Language of document : ECLI:EU:T:2013:472

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

16 septembre 2013 (*)

« Aides d’État – Compensation de charges de service public dans le cadre d’un projet de réseau de communications électroniques à très haut débit dans le département des Hauts-de-Seine – Décision constatant l’absence d’aide – Absence d’ouverture de la procédure formelle d’examen – Difficultés sérieuses – Arrêt Altmark – Service d’intérêt économique général – Défaillance du marché – Surcompensation »

Dans l’affaire T‑325/10,

Iliad, établie à Paris (France),

Free infrastructure, établie à Paris,

Free, établie à Paris,

représentées par MT. Cabot, avocat,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée par MM. B. Stromsky et C. Urraca Caviedes, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

République française, représentée initialement par MM. G. de Bergues et J.  Gstalter, puis par M. D. Colas et Mme J. Bousin, en qualité d’agents,

par

République de Pologne, représentée initialement par MM. M. Szpunar et B. Majczyna, puis par M. Majczyna, en qualité d’agents,

et par

Département des Hauts-de-Seine (France), représenté par Mes J.-D. Bloch et G. O’Mahony, avocats,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2009) 7426 final de la Commission, du 30 septembre 2009, relative à la compensation de charges de service public pour l’établissement et l’exploitation d’un réseau de communications électroniques à très haut débit dans le département des Hauts-de-Seine (aide d’État N 331/2008 – France),

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. L. Truchot (rapporteur), président, Mme M. E. Martins Ribeiro et M. A. Popescu, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 17 mai 2013,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 27 juin 2008, les autorités françaises ont notifié à la Commission des Communautés européennes un projet d’octroi à un groupement d’entreprises, Sequalum SAS, choisi à l’issue d’une mise en concurrence, d’une compensation de charges de service public de 59 millions d’euros pour l’établissement et l’exploitation d’un réseau de communications électroniques à très haut débit dans le département des Hauts-de-Seine (France) (ci-après le « projet THD 92 »). Le département des Hauts-de-Seine, qui est une collectivité territoriale française sise dans la périphérie immédiate de Paris (France), située au nord-ouest, à l’ouest et au sud-ouest de cette ville, avait en effet décidé, compte tenu de l’hétérogénéité en termes économique, sociologique, topographique et d’infrastructures des communes situées sur son territoire, de procéder au déploiement d’un réseau de communications électroniques à très haut débit (réseau en fibre optique) (ci-après le « réseau THD 92 »), afin de constituer un socle durable en matière de technologies de l’information et de la communication.

2        Cette notification a été complétée par les autorités françaises le 15 juillet 2008.

3        Le 22 juillet 2008, la Commission a reçu un courrier confidentiel envoyé par un opérateur de communications électroniques, exerçant son activité sur le territoire des Hauts-de-Seine, soutenant que le projet THD 92 n’était pas compatible avec le marché commun.

4        Ce courrier a été suivi, le 1er août 2008, par des courriers dans lesquels deux opérateurs de réseaux et de services des communications électroniques, l’une des requérantes dans la présente affaire, Free, et Colt Télécommunications France, ainsi que le syndicat intercommunal de la périphérie de Paris pour l’électricité et les réseaux de communication (ci-après le « Sipperec ») ont contesté auprès de la Commission la compatibilité du projet THD 92 avec les règles applicables aux aides d’État. Le 22 septembre 2008, France Télécom, opérateur historique des communications électroniques en France, a également envoyé à la Commission des observations sur certains aspects du projet THD 92. Une version non confidentielle de ces observations a été envoyée aux autorités françaises le 10 octobre 2008.

5        Le 18 août 2008, la Commission a demandé des informations complémentaires aux autorités françaises. Après avoir sollicité de la Commission deux prorogations des délais de réponse, dont la dernière aux fins de pouvoir prendre en compte les observations de France Télécom, les autorités françaises ont transmis à la Commission le 19 novembre 2008 les renseignements sollicités et ont complété leur réponse par un courrier du 28 novembre 2008.

6        Par courriers des 21 novembre 2008 et 16 février 2009, le Sipperec a présenté de nouvelles observations à la Commission sur certains aspects du projet THD 92.

7        Le 23 janvier 2009, la Commission a envoyé aux autorités françaises une nouvelle demande d’informations. Après avoir demandé des délais de réponse supplémentaires, par lettres des 27 février et 3 mars 2009, les autorités françaises ont répondu aux questions posées par la Commission le 13 mai 2009. Cette réponse a été complétée par l’envoi de sept annexes le 2 juin 2009.

8        Dans l’intervalle, le 6 février 2009, France Télécom a communiqué à la Commission ses prévisions relatives au déploiement de son réseau à très haut débit dans les Hauts-de-Seine.

9        Par courriers des 12 novembre, 9 et 10 décembre 2008, 7 et 22 janvier, 4 et l3 février, 12 mars, 26 mai, 8 et 26 juin 2009, Free a exprimé son opposition au projet THD 92, estimant qu’il constituait une aide incompatible avec le marché commun.

10      Le 29 mai 2009, la Commission a demandé aux autorités françaises de lui présenter leurs observations éventuelles relatives au courrier de Free du 26 mai 2009 mentionné au point 9 ci-dessus. Ces observations lui sont parvenues le 17 juin 2009.

11      Le 13 juillet 2009, Colt Télécommunications France a une nouvelle fois informé la Commission de son opposition au projet THD 92.

12      Par courrier reçu par la Commission le 10 août 2009, les autorités françaises ont déposé un complément à leurs réponses précédentes.

13      Par la décision C (2009) 7426 final, du 30 septembre 2009, relative à la compensation de charges de service public pour l’établissement et l’exploitation d’un réseau de communications électroniques à très haut débit dans le département des Hauts-de-Seine (aide d’État N 331/2008 – France), ayant fait l’objet d’un corrigendum le 16 décembre 2009 et d’une publication sur le site Internet de la Commission le 4 janvier 2010, la Commission a constaté que la mesure notifiée ne constituait pas une aide d’État (ci-après la « décision attaquée »). La décision attaquée est fondée, en substance, sur les considérations mentionnées aux points 14 et 17 ci-après.

14      En premier lieu, la Commission a relevé que, pour remédier aux insuffisances techniques des réseaux métalliques existants et au déploiement déséquilibré du réseau à très haut débit sur le territoire départemental, le projet THD 92 visait à atteindre, selon les autorités françaises, trois objectifs principaux. Le premier objectif poursuivi était la couverture universelle du territoire, c’est-à-dire la couverture, à l’issue d’une période de six ans, de la totalité du territoire départemental par une infrastructure de desserte à très haut débit qui serait mise à la disposition de tous les opérateurs dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, au lieu d’une concentration sur les zones les plus denses du territoire ignorant celles dans lesquelles un investissement similaire ne serait pas rentable. Le deuxième objectif poursuivi était la neutralité technologique de l’infrastructure déployée. Enfin, le troisième objectif poursuivi était la péréquation des prix pratiqués à l’échelle du département, l’exploitant du réseau THD 92 étant tenu de proposer des tarifs identiques, quelle que soit la localisation des infrastructures mises à disposition sur le territoire départemental, afin que les recettes tirées des zones plus rentables viennent compenser les pertes occasionnées par la construction de l’infrastructure dans les zones non rentables (paragraphes 21, 26 à 28 et 30 de la décision attaquée).

15      En deuxième lieu, la Commission a précisé que les autorités françaises avaient choisi de confier la réalisation du projet THD 92 à un tiers dans le cadre d’une délégation de service public (ci-après la « DSP ») ayant la forme d’une concession, c’est-à-dire en lui accordant une subvention pour couvrir les coûts afférents, le bénéficiaire de la délégation devant par ailleurs se rémunérer sur toute la durée de celle-ci en exploitant l’infrastructure construite. Lors de la procédure de sélection, six candidatures auraient été reçues, examinées et suivies d’une invitation par les autorités françaises à présenter une offre. Les requérantes, Iliad, Free infrastructure et Free, n’ont pas participé à cette procédure. À l’issue de la procédure de sélection, l’offre du groupement constitué de Numericable, LD Collectivités et Eiffage, regroupées au sein du consortium Sequalum, a été retenue (paragraphes 31, 35, 36 et 40 de la décision attaquée).

16      S’agissant du contenu de la DSP, la Commission a indiqué, dans la décision attaquée, que, selon la convention signée entre le département des Hauts-de-Seine et le délégataire, ce dernier s’engageait, d’une part, à concevoir, à financer, à construire et à déployer un réseau universel de communications électroniques de desserte en fibre optique et, d’autre part, à l’exploiter en le mettant à la disposition de ses usagers, à savoir des opérateurs de communications électroniques et éventuellement des utilisateurs de réseaux indépendants. La convention aurait une durée de 25 ans, justifiée par la durée d’amortissement des ouvrages construits par le délégataire. La construction du réseau s’échelonnerait sur une durée de six ans, comportant deux phases successives de 36 mois chacune. La Commission a également constaté, dans la décision attaquée, que, afin de compenser les surcoûts induits par la couverture intégrale du département des Hauts-de-Seine ainsi que par la péréquation tarifaire, le délégataire bénéficierait d’une subvention de 59 millions d’euros, dont 25 millions pour la première phase de réalisation et 34 millions pour la seconde phase. Il est également indiqué, dans la décision attaquée, que, selon les autorités françaises, la subvention ne compense que les coûts du déploiement du réseau THD 92 dans les zones non rentables, qui correspondent à 40 % du territoire à couvrir (paragraphes 41, 42 et 50 de la décision attaquée).

17      En troisième lieu, la Commission a estimé, dans la décision attaquée, que le service d’intérêt économique général (ci-après le « SIEG ») ainsi mis en place par les autorités françaises était conforme aux exigences posées par l’arrêt de la Cour du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (C‑280/00, Rec. p. I‑7747, ci-après l’« arrêt Altmark »), en faisant également référence aux lignes directrices communautaires pour l’application des règles relatives aux aides d’État dans le cadre du déploiement rapide des réseaux de communication à haut débit (JO 2009, C 235, p. 7, ci-après les « lignes directrices »). En particulier, la Commission a considéré que le groupement bénéficiaire avait effectivement été chargé de l’exécution d’obligations de service public clairement définies, que les paramètres du financement public avaient été préalablement établis de façon objective et transparente, que la compensation prévue ne dépassait pas ce qui était nécessaire pour couvrir les coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public et que la DSP avait été attribuée à l’issue d’une procédure ayant effectivement permis de sélectionner le candidat capable de fournir ce service au moindre coût pour la collectivité. La Commission en a conclu que la mesure notifiée ne constituait pas une aide d’État (paragraphes 116 à 175 et note en bas de page n° 39 de la décision attaquée).

 Procédure et conclusions des parties

18      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 3 août 2010, les requérantes ont introduit le présent recours.

19      Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement, le 3 novembre, le 2 et le 13 décembre 2010, le département des Hauts-de-Seine, la République française et la République de Pologne ont demandé à intervenir à l’appui des conclusions de la Commission.

20      Par ordonnances du président de la huitième chambre du Tribunal du 2 mars 2011, le département des Hauts-de-Seine, la République française et la République de Pologne ont été admis à intervenir. La décision sur le bien-fondé des demandes de traitement confidentiel a été réservée.

21      Par ordonnance du 5 octobre 2012, le président de la huitième chambre du Tribunal a partiellement accueilli les demandes de traitement confidentiel des requérantes.

22      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (huitième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, au titre des mesures d’organisation de la procédure, a demandé à la Commission de produire certains des documents visés au point 25 ci-après. La Commission a déféré à cette demande en communiquant dans sa réponse l’ensemble des documents demandés par les requérantes dans la réplique (voir point 25 ci-après).

23      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 17 mai 2013.

24      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

25      Les requérantes demandent également au Tribunal, dans la réplique, d’ordonner à la Commission de produire :

–        la notification du projet THD 92 par les autorités françaises en date du 27 juin 2008 ainsi que le complément de notification du 15 juillet 2008 ;

–        les demandes d’informations adressées aux autorités françaises datées des 18 août 2008 et 23 janvier 2009 ;

–        les réponses données par lesdites autorités à ces demandes en date des 19 et 28 novembre 2008, 13 mars et 10 août 2009 ;

–        les courriers des autorités françaises des 8 septembre et 16 octobre 2008 demandant l’octroi de délais de réponses supplémentaires ;

–        le courrier des autorités françaises du 30 avril 2009 évoqué aux paragraphes 89 et 114 de la décision attaquée ;

–        la demande d’observations de la Commission du 29 mai 2009 faisant suite au courrier de Free du 26 mai 2009 et la réponse des autorités françaises du 17 juin 2009.

26      La Commission et les intervenants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

 En droit

27      Au soutien de leur recours, les requérantes soulèvent trois moyens, tirés, le premier, de la violation de leurs droits procéduraux tels que prévus par l’article 88, paragraphe 2, CE, en raison de l’absence d’ouverture de la procédure formelle d’examen par la Commission, le deuxième, de la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE, au motif que les quatre critères posés par l’arrêt Altmark, point 17 supra, pour qu’une mesure puisse échapper à la qualification d’aide d’État ne seraient pas réunis en l’espèce et, le troisième, de la violation de l’obligation de motivation. 

28      Avant d’examiner chacun de ces moyens, il convient de rejeter comme irrecevable le document fourni en annexe 1 des observations des requérantes sur les mémoires en intervention, qui constitue une « réponse détaillée à la duplique de la Commission », sans que les arguments qui y sont exposés soient repris dans lesdites observations. En effet, en vertu d’une jurisprudence constante, le texte de la requête peut être étayé et complété sur des points spécifiques par des renvois à des passages déterminés de pièces qui y sont annexées, mais un renvoi à d’autres écrits, même annexés à la requête, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels dans celle-ci, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale. Les annexes ne sauraient dès lors servir à développer un moyen sommairement exposé dans la requête en avançant des griefs ou des arguments ne figurant pas dans celle-ci. Le requérant doit indiquer dans sa requête les griefs précis sur lesquels le Tribunal est appelé à se prononcer ainsi que, de manière à tout le moins sommaire, les éléments de droit et de fait sur lesquels ces griefs sont fondés. En effet, il serait contraire à la fonction purement probatoire et instrumentale des annexes que celles-ci puissent servir à faire la démonstration détaillée d’une allégation présentée de manière insuffisamment claire et précise dans la requête (voir arrêt du Tribunal du 30 janvier 2007, France Telecom/Commission, T‑340/03, Rec. p. II‑107, points 167 et 204, et la jurisprudence citée).

I –  Sur le premier moyen, tiré de la violation des droits procéduraux des requérantes prévus par l’article 88, paragraphe 2, CE

29      Les requérantes soutiennent que la Commission a violé leurs droits procéduraux en raison de l’absence d’ouverture de la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE.

30      À titre liminaire, il convient de rappeler que, dans le cadre de la procédure de contrôle des aides d’État, doivent être distinguées, d’une part, la phase préliminaire d’examen des aides instituée à l’article 88, paragraphe 3, CE, qui a seulement pour objet de permettre à la Commission de se former une première opinion sur la mesure notifiée, et, d’autre part, la phase formelle d’examen visée à l’article 88, paragraphe 2, CE. Ce n’est que dans le cadre de celle-ci, qui est destinée à permettre à la Commission d’avoir une information complète sur l’ensemble des données de l’affaire, que le traité prévoit l’obligation, pour la Commission, de mettre en demeure les intéressés de présenter leurs observations (voir arrêt du Tribunal du 10 juillet 2012, Smurfit Kappa Group/Commission, T‑304/08, non encore publié au Recueil, point 45, et la jurisprudence citée).

31      Selon une jurisprudence constante, la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE revêt un caractère indispensable dès lors que la Commission éprouve des difficultés sérieuses pour apprécier si une mesure est constitutive d’une aide d’État (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 10 février 2009, Deutsche Post et DHL International/Commission, T‑388/03, Rec. p. II‑199, point 88, et la jurisprudence citée).

32      La Commission ne peut donc s’en tenir à la phase préliminaire énoncée à l’article 88, paragraphe 3, CE pour prendre une décision favorable à une mesure étatique que si elle est en mesure d’acquérir la conviction, au terme d’un premier examen, que cette mesure soit ne constitue pas une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, soit, si elle est qualifiée d’aide, est compatible avec le traité. En revanche, si ce premier examen a conduit la Commission à la conviction contraire, ou même n’a pas permis de surmonter toutes les difficultés soulevées par l’appréciation de la mesure considérée, la Commission a le devoir de s’entourer de tous les avis nécessaires et d’ouvrir, à cet effet, la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE (arrêt de la Cour du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C‑487/06 P, Rec. p. I‑10515, points 186 et 187).

33      Cette obligation résulte directement de l’article 88, paragraphe 3, CE, tel qu’il a été interprété par la jurisprudence, et est confirmée par les dispositions de l’article 4, paragraphe 4, du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [88 CE] (JO L 83, p. 1), lorsque la Commission constate, après un examen préliminaire, que la mesure notifiée suscite des doutes quant à sa compatibilité avec le marché commun (voir arrêt du Tribunal du 18 novembre 2009, Scheucher-Fleisch e.a./Commission, T‑375/04, Rec. p. II‑4155, point 69, et la jurisprudence citée).

34      Dès lors, il appartient à la Commission de déterminer, en fonction des circonstances de fait et de droit propres à l’affaire, si les difficultés rencontrées dans l’examen de la mesure notifiée nécessitent l’ouverture de la procédure formelle d’examen. Cette appréciation doit respecter trois exigences (voir, en ce sens, arrêt Deutsche Post et DHL International/Commission, point 31 supra, point 89, et la jurisprudence citée).

35      Premièrement, l’article 88 CE circonscrit le pouvoir de la Commission de se prononcer sur l’existence d’une aide au terme de la procédure d’examen préliminaire aux seules mesures ne soulevant pas de difficultés sérieuses, de telle sorte que ce critère revêt un caractère exclusif. Ainsi, la Commission ne saurait refuser d’ouvrir la procédure formelle d’examen en se prévalant d’autres circonstances, telles que l’intérêt de tiers, des considérations d’économie de procédure ou tout autre motif de convenance administrative ou politique (voir, en ce sens, arrêt Deutsche Post et DHL International/Commission, point 31 supra, point 90, et la jurisprudence citée).

36      Deuxièmement, lorsqu’elle se heurte à des difficultés sérieuses, la Commission est tenue d’ouvrir la procédure formelle et ne dispose, à cet égard, d’aucun pouvoir discrétionnaire (arrêt Deutsche Post et DHL International/Commission, point 31 supra, point 91).

37      Troisièmement, la notion de difficultés sérieuses revêt un caractère objectif. L’existence de telles difficultés doit être recherchée tant dans les circonstances d’adoption de l’acte attaqué que dans son contenu, d’une manière objective, en mettant en rapport les motifs de la décision avec les éléments dont la Commission pouvait disposer lorsqu’elle s’est prononcée sur la qualification d’aide de la mesure litigieuse. Il en découle que le contrôle de légalité effectué par le Tribunal sur l’existence de difficultés sérieuses, par nature, ne peut se limiter à la recherche de l’erreur manifeste d’appréciation (voir, en ce sens, arrêt Deutsche Post et DHL International/Commission, point 31 supra, point 92, et la jurisprudence citée).

38      À cet égard, il convient de relever que la partie requérante supporte la charge de la preuve de l’existence de difficultés sérieuses, preuve qu’elle peut fournir à partir d’un faisceau d’indices concordants, relatifs, d’une part, aux circonstances et à la durée de la phase préliminaire d’examen et, d’autre part, au contenu de la décision attaquée (arrêts du Tribunal du 15 mars 2001, Prayon‑Rupel/Commission, T‑73/98, Rec. p. II‑867, point 49, et du 3 mars 2010, Bundesverband deutscher Banken/Commission, T‑36/06, Rec. p. II‑537, point 127).

39      En l’espèce, selon les requérantes, l’existence de difficultés sérieuses nécessitant l’ouverture de la procédure formelle d’examen serait révélée par des indices tenant, d’une part, à la procédure préliminaire d’examen et, d’autre part, au contenu de la décision attaquée.

A –  Indices relatifs à la procédure préliminaire d’examen

40      Selon les requérantes, trois circonstances caractérisant la procédure préliminaire d’examen ayant donné lieu à l’adoption de la décision attaquée démontreraient l’existence de difficultés sérieuses rencontrées par la Commission lors de son appréciation de la mesure notifiée.

