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Demande de décision préjudicielle présentée par le Landgericht Düsseldorf (Allemagne) le 23 mars 2021 – Nokia Technologies Oy/Daimler AG

(Affaire C-182/21)

Langue de procédure : l’allemand

Juridiction de renvoi

Landgericht Düsseldorf

Parties dans la procédure au principal

Partie requérante : Nokia Technologies Oy

Partie défenderesse : Daimler AG

Autres parties à la procédure : Continental Automotive GmbH, Continental Automotive Hungary Kft., Bury Sp. z.o.o., TomTom Sales B.V., VALEO Telematik und Akustik GmbH (anciennement Peiker acustic GmbH), Robert Bosch GmbH, Huawei Technologies Deutschland GmbH, TomTom International B.V., Sierra Wireless S.A

Questions préjudicielles

A.    Existe-t-il une obligation d’octroyer une licence à des fournisseurs par priorité ?

1.    Une entreprise située en aval dans le circuit économique peut-elle faire valoir, à l’encontre d’une action en contrefaçon tendant à la cessation de la contrefaçon, introduite par le titulaire d’un brevet essentiel à une norme établie par un organisme de normalisation (ci après un « BEN »), ledit titulaire s’étant irrévocablement engagé, auprès de l’organisme de normalisation, à le donner en licence aux tiers à des conditions FRAND, l’exception d’abus de position dominante au sens de l’article 102 TFUE, si la norme pour laquelle le brevet litigieux est essentiel, ou certaines parties de celle ci, sont déjà mises en œuvre dans un produit préliminaire acquis par la partie défenderesse dans l’action en contrefaçon, dont les fournisseurs désireux d’obtenir une licence se voient refuser, par le titulaire du brevet, l’octroi d’une licence illimitée à des conditions FRAND pour tous les types d’utilisation pertinents au regard du droit des brevets, concernant des produits mettant en œuvre la norme ?

a)    En va-t-il en particulier ainsi lorsqu’il est d’usage, dans le secteur économique concerné du distributeur du produit final, que la situation de la disponibilité des brevets utilisés pour les pièces détachées soit clarifiée grâce à la prise de licences par les fournisseurs ?

b)    Existe-t-il une priorité dans la concession de licences à l’égard des fournisseurs à chaque étape de la chaîne d’approvisionnement ou seulement à l’égard du fournisseur qui se trouve immédiatement en amont du distributeur du produit final au bout de la chaîne de valorisation ? Les usages commerciaux sont-ils là aussi déterminants ?

2.    L’interdiction des abus prévue par le droit des ententes implique-t-elle que le fournisseur se voie accorder sa propre licence illimitée à des conditions FRAND pour tous les types d’utilisation pertinents au regard du droit des brevets, concernant des produits mettant en œuvre la norme, en ce sens que les distributeurs finaux (et, le cas échéant, les acheteurs en amont) n’ont plus besoin d’obtenir à leur tour leur propre licence séparée de la part du titulaire du BEN pour éviter une contrefaçon lorsque la pièce détachée concernée est utilisée conformément à sa destination ?

3.    En cas de réponse négative à la question préjudicielle 1 : l’article 102 TFUE prévoit-il des conditions particulières de qualité et/ou de quantité ou autres pour les critères en vertu desquels le titulaire d’un BEN décide contre quels contrefacteurs de brevets potentiels, à différents niveaux de la même chaîne de production et de valorisation, il intentera une action en contrefaçon tendant à la cessation de la contrefaçon ?

B. Concrétisation des exigences de l’arrêt de la Cour du 16 juillet 2015, Huawei Technologies 1  :

1.    Indépendamment du fait que les obligations d’agir qui incombent mutuellement au titulaire d’un BEN et à l’utilisateur d’un BEN (avertissement relatif à la contrefaçon, demande de concession de licence, offre de licence à des conditions FRAND ; offre de licence au fournisseur devant bénéficier d’une licence par priorité) doivent être remplies au stade précontentieux, existe-t-il une possibilité de s’acquitter a posteriori, au cours de la procédure juridictionnelle et sans perdre ses droits, de ces obligations qui ont été omises préalablement à l’engagement de la procédure ?

2.    Doit-on considérer qu’il n’y a de demande sérieuse de concession de licence de la part de l’utilisateur du brevet que si une évaluation complète de toutes les circonstances entourant cette demande montre clairement et sans équivoque que l’utilisateur du BEN le souhaite et qu’il est disposé à conclure un contrat de licence avec le titulaire du BEN à des conditions FRAND, quelles que soient les modalités de ces conditions (qui, en l’absence d’une offre de licence formulée à ce moment-là, ne sont absolument pas encore prévisibles) ?

a)    Un contrefacteur qui reste silencieux pendant plusieurs mois après avoir été averti de la contrefaçon donne-t-il ainsi généralement à entendre qu’il ne souhaite pas obtenir de licence, de sorte que – malgré une demande de licence formulée verbalement – celle-ci fait défaut, avec pour conséquence que l’action en cessation introduite par le titulaire d’un BEN doit être accueillie ?

b)    Des conditions de licence soumises par l’utilisateur d’un BEN dans le cadre d’une contre-offre permettent-elles de conclure à l’absence d’une demande de licence, avec pour conséquence que l’action en cessation du titulaire d’un BEN doit être accueillie sans examiner au préalable si la propre offre de licence du titulaire d’un BEN (ayant précédé la contre-offre de l’utilisateur d’un BEN) est elle-même conforme aux conditions FRAND ?

c)    Une telle conclusion est-elle en tout cas exclue si les conditions d’octroi de la licence, tirées de la contre-offre et permettant, par hypothèse, de conclure à l’absence d’une demande de licence, sont telles que leur incompatibilité avec les conditions FRAND n’est ni manifeste ni consacrée par la jurisprudence des juridictions supérieures ?

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1     C-170/13, EU:C:2015:477.