Language of document : ECLI:EU:T:2008:386

ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

19 septembre 2008 (*)

« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Remboursement des frais de voyage annuel – Fonctionnaire originaire des départements d’outre-mer français (DOM) – Article 8 de l’annexe VII du statut – Acte confirmatif – Bulletin de rémunération – Dénaturation des faits – Erreur de droit »

Dans l’affaire T‑253/06 P,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’ordonnance du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (troisième chambre) du 29 juin 2006, Chassagne/Commission (F‑11/05, RecFP p. I‑A‑1‑65 et II‑A‑1‑241), et tendant à l’annulation de cette ordonnance,

Olivier Chassagne, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté initialement par Mes S. Rodrigues et C. Bernard-Glanz, puis par MT. Bontinck, avocats,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. G. Berscheid et V. Joris, en qualité d’agents, assistés de Me F. Longfils, avocat,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (chambre des pourvois),

composé de M. M. Jaeger (rapporteur), président, Mme V. Tiili, MM. J. Azizi, A. W. H. Meij et M. Vilaras, juges,

greffier : Mme K. Pocheć, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 28 janvier 2008,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice, le requérant, M. Olivier Chassagne demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (troisième chambre) du 29 juin 2006 (F‑11/05, RecFP p. I‑A‑1‑65 et II‑A‑1‑241), par laquelle celui-ci a rejeté comme manifestement irrecevable son recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision de la Commission lui refusant le bénéfice des dispositions de l’article 8, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes dans sa version applicable avant le 1er mai 2004 (ci-après le « statut »), relatives aux modalités de remboursement des frais de voyage annuel, et, d’autre part, à la réparation du préjudice qu’il estime avoir subi du fait de ce refus.

 Cadre juridique

2        Aux termes de l’article 7 de l’annexe V du statut :

« La durée du congé prévu à la section 1 est majorée d’un délai de route calculé sur la base de la distance en chemin de fer séparant le lieu du congé du lieu d’affectation, dans les conditions suivantes :

–        entre 50 et 250 kilomètres : une journée pour l’aller-retour,

–        entre 251 et 600 kilomètres : deux journées pour l’aller-retour,

–        entre 601 et 900 kilomètres : trois journées pour l’aller-retour,

–        entre 901 et 1 400 kilomètres : quatre journées pour l’aller-retour,

–        entre 1 401 et 2 000 kilomètres : cinq journées pour l’aller-retour,

–        au-delà de 2 000 kilomètres : six journées pour l’aller-retour.

Lorsque le fonctionnaire bénéficie des dispositions prévues à l’article 8, paragraphe 2, second alinéa, de l’annexe VII, le délai de route calculé sur la base de la distance en chemin de fer séparant le lieu du congé du lieu d’affectation est déterminé comme suit :

–        jusqu’à 900 kilomètres : une journée pour l’aller-retour,

–        au-delà de 900 kilomètres : deux journées pour l’aller-retour.

À titre exceptionnel, des dérogations peuvent être accordées sur demande de l’intéressé et moyennant justifications, si le voyage aller-retour ne peut être effectué dans les délais accordés.

Pour le congé annuel, le lieu du congé, au sens du présent article, est le lieu d’origine.

Les dispositions qui précèdent sont applicables au fonctionnaire dont le lieu d’affectation et le lieu d’origine se trouvent en Europe. Si le lieu d’affectation et/ou lieu d’origine se trouvent en dehors de l’Europe, un délai de route est fixé par décision spéciale, compte tenu des nécessités.

En cas de congés spéciaux prévus à la section 2, un délai de route éventuel est fixé par décision spéciale, compte tenu des nécessités. »

3        Aux termes de l’article 8 de l’annexe VII du statut :

« 1. Le fonctionnaire a droit pour lui-même et, s’il a droit à l’allocation de foyer, pour son conjoint et les personnes à charge au sens de l’article 2, au paiement forfaitaire des frais de voyage du lieu d’affectation au lieu d’origine défini à l’article 7, dans les conditions suivantes :

–        une fois par année civile, si la distance en chemin de fer entre le lieu d’affectation et le lieu d’origine est supérieure à 50 kilomètres et inférieure à 725 kilomètres,

–        deux fois par année civile, si la distance en chemin de fer entre le lieu d’affectation et le lieu d’origine est d’au moins 725 kilomètres,

ces distances étant calculées selon les modalités prévues à l’article 7, paragraphe 2.

[…]

2. Le paiement forfaitaire est effectué sur la base du prix d’un billet de chemin de fer aller-retour en première classe pour les fonctionnaires des catégories A et B, ainsi que du cadre linguistique, et en seconde classe pour les autres fonctionnaires. Toutefois, si le voyage porte sur une distance aller-retour égale ou supérieure à 800 kilomètres, le paiement pour les fonctionnaires des catégories C et D est effectué sur la base du prix en première classe. Si le calcul ne peut être effectué sur ces bases, une décision spéciale de l’autorité investie du pouvoir de nomination fixe les modalités.

Lorsque la distance en chemin de fer entre le lieu d’affectation et le lieu d’origine est supérieure à 500 kilomètres et dans les cas où l’itinéraire usuel comporte la traversée d’une mer, l’intéressé a droit, sur présentation des billets, au remboursement des frais de voyage en avion, en classe immédiatement inférieure à la classe de luxe ou la première classe.

[…]

4. Les dispositions qui précèdent sont applicables au fonctionnaire dont le lieu d’affectation et le lieu d’origine se trouvent en Europe. Le fonctionnaire dont le lieu d’origine et/ou le lieu d’affectation est situé en dehors de l’Europe a droit, pour lui-même et, s’il a droit à l’allocation de foyer, pour son conjoint et les personnes à charge au sens de l’article 2, une fois par année civile et sur présentation de pièces justificatives, au remboursement des frais de voyage à son lieu d’origine ou, dans la limite de ces frais, au remboursement des frais de voyage à un autre lieu.

[…] »

 Faits à l’origine du litige et procédure en première instance

4        Les faits à l’origine du litige et la procédure en première instance sont énoncés, aux points 2 à 9 de l’ordonnance attaquée, dans les termes suivants :

« 2               Le requérant, fonctionnaire de grade A* 10 à la Commission, a comme lieu d’origine Saint-Denis, à l’île de La Réunion.

3      Par note du 19 janvier 2004, le requérant a demandé à l’autorité investie du pouvoir de nomination […], au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, de reconnaître aux agents originaires des départements d’outre‑mer français […] le bénéfice des dispositions des paragraphes 1 à 3 de l’article 8 de l’annexe VII du statut pour le remboursement de leurs frais de voyage annuels, au lieu de leur appliquer le paragraphe 4 de ce même article. Aux termes de cette dernière disposition, les paragraphes 1 à 3 étaient applicables au fonctionnaire ‘dont le lieu d’affectation et le lieu d’origine se trouvent en Europe’, alors qu’elle prévoyait que le fonctionnaire ‘dont le lieu d’origine et/ou le lieu d’affectation est situé en dehors de l’Europe’ bénéficiait de règles différentes pour le remboursement des frais de voyage annuels. Par courrier du 4 mars 2004, à la suite d’un entretien qu’il aurait eu avec un membre du service compétent, le requérant a requalifié ce document de demande, invitant l’[autorité investie du pouvoir de nomination] à prendre à son égard une décision au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, notamment pour trancher la question de savoir ‘si les agents originaires des [départements d’outre-mer français] relèvent du paragraphe 4 de l’article 8 de l’annexe VII du statut ou bien des paragraphes 1 à 3 dudit article’.

4      Par courrier de l’[autorité investie du pouvoir de nomination], en date du 1er mars 2004, le requérant a été informé que, dans la mesure où il effectuerait son voyage de l’année 2004 avant le 1er mai de cette même année, date d’entrée en vigueur des nouvelles règles du statut relatives au remboursement des frais de voyage annuels, il disposerait du choix entre l’ancien et le nouveau régime de remboursement. Le même courrier de l’[autorité investie du pouvoir de nomination] précisait que le choix pouvait être fait séparément pour chaque membre de la famille qui effectuerait son voyage avant la date du 1er mai 2004. Le requérant a choisi l’ancien régime pour son épouse et lui-même et le nouveau régime pour ses enfants à charge. Les voyages du requérant et de son épouse ont été effectués en avril 2004, vers une destination autre que son lieu d’origine, ceci étant permis par les dispositions alors applicables aux fonctionnaires dont le lieu d’origine était situé en dehors de l’Europe.

5      Une avance sur les frais dudit voyage a été versée au requérant avec sa rémunération du mois d’avril 2004, puis, avec la rémunération du mois de mai 2004, l’[autorité investie du pouvoir de nomination] a remboursé, sur présentation des billets, le solde dû des dépenses réellement exposées.

6      Par courrier du 28 mai 2004, enregistré auprès de l’administration le 2 juin 2004, le requérant a introduit une réclamation contre le rejet implicite par l’[autorité investie du pouvoir de nomination] de sa demande du 19 janvier 2004, ainsi que contre son bulletin de rémunération du mois de mai 2004, le but de cette réclamation étant de faire reconnaître ‘aux agents originaires des départements d’outre-mer français le bénéfice a posteriori des dispositions de l’ancien article 8, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut’.

7      Le délai de réponse à la réclamation a expiré le 2 octobre 2004. Par décision du 9 décembre 2004, dont le requérant a accusé réception le 17 décembre 2004, à savoir toujours dans le délai de recours, l’[autorité investie du pouvoir de nomination] a explicitement rejeté ladite réclamation.

8      C’est dans ces circonstances que le requérant a introduit, le 11 mars 2005, le présent recours, enregistré au greffe du Tribunal de première instance sous le numéro T‑123/05.

9      Par ordonnance du 15 décembre 2005, le Tribunal de première instance, en application de l’article 3, paragraphe 3, de la décision 2004/752 […], a renvoyé la présente affaire devant le Tribunal. Le recours a été enregistré au greffe du Tribunal sous le numéro F‑11/05. »

5        Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal, applicable mutatis mutandis au Tribunal de la fonction publique en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), le Tribunal de la fonction publique a demandé à la Commission de produire certains documents, et notamment la réclamation R/457/03, du 4 juillet 2003 (ci-après la « réclamation du 4 juillet 2003 ») et la réclamation R/437/04, du 28 mai 2004, une note du requérant du 13 juin 2003 ayant pour objet la détermination « à titre exceptionnel » du délai de route le concernant (ci-après la « note du 13 juin 2003 »), ainsi que la réponse de la Commission du 23 juin 2003 à ladite note (ci-après la « réponse du 23 juin 2003 »). Il a été déféré à cette demande.

6        Par lettre du 3 mai 2006, le greffe du Tribunal de la fonction publique a transmis ces documents au requérant.

7        Par ordonnance du 29 juin 2006 (F‑11/05, RecFP p. I‑A‑1‑65 et II‑A‑1‑241) (ci-après l’« ordonnance attaquée), le Tribunal de la fonction publique a rejeté le recours comme manifestement irrecevable.

 Sur l’ordonnance attaquée

8        Les motifs sur lesquels le Tribunal de la fonction publique a fondé l’irrecevabilité du recours figurent aux points 22 à 33 de l’ordonnance attaquée dans les termes suivants :

« 22      Il résulte d’une jurisprudence constante que le recours introduit par un fonctionnaire devant le Tribunal doit être déclaré irrecevable si la procédure précontentieuse n’a pas suivi un cours régulier (ordonnances du Tribunal de première instance du 11 mai 1992, Whitehead/Commission, T‑34/91, Rec. p. 1723, point 18 ; du 25 mars 1998, Koopman/Commission, T‑202/97, RecFP p. I‑A‑163 et II‑511, point 22, et du 7 décembre 1999, Reggimenti/Parlement, T‑108/99, RecFP p. I‑A‑243 et II‑1205, point 19).

23      Il est également de jurisprudence constante que, les délais de la procédure précontentieuse étant d’ordre public, il appartient au Tribunal de contrôler d’office s’ils ont été respectés (arrêt de la Cour du 13 novembre 1986, Becker/Commission, 232/85, Rec. p. 3401, point 8 ; arrêts du Tribunal de première instance du 17 octobre 1991, Offermann/Parlement, T‑129/89, Rec. p. II‑855, points 30 et 31 ; du 18 mars 1997, Rasmussen/Commission, T‑35/96, RecFP p. I‑A‑61 et II‑187, point 29, et du 2 mars 2004, Di Marzio/Commission, T‑14/03, RecFP p. I‑A‑43 et II‑167, point 37 ; ordonnance du Tribunal de première instance du 7 septembre 2005, Krahl/Commission, T‑358/03, non encore publiée au Recueil, point 35).

