Language of document : ECLI:EU:T:2011:120

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

24 mars 2011 (*)

« FEOGA – Section ‘Garantie’ – Dépenses exclues du financement communautaire – Organisation commune des marchés dans le secteur du sucre – Article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1663/95 et article 11, paragraphes 1 et 2, du règlement (CE) n° 885/2006 – Évaluation du risque de préjudice financier pour le FEOGA – Principe de proportionnalité »

Dans l’affaire T‑184/09,

République hellénique, représentée par M. V. Kontolaimos et Mmes E. Leftheriotou et V. Karra, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. F. Jimeno Fernández et Mme A. Markoulli, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2009/253/CE de la Commission, du 19 mars 2009, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie », et du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) (JO L 75, p. 15), dans la mesure où elle exclut certaines dépenses effectuées par la République hellénique dans le cadre de l’organisation commune des marchés dans le secteur du sucre,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. E. Moavero Milanesi, président, N. Wahl (rapporteur) et S. Soldevila Fragoso, juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 18 novembre 2010,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

 Réglementation générale relative au financement de la politique agricole commune

1        Le règlement (CE) nº 1258/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 160, p. 103), régit les dépenses effectuées du 1er janvier 2000 au 16 octobre 2006 dans le cadre du financement de la politique agricole commune.

2        L’article 1er, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement n° 1258/1999 prévoit que la section « Garantie » du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA) finance les restitutions à l’exportation vers des pays tiers et les interventions destinées à la régularisation des marchés agricoles dans la mesure où, conformément à l’article 2 dudit règlement, elles sont entreprises selon les règles communautaires dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles.

3        Selon l’article 7, paragraphe 4, de ce même règlement, la Commission européenne décide des dépenses à écarter du financement communautaire lorsqu’elle constate que des dépenses n’ont pas été effectuées conformément aux règles communautaires. Cette disposition prévoit également la procédure précédant l’adoption de la décision d’écarter certaines dépenses du financement communautaire.

4        L’article 8 dudit règlement dispose que les États membres prennent, conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales, les mesures nécessaires pour s’assurer de la réalité et de la régularité des opérations financées par le FEOGA, pour prévenir et poursuivre les irrégularités et pour récupérer les sommes perdues à la suite d’irrégularités ou de négligences.

5        En vertu de l’article 9, paragraphe 2, du règlement n° 1258/1999, la Commission peut vérifier la conformité des pratiques administratives avec les règles communautaires, l’existence des pièces justificatives nécessaires et leur concordance avec les opérations financées par le FEOGA et les conditions dans lesquelles sont réalisées et vérifiées les opérations financées par le FEOGA.

6        L’article 8 du règlement (CE) n° 1663/95 de la Commission, du 7 juillet 1995, établissant les modalités d’application du règlement (CEE) n° 729/70 en ce qui concerne la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, section « Garantie » (JO L 158, p. 6), tel que modifié notamment par le règlement (CE) n° 2245/1999 de la Commission, du 22 octobre 1999 (JO L 273, p. 5), définit la procédure à suivre lorsque, à l’issue d’une enquête, la Commission considère que certaines dépenses n’ont pas été effectuées conformément aux règles communautaires. Cette procédure est engagée par une communication adressée à l’État membre concerné. La Commission indique les mesures correctives à prendre. Après l’expiration du délai de réponse de deux mois accordé à l’État membre, la Commission convoque une discussion bilatérale, après quoi elle communique ses conclusions en indiquant les dépenses qu’elle a l’intention d’écarter du financement. En l’absence d’accord, la Commission signale à l’État membre la possibilité de mettre en place une procédure de conciliation.

7        À la suite de l’adoption du règlement (CE) n° 1290/2005 du Conseil, du 21 juin 2005, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 209, p. 1), applicable à partir du 1er janvier 2007, le règlement n° 1663/95 a été abrogé et remplacé par le règlement (CE) n° 885/2006 de la Commission, du 21 juin 2006, portant modalités d’application du règlement n° 1290/2005 du Conseil en ce qui concerne l’agrément des organismes payeurs et autres entités ainsi que l’apurement des comptes du FEAGA et du Feader (JO L 171, p. 90). À compter du 16 octobre 2006, les dispositions de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95 ont ainsi été remplacées par les dispositions équivalentes de l’article 11, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 885/2006.

