Language of document : ECLI:EU:T:2024:46

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

31 janvier 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Enregistrement international désignant l’Union européenne – Marque verbale IU International University of Applied Sciences – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001 – Obligation de motivation – Article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑188/23,

IU Internationale Hochschule GmbH, établie à Erfurt (Allemagne), représentée par Me A. Heise, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. D. Hanf, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes A. Marcoulli, présidente, V. Tomljenović et M. R. Norkus (rapporteur), juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, IU Internationale Hochschule GmbH, demande l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 14 février 2023 (affaire R 1951/2022‑1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 22 juin 2021, l’EUIPO a reçu notification de la désignation de l’Union européenne pour l’enregistrement international déposé par la requérante pour la marque verbale IU International University of Applied Sciences.

3        La marque demandée désignait, notamment, des services relevant des classes 41 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 41 : « Formation éducative ; formation ; éducation et formation continues ; organisation, préparation et tenue de séminaires et d’ateliers, cours de formation, conférences et congrès [formation] et cours ; organisation d’expositions et de présentations multimédias [éducation, formation] ; organisation et mise en œuvre de programmes d’apprentissage à distance et de programmes dans le cadre de l’apprentissage en ligne ; création, émission, publication et fourniture de produits de l’imprimerie et de documents d’enseignement et de séminaires, y compris sous forme électronique non téléchargeable ; rédaction et transformation de programmes d’enseignement [concepts] et de concepts pour la formation continue, y compris dans le cadre de l’apprentissage en ligne et pour les programmes d’apprentissage à distance et de formation à distance ; services d’information, à savoir informations sur des événements [éducation, formation] ; mise à disposition de vidéos, de contenus audio, de vodcasts et de podcasts en ligne [non téléchargeables] ; fourniture de formation, d’éducation continue et de formation continue pour les étudiants et les enseignants via des portails sur l’internet » ;

–        classe 42 : « Services scientifiques et recherches et conception connexes ; hébergement de plateformes sur l’internet pour étudiants et enseignants et pour la formation, l’éducation continue et la formation continue ; hébergement interactif pour permettre la publication et le partage en ligne de contenus par les utilisateurs, en particulier les enseignants et les étudiants ».

4        Par décision du 21 septembre 2022, l’examinateur a rejeté, en tant qu’elle visait ces services, la demande d’enregistrement de ladite marque, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

5        Le 5 octobre 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de l’examinateur.

6        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours notamment au motif que la marque demandée était descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001. En particulier, la chambre de recours a considéré que l’expression « International University of Applied Sciences » était descriptive pour les services en cause. Quant au groupe de lettres « iu », étant donné qu’il précède immédiatement l’expression « International University », le public pertinent le percevrait comme l’acronyme de cette expression.

7        Selon la chambre de recours, la marque demandée étant une indication purement descriptive, elle est également dépourvue de tout caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

 Conclusions des parties

8        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

9        L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens dans l’hypothèse où une procédure orale serait prévue.

 En droit

10      La requérante invoque, en substance, trois moyens tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, le deuxième, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement et, le troisième, de la violation de l’article 94, paragraphe 1, du même règlement.

11      Dès lors que le troisième moyen porte sur des griefs tirés d’un défaut de motivation et que les deux premiers contestent le bien-fondé de cette motivation, il convient d’analyser en premier lieu le troisième moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001

12      La requérante soutient que la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation pour deux raisons. D’une part, la chambre de recours aurait constaté que le public pertinent n’avait pas de raison de ne pas percevoir le groupe de lettres « iu » comme l’acronyme de « international university » au sein de l’expression « international university of applied sciences », et ce sans avoir examiné des faits qui plaideraient contre une telle perception. D’autre part, ladite chambre n’aurait pas procédé à un examen individuel de chacun des services en cause avant de considérer que la marque demandée indiquait, pour l’ensemble de ces services, qu’ils étaient fournis par une université à des étudiants de différents pays.

