Language of document : ECLI:EU:T:2022:421

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre élargie)

6 juillet 2022 (*)

« Droit institutionnel – Membre du Parlement – Refus du président du Parlement de reconnaître la qualité de député européen et les droits associés à des candidats élus – Recours en annulation – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑388/19,

Carles Puigdemont i Casamajó, demeurant à Waterloo (Belgique),

Antoni Comín i Oliveres, demeurant à Waterloo,

représentés par Mes P. Bekaert, G. Boye, S. Bekaert, avocats, et M. B. Emmerson, QC,

parties requérantes,

contre

Parlement européen, représenté par MM. N. Görlitz, T. Lukácsi et Mme C. Burgos, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par

Royaume d’Espagne, représenté par Mme A. Gavela Llopis, en qualité d’agent,

partie intervenante,

LE TRIBUNAL (sixième chambre élargie),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, MM. S. Frimodt Nielsen, J. Schwarcz, C. Iliopoulos (rapporteur) et R. Norkus, juges,

greffier : M. I. Pollalis, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 21 janvier 2022,

rend le présent

Arrêt

1        Par leur recours fondé sur l’article 263 TFUE, les requérants, MM. Carles Puigdemont i Casamajó et Antoni Comín i Oliveres, demandent l’annulation, d’une part, de l’instruction du 29 mai 2019 du président du Parlement européen leur refusant le bénéfice du service d’accueil et d’assistance offert aux députés européens entrants et l’octroi d’une accréditation temporaire et, d’autre part, du refus du président du Parlement de leur reconnaître la qualité de député européen, contenu dans la lettre du 27 juin 2019.

 Cadre juridique

 Protocole (no 7) sur les privilèges et immunités de l’Union européenne

2        L’article 9 du protocole (no 7) sur les privilèges et immunités de l’Union européenne (JO 2010, C 83, p. 266, ci-après le « protocole no 7 »), énonce ce qui suit :

« Pendant la durée des sessions du Parlement européen, les membres de celui-ci bénéficient :

a)      sur leur territoire national, des immunités reconnues aux membres du parlement de leur pays,

b)      sur le territoire de tout autre État membre, de l’exemption de toute mesure de détention et de toute poursuite judiciaire.

L’immunité les couvre également lorsqu’ils se rendent au lieu de réunion du Parlement […] ou en reviennent.

[…] »

 Acte électoral

3        L’article 5 de l’acte portant élection des membres du Parlement au suffrage universel direct (JO 1976, L 278, p. 5), annexé à la décision 76/787/CECA, CEE, Euratom du Conseil, du 20 septembre 1976 (JO 1976, L 278, p. 1), tel que modifié par la décision 2002/772/CE, Euratom du Conseil, du 25 juin 2002 et du 23 septembre 2002 (JO 2002, L 283, p. 1, ci-après l’« acte électoral »), établit ce qui suit :

« 1. La période quinquennale pour laquelle sont élus les membres du Parlement […] commence à l’ouverture de la première session tenue après chaque élection.

[…]

2. Le mandat de chaque membre du Parlement […] commence et expire en même temps que la période visée au paragraphe 1. »

4        L’article 7 de l’acte électoral énonce ce qui suit :

« 1. La qualité de membre du Parlement […] est incompatible avec celle de :

–        membre du gouvernement d’un État membre,

–        membre de la Commission [européenne],

–        juge, avocat général ou greffier de la Cour de justice [de l’Union européenne],

–        membre du directoire de la Banque centrale européenne,

–        membre de la Cour des comptes [européenne],

–        [M]édiateur [européen],

–        membre du Comité économique et social [européen],

–        membre du Comité des régions,

–        membre de comités ou organismes créés en vertu ou en application des traités instituant la Communauté économique européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique en vue de l’administration de fonds communautaires ou d’une tâche permanente et directe de gestion administrative,

–        membre du conseil d’administration, du comité de direction ou employé de la Banque européenne d’investissement,

–        fonctionnaire ou agent en activité des institutions [de l’Union européenne] ou des organes ou organismes qui leur sont rattachés ou de la Banque centrale européenne.

2. À partir de l’élection au Parlement […] en 2004, la qualité de membre du Parlement […] est incompatible avec celle de membre d’un parlement national.

[…]

3. En outre, chaque État membre peut étendre les incompatibilités applicables sur le plan national, dans les conditions prévues à l’article [8].

[…] »

5        L’article 8 de l’acte électoral dispose ce qui suit :

« Sous réserve des dispositions du présent acte, la procédure électorale est régie, dans chaque État membre, par les dispositions nationales.

Ces dispositions nationales, qui peuvent éventuellement tenir compte des particularités dans les États membres, ne doivent pas globalement porter atteinte au caractère proportionnel du mode de scrutin. »

6        L’article 12 de l’acte électoral prévoit ce qui suit :

« Le Parlement […] vérifie les pouvoirs des membres du Parlement […] À cet effet, il prend acte des résultats proclamés officiellement par les États membres et statue sur les contestations qui pourraient être éventuellement soulevées sur la base des dispositions du présent acte, à l’exclusion des dispositions nationales auxquelles celui-ci renvoie. »

7        L’article 13 de l’acte électoral énonce ce qui suit :

« 1. Un siège devient vacant quand le mandat d’un membre du Parlement […] expire en cas de sa démission ou de son décès ou de déchéance de son mandat.

2. Sous réserve des autres dispositions du présent acte, chaque État membre établit les procédures appropriées pour que, au cas où un siège devient vacant, ce siège soit pourvu pour le reste de la période quinquennale visée à l’article [5].

3. Lorsque la législation d’un État membre établit expressément la déchéance du mandat d’un membre du Parlement […], son mandat expire en application des dispositions de cette législation. Les autorités nationales compétentes en informent le Parlement […]

[…] »

 Règlement intérieur du Parlement (2019-2024)

8        L’article 3 du règlement intérieur du Parlement applicable à la neuvième législature (2019-2024) (ci-après le « règlement intérieur »), intitulé « Vérification des pouvoirs », est libellé comme suit :

« 1. À l’issue des élections générales au Parlement […], le [p]résident [du Parlement] invite les autorités compétentes des États membres à communiquer sans retard au Parlement les noms des députés élus, afin que l’ensemble de ceux-ci puissent siéger au Parlement dès l’ouverture de la première séance suivant les élections.

Le [p]résident [du Parlement] attire en même temps l’attention de ces mêmes autorités sur les dispositions pertinentes de l’acte [électoral] et les invite à prendre les mesures nécessaires afin d’éviter la survenance de toute incompatibilité avec le mandat de député au Parlement […]

2. Les députés dont l’élection est communiquée au Parlement sont tenus de déclarer par écrit, avant de siéger au Parlement, qu’ils n’exercent pas une fonction incompatible avec celle de député au Parlement […], aux termes de l’article 7, paragraphe 1 ou 2, de l’acte [électoral]. À l’issue des élections générales, cette déclaration doit être faite dans la mesure du possible six jours au plus tard avant l’ouverture de la première séance suivant les élections. Aussi longtemps que leurs pouvoirs n’ont pas été vérifiés ou qu’il n’a pas été statué sur une contestation éventuelle, les députés siègent au Parlement et dans ses organes en pleine jouissance de leurs droits, à la condition qu’ils aient effectué au préalable la déclaration écrite susmentionnée.

Dans le cas où des faits vérifiables à partir de sources accessibles au public permettent d’établir qu’un député exerce une fonction incompatible avec celle de député au Parlement […], aux termes de l’article 7, paragraphe 1 ou 2, de l’acte [électoral], le Parlement, sur la base des informations fournies par son Président, constate la vacance.

3. Sur la base d’un rapport de la commission compétente, le Parlement procède sans retard à la vérification des pouvoirs et statue sur la validité du mandat de chacun de ses membres nouvellement élus, ainsi que sur les contestations éventuelles présentées conformément aux dispositions de l’acte [électoral], à l’exclusion de celles qui, en vertu dudit acte, relèvent exclusivement des dispositions nationales auxquelles celui-ci renvoie.

Le rapport de la commission est fondé sur la communication officielle, par chaque État membre, de l’ensemble des résultats électoraux précisant le nom des candidats élus, ainsi que celui des suppléants éventuels, avec leur ordre de classement tel qu’il résulte du vote.

La validité du mandat des députés ne peut être confirmée qu’après que ceux-ci ont effectué les déclarations écrites exigées par le présent article ainsi que par l’annexe I du présent règlement intérieur.

[…] »

9        L’article 8 du règlement intérieur, intitulé « Action d’urgence du [p]résident [du Parlement] en vue de confirmer l’immunité » établit ce qui suit :

« 1. Dans les cas où un député est arrêté ou privé de sa liberté de déplacement en violation apparente de ses privilèges et immunités, le [p]résident [du Parlement] peut prendre d’urgence, après consultation du président et du rapporteur de la commission compétente, une initiative visant à confirmer les privilèges et immunités du député concerné. Le [p]résident [du Parlement] communique son initiative à la commission et en informe le Parlement.

[…] »

10      L’article 9 du règlement intérieur, intitulé « Procédures relatives à l’immunité » dispose ce qui suit :

« 1. Toute demande adressée au [p]résident [du Parlement] par une autorité compétente d’un État membre en vue de lever l’immunité d’un député, ou par un député ou un ancien député en vue de défendre des privilèges et immunités, est communiquée en séance plénière et renvoyée à la commission compétente.

2. Avec l’accord du député ou de l’ancien député concerné, la demande peut être adressée par un autre député, qui est autorisé à représenter le député ou l’ancien député concerné à toutes les étapes de la procédure.

[…] »

11      Enfin, l’article 4, paragraphe 1, de l’annexe I du règlement intérieur, intitulée « Code de conduite des députés au Parlement […] en matière d’intérêts financiers et de conflits d’intérêts », établit ce qui suit :

« Pour des raisons de transparence, les députés au Parlement […] présentent sous leur responsabilité personnelle une déclaration d’intérêts financiers au Président avant la fin de la première période de session consécutive aux élections au Parlement […] (ou, en cours de législature, dans les 30 jours suivant leur entrée en fonction au Parlement), en utilisant le formulaire à adopter par le Bureau en vertu de l’article 9. Ils informent le Président de tout changement influant sur leur déclaration avant la fin du mois qui suit ledit changement. »

 Loi électorale espagnole

12      L’article 224 de la Ley orgánica 5/1985 de Régimen Electoral General (loi organique 5/1985, portant régime électoral général), du 19 juin 1985 (Boletín Oficial del Estado no 147, du 20 juin 1985, p. 19110, ci-après la « loi électorale espagnole ») établit ce qui suit :

« 1. La Junta Electoral Central [(commission électorale centrale, Espagne)] procède, au plus tard le vingtième jour suivant les élections, au décompte des votes au niveau national, à l’attribution des sièges correspondant à chacune des candidatures et à la proclamation des candidats élus.

2. Dans un délai de cinq jours à compter de leur proclamation, les candidats élus doivent jurer ou promettre de respecter la Constitution [espagnole] devant la [commission électorale centrale]. À l’issue de ce délai, la [commission électorale centrale] déclare vacants les sièges attribués aux députés du Parlement […] n’ayant pas juré ou promis de respecter la Constitution [espagnole] et suspendues toutes les prérogatives qui pourraient leur revenir du fait de leurs fonctions, jusqu’à ce que cette prestation de serment ait lieu.