8        Des orientations pour l’application de corrections forfaitaires ont été définies dans le document n° VI/5330/97 de la Commission, du 23 décembre 1997, intitulé « Orientations concernant le calcul des conséquences financières lors de la préparation de la décision d’apurement des comptes du FEOGA-Garantie ». Lorsque les informations fournies par l’enquête ne permettent pas d’évaluer les pertes subies par la Communauté, une correction forfaitaire peut être envisagée à partir d’une extrapolation de ces pertes, par des moyens statistiques ou par référence à d’autres données vérifiables. Le taux de correction appliqué s’élève, en général, à 2, à 5, à 10 ou à 25 % des dépenses déclarées, en fonction de l’ampleur du risque de perte.

9        L’annexe 2 du document n° VI/5330/97, intitulée « Conséquences financières, pour l’apurement des comptes de la section ‘Garantie’ du FEOGA, des carences des contrôles effectués par les États membres », distingue deux catégories de contrôles, les contrôles clés et les contrôles secondaires :

« Les contrôles clés sont les vérifications physiques et administratives requises pour contrôler les éléments quant au fond, en particulier la réalité de l’objet de la demande, la quantité et les conditions qualitatives, y compris le respect des délais, les exigences de récoltes, les délais de rétention, etc. Ils sont effectués sur le terrain et par recoupement avec des informations indépendantes, telles que les registres cadastraux.

Les contrôles secondaires sont les opérations administratives nécessaires pour traiter correctement les demandes, telles que la vérification du respect des délais de soumission, l’identification de demandes similaires pour un même objet, l’analyse du risque, l’application de sanctions et la supervision adéquate des procédures. »

10      L’annexe 2 du document n° VI/5330/97 prévoit ce qui suit en ce qui concerne les taux de correction :

« Lorsqu’un ou plusieurs contrôles clés ne sont pas effectués ou sont si mal ou si rarement réalisés qu’ils sont inefficaces pour déterminer l’éligibilité d’une demande ou prévenir les irrégularités, il convient alors d’appliquer une correction à hauteur de 10 %, car il est raisonnablement permis de penser qu’il existait un risque élevé de pertes importantes pour le FEOGA.

Lorsque tous les contrôles clés sont effectués, mais sans respecter le nombre, la fréquence ou la rigueur préconisés par les règlements, il convient alors d’appliquer une correction à hauteur de 5 %, car il peut raisonnablement être conclu que ces contrôles n’offrent pas le niveau attendu de garantie de régularité des demandes et que le risque de pertes pour le FEOGA était significatif.

[…]

Le taux de correction doit être appliqué à la part des fonds pour laquelle la dépense a constitué un risque. Lorsque la carence résulte de la non-adoption, par un État membre, d’un système de contrôle approprié, la correction doit être appliquée à toutes les dépenses relevant de la mesure concernée. Lorsqu’il y a des raisons de supposer que la carence est limitée à la non-application du système de contrôle adopté par l’État membre dans un département ou une région, la correction doit être appliquée aux dépenses gérées par ledit département ou ladite région. »

 Réglementation spécifique relative au régime des quotas et des restitutions à l’exportation dans le secteur du sucre

11      Le règlement (CE) n° 1260/2001 du Conseil, du 19 juin 2001, portant organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (JO L 178, p. 1), applicable aux campagnes de commercialisation 2001/2002 à 2005/2006, prévoyait notamment, aux fins de réglementer la production et l’importation du sucre et de mettre en place des mécanismes de stabilisation du marché visant à garantir l’écoulement de la production communautaire, un régime de quotas à la production ainsi qu’un système de soutien des prix et de restitutions à l’exportation.

12      Aux termes des articles 10 et 11 du règlement n° 1260/2001, la production communautaire de sucre repose sur l’application d’un système de quotas. Ce système comporte la fixation, pour chacune des régions de production de la Communauté, des quantités à produire, les États membres devant les répartir, sous forme de quotas de production – quota A et quota B –, entre les différentes entreprises productrices établies sur leur territoire. Ces quantités correspondent à une campagne de commercialisation annuelle, qui commence le 1er juillet d’une année et se termine le 30 juin de l’année suivante. Le sucre produit par une entreprise dans le cadre des quotas A et B est dénommé respectivement « sucre A » et « sucre B ». Toute quantité de sucre produite en sus des quotas A et B est dénommée « sucre C ».

13      L’article 4 du règlement (CE) n° 314/2002 de la Commission, du 20 février 2002, établissant des modalités d’application du régime des quotas dans le secteur du sucre (JO L 50, p. 40), tel que modifié par le règlement (CE) n° 1140/2003 de la Commission, du 27 juin 2003 (JO L 160, p. 33), est ainsi libellé :

« 1. Pour chaque campagne de commercialisation, sont établis un bilan communautaire d’approvisionnement de sucre, d’isoglucose et de sirop d’inuline ainsi qu’un bilan par État membre d’approvisionnement de sucre. Ces bilans sont consolidés à la fin de la campagne suivante.