13      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

14      Aux termes de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Cette obligation a la même portée que celle découlant de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, lequel exige que la motivation fasse apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte, sans qu’il soit nécessaire que cette motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait auxdites exigences devant cependant être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, point 65 et jurisprudence citée).

15      L’obligation de motiver des décisions constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. En effet, la motivation d’une décision consiste à exprimer formellement les motifs sur lesquels repose cette décision. Si ces motifs sont entachés d’erreurs, celles-ci entachent la légalité au fond de la décision, mais non la motivation de celle-ci, qui peut être suffisante tout en exprimant des motifs erronés [voir arrêt du 20 février 2013, Langguth Erben/OHMI (MEDINET), T‑378/11, EU:T:2013:83, point 15 et jurisprudence citée].

16      S’agissant de l’obligation, pour l’autorité compétente, de motiver le refus d’enregistrement d’une marque à l’égard de chacun des produits ou des services pour lesquels cet enregistrement est demandé, l’autorité compétente peut se limiter à une motivation globale pour tous les produits ou services concernés, lorsque le même motif de refus est opposé pour une catégorie ou un groupe de produits ou de services (voir arrêt du 17 mai 2017, EUIPO/Deluxe Entertainment Services Group, C‑437/15 P, EU:C:2017:380, point 30 et jurisprudence citée). Cependant, une telle faculté ne s’étend qu’à des produits et à des services présentant entre eux un lien suffisamment direct et concret, au point qu’ils forment une catégorie ou un groupe de produits ou de services d’une homogénéité suffisante (voir arrêt du 17 mai 2017, EUIPO/Deluxe Entertainment Services Group, C‑437/15 P, EU:C:2017:380, point 31 et jurisprudence citée).

17      En l’espèce, s’agissant, tout d’abord, de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’aurait pas examiné des faits permettant de constater que le public pertinent pouvait ne pas percevoir le groupe de lettres « iu » comme l’acronyme de « international university » au sein de l’expression « international university of applied sciences », il convient de constater que la motivation de la décision attaquée concernant la perception de la marque demandée par le public pertinent est claire et non équivoque et apparaît suffisante pour permettre à la requérante de comprendre le raisonnement de la chambre de recours et de le contester et au juge de l’Union d’exercer son contrôle. Dès lors, il ne peut être soutenu que ce raisonnement souffre d’un défaut de motivation.

18      Ensuite, quant à l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’aurait pas procédé à un examen individuel de chacun des services en cause avant de considérer que la marque demandée indiquait, pour l’ensemble de ces services, qu’ils étaient fournis par une université à des étudiants provenant de différents pays, force est de constater que la requérante ne soutient pas que ces services ne pourraient pas être fournis par une université à des étudiants internationaux. En outre, il y a lieu de relever que la chambre de recours a indiqué, au point 12 de la décision attaquée, que « [l]es services faisant l’objet du recours consistent en divers services d’éducation, de formation et d’informations connexes compris dans la classe 41, ainsi qu’en des services scientifiques, de recherche et d’hébergement de plateformes compris dans la classe 42 » et, au point 13 de ladite décision, que ces services pouvaient être fournis par un établissement d’enseignement de haut niveau ouvert aux étudiants provenant de différents pays. Or, la requérante ne conteste pas ces appréciations de la chambre de recours ni ne fait valoir que les services en cause ne présentent pas entre eux un lien suffisamment direct et concret pour pouvoir considérer qu’ils forment une catégorie ou un groupe de services d’une homogénéité suffisante permettant à l’autorité compétente de se limiter à une motivation globale.

19      Il y a donc lieu de considérer que la chambre de recours pouvait se limiter, conformément à la jurisprudence exposée au point 16 ci-dessus, à une motivation globale pour tous les services en cause.

20      Il ressort de ce qui précède que la chambre de recours n’a pas violé l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001.