[...] »

 Antécédents du litige et faits postérieurs à l’introduction du recours

13      M. Puigdemont i Casamajó était président de la Generalitat de Cataluña (Généralité de Catalogne, Espagne) et M. Comín i Oliveres membre du Gobierno autonómico de Cataluña (gouvernement autonome de Catalogne, Espagne) au moment de l’adoption de la Ley 19/2017 del Parlamento de Cataluña, reguladora del referéndum de autodeterminación (loi 19/2017 du Parlement de Catalogne, portant réglementation du référendum d’autodétermination), du 6 septembre 2017 (DOGC no 7449A, du 6 septembre 2017, p. 1), et de la Ley 20/2017 del Parlamento de Cataluña, de transitoriedad jurídica y fundacional de la República (loi 20/2017 du Parlement de Catalogne, de transition juridique et constitutive de la République), du 8 septembre 2017 (DOGC no 7451A, du 8 septembre 2017, p. 1), ainsi que de la tenue, le 1er octobre 2017, du référendum d’autodétermination prévu par la première de ces deux lois, dont les dispositions avaient, dans l’intervalle, été suspendues par une décision du Tribunal Constitucional (Cour constitutionnelle, Espagne).

14      À la suite de l’adoption desdites lois et de la tenue dudit référendum, le Ministerio fiscal (ministère public, Espagne), l’Abogado del Estado (avocat de l’État, Espagne) et le parti politique VOX ont engagé une procédure pénale contre plusieurs personnes, dont les requérants, en considérant que celles-ci avaient commis des faits relevant notamment des infractions de « sédition » et de « détournement de fonds publics ».

15      Par ordonnance du 9 juillet 2018, le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne) a déclaré les requérants défaillants, à la suite de leur fuite d’Espagne, et a suspendu la procédure pénale ouverte contre eux jusqu’à ce qu’ils soient retrouvés.

16      Par ailleurs, les requérants se sont présentés comme candidats aux élections au Parlement qui se sont tenues en Espagne le 26 mai 2019 (ci-après les « élections du 26 mai 2019 »), dans la liste de la coalition Lliures per Europa (Junts), qu’ils conduisaient.

17      À l’issue des élections du 26 mai 2019, la liste susmentionnée a recueilli 1 018 435 voix et a obtenu deux sièges au Parlement.

18      Le 29 mai 2019, le président du Parlement en fonction à cette date (ci-après l’« ancien président du Parlement ») a donné une instruction interne au secrétaire général de l’institution (ci-après l’« instruction du 29 mai 2019 ») visant à refuser, à tous les candidats élus en Espagne, l’accès au « welcome village » ainsi que l’assistance fournie par l’institution aux candidats nouvellement élus au Parlement (ci-après le « service spécial d’accueil ») et à surseoir à leur accréditation jusqu’à ce que le Parlement ait officiellement reçu confirmation de leur élection conformément à l’article 12 de l’acte électoral. En application de cette instruction, les requérants n’ont pas pu bénéficier du service spécial d’accueil et, partant, se sont vu refuser l’accès au « welcome village » ainsi que l’octroi d’une accréditation et d’un badge temporaires.

19      Le 13 juin 2019, la Junta Electoral Central (commission électorale centrale, Espagne) a adopté une décision portant « [p]roclamation des députés élus au Parlement européen aux élections organisées le 26 mai 2019 » (Boletín Oficial del Estado no 142, du 14 juin 2019, p. 62477, ci-après la « proclamation du 13 juin 2019 »). La proclamation du 13 juin 2019 indiquait que, conformément à l’article 224, paragraphe 1, de la loi électorale espagnole, et d’après les données figurant dans les décomptes consolidés transmis par chacune des commissions électorales provinciales, la commission électorale centrale avait procédé au nouveau décompte des voix au niveau national aux élections du 26 mai 2019, à l’attribution des sièges correspondants à chacun des candidats et à la proclamation des candidats élus mentionnés nominativement, parmi lesquels figuraient les requérants. La proclamation du 13 juin 2019 indiquait également que la session lors de laquelle les candidats élus allaient prêter le serment de respecter la Constitution espagnole, exigé par l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale espagnole, allait avoir lieu le 17 juin 2019.

20      Par lettre du 14 juin 2019, les requérants ont demandé à l’ancien président du Parlement, en substance, de prendre acte des résultats des élections du 26 mai 2019 résultant de la proclamation du 13 juin 2019, de retirer son instruction du 29 mai 2019 afin qu’ils puissent avoir accès aux locaux du Parlement et bénéficier du service spécial d’accueil et de donner instruction aux services du Parlement de leur permettre de prendre possession de leurs sièges et de jouir des droits afférents à leur qualité de membres du Parlement à compter du 2 juillet 2019, date de la première séance plénière après les élections du 26 mai 2019.

21      Le 15 juin 2019, le juge d’instruction du Tribunal Supremo (Cour suprême) a rejeté une demande des requérants visant au retrait des mandats d’arrêt nationaux délivrés contre eux par les juridictions pénales espagnoles afin qu’ils puissent être jugés dans le cadre de la procédure pénale mentionnée au point 14 ci-dessus.

22      Le 17 juin 2019, la commission électorale centrale a notifié au Parlement la liste des candidats élus en Espagne (ci-après la « communication du 17 juin 2019 »), dans laquelle ne figuraient pas les noms des requérants.

23      Le 20 juin 2019, la commission électorale centrale a, en substance, refusé aux requérants la possibilité de prêter le serment de respecter la Constitution espagnole, exigé par l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale espagnole, par la voie d’une déclaration écrite faite devant un notaire en Belgique ou par l’intermédiaire de mandataires désignés par acte notarié fait en Belgique, au motif que ce serment est un acte qui doit être effectué en personne devant la commission électorale centrale.

24      Le même jour, la commission électorale centrale a communiqué au Parlement une décision dans laquelle elle a constaté que les requérants n’avaient pas prêté le serment de respecter la Constitution espagnole et a, conformément à l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale espagnole, déclaré la vacance des sièges attribués aux requérants au Parlement ainsi que la suspension de toutes les prérogatives qui pourraient leur revenir du fait de leurs fonctions jusqu’à ce qu’ils aient prêté ce serment.

25      Par lettre du 20 juin 2019, les requérants ont demandé à l’ancien président du Parlement d’adopter en urgence, sur le fondement de l’article 8 du règlement intérieur, toute mesure nécessaire aux fins de confirmer leurs privilèges et immunités et, en particulier, de défendre ces privilèges et immunités, de déclarer que les mandats d’arrêt nationaux dont ils faisaient l’objet violaient les privilèges et immunités dont ils bénéficiaient en vertu de l’article 9 du protocole no 7, de déclarer que l’article 9, deuxième alinéa, du même protocole protégeait les députés européens contre toute restriction judiciaire apportée à leur liberté de circulation pouvant les empêcher d’accomplir les formalités nécessaires à leur prise de fonction et, enfin, de transmettre immédiatement sa décision aux autorités espagnoles compétentes.

26      Par lettre du 24 juin 2019, les requérants ont, en substance, réitéré l’ensemble des demandes présentées précédemment dans leurs lettres des 14 et 20 juin 2019 (voir points 20 et 25 ci-dessus), lesquelles étaient restées sans réponse.

27      Par lettre du 27 juin 2019, l’ancien président du Parlement a répondu aux lettres des requérants des 14, 20 et 24 juin 2019, en leur indiquant, en substance, qu’il ne pouvait pas les traiter comme de futurs membres du Parlement, car leurs noms ne figuraient pas sur la liste des candidats élus communiquée officiellement par les autorités espagnoles (ci-après la « lettre du 27 juin 2019 »).

28      À la suite de cette réponse, le 28 juin 2019, les requérants ont introduit le présent recours en annulation (enregistré sous le numéro T‑388/19) dirigé, d’une part, contre l’instruction du 29 mai 2019 et, d’autre part, contre plusieurs actes contenus dans la lettre du 27 juin 2019, à savoir, en substance, premièrement, le refus de l’ancien président du Parlement de prendre acte des résultats des élections du 26 mai 2019 ; deuxièmement, la déclaration de la vacance du siège attribué respectivement à chacun des requérants effectuée par l’ancien président du Parlement ; troisièmement, le refus de l’ancien président du Parlement de reconnaître à ces derniers le droit de prendre leurs fonctions, d’exercer le mandat de député européen et de siéger au Parlement dès le début de la première session suivant les élections du 26 mai 2019 et, quatrièmement, le refus de l’ancien président du Parlement de prendre d’urgence une initiative sur le fondement de l’article 8 du règlement intérieur visant à confirmer leurs privilèges et immunités.

29      Le même jour, les requérants ont également introduit une demande en référé, enregistrée sous le numéro T‑388/19 R.

30      Le 2 juillet 2019 a été ouverte la première session du Parlement nouvellement élu après les élections du 26 mai 2019.

31      Par courriel du 10 octobre 2019, la députée européenne Mme Riba i Giner, agissant au nom des requérants, a adressé au nouveau président du Parlement élu le 3 juillet 2019 (ci-après le « nouveau président du Parlement ») et aux président et vice-président de la commission des affaires juridiques du Parlement une demande émanant de 38 députés européens issus de plusieurs nationalités et partis politiques, dont elle-même, visant notamment à ce que le Parlement défende, sur le fondement de l’article 9 du règlement intérieur, l’immunité parlementaire des requérants, visée à l’article 9, premier et deuxième alinéas, du protocole no 7.

32      Le 14 octobre 2019, le juge d’instruction de la chambre pénale du Tribunal Supremo (Cour suprême) a émis un mandat d’arrêt national, un mandat d’arrêt européen et un mandat d’arrêt international contre M. Puigdemont i Casamajó, afin qu’il puisse être jugé dans le cadre de la procédure pénale mentionnée au point 14 ci-dessus. Le 4 novembre 2019, le juge d’instruction de la chambre pénale du Tribunal Supremo (Cour suprême) a émis les mêmes mandats d’arrêt contre M. Comín i Oliveres. Par la suite, les requérants ont été placés en détention en Belgique, respectivement, le 17 octobre et le 7 novembre 2019 et libérés, le jour même, sous conditions.

33      Par deux lettres du 10 décembre 2019 libellées en des termes similaires, l’une adressée à Mme Riba i Giner et l’autre à l’ensemble des 38 députés, le nouveau président du Parlement a répondu à la demande mentionnée au point 31 ci-dessus. En substance, le nouveau président du Parlement a fait valoir, en particulier, qu’il ne pouvait pas considérer les requérants comme membres du Parlement en l’absence de communication officielle de leur élection par les autorités espagnoles, au sens de l’acte électoral.

34      Le 20 février 2020 les requérants ont introduit un recours en annulation contre la lettre du 10 décembre 2019 adressée à Mme Riba i Giner par le nouveau président du Parlement (voir point 33 ci-dessus), lequel a été enregistré sous le numéro T‑115/20.

35      Par arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), la Cour a notamment jugé qu’une personne qui avait été officiellement proclamée élue au Parlement, mais qui n’avait pas été autorisée à se conformer à certaines exigences prévues par le droit interne à la suite d’une telle proclamation, ainsi qu’à se rendre au Parlement en vue de prendre part à la première session de celui-ci, devait être regardée comme bénéficiant d’une immunité en vertu de l’article 9, deuxième alinéa, du protocole no 7.

36      Lors de la séance plénière du 13 janvier 2020, le Parlement a pris acte, à la suite de l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), de l’élection au Parlement des requérants avec effet au 2 juillet 2019 (ci-après la « prise d’acte du 13 janvier 2020 »).

 Procédure et conclusions des parties

37      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 juin 2019, les requérants ont introduit le présent recours.