1.     Sur le premier indice, tenant à la durée de la procédure préliminaire d’examen

41      Les requérantes font valoir que la durée de la procédure préliminaire d’examen est révélatrice de l’existence de difficultés sérieuses. Elles font observer à cet égard que la Commission a adopté la décision attaquée au terme d’une instruction formelle de quinze mois, excédant largement le délai de deux mois prévu par le règlement n° 659/1999. En outre, la Commission n’aurait pas toujours respecté le délai d’envoi des demandes d’information, délai de deux mois, fixé par le règlement n° 659/1999. Les requérantes ajoutent qu’il est difficile pour elles d’argumenter en l’espèce sur le respect des délais prévus par le règlement n° 659/1999, dès lors qu’elles n’ont pas accès aux échanges entre la Commission et l’État notifiant. Elles demandent à cet égard que la production de cette correspondance soit ordonnée à la Commission (voir point 25 ci-dessus).

42      Les requérantes précisent en outre, en réponse à une argumentation subsidiaire de la Commission selon laquelle le délai de quinze mois séparant la notification initiale de la décision attaquée ne saurait en tout état de cause être considéré comme excessif, que l’arrêt cité par la Commission au soutien de cette argumentation (arrêt Bundesverband deutscher Banken/Commission, point 38 supra) a retenu une telle solution en raison des circonstances propres à l’espèce.

43      Selon une jurisprudence constante, la durée de l’examen préliminaire peut, avec d’autres éléments, constituer un indice des difficultés sérieuses rencontrées par la Commission, si elle excède notablement ce qu’implique normalement un tel examen (arrêts du Tribunal du 10 mai 2000, SIC/Commission, T‑46/97, Rec. p. II‑2125, point 102, et du 10 juillet 2012, TF1 e.a./Commission, T‑520/09, non publié au Recueil, point 54).

44      En vertu de l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 659/1999, l’examen préliminaire débute dès la réception de la notification de la mesure concernée.

45      L’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 659/1999 prévoit que les décisions clôturant l’examen préliminaire sont prises dans un délai de deux mois. Selon cette disposition, ce délai court à compter du jour suivant celui de la réception d’une notification complète.

46      Il en résulte, d’une part, que la durée de l’examen préliminaire doit être calculée à partir de la réception d’une notification complète par la Commission (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 20 septembre 2007, Fachvereinigung Mineralfaserindustrie/Commission, T‑375/03, non publié au Recueil, point 119) et, d’autre part, que le délai maximal dont dispose la Commission pour procéder à un examen préliminaire est, en principe, de deux mois (voir, en ce sens, arrêt Deutsche Post et DHL International/Commission, point 31 supra, point 97).

47      Il convient de préciser à cet égard que, en vertu de l’article 2, paragraphe 2, du règlement n° 659/1999, une notification n’est complète que si elle permet à la Commission de prendre une décision conformément à la procédure d’examen préliminaire et à la procédure formelle d’examen. En outre, aux termes de l’article 4, paragraphe 5, de ce même règlement, « [l]a notification est considérée comme complète si, dans les deux mois de sa réception ou de la réception de toute information additionnelle réclamée, la Commission ne réclame pas d’autres informations ».

48      Il résulte de ces dispositions combinées qu’une notification ne peut être regardée comme complète qu’à la réception par la Commission de l’ensemble des informations lui permettant de se forger une première opinion sur la nature et les effets de la mesure concernée. Ces informations sont réputées contenues dans la notification si la Commission ne présente aucune demande d’informations additionnelles dans les deux mois de sa réception. En revanche, si la Commission présente des demandes d’informations additionnelles, la notification doit être regardée comme complète à la date de réception des dernières informations demandées, de sorte que le délai de deux mois prévu à l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 659/1999 ne commence à courir qu’à partir de cette date (arrêt TF1 e.a./Commission, point 43 supra, points 61 et 62).

49      En l’espèce, la République française a notifié le projet THD 92 à la Commission le 27 juin 2008. Cette notification a été complétée le 15 juillet 2008 (voir points 1 et 2 ci-dessus).

50      Cette notification n’a pas été considérée comme complète par la Commission. En effet, celle-ci a demandé à la République française des informations complémentaires par lettres du 18 août 2008 (voir point 5 ci-dessus) et du 23 janvier 2009 (voir point 7 ci-dessus) ainsi que ses observations sur un courrier de Free par lettre du 29 mai 2009 (voir point 10 ci-dessus).

51      Les autorités françaises ont répondu à ces demandes par courriers reçus par la Commission, respectivement, les 19 et 28 novembre 2008 (voir point 5 ci-dessus), les 13 mai et 2 juin 2009 (voir point 7 ci-dessus) et le 17 juin 2009 (voir point 10 ci-dessus). Le 10 août 2009, les autorités françaises ont déposé un complément à leurs réponses précédentes (voir point 12 ci-dessus).

52      C’est ainsi au plus tôt à compter de la réception des dernières informations complémentaires envoyées par les autorités françaises, à savoir le 10 août 2009, qu’il convient de calculer la durée de la procédure d’examen préliminaire, et non, comme le soutiennent les requérantes, à partir de la notification initiale du 27 juin 2008. Dès lors, ni les délais antérieurs à la notification initiale ni ceux intervenus entre celle-ci et la dernière réponse des autorités françaises n’entrent dans le calcul de la durée de la procédure préliminaire d’examen.

53      Partant, il convient de considérer que, contrairement à ce que font valoir les requérantes, la décision attaquée, datée du 30 septembre 2009, a été adoptée dans le délai de deux mois prescrit par le règlement n° 659/1999, qui a commencé à courir le jour suivant le 10 août 2009, et non dans le délai de quinze mois allégué par les requérantes.

54      Il résulte de ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à prétendre que, en l’espèce, la durée de l’examen préliminaire a notablement dépassé ce qu’implique normalement un tel examen. Cette durée ne saurait donc être regardée comme un indice de difficultés sérieuses prétendument rencontrées par la Commission.

2.      Sur le deuxième indice, tenant aux objections des opérateurs concurrents

55      Les requérantes font valoir, dans la réplique, que les interventions des concurrents, au nombre de cinq en l’espèce, constituent en vertu de la jurisprudence l’indice de difficultés sérieuses dans l’examen du projet THD 92.

56      Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de cet indice allégué pour la première fois dans la réplique, il y a lieu de rappeler que la notion de difficultés sérieuses revêt un caractère objectif et que l’existence de telles difficultés doit être recherchée de manière objective, notamment dans les circonstances ayant entouré l’adoption de l’acte attaqué (voir point 37 ci-dessus).

57      Il en résulte, ainsi que le souligne la République française, que ne sauraient être pris en compte aux fins de l’établissement de l’existence de difficultés sérieuses le nombre et l’ampleur des objections émises à l’encontre du projet THD 92. Cette considération s’impose d’autant plus lorsque, comme en l’espèce, au moins l’un des opérateurs à l’origine de ces objections a participé à la procédure de sélection du délégataire chargé de mettre en œuvre ledit projet, sans avoir été retenu.

58      En effet, la prise en compte du nombre et de l’ampleur des objections émises à l’encontre du projet THD 92 reviendrait à faire dépendre l’ouverture de la procédure formelle d’examen de difficultés sérieuses de l’opposition provoquée par un projet national et non des difficultés sérieuses effectivement rencontrées par la Commission. De surcroît, elle aboutirait, comme le fait observer la République française, à ce que les opposants à un projet puissent aisément retarder son examen par la Commission en l’obligeant par leur intervention à ouvrir la procédure formelle d’examen.

59      En revanche, il n’est pas exclu que la teneur des objections formulées par les cinq opérateurs en cause puisse révéler l’existence de difficultés sérieuses posées par l’examen du projet THD 92. Or, les requérantes ne font valoir aucun élément du contenu de ces objections qui révélerait l’existence en l’espèce de difficultés sérieuses et se limitent à souligner le nombre de ces objections.

60      Partant, il y a lieu de conclure que les objections des opérateurs privés, si nombreuses et concordantes soient-elles, ne sont pas, en tant que telles, de nature à révéler l’existence de difficultés sérieuses.

3.     Sur le troisième indice, tenant aux échanges entre la Commission et les autorités françaises

61      Les requérantes soutiennent que la fréquence et la teneur des échanges intervenus entre la Commission et les autorités françaises démontrent qu’il n’a pas pu être statué sur la qualification d’aide d’État du projet THD 92 dans les limites d’un examen sommaire. Elles rappellent à cet égard la chronologie de ces échanges, en soulignant les réponses tardives des autorités françaises. Les requérantes évoquent par ailleurs l’hypothèse selon laquelle d’autres échanges, en plus de ceux mentionnés dans la partie intitulée « Procédure » de la décision attaquée, auraient eu lieu entre la Commission et les autorités françaises. Elles soulignent enfin que l’indice fondé sur les échanges entre la Commission et l’État notifiant n’est pas le seul qu’elles allèguent et renvoient à la jurisprudence en vertu de laquelle l’existence de difficultés sérieuses est détectée grâce à un faisceau d’indices.

62      À cet égard, il y a lieu de rappeler, tout d’abord, la jurisprudence constante selon laquelle le seul fait que des discussions se soient instaurées entre la Commission et l’État membre notifiant durant la phase d’examen préliminaire et que, dans ce cadre, des informations complémentaires aient pu être demandées par la Commission sur les mesures soumises à son contrôle ne peut pas, en soi, être considéré comme un indice de ce que cette institution se trouvait confrontée à des difficultés sérieuses d’appréciation. Toutefois, il ne saurait être exclu que la teneur des discussions engagées entre la Commission et l’État membre notifiant durant cette phase de la procédure puisse, dans certaines circonstances, révéler l’existence de telles difficultés (voir arrêt TF1 e.a./Commission, point 43 supra, points 76 et 77, et la jurisprudence citée).

63      Ensuite, il ressort également de la jurisprudence que, si le nombre des échanges entre les autorités de l’État notifiant et la Commission constitue un élément à prendre en compte pour déterminer si les échanges sont de nature à révéler l’existence de difficultés sérieuses, il ne suffit pas à lui seul pour établir que la Commission aurait dû ouvrir la procédure formelle d’examen (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 22 septembre 2011, Belgique/Deutsche Post e.a., C‑148/09 P, Rec. p. I‑8573, point 81).

64      En l’espèce, la Commission a envoyé, respectivement le 18 août 2008 et le 23 janvier 2009, deux demandes d’informations à la République française et lui a communiqué les objections des tiers intéressés par le projet THD 92 en lui demandant de présenter ses observations à leur égard (voir point 50 ci-dessus).

65      Compte tenu de la jurisprudence citée aux points 62 et 63 ci-dessus, il convient, dès lors, pour répondre à l’argument en cause des requérantes, d’apprécier la teneur des échanges qui ont eu lieu entre la Commission et les autorités françaises. Le Tribunal a ainsi demandé à la Commission, dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure, de produire les demandes d’informations concernées ainsi que les réponses fournies auxdites demandes (voir point 22 ci-dessus).

66      Or, ces échanges ne contiennent pas d’éléments susceptibles de révéler l’existence de difficultés sérieuses au sens de la jurisprudence citée aux points 62 et 63 ci-dessus.

67      En effet, d’une part, la demande d’informations du 18 août 2008 comprend, certes, près de 40 questions attestant de l’étendue du champ d’investigation de la Commission, portant sur plusieurs aspects précis des marchés concernés, de l’état de la concurrence sur ces marchés (questions nos 8 à 18), de la couverture actuelle et future du territoire départemental par des réseaux à très haut débit (questions nos 1 à 7), du risque de surcompensation (questions nos 19 à 28), du montant de la subvention et de ses modalités d’octroi (questions nos 29 à 36) ainsi que des conditions d’accès au réseau THD 92 (questions nos 37 et 38). Toutefois, l’ensemble des éléments susvisés abordés dans la demande d’informations du 18 août 2008 et dans les réponses données par les autorités françaises les 19 et 28 novembre 2008 portaient sur le seul projet THD 92, tel que notifié par les autorités françaises, sans dépasser le champ dudit projet. Ils visaient, en effet, à déterminer si le projet en cause remplissait les conditions posées par l’arrêt Altmark, point 17 supra, pour échapper à la qualification d’aide d’État, telles que l’existence d’un SIEG, du fait notamment de la défaillance du marché et de l’absence de surcompensation (voir points 111 à 113 ci-après), et ont été, à ce titre, repris en substance dans la décision attaquée. Dans ces conditions, le nombre et l’étendue des questions posées par la Commission ne sauraient, à eux seuls et en l’absence d’autres indices concordants, révéler l’existence de difficultés sérieuses (voir, en ce sens, arrêt Deutsche Post et DHL International/Commission, point 31 supra, points 101 à 106).

68      D’autre part, la demande d’informations du 23 janvier 2009 ne comprend que neuf questions. Celles-ci visent, essentiellement, à une actualisation des données nécessaires à l’appréciation de la mesure notifiée compte tenu du temps écoulé, de la modification du cadre législatif français, des modifications apportées à la convention de DSP et des observations reçues de la part d’opérateurs tiers. Ces questions visent, également, à obtenir des précisions relatives aux réponses données par les autorités françaises à la première demande d’informations sur deux points précis, à savoir le traitement discriminatoire des concurrents des sociétés actionnaires du délégataire pour l’accès aux nœuds de raccordement optique et le montant de 3 millions d’euros payé par le délégataire à son principal actionnaire en contrepartie de l’usage de certaines infrastructures. Ainsi, l’examen de cette demande ne permet pas de constater l’existence de difficultés sérieuses suscitées par le projet THD 92, dès lors qu’elle ne réitère pas simplement des questions déjà posées et que les demandes de précisions qu’elle contient ne portent que sur un nombre très limité de points déjà abordés dans la première demande d’informations.

69      Par ailleurs, n’est pas non plus considéré par la jurisprudence comme étant révélateur de difficultés sérieuses le fait que plusieurs questions posées dans les demandes d’informations des 18 août 2008 et 23 janvier 2009 laissent entrevoir les doutes que semblait éprouver la Commission à l’égard de la mesure notifiée au regard des dispositions relatives aux aides d’État, dès lors que ces doutes ont pu être dissipés à la suite des réponses des autorités françaises auxdites demandes (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 décembre 2006, Asociación de Estaciones de Servicio de Madrid et Federación Catalana de Estaciones de Servicio/Commission, T‑95/03, Rec. p. II‑4739, point 139), voire les positions différentes de la Commission et des autorités françaises relatives à certains aspects du projet notifié (voir, en ce sens, arrêt Fachvereinigung Mineralfaserindustrie/Commission, point 46 supra, points 120 et 125).

70      Ainsi, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, les échanges entre la Commission et les autorités françaises ne permettent pas de révéler l’existence de difficultés sérieuses posées par l’examen du projet THD 92.

71      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument des requérantes selon lequel d’autres échanges auraient eu lieu entre la Commission et les autorités françaises, dès lors que les requérantes se contentent d’émettre l’hypothèse de tels échanges sans toutefois en établir l’existence. En effet, les requérantes se contentent, dans le mémoire en réplique, de renvoyer à un courrier des autorités françaises, en date du 30 avril 2009, auquel la décision attaquée fait référence (paragraphes 89 et 114). Toutefois, la Commission a expliqué, dans ses écritures, que ce courrier était une note informelle des autorités françaises, identique à la lettre des autorités françaises du 13 mai 2009 adressée en réponse à sa demande d’informations du 23 janvier 2009.

72      Compte tenu des considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que les prétendus indices relatifs à la procédure préliminaire d’examen invoqués par les requérantes ne sont pas de nature à révéler l’existence de difficultés sérieuses qui auraient nécessité l’ouverture de la procédure formelle d’examen.

B –  Indices relatifs au contenu de la décision attaquée

73      Les requérantes font valoir que le contenu de la décision attaquée laisse apparaître deux indices de ce que l’examen de la mesure notifiée présentait des difficultés sérieuses et, ainsi, aurait dû susciter des doutes quant à la qualification d’aide d’État de ladite mesure.

1.     Sur le premier indice, tenant aux engagements futurs pris par les autorités françaises

74      Selon les requérantes, la référence dans la décision attaquée (paragraphes 86, 88, 112, 114 et 115) à de nombreux engagements futurs pris par les autorités françaises sur des éléments essentiels de la subvention pour répondre à leurs critiques ainsi qu’à celles d’autres parties intéressées démontre que la qualification du projet THD 92 au regard des dispositions relatives aux aides d’État n’était pas à première vue évidente. En effet, la Commission se serait ainsi fondée sur des éléments de fait et de droit en réalité inexistants au moment de l’adoption de la décision attaquée, ce qui démontrerait le caractère non abouti du projet THD 92 et révélerait l’existence de difficultés sérieuses suscitées par son examen.

75      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu d’une jurisprudence constante, si la Commission ne dispose d’aucun pouvoir discrétionnaire quant à la décision d’engager la procédure formelle d’examen lorsqu’elle constate l’existence de telles difficultés, elle jouit néanmoins d’une certaine marge d’appréciation dans la recherche et dans l’examen des circonstances de l’espèce afin de déterminer si celles-ci soulèvent des difficultés sérieuses. Conformément à la finalité de l’article 88, paragraphe 3, CE et au devoir de bonne administration qui lui incombe, la Commission peut engager un dialogue avec l’État membre notifiant ou des tiers afin de surmonter, au cours de la procédure préliminaire, des difficultés éventuellement rencontrées (voir arrêt du Tribunal du 27 septembre 2011, 3F/Commission, T‑30/03 RENV, Rec. p. II‑6651, point 54, et la jurisprudence citée).

76      La décision attaquée fait état, aux paragraphes 88, 112 et 114, d’un certain nombre d’engagements des autorités françaises visant à modifier par voie d’avenant la convention de DSP en vue notamment d’augmenter les possibilités de contrôle du département, d’éviter toute confusion entre les intérêts du délégataire et ceux de ses actionnaires, d’assurer l’adaptation du réseau THD 92 aux besoins du marché ou encore de davantage maîtriser le risque d’exclusion des concurrents des actionnaires du délégataire. Ces engagements ont été proposés par les autorités françaises en réponse aux interrogations ou aux doutes émis par la Commission dans ses demandes d’informations (voir points 5 et 7 ci-dessus).

77      Ainsi, en l’espèce, comme le soulignent à juste titre la Commission et le département des Hauts-de-Seine, les engagements pris par les autorités françaises ont permis d’écarter un certain nombre de doutes quant à la qualification d’aide du projet THD 92 et ont pour cette raison été mentionnés dans la décision attaquée comme des éléments venant au soutien de la conclusion de la Commission relative à l’absence d’aide d’État.

78      Or, considérer, comme le font les requérantes, de tels engagements comme étant révélateurs de difficultés sérieuses revient à méconnaître la finalité de l’article 88, paragraphe 3, CE et de la procédure préliminaire d’examen qu’il prévoit. En effet, une telle considération remet en cause la possibilité pour la Commission d’engager un dialogue avec l’État notifiant au cours de la procédure préliminaire afin de surmonter les difficultés éventuellement rencontrées pour se prononcer sur la mesure notifiée sans qu’il y ait lieu d’ouvrir la procédure formelle d’examen, en méconnaissance de la jurisprudence citée au point 75 ci-dessus.

79      Il en résulte que les engagements pris par les autorités françaises mentionnés dans la décision attaquée ne sauraient être considérés comme révélateurs de difficultés sérieuses posées par l’examen du projet THD 92.

2.     Sur le second indice, tenant à l’examen incomplet et insuffisant des conditions posées par l’arrêt Altmark

80      Les requérantes renvoient à leurs arguments invoqués dans le cadre du deuxième moyen pour soutenir qu’il ressort de la décision attaquée que non seulement le champ d’investigation couvert par la Commission lors de la procédure préliminaire d’examen a été très étendu, mais également que la Commission n’a pas, en tout état de cause, effectué d’examen suffisant et complet de la subvention litigieuse. Dans la réplique, les requérantes précisent qu’attesteraient du caractère insuffisant de l’examen de la Commission en particulier le fait que cette dernière s’est fondée sur une information incomplète pour apprécier la défaillance du marché ainsi que l’erreur de calcul dans le montant de la subvention litigieuse correspondant à la première phase du projet THD 92 et celle portant sur le ratio entre prises adressables et prises raccordables.