24      De même, il n’est pas permis à un fonctionnaire d’écarter les délais prévus par les articles 90 et 91 du statut pour l’introduction de la réclamation et du recours en mettant en cause, par le biais d’une demande, une décision antérieure non contestée dans les délais, seule l’existence de faits nouveaux substantiels pouvant justifier la présentation d’une demande de réexamen d’une décision devenue définitive (arrêts de la Cour du 15 mai 1985, Esly/Commission, 127/84, Rec. p. 1437, point 10, et du 14 juin 1988, Muysers et Tülp/Cour des comptes, 161/87, Rec. p. 3037, point 11 ; ordonnances du Tribunal de première instance du 11 juillet 1997, Chauvin/Commission, T‑16/97, RecFP p. I‑A‑237 et II‑681, point 37, et du 11 décembre 2001, Stols/Conseil, T‑99/97, RecFP p. I‑A‑233 et II‑1061, point 40 ; arrêts du Tribunal de première instance du 4 mai 2005, Schmit/Commission, T‑144/03, point 147, et du 21 février 2006, V/Commission, T‑200/03 et T‑313/03, point 93, non encore publiés au Recueil). On ne saurait qualifier de fait nouveau, permettant de déroger au système des délais impérativement prévus par les articles 90 et 91 du statut, la circonstance que, sur demande du fonctionnaire intéressé, l’administration a ultérieurement repris l’examen de son cas, en vue de lui fournir des renseignements supplémentaires (arrêt de la Cour du 10 juillet 1986, Trenti/CES, 153/85, Rec. p. 2427, point 13).

25      Ainsi qu’il résulte des conclusions de la requête, celle-ci vise en premier lieu à l’annulation du rejet par la Commission, en date du 9 décembre 2004, de la réclamation du requérant, introduite le 28 mai 2004, laquelle contestait la décision de l’administration de soumettre les fonctionnaires qui, comme lui, sont originaires des [départements d’outre-mer français], au régime du paragraphe 4 de l’article 8 de l’annexe VII du statut, plutôt qu’à celui des paragraphes 1 à 3 de ce même article, pour le remboursement de leurs frais de voyage annuels. Tel était aussi l’objet de la demande du 19 janvier 2004, par laquelle le requérant avait entamé la procédure précontentieuse, en qualifiant dans un premier temps cette demande de réclamation.

26      Or, les faits de l’espèce révèlent que cette décision de l’administration, qui est l’acte faisant grief au requérant, avait été portée à sa connaissance bien avant le 19 janvier 2004, date à laquelle il a entamé la procédure précontentieuse.

27      En premier lieu, en réponse à une note du requérant, en date du 13 juin 2003, par laquelle celui-ci faisait état de la durée de son voyage Bruxelles-La Réunion et demandait la fixation de son délai de route à quatre jours, il lui avait été répondu, par note de l’[autorité investie du pouvoir de nomination] du 23 juin 2003, que, selon les règles en vigueur, pour les lieux d’origine situés hors d’Europe (géographique), le délai de route était de deux jours, une dérogation pouvant être accordée en cas de voyage dépassant les 48 heures, mais que tel ne serait pas le cas pour le requérant, car son propre voyage n’avait duré que 41 heures et demie. À la lecture de cette note, le requérant prenait clairement connaissance que l’[autorité investie du pouvoir de nomination] considérait son lieu d’origine, à savoir La Réunion, comme étant en dehors de l’Europe géographique, ce qui, s’agissant du remboursement des frais de voyage annuels, le faisait forcément relever du paragraphe 4 de l’article 8 de l’annexe VII du statut.

28      En deuxième lieu, dans la réclamation qu’il avait introduite le 4 juillet 2003 à l’encontre de la note précitée du 23 juin 2003, concernant son délai de route, le requérant se plaignait déjà du fait que les fonctionnaires originaires des [départements d’outre‑mer français] ne pouvaient pas bénéficier du remboursement forfaitaire de leurs frais de voyage annuels. Or, l’impossibilité d’obtenir un remboursement forfaitaire des frais de voyage annuels est une caractéristique propre au régime du paragraphe 4 de l’article 8 de l’annexe VII du statut, par opposition à celui des paragraphes 1 à 3 du même article.

29      En troisième lieu, il est constant que le requérant n’a présenté pour remboursement, au titre de l’année 2003, que les pièces justificatives relatives à un seul voyage et que son bulletin de rémunération du mois de juillet 2003 (l’administration procédant normalement au remboursement forfaitaire des frais de voyage annuels avec le versement du salaire afférent à ce mois, conformément à l’article 9 des Dispositions générales d’exécution relatives à l’application de l’article 8 de l’annexe VII du statut) ne fait pas état du remboursement d’un deuxième voyage. Or, les deux régimes précités se distinguaient également par le fait que les fonctionnaires relevant du paragraphe 4 n’avaient droit au remboursement que d’un seul voyage, tandis que ceux relevant des paragraphes 1 à 3 pouvaient se faire rembourser deux voyages par an, si, comme c’était le cas du requérant, la distance entre le lieu d’origine et le lieu d’affectation était d’au moins 725 km. Par ailleurs, il a été jugé que le remboursement forfaitaire des frais de voyage fait partie des domaines dans lesquels l’existence et la portée des mesures individuelles prises par l’administration peuvent, en raison de leur objet même, clairement ressortir du décompte des sommes versées, contenu dans le bulletin mensuel de rémunération (arrêt du [Tribunal de la fonction publique] du 28 juin 2006, Grünheid/Commission, F-101/05, non encore publié au Recueil, point 43).

30      Il en résulte qu’en juin ou, au plus tard, à la fin du mois de juillet 2003, l’administration avait pris la décision de soumettre le requérant aux dispositions du paragraphe 4, qu’elle lui avait également appliqué cette décision et que, de surcroît, le requérant en avait parfaitement connaissance. Il avait, en outre, connaissance tant des conséquences de cette décision pour le remboursement de ses frais de voyage annuels, notamment qu’il aurait droit au remboursement d’un seul voyage et que le remboursement forfaitaire serait exclu, que des motifs ayant conduit la Commission à lui appliquer ces règles, à savoir le fait que son lieu d’origine se situait en dehors de l’Europe géographique. Par ailleurs cette connaissance ne résultait pas de moyens officieux (voir arrêt du Tribunal de première instance, Rasmussen/Commission, précité, point 40) ou de procédés irréguliers, mais de procédures et démarches statutaires entamées par le requérant lui-même.

31      Par conséquent, la note qu’il a adressée le 19 janvier 2004 à l’administration, afin d’entamer la procédure précontentieuse prévue par l’article 90 du statut – que cette note constitue une demande ou une réclamation – n’a pas respecté les conditions de délai prévues par la disposition précitée. En effet, aux termes de cette disposition, le délai de trois mois pour l’introduction d’une réclamation court au plus tard à compter du jour où l’intéressé a eu connaissance de l’acte faisant grief. Or, ainsi qu’il résulte des éléments relevés dans les points 27 à 29 du présent arrêt, le requérant, fonctionnaire, dont les écrits et démarches démontrent d’ailleurs une certaine familiarité avec les procédures statutaires, a eu connaissance tant du contenu que de la motivation de la décision litigieuse (voir arrêt du Tribunal de première instance du 3 juin 1997, H/Commission, T‑196/95, RecFP p. I‑A‑133 et II‑403, point 31) plus de trois mois avant sa lettre du 19 janvier 2004, qu’il a initialement qualifiée de réclamation et qui serait, dès lors, tardive. Par ailleurs, à supposer que cette lettre soit une demande, la jurisprudence citée dans le point 24 du présent arrêt serait opposable au requérant.

32      À titre surabondant, il convient de relever que les griefs formulés dans la première réclamation du requérant, en 2003, relative au délai de route, sont essentiellement les mêmes que ceux visant à contester les différences de régime de remboursement des frais de voyage selon que le lieu d’origine d’un fonctionnaire se trouve sur le continent européen ou en dehors de celui-ci, différend qui constitue l’objet de la présente affaire. Or, si le requérant a choisi de ne pas former un recours contre le rejet de sa réclamation de 2003, lui reconnaître qu’il était en droit d’entamer, de manière recevable, après l’expiration du délai d’un tel recours, la procédure précontentieuse de la présente affaire, équivaudrait en substance à une extension des délais de recours, laquelle n’est cependant à la disposition ni des parties ni du juge communautaire (arrêt du Tribunal de première instance du 26 septembre 1990, F/Commission, T‑122/89, Rec. p. II‑517, point 23 ; ordonnance du Tribunal de première instance du 12 février 1995, Grassi/Commission, T‑552/93, RecFP p. I‑A‑33 et II‑125, point 23 ; arrêt du Tribunal de première instance du 11 mars 1999, Herold/Commission, T‑257/97, RecFP p. I-A-49 et II-251, point 43).

33      À la lumière de ce qui précède, force est de constater que, la procédure précontentieuse n’ayant pas suivi un cours régulier, en ce qui concerne en particulier le respect des délais statutaires, le recours est irrecevable de ce chef, y compris en ses conclusions indemnitaires, qui sont manifestement liées de manière étroite aux autres conclusions du recours, et notamment aux conclusions en annulation. Par conséquent, le rejet de ces dernières comme irrecevables entraîne également le rejet des conclusions indemnitaires (arrêt du Tribunal de première instance du 9 février 1994, Latham/Commission, T‑82/91, RecFP p. I‑A‑15 et II‑61, points 34 à 36, et ordonnance du Tribunal de première instance du 28 juin 2005, Ross/Commission, T‑147/04, non encore publiée au Recueil, point 39). »

 Sur le pourvoi

1.     Procédure

9        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 septembre 2006, le requérant a, en vertu de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice, formé le présent pourvoi.

10      La Commission a déposé un mémoire en réponse le 8 décembre 2006.

11      Par lettre reçue au greffe du Tribunal le 21 décembre 2006, le requérant a formulé une demande, au titre de l’article 143, paragraphe 1, du règlement de procédure, tendant à la présentation d’un mémoire en réplique. Par décision du 9 janvier 2007, le président de la chambre des pourvois a rejeté cette demande et a clos la procédure écrite.

12      Par lettre du 1er février 2007, le requérant a formulé une demande motivée, au titre de l’article 146 du règlement de procédure, aux fins d’être entendu dans le cadre de la phase orale de la procédure.

13      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (chambre des pourvois) a fait droit à cette demande et a ouvert la procédure orale. Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure, le Tribunal a invité la Commission à répondre à certaines questions écrites. Il a été déféré à cette demande dans les délais impartis.

2.     Conclusions des parties

14      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’ordonnance attaquée ;

–        faire droit aux conclusions en annulation et en indemnités présentées par lui en première instance ;

–        condamner la Commission aux dépens.

15      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le pourvoi comme irrecevable ou, à tout le moins, comme non fondé ;

–        à titre subsidiaire, faire droit aux conclusions présentées par elle en première instance ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

16      Le requérant invoque deux moyens tirés, en premier lieu, de l’irrégularité de la procédure en première instance et, en second lieu, de la violation du droit communautaire.

1.     Sur le premier moyen, tiré de l’irrégularité de la procédure en première instance

17      Le requérant soutient que ses droits de la défense ont été violés au cours de la procédure en première instance. Ce moyen se divise en trois branches tirées, premièrement, de l’impossibilité pour le requérant de présenter ses observations relatives à certains documents sur lesquels est fondée l’ordonnance attaquée, deuxièmement, du défaut de prise en considération de certains éléments essentiels exposés par le requérant dans ses mémoires et, troisièmement, du défaut de prise en considération de certains documents versés à la procédure.

 Sur l’impossibilité pour le requérant de présenter ses observations relatives à certains documents sur lesquels est fondée l’ordonnance attaquée

 Arguments des parties

18      Le requérant fait observer que, après avoir demandé à la Commission de produire certains documents ne figurant pas dans les mémoires, le Tribunal de la fonction publique ne lui a pas permis de présenter ses observations sur lesdits documents, s’agissant, notamment, de la note du 13 juin 2003 et de la réponse du 23 juin 2003 sur lesquelles l’ordonnance attaquée est fondée. Il souligne que le greffe du Tribunal de la fonction publique l’avait pourtant invité, dans le bordereau de transmission de ces documents, à présenter ses observations lors de l’audience.

19      La Commission considère que cette argumentation n’est pas fondée. Elle rappelle que, lorsque le Tribunal de la fonction publique s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier, il peut statuer sur une exception d’irrecevabilité sans engager la procédure orale, conformément à l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal. L’article 114, paragraphes 1 à 3, de ce même règlement ne prévoirait en effet aucunement l’obligation de tenir une audience. Ainsi, selon la Commission, dès lors que le recours du requérant était tardif, ce serait à juste titre que le Tribunal de la fonction publique aurait rejeté le recours comme manifestement irrecevable (arrêt de la Cour du 1er juillet 1999, Alexopoulou/Commission, C‑155/98 P, Rec. p. I‑4069, points 11 à 13).

20      Elle ajoute que le requérant a eu la possibilité de faire valoir ses observations relatives aux documents en question au cours de la procédure en première instance, ces documents lui ayant été transmis le 28 avril 2006. En outre, la Commission soutient que, dans le mémoire en défense, elle avait déjà fait référence aux décisions de rejet des réclamations des 4 juillet 2003 et 28 mai 2004, lesquelles étaient jointes en annexe audit mémoire et faisaient elles-mêmes référence aux documents transmis au Tribunal de la fonction publique en exécution de la mesure d’organisation de la procédure adoptée par ce dernier. Ainsi, le requérant, qui avait connaissance de ces documents dont il était pour la plupart d’entre eux l’auteur, aurait été en mesure de présenter ses observations à leur égard dès la réplique. Le requérant n’ayant pas jugé opportun de le faire, le moyen devrait être rejeté comme non fondé (arrêt de la Cour du 9 septembre 1999, Petrides/Commission, C‑64/98 P, Rec. p. I‑5187, point 32).