38      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le même jour, les requérants ont introduit une demande en référé, sur le fondement des articles 278 et 279 TFUE, enregistrée sous le numéro T‑388/19 R.

39      Par ordonnance du 1er juillet 2019, Puigdemont i Casamajó et Comín i Oliveres/Parlement (T‑388/19 R, non publiée, EU:T:2019:467), le président du Tribunal a rejeté la demande en référé et a réservé les dépens. Les requérants ont introduit un pourvoi contre cette ordonnance devant la Cour, enregistré sous le numéro C‑646/19 P(R).

40      Par ordonnance du 20 décembre 2019, Puigdemont i Casamajó et Comín i Oliveres/Parlement [C‑646/19 P(R), non publiée, EU:C:2019:1149], la vice-présidente de la Cour a annulé l’ordonnance du 1er juillet 2019, Puigdemont i Casamajó et Comín i Oliveres/Parlement (T‑388/19 R, non publiée, EU:T:2019:467), renvoyé l’affaire devant le Tribunal et réservé les dépens.

41      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 10 septembre 2019, le Royaume d’Espagne a demandé à intervenir dans la présente affaire.

42      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 19 septembre 2019 au titre de l’article 130 du règlement de procédure du Tribunal, le Parlement a introduit, d’une part, une demande de non-lieu à statuer pour une partie du recours et, d’autre part, une exception d’irrecevabilité pour le surplus du recours, sur lesquelles les requérants ont présenté leurs observations le 4 novembre 2019.

43      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 20 janvier 2020, le Parlement a demandé au Tribunal de prononcer un non-lieu à statuer sur l’intégralité du recours. Les requérants ont présenté leurs observations sur cette demande le 7 février 2020.

44      Par ordonnance du 19 mars 2020, Puigdemont i Casamajó et Comín i Oliveres/Parlement (T‑388/19 R‑RENV, non publiée, EU:T:2020:114), le président du Tribunal, statuant sur renvoi après l’ordonnance du 20 décembre 2019, Puigdemont i Casamajó et Comín i Oliveres/Parlement [C‑646/19 P(R), non publiée, EU:C:2019:1149], mentionnée au point 40 ci-dessus, a jugé que, eu égard à la prise d’acte du 13 janvier 2020, il n’y avait plus lieu de statuer sur la demande en référé et a réservé les dépens.

45      Par ordonnance du 29 juillet 2020, le Tribunal (sixième chambre) a décidé de joindre au fond l’exception d’irrecevabilité ainsi que les demandes de non-lieu à statuer des 19 septembre 2019 et 20 janvier 2020.

46      Par décision du 11 septembre 2020, la présidente de la sixième chambre du Tribunal a admis le Royaume d’Espagne à intervenir au soutien des conclusions du Parlement.

47      Le Parlement a déposé le mémoire en défense au greffe du Tribunal le 11 septembre 2020.

48      Le Royaume d’Espagne a déposé le mémoire en intervention au greffe du Tribunal le 8 janvier 2021.

49      Les requérants ont déposé la réplique au greffe du Tribunal le 11 janvier 2021.

50      Le Parlement a déposé ses observations sur le mémoire en intervention du Royaume d’Espagne au greffe du Tribunal le 4 mars 2021.

51      Les requérants ont déposé leurs observations sur le mémoire en intervention du Royaume d’Espagne au greffe du Tribunal le 11 mars 2021.

52      Le Parlement a déposé la duplique au greffe du Tribunal le 11 mars 2021.

53      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (sixième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, a posé aux parties des questions écrites, auxquelles celles-ci ont répondu dans les délais impartis.

54      Sur proposition de la sixième chambre, le Tribunal a décidé, en application de l’article 28 du règlement de procédure, de renvoyer l’affaire devant une formation de jugement élargie.

55      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 21 janvier 2022. À cette occasion, le Parlement s’est désisté de ses demandes de non-lieu à statuer du 19 septembre 2019 et du 20 janvier 2020.

56      Les requérants concluent, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter l’exception d’irrecevabilité du 19 septembre 2019 ;

–        annuler l’instruction du 29 mai 2019 ;

–        annuler le refus de l’ancien président du Parlement de prendre acte des résultats des élections du 26 mai 2019 officiellement proclamés par le Royaume d’Espagne, contenu dans la lettre du 27 juin 2019 ;

–        annuler la déclaration de la vacance de leurs sièges effectuée par l’ancien président du Parlement dans la lettre du 27 juin 2019 ;

–        annuler le refus de l’ancien président du Parlement de leur reconnaître le droit de prendre leurs fonctions, d’exercer leur mandat et de siéger au Parlement dès l’ouverture de la première session suivant les élections du 26 mai 2019, contenu dans la lettre du 27 juin 2019 ;

–        annuler le refus de l’ancien président du Parlement de prendre d’urgence une initiative sur le fondement de l’article 8 du règlement intérieur visant à confirmer leurs privilèges et immunités, contenu dans la lettre du 27 juin 2019 ;

–        condamner le Parlement aux dépens.

57      Le Parlement, soutenu, en substance, par le Royaume d’Espagne, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, rejeter le recours comme irrecevable ;

–        à titre subsidiaire, rejeter le recours comme étant en partie irrecevable et en partie non fondé ;

–        à titre infiniment subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner les requérants aux dépens.

 En droit

58      À l’appui du recours, les requérants invoquent cinq moyens. Le premier moyen concerne l’instruction du 29 mai 2019 et est tiré de la violation de l’article 20, de l’article 21 et de l’article 39, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») et de l’article 3, paragraphe 2, du règlement intérieur. Le deuxième moyen concerne le refus de l’ancien président du Parlement de prendre acte des résultats des élections du 26 mai 2019 officiellement proclamés par le Royaume d’Espagne et est tiré, en substance, de la violation de l’article 39, paragraphe 2, de la Charte, de l’article 5, paragraphe 1, et de l’article 12 de l’acte électoral, de l’article 2, de l’article 10, paragraphes 2 et 4, et de l’article 14, paragraphe 3, TUE et de l’article 3, paragraphe 1, du règlement intérieur. Le troisième moyen concerne la prétendue déclaration de vacance des sièges des requérants par l’ancien président du Parlement et est tiré, en substance, de la violation de l’article 6, paragraphe 2, de l’article 8 et de l’article 13 de l’acte électoral, lus conjointement avec l’article 39, paragraphe 2, de la Charte et avec l’article 10, paragraphes 2 et 3, TUE. Le quatrième moyen concerne le refus de l’ancien président du Parlement de reconnaître aux requérants le droit de prendre leurs fonctions, d’exercer leur mandat et de siéger au Parlement dès l’ouverture de la première session suivant les élections européennes du 26 mai 2019 et est tiré de la violation de l’article 5, paragraphe 1, et de l’article 12 de l’acte électoral, lu conjointement avec l’article 39, paragraphe 2, de la Charte et avec l’article 10, paragraphes 1 et 2, et l’article 14, paragraphes 2 et 3, TUE, ainsi que de l’article 3, paragraphe 2, du règlement intérieur. Enfin, le cinquième moyen concerne le refus de l’ancien président du Parlement de confirmer les privilèges et immunités des requérants sur le fondement de l’article 8 du règlement intérieur et est tiré de la violation de l’article 5, paragraphe 2, dudit règlement, de l’article 39, paragraphe 2, de la Charte, de l’obligation de motivation et du principe de bonne administration.

59      Le Parlement, soutenu par le Royaume d’Espagne invoque, à titre principal, l’irrecevabilité du recours, aux motifs, d’une part, du manque de clarté de la requête quant à certains actes dont l’annulation est sollicitée et, d’autre part, de l’absence d’actes attaquables.

60      Les requérants concluent au rejet de l’exception d’irrecevabilité. D’une part, ils soutiennent que les actes dont ils demandent l’annulation sont clairement identifiés dans la requête. D’autre part, le recours serait dirigé contre des actes susceptibles de faire l’objet d’un recours sur le fondement de l’article 263 TFUE.

61      Il y a lieu, dès lors, d’examiner la recevabilité du recours introduit par les requérants.

 Observations liminaires sur l’objet du litige

62      En premier lieu, il convient de relever que, en réponse à des questions du Tribunal posées lors de l’audience, d’une part, les requérants ont confirmé que leur recours était toujours dirigé contre l’instruction du 29 mai 2019 (voir point 56, deuxième tiret, ci-dessus).

63      D’autre part, les requérants ont indiqué que, tout en maintenant les chefs de conclusions mentionnés au point 56 ci-dessus, ce qu’ils contestaient c’était, en substance, le refus de l’ancien président du Parlement de leur reconnaître la qualité de député européen à compter de la proclamation du 13 juin 2019, contenu dans la lettre du 27 juin 2019.

64      À cet égard, les requérants ont précisé que le refus susmentionné avait produit plusieurs conséquences juridiques, dont le refus de l’ancien président du Parlement de leur reconnaître le droit de prendre leurs fonctions, d’exercer leur mandat et de siéger au Parlement ainsi que le refus de ce même président d’adopter d’urgence une initiative sur le fondement de l’article 8 du règlement intérieur visant à confirmer leurs privilèges et immunités.

65      Enfin, les requérants ont confirmé que, dans l’hypothèse où, contrairement à ce qu’ils prétendent, le Tribunal parviendrait à la conclusion que la légalité du refus de l’ancien président du Parlement de leur reconnaître la qualité de député européen ne pouvait pas être remise en question, il n’y aurait pas lieu d’examiner séparément la légalité des actes mentionnés au point 56 ci-dessus.

66      Compte tenu des explications des requérants rappelées aux points 63 à 65 ci-dessus, il y a lieu de considérer, en substance, qu’ils ne demandent pas l’annulation des actes visés au point 56 troisième, quatrième, cinquième et sixième tirets ci-dessus, mais uniquement l’annulation du refus de l’ancien président du Parlement de leur reconnaître la qualité de député européen, dont les actes susmentionnés seraient des conséquences.

67      En second lieu, dans la duplique, le Parlement a invoqué l’irrecevabilité du chef de conclusions que les requérants auraient invoqué pour la première fois dans la réplique, visant à l’annulation, d’une part, du prétendu refus de l’ancien président du Parlement de défendre leurs privilèges et immunités sur le fondement des articles 7 et 9 du règlement intérieur et, d’autre part, de la prétendue décision de ce président ne pas communiquer à la commission compétente du Parlement leur prétendue demande de défense des privilèges et immunités.

68      Dans leur réponse à une question écrite du Tribunal (voir point 53 ci-dessus), les requérants ont indiqué qu’ils ne sollicitaient pas l’annulation d’une éventuelle décision du Parlement refusant de défendre leurs privilèges et immunités sur le fondement des articles 7 et 9 du règlement intérieur, une telle décision n’ayant, au demeurant, jamais été adoptée. En effet, ils se seraient limités à contester le fait que l’ancien président du Parlement n’avait pas communiqué leur demande de défense des privilèges et immunités en séance plénière et ne l’avait pas renvoyée à la commission compétente, en violation de l’article 9, paragraphe 1, du règlement intérieur. En substance, les requérants ont précisé qu’il s’agissait là encore d’une conséquence juridique découlant du refus de l’ancien président du Parlement de leur reconnaître la qualité de député européen.

69      Il s’ensuit que, dans la réplique, les requérants n’ont demandé ni l’annulation d’un éventuel refus de l’ancien président du Parlement de défendre leurs privilèges et immunités sur le fondement des articles 7 et 9 du règlement intérieur, ni celle de l’éventuelle décision de ce président de ne pas communiquer, en séance plénière, leur prétendue demande de défense des privilèges et immunités et de ne pas la renvoyer à la commission compétente du Parlement.