81      À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante que le caractère insuffisant ou incomplet de l’examen mené par la Commission lors de la procédure préliminaire d’examen constitue un indice de l’existence de difficultés sérieuses (voir arrêt Smurfit Kappa Group/Commission, point 30 supra, point 81, et la jurisprudence citée).

82      En l’espèce, il convient, en premier lieu, d’observer que, dans la requête, les requérantes se contentent d’opérer un renvoi général à leur argumentation présentée au soutien du deuxième moyen en faisant valoir qu’il en découlerait que le champ d’investigation était très étendu et que l’examen réalisé par la Commission était insuffisant et incomplet. Elles ne fournissent, toutefois, aucun argument venant spécifiquement étayer cette allégation. En particulier, elles n’expliquent pas en quoi il découlerait de ladite argumentation que le caractère étendu du champ d’investigation révélerait l’existence de difficultés et que l’examen de la Commission était insuffisant.

83      Certes, selon la jurisprudence, lorsqu’un requérant invoque une violation de ses droits procéduraux résultant de ce que la Commission n’a pas ouvert la procédure formelle d’examen, il peut invoquer tout moyen de nature à démontrer que l’appréciation des informations et des éléments dont la Commission disposait, lors de la phase préliminaire d’examen de la mesure notifiée, aurait dû susciter des doutes quant à la qualification de la mesure notifiée comme aide d’État et à sa compatibilité avec le traité. L’utilisation de tels arguments ne saurait pour autant avoir pour conséquence de transformer l’objet du recours, ni d’en modifier les conditions de recevabilité. Au contraire, l’existence de doutes sur cette qualification ou sur cette compatibilité est précisément la preuve qui doit être apportée pour démontrer que la Commission était tenue d’ouvrir la procédure formelle d’examen (voir, en ce sens, arrêt Smurfit Kappa Group/Commission, point 30 supra, point 52, et la jurisprudence citée). Il appartient, dès lors, au Tribunal d’apprécier les moyens contestant la compatibilité de la mesure avec le traité au regard de l’existence d’une difficulté sérieuse au sens de la jurisprudence citée aux points 34 à 37 ci-dessus (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 7 novembre 2012, CBI/Commission, T‑137/10, non encore publié au Recueil, point 66, et la jurisprudence citée).

84      Il découle de ces rappels qu’il appartient à la partie requérante d’identifier les indices relatifs au contenu de la décision attaquée afin de démontrer l’existence de difficultés sérieuses (voir, en ce sens, arrêt Prayon‑Rupel/Commission, point 38 supra, point 49 ; voir également point 38 ci-dessus). Il y a lieu d’ajouter que, lorsque la partie requérante procède, comme en l’espèce, par un renvoi aux arguments soulevés au titre d’un autre moyen, tiré de la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE, il lui appartient d’identifier précisément ceux des arguments soulevés à ce dernier titre qui sont, selon elle, susceptibles de démontrer l’existence de telles difficultés.

85      En l’espèce, les requérantes se bornant à faire valoir que, comme elles le démontreraient « amplement » dans le cadre du deuxième moyen, « il ressort de la [d]écision attaquée que non seulement le champ d’investigation couvert par la Commission lors de la procédure préliminaire d’examen a été très vaste, mais la Commission n’a pas, en tout état de cause, effectué un examen suffisant et complet de la subvention litigieuse », il y a lieu de considérer que ce renvoi vague et non étayé ne permet pas au Tribunal d’identifier les éléments précis soulevés à l’appui du deuxième moyen qui établiraient, selon les requérantes, l’insuffisance de l’examen effectué par la Commission et, dès lors, l’existence de difficultés sérieuses. Partant, il y a lieu d’examiner cette argumentation uniquement dans le cadre de l’appréciation du deuxième moyen soulevé par les requérantes.

86      Il convient, en second lieu, toutefois, d’observer que, dans la réplique, les requérantes précisent leur argumentation en désignant deux séries d’arguments, soulevés au titre du deuxième moyen, qui seraient, selon elles, de nature à démontrer l’existence de difficultés sérieuses justifiant l’ouverture de la procédure formelle d’examen. D’une part, les requérantes font valoir que la Commission a apprécié l’existence d’une défaillance du marché en se fondant sur des informations anciennes et incomplètes. D’autre part, elles invoquent deux erreurs de calcul commises par la Commission dans la décision attaquée.

87      Il y a lieu, dès lors, d’examiner si ces trois indices sont de nature à révéler l’existence de difficultés sérieuses.

88      Premièrement, s’agissant de l’examen prétendument insuffisant de l’existence d’une défaillance du marché, il convient d’observer que, au titre du présent moyen, les requérantes contestent le caractère complet et actuel des informations sur lesquelles la Commission a fondé son appréciation de l’existence d’une telle défaillance, sans toutefois remettre en cause, à ce stade, le bien-fondé de la conclusion tirée par la Commission de cette appréciation. Cette conclusion est, en revanche, contestée au titre du deuxième moyen. Dans ces conditions, compte tenu de la teneur de l’argument soulevé au titre du présent moyen, il n’y a pas lieu de se prononcer, à ce stade, sur le bien-fondé de cette conclusion, ni, en particulier, sur la question de savoir si la Commission s’est conformée à l’arrêt Altmark, point 17 supra, qui relèvent de l’examen du bien-fondé du deuxième moyen soulevé par les requérantes.

89      Il ressort de la décision attaquée que la Commission a examiné l’état de la couverture actuelle et projetée du département des Hauts-de-Seine par des réseaux à très haut débit (paragraphe 123 de la décision attaquée). À cet égard, la Commission a notamment pris en compte, outre les données datant de 2004 et de 2005 auxquelles les requérantes font référence, les déclarations successives faites par Free, en dernier lieu dans son courrier du 26 mai 2009, les prévisions de déploiement de France Télécom, telles que présentées dans sa lettre du 6 février 2009, ainsi que les données fournies par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) dans sa réponse du 25 février 2009, formulée à la suite d’une demande d’avis quant à ce courrier de France Télécom (paragraphes 124 à 133 de la décision attaquée).

90      Tout d’abord, il découle de ce rappel de la décision attaquée que, contrairement à ce que font valoir les requérantes, la Commission ne s’est pas contentée de prendre en considération des données anciennes, datant de 2004 et de 2005, pour apprécier l’existence d’une défaillance du marché. Au contraire, la Commission a pris en considération des données actualisées existant au moment où elle a adopté la décision attaquée.

91      Ensuite, il y a lieu de constater que la Commission ne s’est pas davantage limitée aux prévisions de déploiement de France Télécom, dès lors qu’elle a pris en considération, notamment, celles de Free ainsi que les données fournies par l’ARCEP dans sa réponse du 25 février 2009. En particulier, cette dernière réponse a pris en considération, ainsi que cela ressort du paragraphe 98 de la décision attaquée, l’état du déploiement des opérateurs alternatifs.

92      Enfin, pour autant que les requérantes font valoir que la Commission s’est contentée de prendre en considération les prévisions de déploiement de France Télécom seulement jusqu’en 2009, il convient d’observer que, ainsi que le fait valoir la Commission, France Télécom a eu tout loisir de présenter ses prévisions de déploiement au-delà de 2009. En effet, il ressort des éléments du dossier que la Commission a interrogé France Télécom sur son déploiement et ses prévisions de déploiement à la date d’adoption de la décision attaquée. En réponse à cette demande, France Télécom s’est toutefois contentée, durant et après la procédure d’attribution de la DSP, d’adresser à la Commission un unique courrier, en date du 6 février 2009, pris en compte dans ladite décision, qui faisait état de son déploiement au 31 décembre 2008 et de ses prévisions de déploiement au 31 décembre 2009. Ainsi, la Commission avait entrepris toutes les démarches requises aux fins de disposer, au moment de l’adoption de la décision attaquée, des données actualisées relatives au déploiement actuel et futur de France Télécom.

93      Par conséquent, il ne saurait être soutenu que la Commission ne disposait pas d’informations actualisées et suffisantes pour conclure à l’existence de difficultés sérieuses de nature à justifier l’ouverture de la procédure formelle d’examen.

94      Deuxièmement, s’agissant des erreurs de calcul alléguées par les requérantes, il suffit de relever, sans qu’il soit besoin d’examiner, à ce stade, l’incidence de ces arguments sur la question de savoir si les conditions de l’arrêt Altmark, point 17 supra, sont remplies en l’espèce, que ces arguments ne sont pas de nature à révéler l’existence de difficultés sérieuses justifiant l’ouverture de la procédure formelle d’examen

95      D’une part, s’agissant de l’erreur de calcul dans le montant de la subvention litigieuse correspondant à la première phase du projet THD 92, les requérantes précisent que la somme des montants à verser au délégataire durant la première phase de réalisation du projet THD 92, qui figurent à l’article 28.2 de la convention de DSP, aboutirait à une somme de 30 millions et non de 25 millions d’euros.

96      Il y a lieu de rappeler à cet égard les termes de l’article 28.2 de la convention de DSP comme suit :

« La participation de vingt-cinq (25) millions d’euros sera libérée dans les conditions suivantes :

–        cinq (5) millions d’euros dans les 45 jours suivant notification au [d]élégant de la décision de la Commission européenne visée à l’article 44 de considérer la subvention comme non constitutive d’une aide d’État ou comme compatible avec le régime des aides d’État ;

–        cinq cent mille (500 000) euros par tranche de deux (2) millions HT de travaux commandés par le [d]élégataire et sur le point d’être réalisés, jusqu’à un montant commandé de travaux de quatre-vingts douze (92) millions d’euros HT ;

–        deux (2) millions d’euros suivant la réception des travaux de la première phase. »

97      Il ressort certes de cette disposition que la somme des montants mentionnés dans les trois tirets qu’elle comporte aboutit à un montant de 30 millions d’euros, alors que l’alinéa précédant ces trois tirets indique que le montant de la subvention correspondant à la première phase du projet est de 25 millions d’euros.

98      Cependant, la Commission a mentionné, dans la décision attaquée, la seule somme de 25 millions d’euros, lors de ses références au montant de la subvention correspondant à la première phase du projet THD 92, ainsi que les requérantes l’ont-elles-mêmes reconnu dans leurs écritures. En effet, ayant relevé la différence entre les deux montants résultant de l’article 28.2 de la convention de DSP, la Commission avait demandé aux autorités françaises de lui préciser, dans sa demande d’informations du 18 août 2008, le montant d’aide qui serait finalement octroyé au délégataire (question n° 34). Les autorités françaises ont confirmé, dans leur réponse à cette question, que le montant total de l’aide était de 59 millions d’euros, résultant de l’addition des montants respectivement indiqués, s’agissant de la première phase, à l’article 28.2 de la convention de DSP (25 millions d’euros), et, s’agissant de la seconde phase, à l’article 28.3 de ladite convention (34 millions d’euros), et que ce plafond était « intangible ». La Commission a ainsi effectué son appréciation en partant de cette prémisse et a finalement autorisé le projet THD 92, en tant que la subvention correspondant à la première phase de sa mise en œuvre s’élevait à 25 millions d’euros.

99      Il découle de ce qui précède que la Commission a elle-même attiré, au cours de la procédure préliminaire, l’attention des autorités françaises sur l’erreur commise par ces dernières dans le calcul du montant de la subvention accordée au titre de la première phase de mise en œuvre du projet THD 92 et qu’elle n’a pas commis cette erreur dans la décision attaquée. Dès lors, contrairement aux allégations des requérantes, cette erreur initialement commise par les autorités françaises n’est pas susceptible de révéler l’existence de difficultés sérieuses justifiant l’ouverture de la procédure formelle d’examen.

100    D’autre part, s’agissant de l’erreur de calcul quant au ratio entre les prises adressables et les prises raccordables de France Télécom, les requérantes font valoir que la Commission a évoqué un très faible ratio entre prises raccordables et prises adressables de 2 % (paragraphe 128 de la décision attaquée), alors que ce ratio serait en réalité de 20 %.

101    Il y a lieu de rappeler que, dans la décision attaquée, la Commission a estimé que la perspective du déploiement d’un ou de plusieurs réseaux universels en fibre optique dans les Hauts-de-Seine était très incertaine, en se fondant sur les réticences des opérateurs que démontrerait la disparité entre le nombre de prises raccordables et le nombre de prises adressables d’ores et déjà déployées par certains opérateurs. Elle a ainsi évoqué un très faible ratio entre prises raccordables et prises adressables de France Télécom, le nombre de prises raccordables représentant 2 % du nombre de prises adressables (paragraphes 127 à 130 de la décision attaquée).

102    La Commission a reconnu dans le mémoire en duplique que le paragraphe 128 de la décision attaquée comportait une erreur de plume, en ce qu’il convenait de lire « prise raccordée », ainsi qu’il ressortait du paragraphe 97 de la décision attaquée, au lieu de « prise raccordable ». Dès lors, le ratio de 2 % mentionné audit paragraphe concernerait le rapport entre prises raccordées et prises adressables.

103    Toutefois, cette erreur de plume ne permet pas de remettre en cause l’appréciation de la Commission relative au déploiement de France Télécom. En effet, il ressort du paragraphe 129 de la décision attaquée, qui suit le paragraphe contenant ladite erreur, que, à supposer même que France Télécom convertisse, à l’avenir, l’ensemble de ses prises adressables en prises raccordables, d’une part, 60 % du territoire du département des Hauts-de-Seine ne serait toujours pas couvert et, d’autre part, le réseau THD 92 permettrait d’atteindre une couverture supplémentaire d’environ 40 % de ce même territoire. Il en découle que la Commission a conclu à un déploiement insuffisant de France Télécom en se fondant non sur le ratio de 2 % entaché d’une erreur de plume, mais sur l’hypothèse de la transformation de toutes les prises adressables de France Télécom en prises raccordables.

104    Il résulte de ce qui précède qu’aucun des prétendus indices relatifs au contenu de la décision attaquée avancés par les requérantes ne révèle l’existence de difficultés sérieuses justifiant l’ouverture de la procédure formelle d’examen.

105    Compte tenu des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le premier moyen dans son intégralité.

II –  Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE

106    Les requérantes font valoir que la Commission a considéré à tort que les quatre critères posés par l’arrêt Altmark, point 17 supra, étaient réunis en l’espèce et a ainsi méconnu la notion d’aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.

107    La Commission, soutenue par les trois intervenants, fait valoir que ce moyen n’est pas fondé. Selon le département des Hauts-de-Seine, il est, par ailleurs, irrecevable. En effet, ce moyen mettant en cause le bien-fondé de la décision attaquée, il ne peut être déclaré recevable que si la position concurrentielle des requérantes doit être considérée comme étant substantiellement affectée par la mesure en cause.

108    Sans même qu’il y ait lieu d’examiner si une partie intervenante peut soulever une exception d’irrecevabilité en dépit du fait que la partie défenderesse ne l’a pas soulevée, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, il appartient au Tribunal d’apprécier si une bonne administration de la justice justifie, dans les circonstances de l’espèce, de rejeter au fond les allégations des requérantes relatives au bien-fondé de la décision attaquée sans statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par le département des Hauts-de-Seine (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 26 février 2002, Conseil/Boehringer, C‑23/00 P, Rec. p. I‑1873, point 52).

109    En l’espèce, dans un souci d’économie de procédure, il y a lieu d’examiner les arguments invoqués par les requérantes au soutien du deuxième moyen, sans statuer préalablement sur la fin de non-recevoir soulevée, ces arguments ne permettant pas, au demeurant et pour les motifs exposés ci-après, de démontrer que la Commission a, dans la décision attaquée, violé l’article 87, paragraphe 1, CE.

110    À titre liminaire, il convient de rappeler, en premier lieu, les critères posés par la Cour dans l’arrêt Altmark, point 17 supra, dès lors que la Commission a, dans la décision attaquée, rejeté la qualification d’aide d’État de la mesure notifiée en se fondant sur cet arrêt.

111    Selon l’arrêt Altmark, point 17 supra, une intervention étatique ne tombe pas sous le coup de l’article 87, paragraphe 1, CE, dans la mesure où elle doit être considérée comme une compensation représentant la contrepartie des prestations effectuées par les entreprises bénéficiaires pour exécuter des obligations de service public, de sorte que ces entreprises ne profitent pas, en réalité, d’un avantage financier et que ladite intervention n’a donc pas pour effet de mettre ces entreprises dans une position concurrentielle plus favorable par rapport aux entreprises qui leur font concurrence (point 87 de l’arrêt).

112    Cependant, pour que, dans un cas concret, une telle compensation puisse échapper à la qualification d’aide d’État, un certain nombre de conditions doivent être réunies (arrêt Altmark, point 17 supra, point 88).

113    Premièrement, l’entreprise bénéficiaire doit effectivement être chargée de l’exécution d’obligations de service public et ces obligations doivent être clairement définies. Deuxièmement, les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation doivent être préalablement établis de façon objective et transparente, afin d’éviter qu’elle ne comporte un avantage économique susceptible de favoriser l’entreprise bénéficiaire par rapport à des entreprises concurrentes. Troisièmement, la compensation ne saurait dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes qui y sont relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations. Le respect d’une telle condition est indispensable afin de garantir que n’est accordé à l’entreprise bénéficiaire aucun avantage qui fausse ou menace de fausser la concurrence en renforçant la position concurrentielle de cette entreprise. Quatrièmement, lorsque le choix de l’entreprise qui va se trouver chargée de l’exécution d’obligations de service public, dans un cas concret, n’est pas effectué dans le cadre d’une procédure de marché public permettant de sélectionner le candidat capable de fournir ces services au moindre coût pour la collectivité, le niveau de la compensation nécessaire doit être déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée afin de pouvoir satisfaire aux exigences de service public requises, aurait encourus pour exécuter ces obligations, en tenant compte des recettes qui y sont relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations (arrêt Altmark, point 17 supra, points 89 à 93).

114    En second lieu, il convient de préciser que les lignes directrices, même si elles ont été mentionnées dans la décision attaquée (voir point 17 ci-dessus), n’ont pas été appliquées dans cette décision, dès lors qu’elles ont été publiées au Journal officiel de l’Union européenne le même jour que celui de l’adoption de la décision attaquée et qu’elles ne sont applicables qu’à partir du premier jour suivant celui de leur publication (paragraphe 80 des lignes directrices). Il a néanmoins été fait référence aux lignes directrices dans certains développements subséquents, non pour les imposer à la Commission ou les opposer aux requérantes, mais parce qu’elles codifient la pratique de la Commission relative à l’application des critères de l’arrêt Altmark, point 17 supra, dans le secteur des communications électroniques à haut débit et qu’elles fournissent des indications utiles sur l’application desdits critères dans le secteur des communications électroniques à très haut débit en cause en l’espèce (paragraphe 7 des lignes directrices). En effet, même si les lignes directrices mentionnent uniquement les « réseaux à haut débit » dans leur intitulé, elles contiennent également des dispositions spécifiques aux réseaux à très haut débit, dits « réseaux NGA » (paragraphe 3 des lignes directrices), et l’essentiel de leurs dispositions relatives aux réseaux à haut débit s’appliquent également aux réseaux à très haut débit (paragraphe 59 des lignes directrices).

115    C’est à la lumière de ces rappels et précisions qu’il y a lieu, à titre principal, d’examiner les arguments soulevés par les requérantes à l’appui du deuxième moyen. Ces arguments sont présentés dans le cadre de quatre branches qui portent, respectivement, sur chacune des quatre conditions posées par l’arrêt Altmark, point 17 supra.

1.     Sur la première branche, tirée du non-respect de la première condition posée par l’arrêt Altmark, relative à l’existence d’obligations de service public effectives et définies

116    À l’appui de la première branche du deuxième moyen, les requérantes reprochent à la Commission, d’une part, une qualification erronée des services en cause de SIEG et, d’autre part, une absence de définition claire des obligations de service public, en méconnaissance de la première condition posée par l’arrêt Altmark, point 17 supra.

a)     Sur la qualification erronée des services en cause de SIEG

117    Les requérantes font valoir que l’intervention publique du département des Hauts-de-Seine n’est ni justifiée, dès lors qu’elle n’a pas vocation à couvrir l’ensemble du territoire départemental et qu’elle n’est pas caractérisée par une neutralité technologique et une péréquation tarifaire, ni nécessaire, dès lors qu’elle intervient dans un contexte concurrentiel caractérisé par de nombreuses initiatives tant privées que publiques existantes et qui continuent à se densifier.

