces motifs, l’argumentation de la requérante relative à la violation des valeurs d’une Union de droit, en particulier du principe de prévisibilité, ainsi que du principe de proportionnalité et du droit de propriété doit être rejetée.

 Sur l’incohérence alléguée dans la formulation du critère litigieux par la réglementation applicable 

130    La requérante soutient que le contenu de l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2012/413, d’une part, et celui de l’article 23, paragraphe 2, sous d), du règlement n° 267/2012, d’autre part, comportent une incohérence contraire au principe de sécurité juridique et de prévisibilité de la loi.

131    Certes, lors de l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause par les actes attaqués, l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413, telle que modifiée par la décision attaquée, visait notamment les entités détenues ou contrôlées par des personnes et entités fournissant un appui au gouvernement iranien. En revanche, ces entités n’étaient pas encore visées par l’article 23, paragraphe 2, sous d), du règlement n° 267/2012 à cette date (voir points 8 et 10 ci-dessus).

132    Toutefois, en l’espèce, force est de constater que l’argument tiré de cette incohérence est en tout état de cause inopérant, dans la mesure où l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause se fonde sur le critère juridique relatif à la fourniture d’un appui au gouvernement iranien, consacré par les deux dispositions susmentionnées, ainsi que le relève le Conseil, et qui ne soulève aucune incertitude.

133    Il s’ensuit que le troisième moyen, tiré de l’illégalité de l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413 et de l’article 23, paragraphe 2, sous d), du règlement n° 267/2012, doit être rejeté.

 Sur le quatrième moyen tiré d’erreurs de droit, d’une erreur de fait et d’une erreur d’appréciation

134    En premier lieu, la requérante soutient que le Conseil a commis deux erreurs de droit en ce qui concerne l’interprétation de l’article 20, paragraphe 1, de la décision 2010/413.

135    Premièrement, la requérante fait valoir que les critères définis à l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413 se réfèrent au gouvernement iranien, qui est une entité différente de l’État iranien visé par la première phrase de la motivation mise en avant par le Conseil pour justifier l’inscription de son nom à l’annexe II de la décision 2010/413 (voir point 13 ci-dessus). Le fait d’avoir des ministres au sein de ses instances dirigeantes ne déclencherait pas davantage les conditions d’application de l’article 20, paragraphe 1, sous b).

136    En l’espèce, ainsi que le relève le Conseil, il ressort clairement des motifs de la désignation de la requérante que c’est en tant qu’entité étatique fournissant un appui au gouvernement iranien, au sens de l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413, que son nom a été inscrit sur les listes en cause. Les arguments de la requérante relatifs à l’article 20, paragraphe 1, sous b), ne sont donc pas pertinents dans le cas d’espèce.

137    S’agissant de l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413, il suffit d’observer que la requérante n’explique ni la pertinence de la distinction qu’elle opère entre l’État et le gouvernement iranien, ni l’erreur de droit que le Conseil aurait commise en considérant que la requérante serait une entité détenue et gérée par l’État iranien. En tout état de cause, il n’est pas contesté que le gouvernement fait partie de l’État et que la requérante est une entreprise publique dans laquelle siègent des membres du gouvernement (voir également point 143 ci-après).

138    Deuxièmement, la requérante fait valoir que l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413 doit être interprété en relation avec le considérant 13 de la décision 2012/35. Elle en déduit que la seule circonstance qu’elle fournirait des ressources financières au gouvernement iranien ne saurait suffire à justifier l’inscription de son nom sur les listes en cause. Encore faudrait-il établir que ces ressources financières permettent la poursuite d’activités de prolifération nucléaire.

139    L’interprétation du critère appliqué en l’espèce, telle qu’elle est proposée par la requérante, ne saurait être retenue. À cet égard, le Conseil soutient, à bon droit, que la requérante effectue une confusion entre le critère relatif à la fourniture d’un appui au gouvernement iranien, énoncé à l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413, seul pertinent en l’espèce, et le critère relatif à la fourniture d’« un appui aux activités nucléaires de l’Iran posant un risque de prolifération ou à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires », énoncé à l’article 20, paragraphe 1, sous b), de la même décision, et impliquant un certain degré de rattachement aux activités nucléaires de l’Iran.