70      Compte tenu de tout ce qui précède, il y a lieu de considérer que le présent recours tend, en substance, à l’annulation, d’une part, de l’instruction du 29 mai 2019 et, d’autre part, du refus de l’ancien président du Parlement de reconnaître aux requérants la qualité de député européen, contenu dans la lettre du 27 juin 2019 (ci-après, dénommés ensemble, les « actes attaqués »).

 Sur la nature des actes attaqués

71      Dans l’exception d’irrecevabilité, premièrement, le Parlement fait valoir que la lettre du 27 juin 2019 est un acte à caractère purement informatif qui se limite à rappeler aux requérants que, conformément au cadre juridique applicable, ils ne pouvaient pas être assimilés à des députés européens entrants au titre de la neuvième législature. Deuxièmement, le Parlement prétend que l’instruction du 29 mai 2019 ne produit pas des effets juridiques à l’égard des tiers, au sens de l’article 263, premier alinéa, TFUE, et invite le Tribunal à se saisir d’office de la question de savoir si celle-ci est un acte attaquable.

72      Les requérants concluent au rejet des arguments du Parlement. Premièrement, ils soutiennent, en substance, que le refus de l’ancien président du Parlement de leur reconnaître la qualité de député européen, contenu dans la lettre du 27 juin 2019, n’a pas un caractère informatif. En effet, ce refus aurait entraîné un changement dans leur situation juridique, car il les aurait empêchés, notamment, de prendre leurs fonctions, d’exercer leur mandat et de siéger au Parlement. Partant, il constituerait un acte faisant grief au sens de l’article 263, premier alinéa, TFUE. Deuxièmement, les requérants font valoir que l’instruction du 29 mai 2019 est un acte attaquable, car elle les aurait empêchés d’effectuer les démarches nécessaires à leur prise de fonctions.

73      Le Royaume d’Espagne considère, en substance, que le recours est irrecevable, au motif que les prétendus effets négatifs des actes attaqués, allégués par les requérants, ne découlent pas de ces actes, mais des décisions des autorités espagnoles.

74      Selon une jurisprudence constante, sont considérés comme des actes attaquables au sens de l’article 263 TFUE tous les actes pris par les institutions, quelles qu’en soient la nature ou la forme, qui visent à produire des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la partie requérante, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de cette dernière (arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 9, et du 26 janvier 2010, Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑362/08 P, EU:C:2010:40, point 51 ; voir, également, arrêt du 25 octobre 2017, Roumanie/Commission, C‑599/15 P, EU:C:2017:801, point 47 et jurisprudence citée).

75      En revanche, échappe au contrôle juridictionnel prévu à l’article 263 TFUE tout acte ne produisant pas d’effets juridiques obligatoires, tels que les actes préparatoires, les actes confirmatifs et les actes de pure exécution, les simples recommandations et avis ainsi que, en principe, les instructions internes [voir arrêt du 12 septembre 2006, Reynolds Tobacco e.a./Commission, C‑131/03 P, EU:C:2006:541, point 55 et jurisprudence citée, et ordonnance du 14 mai 2012, Sepracor Pharmaceuticals (Ireland)/Commission, C‑477/11 P, non publiée, EU:C:2012:292, point 52 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 23 novembre 1995, Nutral/Commission, C‑476/93 P, EU:C:1995:401, point 30]. En outre, des actes à caractère purement informatif ne sauraient ni affecter les intérêts du destinataire ni modifier la situation juridique de celui-ci par rapport à la situation antérieure à la réception desdits actes (voir arrêt du 11 décembre 2012, Sina Bank/Conseil, T‑15/11, EU:T:2012:661, point 30 et jurisprudence citée).

76      Au vu de la jurisprudence, l’aptitude d’un acte à produire des effets de droit et, partant, à faire l’objet d’un recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE implique d’examiner sa substance et d’apprécier lesdits effets à l’aune de critères objectifs, tels que le contenu de ce même acte, en tenant compte, le cas échéant, du contexte de l’adoption de ce dernier ainsi que des pouvoirs de l’institution de l’Union qui en est l’auteur (voir arrêt du 20 février 2018, Belgique/Commission, C‑16/16 P, EU:C:2018:79, point 32 et jurisprudence citée).

77      Enfin, il convient de rappeler que la condition tenant à l’existence d’un acte attaquable relève des fins de non-recevoir d’ordre public que le Tribunal peut soulever, le cas échéant, d’office (voir, en ce sens, ordonnances du 14 janvier 1992, ISAE/VP et Interdata/Commission, C‑130/91, EU:C:1992:7, point 11, et du 19 octobre 2016, E-Control/ACER, T‑671/15, non publiée, EU:T:2016:626, point 91 ; conclusions de M. l’avocat général Bot dans l’affaire Commission/Irlande e.a., C‑89/08 P, EU:C:2009:298, point 62, et dans l’affaire BSH/OHMI, C‑43/15 P, EU:C:2016:129, point 52).

78      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si le refus de l’ancien président du Parlement de reconnaître aux requérants la qualité de député européen, d’une part, et l’instruction du 29 mai 2019, d’autre part, sont des actes attaquables au sens de l’article 263 TFUE.

 Sur le refus de l’ancien président du Parlement de reconnaître aux requérants la qualité de député européen

79      Les requérants soutiennent, en substance, que le refus de l’ancien président du Parlement de leur reconnaître la qualité de député européen a eu plusieurs effets juridiques, tels que, premièrement, l’impossibilité de prendre leurs fonctions, d’exercer leur mandat et de siéger au Parlement à compter de l’ouverture de la première session après les élections du 26 mai 2019, deuxièmement, la déclaration de vacance de leurs sièges effectuée par l’ancien président du Parlement, troisièmement, le refus de ce dernier de prendre d’urgence une initiative sur le fondement de l’article 8 du règlement intérieur visant à confirmer leurs privilèges et immunités et, quatrièmement, l’absence de communication en séance plénière de leur demande de défense des privilèges et immunités, fondée sur l’article 9 du règlement intérieur, et de renvoi de celle-ci à la commission compétente du Parlement.

80      Le Parlement, soutenu par le Royaume d’Espagne, fait valoir que, même à supposer établie l’existence des effets allégués par les requérants, ceux-ci ne découlent pas du refus de l’ancien président du Parlement de leur reconnaître la qualité de député européen.

–       Sur le contenu de la lettre du 27 juin 2019

81      Dans la lettre du 27 juin 2019, tout d’abord, l’ancien président du Parlement a indiqué aux requérants que, les 17 et 20 juin 2019, les autorités espagnoles l’avaient informé des résultats officiels des élections européennes qui s’étaient tenues en Espagne. Ensuite, il a rappelé aux requérants que, en application de l’article 12 de l’acte électoral, « le Parlement pren[ait] acte des résultats proclamés officiellement par les États membres et qu’il rev[enai]t, en premier, aux juridictions nationales de statuer sur la légalité des dispositions et des procédures électorales nationales ». Enfin, l’ancien président du Parlement a relevé que les noms des requérants n’apparaissaient pas sur la liste des candidats élus communiquée officiellement au Parlement par les autorités espagnoles et que, « jusqu’à [réception d’] une nouvelle communication des autorités espagnoles, [il n’était] actuellement pas en mesure de [les] traiter en tant que futurs membres du [Parlement] ainsi [qu’ils l’avaient] demandé dans leur lettre du 14 juin 2019 ».

82      Il ressort ainsi des termes de la lettre du 27 juin 2019 que l’ancien président du Parlement n’a fait que prendre acte de la situation juridique des requérants dont il avait été informé officiellement par les autorités espagnoles par le biais des communications des 17 et 20 juin 2019.

83      En outre, il ressort expressément des termes de la lettre du 27 juin 2019 que la position exprimée par l’ancien président du Parlement aurait pu évoluer en fonction de nouvelles informations reçues de la part des autorités espagnoles.

84      Dès lors, eu égard à son contenu, la lettre du 27 juin 2019 excluait expressément tout caractère décisionnel et définitif de la position de l’ancien président du Parlement qui y était exprimée.

–       Sur les prétendus effets juridiques découlant de la lettre du 27 juin 2019

i)      Observations liminaires

85      En premier lieu, il convient de relever que, dans l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), la Cour a opéré une distinction entre la qualité de député européen et l’exercice du mandat y afférent.

86      Ainsi, après avoir relevé que, en application de l’article 5, paragraphes 1 et 2, de l’acte électoral, le mandat de député européen coïncidait avec la période quinquennale qui commençait à l’ouverture de la première session tenue après chaque élection, de telle sorte qu’il débutait et expirait en même temps que cette période quinquennale, la Cour a dit pour droit que, à la différence de la qualité de membre du Parlement, qualité qui, d’une part, était acquise au moment où une personne était officiellement proclamée élue, et, d’autre part, établissait un lien entre cette personne et l’institution dont elle faisait désormais partie, le mandat de membre du Parlement établissait un lien entre ladite personne et la législature pour laquelle celle-ci avait été élue. Or, cette législature ne se constituait qu’au moment de l’ouverture de la première session du « nouveau » Parlement tenue après l’élection, qui était, par hypothèse, postérieure à la proclamation officielle des résultats électoraux effectuée par les États membres (arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies, C‑502/19, EU:C:2019:1115, points 72 et 74).

87      En deuxième lieu, dans l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115, points 70, 71 et 81), la Cour a dit pour droit que les articles 8 et 12 de l’acte électoral devaient être compris en ce sens qu’une personne qui avait été officiellement proclamée élue au Parlement devait être regardée comme ayant acquis, de ce fait et à partir de ce moment, la qualité de membre de cette institution aux fins de l’article 9 du protocole no 7, ainsi que comme bénéficiant, à ce titre, de l’immunité prévue au deuxième alinéa de cet article.

88      À cet égard, la Cour a précisé que l’immunité prévue à l’article 9, deuxième alinéa, du protocole no 7 couvrait les membres du Parlement lorsqu’ils se rendaient au lieu de réunion de celui-ci ou en revenaient, et donc, notamment, lorsqu’ils se rendaient à la première réunion organisée à la suite de la proclamation officielle des résultats électoraux, en vue de permettre à la nouvelle législature de tenir sa session constitutive et de vérifier les pouvoirs de ses membres. Lesdits membres bénéficiaient ainsi de l’immunité en question avant que leur mandat ne débutât (arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies, C‑502/19, EU:C:2019:1115, point 80).

89      En troisième lieu, il ressort implicitement, mais nécessairement du point 89 de l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), que la proclamation officielle des résultats des élections du 26 mai 2019 qui se sont tenues en Espagne est la proclamation du 13 juin 2019.

90      Compte tenu de ce qui précède, en l’espèce, il y a lieu de considérer que les requérants, dont les noms figuraient dans la proclamation du 13 juin 2019, ont acquis la qualité de député européen à compter de cette date et bénéficiaient donc, de ce seul fait, de l’immunité visée à l’article 9, deuxième alinéa, du protocole no 7. Les parties s’accordent d’ailleurs désormais sur ce point.

91      En outre, il découle de la jurisprudence citée aux points 86 et 87 ci-dessus, que l’acquisition, par les requérants, de la qualité de député européen et, en conséquence, de l’immunité visée à l’article 9, deuxième alinéa, du protocole no 7 qui s’y rattache découle exclusivement de la proclamation du 13 juin 2019 et, partant, ne pouvait être remise en cause ni par l’ancien président du Parlement ni par le Parlement lui-même.