 Appréciation du Tribunal

21      Il y a lieu de constater que l’ordonnance attaquée est fondée sur l’article 111 du règlement de procédure, applicable mutatis mutandis à la procédure devant le Tribunal de la fonction publique, aux termes duquel, lorsque le Tribunal est manifestement incompétent pour connaître d’un recours ou lorsque celui-ci est manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

22      Bien que l’ordonnance attaquée ne fasse pas état des différentes étapes de la procédure en première instance, il ressort de l’argumentation des parties figurant aux points 14 à 21 de ladite ordonnance ainsi que du dossier de procédure que la procédure écrite a donné lieu à deux échanges de mémoires. En outre, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64, paragraphe 3, sous d), du règlement de procédure, le Tribunal de la fonction publique a demandé à la Commission de produire les réclamations du 4 juillet 2003 et du 28 mai 2004, la note du 13 juin 2003, la réponse du 23 juin 2003, « ainsi que toute autre note antérieure, de la Commission ou du requérant, concernant la question du remboursement des frais de voyage de ce dernier ».

23      Le greffe du Tribunal de la fonction publique a communiqué au requérant les documents déposés par la Commission en exécution de cette mesure d’organisation de la procédure, en lui indiquant qu’il « pourr[ait] présenter [ses] observations éventuelles à ce sujet lors de l’audience ».

24      Il convient de rappeler que le raisonnement suivi par le Tribunal de la fonction publique en vue de conclure à l’irrecevabilité du recours est fondé sur trois considérations développées à titre principal (points 27 à 29 de l’ordonnance attaquée) et sur une quatrième présentée à titre surabondant (point 32 de l’ordonnance attaquée).

25      Les deux premières de ces considérations reposent sur l’analyse de documents transmis par la Commission, à savoir, d’une part, la note du 13 juin 2003 et la réponse du 23 juin 2003 et, d’autre part, la réclamation du 4 juillet 2003, tandis que la troisième s’appuie, d’une part, sur un élément présenté par le Tribunal de la fonction publique comme constant, ce que le requérant ne conteste pas à l’occasion du présent pourvoi, à savoir le fait que ce dernier n’a présenté, au titre de l’année 2003, que les pièces justificatives relatives à un seul voyage, et, d’autre part, sur le contenu du bulletin de rémunération du requérant du mois de juillet 2003, dont le requérant ne prétend pas qu’il a fondé l’ordonnance attaquée en violation de ses droits de la défense. Enfin, la quatrième considération, développée à titre surabondant, est fondée sur une analyse des griefs formulés par le requérant dans la réclamation du 4 juillet 2003 ainsi que sur la décision du 23 décembre 2003 rejetant cette réclamation (ci-après la « décision du 23 décembre 2003 »), cette dernière ayant figuré en annexe au mémoire en défense.

26      La question de l’éventuelle violation du droit d’être entendu du requérant ne se pose donc que pour les trois documents qui n’ont été versés au dossier qu’à la suite de la mesure d’organisation de la procédure adressée à la Commission et sur lesquels le Tribunal de la fonction publique a fondé son raisonnement, à savoir la note du 13 juin 2003, la réponse du 23 juin 2003 et la réclamation du 4 juillet 2003.

27      Dans ce cadre, il convient de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence que ce serait violer un principe élémentaire du droit que de fonder une décision judiciaire sur des faits ou documents dont les parties, ou l’une d’entre elles, n’ont pu prendre connaissance et sur lesquels elles n’ont donc pas été en mesure de prendre position (arrêts de la Cour du 22 mars 1961, Snupat/Haute Autorité, 42/59 et 49/59, Rec. p. 103, 156, et du 10 janvier 2002, Plant e.a./Commission et South Wales Small Mines, C‑480/99 P, Rec. p. I‑265, point 24).

28      La Cour en avait déduit, dans l’arrêt Plant e.a./Commission et South Wales Small Mines, précité, qu’il convenait d’examiner si, ainsi que le prétendaient les parties requérantes, le Tribunal avait fondé son ordonnance d’irrecevabilité en application de l’article 111 du règlement de procédure sur des faits ou documents dont ils n’avaient pas pu prendre connaissance.

29      Il s’ensuit que, à l’évidence, le simple fait que l’article 111 du règlement de procédure autorise le Tribunal de la fonction publique à statuer sans engager la procédure orale ne saurait l’autoriser à fonder son ordonnance sur des faits et documents au sujet desquels le requérant n’a pas, à tout le moins, été en mesure de prendre position. À cet égard, il convient de souligner que la Cour a relevé, dans l’arrêt du 19 janvier 2006, AIT/Commission (C‑547/03 P, Rec. p. I‑845, points 18 et 36), que le droit du requérant d’être entendu n’avait pas été violé, dès lors que le Tribunal, préalablement à l’adoption de l’ordonnance d’irrecevabilité fondée sur l’article 111 du règlement de procédure, avait invité le requérant à prendre position sur les fins de non-recevoir soulevées par la Commission ainsi que sur les documents produits par celle-ci consécutivement à la mesure d’organisation de la procédure prise par le Tribunal sur le fondement de l’article 64 du règlement de procédure. L’argument que la Commission entend tirer de l’absence d’obligation, pour le Tribunal de la fonction publique, de tenir une audience, conformément à l’article 111 et à l’article 114, paragraphes 1 à 3, du règlement de procédure, est donc dépourvu de pertinence.

30      S’agissant, en premier lieu, de la réclamation du 4 juillet 2003, outre qu’elle n’est pas visée de manière expresse dans le présent moyen, il suffit de relever que, au point 28 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique s’est contenté de relever qu’il en ressortait que le requérant y contestait déjà le « fait que les fonctionnaires originaires des [départements d’outre-mer français] ne pouvaient pas bénéficier du remboursement forfaitaire de leurs frais de voyage annuels ». Or, force est de constater que cet élément, d’une part, figure en des termes quasi identiques dans la décision du 23 décembre 2003, qui était jointe en annexe au mémoire en défense et, d’autre part, avait été invoqué par la Commission dans le mémoire en défense en vue de démontrer le caractère tardif de la réclamation R/436/04, du 28 mai 2004. Le requérant, qui avait nécessairement connaissance de ce document dont il est l’auteur, a donc été en mesure de présenter utilement ses observations à cet égard dans le cadre de la réplique.

31      S’agissant, en second lieu, de la note du 13 juin 2003 et de la réponse du 23 juin 2003, il apparaît que l’ordonnance attaquée est effectivement fondée, en son point 27, sur une analyse de ces documents. S’il ne saurait être contesté que le requérant, en tant qu’auteur de la note du 13 juin 2003 et destinataire de la réponse du 23 juin 2003, a pu prendre connaissance de ces documents, ce qui constitue une condition nécessaire et préalable à la faculté pour celui-ci de prendre position à leur sujet, il n’en demeure pas moins que cette seule possibilité ne saurait être considérée comme suffisante pour conclure que le droit du requérant d’être entendu à leur sujet a été respecté, cette conclusion exigeant que celui-ci ait été en mesure de présenter utilement ses observations sur lesdits documents.

32      Il convient ainsi de vérifier si, en l’espèce, le requérant a été en mesure de présenter de manière utile ses observations sur la note du 13 juin 2003 et sur la réponse du 23 juin 2003, documents dont le Tribunal de la fonction publique a déduit que le requérant avait pris « connaissance que l’[autorité investie du pouvoir de nomination] considérait son lieu d’origine, à savoir La Réunion, comme étant en dehors de l’Europe géographique, ce qui, s’agissant des frais de voyage annuels, le faisait forcément relever du paragraphe 4 de l’article 8 de l’annexe VII du statut ».

33      Il y a lieu de souligner, à cet égard, que, ainsi que le relève la Commission, la note du 13 juin 2003 et la réponse du 23 juin 2003 sur lesquelles l’ordonnance attaquée est fondée à son point 27 ont bien été communiquées par le greffe du Tribunal de la fonction publique au requérant par courrier du 3 mai 2006.

34      Toutefois, force est de constater que le requérant n’a pas été informé de ce que la production desdits documents avait été demandée en vue d’apprécier la recevabilité du recours et n’a pas été invité à formuler d’observations à leur sujet avant l’audience.

35      En outre, la procédure écrite ayant été close par décision du Tribunal de la fonction publique du 20 février 2006 et le greffe du Tribunal de la fonction publique ayant expressément indiqué au requérant qu’il pourrait présenter ses observations éventuelles à ce sujet lors de l’audience, il ne saurait être soutenu qu’il appartenait à celui-ci de soumettre spontanément ses observations écrites après la clôture de la procédure écrite et dès avant la tenue de ladite audience. Par ailleurs, et en tout état de cause, la procédure écrite étant close à ce stade, à supposer même que, nonobstant ce fait, le requérant ait présenté des observations à cet égard, celui-ci ne pouvait être certain que lesdites observations seraient, à titre exceptionnel, versées au dossier.

36      Étant donné que l’affaire a finalement été réglée par voie d’ordonnance, il convient donc de considérer que le requérant n’a pas eu l’occasion de présenter utilement, postérieurement à la production, par la Commission, de la note du 13 juin 2003 et de la réponse du 23 juin 2003, ses observations sur ces documents.

37      La Commission soutient néanmoins que, dans le mémoire en défense, elle avait déjà fait référence à la décision du 23 décembre 2003 et à la décision du 8 septembre 2004 de rejet de la réclamation R/437/04, du 28 mai 2004, lesquelles étaient jointes en annexe audit mémoire et faisaient elles-mêmes référence aux documents transmis au Tribunal de la fonction publique en exécution de la mesure d’organisation de la procédure adoptée par ce dernier. Ainsi, le requérant, qui avait connaissance de ces documents dont il était pour la plupart l’auteur, aurait été en mesure de présenter ses observations à leur égard dès la réplique.

38      Il est vrai que, dans la décision du 23 décembre 2003, qui était jointe en annexe au mémoire en défense, la Commission faisait mention, sous le titre « Les faits » et à titre de simple description des différentes étapes de la procédure ayant précédé l’adoption de ladite décision, de la note du 13 juin 2003 et de la réponse du 23 juin 2003. Toutefois, force est de constater que, d’une part, ces documents ne figuraient pas au dossier avant leur production par la Commission et, d’autre part, ni dans la décision du 8 septembre 2004 de rejet de la réclamation R/437/04, du 28 mai 2004, ni dans la décision du 9 décembre 2004 de rejet de la réclamation R/436/04, du 28 mai 2004, attaquée en première instance, ni même dans ses mémoires déposés dans le cadre de la procédure devant le Tribunal de la fonction publique, la Commission n’a tiré argument de ces documents en vue de démontrer le caractère tardif de la réclamation R/436/04.

39      En effet, si dans la décision du 9 décembre 2004 de rejet de la réclamation n° R/436/04, attaquée en première instance, la Commission conclut à l’irrecevabilité de ladite réclamation, c’est uniquement au motif que l’argumentation du requérant relative à la prétendue violation du principe d’égalité dont feraient l’objet les fonctionnaires originaires des départements d’outre-mer français (DOM) aurait déjà fait l’objet d’une réponse de la part de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») dans la décision du 23 décembre 2003 et dans la décision du 8 septembre 2004 de rejet de la réclamation R/437/04, du 28 mai 2004, la note du 13 juin 2003 et la réponse du 23 juin 2003 n’y étant aucunement mentionnées. Il en va de même du mémoire en défense, tandis que, dans la duplique, il n’a été développé aucun argument sur ce point.

40      Dès lors, le simple fait que, dans le mémoire en défense, la Commission a fait référence à un document faisant lui-même référence, de manière purement descriptive, à la note du 13 juin 2003 et à la réponse du 23 juin 2003, et ce alors que, par ailleurs, elle ne s’est à aucun moment fondée sur lesdits documents en vue de contester la recevabilité du recours ni même son bien-fondé, ne permet pas de conclure que le requérant a été mis en mesure de se faire entendre utilement à leur sujet avant qu’ils ne soient versés au dossier par la Commission.

41      Il convient de conclure de ce qui précède que le requérant n’a pas été mis en mesure de prendre utilement position sur la note du 13 juin 2003 et la réponse du 23 juin 2003, documents sur lesquels le point 27 de l’ordonnance attaquée est fondé. Cette violation du droit d’être entendu du requérant, constitutive d’une irrégularité de procédure portant atteinte aux intérêts de la partie requérante au sens de l’article 11, paragraphe 1, de l’annexe I du statut de la Cour, ne vicie toutefois que le motif contenu audit point et ne saurait donc, à elle seule, conduire à l’annulation de l’ordonnance attaquée.