118    Il convient de considérer que, par ces arguments, les requérantes contestent la qualification de SIEG des services en cause en se fondant, d’une part, sur l’absence de certaines caractéristiques des SIEG et, d’autre part, sur l’absence de défaillance du marché en cause.

 Sur l’absence de certaines caractéristiques des SIEG

119    Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, en droit de l’Union, il n’existe ni définition réglementaire claire et précise de la notion de mission de SIEG, ni concept juridique établi fixant, de manière définitive, les conditions qui doivent être réunies pour qu’un État membre puisse valablement invoquer l’existence et la protection d’une mission de SIEG au sens de la première condition énoncée dans l’arrêt Altmark, point 17 supra (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 février 2008, BUPA e.a./Commission, T‑289/03, Rec. p. II‑81, point 165). S’agissant de la compétence pour déterminer la nature et la portée d’une mission de SIEG au sens du traité, ainsi que du degré de contrôle que les institutions de l’Union européenne doivent exercer dans ce contexte, il ressort du paragraphe 22 de la communication de la Commission sur les services d’intérêt général en Europe (JO 2001, C 17, p. 4) et de la jurisprudence du Tribunal que les États membres ont un large pouvoir d’appréciation quant à la définition de ce qu’ils considèrent comme des SIEG et que la définition de ces services par un État membre ne peut être remise en question par la Commission qu’en cas d’erreur manifeste (voir arrêt BUPA e.a./Commission, précité, points 165 et 166, et la jurisprudence citée).

120    La marge d’appréciation des États pour définir ce qu’ils qualifient de SIEG et le contrôle limité à l’erreur manifeste de la Commission sont par ailleurs expressément confirmés s’agissant des services de communications électroniques à haut débit par le paragraphe 24 des lignes directrices, applicable, en vertu du paragraphe 59 de ces lignes directrices, également aux réseaux à très haut débit.

121    Il en résulte, selon une jurisprudence constante, que, au regard, d’une part, du pouvoir discrétionnaire dont dispose l’État membre quant à la définition d’une mission de SIEG et aux conditions de sa mise en œuvre et, d’autre part, de la portée du contrôle limitée à l’erreur manifeste que la Commission est habilitée à exercer à ce titre, le contrôle devant être exercé par le Tribunal sur l’appréciation de la Commission à cet égard ne saurait non plus dépasser la même limite et que, dès lors, ce contrôle doit se borner à examiner si la Commission a constaté ou a rejeté à bon droit l’existence d’une erreur manifeste de l’État membre (voir, en ce sens, arrêt BUPA e.a./Commission, point 119 supra, point 220, et la jurisprudence citée, et arrêt CBI/Commission, point 83 supra, points 99 et 100).

122    En l’espèce, les requérantes contestent la qualification de SIEG du projet THD 92 aux motifs que le projet THD 92 ne garantirait pas une couverture universelle du département, qu’il ne serait pas neutre technologiquement et que la péréquation tarifaire qu’il prévoit serait habituelle dans le secteur en cause.

–       Absence d’universalité du projet THD 92

123    Les requérantes font valoir que le nombre de prises devant être raccordées en vertu de la convention de DSP est très inférieur au nombre de logements que compte le département des Hauts-de Seine, que ladite convention exclut le raccordement des « habitats isolés » et que le délai de six ans dont dispose le délégataire pour réaliser la couverture du département est supérieur au délai de trois ans prévu par les lignes directrices. Elles ajoutent que seront couverts en priorité les principales zones de bureaux ainsi que les pôles publics majeurs et qu’une obligation de couverture en termes de prises raccordables ne correspond pas à une couverture universelle.

124    En vertu d’une jurisprudence constante, même si l’État membre dispose d’un large pouvoir discrétionnaire quant à la détermination de ce qu’il considère comme un SIEG, cela ne le dispense pas, lorsqu’il invoque l’existence et la nécessité de la protection d’une mission de SIEG, de veiller à ce que cette dernière satisfasse à certains critères minimaux communs à toute mission SIEG au sens du traité, tels que précisés par la jurisprudence, et de démontrer que ces critères, notamment le caractère universel et obligatoire de cette mission, sont bien satisfaits dans le cas d’espèce. Inversement, l’absence de preuve fournie par l’État membre que ces critères sont satisfaits ou leur méconnaissance est susceptible de constituer une erreur manifeste d’appréciation que la Commission est tenue de sanctionner, sous peine de commettre elle-même une erreur manifeste. En outre, l’État membre doit indiquer les raisons pour lesquelles il estime que le service en cause mérite, de par son caractère spécifique, d’être qualifié de SIEG et distingué d’autres activités économiques (voir arrêt BUPA e.a./Commission, point 119 supra, point 172, et la jurisprudence citée).

125    En outre, il y a lieu de relever que la Commission a rappelé, au paragraphe 25 des lignes directrices, l’obligation pour les États membres de décrire les raisons pour lesquelles ils estiment que le service en cause mérite, de par son caractère spécifique, d’être qualifié de SIEG et distingué d’autres activités économiques. Selon le même paragraphe des lignes directrices, les États devraient faire en sorte que la mission de SIEG satisfasse à certains critères communs à chaque mission de SIEG et démontrer qu’il est satisfait en l’espèce à ces critères. Au paragraphe 26 des lignes directrices, il est précisé que figure au nombre de ces critères la nature universelle de la mission de SIEG, les États devant s’assurer que l’infrastructure à déployer fournisse une connectivité universelle à l’ensemble des utilisateurs dans une zone donnée.

126    Aux paragraphes 143, 147 et 150 de la décision attaquée notamment, la Commission a évoqué la nature universelle ou quasi universelle des services en cause qui seraient fournis dans l’ensemble du département à tous les opérateurs, reprenant en cela les données fournies par les autorités françaises.

127    En particulier, la Commission a indiqué, dans la décision attaquée, que les autorités françaises avaient annoncé que l’un des objectifs du projet THD 92 était la couverture universelle du département des Hauts-de-Seine à l’issue d’une période de six ans, laquelle a été inscrite en tant qu’obligation contractuelle du délégataire dans la convention de DSP (paragraphes 28 et 57 à 63 de la décision attaquée). Après avoir rappelé la jurisprudence relative au large pouvoir d’appréciation des États membres quant à la nature des services susceptibles d’être qualifiés de SIEG, la Commission a précisé que, aux fins de son analyse de la nature de SIEG du projet THD 92, elle partait de la prémisse que les zones non rentables pour le déploiement de ce réseau représentaient 40 % du territoire des Hauts-de-Seine en termes de prises raccordables (paragraphes 121 à 134 de la décision attaquée). Dans le cadre de cette analyse, elle a considéré tout d’abord que la décision des autorités françaises de développer comme un SIEG un réseau à très haut débit dans les Hauts-de-Seine, qui allait bien au-delà des limites des réseaux actuels à haut débit en assurant ainsi une couverture des zones non rentables, ne contrastait pas avec la réglementation communautaire en la matière (paragraphe 141 de la décision attaquée). La Commission a estimé ensuite que l’accès aux services de très haut débit pour l’ensemble de la population du département répondait à un besoin général et présentait un intérêt général spécifique par rapport à celui que peuvent revêtir d’autres activités de la vie économique (paragraphes 142 à 145 de la décision attaquée). Cette mise à disposition d’un réseau de communications électroniques autorisant l’accès généralisé de la population aux services de très haut débit présenterait en outre des caractéristiques spécifiques par rapport aux autres services commerciaux et justifierait l’attribution d’une mission particulière par le département des Hauts-de-Seine. La Commission en a conclu que les autorités françaises n’avaient pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en qualifiant lesdits services de SIEG (paragraphe 153 de la décision attaquée).

128    Il découle de ces rappels de la décision attaquée que la qualification du projet THD 92 de SIEG est notamment fondée sur le caractère universel de la couverture du réseau projeté. Il y a lieu de considérer qu’aucun des arguments invoqués par les requérantes ne permet de remettre en cause cette considération de la Commission.

129    Premièrement, contrairement à ce que font valoir les requérantes, il ne saurait être considéré qu’une obligation de couverture fixée en termes de prises raccordables, telle que celle prévue par la convention de DSP, ne correspond pas à une couverture universelle.

130    À cet égard, il y a lieu, à titre liminaire, d’observer que, si, lors de l’audience, des divergences sont apparues quant à la définition exacte des notions de « prise raccordable » et de « prise raccordée », les parties se rejoignent néanmoins sur le fait, d’une part, qu’une prise adressable peut être transformée en prise raccordable, laquelle peut à son tour être transformée en prise raccordée, et, d’autre part, que ces transformations correspondent à un rapprochement par étape de la fibre optique des habitations et établissements à relier au très haut débit. En particulier, les parties s’accordent pour reconnaître qu’une prise raccordable est susceptible d’être transformée et doit encore être transformée en prise raccordée.

131    Or, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la définition de ces différentes catégories de prises, il suffit, à titre principal, de constater que l’argumentation des requérantes procède d’une compréhension erronée de la notion d’universalité.

132    À cet égard, il convient, tout d’abord, de préciser que, en vertu du considérant 8 de la directive 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (directive « service universel ») (JO L 108, p. 51), « [u]ne exigence fondamentale du service universel est d’assurer aux utilisateurs qui en font la demande un raccordement au réseau téléphonique public en position déterminée à un prix abordable » et non d’assurer un raccordement d’office au réseau à toutes les personnes physiques et morales installées sur le territoire départemental.

133    Ensuite, il y a lieu d’observer que l’article 12 de la convention de DSP définit les obligations de raccordement du délégataire de la façon suivante :

« Le [r]éseau [THD 92] a vocation à desservir l’ensemble du territoire départemental. Afin de respecter l’objectif d’un déploiement homogène du [r]éseau sur le territoire départemental, le [d]élégataire établira au moins un [nœud de raccordement optique] sur chaque commune permettant ainsi d’y déployer des [b]oucles [l]ocales [o]ptiques tel que prévu en [p]hases 1 et 2.

[…]

Le [d]élégataire s’engage, au sens d’une obligation de résultat, à avoir réalisé, au terme des deux [p]hases, dans les conditions définies ci-après, le [r]éseau permettant de desservir huit cent vingt-sept mille neuf cents (827 900) prises [r]accordables, dont cinq cent soixante-treize mille (573 000) prises [r]accordées, tel que précisé en [annexe] 1.

Par ailleurs, le [d]élégataire cible, au sens d’une [o]bligation de moyen, un volume de six cent quatre-vingts dix mille (690 000) prises [r]accordées à l’issue de la [p]hase 2 tel que le définit le [p]lan d’[a]ffaires en [annexe] 5.

[…]

Afin de desservir l’ensemble du territoire départemental, exception faite des habitats isolés, les [p]arties conviennent que le [d]élégataire aura l’obligation de transformer une prise [r]accordable en prise [r]accordée sur la base des demandes préalablement exprimées par les [u]sagers.

[…]

Tel que précisé en [annexe] 1, le seuil de transformation d’une prise [r]accordable en prise [r]accordée est de :

–        15 % des prises d’un SRO2 couvrant une zone d’habitat collectif majoritaire ayant fait l’objet d’une demande de la part des [u]sagers ;

–        20 % des prises d’un SRO2 couvrant une zone d’habitat pavillonnaire majoritaire ayant fait l’objet d’une demande de la part des [u]sagers.

[…] »

134    Il ressort de cette disposition que le délégataire s’engage, au sens d’une obligation de résultat, à raccorder 573 000 prises sur un total de 827 900 prises raccordables (article 12, troisième alinéa, de la convention de DSP). De plus, le délégataire s’engage à porter ce nombre de prises raccordées à 690 000 au terme de la seconde phase du projet THD 92, au sens d’une obligation de moyen (article 12, quatrième alinéa, de la convention de DSP), dont il y a lieu de rappeler qu’elle demeure une obligation au sens du droit français, si ce n’est que le débiteur ne s’engage pas à obtenir un résultat donné, mais à employer tous les moyens pour y parvenir, sous peine de voir sa responsabilité engagée. En tout état de cause, le délégataire est tenu, en vertu de l’article 12, sixième alinéa, de la convention de DSP, de transformer une prise raccordable en prise raccordée en cas de demande en ce sens, pour autant que le seuil pertinent mentionné au huitième alinéa de cette même disposition est franchi, comme l’a indiqué le département des Hauts-de-Seine lors de l’audience.

135    Or, d’une part, il découle des rappels effectués aux points précédents que la notion de « prise raccordable », qui est susceptible d’être transformée et doit encore être transformée en prise raccordée, correspond précisément à l’exigence d’universalité telle que définie au considérant 8 de la directive 2002/22 (voir point 132 ci-dessus), ainsi que l’a, par ailleurs, fait valoir le département des Hauts-de-Seine à l’audience. En effet, en déployant des prises raccordables, le délégataire crée les conditions dans lesquelles il peut, à la demande des usagers, assurer à ceux-ci un raccordement au très haut débit en transformant lesdites prises en prises raccordées. Ainsi, le délégataire est obligé, en vertu de l’article 12, sixième alinéa, de la convention de DSP, de procéder à une telle transformation, pour autant que le seuil pertinent, tel que fixé au huitième alinéa de cette même disposition, est atteint. Or, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, l’existence de ces seuils ne peut être considérée comme remettant en cause l’obligation de raccordement susvisée, dès lors que ces seuils sont peu élevés (15 % des prises ayant fait l’objet d’une demande dans une zone d’habitat collectif majoritaire et 20 % dans une zone d’habitat pavillonnaire majoritaire) et que, une fois franchis, ils obligent à un raccordement de toutes les prises pour lesquelles une demande aura été présentée.

136    D’autre part, et en tout état de cause, l’article 12 de la convention de DSP impose au délégataire des obligations de raccordement allant même au-delà d’un raccordement sur demande. En effet, les obligations de résultat et de moyen consacrées aux troisième et quatrième alinéas de ladite disposition obligent à un raccordement indépendamment de toute demande en ce sens.

137    Ces obligations du délégataire ne sont pas remises en cause par l’avenant n° 1 à la convention de DSP, adopté par le département des Hauts-de-Seine par délibération du 5 juillet 2010, dont les requérantes se sont prévalues dans leurs observations sur les mémoires en intervention. Il ressort certes de cet avenant, ainsi que l’ont soutenu les requérantes lors de l’audience, que le déploiement de la partie horizontale du réseau par le délégataire, consistant en l’installation de colonnes montantes dans les immeubles, sera effectué sous réserve qu’il n’y soit pas procédé par un autre opérateur (article 12.3 de la convention de DSP, tel que modifié par l’avenant n° 1 à ladite convention). Il en résulte ainsi que le déploiement de la partie horizontale du réseau par un autre opérateur dans un immeuble empêchera le délégataire de construire une colonne montante dans ce même immeuble. Toutefois, outre le fait que cet avenant est postérieur à l’adoption de la décision attaquée, il y a lieu de relever, ainsi que l’a fait valoir le département des Hauts-de-Seine lors de l’audience, que cet avenant n’entraîne aucune modification des obligations chiffrées de résultat et de moyen contenues à l’article 12 de la convention de DSP.

138    Deuxièmement, les requérantes ne sauraient valablement remettre en cause l’universalité du projet THD 92 au motif que le nombre de prises devant être raccordées (573 000) est sensiblement inférieur au nombre de logements (744 000) que compte le département des Hauts-de-Seine. En effet, il découle des considérations qui précèdent que l’universalité s’apprécie par rapport aux prises raccordables, non par rapport aux prises raccordées. En outre, il ressort également de ce qui précède que l’obligation de transformation des prises raccordables en prises raccordées dépasse le nombre de 573 000 visé au titre de l’obligation de résultat (voir points 135 et 136 ci-dessus).

139    Troisièmement, la circonstance, invoquée par les requérantes, selon laquelle la convention de DSP exclut le raccordement des « habitats isolés » en son article 12 ne porte pas non plus atteinte à l’objectif de couverture universelle du département. En effet, selon la jurisprudence, il ne découle pas du droit de l’Union que, pour pouvoir être qualifié de SIEG, le service en cause doive constituer un service universel au sens strict, la notion de service universel, au sens du droit de l’Union, n’impliquant pas que le service en cause doive répondre à un besoin commun à l’ensemble de la population ou être fourni sur l’intégralité d’un territoire (voir arrêt BUPA e.a./Commission, point 119 supra, point 186, et la jurisprudence citée). A fortiori, l’exclusion de certaines habitations isolées, même non précisément définies, mais nécessairement marginales au sein d’un département considéré comme très dense, ne permet pas de remettre en cause le caractère de service universel du projet THD 92.

140    Quatrièmement, il ne saurait davantage être déduit de la couverture prioritaire des zones de bureaux et des pôles publics majeurs, à la supposer avérée, que la couverture universelle du département ne sera pas assurée. En effet, les requérantes se contentent d’alléguer, par cet argument, que la couverture territoriale serait assurée selon un certain ordre et non qu’elle ne serait pas assurée dans sa totalité.

141    Cinquièmement, le délai de six ans prévu par la convention de DSP pour assurer le déploiement du réseau THD 92 n’est pas non plus susceptible de remettre en cause l’objectif de couverture universelle du département, dès lors qu’il porte sur la durée de réalisation de cette couverture et non sur la réalisation à terme de l’objectif de couverture. En tout état de cause, il ne saurait être déduit des lignes directrices que l’objectif d’une couverture universelle doit être assuré dans un délai de trois ans. En effet, ledit délai, figurant dans la note en bas de page n° 31 des lignes directrices, ne porte pas sur la mise en place d’un SIEG universel, mais sur l’appréciation de l’existence d’une défaillance du marché et concerne ainsi les efforts d’investissement des investisseurs privés pris en compte à cet effet.

–       Absence de neutralité technologique du projet THD 92

142    S’agissant de l’absence de neutralité technologique du projet THD 92, les requérantes font valoir que le catalogue de services établi par le délégataire se décompose en différentes offres, dont certaines sont communes à tous les utilisateurs potentiels, quelle que soit la technologie utilisée, et dont les autres dépendent de la technologie choisie par l’usager, favorisant ainsi les actionnaires du délégataire.

143    Dans la décision attaquée, la Commission a évoqué à plusieurs reprises le caractère neutre du réseau THD 92 (voir, notamment, paragraphes 143 et 148 de la décision attaquée), reprenant en cela les données fournies par les autorités françaises. Il ressort, en particulier, du paragraphe 143 de la décision attaquée que le projet THD 92 a pour objet « [l]’établissement dans [le département d]es Hauts-de-Seine d’une infrastructure passive, neutre, ouverte à tous les opérateurs tiers et mutualisée, autorisant tout opérateur intéressé à fournir des services à très haut débit en utilisant soit une technologie point-à-points, soit une technologie point-à-multipoints ».

144    Il convient de relever à cet égard que les arguments des requérantes ne permettent pas de remettre en cause l’existence de la neutralité technologique du réseau THD 92 constatée par la Commission.

145    En effet, le catalogue des services offerts par le réseau THD 92, sur lequel se fondent les requérantes, permet tout au plus d’établir que certaines offres concernant la location de fibre dépendent de la technologie de l’opérateur (technologie dite « point-à-point » ou technologie dite « multipoints »). Or, une telle différence dans les offres ne saurait être qualifiée de discriminatoire, dès lors qu’elle est fondée sur une différence objective entre les opérateurs, à savoir la technologie qu’ils utilisent. Il peut être relevé à cet égard que les lignes directrices ont expressément indiqué que les réseaux à très haut débit supportant aussi bien les technologies point-à-point que les technologies multipoints sont technologiquement neutres (paragraphe 79, troisième tiret). A fortiori, la différence entre les offres d’accès au réseau THD 92 n’exclut pas certains opérateurs de l’accès à ce réseau, puisqu’elle ne fait qu’adapter cet accès à la technologie utilisée par l’opérateur en cause, de sorte qu’elle ne peut pas être considérée comme portant atteinte à la neutralité technologique (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du Tribunal du 15 juin 2010, Mediaset/Commission, T‑177/07, Rec. p. II‑2341, point 60). Est à cet égard sans pertinence le rapport d’analyse fourni par les requérantes en annexe de leur requête et qui vise à établir que le coût d’établissement d’un réseau à très haut débit par Free infrastructure serait très inférieur à celui de l’utilisation du réseau THD 92. En effet, les requérantes n’établissent, ce faisant, aucune exclusion ou discrimination par le réseau THD 92.