92      Ainsi, même si la lettre du 27 juin 2019 ne mentionnait pas la question de l’immunité des requérants, il doit être constaté que le refus de l’ancien président du Parlement de reconnaître aux requérants la qualité de député européen qu’il contient n’a, en tout état de cause, pas eu pour effet de les priver de l’immunité visée à l’article 9, deuxième alinéa, du protocole no 7, dont le respect s’imposait aux autorités nationales du simple fait de la proclamation officielle des résultats des élections européennes.

93      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si le refus de l’ancien président du Parlement de reconnaître aux requérants la qualité de député européen a été à l’origine des effets juridiques allégués par ces derniers, rappelés au point 79 ci-dessus.

ii)    Sur l’impossibilité pour les requérants de prendre leurs fonctions, d’exercer leur mandat et de siéger au Parlement

94      Le Parlement, soutenu par le Royaume d’Espagne, fait valoir, en substance, qu’il ne pouvait pas adopter des actes produisant des effets juridiques à l’égard des requérants, au motif que, en application de l’article 12 de l’acte électoral et conformément à la jurisprudence applicable, il était tenu par la liste des candidats élus qui lui avait été notifiée officiellement par les autorités espagnoles par la communication du 17 juin 2019. À cet égard, le Parlement indique que, compte tenu du partage de compétences consacré par l’acte électoral, il revient aux États membres de fixer les conditions d’exercice du mandat de député européen. Ainsi, en application des articles 8 et 12 de l’acte électoral, lus conjointement avec le principe de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE, le Parlement aurait été tenu de donner pleinement effet aux dispositions du droit électoral espagnol applicables, telles que reflétées dans les communications des 17 et 20 juin 2019. Par ailleurs, le Parlement prétend, en substance, qu’il résulte des dispositions susmentionnées et de l’article 3 du règlement intérieur que les notifications officielles qui lui sont adressées par les organes électoraux nationaux compétents sont les seules sources d’information faisant autorité en ce qui concerne la situation juridique des députés européens selon le droit national et qu’elles sont un outil indispensable au processus électoral. En conclusion, le Parlement estime que, eu égard à l’ensemble des informations transmises par la commission électorale centrale, il n’était pas en mesure, à la date du 27 juin 2019, de considérer que les requérants avaient « inconditionnellement [acquis le statut] de futurs membres du Parlement » et il n’était donc pas habilité à leur reconnaître, en substance, le droit de prendre leurs fonctions, d’exercer leur mandat et de siéger en son sein à compter du 2 juillet 2019.

95      Les requérants contestent ces arguments. Selon eux, la principale question qui se pose en l’espèce est celle de savoir si le Parlement était tenu par la proclamation du 13 juin 2019 ou par les communications des 17 et 20 juin 2019. À cet égard, les requérants font valoir qu’il découle de l’article 12 de l’acte électoral que la notion de « résultats proclamés officiellement » est un concept autonome du droit de l’Union. En l’espèce, ces résultats coïncideraient avec ceux proclamés conformément à l’article 224, paragraphe 1, de la loi électorale espagnole, ainsi que la Cour l’aurait jugé au point 89 de l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), c’est-à-dire les résultats figurant dans la proclamation du 13 juin 2019. Par ailleurs, les requérants prétendent, en substance, que le Royaume d’Espagne n’était pas compétent pour établir des conditions d’exercice du mandat de député européen, telles que la condition de prêter le serment de respecter la Constitution espagnole, prévue à l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale espagnole. Cette interprétation aurait été confirmée par l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), dans lequel la Cour aurait jugé que les « formalités nécessaires » pour pouvoir siéger en tant que membre au Parlement devaient être accomplies devant cette institution. Enfin, les requérants prétendent que le Parlement savait que les autorités espagnoles ne lui avaient pas communiqué les résultats complets des élections du 26 mai 2019, étant donné qu’ils lui avaient eux-mêmes envoyé une copie de ces résultats. Ainsi, l’absence de communication des résultats complets desdites élections par les autorités espagnoles n’aurait pas libéré le Parlement de son obligation de prendre acte de ces résultats.

96      En l’espèce, la question qui se pose est de savoir si l’ancien président du Parlement était compétent pour remettre en cause la communication du 17 juin 2019, par laquelle les autorités espagnoles lui ont officiellement communiqué la liste des candidats élus lors des élections du 26 mai 2019, laquelle ne mentionnait pas les noms des requérants, alors même que leurs noms figuraient dans la proclamation officielle du 13 juin 2019.

97      À titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément à l’article 5, paragraphe 1, et à l’article 13, paragraphe 2, TUE, le Parlement agit dans les limites des compétences qui lui sont conférées par les traités. En effet, les principes de l’équilibre institutionnel et de l’attribution des compétences, tels que consacrés à l’article 13, paragraphe 2, TUE, impliquent que chaque institution agisse dans les limites des attributions qui lui sont conférées dans les traités, conformément aux procédures, aux conditions et aux fins prévues par ceux-ci (arrêt du 3 décembre 2020, Changmao Biochemical Engineering/Distillerie Bonollo e.a., C‑461/18 P, EU:C:2020:979, point 102).

98      S’agissant de l’élection des députés européens, l’acte électoral institue un partage de compétence entre le Parlement et les États membres.

99      Ainsi, d’une part, en application de l’article 8, premier alinéa, de l’acte électoral, sous réserve des dispositions de cet acte, la procédure électorale est régie, dans chaque État membre, par les dispositions nationales.

100    D’autre part, aux termes de l’article 12 de l’acte électoral, le Parlement vérifie les pouvoirs de ses membres. À cet effet, il prend acte des résultats proclamés officiellement par les États membres et statue sur les contestations qui pourraient être éventuellement soulevées sur la base des dispositions dudit acte, à l’exclusion des dispositions nationales auxquelles celui-ci renvoie.

101    Il ressort de l’article 12, seconde phrase, de l’acte électoral, que le pouvoir de vérification du Parlement est soumis à deux restrictions importantes (arrêt du 30 avril 2009, Italie et Donnici/Parlement, C‑393/07 et C‑9/08, EU:C:2009:275, point 52).

102    Premièrement, selon l’article 12, première partie de la seconde phrase, de l’acte électoral, aux fins de la vérification des pouvoirs, le Parlement prend acte des résultats proclamés officiellement par les États membres (arrêt du 30 avril 2009, Italie et Donnici/Parlement, C‑393/07 et C‑9/08, EU:C:2009:275, point 53).

103    Selon la jurisprudence, l’utilisation de l’expression « prendre acte », visée à l’article 12 de l’acte électoral, doit être interprétée comme indiquant l’absence totale de marge d’appréciation du Parlement. En effet, ce sont les autorités nationales qui sont compétentes pour désigner les futurs membres du Parlement conformément à la procédure électorale, qui est régie, comme il ressort expressément de l’article 8 de l’acte électoral, par les dispositions nationales [voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2009, Italie et Donnici/Parlement, C‑393/07 et C‑9/08, EU:C:2009:275, points 55 et 56 et jurisprudence citée, et ordonnance du 8 octobre 2020, Junqueras i Vies/Parlement, C‑201/20 P(R), non publiée, EU:C:2020:818, point 66].

104    Ainsi, l’exercice consistant à « prendre acte des résultats proclamés officiellement » signifie que le Parlement est tenu de se fonder, aux fins des opérations de vérification des pouvoirs de ses membres, sur la proclamation officielle des résultats des élections, telle qu’elle résulte d’un processus décisionnel conforme aux procédures nationales, par lequel les questions juridiques liées à ladite proclamation ont été tranchées, qui constitue, dès lors, une situation juridique préexistante qui s’impose au Parlement (voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2009, Italie et Donnici/Parlement, C‑393/07 et C‑9/08, EU:C:2009:275, point 55).

105    Deuxièmement, conformément à l’article 12, seconde partie de la seconde phrase, de l’acte électoral, le Parlement statue sur les contestations qui pourraient être éventuellement soulevées sur la base des dispositions dudit acte, à l’exclusion des dispositions nationales auxquelles celui-ci renvoie (arrêt du 30 avril 2009, Italie et Donnici/Parlement, C‑393/07 et C‑9/08, EU:C:2009:275, point 53).

106    Dès lors, il résulte du texte même de l’article 12 de l’acte électoral que cet article ne confère pas au Parlement la compétence pour trancher des contestations soulevées sur la base du droit de l’Union dans son ensemble, mais uniquement celles soulevées sur la base des dispositions de l’acte électoral (arrêt du 30 avril 2009, Italie et Donnici/Parlement, C‑393/07 et C‑9/08, EU:C:2009:275, point 54). En outre, cet article exclut expressément la compétence du Parlement pour se prononcer sur les contestations trouvant leur origine dans le droit national, même lorsqu’un renvoi à ce droit est opéré par l’acte électoral.

107    Par ailleurs, il convient de noter, à l’instar du Parlement et de M. l’avocat général Szpunar dans ses conclusions dans l’affaire Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:958, point 53), que, après la proclamation officielle des résultats électoraux, plusieurs évènements peuvent conduire à ce qu’un candidat proclamé officiellement élu député européen à l’issue du dépouillement des votes ne prenne pas ses fonctions et n’exerce pas le mandat y afférent, tels que, par exemple, l’existence d’une incompatibilité avec le mandat de député européen ou la renonciation du député élu à prendre ses fonctions. En outre, il y a lieu de relever, ainsi que l’a fait M. l’avocat général Szpunar dans l’affaire Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:958, point 48), que différents systèmes parlementaires prévoient des obligations formelles à remplir par les candidats élus avant la prise effective de leurs fonctions.

108    Tel est le cas du droit espagnol, puisque l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale espagnole établit que, dans un délai de cinq jours à compter de leur proclamation, les candidats élus doivent prêter le serment de respecter la Constitution espagnole devant la commission électorale centrale, à défaut de quoi leurs sièges au Parlement sont déclarés « vacants » et les prérogatives qui pourraient leur revenir du fait de leurs fonctions sont suspendues jusqu’à ce que cette prestation de serment ait eu lieu (voir point 12 ci-dessus).

109    Compte tenu de ce qui précède, il ne saurait être exclu que le Parlement doive procéder à la vérification des pouvoirs sur la base de la liste des candidats proclamés officiellement élus telle qu’amendée à l’issue des contestations soulevées sur la base du droit national.

110    C’est ainsi que l’article 3 du règlement intérieur, régissant la procédure de vérification des pouvoirs, établit que cette procédure repose sur la communication officielle par les États membres de la liste des résultats électoraux.

111    Tout d’abord, aux termes de l’article 3, paragraphe 1, du règlement intérieur, à l’issue des élections générales au Parlement, le président invite les autorités compétentes des États membres à communiquer sans retard au Parlement les noms des députés élus, afin que l’ensemble de ceux-ci puissent siéger au Parlement dès l’ouverture de la première séance suivant les élections.

112    Ensuite, en application de l’article 3, paragraphe 2, du règlement intérieur, ce sont les députés européens dont les noms figurent sur cette liste qui doivent effectuer la déclaration de non-incompatibilité et qui peuvent siéger au Parlement et dans ses organes en pleine jouissance de leurs droits aussi longtemps que leurs pouvoirs n’ont été vérifiés ou qu’il n’a pas été statué sur une contestation éventuelle relevant de la compétence du Parlement.