140    Or, en ce qui concerne le critère litigieux, il ressort expressément du considérant 13 de la décision 2012/35, laquelle a inséré ce critère à l’article 20, paragraphe 1, de la décision 2010/413, que les mesures de gel des fonds devraient être appliquées aux personnes et aux entités fournissant un appui au gouvernement iranien lui permettant de poursuivre des activités de prolifération nucléaire (voir point 118 ci-dessus). L’existence d’un lien entre la fourniture d’un appui au gouvernement iranien et la poursuite des activités de prolifération nucléaire est ainsi expressément établie par la réglementation applicable. Dans ce contexte, le critère litigieux doit être compris dans le sens qu’il vise tout appui qui, bien que n’ayant aucun lien direct ou indirect avec le développement de la prolifération nucléaire, est cependant susceptible, par son importance quantitative ou qualitative, de favoriser un tel développement, en fournissant au gouvernement iranien des ressources ou des facilités d’ordre matériel, financier ou logistique lui permettant de poursuivre les activités de prolifération nucléaire (voir points 119 à 121 ci-dessus). À cet égard, le Conseil rappelle, à juste titre, que ce critère vise à priver le gouvernement iranien de ses sources de revenus, en vue de le contraindre à cesser le développement de son programme de prolifération nucléaire, faute de ressources financières suffisantes.

141     En outre, au considérant 16 de la décision attaquée, le Conseil a précisé qu’il entendait élargir les catégories de personnes et d’entités susceptibles de faire l’objet de mesures restrictives, en visant également les entités détenues par l’État iranien opérant dans le secteur du pétrole et du gaz, étant donné qu’elles fournissent une source de revenus substantielle au gouvernement iranien. Il ressort ainsi explicitement de la réglementation applicable que le critère litigieux vise en particulier les entreprises publiques iraniennes du secteur de l’énergie et du gaz, en raison des revenus substantiels qu’elles fournissent au gouvernement iranien, sans exiger pour autant que ces entreprises soient impliquées de manière directe ou indirecte dans le programme nucléaire de l’Iran.

142    En deuxième lieu, la requérante soutient que le Conseil a commis une erreur de fait en constatant qu’elle était une « entité gérée par l’État ». Le Conseil aurait d’ailleurs reconnu dans le mémoire en défense qu’il entendait relever que la requérante était « gérée par des représentants de l’État ». La requérante fait valoir que, si l’État nomme certains de ses dirigeants, ceux-ci n’agissent pas au nom et pour le compte de l’État qui n’est qu’actionnaire de l’entreprise publique et, partant, ne la gère pas.

143    Cette argumentation, qui consiste à jouer sur les termes et les concepts, est dépourvue de toute substance. En effet, l’affirmation contenue dans la première phrase des motifs de l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause, selon laquelle la requérante est une « entité […] gérée par l’État », est explicitée dans la seconde phrase de ces motifs qui énonce que « [l]e ministre du Pétrole est directeur du conseil d’administration de la NIOC et le ministre adjoint du Pétrole [en] est le directeur général ».

144    Il ressort ainsi de manière explicite de ces motifs que le Conseil s’est fondé, pour motiver l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause, sur le fait que cette dernière était détenue par l’État iranien et gérée par des représentants de cet État.

145    Or, la requérante ne conteste ni qu’elle est détenue par l’État iranien, ni que les principales fonctions de direction en son sein sont exercées par des membres du gouvernement iranien. Par ailleurs, le Conseil relève à bon droit que l’État iranien, en tant que personne morale, ne peut agir qu’à travers ses représentants, en l’occurrence des membres du gouvernement iranien.

146    Il en résulte que le Conseil n’a commis aucune erreur de fait en indiquant que la requérante était « détenue et gérée par l’État iranien ».

147    En troisième lieu, la requérante soutient que le Conseil a également commis une erreur de fait en affirmant qu’elle fournissait des ressources financières au « gouvernement iranien ». En effet, la requérante exercerait les droits du peuple iranien sur les réserves de gaz et de pétrole du pays, au nom et au bénéfice du peuple iranien. En outre, le Conseil aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en s’abstenant de fournir la moindre preuve de ce que les recettes de l’activité pétrolière de la requérante seraient versées au gouvernement iranien.

148    Cette argumentation est manifestement privée de tout fondement. En effet, le Conseil soutient à bon droit que, dans la mesure où l’État iranien est l’unique actionnaire de la requérante, les dividendes de cette société reviennent en principe à l’État, les statuts de la requérante ne contenant aucune disposition contraire à cette règle commune. À cet égard, il ressort, au contraire, de l’article 54 de ces statuts que le solde du revenu total de la requérante est versé au Trésor public, après déduction des montants payés en application des dispositions desdits statuts.