42      Il incombe dès lors au Tribunal d’examiner les moyens du requérant dirigés contre les autres motifs développés dans l’ordonnance attaquée au soutien de l’irrecevabilité du recours en première instance.

 Sur le défaut de prise en considération de certains éléments essentiels exposés par le requérant dans ses mémoires

 Arguments des parties

43      Le requérant estime que le raisonnement juridique du Tribunal de la fonction publique est vicié du fait de l’omission, dans l’analyse menée par ce dernier, de certains passages de son exposé ou des documents examinés.

44      Ainsi, au point 28 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique, se fondant sur la réclamation du 4 juillet 2003 introduite à l’encontre de la réponse du 23 juin 2003, concernant son délai de route, aurait omis de prendre en considération le fait que le requérant contestait non la légalité des dispositions du statut, mais celle des règles exposées par la direction générale (DG) « Personnel et administration » de la Commission dans la réponse du 23 juin 2003 ainsi que leur application à son égard.

45      La Commission considère que la deuxième branche du premier moyen vise à contester l’appréciation des faits opérée par le Tribunal de la fonction publique et qu’il y a ainsi lieu de la rejeter comme irrecevable. À titre surabondant, la Commission soutient que cette branche est dépourvue de fondement.

 Appréciation du Tribunal

46      À cet égard, sans même qu’il soit nécessaire de se prononcer quant à la recevabilité de la présente branche, il suffit de rappeler que, au point 28 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a considéré qu’il ressortait de la réclamation du 4 juillet 2003 que le requérant y contestait déjà le fait que les fonctionnaires des DOM ne pouvaient pas bénéficier du remboursement forfaitaire de leurs frais de voyage annuels. Le requérant ne conteste pas cette considération, mais fait grief au Tribunal de la fonction publique de ne pas avoir pris en compte la circonstance que, dans ladite réclamation, il contestait le fait que cette impossibilité résultait non du statut mais « des règles en vigueur à la DG [‘Personnel et administration’] ». Or, outre que l’ordonnance attaquée ne fait aucunement état de ce que le requérant aurait contesté le fait que le statut lui-même était le fondement du régime appliqué aux fonctionnaires des DOM, la question de savoir si le requérant avait identifié ce fondement comme étant le statut ou les dispositions internes d’application à la DG « Personnel et administration » est sans pertinence.

47      En effet, la nature des motifs contestés par le requérant dans la réclamation du 4 juillet 2003 n’a d’incidence ni sur la considération, non contestée par celui-ci, figurant au point 28 de l’ordonnance attaquée, selon laquelle ce dernier contestait le fait que les fonctionnaires des DOM ne pouvaient pas bénéficier du remboursement forfaitaire de leurs frais de voyage annuels, ni sur le second élément du raisonnement tenu par le Tribunal de la fonction publique, selon lequel l’impossibilité d’obtenir un tel remboursement est une caractéristique propre au régime des fonctionnaires ayant leur lieu d’origine en dehors de l’Europe.

48      Dès lors, la présente branche doit être rejetée comme inopérante.

 Sur le défaut de prise en considération de certains documents versés à la procédure

 Arguments des parties

49      Le requérant soutient que, en se fondant sur la réponse du 23 juin 2003 et en omettant de prendre en considération l’ensemble des documents pertinents figurant au dossier, le Tribunal de la fonction publique a faussé son raisonnement exposé au point 30 de l’ordonnance attaquée. En effet, il a abouti à la conclusion que le requérant avait parfaitement connaissance que, « en juin ou au plus tard à la fin du mois de juillet 2003, l’administration avait pris la décision de [le] soumettre aux dispositions du paragraphe 4 et qu’elle lui avait également appliqué cette décision » alors qu’il aurait nécessairement dû tirer une autre conclusion à la lecture desdits documents.

50      En effet, il ressortirait tant de la réponse de la Commission du 19 décembre 2002 à la demande du requérant du 13 décembre 2002 relative à la détermination « à titre exceptionnel » de son délai de route (ci-après la « réponse du 19 décembre 2002 ») que de la décision du 23 décembre 2003 que la Commission considérait que le requérant relevait des dispositions de l’article 8, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut, ainsi que l’attesterait le fait que cette dernière réponse était fondée non sur les dispositions internes en vigueur à la DG « Personnel et administration » et dénommées MAP 2000 (ci-après le « MAP 2000 »), mais sur le statut. Or, la décision du 23 décembre 2003 aurait corrigé et remplacé la réponse du 23 juin 2003, de sorte que le Tribunal de la fonction publique aurait fondé son raisonnement sur un document irrecevable.

51      La Commission considère que cette branche constitue une simple répétition des arguments soulevés par le requérant aux points 32 à 72 de la requête en première instance. Elle viserait ainsi au réexamen par le Tribunal de faits déjà soumis au Tribunal de la fonction publique et serait donc irrecevable. À titre subsidiaire, la Commission soutient que l’argumentation du requérant est dépourvue de fondement.

52      D’une part, rien ne démontrerait que le Tribunal de la fonction publique n’a pas tenu compte des deux documents identifiés par le requérant, le Tribunal de la fonction publique ayant au contraire expressément fait référence auxdits documents au point 20 de l’ordonnance attaquée. En effet, la Commission fait observer que ce point mentionne la décision du 23 décembre 2003, laquelle fait elle-même référence à la réponse du 19 décembre 2002.

53      D’autre part, ces deux documents n’auraient aucune incidence sur la conclusion du Tribunal de la fonction publique selon laquelle le requérant est soumis aux dispositions de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. En effet, tandis que, dans la réponse du 19 décembre 2002, la Commission ne se prononcerait pas à cet égard, dans la décision du 23 décembre 2003, elle rejetterait précisément l’argument du requérant selon lequel il devrait bénéficier des dispositions de l’article 8, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut. Il en résulterait implicitement que l’AIPN a considéré que seul l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut s’appliquait à l’égard du requérant.

 Appréciation du Tribunal

54      À titre liminaire, s’agissant de la fin de non-recevoir soulevée par la Commission en ce que la présente branche constituerait la simple répétition des arguments soulevés aux points 32 à 72 de la requête en première instance, il convient de rappeler qu’il résulte de l’article 225 CE, de l’article 11, paragraphe 1, de l’annexe I du statut de la Cour et de l’article 138, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande. Ne répond pas à cette exigence le pourvoi qui, sans même comporter une argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont serait entaché l’arrêt attaqué, se limite à reproduire les moyens et les arguments qui ont déjà été présentés devant le Tribunal de la fonction publique. En effet, un tel pourvoi constitue en réalité une demande visant à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal de la fonction publique, ce qui échappe à la compétence du Tribunal (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 4 juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C‑352/98 P, Rec. p. I‑5291, points 34 et 35).

55      Toutefois, dès lors qu’un requérant conteste l’interprétation ou l’application du droit communautaire faite par le Tribunal de la fonction publique, les points de droit examinés en première instance peuvent à nouveau être discutés au cours du pourvoi. En effet, si un requérant ne pouvait fonder de la sorte son pourvoi sur des moyens et arguments déjà utilisés devant le Tribunal de la fonction publique, la procédure de pourvoi serait privée d’une partie de son sens (voir, par analogie, ordonnance de la Cour du 11 novembre 2003, Martinez/Parlement, C‑488/01 P, Rec. p. I‑13355, point 39).

56      Il ressort de l’argumentation du requérant présentée ci-dessus que celui-ci fait grief au Tribunal de la fonction publique de ne pas avoir pris en considération certains documents qui étaient à sa disposition et dont l’analyse eût dû le mener à une conclusion différente de celle figurant au point 30 de l’ordonnance attaquée. Contrairement à ce que prétend la Commission, ladite argumentation ne saurait constituer la répétition de certains griefs formulés par le requérant dans la requête en première instance dès lors qu’elle conteste l’analyse des moyens de preuve opérée par le Tribunal de la fonction publique et vise une constatation qui a été faite par le Tribunal de la fonction publique dans l’ordonnance attaquée.

57      En outre, s’agissant de l’argument de la Commission selon lequel la troisième branche du premier moyen est irrecevable, car elle vise une constatation de fait du Tribunal de la fonction publique, il y a lieu de rappeler que, conformément à la jurisprudence de la Cour, sont recevables au stade du pourvoi des griefs relatifs à la constatation des faits et à leur appréciation dans la décision attaquée lorsque le requérant allègue que le Tribunal de la fonction publique a effectué des constatations dont l’inexactitude matérielle résulte des pièces du dossier ou qu’il a dénaturé les éléments de preuve qui lui sont soumis (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 18 janvier 2007, PKK et KNK/Conseil, C‑229/05 P, Rec. p. I-439, point 35, et la jurisprudence citée). En outre, la Cour a également considéré comme recevable au stade du pourvoi le moyen tiré de l’examen incomplet des faits (voir, en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, Rec. p. I‑8375, points 392 à 405).

58      Or, en l’espèce, le requérant allègue, en substance, précisément que le Tribunal de la fonction publique a omis d’examiner certains documents dont le contenu démontrerait qu’est matériellement inexacte la constatation selon laquelle il avait parfaitement connaissance que, « en juin ou au plus tard à la fin du mois de juillet 2003, l’administration avait pris la décision de [le] soumettre aux dispositions du paragraphe 4 et qu’elle lui avait également appliqué cette décision ».

59      Il s’ensuit que la présente branche doit être considérée comme recevable.

60      L’argumentation que le requérant y développe est toutefois étroitement liée à la troisième branche du second moyen, tirée de l’erreur manifeste d’appréciation de certains faits, dans le cadre de laquelle le requérant la réitère d’ailleurs. Il convient donc, pour le Tribunal, de l’examiner à cette occasion.

2.     Sur le second moyen, tiré de la violation du droit communautaire

61      Par le présent moyen, ainsi que par la troisième branche du premier moyen, le requérant conteste l’examen des éléments de preuve et l’interprétation des dispositions applicables effectués par le Tribunal de la fonction publique l’ayant amené à conclure, au point 30 de l’ordonnance attaquée, d’une part, que, « en juin ou, au plus tard, à la fin du mois de juillet 2003, l’administration avait pris la décision de soumettre le requérant aux dispositions du paragraphe 4, qu’elle lui avait également appliqué cette décision et que, de surcroît, le requérant en avait parfaitement connaissance » et, d’autre part, qu’« [i]l avait, en outre, connaissance tant des conséquences de cette décision pour le remboursement de ses frais de voyage annuels, notamment qu’il aurait droit au remboursement d’un seul voyage et que le remboursement forfaitaire serait exclu, que des motifs ayant conduit la Commission à lui appliquer ces règles, à savoir le fait que son lieu d’origine se situait en dehors de l’Europe géographique ».

62      La thèse du requérant consiste à soutenir que, contrairement aux considérations du Tribunal de la fonction publique, il ressort du dossier que la décision attaquée en première instance est le premier acte attaquable par lequel l’AIPN a considéré qu’il relevait de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

63      Le second moyen se divise en trois branches tirées, premièrement, de la dénaturation des moyens formulés dans la requête en première instance, deuxièmement, de l’erreur manifeste d’interprétation des dispositions statutaires applicables et, troisièmement, de l’erreur manifeste d’appréciation de certains faits.

 Sur la première branche, tirée de la dénaturation des moyens formulés dans la requête en première instance

64      Par la présente branche, le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique d’avoir considéré que l’acte lui faisant grief était la décision de l’AIPN de le faire relever de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, laquelle, selon le point 26 de l’ordonnance attaquée, aurait été portée à sa connaissance bien avant le 19 janvier 2004, date à laquelle il a entamé la procédure précontentieuse. Le requérant soutient, en effet, que l’acte attaqué dans la réclamation R/436/04, du 28 mai 2004, était son bulletin de rémunération du mois de mai 2004 et que ce n’est qu’à titre de moyen d’annulation qu’il a contesté la considération de l’AIPN selon laquelle il relevait de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. À supposer même que le requérant ait eu connaissance de cette circonstance dès avant le 19 janvier 2004, quod non, cela n’entraînerait l’irrecevabilité que de ce seul moyen et non de l’ensemble du recours, lequel comporterait d’autres moyens d’annulation recevables, notamment une exception d’illégalité de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

65      Le Tribunal rappelle, à cet égard, que le recours en première instance avait pour objet l’annulation de la décision de rejet de la réclamation R/436/04 du requérant. Cette réclamation était décrite par le requérant comme visant « à ce que la Commission reconnaisse aux agents originaires des DOM le bénéfice a posteriori des dispositions de l’article 8, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut ». En vue d’étayer la recevabilité de ladite réclamation, le requérant faisait valoir, d’une part, que sa demande initiale formulée en ce sens au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, n’avait fait l’objet d’aucune réponse explicite à l’issue du délai statutaire de quatre mois et, d’autre part, que, en tout état de cause, son bulletin de rémunération du mois de mai 2004, en ce qu’il comportait le remboursement de frais de voyage pour une destination autre que le lieu d’origine, constituait une décision impliquant que l’AIPN considérait les DOM comme étant en dehors de l’Europe aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. Le requérant en concluait qu’il existait donc désormais une décision formelle à l’encontre de laquelle ladite réclamation était recevable.