113    Enfin, il découle de l’article 3, paragraphe 3, du règlement intérieur que le Parlement procède à la vérification des pouvoirs de ses membres nouvellement élus, sur la base d’un rapport de la commission compétente, lequel est, conformément à l’article 3, paragraphe 3, deuxième alinéa, de ce règlement, fondé sur la communication officielle, par chaque État membre, de l’ensemble des résultats électoraux, précisant le nom des candidats élus ainsi que celui des suppléants éventuels, avec leur ordre de classement tel qu’il résulte du vote.

114    Il s’ensuit que, aux fins de procéder à la vérification des pouvoirs de ses membres, le Parlement doit se fonder sur la liste des candidats élus communiquée officiellement par les autorités nationales, laquelle, par hypothèse, est établie au vu des résultats proclamés officiellement et après que d’éventuelles contestations fondées sur l’application du droit national ont été réglées par ces autorités.

115    C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner les arguments des requérants.

116    En premier lieu, les requérants font valoir, en substance, que le Parlement n’était tenu ni par la communication du 17 juin 2019 ni par celle du 20 juin 2019, ce qu’il aurait lui-même reconnu, car, après la prise d’acte du 13 janvier 2020, il les a autorisés à prendre leurs fonctions, à exercer leur mandat et à siéger au Parlement. Au demeurant, les requérants observent que le Parlement savait que les autorités espagnoles ne lui avaient pas communiqué les résultats complets des élections du 26 mai 2019, étant donné qu’ils lui avaient eux-mêmes envoyé une copie de ces résultats. Ainsi, les requérants prétendent, en substance, que le Parlement aurait été obligé, conformément à l’article 3, paragraphe 1, du règlement intérieur, de solliciter des autorités espagnoles qu’elles lui envoient les résultats complets des élections du 26 mai 2019. Enfin, en s’appuyant sur les conclusions de M. l’avocat général Szpunar dans l’affaire Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:958, point 51), les requérants soutiennent que le fait que les autorités espagnoles n’aient jamais notifié les résultats des élections tels qu’issus de la proclamation du 13 juin 2019 au Parlement ne libérait pas ce dernier de son obligation d’en prendre acte en application de l’article 12 de l’acte électoral.

117    En l’espèce, d’une part, il est constant entre les parties que les requérants n’ont pas accompli l’exigence prévue à l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale espagnole et que c’est pour cette raison que leurs noms n’ont pas été inclus dans la communication du 17 juin 2019, par laquelle les autorités espagnoles ont officiellement communiqué au Parlement la liste des candidats élus lors des élections du 26 mai 2019.

118    D’autre part, l’ancien président du Parlement n’était pas compétent pour contrôler le bien-fondé de l’exclusion de certains candidats élus de la liste susmentionnée, communiquée officiellement par les autorités espagnoles en application de l’article 3, paragraphe 1, du règlement intérieur, celle-ci reflétant les résultats officiels des élections du 26 mai 2019, tels qu’ établis, le cas échéant, après résolution des éventuelles contestations soulevées sur la base du droit national (voir points 97 à 106 ci-dessus).

119    Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l’ancien président du Parlement aurait dû, conformément à l’article 3, paragraphe 1, du règlement intérieur, solliciter des autorités espagnoles qu’elles lui communiquent les résultats complets des élections du 26 mai 2019 qui figuraient dans la proclamation du 13 juin 2019.

120    Par ailleurs, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence rappelée au point 76 ci-dessus, l’aptitude d’un acte à produire des effets de droit et, partant, à faire l’objet d’un recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE implique d’examiner sa substance et d’apprécier lesdits effets à l’aune de critères objectifs, tels que le contenu de ce même acte, en tenant compte, le cas échéant, du contexte de l’adoption de ce dernier ainsi que des pouvoirs de l’institution de l’Union qui en est l’auteur.

121    Ainsi, le fait que, eu égard à l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), et après la prise d’acte du 13 janvier 2020, le Parlement ait autorisé les requérants à siéger au Parlement et à bénéficier pleinement des droits qui se rattachaient au statut de député européen en l’absence de communication officielle de l’État membre n’est pas de nature à remettre en cause les considérations aux points 82 à 84 et 100 à 114 ci-dessus.

122    Au demeurant, lors de l’audience, le Parlement a expliqué que, eu égard à l’incertitude juridique du statut des requérants après l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), et l’ordonnance du 20 décembre 2019, Puigdemont i Casamajó et Comín i Oliveres/Parlement [C‑646/19 P(R), non publiée, EU:C:2019:1149], il a décidé d’autoriser les requérants à prendre leurs fonctions et à siéger en son sein, sur le fondement de l’article 3, paragraphe 2, du règlement intérieur, sans pour autant procéder à la vérification de leurs pouvoirs, car celle-ci nécessitait, au préalable, la notification officielle de leur élection par les autorités nationales.

123    Dès lors, l’argumentation des requérants rappelée au point 116 ci-dessus doit être rejetée.

124    Enfin, s’agissant du renvoi effectué par les requérants aux conclusions de M. l’avocat général Szpunar dans l’affaire Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:958), il convient de rappeler que la question qui se posait dans ladite affaire était celle de savoir, en substance, si une personne officiellement proclamée élue bénéficiait de l’immunité prévue à l’article 9, deuxième alinéa, du protocole no 7, aux fins de pouvoir accomplir les formalités et les exigences nécessaires à son entrée en fonction.

125    Au point 50 des conclusions de M. l’avocat général Szpunar dans l’affaire Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:958), l’avocat général a admis que l’exigence prévue à l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale espagnole pouvait conditionner la prise effective de fonctions par les candidats élus députés européens. En revanche, selon M. l’avocat général Szpunar, cette exigence ne pouvait pas conditionner l’acquisition de la qualité de député européen et des prérogatives découlant de cette qualité, dont l’immunité, sous peine d’empêcher une personne régulièrement élue en tant que député européen d’accomplir les formalités et les exigences nécessaires à son entrée en fonction.

126    C’est dans ce contexte qu’il faut lire le point 51 des conclusions de M. l’avocat général Szpunar dans l’affaire Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:958), selon lequel, bien qu’il soit logique que le Parlement soit informé du résultat des élections par la communication officielle des États membres visée à l’article 3, paragraphe 1, du règlement intérieur, cette communication n’est pas constitutive, en substance, de l’acquisition de la qualité de député européen.

127    Ainsi, l’opinion de M. l’avocat général Szpunar exprimée au point 51 de ses conclusions dans l’affaire Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:958) ne peut pas venir au soutien de l’argumentation des requérants selon laquelle, aux fins de la vérification des pouvoirs, le Parlement aurait eu l’obligation de prendre acte des résultats des élections du 26 mai 2019 figurant dans la proclamation du 13 juin 2019, au lieu de ceux communiqués officiellement par les autorités espagnoles le 17 juin 2019.

128    En deuxième lieu, les requérants font valoir que les autorités espagnoles n’étaient pas compétentes pour établir l’exigence visée à l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale espagnole. En effet, la condition de prêter le serment de respecter la Constitution espagnole ne relèverait pas de la « procédure électorale » des États membres au sens de l’article 8 de l’acte électoral et, partant, ne serait pas couverte par le renvoi à la législation nationale opéré par cet article. Les requérants ajoutent que, en vertu de l’article 223, paragraphe 2, TFUE, il appartient au Parlement de fixer le statut et les conditions générales d’exercice des fonctions de ses membres, cette compétence n’ayant pas été déléguée aux États membres. Ainsi, lorsqu’un député européen acquiert ce statut à la suite de la proclamation des résultats des élections européennes, toutes les formalités subséquentes relèveraient de la compétence prévue à l’article susmentionné.

129    Il ressort des points 97 à 109 ci-dessus que le Parlement n’est pas compétent pour statuer sur les contestations qui trouvent leur origine dans des dispositions du droit national pour lesquelles l’acte électoral n’a opéré aucun renvoi, telles que l’exigence prévue à l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale espagnole.

130    Il s’ensuit que, à supposer même que le Royaume d’Espagne ne fût pas compétent pour instituer en son droit national l’exigence susmentionnée, l’ancien président du Parlement ne disposait d’aucun pouvoir pour relever cette incompétence et, a fortiori, pour remettre en cause la légalité de la liste des candidats élus communiquée officiellement par les autorités espagnoles le 17 juin 2019.

131    Au surplus, il y a lieu de rappeler que le Tribunal n’est pas non plus compétent pour apprécier, d’une part, si le Royaume d’Espagne était compétent, au regard de l’article 223, paragraphe 2, TFUE et de l’article 8 de l’acte électoral, pour instituer l’exigence prévue à l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale espagnole et, d’autre part, si cette exigence est conforme au droit de l’Union, ces questions relevant de la compétence des juridictions nationales et, le cas échéant, de la Cour dans l’hypothèse où elle serait saisie d’un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE ou d’une question préjudicielle en interprétation sur le fondement de l’article 267 TFUE [voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2009, Italie et Donnici/Parlement, C‑393/07 et C‑9/08, EU:C:2009:275, point 65, et ordonnance du 8 octobre 2020, Junqueras i Vies/Parlement, C‑201/20 P(R), non publiée, EU:C:2020:818, point 60].

132    À titre surabondant, aux termes de l’article 223, paragraphe 2, TFUE, le Parlement, statuant, par voie de règlements, de sa propre initiative et conformément à une procédure législative spéciale, fixe le statut et les conditions générales d’exercice des fonctions de ses membres, après avis de la Commission européenne et avec l’approbation du Conseil de l’Union européenne.

133    Or, « les conditions générales d’exercice des fonctions des membres du Parlement » font l’objet du titre I de la décision 2005/684/CE, EURATOM du Parlement européen, du 28 septembre 2005, portant adoption du statut des députés au Parlement européen (JO 2005, L 262, p. 1), intitulé « Dispositions et conditions générales régissant l’exercice des fonctions des députés au Parlement européen », et concernent, en substance, les modalités d’exercice de la fonction de député européen et non les formalités préalables à l’entrée en fonction.

134    Partant, l’article 223, paragraphe 2, TFUE confère au Parlement une compétence exclusive pour établir le statut des députés européens et, dans ce cadre, les conditions « générales » d’exercice du mandat de député européen. Par contre, il ne ressort pas expressément dudit article que le Parlement disposerait également d’une telle compétence exclusive pour établir les conditions ou les exigences préalables à l’entrée en fonction des députés européens.

135    Dès lors, l’argument des requérants, tiré de l’incompétence du Royaume d’Espagne pour édicter l’exigence prévue à l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale espagnole, qui conditionne l’exercice du mandat de député européen, doit être rejeté comme inopérant.

136    En troisième lieu, eu égard aux considérations qui précèdent, il y a également lieu de rejeter comme inopérante l’allégation des requérants selon laquelle, au point 74 de l’ordonnance du 20 décembre 2019, Puigdemont i Casamajó et Comín i Oliveres/Parlement [C‑646/19 P(R), non publiée, EU:C:2019:1149], la vice-présidente de la Cour aurait jugé que l’accomplissement de toute formalité subséquente au résultat du dépouillement des votes exprimés par les électeurs ne faisait pas partie de la procédure électorale.

137    À cet égard, il convient de rappeler que, au point 74 de l’ordonnance du 20 décembre 2019, Puigdemont i Casamajó et Comín i Oliveres/Parlement [C‑646/19 P(R), non publiée, EU:C:2019:1149], la vice-présidente de la Cour a considéré que, compte tenu du fait que, conformément à l’article 14, paragraphe 3, TUE, à l’article 223, paragraphe 1, TFUE, à l’article 39 de la Charte ainsi qu’à l’article 1er de l’acte électoral, l’élection des membres du Parlement est régie par le principe du suffrage universel, direct, libre et secret, il ne pouvait, à première vue, être exclu que l’acte mettant fin à la procédure électorale des membres du Parlement fût celui contenant les résultats du dépouillement des votes exprimés par les électeurs, de telle sorte que l’accomplissement de toute formalité subséquente imposée par le droit national ne fît pas partie de cette procédure électorale.