–       Absence de spécificité de la péréquation tarifaire dans le cadre du projet THD 92

146    Selon les requérantes, la Commission ne peut valablement retenir l’objectif de péréquation tarifaire pour caractériser l’existence en l’espèce d’un SIEG, dès lors que tous les opérateurs commercialisent déjà leurs services au même tarif quelle que soit la localisation des infrastructures.

147    Il ressort de la décision attaquée que la péréquation tarifaire constitue l’un des objectifs du projet THD 92. Ainsi, la Commission a rappelé, au paragraphe 30 de la décision attaquée, la substance de l’article 30 de la convention de DSP, selon lequel l’exploitant du réseau THD 92 sera tenu de proposer des tarifs identiques quelle que soit la localisation des infrastructures mises à la disposition des usagers sur le territoire départemental. En outre, la Commission a considéré, au paragraphe 150 de ladite décision, que le financement public en cause était octroyé sur la base du « principe de péréquation tarifaire, principe qui, selon la jurisprudence, constitue l’une des caractéristiques particulières du service public ».

148    Les requérantes ne contestent ni le fait que l’objectif de péréquation tarifaire constitue l’un des objectifs du projet THD 92, ni la considération de la Commission figurant au paragraphe 150 de la décision attaquée. En revanche, elles estiment que la Commission ne pouvait retenir cette péréquation tarifaire pour en déduire l’existence, en l’espèce, d’un SIEG, dès lors que l’ensemble des opérateurs fournissant des services de haut et de très haut débit commercialisaient ces services au même tarif quelle que soit la localisation des infrastructures mises à la disposition des usagers sur le territoire national.

149    Il y a lieu de considérer à cet égard que ne saurait être déduite d’une simple pratique tarifaire des opérateurs sur le marché, au demeurant non établie, l’absence de spécificité du projet THD 92 au regard du principe de péréquation tarifaire. En effet, comme le souligne à juste titre la Commission dans le mémoire en défense, si la péréquation tarifaire pratiquée par les opérateurs privés peut être remise en cause au gré de leurs contraintes et objectifs commerciaux, la péréquation tarifaire du projet THD 92 est, quant à elle, garantie par la convention de DSP pendant toute la durée de la DSP.

150    Compte tenu de ce qui précède, l’ensemble des arguments visant à contester la présence dans le cadre du projet THD 92 de certaines caractéristiques des SIEG doit être rejeté.

 Sur l’absence de défaillance du marché

151    S’agissant des initiatives privées de déploiement d’un réseau de très haut débit, en premier lieu, les requérantes estiment qu’il n’existe pas de preuve selon laquelle l’offre concurrentielle privée en matière de réseaux en fibre optique ne serait pas suffisante sur le territoire départemental, ni que cette offre ne serait déployée que dans les zones rentables dudit territoire. Elles font observer à cet égard que la décision attaquée se fonde sur des données anciennes non réactualisées.

152    En deuxième lieu, les requérantes soutiennent que plusieurs opérateurs privés, dont elles-mêmes et France Télécom, ont déjà déployé et continuent à déployer des réseaux en fibre optique sur le territoire départemental. Selon les données fournies par le département des Hauts-de-Seine lui-même dans son mémoire en intervention complémentaire, il existerait des réseaux à très haut débit privés concurrents sur le territoire départemental, dont le déploiement serait en outre plus avancé que celui du réseau THD 92.

153    Ainsi, les requérantes se fondent sur les déclarations de France Télécom sur son site Internet pour soutenir que la Commission n’a pas rapporté la preuve, conformément aux lignes directrices (paragraphes 51 et 71 desdites lignes), que cet opérateur ne sera pas en mesure de déployer son réseau en fibre optique sur le territoire départemental. Elles critiquent à cet égard la distinction sur laquelle s’est fondée la Commission entre « prises adressables » et « prises raccordables » et, partant, les considérations de la Commission relatives aux 95 000 prises raccordées par France Télécom, aux 300 000 prises supplémentaires couvertes par le projet THD 92 et au pourcentage de prises non rentables du département (paragraphes 98 et 128 à 130 de la décision attaquée). Les requérantes évoquent également l’existence d’une erreur grossière de calcul des autorités françaises sur laquelle la Commission aurait fondé son analyse.

154    De même, les requérantes se prévalent de leur propre déploiement d’un réseau en fibre optique dans le département des Hauts-de-Seine, en présentant les données chiffrées correspondantes datant de 2009 et de 2010 ainsi qu’en critiquant l’interprétation de leurs intentions qu’aurait retenue la Commission de manière subjective. Elles reprochent également à la Commission de ne pas avoir pris en considération les incertitudes réglementaires qui ont retardé le déploiement des réseaux en fibre optique des opérateurs, la différence de situation entre les opérateurs alternatifs, dont elles font partie, et le délégataire ainsi que les difficultés rencontrées par les opérateurs alternatifs pour accéder aux infrastructures de France Télécom. Les requérantes se fondent à cet égard sur plusieurs décisions de l’ARCEP et du conseil de la concurrence français.

155    Les requérantes reprochent encore à la Commission de ne pas avoir pris en compte le déploiement important de Numericable sur le territoire départemental.

156    Les requérantes ajoutent que l’ARCEP a classé le territoire départemental en zone très dense, définie comme une zone dans laquelle il est économiquement viable pour plusieurs opérateurs de déployer leurs propres réseaux en fibre optique (décision 2009-1106 de l’ARCEP, du 22 décembre 2009, ci-après la « décision de l’ARCEP »). Elles en déduisent que le déploiement du réseau THD 92 serait contraire aux lignes directrices en vertu desquelles une intervention de l’État n’est pas considérée comme nécessaire dans les « zones noires » (paragraphes 24 et 76 des lignes directrices).

157    En troisième lieu, s’agissant des initiatives publiques de déploiement, les requérantes énumèrent les nombreux réseaux d’initiative publique qui seraient en mesure de satisfaire les besoins en matière de très haut débit dans le département des Hauts-de-Seine, en insistant plus particulièrement sur le réseau « Irisé » établi par le Sipperec, qui présenterait des caractéristiques semblables à celles du réseau THD 92.

158    Il y a lieu, à titre liminaire, de préciser le rôle que joue le critère de la défaillance du marché dans la qualification d’un service de SIEG et, partant, dans son absence de qualification d’aide d’État. La République française soutient en effet qu’un service donné pourrait être qualifié de SIEG même en l’absence de défaillance du marché, ce qui permettrait en l’espèce de rejeter l’ensemble des arguments des requérantes remettant en cause l’existence d’une telle défaillance comme inopérants. Elle se fonde à cet égard sur le point 219 de l’arrêt du Tribunal du 15 juin 2005, Olsen/Commission (T‑17/02, Rec. p. II‑2031), qui est libellé comme suit :

« Certes, il est constant que Trasmediterránea offrait ces services en concurrence avec d’autres opérateurs, parmi lesquels la requérante. Toutefois, la requérante ne démontre pas que cette concurrence permettait d’assurer des services analogues à ceux fournis par Trasmediterránea, en termes de continuité, de régularité et de fréquence sur toutes les lignes desservies par Trasmediterránea dans le cadre du régime provisoire. »

159    À cet égard, il convient de relever que, si le critère de la défaillance du marché est, certes, spécifiquement mentionné dans la jurisprudence et les lignes directrices (arrêts du Tribunal du 6 octobre 2009, FAB/Commission, T‑8/06, non publié au Recueil, points 79 à 82, et Allemagne/Commission, T‑21/06, non publié au Recueil, points 53 à 60 ; voir également paragraphes 39, 43 et 44 des lignes directrices) comme intervenant dans l’appréciation de la compatibilité d’une aide au regard de l’article 87, paragraphe 3, CE, il joue également un rôle dans la détermination de l’existence d’une aide d’État et, en particulier, dans celle de l’existence d’un SIEG.

160    Contrairement à ce que fait valoir la République française, il ne ressort pas de l’arrêt Olsen/Commission, point 158 supra, qu’un SIEG peut être institué même en présence d’opérateurs concurrents sur le marché. En effet, aux points 217 à 221 de cet arrêt, le Tribunal a considéré que, en l’absence de services concurrents, analogues en termes de continuité, de régularité et de fréquence à ceux fournis par le bénéficiaire de la subvention en cause, l’institution d’un SIEG était justifiée. Dès lors, la conclusion des autorités ayant accordé la subvention en cause, selon laquelle existait un besoin de service public étant donné que l’état du marché ne permettait pas d’assurer la continuité du service en cause, n’était pas entachée d’une erreur manifeste d’appréciation que la Commission aurait dû sanctionner. Il en découle que l’absence de services concurrents analogues à ceux fournis par le prestataire de SIEG justifie l’institution d’un tel SIEG. Le point cité par la République française fait, partant, de la défaillance du marché, entendue comme l’absence de services concurrents analogues à ceux fournis par le prestataire du SIEG, une condition préalable à l’institution d’un SIEG.

161    Ce rôle joué par le critère de la défaillance du marché dans la détermination de l’existence d’un SIEG est par ailleurs confirmé par les textes relatifs aux SIEG. En effet, la communication de la Commission sur les services d’intérêt général en Europe, mentionnée au point 119 ci-dessus, dispose en son paragraphe 14 que, « si les pouvoirs publics estiment que certains services sont d’intérêt général et que les mécanismes du marché pourraient ne pas être à même d’assurer une fourniture satisfaisante de ces services, ils peuvent établir un certain nombre de prestations de services spécifiques destinées à répondre à ces besoins sous forme d’obligations de service d’intérêt général ». 

162    En outre, les lignes directrices, codifiant en cela la pratique de la Commission, disposent en leur paragraphe 24 ce qui suit :

« […L]a Commission considérera que, dans les zones où les investisseurs privés ont déjà investi dans une infrastructure de réseau [à] haut débit (ou sont en train d’étendre leur réseau d’infrastructure) et fournissent déjà des services compétitifs d’accès au haut débit avec une couverture appropriée, la mise en place d’une infrastructure à haut débit parallèle, compétitive et financée par des fonds publics ne devrait pas être qualifiée de SIEG au sens de l’article 86 [CE]. Toutefois, dès lors qu’il peut être démontré que des investisseurs privés pourraient ne pas être en mesure d’assurer, dans un avenir proche, une couverture adéquate pour l’ensemble des citoyens ou des utilisateurs et qu’ils risqueraient ainsi de priver de connexion une partie importante de la population, une compensation de service public peut être accordée à une entreprise chargée d’un SIEG pour autant que les conditions énoncées aux [paragraphes suivants] [sont] réunies. » 

163    Par ailleurs, cette même exigence est réitérée, s’agissant plus particulièrement du déploiement d’un réseau à très haut débit, aux paragraphes 77 et 78 des lignes directrices, auxquels les requérantes font référence. Certes, selon le paragraphe 77 des lignes directrices, aucune intervention de l’État n’est, en principe, nécessaire dans des zones déjà couvertes par des infrastructures à haut débit concurrentes dans lesquelles les opérateurs existants pourraient transformer leurs réseaux à haut débit classiques en réseaux à très haut débit. Toutefois, selon le paragraphe 78 de ces mêmes lignes directrices, un État membre peut démontrer que les opérateurs du haut débit existants n’ont pas l’intention d’investir dans des réseaux à très haut débit dans les trois années à venir.

164    Il ressort de cette jurisprudence et de ces dispositions que l’appréciation de l’existence d’une défaillance du marché constitue un préalable à la qualification d’une activité de SIEG et ainsi à la constatation de l’absence d’aide d’État.

165    Dans la décision attaquée, la Commission a appliqué le critère de la défaillance du marché au cas d’espèce. Elle a considéré, sous le titre « Mesures justifiées par une mission de service public d’intérêt économique général », que les services en question n’étaient pas fournis à l’heure actuelle par des opérateurs tiers d’une façon complète et satisfaisante sur le marché concerné. En effet, aucun opérateur commercial n’aurait à ce jour déployé dans les Hauts-de-Seine un réseau de desserte à très haut débit couvrant l’ensemble des usagers résidentiels et professionnels du département (paragraphe 147 de la décision attaquée).

166    La Commission a ainsi rejeté les allégations d’opérateurs privés tiers formulées au cours de la procédure administrative, selon lesquels il n’existerait aucune raison justifiant une intervention publique, les besoins du public étant sur le point d’être satisfaits par des déploiements de réseaux en fibre entrepris par eux-mêmes. Elle a notamment constaté que, lors de la procédure d’attribution de la DSP, tous les groupements ayant présenté une candidature se sont fondés sur l’existence, dans le département, de zones non rentables dont la couverture aurait nécessité l’octroi d’une subvention publique. De même, il ressortirait d’une réponse de l’ARCEP à une demande d’avis formulée par les autorités françaises à l’instigation de la Commission à la suite d’un courrier de France Télécom du 6 février 2009 qu’aucun opérateur n’a à ce jour déployé un réseau universel en fibre optique dans les Hauts-de-Seine. Enfin, quant au courrier de Free du 26 mai 2009, selon lequel cet opérateur aurait déployé d’ici à la fin de 2012 un réseau à très haut débit couvrant les 36 communes du département, la Commission a constaté que les autorités françaises l’avaient considéré comme étant dépourvu de crédibilité, dès lors que les objectifs de couverture précédents annoncés par cet opérateur en 2007 n’avaient pas été atteints (paragraphes 122 à 134 de la décision attaquée).

167     C’est à la lumière de ces rappels qu’il convient d’examiner les arguments des requérantes, dont aucun n’apparaît de nature à remettre en cause les considérations émises par la Commission, dans la décision attaquée, quant à l’existence d’une défaillance du marché.

168    Ainsi, en premier lieu, doivent être rejetés les arguments des requérantes visant à contester les données prises en compte par la Commission dans le cadre de son appréciation de la défaillance du marché (voir point 151 ci-dessus).

169    À cet égard, il y a lieu de préciser que l’existence d’une défaillance du marché doit être appréciée au moment où le service destiné à pallier cette défaillance est institué. Cette appréciation doit également comporter une analyse prospective de la situation du marché pour toute la durée d’application du SIEG, pendant laquelle la défaillance du marché doit également être vérifiée, ainsi que cela ressort en substance également du point 217 de l’arrêt Olsen/Commission, point 158 supra, cité par la République française. Néanmoins, dès lors que, en vertu d’une jurisprudence constante, les appréciations portées par la Commission ne doivent être examinées qu’en fonction des seuls éléments dont elle disposait au moment où elle les a effectuées (arrêt de la Cour du 11 septembre 2003, Belgique/Commission, C‑197/99 P, Rec. p. I‑8461, point 86, et arrêt du Tribunal du 15 décembre 2009, EDF/Commission, T‑156/04, Rec. p. II‑4503, point 125), l’appréciation de la défaillance du marché est nécessairement limitée aux éléments dont la Commission disposait à la date d’adoption de la décision attaquée.

170    Dans ces conditions, en l’espèce, premièrement, il convient de relever que les requérantes ne sauraient reprocher à la Commission de s’être fondée sur des données anciennes, puisque datant de 2004 et de 2005. En effet, ces données correspondent à la période pendant laquelle le département des Hauts-de-Seine procédait à des études en vue d’instituer un SIEG dans le secteur des communications électroniques à très haut débit, avant le vote de la délibération à l’origine de la procédure de DSP datant du 24 mars 2006.

171    Deuxièmement, d’une part, ne sauraient davantage être opposées à la Commission les données relatives au déploiement de réseaux à très haut débit privés concurrents tirées par les requérantes du mémoire en intervention complémentaire du département des Hauts-de-Seine (voir point 152 ci-dessus), ni les déclarations de France Télécom sur son site Internet au moment du dépôt de la requête (voir point 153 ci-dessus), ni les données relatives au déploiement de Free datant de 2010 (voir point 154 ci-dessus), ni les données cartographiques relatives au déploiement de Numericable datant de 2010 (voir point 155 ci-dessus). En effet, l’ensemble de ces données et déclarations sont postérieures à la décision attaquée.

172    D’autre part, s’agissant de la décision de l’ARCEP (voir point 156 ci-dessus), outre qu’elle est également postérieure à la décision attaquée, il y a lieu de relever, en tout état de cause, que les éléments qu’elle contient ne permettent pas de remettre en cause les considérations exposées par la Commission dans la décision attaquée relatives à l’existence d’une défaillance du marché.

173    En effet, tout d’abord, cette décision de l’ARCEP ne tire aucune conclusion quant à l’état du déploiement des réseaux en fibre optique avant l’établissement du réseau THD 92 et au moment de l’adoption de la décision attaquée. En effet, l’ARCEP s’est précisément fondée sur l’existence déjà annoncée du projet THD 92. Ainsi, elle définit les zones très denses en y incluant notamment les « communes périphériques pour lesquelles la proportion de logements en grands immeubles de plus de douze logements, est supérieure ou égale à 50 % ou pour lesquelles un projet de déploiement en fibre optique a été annoncé à ce jour » (section IV de la décision de l’ARCEP). Partant, l’appréciation portée par l’ARCEP ne portait pas sur la situation antérieure au déploiement du projet THD 92.

174    Ensuite, il ressort de la décision de l’ARCEP, comme l’explique pertinemment la Commission, qu’elle visait à déterminer les points de mutualisation (section I, point 1, de la décision de l’ARCEP), alors que la décision attaquée visait à s’assurer du respect des conditions posées par l’arrêt Altmark, point 17 supra. Or, s’agissant de l’obligation de mutualisation des parties terminales des réseaux, consistant pour les opérateurs à partager leurs installations lorsqu’ils sont susceptibles de desservir un même immeuble, l’ARCEP devait déterminer le champ d’application géographique des obligations qu’elle allait imposer en matière de modalités techniques et financières de mutualisation entre les opérateurs de la partie terminale des réseaux. Pour ce faire, l’ARCEP a retenu un champ d’application large, de nature à couvrir toutes les zones dans lesquelles la concurrence entre opérateurs de réseaux en fibre optique serait potentiellement forte à moyen terme, quitte à y inclure des zones où l’effectivité de cette concurrence est très douteuse en l’absence de rentabilité. Elle a ainsi qualifié le département des Hauts-de-Seine de « zone très dense », dite également « zone noire », sans qu’il puisse en être déduit, compte tenu de ce qui précède, que l’initiative privée ne serait pas en défaut dans le département.

175    Dans ces conditions, il convient, enfin, de rejeter l’argument des requérantes selon lequel le déploiement du réseau THD 92, en ce qu’il intervient dans une zone qualifiée de « noire », est contraire aux lignes directrices (voir point 156 ci-dessus). En effet, dès lors que, ainsi que cela ressort de ce qui précède, la décision de l’ARCEP n’invalide pas le constat d’une défaillance de marché, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir méconnu les lignes directrices, au demeurant non applicables en l’espèce (voir point 17 ci-dessus), en retenant l’existence d’une défaillance du marché et en approuvant l’institution d’un SIEG dans une zone pourtant qualifiée de « noire ».

176    En deuxième lieu, il convient d’observer qu’aucun des arguments des requérantes visant à contester l’interprétation par la Commission des données prises en compte dans la décision attaquée aux fins d’apprécier les initiatives privées de déploiement sur le territoire départemental ne peut être accueilli (voir points 152 à 156 ci-dessus).

177    Ainsi, premièrement, quant au déploiement de France Télécom, la Commission indique, aux paragraphes 98 et 126 à 130 de la décision attaquée, ce qui suit :

« 98. Pour ce qui est des prises ʻraccordablesʼ, les autorités françaises considèrent que le nombre de 95 000 prises mentionné dans le courrier de l’ARCEP correspondrait à 87 000 logements pour France Télécom et près de 8 000 pour les opérateurs alternatifs. Selon les autorités françaises, la prédiction de l’ARCEP selon laquelle ʻce parc de [95 000] logements a vocation à augmenter régulièrement, au rythme des immeubles qui seront démarchés par les opérateurs, et tendre ainsi, à terme, vers le parc de logements adressablesʼ ne serait qu’une hypothèse optimale qui devrait être mise en perspective avec le déploiement de THD 92 qui est fondé sur des engagements fermes et contractuellement contraignants. Selon les autorités françaises, à supposer même que la totalité des prises ʻadressablesʼ de France Télécom deviennent effectivement ʻraccordablesʼ, il n’en reste pas moins que le projet THD 92 permettra a minima la couverture de plus de 300 000 prises supplémentaires.