149    Partant, le Conseil n’a commis aucune erreur de fait ni aucune erreur d’appréciation en estimant que, dans la mesure où elle était détenue et gérée par l’État iranien, la requérante fournissait des ressources financières au gouvernement iranien.

150    Il s’ensuit que le quatrième moyen doit être rejeté.

 Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation, des droits de la défense, du droit à une bonne administration et du droit à une protection juridictionnelle effective

151    En premier lieu, la requérante soutient que le Conseil a violé l’obligation de motivation. Elle allègue que les motifs de l’inscription de son nom sur les listes en cause, telle que l’affirmation selon laquelle elle serait « gérée par l’État », sont incompréhensibles. En effet, le Conseil n’exposerait pas les raisons pour lesquelles il considère que la requérante « fournit des ressources au gouvernement iranien ». Il se limiterait à reprendre le libellé du critère juridique appliqué en ce qui concerne la fourniture d’un appui financier au gouvernement iranien, sans préciser les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles ce critère lui était applicable.

152    Par cette argumentation, la requérante se borne en réalité à reprendre, sous l’angle de la motivation, les arguments qu’elle a déjà invoqués pour démontrer que les allégations du Conseil, selon lesquelles elle est « gérée par l’État » et « fournit des ressources financières au gouvernement iranien », sont entachées d’une erreur de fait ou d’une erreur manifeste d’appréciation  (voir points 143 à 149 ci-dessus).

153    À cet égard, il convient de rappeler que les motifs énoncés dans les actes attaqués indiquent explicitement que le Conseil s’est fondé, pour motiver l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause, sur le fait qu’elle était détenue par l’État iranien et gérée par des représentants de cet État, ainsi que cela a déjà été relevé (voir point 144 ci-dessus).

154    En particulier, en mentionnant dans les motifs de l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause, que cette dernière était détenue et gérée par l’État iranien, le ministre du Pétrole étant le directeur de son conseil d’administration et le ministre adjoint du Pétrole son directeur général, le Conseil a exposé de manière claire et compréhensible les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles il considérait que la requérante fournissait un appui financier au gouvernement iranien.

155    Partant, il y a lieu de constater que l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause est motivée à suffisance de droit.

156    En deuxième lieu, la requérante soutient qu’elle n’a pas été en mesure de présenter utilement ses observations à propos des griefs retenus contre elle, en raison du défaut de motivation des actes attaqués. Le Conseil aurait ainsi violé son droit d’être entendu ainsi que le principe de bonne administration.

157    Dans la mesure où ces arguments se fondent sur le défaut de motivation, ils doivent être rejetés pour les mêmes motifs que ceux ayant conduit à constater que les actes attaqués répondaient aux exigences liées à l’obligation de motivation (voir points 153 à 155 ci-dessus).

158    En troisième lieu, la requérante soutient que le Conseil a violé son droit d’accès au dossier et son droit à un recours juridictionnel effectif en ne lui communiquant le dossier qu’après l’introduction du présent recours. En outre, n’ayant pas eu le moindre accès utile aux informations et aux éléments de preuve retenus à sa charge, la requérante n’aurait pas été en mesure de défendre ses droits.

159    À cet égard, il y a lieu de constater que la requérante ne saurait reprocher au Conseil de ne pas lui avoir donné accès au dossier avant l’introduction du présent recours, le 27 décembre 2012, alors qu’elle ne lui avait adressé une demande en ce sens que le 26 décembre 2012. En outre et en tout état de cause, force est de constater que les éléments justifiant l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause étaient clairement énoncés dans les actes attaqués.

160    Partant, les arguments relatifs à la violation du droit d’accès au dossier et du droit à une protection juridictionnelle effective doivent être rejetés.

161    Par ailleurs, la requérante soutient dans la réplique que le dossier qui lui a été communiqué le 12 mars 2012 par le Conseil révèle un fait nouveau l’autorisant à invoquer des arguments nouveaux.

162    En effet, selon la requérante, il ressort de ce dossier que les actes attaqués se limitent à reprendre les motifs avancés dans la proposition, présentée par un État membre le 19 septembre 2012, d’inscrire son nom sur les listes en cause. Cela démontrerait que le Conseil n’a conduit aucune instruction du dossier, mais s’est limité à enregistrer la proposition d’une très faible minorité d’États membres.