138    Or, d’une part, force est de constater que l’appréciation susmentionnée a été effectuée avant dire droit, dans le cadre du pourvoi contre l’ordonnance du 1er juillet 2019, Puigdemont i Casamajó et Comín i Oliveres/Parlement (T‑388/19 R, non publiée, EU:T:2019:467). Ainsi, il ne saurait être considéré que la vice-présidente de la Cour ait adopté une position définitive sur cette question.

139    D’autre part, à supposer même que le Royaume d’Espagne ne fût pas compétent pour imposer une telle formalité, un constat dans ce sens effectué par la vice-présidente de la Cour ne saurait, en tout état de cause, fonder la compétence du Parlement pour refuser de prendre acte de la liste des candidats élus communiquée officiellement par les autorités espagnoles pour les motifs exposés aux points 97 à 114 et 117 à 119 ci-dessus.

140    Dès lors, l’allégation des requérants doit être rejetée.

141    En quatrième lieu, les requérants prétendent qu’il ressort de l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), que les « formalités nécessaires » pour pouvoir siéger au Parlement en tant que député européen doivent être accomplies exclusivement devant cette institution.

142    Toutefois, l’allégation susmentionnée ne trouve pas de confirmation dans l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115).

143    Il convient de rappeler que, dans le cadre de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), la Cour était exclusivement saisie de la question de savoir si l’article 9 du protocole no 7 devait être interprété en ce sens qu’une personne qui avait été officiellement proclamée élue au Parlement alors qu’elle faisait l’objet d’une mesure de placement en détention provisoire dans le cadre d’une procédure pour infractions pénales graves, mais qui n’avait pas été autorisée à se conformer à certaines exigences prévues par le droit interne à la suite d’une telle proclamation ainsi qu’à se rendre au Parlement, en vue de prendre part à la première session de celui-ci, devait être regardée comme bénéficiant d’une immunité en vertu de cet article. Dans l’affirmative, la juridiction de renvoi demandait, en outre, si cette immunité impliquait de lever la mesure de placement en détention provisoire imposée à la personne concernée, afin de lui permettre de se rendre au Parlement et d’y accomplir les formalités requises.

144    Au point 88 et au second tiret du dispositif de l’arrêt du 19 décembre 2019, Junqueras Vies (C‑502/19, EU:C:2019:1115), la Cour a répondu à la seconde question en indiquant que l’immunité prévue à l’article 9, deuxième alinéa, du protocole no 7 devait, sous réserve d’une demande de levée de cette immunité, permettre à la personne concernée de se rendre au Parlement et d’y d’accomplir les « formalités requises ». Dans ce contexte, la seule référence aux formalités à accomplir devant le Parlement ne saurait être interprétée comme signifiant que la Cour ait exclu que le droit national pût soumettre l’entrée en fonction d’un député européen à l’existence de certaines formalités.

145    Dès lors, l’argument des requérants doit être rejeté.

146    À la lumière de tout ce qui précède, il y a lieu de conclure que l’impossibilité pour les requérants de prendre leurs fonctions, d’exercer leur mandat et de siéger au Parlement ne découle pas du refus de l’ancien président du Parlement de leur reconnaître la qualité de député européen, contenu dans la lettre du 27 juin 2019, mais de l’application du droit espagnol, telle que reflétée dans les communications des 17 et 20 juin 2019, à l’égard desquelles l’ancien président du Parlement et, plus généralement, le Parlement ne disposait d’aucune marge d’appréciation.

147    Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le refus de l’ancien président du Parlement de leur reconnaître la qualité de député européen aurait eu pour effet juridique de les priver de la possibilité de prendre leurs fonctions, d’exercer leur mandat et de siéger au Parlement.

iii) Sur la prétendue déclaration de vacance des sièges des requérants

148    Les requérants soutiennent, en substance, que le refus de l’ancien président du Parlement de leur reconnaître la qualité de député européen, qui se fondait sur les communications des 17 et 20 juin 2019, a entraîné la déclaration de vacance de leurs sièges par ledit président, alors même que le motif qui justifiait cette vacance n’était pas l’un de ceux visés à l’article 13, paragraphe 1, de l’acte électoral.

149    À cet égard, il y suffit de constater, à l’instar du Parlement, que ni l’ancien président du Parlement ni le Parlement n’ont déclaré la vacance des sièges des requérants.

150    Dès lors, l’effet juridique allégué par les requérants, tiré de la déclaration de vacance de leurs sièges par le Parlement, est matériellement inexistant.

151    Au demeurant, aux termes de l’article 13, paragraphe 1, de l’acte électoral, un siège devient vacant quand le mandat d’un membre du Parlement expire en cas de démission, de décès ou de déchéance du mandat de celui-ci. Conformément à l’article 13, paragraphe 3, de l’acte électoral, les autorités nationales informent le Parlement de l’expiration du mandat d’un député européen en raison de sa déchéance, prévue expressément par le droit national.

152    En l’espèce, lors de l’audience, le Royaume d’Espagne a expliqué que, nonobstant la terminologie employée à l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale espagnole, en droit espagnol, l’absence de prestation de serment n’avait pas pour effet de rendre « vacants » les sièges des candidats élus, au sens de l’article 13 de l’acte électoral, mais uniquement de suspendre temporairement la possibilité de les occuper. Le Royaume d’Espagne a donc confirmé que ces sièges restaient « réservés » aux candidats élus, le cas échéant, pendant toute la durée de la législature du Parlement, jusqu’à ce qu’ils prêtent le serment de respecter la Constitution espagnole visé à l’article 224, paragraphe 2, de la loi électorale espagnole.

153    Dès lors, et en tout état de cause, l’impossibilité temporaire pour les requérants de prendre possession de leurs sièges au Parlement ne découle pas du refus de l’ancien président du Parlement de leur reconnaître la qualité de député européen, contenu dans la lettre du 27 juin 2019, mais de l’application du droit espagnol.

iv)    Sur l’absence d’adoption d’urgence d’une initiative visant à confirmer les privilèges et immunités des requérants

154    Les requérants prétendent, en substance, que le refus de l’ancien président du Parlement de reconnaître leur qualité de député européen, contenu dans la lettre du 27 juin 2019, a entraîné le rejet, par ce même président, de leur demande visant à ce qu’il prenne une initiative pour confirmer leurs privilèges et immunités sur le fondement de l’article 8 du règlement intérieur (voir points 64 et 79 ci-dessus).

155    Il ressort de la jurisprudence du Tribunal que le président du Parlement n’est nullement contraint de prendre une initiative visant à confirmer les privilèges et immunités d’un député européen et qu’il dispose d’un pouvoir discrétionnaire à cet égard, même lorsque ce député serait arrêté ou privé de sa liberté de déplacement en violation apparente de ses privilèges et de ses immunités (ordonnance du 20 janvier 2021, Junqueras i Vies/Parlement, T‑734/19, non publiée, EU:T:2021:15, point 44).

156    Ainsi, à supposer que l’ancien président du Parlement eût reconnu aux requérants la qualité de député européen, il aurait pu, en tout état de cause, refuser de prendre d’urgence une initiative sur le fondement de l’article 8 du règlement intérieur.

157    Dès lors, l’absence d’adoption d’une telle initiative ne saurait être considérée comme un effet juridique obligatoire découlant du refus de l’ancien président du Parlement de reconnaître aux requérants la qualité de député européen, mais est la conséquence du pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré, à cet égard, par l’article 8 du règlement intérieur.

158    Au surplus, à supposer même que le rejet de la demande des requérants fondée sur l’article 8 du règlement intérieur, visant à ce que l’ancien président du Parlement prenne une initiative pour confirmer leurs privilèges et immunités, soit la conséquence du refus de celui-ci de leur reconnaître la qualité de député européen, il ressort de la jurisprudence du Tribunal qu’un tel refus aurait été, en tout état de cause, dépourvu d’effets contraignants à l’égard des autorités espagnoles (voir, en ce sens, ordonnance du 20 janvier 2021, Junqueras i Vies/Parlement, T‑734/19, non publiée, EU:T:2021:15, points 62 et 65).

v)      Sur l’absence de communication en séance plénière de la prétendue demande de défense des privilèges et immunités des requérants et de transmission de celle-ci à la commission compétente du Parlement

159    Les requérants soutiennent que le fait que l’ancien président du Parlement n’ait pas communiqué leur demande de défense des privilèges et immunités en séance plénière et ne l’ait pas renvoyée à la commission compétente, en violation de l’article 9, paragraphe 1, du règlement intérieur, serait un effet juridique découlant de son refus de leur reconnaître la qualité de député européen (voir point 68 ci-dessus).

160    À cet égard, il convient de rappeler que, dans la réplique, les requérants ont fait valoir que, dans leur lettre du 20 juin 2019, ils avaient demandé à l’ancien président du Parlement, d’une part, de prendre d’urgence une initiative pour confirmer leurs privilèges et immunités sur le fondement de l’article 8 du règlement intérieur et, d’autre part, de défendre ces privilèges et immunités sur le fondement de l’article 9 dudit règlement. En outre, dans cette lettre, ils auraient mis l’accent sur l’article 8 du règlement intérieur, en substance, uniquement afin de souligner la situation d’urgence à laquelle ils étaient confrontés. Au surplus, ils soutiennent que les articles 8 et 9 du règlement intérieur n’instituent pas des procédures distinctes et, partant, qu’il n’y a pas lieu de différencier une demande visant à confirmer d’urgence les privilèges et immunités, au sens de l’article 8 de ce règlement, d’une demande de défense de ces privilèges et immunités, au sens de l’article 9 du même règlement.

161    Aux termes de l’article 9, paragraphe 1, du règlement intérieur, toute demande adressée au président du Parlement par un député ou par un ancien député en vue de défendre des privilèges et immunités, est communiquée en séance plénière et renvoyée à la commission compétente.

162    Il découle ainsi du libellé de cette disposition que son application est conditionnée à l’existence d’une demande de défense des privilèges et immunités adressée au président du Parlement par un député ou par un ancien député.

163    En l’espèce, d’une part, dans la lettre du 20 juin 2019, les requérants ont demandé à l’ancien « président du Parlement de prendre d’urgence, conformément à l’article 8, paragraphe 1, du [règlement intérieur et] après consultation du président de la commission des affaires juridiques, toutes les mesures nécessaires pour confirmer [leurs] privilèges et immunités ». Cette demande était surlignée en gras et ne visait pas les articles 7 et 9 du règlement intérieur. D’autre part, les requérants ont énuméré les mesures susmentionnées dont ils demandaient « en particulier » l’adoption, parmi lesquelles figurait la défense de leurs privilèges et immunités (voir point 25 ci-dessus).

164    Dès lors, il y a lieu de considérer que la demande de défense des privilèges et immunités susmentionnée n’a pas été formulée à titre distinct, mais s’inscrivait dans le cadre de celle visant à l’adoption d’urgence de mesures visant à confirmer les privilèges et immunités des requérants sur le fondement de l’article 8 du règlement intérieur, lequel était le seul article expressément visé dans la lettre du 20 juin 2019.