2. Les États membres établissent et communiquent à la Commission avant le 1er mars de chaque année, la production provisoire de sucre et de sirop d’inuline de la campagne en cours, pour chaque entreprise située sur leur territoire. La production de sucre est ventilée par mois.

[…]

3. Les États membres communiquent à la Commission, avant le 1er juin de chaque année, les superficies et productions, d’une part, de betteraves destinées à la production, respectivement, de sucre, d’alcool ou d’autres produits, et d’autre part, de chicorées destinées à la production de sirop d’inuline, de la campagne en cours et, sur base prévisionnelle, de la campagne suivante.

4. Les États membres établissent et communiquent à la Commission avant le 5 septembre de chaque année, les productions définitives A, B et C respectivement, de sucre, d’isoglucose et de sirop d’inuline de la campagne précédente, pour chaque entreprise située sur leur territoire. La production totale de sucre est ventilée par mois.

5. Lorsqu’il est nécessaire de modifier la production définitive de sucre sur la base des informations communiquées visées au paragraphe 4, la différence qui en découle est prise en considération lors de l’établissement de la production définitive de la campagne pendant laquelle cette différence est constatée.

6. Les États membres communiquent à la Commission, avant le 1er mars de chaque année, la ventilation par entreprise, des attributions de quotas A et B de sucre, d’isoglucose et de sirop d’inuline, pour la campagne en cours. »

14      L’article 10 du règlement n° 314/2002 prévoit que les États membres prennent toutes les mesures requises en vue d’instaurer les contrôles nécessaires à la constatation de la production des produits visés par le présent règlement.

15      Le règlement n° 314/2002 a été abrogé par le règlement (CE) n° 952/2006 de la Commission, du 29 juin 2006, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 318/2006 du Conseil en ce qui concerne la gestion du marché intérieur du sucre et le régime des quotas (JO L 178, p. 39). Ce dernier règlement s’insère dans le cadre de la réforme de l’organisation commune des marchés dans le secteur du sucre intervenue au cours de l’année 2006, par laquelle le Conseil de l’Union européenne a notamment adopté le règlement (CE) n° 318/2006, du 20 février 2006, portant organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (JO L 58, p. 1).

 Antécédents du litige

16      Lors d’une mission de contrôle au titre de l’article 9, paragraphe 2, du règlement n° 1258/1999, menée du 23 au 27 mai 2005 et portant la référence EX/2005/03/GR, les services de la Commission ont constaté que, depuis 2001, les autorités grecques avaient omis de mettre en place des systèmes de contrôle de la production et du stockage du sucre conformes à la réglementation communautaire régissant les modalités d’application du régime des quotas dans le secteur du sucre.

17      Par lettre du 19 octobre 2005, modifiée par lettre du 8 décembre 2005, la Commission a, conformément à l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95, informé la République hellénique que ces vérifications avaient mis en lumière de graves carences en ce qui concerne certains contrôles clés. Ladite lettre faisait notamment référence au fait que, depuis 2001 et en violation des dispositions de l’article 10 du règlement n° 314/2002, les autorités grecques n’avaient réalisé aucun contrôle, que ce soit de la production de sucre ou des stocks, dans les usines de l’Elliniki Viomichania Zacharis AE (ci-après l’« EVZ »), qui était l’unique producteur de sucre en Grèce.

18      En date du 21 décembre 2005, les autorités grecques compétentes ont fait part de leurs observations sur les constatations de la Commission.

19      Par lettre du 7 mars 2006, la Commission a invité les autorités grecques à une discussion bilatérale.

20      Un résumé des points discutés lors de cette réunion, qui s’est tenue le 7 avril 2006, a été communiqué à la République hellénique par lettre du 27 février 2007.

21      Le 30 avril 2007, les autorités grecques ont transmis à la Commission leurs commentaires sur ce résumé.

22      Par lettre du 2 juillet 2008, la Commission a, conformément à l’article 11, paragraphe 2, du règlement n° 885/2006, communiqué ses conclusions officielles.