21      Il convient, par conséquent, de rejeter le troisième moyen.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7 paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001

22      La requérante fait valoir, en substance, que la marque demandée n’a pas de caractère descriptif, car le groupe de lettres « iu » n’est pas descriptif en soi et le public pertinent ne le reconnaîtrait pas immédiatement et directement comme étant un acronyme de l’expression composant ladite marque, à savoir « international university of applied sciences ». Selon la requérante, la lettre « i » n’est pas une abréviation courante ou reconnue pour le terme « international », lequel serait abrégé « int. », « intl. » ou « int’l », tout comme le groupe de lettres « iu » ne constitue pas une abréviation connue pour l’expression « international university ». Si les règles habituelles de création d’acronymes avaient été appliquées en l’espèce, l’abréviation de l’expression « international university of applied sciences » aurait été « IntUAS » ou « IUAS ».

23      De même, la requérante estime que le public pertinent doit faire un effort de réflexion évident pour analyser les termes qui suivent le groupe de lettres « iu » pour parvenir à la conclusion que ce groupe de lettres ne correspond qu’à une partie desdits termes. En outre, le public pertinent n’aurait pas de raisons pour procéder à une telle analyse étant donné que l’élément « IU » n’est pas une abréviation usuelle dans le contexte des services en cause et que d’autres abréviations sont connues.

24      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

25      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci.

26      Ces signes ou indications sont réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service (arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 30).

27      Pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public pertinent de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir arrêts du 12 janvier 2005, Deutsche Post EURO EXPRESS/OHMI (EUROPREMIUM), T‑334/03, EU:T:2005:4, point 25 et jurisprudence citée, et du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, EU:T:2005:247, point 25 et jurisprudence citée].

28      L’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d’autre part, par rapport à la compréhension qu’en a le public pertinent [voir arrêt du 25 octobre 2005, Peek & Cloppenburg/OHMI (Cloppenburg), T‑379/03, EU:T:2005:373, point 37 et jurisprudence citée].

29      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que les services visés par la marque demandée, tels qu’ils sont mentionnés au point 3 de la décision attaquée, consistaient en divers services d’éducation, de formation et d’informations connexes compris dans la classe 41, ainsi qu’en des services scientifiques, de recherche et d’hébergement de plateformes compris dans la classe 42. Elle a également considéré que l’ensemble de ces services s’adressaient au grand public et, à l’instar de l’examinateur, a fondé son appréciation sur la partie anglophone dudit public.

30      La requérante ne conteste pas ces appréciations de la chambre de recours. Au demeurant, aucun élément du dossier ne permet de les remettre en cause.

31      La marque demandée est composée du groupe de lettres « iu » suivi immédiatement de l’expression en anglais « international university of applied sciences ».

32      La chambre de recours a considéré que ladite expression, compte tenu de sa signification en anglais, était descriptive des services en cause étant donné qu’elle informait les consommateurs du fait que lesdits services étaient proposés par un établissement d’enseignement de haut niveau ouvert aux étudiants provenant de différents pays (pour l’élément « international university ») et qui était spécialisé dans les sciences appliquées (pour l’élément « of applied sciences »). Quant au groupe de lettres « iu », la chambre de recours a considéré qu’il ne véhiculait pas nécessairement une signification claire s’il était considéré isolément, mais qu’il pouvait être compris comme un acronyme de « international university » dans le cadre d’une appréciation d’ensemble de la marque demandée.

33      La requérante ne conteste pas l’appréciation de la chambre de recours relative au caractère descriptif de l’expression en anglais « international university of applied sciences » par rapport aux services en cause, mais fait valoir, en substance, que le groupe de lettres « iu » n’est, en soi, pas descriptif, qu’il ne peut pas être considéré comme une abréviation ou un acronyme des autres termes de la marque demandée et que, partant, la marque demandée, considérée dans son ensemble, n’est pas descriptive des services en cause.

34      D’emblée, il y a lieu de relever que la jurisprudence n’établit pas ni ne constate l’existence de règles particulières relatives à la formation d’acronymes ou d’abréviations, mais se limite à prendre acte de certains usages habituels en la matière. Ainsi, le Tribunal a relevé que les conjonctions, les prépositions et les articles ne font généralement pas partie des acronymes [arrêt du 8 décembre 2021, Talleres de Escoriaza/EUIPO – Salto Systems (KAAS KEYS AS A SERVICE), T‑294/20, non publié, EU:T:2021:867, point 79].