163    De plus, il ressortirait de cette proposition que les motifs énoncés dans les actes attaqués ne correspondent pas au motif réel de l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause, qui résiderait dans le fait qu’elle est une entreprise iranienne du secteur énergétique.

164    À cet égard, il convient d’abord de relever que la circonstance que les motifs d’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause, tels qu’énoncés dans les actes attaqués, reprennent les motifs avancés dans l’une des quatre propositions d’inscription de son nom sur lesdites listes, présentées par des États membres, ne permet pas de supposer que le Conseil n’a pas instruit le dossier, ce qui constituerait une erreur manifeste d’appréciation.

165    Ensuite, le seul fait que, dans la proposition d’un État membre invoquée par la requérante (voir point 162 ci-dessus), il est indiqué que « l’ UE devrait viser les principales sociétés iraniennes du secteur énergétique, ainsi que leurs filiales » et que, dans deux autres des quatre propositions émanant d’États membres mentionnées au point 164 ci-dessus, il soit fait référence à la NIOC en tant que grande compagnie du secteur iranien de l’énergie, ne signifie pas que le nom de la requérante n’a pas été inscrit sur les listes en cause pour les motifs énoncés dans les actes attaqués, fondés sur la fourniture d’un appui financier au gouvernement iranien.

166    Or, force est de rappeler, à cet égard, que ces motifs sont conformes à l’obligation de motivation des actes des institutions de l’Union et qu’ils permettent d’étayer à suffisance de droit l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause, ainsi qu’il a déjà été constaté aux points 149 et 155 ci-dessus.

167    Pour l’ensemble de ces raisons, le cinquième moyen doit être rejeté.

 Sur le sixième moyen, tiré de la violation du principe de proportionnalité et du droit de propriété

168    À titre liminaire, il convient de rejeter l’argument du Conseil, soutenu par la Commission, selon lequel la requérante, en tant qu’émanation de l’État iranien, ne saurait se prévaloir de la violation des droits fondamentaux, en particulier du droit de propriété (voir point 32 ci-dessus).

169    En effet, ni le droit primaire de l’Union ni la charte des droits fondamentaux ne comportent de dispositions excluant les entreprises publiques, telles que la requérante, du bénéfice de la protection des droits fondamentaux. Au contraire, les dispositions de ladite charte qui sont pertinentes par rapport aux moyens soulevés par la requérante, notamment ses articles 17, 41 et 47, garantissent les droits de « [t]oute personne », cette formulation incluant notamment les personnes morales qui sont des émanations d’un État (arrêt Bank Mellat/Conseil, précité, point 36).

170    En outre, les dispositions spécifiques des traités et du droit dérivé relatives aux mesures restrictives rappellent la nécessité de respecter les garanties juridiques et les droits fondamentaux sans distinguer à cet égard selon que les personnes ou les entités visées entretiennent des liens plus ou moins étroits avec l’État tiers concerné (voir les conclusions de l’avocat général M. Bot sous l’arrêt Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft, précitées, points 67 et 69). L’article 215, paragraphe 3, TFUE énonce ainsi que les actes prévoyant des mesures restrictives contiennent les dispositions nécessaires en matière de garanties juridiques. La déclaration n° 25, intitulée « Déclaration ad articles 75 et 215 du traité [FUE] », annexée à l’acte final de la conférence intergouvernementale qui a adopté le traité de Lisbonne, signé le 13 décembre 2007, souligne la nécessité de respecter les droits et les libertés fondamentaux des personnes et des entités visées par des mesures restrictives (JO 2008, C 115, p. 346, et JO 2012, C 326, p. 348). Quant au considérant 25 de la décision 2010/413 et au considérant 26 du règlement n° 267/2012, ils rappellent expressément que ces actes devront être appliqués dans le respect des droits fondamentaux et des principes reconnus par la charte des droits fondamentaux, en particulier du droit à un recours effectif et à un Tribunal impartial, du droit de propriété et du droit à la protection des données à caractère personnel.

171    Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que, de même que, en vertu de la CEDH, les États doivent garantir sur leur territoire le respect des droits fondamentaux à l’égard de toute personne physique ou morale relevant de leur juridiction au sens de l’article 1er de cette convention, l’Union est la garante, selon les modalités prévues par son propre droit, du respect des droits fondamentaux dans le cadre de l’exercice de leurs compétences par ses institutions, y compris lors de l’adoption de mesures restrictives à l’égard d’une personne morale qui est une émanation d’un État tiers.