66      Force est de constater que, au point 6 de l’ordonnance attaquée, il est indiqué que, « [p]ar courrier du 28 mai 2004, enregistré auprès de l’administration le 2 juin 2004, le requérant a introduit une réclamation contre le rejet implicite par l’AIPN de sa demande du 19 janvier 2004, ainsi que contre son bulletin de rémunération du mois de mai 2004 », étant précisé que « le but de cette réclamation éta[it] de faire reconnaître ‘aux agents originaires des départements d’outre-mer français le bénéfice a posteriori des dispositions de l’ancien article 8, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut’ ».

67      Par ailleurs, et plus généralement, au point 23 de la requête en première instance, le requérant indiquait, sous le titre « Acte faisant grief », que, « en remboursant, sur la base de l’ancien article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, les frais de voyage annuels vers un lieu autre que le lieu d’origine du requérant […], l’AIPN a[vait] pris un acte faisant grief au requérant au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut », en précisant qu’« [i]l ressort[ait] en effet de la jurisprudence qu’un bulletin de rémunération constitue un acte faisant grief susceptible de faire l’objet d’un recours ». Il ajoutait que cette décision affectait son droit à la rémunération et aux avantages sociaux tels qu’ils sont définis par le régime pécuniaire du statut.

68      Il s’ensuit que, tant dans la réclamation R/436/04 que dans la requête en première instance, le requérant a effectivement défini l’acte lui faisant grief comme étant, notamment, son bulletin de rémunération. En considérant, aux points 25 et 26 de l’ordonnance attaquée, que l’acte faisant grief au requérant était « la décision de l’administration de soumettre les fonctionnaires qui, comme lui, sont originaires des DOM, au régime du paragraphe 4 de l’article 8 de l’annexe VII du statut, plutôt qu’à celui des paragraphes 1 à 3 de ce même article, pour le remboursement de leurs frais de voyage annuels », le Tribunal de la fonction publique a donc commis une erreur dans la détermination formelle de l’acte attaqué par le requérant.

69      Aucun des arguments de la Commission n’est de nature à remettre en cause cette conclusion.

70      Tout d’abord, la Commission conteste la recevabilité de la présente branche en ce qu’elle tendrait à faire grief au Tribunal de la fonction publique de ne pas avoir pris en considération le fait que le remboursement opéré dans le bulletin de rémunération du mois de mai 2004 était nul, ce qui excèderait le cadre du litige porté devant le Tribunal de la fonction publique. Cet argument est manifestement dépourvu de pertinence et de fondement. D’une part, la présente branche ne vise pas à demander l’annulation du bulletin de rémunération du mois de mai 2004, mais à contester la détermination de l’acte faisant grief opérée par le Tribunal de la fonction publique. D’autre part, ainsi qu’il a été exposé ci-dessus, le litige en première instance avait bien en partie pour objet l’annulation du bulletin de rémunération du mois de mai 2004 en ce que celui-ci lui faisait application de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

71      Ensuite, quant au fond, la Commission soutient qu’il ressort de la requête en première instance que le recours avait bien pour objet la décision du 9 décembre 2004 de rejet de la réclamation R/436/04. Or, ce fait, qui n’est nullement contesté, ne démontre pas que l’acte faisant grief au requérant était la décision de soumettre les fonctionnaires des DOM aux dispositions de l’article 8, paragraphe 4, du statut, dès lors que, précisément, la réclamation R/436/04 avait notamment pour objet la contestation du bulletin de rémunération du mois de mai 2004 et que la requête identifiait explicitement l’acte faisant grief comme étant ledit bulletin de rémunération.

72      Enfin, la Commission fait valoir que, en tout état de cause, quand bien même l’acte attaqué aurait été le bulletin de rémunération du requérant du mois de mai 2004, le recours aurait également été tardif, puisque la décision rejetant la réclamation R/437/04, du 28 mai 2004 portant sur ledit bulletin de rémunération aurait été adoptée le 8 septembre 2004, soit antérieurement à la décision du 9 décembre 2004 de rejet de la réclamation R/436/04.

73      Outre que cet élément ne figure pas parmi les motifs de l’ordonnance attaquée, force est de constater que, en tout état de cause, il manque en fait. La réclamation R/437/04 avait, en effet, pour objet la contestation de la décision de l’AIPN du 25 mai 2004 fixant le délai de route du requérant pour l’année 2004 et ne visait pas le bulletin de rémunération du mois de mai 2004, de sorte que la décision de rejet de ladite réclamation, même s’il est vrai qu’elle aborde la question des dispositions applicables au requérant en matière de remboursement des frais de voyage en vue de rejeter les arguments du requérant, ne peut avoir pour seul objet que la fixation du délai de route du requérant.

74      Il convient toutefois de relever que l’erreur de droit commise par le Tribunal de la fonction publique n’est pas, en soi, de nature à invalider l’ordonnance attaquée.

75      En effet, si le requérant a effectivement visé son bulletin de rémunération comme étant l’acte lui faisant grief, c’est uniquement en ce que celui-ci lui faisait application de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. L’ensemble des moyens soulevés par le requérant dans la requête en première instance tendent ainsi à démontrer soit l’illégalité de l’application de cette disposition à sa situation, soit, par voie d’exception, l’illégalité de cette disposition elle-même en vue de ne pas s’en voir appliquer le régime.

76      Il convient à cet égard de rejeter l’argument du requérant selon lequel, à supposer même qu’il ait pris connaissance d’une telle décision, cette circonstance n’aurait permis au Tribunal de la fonction publique que de conclure à l’irrecevabilité du moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation de l’AIPN en ce qu’elle a considéré qu’il relevait de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, et non à l’irrecevabilité du recours dans son ensemble dès lors qu’il soulevait par ailleurs d’autres moyens, tirés notamment de l’illégalité de cette disposition. En effet, il y a lieu de rappeler que la possibilité d’invoquer l’illégalité d’une mesure de portée générale qui forme la base juridique de l’acte d’application attaqué ne constitue pas un droit d’action autonome et ne peut être exercée que de manière incidente, de sorte que l’irrecevabilité de l’action principale entraîne celle de l’exception d’illégalité et que, en l’absence d’un droit de recours principal, l’article 241 CE ne peut être invoqué (voir arrêt du Tribunal du 29 novembre 2006, Agne-Dapper e.a./Commission, T‑35/05, T‑61/05, T‑107/05, T‑108/05 et T‑139/05, non encore publié au Recueil, point 42, et la jurisprudence citée). Quant aux autres moyens invoqués dans la requête en première instance, outre que le requérant ne précise aucunement en quoi ils devraient être considérés comme recevables, il apparaît qu’ils visent à démontrer l’illégalité de la décision attaquée en ce qu’elle a fait application au requérant de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

77      Dès lors, au-delà de l’erreur constatée dans la détermination formelle de l’acte faisant grief au requérant, l’ordonnance attaquée ne saurait être invalidée s’il ressort de ses motifs que le requérant avait déjà pris connaissance, antérieurement à sa demande du 19 janvier 2004, d’une décision de l’AIPN faisant application à son égard des dispositions de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, et si, dès lors, c’est à juste titre que le Tribunal de la fonction publique a conclu, en substance, aux points 30 et 31 de ladite ordonnance, que la décision attaquée, dans la limite du cadre dans lequel le requérant la contestait, était un acte confirmatif d’un acte devenu définitif.

78      Le requérant contestant la validité desdits motifs dans le cadre des deuxième et troisième branches du second moyen, leur analyse sera réalisée à l’occasion de l’examen desdites branches.

 Sur la deuxième branche, tirée d’une erreur de droit dans l’interprétation des dispositions statutaires applicables

 Arguments des parties

79      Le requérant soutient que, en considérant, au point 27 de l’ordonnance attaquée, que le requérant avait pris connaissance à la lecture de la réponse du 23 juin 2003 de ce que « l’AIPN considérait son lieu d’origine, à savoir la Réunion, comme étant en dehors de l’Europe géographique, ce qui, s’agissant du remboursement des frais de voyage annuels, le faisait forcement relever du paragraphe 4 de l’article 8 de l’annexe VII du statut », le Tribunal de la fonction publique a repris à son compte des dispositions d’un vade-mecum de la Commission, le MAP 2000, qui seraient en contradiction avec le statut.

80      En outre, le requérant fait observer que, dès lors que l’AIPN a fixé son délai de route à deux jours, elle a nécessairement considéré que le lieu d’origine du requérant était situé en Europe aux fins de l’application de l’article 7 de l’annexe V du statut.

81      Cela se trouverait d’ailleurs confirmé par le fait que, à la suite de la demande du requérant du 13 décembre 2002 par laquelle celui-ci demandait à bénéficier de l’article 7, troisième alinéa, de l’annexe V du statut et se présentait comme ayant pour lieu d’origine un territoire situé en Europe, l’AIPN, dans la réponse du 19 décembre 2002, n’a pas contredit le requérant sur ce point et a invité ce dernier à produire des justificatifs.

82      De même, dans la décision du 23 décembre 2003, l’AIPN aurait rejeté l’argument du requérant fondé sur l’article 7, troisième alinéa, de l’annexe V du statut et tendant à l’octroi d’un délai de route de quatre jours, « au motif que – à la lumière des dispositions statutaires applicables – ses nécessités, telles qu’attestées par les justificatifs qu’il a produits, sont couvertes par le délai de route de deux jours déjà accordé », reconnaissant ainsi que cette disposition avait vocation à s’appliquer à la situation du requérant.

83      L’AIPN n’aurait pas non plus contesté l’affirmation du requérant selon laquelle il avait droit au remboursement de deux voyages par an au titre de l’article 8, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut, l’AIPN se référant elle-même à cette disposition en précisant que le fonctionnaire bénéficiant du remboursement de deux voyages annuels ne pouvait néanmoins bénéficier d’une dérogation à la fixation de son délai de route que sur la base d’un calcul portant sur un seul voyage annuel.

84      Enfin, s’agissant de la considération présentée à titre surabondant au point 32 de l’ordonnance attaquée, selon laquelle le requérant aurait choisi de ne pas former un recours contre le rejet de sa réclamation de 2003, ce dernier fait valoir que ce choix avait été motivé par le fait que l’explication fournie par l’AIPN quant aux délais de route lui paraissait cohérente et que cette décision indiquait sans équivoque qu’il relevait de l’article 8, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut.

85      Le requérant conclut de tout ce qui précède que le Tribunal de la fonction publique ne pouvait aboutir, sur la base des documents à sa disposition et de l’article 7 de l’annexe V du statut, qu’à la conclusion selon laquelle la décision attaquée en première instance était le premier acte attaquable aux termes duquel l’AIPN avait considéré qu’il relevait de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

86      La Commission considère que la deuxième branche du second moyen vise à contester l’appréciation des faits opérée par le Tribunal de la fonction publique au point 27 de l’ordonnance attaquée et consiste en une répétition des arguments exposés par le requérant sur ce point dans la requête en première instance.

87      Quant au grief soulevé par le requérant à l’égard du point 32 de l’ordonnance attaquée, la Commission fait valoir que, dès lors que ce point expose un motif à titre surabondant, il doit être rejeté comme manifestement non fondé.

88      Enfin, s’agissant du grief relatif à la référence faite par le Tribunal de la fonction publique au MAP 2000, la Commission soutient que le requérant est resté en défaut de démontrer, d’une part, que ce document méconnaissait les dispositions du statut et, d’autre part, que le Tribunal de la fonction publique avait fondé sa conclusion figurant au point 27 de l’ordonnance attaquée sur ce document. En tout état de cause, cette question n’aurait aucune incidence sur la recevabilité du recours dès lors que les délais prévus par l’article 90 du statut n’auraient pas été respectés par le requérant.

89      La Commission considère ainsi que la deuxième branche du second moyen doit être rejetée comme irrecevable ou, à tout le moins, comme non fondée.

 Appréciation du Tribunal

90      Au-delà de son intitulé formel, la présente branche vise à démontrer, conformément au point 37 du pourvoi, que le Tribunal de la fonction publique ne pouvait aboutir, sur la base des documents à sa disposition et de l’article 7 de l’annexe V du statut, qu’à la conclusion selon laquelle la décision attaquée en première instance était le premier acte attaquable aux termes duquel l’AIPN avait considéré qu’il relevait de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

91      Le requérant expose, en substance, trois arguments dans le cadre de la présente branche. D’une part, il reproche au Tribunal de la fonction publique de s’être fondé, au point 27 de l’ordonnance attaquée, sur les dispositions du MAP 2000 alors que celles-ci seraient contraires au statut. D’autre part, le requérant considère que, en fixant son délai de route à deux jours par an dans la réponse du 23 juin 2003, l’AIPN lui a nécessairement fait application de l’article 7, deuxième alinéa, second tiret, de l’annexe V du statut, lequel n’a vocation à s’appliquer qu’aux fonctionnaires dont le lieu d’affectation et le lieu d’origine se trouvent en Europe, conformément à l’article 7, cinquième alinéa, de l’annexe V du statut. Enfin, le requérant fait valoir qu’il ne saurait lui être reproché, au point 32 de l’ordonnance attaquée, de ne pas avoir contesté la décision du 23 décembre 2003, dès lors que cette décision lui semblait cohérente au regard du statut et que l’AIPN lui y aurait indiqué sans équivoque qu’il relevait de l’article 8, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut.