165    D’autre part, contrairement à ce que prétendent les requérants, il ressort de la jurisprudence qu’il y a lieu de distinguer une demande fondée sur l’article 8 du règlement intérieur d’une demande de défense des privilèges et immunités fondée sur les articles 7 et 9 de ce règlement (ordonnance du 20 janvier 2021, Junqueras i Vies/Parlement, T‑734/19, non publiée, EU:T:2021:15, points 42 à 46 et 57 et 61).

166    Ainsi, eu égard à l’inexistence matérielle d’une demande de défense des privilèges et immunités, dûment formée par les requérants sur le fondement des articles 7 et 9 du règlement intérieur, le refus de l’ancien président du Parlement de reconnaître aux requérants la qualité de député européen ne peut pas avoir eu pour conséquence l’absence de communication en séance plénière et de transmission à la commission compétente de ladite demande.

167    Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de considérer que le refus de l’ancien président du Parlement de reconnaître aux requérants la qualité de député européen n’est pas un acte produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts des requérants au sens de la jurisprudence citée au point 74 ci-dessus.

168    Dès lors, le recours en annulation contre ledit refus est irrecevable.

 Sur l’instruction du 29 mai 2019

169    Le Parlement fait valoir que l’instruction du 29 mai 2019 se limite à suspendre temporairement une pratique informelle, qui n’avait jamais été conçue comme un engagement juridique contraignant s’imposant au Parlement. Ainsi, cette instruction ne produirait pas des effets juridiques à l’égard des tiers, au sens de l’article 263, premier alinéa, TFUE.

170    Les requérants contestent cette fin de non-recevoir, au motif que, contrairement à ce que prétend le Parlement, la pratique en cause constituait une « étape essentielle » pour que les candidats élus puissent, en substance, prendre leurs fonctions et exercer leur mandat, conformément à l’article 3, paragraphe 2, du règlement intérieur.

171    À compter du jour des élections et jusqu’à la fin de la semaine de la première session après les élections au Parlement, l’institution a pour pratique de fournir, dans ses locaux, un service spécial d’accueil aux candidats nouvellement élus.

172    Ce service a pour objectif d’assister les candidats élus, avant le début de leur mandat, dans leur prise de contact initiale avec le Parlement et de faciliter au maximum leur entrée en fonction.

173    Lors de l’audience, le Parlement a expliqué que, dans le cadre du service spécial d’accueil, tout d’abord, les candidats élus obtiennent soit une accréditation temporaire, avec un badge temporaire leur permettant d’accéder aux locaux du Parlement, soit une accréditation définitive, avec un badge définitif, lorsque l’État membre dont ils sont ressortissants a déjà adressé au Parlement la communication officielle des résultats des élections européennes, visée à l’article 3 du règlement intérieur. Ensuite, les candidats élus ont accès à des stands thématiques qui leur fournissent des informations, notamment, sur les formalités administratives à accomplir et les questions financières. Enfin, le Parlement a indiqué que, pour effectuer les démarches administratives nécessaires à leur prise de fonction, il revenait aux candidats élus de prendre directement contact avec les services administratifs de l’institution.

174    En outre, le badge définitif octroyé aux candidats dont l’élection a été officiellement communiquée au Parlement ne deviendrait effectif qu’à compter de l’ouverture de la première session après les élections, laquelle marque le début de la nouvelle législature.

175    Enfin, le Parlement a indiqué que, en pratique, la procédure de vérification des pouvoirs, conduite par la commission des affaires juridiques du Parlement sur le fondement de l’article 3, paragraphe 3, du règlement intérieur, débutait également après l’ouverture de la première session suivant les élections. Au cours de cette période de vérification des pouvoirs, qui peut durer plusieurs mois, les candidats élus peuvent adresser toute information ou tout document utiles à ladite commission, dont la déclaration de non-incompatibilité.

176    À cet égard, en réponse à une question du Tribunal, le Parlement a en effet confirmé que, si l’article 3, paragraphe 2, du règlement intérieur prévoyait que la déclaration de non-incompatibilité devait être faite « dans la mesure du possible » six jours au plus tard avant l’ouverture de la première séance suivant les élections, il ne s’agissait aucunement d’une obligation.

177    En l’espèce, à l’issue des élections du 26 mai 2019, le Parlement a mis en place le service spécial d’accueil au sein du « welcome village » dans ses locaux à Bruxelles (Belgique) et à Strasbourg (France), lequel a pris fin le 4 juillet 2019.

178    Par l’instruction du 29 mai 2019, adoptée oralement par l’ancien président du Parlement, celui-ci a décidé, d’une part, de geler l’octroi des accréditations temporaires aux candidats élus en Espagne et de suspendre celles qui avaient déjà été octroyées à certains de ces candidats et, d’autre part, de leur refuser l’accès au « welcome village » jusqu’à ce que les autorités espagnoles aient officiellement communiqué le résultat des élections du 26 mai 2019. Ainsi que cela ressort d’un courriel de l’ancien président du Parlement du 30 mai 2019, produit par le Parlement en annexe à l’exception d’irrecevabilité du 19 septembre 2019, l’objectif de cette instruction était de ne pas interférer dans la procédure électorale nationale, eu égard au fait que les résultats des élections n’étaient pas encore définitifs et que le comptage des votes était toujours en cours.

179    En premier lieu, eu égard aux termes de l’instruction du 29 mai 2019, tels qu’explicités dans le courriel susmentionné, il y a lieu de considérer que l’ancien président du Parlement a adopté une mesure d’organisation interne qui n’avait vocation qu’à produire des effets provisoires, dans l’attente des résultats définitifs des élections conduites en Espagne et de la communication officielle desdits résultats au Parlement par les autorités espagnoles.

180    En deuxième lieu, contrairement à ce que prétendent les requérants, l’instruction du 29 mai 2019 n’a préjugé en aucune manière la possibilité, pour les candidats élus en Espagne, d’obtenir une accréditation et un badge définitifs aux fins de pouvoir siéger au Parlement dès l’ouverture de la première session après les élections européennes. En effet, il ressort des considérations exposées aux points 117, 118, 129 et 130 ci-dessus et des explications fournies par le Parlement lors de l’audience, rappelées aux points 173 à 175 ci-dessus, que l’accréditation et le badge définitifs ne peuvent être octroyés par le Parlement qu’après réception de la communication officielle des résultats des élections visée à l’article 3 du règlement intérieur.

181    En troisième lieu, à supposer même que, ainsi que le prétendent les requérants, ceux-ci n’aient pas pu effectuer les déclarations de non-incompatibilité et d’intérêts financiers, visées, respectivement, à l’article 3 du règlement intérieur et à l’article 4 de l’annexe I de ce règlement, car ils n’avaient pas eu accès au « welcome village », au sein duquel étaient distribués les formulaires nécessaires à cette fin, cette circonstance n’était, en tout état de cause, pas de nature à affecter leur faculté de siéger au Parlement dès l’ouverture de la première session après les élections européennes.

182    D’une part, il découle de l’article 3, paragraphes 1, 2 et 3, du règlement intérieur que, pendant la procédure de vérification des pouvoirs, ne peuvent siéger au Parlement que les candidats élus dont les noms figurent sur la liste portant résultats des élections, communiquée par les autorités nationales (voir points 109 à 114 ci-dessus). D’autre part, et en tout état de cause, en application de l’article 3, paragraphe 2, du règlement intérieur, la déclaration de non-incompatibilité peut être effectuée après l’ouverture de la première session après les élections européennes, ce que le Parlement a confirmé lors de l’audience (voir points 175 et 176 ci-dessus).

183    Au surplus, force est de constater que les requérants n’ont pas allégué que l’instruction du 29 mai 2019 avait interdit aux candidats élus en Espagne d’adresser au Parlement la déclaration de non-incompatibilité et la déclaration d’intérêts financiers. Au demeurant, cette instruction ne s’adressait pas aux candidats élus en Espagne, mais au secrétaire général de l’institution (voir point 18 ci-dessus).

184    Dès lors, contrairement à ce que prétendent les requérants, l’instruction du 29 mai 2019 n’a pas eu pour effet de les empêcher d’effectuer les démarches administratives nécessaires à leur entrée en fonction et à l’exercice de leur mandat, visées à l’article 3, paragraphes 2 et 3, du règlement intérieur, à savoir la déclaration de non-incompatibilité et la déclaration d’intérêts financiers.

185    Compte tenu de ce qui précède, l’instruction du 29 mai 2019 n’a pas été à l’origine de l’impossibilité pour les requérants de prendre leurs fonctions, de siéger au Parlement et d’exercer leur mandat à compter de l’ouverture de la première session après les élections, soit à compter du 2 juillet 2019. Tout au plus, cette instruction a privé les requérants de l’assistance du Parlement aux fins de leur prise de fonction à compter de son adoption et jusqu’au 17 juin 2019, date à laquelle les autorités espagnoles ont adressé au Parlement la communication officielle des résultats des élections.

186    Il s’ensuit que, eu égard à son contenu, à son caractère provisoire et au contexte de son adoption, l’instruction du 29 mai 2019 n’a pas produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts des requérants au sens de la jurisprudence visée au point 74 ci-dessus.

187    Dès lors, le recours en annulation contre l’instruction du 29 mai 2019 est irrecevable.

188    Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de considérer que le présent recours n’est pas dirigé contre des actes attaquables au titre de l’article 263 TFUE et, partant, doit être rejeté comme étant irrecevable sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres fins de non-recevoir soulevées par le Parlement.

 Sur les dépens

189    En vertu de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

190    Les requérants ayant succombé en leurs conclusions, il y a lieu de les condamner à supporter leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par le Parlement devant le Tribunal dans le cadre de la présente affaire et des affaires T‑388/19 R et T‑388/19 R‑RENV ainsi que devant la Cour dans le cadre de l’affaire C‑646/19 P(R), conformément aux conclusions du Parlement.

191    Enfin, en application de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, le Royaume d’Espagne supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      MM. Carles Puigdemont i Casamajó et Antoni Comín i Oliveres sont condamnés à supporter leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par le Parlement européen, y compris dans le cadre des affaires T388/19 R, C646/19 P(R), et T388/19 RRENV.

3)      Le Royaume d’Espagne supportera ses propres dépens.

Marcoulli

Frimodt Nielsen

Schwarcz

Iliopoulos

 

      Norkus

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 juillet 2022.

Signatures


Table des matières


Cadre juridique

Protocole (n o 7) sur les privilèges et immunités de l’Union européenne

Acte électoral

Règlement intérieur du Parlement (2019-2024)

Loi électorale espagnole

Antécédents du litige et faits postérieurs à l’introduction du recours

Procédure et conclusions des parties

En droit

Observations liminaires sur l’objet du litige

Sur la nature des actes attaqués

Sur le refus de l’ancien président du Parlement de reconnaître aux requérants la qualité de député européen

– Sur le contenu de la lettre du 27 juin 2019

– Sur les prétendus effets juridiques découlant de la lettre du 27 juin 2019

i) Observations liminaires

ii) Sur l’impossibilité pour les requérants de prendre leurs fonctions, d’exercer leur mandat et de siéger au Parlement

iii) Sur la prétendue déclaration de vacance des sièges des requérants

iv) Sur l’absence d’adoption d’urgence d’une initiative visant à confirmer les privilèges et immunités des requérants

v) Sur l’absence de communication en séance plénière de la prétendue demande de défense des privilèges et immunités des requérants et de transmission de celle-ci à la commission compétente du Parlement

Sur l’instruction du 29 mai 2019

Sur les dépens



*      Langue de procédure : l’anglais.