[...]

126. Lorsque France Télécom par courrier du 6 février 2009 a communiqué à la Commission ses propres prévisions de déploiement d’un réseau à très haut débit dans les Hauts-de-Seine [...], la Commission a demandé aux autorités françaises de recueillir sur cette question l’avis de l’ARCEP, autorité responsable pour la régulation du marché français du haut et du très haut débit, et chargée actuellement, à la suite de l’adoption de la nouvelle loi de modernisation de l’économie en août 2008 [...] d’un rôle important de coordination en matière de développement du très haut débit en France. Cette demande de la Commission a été motivée notamment par le fait que, ainsi que le [c]onseil de la concurrence l’avait déjà constaté en 2008, France Télécom jouit d’une position dominante sur le marché du très haut débit en raison d’un réseau de plus de 300 000 km des fibres posées dans toute la France et du contrôle subséquent d’un nombre significatif des fourreaux qui sont des infrastructures essentielles (non duplicables) pour le déploiement de tels réseaux par des opérateurs alternatifs [...]

127. Ainsi qu’il ressort de la réponse de l’ARCEP, aucun opérateur n’a à ce jour déployé un réseau universel en fibre optique dans les Hauts-de-Seine. En effet, le parc d’abonnés des prises raccordables ne dépassait pas 95 000 logements fin 2008, alors que les prises adressables déjà déployées par France Télécom représentaient 460 000 logements.

128. S’agissant du nombre des prises adressables de France Télécom, ainsi que les autorités françaises l’ont souligné, cet indicateur ne permet pas de prendre en compte des paramètres qui jouent un rôle déterminant dans le déploiement effectif d’un réseau FTTH, tels que la desserte horizontale en domaine public, le déploiement complémentaire en linéaire et en capacité vers toutes les habitations d’une zone donnée. Ainsi le fait que des fibres optiques ont été posées sur la voirie publique ne signifie pas que ces prises seront converties automatiquement en prises raccordables, ce qui semble par ailleurs être confirmé par le très bas ratio (2 %) actuel entre prises ʻraccordablesʼ et prises ʻadressablesʼ de France Télécom.

129. Ceci dit, à supposer même que, dans le futur, France Télécom arrive à convertir toutes ses prises adressables en prises raccordables, il n’en reste pas moins qu’ainsi que les autorités françaises l’ont démontré, il suffirait à France Télécom de ne couvrir que 40 % du [d]épartement pour atteindre même 500 000 prises raccordables, ce qui signifie que plus de 60 % du territoire du [d]épartement ne serait pas couvert. En tout état de cause même si un jour toutes les prises adressables de France Télécom deviennent des prises raccordables, le réseau THD 92 aura couvert 300 000 prises supplémentaires, à savoir plus au moins 40 % en plus en termes de couverture territoriale.

130. Ainsi, les données contenues dans la réponse de l’ARCEP ne font que confirmer les analyses effectuées par les experts du [d]épartement qui, basées sur les règles de mutualisation élaborées par l’ARCEP, montrent que les prises raccordables non rentables représentent 40 % du total des prises du [d]épartement. »

178    Il ressort de ces extraits dépourvus d’équivoque de la décision attaquée, et en particulier de son paragraphe 129, que la Commission a fondé, ainsi que cela a déjà été relevé au point 103 ci-dessus, sa conclusion relative au déploiement de France Télécom sur le territoire des Hauts-de-Seine sur la transformation par cet opérateur de l’ensemble de ses prises adressables en prises raccordables.

179    Tout d’abord, il convient d’écarter comme dépourvu de pertinence l’argument des requérantes selon lequel la Commission aurait erronément considéré que cette transformation ne serait qu’une hypothèse optimale et le nombre de prises adressables déployées ne constitue pas un indicateur fiable du déploiement d’un réseau en fibre optique (voir paragraphes 98 et 128 de la décision attaquée). En effet, les requérantes se bornent à reprocher à la Commission de ne pas avoir apporté la preuve de l’impossibilité de cette transformation. Toutefois, une telle argumentation ne permet pas de remettre en cause les conclusions tirées par la Commission de cette transformation, fût-elle envisagée à titre d’hypothèse optimale.

180    Ensuite, il découle également de la décision attaquée, eu égard à la prise en compte du critère des prises raccordables, qu’il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir considéré que le projet THD 92 permettrait la couverture de 300 000 prises supplémentaires par rapport à la couverture assurée par France Télécom. En effet, il résulte de la réponse de l’ARCEP mentionnée au paragraphe 127 de la décision attaquée et dont la teneur n’est pas contestée par les requérantes que les prises adressables déjà déployées par France Télécom concernaient 460 000 logements. Ainsi, dans l’hypothèse retenue par la décision attaquée de leur transformation en prises raccordables, la différence entre la couverture assurée par France Télécom et celle prévue par le projet THD 92, à savoir 827 900 prises raccordables en vertu de l’article 12 de la convention de DSP, serait d’environ 300 000 prises.

181    En outre, l’erreur de calcul alléguée par les requérantes, s’agissant du ratio mentionné au paragraphe 128 de la décision attaquée, ne peut conduire à l’annulation de la décision attaquée. Il suffit de rappeler que, ainsi que cela ressort des points 101 à 103 ci-dessus, il s’agit d’une simple erreur de plume qui n’a eu aucune conséquence sur le résultat de l’appréciation par la Commission des prévisions de déploiement de France Télécom. En effet, ainsi que cela a déjà été relevé au point 103 ci-dessus, la Commission a conclu, au paragraphe 129 de la décision attaquée, à un déploiement insuffisant de France Télécom en se fondant non sur le ratio de 2 % entaché d’une erreur de plume, mais sur l’hypothèse de la transformation de toutes les prises adressables de France Télécom en prises raccordables.

182    Enfin, il y a lieu de constater que la conclusion relative au pourcentage de 40 % de territoire départemental non rentable, mentionné au paragraphe 130 de la décision attaquée, est fondée sur d’autres considérations, au demeurant non contestées par les requérantes, que celles formulées dans la réponse de l’ARCEP du 25 février 2009. En effet, cette conclusion est explicitement fondée sur les analyses effectuées par les experts du département des Hauts-de-Seine, dont les résultats sont par ailleurs repris au paragraphe 102 de la décision attaquée. Partant, les considérations émises par l’ARCEP dans ladite réponse ne venant que confirmer ce pourcentage de 40 %, les arguments des requérantes visant à contester le lien établi entre les données de l’ARCEP et ledit pourcentage sont inopérants. 

183    Deuxièmement, quant au déploiement de Free, les paragraphes 125, 131 à 133 de la décision attaquée, consacrés à l’analyse des données relatives à ce déploiement, précisent ce qui suit :

« 125 [...C]e n’était que lors de l’annonce du choix du délégataire que pour la première fois Free a exprimé son opposition au projet THD 92 en annonçant ses propres plans de déploiement d’un réseau à très haut débit dans le [d]épartement.

[...]

131. Quant au courrier de Free du 26 mai 2009, selon lequel ledit opérateur serait en train de déployer d’ici fin 2012 un réseau à très haut débit couvrant toutes les 36 communes du [d]épartement, courrier qui selon les autorités françaises serait dépourvu de toute crédibilité et viserait uniquement par le seul effet d’annonce de déstabiliser le projet THD 92, il y a lieu de constater que Free avait déjà en 2007 annoncé, lorsque la délégation du THD 92 a été octroyée, qu’elle était en train de réaliser des travaux pour installer 150 000 prises sur les Hauts-de-Seine. Or, ainsi que les autorités françaises l’ont souligné, dix-huit mois plus tard, Free n’aurait pas atteint cet objectif, ses travaux restant limités à 50 000 prises.

132. Dans son courrier susmentionné, à l’appui de son affirmation [selon laquelle] elle a décidé de déployer dans les trois années à venir un réseau universel à très haut débit, Free a également indiqué qu’elle a déjà entrepris récemment des démarches auprès de France Télécom pour avoir accès à ses fourreaux. Bien que ces démarches ne soient pas en soi suffisantes pour démontrer que Free est effectivement en train de déployer un réseau en fibre optique en construisant autant de prises optiques que celles prévues par le réseau THD 92 (plus de 800 000 prises raccordables), elle doivent en tout état de cause être relativisées dès lors que France Télécom, opérateur historique et concurrent direct de Free (aux fourreaux desquels Free aurait demandé d’avoir accès), ne fait état que de 450 000 prises ʻadressablesʼ déployées dans les Hauts-de-Seine.

133. En outre, l’annonce susmentionnée de Free semble être en contradiction avec le courrier qu’elle a adressé au président du [d]épartement quelques semaines auparavant, dans lequel elle proposa [...] Ainsi qu’il découle de ce courrier, Free ne serait pas opposée, si sa proposition devait être acceptée par le président du [d]épartement, [à ce] qu’une subvention publique soit accordée à la condition qu’elle [soit] engagée sur les zones [...] »

184    Il convient de rappeler, tout d’abord, que les données postérieures à l’adoption de la décision attaquée ne sauraient être prises en considération pour apprécier la légalité de la décision attaquée (voir point 170 ci-dessus). Dans ces conditions, les données relatives au déploiement de Free valablement invoquées par les requérantes se limitent à celles figurant dans la décision attaquée. Les requérantes se contentent au surplus d’alléguer, les concernant, que la Commission en aurait fait une interprétation subjective. Cependant, outre le fait que les requérantes se fondent essentiellement sur les passages de la décision attaquée reprenant les allégations des autorités françaises ou sur les arguments exposés par la Commission dans ses écritures au soutien de son allégation, il y a lieu de relever que la Commission s’est limitée dans ses appréciations de la décision attaquée relatives au déploiement de Free à mettre en rapport certaines annonces de cet opérateur avec la réalité du déploiement effectué à leur suite (voir paragraphe 131 de la décision attaquée) ou à mettre en rapport certains courriers de Free entre eux (voir paragraphe 133 de la décision attaquée). Il ne saurait ainsi en être déduit une interprétation subjective des données relatives au déploiement de Free par la Commission.

185    Ensuite, quant à l’argument des requérantes relatif aux causes de la défaillance de l’initiative privée (voir point 154 ci-dessus), il y a lieu de relever que, ainsi que cela découle notamment des dispositions citées aux points 161 et 162 ci-dessus, la notion de défaillance du marché est une notion objective, dont l’appréciation est fondée sur une analyse de la situation concrète du marché.

186    Cette considération est par ailleurs confirmée, s’agissant plus particulièrement du déploiement des réseaux de communication à haut et à très haut débit, par les lignes directrices. En effet, il ressort du paragraphe 24 et de la note en bas de page n° 31 desdites lignes directrices qu’il y a défaillance du marché susceptible de donner lieu à l’établissement d’un SIEG lorsqu’il peut être démontré que des investisseurs privés pourraient ne pas être en mesure d’assurer dans un avenir proche, c’est-à-dire à l’issue d’une période de trois ans, une couverture adaptée pour l’ensemble des citoyens ou des utilisateurs et qu’ils risquent ainsi de priver de connexion une partie importante de la population. À cet égard, les efforts d’investissement envisagés par les investisseurs privés devraient pouvoir garantir que des progrès à tout le moins significatifs soient accomplis en termes de couverture dans ce délai de trois ans, l’investissement prévu devant être mené à bien dans un délai ultérieur raisonnable en fonction des spécificités de chaque région et de chaque projet.

187    Il résulte du caractère objectif de l’appréciation de l’existence d’une défaillance du marché que les raisons de l’absence d’initiative privée sont dénuées de pertinence aux fins de cette appréciation. Il en résulte a fortiori qu’il ne saurait être déduit d’une cause particulière de la défaillance constatée, telle que, en l’espèce, les incertitudes réglementaires ou encore les difficultés rencontrées par Free pour accéder aux infrastructures de France Télécom, que ladite défaillance serait remise en cause et ne pourrait donner lieu à la création d’un SIEG.

188    Troisièmement, quant au déploiement de Numericable, d’une part, il suffit de constater, à l’instar de la Commission, que les données fournies par les requérantes ne contiennent aucune indication chiffrée précise relative au territoire des Hauts-de-Seine couvert, dès lors qu’elles se limitent à faire état d’un nombre de prises et de foyers à l’échelle nationale et en Île-de-France et mentionnent uniquement les noms des communes du département concernées, dont le nombre est au demeurant limité (6 sur 36). D’autre part, dès lors que les données cartographiques de 2010 ne sauraient être prises en considération aux fins de l’appréciation de la légalité de la décision attaquée (voir point 170 ci-dessus), il y a lieu de constater que les données fournies par les requérantes ne portent que sur les années 2005 et 2006. Il en résulte que, quand bien même les données en cause auraient été prises en compte par la Commission, en même temps que les données relatives aux autres opérateurs, elles n’auraient pas permis de modifier son appréciation de l’existence d’une défaillance du marché. L’argument par lequel les requérantes reprochent à la Commission de ne pas avoir pris en compte le déploiement important de Numericable sur le territoire départemental ne saurait dès lors être accueilli.

189    En troisième lieu, doivent également être rejetés les arguments des requérantes fondés sur le déploiement de réseaux publics en fibre optique. En effet, il ressort en substance de l’article 13 de la convention de DSP, qui porte sur la mise en cohérence du réseau THD 92 avec les autres réseaux d’initiative publique, que le réseau THD 92 ne pourra être déployé dans les zones effectivement desservies par les réseaux publics, ce que les requérantes ne contestent pas. Il ressort de cette disposition que lesdits réseaux publics n’assurent pas une couverture universelle du département. Ainsi, en l’absence d’allégation spécifique et étayée des requérantes visant à établir que ces réseaux publics, le cas échéant avec les réseaux privés susvisés, assurent une couverture universelle du territoire départemental, la Commission ne peut être considérée comme ayant erronément retenu l’existence d’une défaillance du marché.

190    Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes n’ont pas établi que la Commission avait approuvé à tort l’existence d’une défaillance du marché alléguée par les autorités françaises.

b)     Sur l’absence de définition claire des obligations de service public

191    Les requérantes estiment que la condition relative à l’existence d’obligations de service public clairement définies n’est pas satisfaite en l’espèce, eu égard aux contradictions existant entre la description de ces obligations dans le programme de consultation (point 5.3 dudit programme) et dans la convention de DSP (articles 3, 21 et 28.1 de ladite convention). Elles ajoutent que la Commission a exigé une conformité entre ces deux documents dans sa décision du 3 mai 2005 relative à la mise en place d’une infrastructure haut débit sur le territoire de la Région Limousin (Dorsal) (aide d’État N 382/2004 – France) (paragraphes 54 à 56 de ladite décision).

192    Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, la première condition posée par la Cour dans l’arrêt Altmark, point 17 supra, exige que l’opérateur en cause soit chargé d’une mission SIEG par un acte de puissance publique et que celui-ci définisse clairement les obligations de SIEG en cause (voir arrêt BUPA e.a./Commission, point 119 supra, point 181, et la jurisprudence citée).

193    Dans la décision attaquée, la Commission a considéré que les obligations de service public en cause avaient été clairement définies et ressortaient distinctement de la convention de DSP et du programme de consultation remis aux candidats (paragraphe 154 de la décision attaquée).

194    À cet égard, il convient d’ajouter que le programme de consultation remis aux candidats constitue un acte préparatoire s’insérant dans la procédure ayant conduit à la conclusion de la convention de DSP, cette dernière constituant, ainsi que le fait valoir la Commission dans ses écritures, sans que les requérantes le contestent, l’acte final qui donne son plein effet à la délégation de service public.

195    Partant, dès lors que c’est la convention de DSP et non le programme de consultation qui investit le délégataire de la mission de service public que constitue la mise en place du réseau THD 92, il convient de considérer que c’est cette convention qui doit, conformément à la jurisprudence rappelée au point 192 ci-dessus, comporter une définition claire des obligations de service public du délégataire. En effet, il ne saurait être déduit de cette jurisprudence que les obligations de service public doivent être définies de manière exhaustive, à l’avance et sans possibilité de modification ultérieure, dans un acte consultatif préparatoire intervenant dans la procédure de sélection du candidat.

196    Dès lors, la convention de DSP est le document pertinent pour apprécier si, en l’espèce, les obligations de service public ont été clairement définies. Or, les requérantes ne contestent nullement que cette convention définit clairement lesdites obligations. Elles se contentent, en effet, de souligner que la définition contenue dans la convention de DSP et celle contenue dans le programme de consultation sont contradictoires. Toutefois, compte tenu des considérations qui précèdent, cet argument doit être rejeté comme inopérant, dès lors que le programme de consultation ne constitue pas le document pertinent pour apprécier si les obligations de service public sont clairement définies.

197    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument des requérantes selon lequel la Commission aurait elle-même exigé une conformité entre le programme de consultation et la convention de DSP dans sa décision relative à la mise en place d’une infrastructure haut débit sur le territoire de la région Limousin. En effet, à supposer même qu’elle ait entendu consacrer une telle pratique dans cette décision, il suffit de relever que la pratique de la Commission ne saurait remettre en cause une jurisprudence constante.

198    Par ailleurs et en tout état de cause, aucune contradiction susceptible de nuire à la clarté de la définition des obligations de service public en cause ne ressort du programme de consultation et de la convention de DSP.

199    En effet, les requérantes reprochent à la convention de DSP de ne pas faire état de certaines obligations de service public pourtant mentionnées au point 5.3 du programme de consultation, à savoir la « desserte obligatoire de différents bâtiments », c’est-à-dire en substance l’obligation de couverture universelle du territoire, la « mise en œuvre d’une péréquation tarifaire » et la « cohérence du tracé [du] réseau [THD 92] et de ses modalités d’exploitation avec celui des autres réseaux d’initiative publique ». Or, il résulte précisément de l’article 2 de la convention de DSP que le réseau THD 92 permettra la « desserte de l’ensemble des immeubles situés sur le territoire des Hauts-de-Seine » (voir également points 129 à 141 ci-dessus). Par ailleurs, l’obligation de péréquation tarifaire est expressément prévue à l’article 30 de la convention de DSP (voir également point 146 ci-dessus). De même, la cohérence du tracé du réseau THD 92 et de ses modalités d’exploitation avec ceux des autres réseaux d’initiative publique est imposée par l’article 13 de la convention de DSP (voir également point 189 ci-dessus).

200    Inversement, selon les requérantes, la convention de DSP ajouterait des obligations supplémentaires de service public par rapport à celles mentionnées dans le programme de consultation. Ainsi, l’article 3 de la convention de DSP aurait ajouté des obligations relatives aux conditions d’accès au réseau THD par les usagers (accès dans des conditions objectives, transparentes, neutres et non discriminatoires) et l’article 21 de ladite convention des obligations relatives à la continuité et à l’adaptabilité du service public en cause. Cependant, il y a lieu de relever que ressortent du programme de consultation une obligation de garantie d’accès au service public en cause « dans des conditions de transparence, d’objectivité et de non-discrimination », un principe de neutralité (notamment points 1.2 et 3.3.2.3 du programme de consultation), une obligation de continuité dudit service (point 3.7 du programme de consultation) ainsi qu’une « obligation de faire évoluer sur un plan technologique le réseau de communications électroniques à très haut débit [...], de façon à satisfaire en permanence les besoins des usagers et à maintenir à tout instant le réseau de communications électroniques à très haut débit à un niveau de performance conforme à l’état de l’art en vigueur en matière de communications électroniques » (point 6.3.5.2 du programme de consultation).

201    Ainsi, dans la convention de DSP, il n’existe pas d’obligation supplémentaire de service public par rapport à celles que contient le programme de consultation, pas plus qu’il n’existe dans ce programme de consultation des obligations de service public non prévues par la convention de DSP. Il ne saurait dès lors être reproché à la Commission d’avoir considéré, au paragraphe 154 de la décision attaquée, que les obligations de service public en cause avaient été clairement définies et ressortaient distinctement de la convention de DSP et du programme de consultation remis aux candidats.

202    Compte tenu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter la première branche du présent moyen dans son intégralité.