92      À titre liminaire, s’agissant de la fin de non-recevoir soulevée par la Commission, le Tribunal relève que, par son premier argument, le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique d’avoir fondé son raisonnement sur un document interne de la Commission prétendument illégal au regard du statut. Quant au deuxième argument du requérant, il tend à démontrer que la conclusion du Tribunal de la fonction publique selon laquelle il avait pris connaissance de ce que l’AIPN considérait son lieu d’origine comme étant situé en dehors de l’Europe procède d’une interprétation erronée du statut à l’origine d’une dénaturation de la réponse du 23 juin 2003. Contrairement aux allégations de la Commission, de tels griefs ne constituent donc pas une question d’appréciation des faits et, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 54 et 55 ci-dessus, ne sauraient non plus être considérés comme une répétition des arguments présentés en première instance. Il convient donc de les examiner au fond.

93      À cet égard, en ce qui concerne, tout d’abord, l’argument tiré de la prétendue illégalité des dispositions en cause du MAP 2000, il y a lieu de relever qu’il ne ressort pas du point 27 de l’ordonnance attaquée que le Tribunal de la fonction publique s’est fondé d’une quelconque manière sur lesdites dispositions. En outre, il convient de rappeler que, audit point 27, le Tribunal de la fonction publique vise à démontrer que le requérant avait pris connaissance, par la réponse du 23 juin 2003, de ce que l’AIPN considérait son lieu d’origine comme étant situé en dehors de l’Europe. Or, l’éventuelle illégalité des dispositions sur lesquelles se fonde cette décision ne serait pas susceptible d’affecter la réalité de cette prise de connaissance, à la supposer avérée. Il s’ensuit que l’argument doit, en tout état de cause, être rejeté comme inopérant.

94      En ce qui concerne, ensuite, le deuxième argument du requérant, celui-ci étant étroitement lié aux griefs développés par le requérant dans le cadre de la troisième branche du présent moyen, il convient de l’aborder à l’occasion de l’examen de ladite branche.

95      En ce qui concerne, enfin, le troisième argument du requérant dirigé à l’encontre du motif surabondant figurant au point 32 de l’ordonnance attaquée, il y a lieu de rappeler que, s’il est vrai que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre d’un pourvoi, un moyen dirigé contre un motif surabondant d’un arrêt du Tribunal de la fonction publique, dont le dispositif est fondé à suffisance de droit sur d’autres motifs, doit être rejeté (voir, en ce sens et par analogie, arrêts de la Cour du 22 décembre 1993, Pincherle/Commission, C‑244/91 P, Rec. p. I‑6965, point 25, et du 29 avril 2004, Commission/Kvaerner Warnow Werft, C‑181/02 P, Rec. p. I‑5703, point 49), il n’en demeure pas moins que, lorsque, dans le cadre d’un pourvoi, le Tribunal constate, en examinant l’un des moyens formulés par le requérant, qu’un motif de l’arrêt déféré, même retenu à titre surabondant par le Tribunal de la fonction publique, suffit à le justifier, il n’y a pas lieu pour le Tribunal d’examiner les autres moyens du pourvoi (voir, en ce sens et par analogie, ordonnance de la Cour du 24 janvier 1994, Boessen/CES, C‑275/93 P, Rec. p. I‑159, points 25 et 26).

96      Il s’ensuit que le grief formulé à l’encontre du point 32 de l’ordonnance attaquée ne peut d’emblée être rejeté comme inopérant, cette question dépendant du caractère fondé ou non des moyens formulés à l’encontre des autres motifs, exposés à titre principal, sur lesquels l’ordonnance attaquée est fondée. Ce grief ne sera donc examiné qu’à l’issue de l’analyse de la validité desdits motifs.

 Sur la troisième branche, tirée de l’erreur manifeste d’appréciation de certains faits

97      Le requérant soutient que plusieurs erreurs manifestes d’appréciation de certains faits ont conduit le Tribunal de la fonction publique à des conclusions juridiques erronées. Ces erreurs concerneraient les points 27 à 30 et 32 de l’ordonnance attaquée et justifieraient son annulation. Le requérant considère, en substance, que le Tribunal de la fonction publique a considéré à tort que l’AIPN avait pris, dès avant la décision attaquée en première instance, un acte faisant application à son égard, de manière implicite ou explicite, de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

98      La Commission soutient que la présente branche doit être considérée comme irrecevable dans son ensemble dès lors qu’elle consiste en une contestation de l’appréciation des faits opérée par le Tribunal de la fonction publique aux points 27 à 30 de l’ordonnance attaquée.

99      À cet égard, le Tribunal rappelle que, conformément à la jurisprudence de la Cour, sont recevables au stade du pourvoi des griefs relatifs à la constatation des faits et à leur appréciation dans la décision attaquée lorsque le requérant allègue que le Tribunal de la fonction publique a effectué des constatations dont l’inexactitude matérielle résulte des pièces du dossier ou qu’il a dénaturé les éléments de preuve qui lui ont été soumis (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 24 octobre 2002, Aéroports de Paris/Commission, C‑82/01 P, Rec. p. I‑9297, point 56).

100    Il est vrai que, formellement, la présente branche vise, d’après son intitulé, à démontrer des erreurs manifestes d’appréciation des faits commises par le Tribunal de la fonction publique et non une dénaturation en tant que telle.

101    Toutefois, au-delà des termes mêmes utilisés par le requérant, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence, une telle dénaturation existe lorsque, sans avoir recours à de nouveaux éléments de preuve, l’appréciation des éléments de preuve existants apparaît manifestement erronée (voir, par analogie, arrêt PKK et KNK/Conseil, précité, point 37). Or, il ressort tant de l’intitulé de la présente branche que de son contenu que tel est précisément ce que le requérant tend à démontrer. Il ne saurait donc être considéré, de manière globale, que la troisième branche du second moyen est irrecevable. Cela ne préjuge toutefois pas de l’examen quant à l’éventuelle irrecevabilité de certains arguments exposés dans ce cadre.

102    Il convient d’examiner les griefs du requérant dirigés successivement contre les points 27, 28, 29 et 32 de l’ordonnance attaquée.

 Sur le point 27 de l’ordonnance attaquée

103    Il convient de rappeler qu’il a été constaté, dans le cadre de l’examen du premier moyen, que le motif exposé par le Tribunal de la fonction publique au point 27 de l’ordonnance attaquée devait être invalidé dès lors qu’il reposait sur une analyse de documents au sujet desquels le requérant n’avait pas pu prendre utilement position.

104    Dans un souci d’économie de procédure, le Tribunal estime néanmoins nécessaire d’examiner le grief du requérant tiré de la dénaturation des éléments de preuve dont serait entaché le raisonnement du Tribunal de la fonction publique au point 27 de l’ordonnance attaquée.

105    Il convient d’examiner à cette occasion les arguments concernant ledit point exposés dans la troisième branche du premier moyen et dans la deuxième branche du présent moyen.

–       Arguments des parties

106    Le requérant prétend en substance que le Tribunal de la fonction publique a apprécié de manière manifestement erronée la réponse du 23 juin 2003 en affirmant que le requérant avait pris connaissance, à sa lecture, de ce que l’AIPN considérait son lieu d’origine comme étant situé en dehors de l’« Europe géographique », ce qui, s’agissant du remboursement des frais de voyage annuels, le faisait forcément relever du paragraphe 4 de l’article 8 de l’annexe VII du statut.

107    Il soutient que le Tribunal de la fonction publique a effectué une lecture biaisée et parcellaire de la réponse du 23 juin 2003. En effet, cette note ne mentionnerait aucunement que l’AIPN considérait que le requérant relevait de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, l’AIPN n’ayant pas pris position sur la question du lieu d’origine du requérant.

108    La Commission souligne que la réponse du 23 juin 2003 indique expressément que « [l]e délai de route pour les lieux d’origine hors Europe (géographique) est de deux jours » et qu’« [u]ne dérogation est possible si l’intéressé démontre avoir voyagé plus de 48 heures », de sorte que l’AIPN aurait clairement informé le requérant qu’elle le considérait comme ayant un lieu d’origine en dehors de l’Europe et donc qu’il relevait de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. Elle estime ainsi que le constat figurant au point 27 de l’ordonnance attaquée reflète fidèlement le contenu de la note du 23 juin 2003.

–       Appréciation du Tribunal

109    Conformément à la jurisprudence citée au point 101 ci-dessus, les allégations du requérant relatives à l’interprétation donnée par le Tribunal de la fonction publique de la réponse du 23 juin 2003 équivalent à un grief de dénaturation et doivent donc être considérées comme recevables.

110    Aux termes de la réponse du 23 juin 2003, l’AIPN a indiqué au requérant ce qui suit :

« 1. Octroi du délai de route pour congé annuel

Sur la base de la mise en œuvre de MAP 2000, la Mesure 11 : Vade-mecum pour la gestion des congés (visible sur notre site IntraTREN), prévoit au niveau du chapitre ‘Délai de route lié au congé annuel’ que :

–        Si le fonctionnaire demande le remboursement des frais de voyage annuels en avion, le délai de route est déterminé comme suit :

         –                jusqu’à 900 km :                   1 jour pour aller et retour,

         –                au-delà de 900 km :                   2 jours pour aller et retour.

–        Le délai de route pour les lieux d’origine hors Europe (géographique) est de deux jours. Une dérogation est possible si l’intéressé démontre avoir voyagé plus de 48 heures.

Étant donné que vous avez demandé auprès de l’Office de gestion et liquidation des droits individuels (PMO) le remboursement de vos frais de voyage et que de toute façon vous avez voyagé moins de 48 heures (41 h 30 selon vos justificatifs), votre délai de route pour congé annuel concernant l’année 2003 reste fixé à 2 jours. »

111    Le Tribunal de la fonction publique en a déduit que, à la lecture de cette note, le requérant prenait clairement connaissance du fait que l’AIPN considérait son lieu d’origine comme étant situé en dehors de l’« Europe géographique », ce qui, s’agissant du remboursement des frais de voyage annuels, le faisait forcément relever du paragraphe 4 de l’article 8 de l’annexe VII du statut.

112    Or, il convient de relever non seulement que la réponse du 23 juin 2003 ne procède pas explicitement à la qualification du lieu d’origine du requérant comme étant situé en Europe ou en dehors de l’Europe au sens des dispositions pertinentes du statut, mais en outre qu’il ne saurait être considéré qu’une telle qualification y est implicitement opérée, encore moins clairement, ainsi que l’affirme le Tribunal de la fonction publique dans l’ordonnance attaquée.

113    Il ressort, en effet, de la réponse du 23 juin 2003 que l’AIPN a, en premier lieu, rappelé les règles du MAP 2000 applicables en matière de délai de route. À cette occasion, si l’AIPN a certes fait état du régime applicable aux fonctionnaires dont le lieu d’origine est situé en dehors de l’« Europe géographique », elle a également décrit le régime applicable aux fonctionnaires demandant le remboursement des frais de voyage annuels en avion, à savoir l’octroi de deux jours de délai de route pour l’aller-retour au-delà de 900 km, cette disposition ayant même été rédigée en caractères gras. Or, conformément à l’article 7, deuxième alinéa, de l’annexe V du statut, dont la règle du MAP 2000 citée constitue la reprise quasi textuelle, ce dernier régime est applicable aux fonctionnaires dont le lieu d’affectation et le lieu d’origine se trouvent en Europe.

114    Par ailleurs, l’AIPN a, en second lieu, pris position quant à la demande du requérant visant à obtenir quatre jours de délai de route en indiquant que, étant donné que celui-ci avait demandé le remboursement de ses frais de voyage et que « de toute façon » il avait voyagé moins de 48 heures, le délai de route restait fixé à deux jours.

115    Or, d’une part, en relevant que le requérant avait demandé le remboursement de ses frais de voyage, ce qui fait nécessairement référence à la condition énoncée dans la disposition du MAP 2000 concernant les fonctionnaires ayant leur lieu d’origine en Europe, et que le requérant avait voyagé moins de 48 heures, ce qui fait référence, au contraire, aux dispositions du MAP 2000 concernant les fonctionnaires ayant leur lieu d’origine en dehors de l’« Europe géographique », et, d’autre part, en faisant précéder cette dernière constatation de l’expression « de toute façon », l’AIPN a exprimé l’idée selon laquelle, sans même qu’il y ait lieu de qualifier le lieu d’origine du requérant, l’application de l’un ou de l’autre des deux régimes envisagés ne devait pas conduire à une modification du délai de route de deux jours accordé au requérant.