23      La République hellénique n’a pas demandé à ce que l’affaire soit soumise à l’organe de conciliation.

24      Par la décision 2009/253/CE, du 19 mars 2009, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du FEOGA, section « Garantie », et du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) (JO L 75, p. 15) (ci-après la « décision attaquée »), la Commission a décidé d’appliquer un taux de correction financière forfaitaire de 10 % sur l’ensemble des dépenses relatives aux restitutions à l’exportation de sucre, y compris le sucre contenu dans les produits qui ne sont pas visés à l’annexe I du traité CE, payées entre le 22 octobre 2003 et le 30 novembre 2005. Le montant total de cette correction s’élève à 1 283 427,72 euros. Les motifs qui ont conduit la Commission à appliquer ladite correction sont exposés au point 2.3.1 du rapport de synthèse AGRI-64177-2008, du 6 janvier 2009, concernant les résultats des inspections menées par la Commission dans le contexte de la procédure d’apurement de conformité conformément à l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999 et à l’article 31 du règlement n° 1290/2005 (ci-après le « rapport de synthèse »).

 Procédure et conclusions des parties

25      Par requête déposée le 14 mai 2009 au greffe du Tribunal, la République hellénique a introduit le présent recours.

26      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (sixième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 18 novembre 2010.

27      La République hellénique conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ou, subsidiairement, modifier la décision attaquée dans le sens d’une réduction de la correction financière à 5 % ou, encore plus subsidiairement, appliquer la correction de 10 % uniquement à la quantité correspondant au sucre importé par l’EVZ ;

–        condamner la Commission aux dépens.

28      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la République hellénique aux dépens.

 En droit

29      La République hellénique soulève trois moyens. Le premier moyen est tiré d’une violation des règles procédurales prévues à l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95. Par son deuxième moyen, la République hellénique soutient que la Commission a apprécié de manière erronée les faits, qu’elle a méconnu son obligation de motivation et qu’elle a dépassé les limites de son pouvoir d’appréciation s’agissant de l’évaluation du risque de pertes pour le FEOGA. Le troisième moyen est pris d’une violation du principe de proportionnalité.

 Sur le premier moyen, tiré d’une méconnaissance des garanties procédurales substantielles prévues par l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95

 Arguments des parties

30      La République hellénique soutient qu’il découle de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95, tel qu’interprété par la Cour et le Tribunal, d’une part, que les constatations de la Commission relatives à la conformité des dépenses effectuées au titre du financement communautaire doivent être communiquées aux États membres concernés et, d’autre part, que les décisions relatives à l’apurement des comptes du FEOGA doivent être prises à l’issue d’une procédure contradictoire au cours de laquelle lesdits États membres disposent de toutes les garanties requises pour présenter leur point de vue.

31      Or, en l’espèce, la question des restitutions à l’exportation du sucre incorporé aux produits hors annexe I du traité CE, qui a conduit à une correction financière supplémentaire et autonome de 275 229,02 euros, n’aurait été évoquée ni lors de la discussion bilatérale ni dans la correspondance qui avait été précédemment échangée entre la Commission et les autorités grecques. Les droits de la défense de la République hellénique, qui n’aurait pas eu la possibilité d’exprimer son point de vue sur cette correction, ni d’évaluer le montant éventuel de la correction finale, auraient donc été méconnus, ce qui devrait entraîner l’annulation partielle de la décision attaquée.

32      Ainsi, la lettre de la Commission du 19 octobre 2005, telle que modifiée par la lettre du 8 décembre 2005, qui fait état des résultats des contrôles, ne mentionnerait pas les produits hors annexe I du traité CE.

33      Il ressortirait en outre de la lettre de la Commission du 27 février 2007, qui se rapporte à la discussion bilatérale du 7 avril 2006, que seule avait été débattue la mise en œuvre d’une correction financière d’un montant total de 938 830,50 euros, correspondant à 10 % des dépenses en cause lors des exercices 2004 et 2005.

34      Ce ne serait que dans la lettre de conciliation de la Commission du 2 juillet 2008 qu’aurait été mentionnée, pour la première fois, l’imposition d’une « correction complémentaire », d’un montant de 275 229,02 euros, pour les restitutions versées lors de l’exportation de sucre incorporé dans les produits hors annexe I du traité CE. Il ressortirait clairement des termes de cette lettre que la question de l’évaluation des restitutions à l’exportation portant sur les produits hors annexe I du traité CE n’avait jamais été évoquée que ce soit lors de la discussion bilatérale ou dans les courriers échangés entre les autorités grecques et les services de la Commission.