2.     Sur la deuxième branche, tirée du non-respect de la deuxième condition posée par l’arrêt Altmark, relative à l’établissement préalable des paramètres de la compensation

203    Les requérantes estiment que la Commission a erronément considéré que le projet THD 92 remplissait le deuxième critère posé par l’arrêt Altmark, point 17 supra, dès lors que le montant de la subvention litigieuse n’a pas été calculé selon des paramètres préalablement établis de façon objective et transparente, mais résulte directement des négociations menées avec le candidat lauréat. Elles font valoir au soutien de cette allégation que les obligations de service public ne sont pas clairement définies, que les paramètres de calcul de la subvention litigieuse ne seraient pas suffisamment objectifs et transparents pour faire obstacle à une surcompensation, que l’octroi de l’aide publique en cause ne serait qu’éventuel, que le versement de la subvention se fera en deux temps au vu notamment d’un bilan d’exécution de la première phase, que le montant de la subvention aurait été réduit après discussion avec le candidat, que le montant fixé pour la première phase du projet THD 92 mentionné dans la convention de DSP serait erroné et, enfin, que ni le département ni la Commission n’ont procédé à la vérification de l’application de la méthodologie utilisée par le délégataire pour déterminer le montant de la subvention sollicitée.

204    Les requérantes ajoutent que la convention de DSP garantit au délégataire le versement de l’intégralité de la subvention, alors même qu’il ne couvrirait pas 100 % des prises du territoire départemental. En outre, contrairement à ce qu’exigerait la Commission dans sa « doctrine relative à la jurisprudence Altmark », la convention de DSP ne mentionnerait pas le « pourcentage du montant hors taxes effectivement constaté des investissements de premier établissement ».

205    Il y a lieu de rappeler que, selon la deuxième condition posée par l’arrêt Altmark, point 17 supra, requise pour exclure la qualification d’aide d’État, les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation doivent être préalablement établis de façon objective et transparente, afin d’éviter qu’elle ne comporte un avantage économique susceptible de favoriser l’entreprise bénéficiaire par rapport à des entreprises concurrentes (voir point 113 ci-dessus).

206    En l’espèce, au paragraphe 157 de la décision attaquée, la Commission a estimé que cette deuxième condition de l’arrêt Altmark, point 17 supra, était satisfaite, eu égard aux considérations suivantes :

« En l’espèce, les paramètres du financement public ont été définis de façon objective et transparente dans le programme de consultation ainsi que dans le règlement de consultation. En effet, le programme de consultation prévoyait que tous les candidats devraient fournir des tableaux de financement permettant de [connaître] les paramètres utilisés pour définir les zones rentables et non rentables et [de savoir] à partir de quel [taux de retour interne] une zone devenait non rentable ; la contribution que les zones rentables apportaient à la couverture partielle ou totale du besoin de financement des zones non rentables ; et le besoin résiduel qui devait, le cas échéant, être versé par le [d]épartement. Sur la base de ces tableaux, les candidats devaient être en mesure de justifier leur demande pour une subvention qui ne saurait en tout état de cause dépasser le plafond de [70 millions d’euros]. »

207    À cet égard, il ressort des éléments du dossier que les autorités françaises avaient, dans le cadre du programme de consultation communiqué aux candidats à la DSP, décrit en détail les aspects financiers de la DSP en précisant notamment le montant maximal qui sera versé à l’issue de la première phase du déploiement du réseau (25 millions d’euros) ainsi que le montant total maximal de la subvention (70 millions d’euros), les données financières à fournir par le candidat en vue d’évaluer son offre et surtout les modalités de calcul du montant définitif de la subvention (point 5.3 du programme de consultation). Il est ainsi indiqué dans ce document que le montant de la subvention qui sera octroyée, c’est-à-dire le « niveau de participation » du département des Hauts-de-Seine, résultera de la déduction des recettes nettes attendues des zones rentables du « coût brut des sujétions de service public », étant précisé que ce dernier coût également appelé « charge globale » correspond à la somme des charges pour chaque zone non rentable. Les montants de ces charges sont obtenus, toujours selon ce document, en rapportant aux pertes attendues pour une zone les recettes nettes obtenues lorsque le taux de retour interne (ci-après le « TRI ») est atteint, telles que diminuées des recettes nettes prévisionnelles.

208    Il en résulte que, conformément à ce qu’exige la jurisprudence rappelée au point 205 ci-dessus, les éléments intervenant dans le calcul de la compensation, c’est-à-dire les paramètres sur la base desquels celle-ci est calculée, ont été établis dans le programme de consultation de la DSP, soit préalablement à l’octroi de l’avantage, et communiqués aux bénéficiaires potentiels de la subvention, incluant le bénéficiaire effectif ainsi que ses concurrents.

209    Cette conclusion relative au respect de la deuxième condition de l’arrêt Altmark, point 17 supra, n’est pas remise en cause par les arguments invoqués par les requérantes.

210    Tout d’abord, doivent être écartés les arguments par lesquels les requérantes réitèrent en substance des allégations effectuées dans le cadre des autres branches du présent moyen. En effet, à supposer même que ces arguments soient pertinents aux fins d’apprécier le respect de la deuxième condition posée par l’arrêt Altmark, point 17 supra, d’une part, il suffit de relever que les arguments ayant trait à la première condition de l’arrêt Altmark, point 17 supra, réitérés dans le cadre de la présente branche, ont été rejetés au titre de la première branche du présent moyen. Tel est le cas tant de l’argument tiré de l’absence de définition claire des obligations de service public en cause (voir points 198 à 202 ci-dessus) que des contestations du caractère universel du projet THD 92. Ces dernières sont, en effet, reprises en substance dans le cadre de la présente branche lorsque les requérantes reprochent à la convention de DSP de prévoir le versement de l’intégralité de la subvention en dépit de l’absence de couverture de la totalité du territoire départemental en termes de prises raccordées (voir point 204 ci-dessus)

211    D’autre part, s’agissant des arguments relatifs à l’existence d’un risque de surcompensation que les requérantes ont soulevés dans le cadre de la présente branche, il suffit de constater qu’ils relèvent de l’appréciation de la troisième condition de l’arrêt Altmark, point 17 supra, et seront, partant, examinés dans le cadre de la troisième branche, portant spécifiquement sur cette condition, aux points 220 à 240 ci-après.

212    Ensuite, il y a lieu de rappeler que la jurisprudence pertinente, telle que rappelée au point 205 ci-dessus, exige uniquement la communication préalable à l’ensemble des entreprises souhaitant participer à la procédure d’appel d’offres, lorsque le SIEG en cause est attribué selon une telle procédure, des paramètres de calcul de la subvention. En particulier, cette jurisprudence ne requiert pas que le montant de la subvention octroyée soit fixé à l’avance et communiqué à l’ensemble de ces entreprises. Dès lors, il est indifférent que le montant de la subvention finalement retenu ait été inférieur à celui proposé initialement par le délégataire. A fortiori, est indifférente la prétendue erreur affectant le montant correspondant à une partie de cette subvention. Cette conclusion s’impose d’autant plus en l’espèce que ladite erreur figure dans la convention de DSP finalement conclue avec le délégataire et non dans le programme de consultation communiqué à l’ensemble des candidats à cette DSP.

213    De même, il convient d’écarter l’argument des requérantes tiré de ce que le versement de la subvention litigieuse ne serait qu’éventuel et qu’il ne pourrait être que partiel compte tenu du bilan d’exécution de la première phase. En effet, il suffit de rappeler que les éléments intervenant dans le calcul de la compensation ont été, en l’espèce, établis, préalablement à l’octroi de la subvention, dans le programme de consultation de la DSP (voir point 208 ci-dessus). Or, l’éventualité d’un versement partiel de la subvention n’est pas de nature à remettre en cause ce constat.

214    En outre, il y a lieu d’écarter l’allégation d’absence de vérification par le département des Hauts-de-Seine et par la Commission de la méthodologie utilisée par le délégataire pour déterminer le montant de la subvention sollicitée. Tout d’abord, l’absence de vérification, à la supposer établie, n’est pas de nature à invalider le constat, établi au point 208 ci-dessus, selon lequel les éléments intervenant dans le calcul de la compensation ont été définis, préalablement à l’octroi de la subvention, dans le programme de consultation de la DSP. Ensuite, ainsi que les requérantes le reconnaissent elles-mêmes, le délégataire a précisément appliqué cette méthodologie de calcul établie dans le cadre du programme de consultation de la DSP. Enfin, et en tout état de cause, il convient de relever que, ainsi que cela ressort notamment des paragraphes 73 à 77 de la décision attaquée, les autorités françaises ont vérifié la réalité du besoin de financement sollicité par le délégataire.

215    Enfin, doivent être écartés les arguments des requérantes relatifs à la méconnaissance par la Commission de sa « doctrine relative à la jurisprudence Altmark ». En effet, les requérantes ne fournissent aucun élément laissant supposer l’existence d’une telle doctrine. À supposer même que la décision de la Commission du 16 novembre 2004 relative au projet de réseau de télécommunications haut débit des Pyrénées-Atlantiques (aide d’État N 381/2004 – France) (paragraphe 70 de ladite décision), mentionnée par les requérantes dans le cadre de l’exposé du troisième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation en ce qui concerne la deuxième condition posée par l’arrêt Altmark, point 17 supra, puisse être prise en compte à cette fin, il suffit de constater que cette décision mentionne un « pourcentage du montant hors taxes effectivement constaté des investissements de premier établissement », non comme une exigence générale correspondant à la deuxième condition de l’arrêt Altmark, point 17 supra, mais en tant que paramètre de calcul de la compensation prévu dans le cadre du projet en cause de réseau de télécommunications à haut débit des Pyrénées-Atlantiques.

216    Cette deuxième branche du deuxième moyen doit par conséquent être rejetée.

3.     Sur la troisième branche, tirée du non-respect de la troisième condition posée par l’arrêt Altmark, relative à l’absence de surcompensation

217    Les requérantes soutiennent que le délégataire bénéficierait d’une surcompensation de ses charges liées aux obligations de service public.

218    Premièrement, l’offre du délégataire supposerait une réutilisation massive d’infrastructures préexistantes, et notamment de façon privilégiée des infrastructures de France Télécom. Cet avantage aurait été insuffisamment pris en compte dans la fixation du montant de la compensation accordée. Les requérantes soulignent à cet égard le montant particulièrement faible consenti au délégataire (3 millions d’euros) en comparaison des coûts d’accès aux infrastructures de France Télécom pour les autres opérateurs, qui seraient au moins dix fois plus élevés. Elles ajoutent que le délégataire utilise également les infrastructures des collectivités locales et que cette utilisation, qu’elle soit comptabilisée dans le montant de 3 millions d’euros susvisé ou qu’elle soit gratuite, fausse la détermination de la subvention publique.

219    Deuxièmement, le département prévoirait, ainsi qu’il ressortirait des articles 12.1.1 et 12.2.1 de la convention de DSP, le versement d’une partie substantielle de la subvention litigieuse dès la première phase du projet, ce qui entraînerait une compensation en l’absence de coût de service public. En effet, la première phase du projet THD 92 concernerait les zones les plus rentables ne nécessitant pas de subvention, alors que la couverture des zones moins rentables n’interviendrait que lors de la seconde phase. Il résulterait d’ailleurs du rapport du délégataire pour 2009 que les premiers travaux ne concernaient que des zones rentables et que celui-ci aurait même fait part de ses réticences à se déployer dans des zones non denses. Les requérantes ajoutent que, à supposer qu’il existe des zones non rentables au sein de zones globalement rentables, la Commission ne fournit aucune donnée précise relative à ces zones non rentables, alors qu’elle disposait d’une méthode d’analyse permettant de les identifier, la méthode fondée sur le nombre de sous-répartiteur optique, et de déterminer si les établissements publics devant être raccordés se situaient dans de telles zones. Elles reprochent à cet égard à la Commission de s’être fondée sur des données obsolètes, dès lors que la notion d’« îlot », qui compose les sous-répartiteurs optiques, n’est plus utilisée depuis 2000.

220    Il convient de rappeler la jurisprudence constante relative au troisième critère posé par l’arrêt Altmark, point 17 supra, selon laquelle la compensation ne saurait dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes qui y sont relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations (voir arrêt de la Cour du 2 septembre 2010, Commission/Deutsche Post, C‑399/08 P, Rec. p. I‑7831, point 43, et la jurisprudence citée ; voir également point 113 ci-dessus).

221    En outre, selon une jurisprudence également constante relative à la troisième condition de l’arrêt Altmark, point 17 supra, au regard du pouvoir discrétionnaire dont dispose l’État membre quant à la définition d’une mission de SIEG et aux conditions de sa mise en œuvre, y compris pour apprécier les surcoûts occasionnés par son exécution qui dépend de faits économiques complexes, la portée du contrôle que la Commission est habilitée à exercer à ce titre est limitée à celui de l’erreur manifeste. Il en découle que le contrôle devant être exercé par le Tribunal sur l’appréciation de la Commission à cet égard ne saurait non plus dépasser la même limite. En outre, ce contrôle implique que le juge de l’Union détermine si les éléments de preuve apportés par un requérant sont suffisants pour priver de plausibilité les appréciations des faits économiques complexes retenus dans une décision litigieuse. Sous réserve de cet examen de la plausibilité, il n’appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation des faits économiques complexes pertinents à celle de l’auteur de la décision. Dans un tel contexte, le contrôle du Tribunal porte sur la vérification tant du respect par la Commission des règles de procédure et de motivation que de l’exactitude matérielle des faits retenus et de l’absence d’erreur de droit, d’erreur manifeste d’appréciation ou de détournement de pouvoir (voir arrêt BUPA e.a./Commission, point 119 supra, points 220 et 221, et la jurisprudence citée).

222    Dans la décision attaquée, la Commission a indiqué que, afin de compenser les surcoûts induits par l’obligation de service public mise à sa charge, le délégataire bénéficierait d’une subvention de 59 millions d’euros, dont 25 millions pour la première phase de réalisation du projet THD 92 et 34 millions pour la seconde phase (paragraphe 50 de la décision attaquée). Elle a considéré que cette subvention était conforme au troisième critère de l’arrêt Altmark, point 17 supra (paragraphe 163 de la décision attaquée). En particulier, elle a estimé qu’un certain nombre de clauses de sauvegarde figurant dans la convention de DSP visaient à assurer que le délégataire ne recevrait pas plus que ce qui était nécessaire pour couvrir les coûts occasionnés par le service public en cause ainsi qu’un bénéfice raisonnable. En effet, selon la Commission, le plan d’affaires du délégataire avait été contrôlé et vérifié de façon approfondie par les experts du département sur la base de critères et de paramètres très détaillés, ce qui avait permis de vérifier la vraisemblance des estimations du candidat. Ces vérifications avaient ainsi démontré que le montant d’aide convenu finalement avec le délégataire se situait en dessous du montant que celui-ci aurait pu réclamer (paragraphes 73 à 77 et 160 de la décision attaquée). En outre, la Commission a considéré que le délégataire ne bénéficiait pas d’un accès privilégié aux infrastructures déjà accordé par France Télécom et les communes concernées à Numericable, mais d’une cession du droit irrévocable d’usage de Numericable sur ces infrastructures horizontales moyennant une rémunération (paragraphes 159 à 162 de la décision attaquée).

223    C’est à la lumière de ces rappels de la jurisprudence et de la décision attaquée qu’il convient d’examiner les arguments des requérantes.

224    En premier lieu, doit être rejeté l’argument des requérantes relatif à l’existence d’une surcompensation au motif de la prise en compte insuffisante de la réutilisation massive d’infrastructures préexistantes.

225    À cet égard, premièrement, s’agissant de l’utilisation, par le délégataire, des infrastructures de France Télécom, il convient de relever qu’il ressort de la décision attaquée, reprenant en cela les explications données par les autorités françaises, que Numericable dispose, en tant qu’opérateur de réseau câblé, d’un droit irrévocable d’usage des infrastructures de génie civil de France Télécom existant dans 34 des 36 communes des Hauts-de-Seine (paragraphes 39 et 69 de la décision attaquée). Dans le cadre de la DSP, le délégataire bénéficie d’une cession de ce droit irrévocable d’usage de Numericable pour une période de 25 ans, moyennant une rémunération évaluée à 3 millions d’euros (paragraphes 69, 91 et 93 de la décision attaquée). Les autorités françaises expliquent le caractère réduit du montant de cette rémunération par le fait que le coût d’utilisation des infrastructures en cause était directement lié au rachat du réseau câblé par Numericable et avait déjà été amorti à ce titre par cette dernière (paragraphe 69 de la décision attaquée). La Commission indique en outre que les autorités françaises ont souligné que cette rémunération avait été prise en considération dans la détermination du montant de la subvention, de sorte que le délégataire supporterait seul le risque de devoir recourir à des modalités plus coûteuses de déploiement au cas où les droits d’usage concédés à Numericable ne seraient pas renouvelés (paragraphes 93 et 162 de la décision attaquée).

226    Dès lors, il résulte clairement des données fournies par les autorités françaises, telles que reprises dans la décision attaquée, que le montant de 3 millions d’euros pris en compte dans le calcul de la subvention litigieuse visait à couvrir le droit d’usage dont bénéficiait spécifiquement le délégataire aux fins de l’installation et de l’exploitation du réseau en fibre optique de France Télécom.

227    Il y a lieu de préciser que les requérantes ne contestent ni le versement de la somme de 3 millions d’euros par le délégataire en contrepartie de l’utilisation de cette infrastructure, ni le fait que ce montant ait été pris en compte dans le calcul de la subvention.

228    En revanche, les requérantes contestent le montant de 3 millions d’euros. Elles ont précisé lors de l’audience, en réponse aux questions du Tribunal, que leur argumentation était fondée sur la considération selon laquelle, d’une part, le montant de 3 millions d’euros était trop faible en comparaison des sommes dont elles devaient elles-mêmes s’acquitter pour utiliser ces mêmes infrastructures et, d’autre part, ce montant de 3 millions d’euros était susceptible d’être trop élevé eu égard au fait que les infrastructures en cause avaient, apparemment, été largement amorties.

229    Cependant, outre le fait que, contrairement à ce qu’allèguent les requérantes et ainsi que l’a fait valoir la République française lors de l’audience, l’argumentation des requérantes selon laquelle le montant de 3 millions d’euros serait à la fois trop faible et trop élevé est contradictoire, elle ne saurait être retenue.

230    En effet, d’une part, il suffit de constater que la considération selon laquelle le montant de 3 millions d’euros serait trop faible est susceptible de conduire à une augmentation de la subvention accordée au délégataire, dès lors que le montant des coûts de l’utilisation des infrastructures en cause est pris en compte dans le calcul des coûts liés à l’accomplissement des obligations de service public. Il en découle que cette argumentation ne peut venir au soutien de l’allégation de surcompensation.

231    D’autre part, s’agissant de la considération selon laquelle ledit montant serait trop élevé, il y a lieu d’observer que les requérantes se sont contentées de s’interroger, à l’audience, sur le caractère excessif de ce montant eu égard à l’amortissement des infrastructures, sans apporter d’élément précis établissant que ce montant est effectivement excessif.

232    Deuxièmement, les requérantes soutiennent que l’utilisation, par le délégataire, des infrastructures appartenant aux collectivités locales est gratuite. Selon elles, le montant de 3 millions d’euros, qui est considéré dans la décision attaquée comme rémunérant l’ensemble des coûts d’utilisation des infrastructures mises à disposition par Numericable, que celles-ci soient la propriété de France Télécom ou des collectivités locales, constituerait ainsi une surcompensation, dès lors qu’il aboutirait à compenser des coûts qui n’existent pas.

233    Cet argument ne saurait prospérer. En effet, les requérantes non seulement n’avancent aucun élément au soutien de leur allégation, mais évoquent même l’hypothèse d’une comptabilisation du droit d’usage des infrastructures des collectivités locales dans le montant de 3 millions d’euros. Par ailleurs, il ressort de l’annexe 5 de la convention de DSP que le montant de 3 millions d’euros rémunère effectivement l’usage de l’ensemble des infrastructures mises à la disposition du délégataire sans préciser s’il s’agit des infrastructures de France Télécom ou de celles appartenant aux collectivités locales.

234    En second lieu, doit également être rejeté l’argument des requérantes selon lequel le montant de la subvention accordée pour la première phase du projet THD 92 serait excessif dans la mesure où le déploiement prévu au cours de cette première phase ne porterait que sur des zones rentables du département.