35      En outre, si certains acronymes sont formés en reprenant les initiales de plusieurs mots [voir, en ce sens, arrêt du 10 décembre 2008, JTEKT/OHMI (IFS), T‑462/05, non publié, EU:T:2008:557, point 25], d’autres peuvent comporter une combinaison de lettres ou de syllabes initiales (voir, en ce sens, arrêt du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, EU:C:2005:547, points 69 et 70).

36      En l’absence de règles claires applicables à la création d’abréviations ou d’acronymes, certains termes ne sont pas nécessairement abrégés ou intégrés dans un acronyme sous un format unique. S’agissant, en particulier, du mot « international », s’il est vrai, comme la requérante le démontre, qu’il peut parfois être abrégé « int. », « intl » ou « int’l », force est de constater qu’il peut aussi être intégré dans des acronymes uniquement par la reprise de sa lettre initiale, comme dans les acronymes d’organisations internationales mondialement connues telles que l’OIT, pour « Organisation internationale du Travail », le FMI, pour « Fonds monétaire international », et l’AIEA, pour « Agence internationale de l’énergie atomique ».

37      En l’espèce, l’expression « international university of applied sciences » est une expression complexe construite autour du mot « university ». Ainsi que la requérante l’admet, cette expression complexe pourrait avoir pour acronyme « IUAS », lequel serait créé par la reprise de la lettre initiale de chaque terme à l’exception de la préposition « of ». Cela signifie implicitement, mais nécessairement, que le groupe de lettres « iu » est, en soi, susceptible de constituer l’acronyme du groupe de mots « international university ». Une telle lecture est d’autant plus plausible que « IU », comme l’EUIPO le fait valoir à juste titre, est un acronyme typique pour un établissement d’enseignement supérieur ouvert vers l’international.

38      Il ne saurait donc être exclu que la partie anglophone du public pertinent puisse percevoir le groupe de lettres « iu », dans la marque demandée et par rapport aux services en cause, comme un acronyme de l’expression juxtaposée « international university ». Le fait que d’autres acronymes ou abréviations soient également envisageables, voire plus connus, pour ladite expression complexe dans son ensemble ou pour certains des éléments qui la composent n’est pas déterminant. En effet, il suffit que le groupe de lettres « iu » puisse constituer, en au moins une de ses significations potentielles, un acronyme ou une abréviation de l’expression « international university » et, de ce fait, désigner une caractéristique des services concernés (voir, en ce sens, arrêt du 3 septembre 2020, achtung!/EUIPO, C‑214/19 P, non publié, EU:C:2020:632, point 35 et jurisprudence citée).

39      Contrairement à ce que fait valoir la requérante, le cas d’espèce ne se distingue pas fondamentalement de celui ayant donné lieu à l’arrêt du 15 mars 2012, Strigl et Securvita (C‑90/11 et C‑91/11, EU:C:2012:147), et ce en dépit du fait que le groupe de lettres « iu » ne constitue pas un acronyme pour l’ensemble des mots qui suivent. En effet, à l’instar des marques en cause dans cet arrêt, la marque demandée en l’espèce est constituée d’une expression descriptive et d’un groupe de lettres non descriptif en lui-même, mais qui peut être perçu par le public pertinent comme un acronyme ou une abréviation des termes composant l’expression. Ledit groupe de lettres n’occupe, par rapport à l’expression, qu’une position accessoire et, bien qu’il revête un caractère non descriptif lorsqu’il est pris isolément, est susceptible de revêtir un caractère descriptif en raison de sa combinaison, au sein de la marque demandée, avec une expression principale, elle-même descriptive comme telle, dont elle serait perçue comme l’abréviation (voir, en ce sens, arrêt du 15 mars 2012, Strigl et Securvita, C‑90/11 et C‑91/11, EU:C:2012:147, point 38).