116    En tirant la conclusion, à partir de la réponse du 23 juin 2003, que le requérant avait clairement pris connaissance de ce que l’AIPN considérait son lieu d’origine comme étant en dehors de l’« Europe géographique », le Tribunal de la fonction publique en a donc dénaturé les termes et le sens, ladite réponse étant, à l’inverse, manifestement caractérisée par l’absence de prise de position de l’AIPN à cet égard.

 Sur le point 28 de l’ordonnance attaquée

–       Arguments des parties

117    Le requérant soutient que l’affirmation, selon laquelle « l’impossibilité d’obtenir un remboursement forfaitaire des frais de voyage annuels est une caractéristique propre au régime du paragraphe 4 de l’article 8 de l’annexe VII du statut, par opposition à celui des paragraphes 1 à 3 du même article », est erronée. En effet, en réalité, lorsque l’AIPN n’est pas en mesure de calculer la distance en chemin de fer, celle-ci inviterait « oralement » les fonctionnaires concernés à voyager en avion afin de les rembourser eu égard aux frais réellement encourus, y compris dans les cas où leur lieu d’origine est considéré comme étant situé en Europe.

118    En tout état de cause, le fait qu’aucune décision spéciale fondée sur l’article 8, paragraphe 2, de l’annexe VII du statut n’ait été adoptée démontrerait que l’impossibilité de fixer un montant forfaitaire pour les remboursements des frais de voyage concernait également certains fonctionnaires relevant de l’article 8, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut.

119    Plus généralement, le requérant conteste le raisonnement du Tribunal de la fonction publique fondé sur « la présomption erronée que l’administration [l’]aurait informé […] avant juin ou juillet 2003 de sa thèse sur l’interprétation du critère ‘en Europe’ », alors qu’il n’en aurait été informé pour la première fois qu’à la lecture de la décision attaquée en première instance, laquelle serait le premier acte faisant grief par lequel l’AIPN a décidé, de manière implicite ou explicite, qu’il relevait de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

120    La Commission fait valoir que les affirmations du requérant relatives à la prétendue pratique non écrite de la Commission et au prétendu remboursement de frais réels au bénéfice de certains fonctionnaires relevant de l’article 8, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut ne sont pas établies à suffisance de droit.

–       Appréciation du Tribunal

121    Il convient de relever que, au point 28 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique se fonde sur une analyse de la réclamation du 4 juillet 2003, concernant son délai de route, dont il ressortirait que le requérant savait que les fonctionnaires originaires des DOM ne pouvaient pas bénéficier du remboursement forfaitaire de leurs frais de voyage annuels, caractéristique qui serait propre au régime de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

122    À titre liminaire, sans même qu’il y ait lieu de se prononcer sur les allégations du requérant exposées aux points 117 et 118 ci-dessus, dont l’exactitude est contestée par la Commission, il y a lieu de constater que le contenu de la réclamation du 4 juillet 2003 ne démontre pas que le requérant avait déjà fait antérieurement l’objet d’une décision de l’AIPN lui faisant application de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut qu’il aurait été en mesure de contester, ni même que l’AIPN lui avait indiqué qu’elle estimait qu’il relevait de cette disposition.

123    En effet, il convient de constater que, d’une part, s’il ressort de la réclamation du 4 juillet 2003 que le requérant affirme que les fonctionnaires des DOM ne bénéficient pas du paiement forfaitaire, cela ne permet d’établir ni qu’il avait fait personnellement l’objet d’une telle décision, ni qu’il avait connaissance des motifs qui en étaient à l’origine, et en particulier que cela résultait de l’application de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, ni encore, a fortiori, que l’AIPN lui avait fait part de tels motifs. D’autre part, il ressort au contraire de cette réclamation que le requérant n’envisageait pas que cette impossibilité résultait de la qualification, sur la base d’un critère purement géographique, des DOM comme étant situés en dehors de l’Europe. Ainsi, le requérant y indique que la réponse du 23 juin 2003, relative à son délai de route, ne lui semble pas refléter le fait que l’article 8, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut prévoit que les agents dont la distance en chemin de fer entre le lieu d’affectation et le lieu d’origine dépasse 725 km ont le droit à deux allers-retours par année civile. Le requérant n’envisageait ainsi aucunement que l’administration le faisait relever de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, mais partait au contraire du principe que l’article 8, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut lui était applicable.

124    Dès lors, il ne peut être déduit de la réclamation du 4 juillet 2003, sans que ses termes en soient dénaturés, que le requérant avait pris connaissance, à cette époque au plus tard, de ce que l’AIPN le considérait comme relevant de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, ainsi que des motifs de cette décision.

125    Il s’ensuit que, ainsi que le soutient le requérant, les motifs figurant au point 28 de l’ordonnance attaquée ne sont pas susceptibles de soutenir la conclusion du Tribunal de la fonction publique figurant au point 30 de ladite ordonnance.

 Sur le point 29 de l’ordonnance attaquée

126    Au point 29 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a considéré ce qui suit :

« [I]l est constant que le requérant n’a présenté pour remboursement, au titre de l’année 2003, que les pièces justificatives relatives à un seul voyage et que son bulletin de rémunération du mois de juillet 2003 (l’administration procédant normalement au remboursement forfaitaire des frais de voyage annuels avec le versement du salaire afférent à ce mois, conformément à l’article 9 des Dispositions générales d’exécution relatives à l’application de l’article 8 de l’annexe VII du statut) ne fait pas état du remboursement d’un deuxième voyage. Or, les deux régimes précités se distinguaient également par le fait que les fonctionnaires relevant du paragraphe 4 n’avaient droit au remboursement que d’un seul voyage, tandis que ceux relevant des paragraphes 1 à 3 pouvaient se faire rembourser deux voyages par an, si, comme c’était le cas du requérant, la distance entre le lieu d’origine et le lieu d’affectation était d’au moins 725 km. Par ailleurs, il a été jugé que le remboursement forfaitaire des frais de voyage fait partie des domaines dans lesquels l’existence et la portée des mesures individuelles prises par l’administration peuvent, en raison de leur objet même, clairement ressortir du décompte des sommes versées, contenu dans le bulletin mensuel de rémunération (arrêt du [Tribunal de la fonction publique] du 28 juin 2006, Grünheid/Commission, F-101/05, non encore publié au Recueil, point 43). »

–       Arguments des parties

127    Le requérant souligne que le Tribunal de la fonction publique ne pouvait déduire de la circonstance qu’il n’avait pas demandé le remboursement des frais concernant un deuxième voyage en 2003 qu’il avait connaissance de ce qu’il relevait de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. Le requérant fait valoir, en effet, que le défaut d’exercice d’un droit par un fonctionnaire ne saurait équivaloir à une reconnaissance implicite de sa part de ce qu’il n’est pas éligible à ce droit.

128    Lors de l’audience, le requérant a indiqué, en substance, que, à l’époque, il avait considéré que le bulletin de rémunération du mois de juillet 2003 faisait droit à sa demande de remboursement des frais de voyage et qu’il ne pouvait avoir connaissance de ce que ce remboursement constituait une décision prise sur le fondement de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

129    À cette même occasion, la Commission a fait valoir que, dès lors que le bulletin de rémunération du requérant du mois de juillet 2003 ne faisait pas état d’un paiement forfaitaire équivalant à deux voyages aller-retour vers l’île de la Réunion, mais uniquement du remboursement des frais de voyage présentés par le requérant, celui-ci aurait dû comprendre que ledit bulletin de rémunération constituait une décision de l’AIPN de lui refuser le bénéfice du régime des fonctionnaires dont le lieu d’origine est situé en Europe.

–       Appréciation du Tribunal

130    Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 8, paragraphe 2, deuxième alinéa, de l’annexe VII du statut, lorsque la distance en chemin de fer entre le lieu d’affectation et le lieu d’origine est supérieure à 500 km et dans les cas où l’itinéraire usuel comporte la traversée d’une mer, l’intéressé a droit, sur présentation des billets, au remboursement des frais de voyage en avion. Cette disposition prévoit ainsi la simple faculté, et non l’obligation, pour le fonctionnaire dont le lieu d’origine est situé en Europe et qui remplit les conditions qui y sont énoncées, de demander le remboursement de ses frais de voyage en avion, et ce à raison de deux voyages par an si la distance en chemin de fer entre le lieu d’affectation et le lieu d’origine est d’au moins 725 km, conformément à l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, deuxième tiret, de l’annexe VII du statut.

131    Il s’ensuit que le simple fait que le requérant a demandé le remboursement de ses frais concernant un seul voyage, de sorte que seul ce voyage a fait l’objet d’un tel remboursement, ne saurait signifier ni que celui-ci avait connaissance de ce que l’AIPN ne le faisait pas relever du régime de l’article 8, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut, ni, a fortiori, que l’AIPN considérait que le requérant relevait de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. L’argument du requérant sur ce point est donc fondé.

132    Force est toutefois de constater que, malgré son imprécision, le raisonnement figurant au point 29 de l’ordonnance attaquée peut également être compris en ce sens que, si le requérant avait été considéré par l’AIPN comme relevant de l’article 8, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut, bien que n’ayant introduit une demande de remboursement des frais afférents qu’à un seul voyage en avion, il aurait tout de même obtenu le paiement de ses frais de voyage afférents au second voyage annuel sur une base forfaitaire. En revanche, il n’aurait pas obtenu ce dernier paiement forfaitaire dans le cadre de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. Étant donné qu’il était constant que le bulletin de rémunération du requérant du mois de juillet 2003 ne faisait pas état du remboursement d’un second voyage, le Tribunal de la fonction publique en a conclu que ledit bulletin de rémunération constituait une décision faisant application au requérant de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

133    À cet égard, il convient de relever que, contrairement à l’affirmation figurant au point 29 de l’ordonnance attaquée, les dispositions générales d’exécution relatives à l’application de l’article 8 de l’annexe VII du statut en vigueur avant le 1er mai 2004 (publiées aux Informations administratives n° 496, du 3 mars 1986) ne prévoyaient pas que l’administration procède au remboursement forfaitaire au mois de juillet, mais « vers le milieu de chaque année », conformément à leur article 9.

134    Interrogée par le Tribunal à l’audience sur ce point, la Commission a indiqué que le paiement forfaitaire des frais de voyage au mois de juillet est prévu par l’article 8 desdites dispositions générales d’exécution dans leur version en vigueur à partir du 1er mai 2004 (publiée aux Informations administratives n° 56, du 7 juin 2004), non encore applicables à l’époque des faits. S’agissant toutefois de la version de ces dispositions générales d’exécution applicables au bulletin de rémunération du requérant du mois de juillet 2003, la Commission n’a pas été en mesure de préciser si l’indication « vers le milieu de chaque année » correspondait, en pratique, à un mois donné au cours duquel le paiement forfaitaire était systématiquement effectué, ni, a fortiori, de faire état d’un document interne qui fixerait concrètement à quel mois de l’année le paiement forfaitaire était effectué avant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions générales d’exécution.

135    Or, il ressort de l’examen du dossier que le requérant a effectué un voyage en avion vers l’île de la Réunion en avril 2003 pour lequel il a demandé le remboursement de ses frais au plus tard le 23 juin 2003, l’AIPN ayant relevé cette circonstance dans la réponse du 23 juin 2003.

136    Dès lors, en l’absence de tout autre élément relevé par le Tribunal de la fonction publique permettant d’en identifier la nature, le paiement des frais de voyage constaté dans le bulletin de rémunération du mois de juillet 2003 pouvait, à première vue, avoir été accordé sur la base tant du paragraphe 2 que du paragraphe 4 de l’article 8 de l’annexe VII du statut, et ce précisément eu égard à la circonstance relevée par le Tribunal de la fonction publique que le requérant n’avait demandé, avant le mois de juillet 2003, le remboursement que pour un seul voyage.

137    En réponse à une question écrite du Tribunal l’invitant à décrire, en se fondant sur les dispositions générales d’exécution relatives à l’application de l’article 8 de l’annexe VII, les modalités du paiement forfaitaire prévu à l’article 8, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut, la Commission a néanmoins affirmé que, lorsqu’un fonctionnaire, dont le lieu d’origine est situé en Europe, introduit, durant la première moitié de l’année civile, une demande de remboursement de ses frais de voyage en avion sur la base de l’article 8, paragraphe 2, deuxième alinéa, de l’annexe VII du statut, seule la différence entre les frais présentés et le montant forfaitaire afférent à un voyage lui est versée, tandis qu’il reçoit l’intégralité du paiement forfaitaire (afférent à un ou à deux voyages selon la distance entre le lieu d’affectation et le lieu d’origine) à l’occasion de son bulletin de rémunération du mois de juillet. Dès lors que le bulletin de rémunération du requérant du mois de juillet 2003 ne faisait pas état d’un paiement forfaitaire équivalant à deux voyages aller-retour vers l’île de la Réunion, mais uniquement du remboursement des frais de voyage présentés par le requérant, la Commission considère que celui-ci aurait dû comprendre que ledit bulletin de rémunération constituait une décision de l’AIPN de lui refuser le bénéfice du régime des fonctionnaires dont le lieu d’origine est situé en Europe.