235    Il suffit de rappeler la jurisprudence selon laquelle la compensation ne saurait dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes qui y sont relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations (voir point 220 ci-dessus). Il en résulte, selon la jurisprudence relative à l’article 86, paragraphe 2, CE (arrêt de la Cour du 19 mai 1993, Corbeau, C‑320/91, Rec. p. I‑2533, point 17), transposable à l’appréciation de l’existence d’une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE (voir, en ce sens, arrêt BUPA e.a./Commission, point 119 supra, point 160), que, si la compensation ne doit couvrir que les coûts de déploiement d’une infrastructure dans les zones non rentables, les recettes générées par l’exploitation commerciale de l’infrastructure dans les zones rentables peuvent être affectées au financement du SIEG dans les zones non rentables.

236    Partant, la couverture de zones rentables ne signifie pas nécessairement que la subvention accordée est excessive, dès lors qu’elle est source de revenus pouvant servir à financer la couverture de zones non rentables et ainsi permettre de diminuer le montant de la subvention accordée.

237    En l’espèce, les requérantes ne contestant pas que des zones non rentables seront couvertes au cours de la seconde phase du projet THD 92 (voir point 219 ci-dessus), elles ne sauraient déduire de la prétendue couverture des seules zones rentables au cours de la première phase, à la supposer avérée, l’existence d’une surcompensation.

238    Dans ces conditions, d’une part, les diverses critiques des requérantes dirigées contre la détermination par la Commission des zones non rentables au sein du département doivent être rejetées comme inopérantes. En effet, elles ne sont pas de nature à remettre en cause le constat, établi au point précédent, de l’absence d’une surcompensation du fait de la couverture des seules zones rentables durant la première phase de réalisation du projet THD 92.

239    D’autre part, l’argument des requérantes tiré de ce que les premiers travaux du délégataire n’auraient concerné que des zones rentables ne saurait davantage prospérer. En effet, outre que cet argument est fondé sur un fait postérieur à la décision attaquée et qu’il a trait non à la légalité de la décision attaquée, mais à l’exécution de la convention de DSP, il suffit de constater que, même à supposer un tel déploiement sélectif avéré, il ne serait pas de nature à remettre en cause le constat d’absence d’une surcompensation, tel qu’établi au point 237 ci-dessus.

240    Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes n’ont pas établi que la Commission avait méconnu la troisième condition posée par l’arrêt Altmark, point 17 supra, et que la troisième branche du présent moyen doit, par conséquent, être rejetée.

4.     Sur la quatrième branche, tirée du non-respect de la quatrième condition posée par l’arrêt Altmark, relative à la détermination du niveau de compensation

241    Les requérantes allèguent que le quatrième critère posé par l’arrêt Altmark, point 17 supra, n’a pas été respecté par le projet THD 92. En effet, d’une part, les obligations de service public n’auraient pas été suffisamment définies dans le programme de consultation de la DSP. D’autre part, les modalités de la passation de la DSP ne permettraient pas de considérer que le département des Hauts-de-Seine a organisé une procédure de publicité et de mise en concurrence assurant une comparaison claire et transparente des offres des candidats. Les requérantes estiment en particulier que le niveau de compensation nécessaire n’aurait pas dû être déterminé par la voie d’une simple négociation, mais aurait dû l’être sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée aurait supportés. Elles ajoutent que l’offre économiquement la plus avantageuse n’est pas nécessairement l’offre la moins élevée, puisqu’elle intègre d’autres critères que le seul prix.

242    À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de la jurisprudence relative à la quatrième condition posée par l’arrêt Altmark, point 17 supra, lorsque le choix de l’entreprise qui sera chargée de l’exécution d’obligations de service public, dans un cas concret, n’est pas effectué dans le cadre d’une procédure de marché public permettant de sélectionner le candidat capable de fournir ces services au moindre coût pour la collectivité, le niveau de la compensation nécessaire doit être déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée afin de pouvoir satisfaire aux exigences de service public requises, aurait encourus pour exécuter ces obligations, en tenant compte des recettes qui y sont relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations (voir point 113 ci-dessus).

243    Dans la décision attaquée, la Commission a estimé que la procédure utilisée pour l’attribution de la DSP avait été une procédure spécifique applicable pour l’attribution d’un contrat de concession et dans le cadre de laquelle les autorités françaises avaient gardé une marge d’appréciation dans le choix du délégataire (paragraphe 166 de la décision attaquée). Elle a considéré toutefois que les documents qui lui avaient été soumis indiquaient que la procédure utilisée avait effectivement permis un degré substantiel de concurrence effective entre les trois offres et que celle retenue était capable de fournir le service en question au moindre coût pour la collectivité (paragraphe 168 de la décision attaquée).

244    En effet, selon la Commission, les autorités départementales ont procédé en deux étapes. Dans un premier temps, elles ont mené des études initiales de faisabilité qui ont porté sur différents scenarios de couverture du territoire départemental en matière de très haut débit ainsi que des consultations publiques auprès des opérateurs concernés afin d’établir les besoins d’une couverture universelle du département, les caractéristiques du service public, et estimer les coûts du projet et le montant du cofinancement public potentiel. Sur la base de ces études, le département a fixé dès le début de la procédure un montant maximal de subvention de 70 millions d’euros (paragraphe 169 de la décision attaquée). Dans un second temps, le département a lancé une procédure de publicité et de mise en concurrence. Les différents paramètres identifiés, les obligations de service public incombant au futur délégataire ainsi que les critères de sélection ont été portés à la connaissance des six candidats initiaux au moyen du programme de consultation (paragraphe 170 de la décision attaquée). Ensuite, les autorités départementales ont comparé les aspects quantitatifs et qualitatifs de l’offre des candidats en termes notamment de technologie utilisée, de revenus, d’investissements et de subvention. Seul le groupement mené par Numericable a pu présenter une offre complète, demander une subvention moindre et obtenir à la fin la meilleure notation (paragraphe 171 de la décision attaquée). Le département a effectué par la suite une analyse circonstanciée des coûts et des recettes de l’offre retenue, de la méthodologie de calcul de la subvention demandée par le groupement mené par Numericable et a procédé à une vérification supplémentaire au moyen d’un outil méthodologique beaucoup plus approfondi, mis en place par l’expert mandaté à cet effet par le département (paragraphe 172 de la décision attaquée).

245    Compte tenu de ces éléments, la Commission a conclu, au paragraphe 173 de la décision attaquée, que le département des Hauts-de-Seine avait sélectionné le candidat capable de fournir le service en cause au moindre coût pour la collectivité.

246    Cette conclusion de la Commission et les considérations sur lesquelles elle est fondée ne sont pas remises en cause par les arguments des requérantes.

247    En effet, eu égard à la jurisprudence citée au point 242 ci-dessus, il convient d’emblée d’écarter comme étant dépourvu de pertinence en l’espèce l’argument des requérantes tiré de l’absence de définition claire des obligations de service public dans le programme de consultation transmis aux candidats. En tout état de cause, cet argument a déjà été rejeté comme étant non fondé dans le cadre de l’examen de la première branche du présent moyen (voir points 198 à 202 ci-dessus).

248    Pour le surplus, il y a lieu de constater que l’argumentation des requérantes vise à établir que la DSP a en l’espèce été attribuée sur la base d’une procédure non conforme au quatrième critère posé par l’arrêt Altmark, point 17 supra. En effet, le niveau de la compensation nécessaire aurait dû, selon les requérantes, être déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée afin de pouvoir satisfaire aux exigences de service public requises aurait encourus pour exécuter ces obligations.

249    Cette argumentation ne saurait être retenue.

250    En effet, d’une part, les requérantes se contentent de faire valoir que les conditions dans lesquelles la subvention litigieuse a été déterminée, à savoir par la voie d’une simple négociation, ne permettent pas de considérer que le département des Hauts-de-Seine a organisé une procédure de publicité et de mise en concurrence permettant de comparer de manière claire et transparente les offres des candidats. Elles soulignent à cet égard que seul un groupement candidat a en définitive été en mesure de déposer une offre complète.

251    Toutefois, en l’espèce, la négociation entre le groupement retenu et les autorités départementales est intervenue après les mesures de publicité dont a fait l’objet la DSP (paragraphe 32 de décision attaquée) et qui ne sont pas en tant que telles contestées par les requérantes. L’existence de cette phase de négociation ne permet pas dès lors de remettre en cause l’existence d’une procédure de publicité. De même, des négociations ont eu lieu, selon le paragraphe 35 de la décision attaquée, avec les trois candidats ayant déposé une offre, ce qui n’est pas contesté par les requérantes. Le fait que seul un candidat ait, à l’issue de cette phase de négociations avec le département, été en mesure de déposer une offre complète ne saurait donc non plus remettre en cause l’existence d’une mise en concurrence et d’une comparaison entre plusieurs candidats.

252    D’autre part, les requérantes soutiennent que l’offre retenue est certes l’offre la moins élevée, mais qu’elle n’est pas l’offre la plus avantageuse économiquement, cette dernière intégrant d’autres critères que le prix, notamment des critères d’ordre qualitatif. Or, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la question de savoir si l’offre la « moins coûteuse » mentionnée dans l’arrêt Altmark, point 17 supra, correspond à la notion de prix le plus bas ou à celle d’offre économiquement la plus avantageuse, il suffit de constater que les requérantes ne fournissent aucun élément de nature à établir que l’offre du délégataire retenu ne serait pas la plus avantageuse économiquement.

253    Les requérantes n’ont dès lors pas établi que la Commission avait méconnu en l’espèce le quatrième critère posé par l’arrêt Altmark, point 17 supra.

254    La quatrième branche de ce moyen ainsi que le deuxième moyen dans son intégralité doivent, par conséquent, être rejetés.

III –  Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

255    Les requérantes font valoir que la décision attaquée est insuffisamment motivée dans la mesure où elle ne contient pas d’éléments suffisants permettant de conclure que toutes les conditions posées par l’arrêt Altmark, point 17 supra, sont remplies en l’espèce.

256    Quant à la première condition posée par l’arrêt Altmark, point 17 supra, la décision attaquée n’évoquerait pas la couverture actuelle du territoire départemental par les réseaux d’initiative publique et par Numericable. Elle se limiterait par ailleurs à des considérations très subjectives sur la crédibilité des projets des investisseurs privés et serait fondée en partie sur des arguments inopérants. Elle serait également fondée sur des erreurs portant sur la distinction entre prises raccordées, raccordables et adressables et sur la confusion entre « territoire non rentable » et « nombre de prises non rentables ». En outre, la Commission ne motiverait pas l’intérêt général du service en cause, en se contentant pour l’essentiel de se référer à la position des autorités françaises. Enfin, la Commission ne pourrait valablement soutenir que les obligations de service public en cause seraient clairement définies.

257    Quant à la deuxième condition posée par l’arrêt Altmark, point 17 supra, la Commission se bornerait à se fonder sur de simples affirmations des autorités françaises, sans vérifier que le cahier des charges de la DSP détermine précisément le montant de la subvention en indiquant qu’il s’agit d’un « pourcentage du montant hors taxes effectivement constaté des investissements de premier établissement » [voir la décision de la Commission du 16 novembre 2004 relative au projet de réseau de télécommunications haut débit des Pyrénées Atlantiques (aide d’État N 381/2004 – France), mentionnée au point 215 ci-dessus (paragraphe 70)].

258    Quant à la troisième condition posée par l’arrêt Altmark, point 17 supra, les requérantes reprochent à la Commission de s’être limitée à se référer aux vérifications réalisées par les autorités françaises, sans procéder à ses propres vérifications.

259    Quant à la quatrième condition posée par l’arrêt Altmark, point 17 supra, la Commission se serait également contentée de reprendre la description générale effectuée par les autorités françaises de la procédure de consultation conduite.

260    Selon une jurisprudence constante, la motivation d’une décision adoptée en matière d’aides d’État doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution auteur de l’acte de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires de l’acte ou d’autres personnes concernées par celui-ci peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences du traité doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt de la Cour du 22 décembre 2008, Régie Networks, C‑333/07, Rec. p. I‑10807, point 63, et la jurisprudence citée).

261    En l’espèce, la décision attaquée a été adoptée au terme de la phase préliminaire d’examen des aides instituée par l’article 88, paragraphe 3, CE, qui doit être clôturée dans un délai de deux mois et qui a seulement pour objet de permettre à la Commission de se former une première opinion sur l’aide concernée, sans que soit ouverte la procédure formelle d’examen prévue au paragraphe 2 dudit article, qui, quant à elle, est destinée à permettre à la Commission d’avoir une information complète sur l’ensemble des données relatives à cette aide. Il incombe dès lors à la Commission, lorsqu’elle approuve une mesure d’aide à l’issue de la procédure préliminaire d’examen, d’exposer uniquement de manière sommaire les principaux motifs de cette décision d’approbation et, en particulier, s’agissant d’une décision rejetant la qualification d’aide d’une mesure, les principales raisons pour lesquelles ladite mesure n’entre pas dans le champ d’application de l’article 87, paragraphe 1, CE (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 14 février 1990, Delacre e.a./Commission, C‑350/88, Rec. p. I‑395, point 16 ; arrêt Régie Networks, point 260 supra, points 64 et 65, et arrêt du Tribunal du 10 décembre 2008, Kronoply et Kronotex/Commission, T‑388/02, non publié au Recueil, point 93).

262    Il convient de rejeter, en l’espèce, l’allégation générale des requérantes selon laquelle la décision attaquée ne contient pas d’éléments suffisants permettant de conclure que toutes les conditions posées par l’arrêt Altmark, point 17 supra, sont remplies par le projet THD 92. En effet, dans la décision attaquée (paragraphes 120 à 175), la Commission a examiné si ledit projet était conforme à chacune des quatre conditions posées par l’arrêt Altmark, point 17 supra, en présentant une motivation allant au-delà d’une motivation sommaire, qui a d’ailleurs permis aux requérantes de présenter une argumentation détaillée en vue de la contester.

263    Quant aux allégations spécifiques de violation par la Commission de son obligation de motivation dans le cadre de son examen de chacune des quatre conditions posées par l’arrêt Altmark, point 17 supra, il y a lieu de rappeler la jurisprudence constante en vertu de laquelle l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé de la motivation, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux (voir arrêt de la Cour du 22 mars 2001, France/Commission, C-17/99, Rec. p. I-2481, point 35, et la jurisprudence citée), laquelle recouvre également les obligations d’examen de la Commission en matière d’aides d’État (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C-367/95 P, Rec. p. I-1719, point 72, et arrêt du Tribunal du 11 mars 2009, TF1/Commission, T‑354/05, Rec. p. II‑471, point 166).

264    Or, en l’espèce, l’ensemble de ces allégations spécifiques des requérantes visent en réalité à contester le bien-fondé de la décision attaquée. Partant, elles ne sont pas de nature à établir que la Commission a violé son obligation de motiver la décision attaquée.

265    Par ailleurs, aucune de ces allégations spécifiques n’est de nature à remettre en cause le bien-fondé de la décision attaquée.

266    Ainsi, certaines des allégations spécifiques ne sont que la réitération d’arguments déjà soulevés dans le cadre du deuxième moyen et ont été rejetées à ce titre (voir points 129 à 136, 178, 179 et 181 ci-dessus, répondant à l’argument tiré de la confusion entre prises raccordées, raccordables et adressables, point 184 ci-dessus, répondant au reproche d’appréciation subjective de la crédibilité des projets de déploiement des opérateurs privés dans les Hauts-de-Seine, point 188 ci-dessus, répondant au reproche d’absence de prise en compte du déploiement de Numericable, points 198 à 202 ci-dessus, rejetant l’allégation d’absence de définition claire des obligations de service public en cause, et point 215 ci-dessus, rejetant l’argument tiré de la nécessaire prise en compte de « pourcentage du montant hors taxes effectivement constaté des investissements de premier établissement » pour vérifier le respect de la deuxième condition posée par l’arrêt Altmark, point 17 supra).

267    Quant aux autres allégations des requérantes auxquelles il n’a pas déjà été répondu, il y a lieu tout d’abord de rappeler, aux fins de répondre à l’argument selon lequel la Commission aurait fait mention des analyses et vérifications effectuées par les autorités françaises sans procéder elle-même à ces vérifications et analyses, que le contrôle exercé par la Commission sur la définition d’un SIEG et sur la détermination de la compensation octroyée en contrepartie est limité à l’erreur manifeste d’appréciation de l’État membre (voir points 119, 123 et 221 ci-dessus). Il en résulte que, si la Commission s’est contentée dans certains passages de la décision attaquée de se référer aux vérifications et analyses des autorités françaises, c’est parce qu’elle a estimé que celles-ci n’étaient pas entachées d’erreur manifeste. Il ne saurait ainsi en être déduit une méconnaissance par la Commission de son obligation d’examen du projet THD 92. Par ailleurs, il ressort de la réponse au premier moyen que les requérantes n’ont pas démontré l’existence de difficultés sérieuses quant à l’appréciation du projet THD 92 qui auraient dû conduire la Commission à ouvrir la procédure formelle d’examen pour examiner ledit projet de manière approfondie.

268    Ensuite, il convient de considérer, s’agissant de l’argument des requérantes selon lequel la Commission n’aurait pas examiné le déploiement du réseau public « Irisé » lors de son analyse de la couverture du département des Hauts-de-Seine par des réseaux à très haut débit, que la Commission n’était pas tenue de prendre en compte ce réseau public eu égard à l’absence de couverture universelle par ledit réseau (voir point 189 ci-dessus).

269    Enfin, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir opéré une confusion entre « territoire non rentable » et « nombre de prises non rentables ». En effet, l’emploi indifférent de ces deux expressions s’explique par le fait que les autorités françaises, approuvées par la Commission, ont estimé qu’il convenait de déterminer les zones non rentables du département en se fondant sur une unité constituée par la « prise » (voir notamment paragraphe 73 de la décision attaquée). Dès lors que les requérantes ne contestent pas spécifiquement cet appui sur la notion de « prise » pour évaluer la rentabilité du département, elles ne peuvent reprocher à la Commission l’emploi indifférent des deux expressions susvisées.

270    Il résulte de ce qui précède qu’il convient de rejeter le présent moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation, ainsi que les griefs de fond soulevés à l’occasion de ce moyen.

271    Le présent recours doit par conséquent être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

272    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

273    Aux termes de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. Aux termes de l’article 87, paragraphe 4, troisième alinéa, du règlement de procédure, le Tribunal peut ordonner qu’une partie intervenante autre que celles mentionnées au premier alinéa supportera ses propres dépens. Le département des Hauts-de-Seine, la République française et la République de Pologne, intervenus au soutien de la Commission, supporteront donc leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Iliad, Free infrastructure et Free supporteront, outre leurs propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne.

3)      Le département des Hauts-de-Seine, la République française et la République de Pologne supporteront leurs propres dépens.

Truchot

Martins Ribeiro

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 septembre 2013.

Signatures


Table des matières


Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

I –  Sur le premier moyen, tiré de la violation des droits procéduraux des requérantes prévus par l’article 88, paragraphe 2, CE

A –  Indices relatifs à la procédure préliminaire d’examen

1.  Sur le premier indice, tenant à la durée de la procédure préliminaire d’examen

2.  Sur le deuxième indice, tenant aux objections des opérateurs concurrents

3.  Sur le troisième indice, tenant aux échanges entre la Commission et les autorités françaises

B –  Indices relatifs au contenu de la décision attaquée

1.  Sur le premier indice, tenant aux engagements futurs pris par les autorités françaises

2.  Sur le second indice, tenant à l’examen incomplet et insuffisant des conditions posées par l’arrêt Altmark

II –  Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE

1.  Sur la première branche, tirée du non-respect de la première condition posée par l’arrêt Altmark, relative à l’existence d’obligations de service public effectives et définies

a)  Sur la qualification erronée des services en cause de SIEG

Sur l’absence de certaines caractéristiques des SIEG

–  Absence d’universalité du projet THD 92

–  Absence de neutralité technologique du projet THD 92

–  Absence de spécificité de la péréquation tarifaire dans le cadre du projet THD 92

Sur l’absence de défaillance du marché

b)  Sur l’absence de définition claire des obligations de service public

2.  Sur la deuxième branche, tirée du non-respect de la deuxième condition posée par l’arrêt Altmark, relative à l’établissement préalable des paramètres de la compensation

3.  Sur la troisième branche, tirée du non-respect de la troisième condition posée par l’arrêt Altmark, relative à l’absence de surcompensation

4.  Sur la quatrième branche, tirée du non-respect de la quatrième condition posée par l’arrêt Altmark, relative à la détermination du niveau de compensation

III –  Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

Sur les dépens


* Langue de procédure : le français.