40      En revanche, la présente affaire se distingue de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 8 décembre 2021, KAAS KEYS AS A SERVICE (T‑294/20, non publié, EU:T:2021:867). Dans cet arrêt, le Tribunal a notamment considéré, d’une part, que l’expression « keys as a service » ne permettait pas au public pertinent de comprendre immédiatement, et sans autre réflexion, quelles étaient les caractéristiques des produits en cause, de sorte que ladite expression ne devait pas être considérée comme descriptive. D’autre part, le Tribunal a considéré que le groupe de lettres « kaas » ne possédait pas une signification descriptive des produits en cause et n’allait pas être perçu par le public pertinent comme un acronyme des termes « keys as a service » ni même comme un acronyme présentant un lien avec les produits en cause. Le Tribunal a donc jugé que le simple fait que « kaas » coïncidait avec les initiales des termes « keys as a service » n’était pas déterminant pour conclure qu’il s’agissait d’un acronyme de cette expression. Or, dans la présente affaire, ainsi qu’il a été constaté au point 38 ci-dessous, le groupe de lettre « iu » peut être perçue par la partie anglophone du public pertinent comme un acronyme de l’expression juxtaposée « international university », laquelle est descriptive des services en cause.

41      S’agissant de la décision du Bundespatentgericht (Cour fédérale des brevets, Allemagne) évoquée par la requérante au point 31 de la requête et produite dans l’annexe A 9, il convient de rappeler que le régime des marques de l’Union européenne est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national (voir, en ce sens, arrêt du 25 octobre 2007, Develey/OHMI, C‑238/06 P, EU:C:2007:635, point 65). Toutefois, les constatations figurant dans les décisions des juridictions nationales, même si elles concernent un litige différent, constituent, en soi, un fait qui peut, s’il est pertinent, être pris en considération par le Tribunal dans le cadre de son pouvoir d’appréciation souverain des faits (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 10 mai 2012, Rubinstein et L’Oréal/OHMI, C‑100/11 P, EU:C:2012:285, point 78).

42      En l’espèce, la requérante se borne à mentionner ladite décision d’une juridiction nationale comme exemple d’application en droit national de certains principes établis par le juge de l’Union. En particulier, la requérante ne démontre pas que les faits figurant dans cette décision sont pertinents pour établir l’absence de caractère descriptif de la marque demandée.

43      Par conséquent, la décision de la Cour fédérale des brevets produite par la requérante ne saurait remettre en cause la légalité de la décision attaquée.

44      Enfin, quant à la référence faite par la requérante aux lignes directrices de l’EUIPO, il suffit de relever que celles-ci ne constituent pas des actes juridiques contraignants pour l’interprétation des dispositions du droit de l’Union (arrêt du 19 décembre 2012, Leno Merken, C‑149/11, EU:C:2012:816, point 48).

45      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de constater que la chambre de recours a conclu à juste titre que la marque demandée, considérée dans son ensemble, pouvait être perçue par la partie anglophone du public pertinent comme une combinaison d’indications ou d’abréviations fournissant des informations sur les caractéristiques des services en cause.

46      Il s’ensuit que le moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 7 paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

47      La requérante fait valoir, en substance, que c’est à tort que la chambre de recours a conclu à l’absence de caractère distinctif du signe IU International University of Applied Sciences pour les services en cause. En effet, étant donné que ledit signe ne posséderait pas de signification descriptive au regard des services visés, il revêtirait un caractère distinctif intrinsèque.

48      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

49      Dès lors qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 qu’il suffit qu’un des motifs absolus de refus qui y sont énumérés s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque de l’Union européenne, il n’est pas nécessaire d’examiner le bien-fondé du deuxième moyen invoqué par la requérante, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

50      En conséquence, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

51      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

52      Bien que la requérante ait succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens qu’en cas d’organisation d’une audience. En l’absence d’organisation d’une audience, il convient de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      IU Internationale Hochschule GmbH supportera ses propres dépens.

3)      L’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supportera ses propres dépens.

Marcoulli

Tomljenović

Norkus

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 31 janvier 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.