138    Toutefois, à supposer même que telles soient effectivement les modalités de paiement et de remboursement des frais de voyage qui sont pratiquées à la Commission, il convient d’emblée de relever que, dans l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique n’en fait pas état en vue de démontrer que le requérant devait déduire de son bulletin de rémunération du mois de juillet 2003 que l’administration lui avait fait application de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. En tout état de cause, force est de constater que la Commission n’étaye aucunement cette description desdites modalités par une référence à un quelconque instrument, que ce soit le statut, les dispositions générales d’exécution relatives à l’application de l’article 8 de l’annexe VII ou tout autre document, et ce alors même que le Tribunal l’y avait expressément invitée, dont le requérant aurait pu prendre connaissance et qui aurait nécessairement dû l’amener à déduire de son bulletin de rémunération que le bénéfice de l’article 8, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut lui était refusé.

139    À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la communication de la fiche mensuelle de traitement a pour effet de faire courir les délais de réclamation et de recours contre une décision administrative lorsque cette fiche fait apparaître clairement l’existence et la portée de cette décision (arrêt de la Cour du 21 février 1974, Kortner e.a./Conseil e.a., 15/73 à 33/73, 52/73, 53/73, 57/73 à 109/73, 116/73, 117/73, 123/73, 132/73 et 135/73 à 137/73, Rec. p. 177, point 18 ; ordonnance du Tribunal du 24 mars 1998, Becret-Danieau e.a./Parlement, T‑232/97, RecFP p. I‑A‑157 et II‑495, points 31 et 32, et arrêt du Tribunal du 16 février 2005, Reggimenti/Parlement, T‑354/03, RecFP p. I‑A‑33 et II‑147, points 38 et 39). Toutefois, en tant qu’aménagement au principe énoncé à l’article 25 du statut, et selon lequel toute décision individuelle prise en application du statut doit être communiquée par écrit au fonctionnaire intéressé, cette hypothèse ne doit pas recevoir une interprétation extensive, de sorte que la condition selon laquelle la fiche mensuelle de traitement doit faire apparaître clairement tant l’existence que la portée de la décision doit être strictement vérifiée.

140    Or, en l’espèce, non seulement les dispositions générales d’exécution de l’article 8 de l’annexe VII du statut applicables au bulletin de rémunération en cause ne prévoyaient pas que le versement du paiement forfaitaire était systématiquement effectué au mois de juillet, mais de surcroît, ni le Tribunal de la fonction publique dans l’ordonnance attaquée ni la Commission ne justifient en quoi le requérant pouvait clairement comprendre dudit bulletin, d’une part, que le paiement forfaitaire lui était refusé et, d’autre part, que le fait qu’il se soit vu rembourser l’intégralité de ses frais de voyage, et non la différence entre les frais présentés et le montant forfaitaire afférent à un voyage, signifiait qu’il relevait du régime de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. S’ajoute à cela le fait que, ainsi qu’il a été constaté précédemment, dans la réponse du 23 juin 2003, l’AIPN avait laissé subsister un doute quant à la question de savoir si le requérant relevait, s’agissant des délais de route, du régime applicable aux agents dont le lieu d’origine est situé en Europe ou de celui applicable aux agents dont le lieu d’origine est situé en dehors de l’Europe.

141    Dès lors, c’est à bon droit que le requérant soutient qu’il ne pouvait prendre connaissance, à partir de son bulletin de rémunération du mois de juillet 2003, que l’AIPN lui avait fait application de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. Il s’ensuit que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en jugeant que ledit bulletin de rémunération avait pour effet de faire courir les délais de réclamation et de recours contre la décision de l’AIPN de faire application, à l’égard du requérant, du régime applicable aux fonctionnaires dont le lieu d’origine est situé en dehors de l’Europe, dès lors que ni l’existence ni la portée de cette décision ne ressortaient clairement du bulletin de rémunération du requérant du mois de juillet 2003.

142    Il résulte de tout ce qui précède que c’est à tort que le Tribunal de la fonction publique a conclu, au point 30 de l’ordonnance attaquée, que, au plus tard à la fin du mois de juillet 2003, le requérant avait connaissance de la décision de l’administration lui faisant application de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, des conséquences de cette décision ainsi que des motifs ayant conduit la Commission à lui appliquer ces règles.

143    Dans ces circonstances, il convient d’examiner les griefs du requérant dirigés contre le point 32 de l’ordonnance attaquée, exposé par le Tribunal de la fonction publique à titre surabondant.

 Sur le point 32 de l’ordonnance attaquée

144    Au point 32 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a relevé, à titre surabondant, ce qui suit :

« [L]es griefs formulés dans la première réclamation du requérant, en 2003, relative au délai de route sont essentiellement les mêmes que ceux visant à contester les différences de régime de remboursement des frais de voyage selon que le lieu d’origine d’un fonctionnaire se trouve sur le continent européen ou en dehors de celui-ci, différend qui constitue l’objet de la présente affaire. Or, si le requérant a choisi de ne pas former un recours contre le rejet de sa réclamation de 2003, lui reconnaître qu’il était en droit d’entamer, de manière recevable, après l’expiration du délai d’un tel recours, la procédure précontentieuse de la présente affaire, équivaudrait en substance à une extension des délais de recours, laquelle n’est cependant à la disposition ni des parties ni du juge communautaire (arrêt du Tribunal de première instance du 26 septembre 1990, F/Commission, T‑122/89, Rec. p. II‑517, point 23 ; ordonnance du Tribunal de première instance du 12 février 1995, Grassi/Commission, T‑552/93, RecFP p. I‑A‑33 et II‑125, point 23 ; arrêt du Tribunal de première instance du 11 mars 1999, Herold/Commission, T‑257/97, RecFP p. I-A-49 et II-251, point 43). »

145    Le Tribunal de la fonction publique en a déduit que, dès lors que le requérant n’avait pas introduit de recours contre la décision de rejet de la réclamation du 4 juillet 2003, relative au délai de route, lui permettre de formuler des griefs « essentiellement » identiques dans le cadre d’un recours contre une décision relative au remboursement des frais de voyage constituerait une extension des délais de recours.

–       Arguments des parties

146    Le requérant fait valoir, dans le cadre de la deuxième branche du second moyen, qu’il n’a pas introduit de recours contre la décision de rejet de la réclamation du 4 juillet 2003 au motif que l’explication donnée par l’AIPN concernant les délais de route lui paraissait cohérente avec le statut et que, selon lui, cette décision indiquait sans équivoque qu’il relevait de l’article 8, paragraphes 1 à 3, de l’annexe VII du statut. Ainsi, la décision attaquée en première instance serait le premier acte attaquable par lequel l’AIPN a fait, implicitement mais nécessairement, application à l’égard du requérant de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

147    La Commission soutient que ce grief est manifestement non fondé, dès lors qu’il vise un motif exposé à titre surabondant, et ne se prononce pas sur le fond de l’argumentation du requérant.

–       Appréciation du Tribunal

148    Il y a lieu de rappeler qu’il est vrai que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre d’un pourvoi, un moyen dirigé contre un motif surabondant d’un arrêt du Tribunal de la fonction publique, dont le dispositif est fondé à suffisance de droit sur d’autres motifs, doit être rejeté (voir, par analogie, arrêt Pincherle/Commission, précité, point 25 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt Commission/Kvaerner Warnow Werft, précité, point 49). Toutefois, en l’espèce, ainsi qu’il a été constaté précédemment, aucun des motifs exposés par le Tribunal de la fonction publique à titre principal ne permet de justifier l’irrecevabilité du recours en première instance. Il y a donc lieu, pour le Tribunal, d’examiner le grief du requérant dirigé contre le motif exposé à titre surabondant au point 32 de l’ordonnance attaquée et de déterminer si ledit motif suffit, à lui seul, à justifier l’irrecevabilité dudit recours.

149    À titre liminaire, il convient de relever que le simple fait qu’un requérant a soulevé certains chefs de contestation dans une réclamation ne saurait le rendre irrecevable à soulever les mêmes chefs de contestation à l’occasion d’une réclamation contre une décision qui lui ferait grief de manière autonome.

150    Or, force est de constater que la réclamation du 4 juillet 2003, dont il est fait état au point 32 de l’ordonnance attaquée, était dirigée contre la décision du 23 juin 2003, relative à la fixation du délai de route du requérant, alors que la réclamation R/436/04, du 28 mai 2004, ayant été formulée préalablement à l’introduction du recours en première instance, était dirigée, notamment, contre le bulletin de rémunération du requérant du mois de mai 2004, en ce que celui-ci constituerait une décision lui faisant application de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. Cette décision concernait ainsi le régime applicable au requérant en matière de frais de voyage et lui faisait donc grief de manière autonome et distincte par rapport à la décision du 23 juin 2003, relative à la fixation de son délai de route. Le contenu de la réclamation du 4 juillet 2003 n’était donc pas susceptible, en soi, d’avoir une quelconque incidence sur la recevabilité de la réclamation R/436/04, du 28 mai 2004, dès lors que leurs objets étaient différents.

151    Il s’ensuit que le motif présenté au point 32 de l’ordonnance attaquée n’aurait de pertinence que s’il tendait à démontrer que la décision attaquée en première instance était confirmative de la décision du 23 décembre 2003 en ce que, dans cette dernière, il avait déjà été fait application au requérant de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

152    Le point 32 de l’ordonnance attaquée n’indiquant aucunement que, dans la décision du 23 décembre 2003, il avait été fait une telle application ni, a fortiori, n’exposant les motifs pour lesquels il y aurait lieu de le considérer, il convient de conclure qu’il n’est pas susceptible de justifier l’irrecevabilité du recours en première instance.

153    En tout état de cause, force est de constater que la décision du 23 décembre 2003 ne saurait constituer une décision faisant application au requérant de l’article 8, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, dès lors que cette dernière disposition concerne les frais de voyage et que ladite décision a pour objet la fixation du délai de route du requérant.

154    Est dépourvu d’incidence à cet égard le fait que ces deux décisions aient éventuellement un élément commun, à savoir la considération selon laquelle le lieu d’origine du requérant devait être qualifié comme étant situé en dehors de l’Europe au sens du statut. En effet, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, constituent des actes ou des décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation les seules mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter directement et immédiatement les intérêts du requérant, en modifiant, de façon caractérisée, la situation juridique de celui-ci (voir arrêt du Tribunal du 13 juillet 2000, Hendrickx/Cedefop, T‑87/99, RecFP p. I‑A‑147 et II‑679, point 37, et la jurisprudence citée). Or, cela ne saurait être le cas d’une telle qualification, laquelle constitue une simple opération intellectuelle préalable à la décision déterminant les droits statutaires de l’intéressé.

155    Il convient d’en conclure que, en considérant que constituerait une extension des délais de recours le fait de permettre au requérant, dans le cadre d’une réclamation contre une décision relative au remboursement des frais de voyage, de formuler des griefs « essentiellement » identiques à ceux formulés dans le cadre d’une réclamation contre une décision d’une autre nature et lui faisant grief de manière distincte, à savoir une décision relative à la fixation de son délai de route, le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit.

156    Il résulte de tout ce qui précède qu’aucun des motifs exposés par le Tribunal de la fonction publique dans l’ordonnance attaquée n’est de nature à justifier l’irrecevabilité du recours en première instance.

157    Il convient donc d’accueillir le pourvoi et d’annuler l’ordonnance attaquée dans son intégralité.

158    L’affaire n’étant pas en état d’être jugée, il y a lieu de la renvoyer devant le Tribunal de la fonction publique, conformément à l’article 13 de l’annexe I du statut de la Cour, et de réserver les dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

déclare et arrête :

1)      L’ordonnance du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne du 29 juin 2006, Chassagne/Commission (F-11/05, RecFP p. I‑A‑1‑65 et II‑A‑1‑241), est annulée.

2)      L’affaire est renvoyée devant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne.

3)      Les dépens sont réservés.

Jaeger

Tiili

Azizi

Meij

 

       Vilaras

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 septembre 2008.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger

Table des matières


Cadre juridique

Faits à l’origine du litige et procédure en première instance

Sur l’ordonnance attaquée

Sur le pourvoi

1.  Procédure

2.  Conclusions des parties

En droit

1.  Sur le premier moyen, tiré de l’irrégularité de la procédure en première instance

Sur l’impossibilité pour le requérant de présenter ses observations relatives à certains documents sur lesquels est fondée l’ordonnance attaquée

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur le défaut de prise en considération de certains éléments essentiels exposés par le requérant dans ses mémoires

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur le défaut de prise en considération de certains documents versés à la procédure

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

2.  Sur le second moyen, tiré de la violation du droit communautaire

Sur la première branche, tirée de la dénaturation des moyens formulés dans la requête en première instance

Sur la deuxième branche, tirée d’une erreur de droit dans l’interprétation des dispositions statutaires applicables

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur la troisième branche, tirée de l’erreur manifeste d’appréciation de certains faits

Sur le point 27 de l’ordonnance attaquée

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur le point 28 de l’ordonnance attaquée

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur le point 29 de l’ordonnance attaquée

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur le point 32 de l’ordonnance attaquée

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal


* Langue de procédure : le français.