172    Cependant, en l’espèce, force est de constater que la requérante n’a pas établi que les actes attaqués étaient contraires au principe de proportionnalité en ce qu’ils violaient son droit de propriété.

173    En premier lieu, la requérante soutient à cet égard que l’inscription de son nom sur les listes en cause est inappropriée au regard des objectifs poursuivis. En effet, elle ne serait pas impliquée dans des activités de prolifération nucléaire, ce que le Conseil ne contesterait pas. De plus, cette inscription ne contribuerait pas à exercer des pressions sur le gouvernement iranien en vue de le contraindre à mettre fin à ses activités de prolifération nucléaire, mais causerait un grand dommage au peuple iranien, y compris aux employés de la requérante.

174    En outre, la requérante fait valoir que l’inscription de son nom sur les listes en cause n’est pas nécessaire. Le Conseil disposerait de moyens moins attentatoires aux droits et aux libertés des personnes pour réaliser les objectifs poursuivis.

175    Cette argumentation se limite à réitérer celle invoquée à l’appui de l’exception d’illégalité soulevée à l’encontre du critère litigieux et doit dès lors être rejetée pour les mêmes motifs (voir points 99 à 129 ci-dessus).

176    En second lieu, la requérante a fait valoir à titre subsidiaire, lors de l’audience, que le maintien des mesures restrictives imposées par les actes attaqués était devenu disproportionné, à tout le moins à partir du 20 janvier 2014, date d’ouverture de la première étape du plan d’action conjoint concernant le programme nucléaire iranien, prévu par l’accord préliminaire conclu à Genève (Suisse) le 26 novembre 2013 entre l’Iran et six autres pays négociateurs, dont trois États membres.

177    À cet égard, il suffit de rappeler que la légalité des actes attaqués ne peut être appréciée que sur le fondement des éléments de fait et de droit sur la base desquels ils ont été adoptés (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 26 octobre 2012, Oil Turbo Compressor/Conseil, T‑63/12, non encore publié au Recueil, point 29). Or, les négociations entamées le 20 janvier 2014 auxquelles la requérante se réfère constituent des événements postérieurs à la date d’adoption des actes attaqués, de sorte qu’il n’y a pas lieu de les prendre en considération dans le cadre du présent recours .

178    Le sixième moyen ne saurait dès lors être accueilli.

179    Il s’ensuit que le recours doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

180    L’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure dispose que toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé en l’ensemble de ses conclusions, il y a lieu de la condamner aux dépens de la présente instance, conformément aux conclusions du Conseil.

181    Aux termes de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs dépens. Il y a donc lieu d’ordonner que la Commission supporte ses propres dépens. 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      National Iranian Oil Company supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par le Conseil de l’Union européenne.

3)      La Commission européenne supportera ses propres dépens.


van der Woude

Wiszniewska-Białecka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 juillet 2014.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

Sur la recevabilité

Sur le fond

Sur le premier moyen tiré du défaut de motivation du règlement attaqué

Sur le deuxième moyen, tiré de l’absence de base juridique appropriée du règlement attaqué

Sur la régularité de l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012, au regard des dispositions de l’article 215 TFUE et de l’article 291, paragraphe 2, TFUE.

– Sur l’applicabilité de l’article 291 TFUE dans le domaine des mesures restrictives fondées sur l’article 215 TFUE

– Sur la conformité de l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012 aux conditions énoncées à l’article 291, paragraphe 2, TFUE

Sur la régularité de l’article 46, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012, au regard de l’obligation de motivation

Sur le troisième moyen, tiré de l’illégalité alléguée de l’article 20, paragraphe 1, sous c), de la décision 2010/413 et de l’article 23, paragraphe 2, sous d), du règlement n° 267/2012

Sur la violation alléguée des valeurs de l’État de droit, du droit de propriété et du principe de proportionnalité

Sur l’incohérence alléguée dans la formulation du critère litigieux par la réglementation applicable

Sur le quatrième moyen tiré d’erreurs de droit, d’une erreur de fait et d’une erreur d’appréciation

Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation, des droits de la défense, du droit à une bonne administration et du droit à une protection juridictionnelle effective

Sur le sixième moyen, tiré de la violation du principe de proportionnalité et du droit de propriété

Sur les dépens


* Langue de procédure : le français.