35      La République hellénique souligne que, contrairement à ce que suggère la Commission, cette dernière correction de 275 229,02 euros, qui concerne les produits hors annexe I du traité CE, correspond à des dépenses indépendantes et non complémentaires. Ces dépenses concerneraient d’autres produits, à savoir des marchandises qui résultent du traitement et de l’incorporation de matières premières (comprenant notamment le sucre). De plus, les bénéficiaires de la restitution à l’exportation pour ces produits seraient différents des bénéficiaires des restitutions à l’exportation dont l’activité consiste dans le commerce du sucre non transformé. En outre, le versement des restitutions à l’exportation correspondant à chacun de ces produits serait enregistré « à différents endroits du budget », conformément à la nomenclature communautaire officielle. Dans de telles conditions, les autorités grecques n’auraient pas eu la possibilité d’exprimer leur point de vue lors de la discussion bilatérale, ni celle de calculer, ne serait-ce que de manière approximative, le montant des éventuelles corrections.

36      Par ailleurs, la République hellénique estime que le fait, évoqué par la Commission, que le sucre incorporé aux produits hors annexe I du traité CE a été mentionné dans le programme de la mission d’enquête, comme cela est décrit dans sa lettre du 19 octobre 2005, n’est pas de nature à remédier à la violation des formes substantielles résultant de l’absence de discussion bilatérale sur la question de l’imposition de corrections financières autonomes pour ce produit.

37      Enfin, la République hellénique considère que le fait qu’elle ne se soit pas adressée à l’organe de conciliation ne la prive pas du droit d’invoquer, dans le cadre d’un recours en annulation, une violation de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95.

38      La Commission conteste l’ensemble des griefs soulevés par la République hellénique.

 Appréciation du Tribunal

39      Il ressort de la jurisprudence de la Cour que la décision finale et définitive relative à l’apurement des comptes doit être prise à l’issue d’une procédure contradictoire spécifique au cours de laquelle les États membres concernés doivent disposer de toutes les garanties requises pour présenter leur point de vue (arrêts de la Cour du 29 janvier 1998, Grèce/Commission, C‑61/95, Rec. p. I‑207, point 39, et du 14 décembre 2000, Allemagne/Commission, C‑245/97, Rec. p. I‑11261, point 47).

40      L’article 8 du règlement n° 1663/95, qui, à compter du 16 octobre 2006 a été abrogé et remplacé par l’article 11 du règlement n° 885/2006, définit les différentes étapes à respecter lors de la procédure d’apurement des comptes du FEOGA. En particulier, l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, de ce règlement précise le contenu de la première communication écrite par laquelle la Commission communique le résultat de ses vérifications aux États membres, avant l’organisation de la discussion bilatérale. Aux termes de cette disposition, dans sa rédaction applicable aux premières communications écrites effectuées après le 30 octobre 1999, lesdites communications doivent préciser les résultats des vérifications effectuées par la Commission à l’État membre concerné et indiquer les mesures correctives à prendre pour garantir à l’avenir le respect des règles communautaires en cause. Quant à l’article 8, paragraphe 1, deuxième et troisième alinéas, du règlement n° 1663/95, il prévoit que la Commission et l’État membre concerné tiennent une discussion bilatérale portant sur la base des dépenses que la Commission propose d’exclure du financement et essaient d’arriver à un accord.

41      En l’espèce, les arguments avancés par la République hellénique visent, en substance, à mettre en cause le respect par la Commission des exigences procédurales prévues par cette disposition, s’agissant du sucre contenu dans les produits hors annexe I du traité CE, non seulement au niveau de la première communication visée par cette disposition, mais également au stade de la discussion bilatérale. Il convient donc d’examiner, premièrement, si la Commission a suffisamment identifié dans la première communication au sens de l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1663/95, à savoir dans sa lettre du 19 octobre 2005, modifiée par sa lettre du 8 décembre 2005, les résultats de l’enquête EX/2005/03/GR et, en définitive, les carences sur lesquelles est fondée la correction financière dans le secteur du sucre visée en l’espèce et, deuxièmement, si a été tenue une discussion bilatérale portant sur la base des dépenses que la Commission a finalement proposé d’exclure.

42      S’agissant du premier aspect, il est constant que la Commission s’est référée dans sa lettre du 19 octobre 2005 à l’absence, constatée lors de la mission d’audit de mai 2005, de systèmes de contrôle du stockage et de la production du sucre dans le cadre du régime de quotas mis en place dans le secteur du sucre, sans qu’il soit possible d’inférer une quelconque distinction entre les différentes catégories de produits relevant de ce secteur. En outre, la lettre du 19 octobre 2005 indique clairement que l’un des sujets abordés lors de cette mission était celui du sucre contenu dans les produits hors annexe I du traité CE, que le montant total des restitutions pour lesdits produits en 2004 s’élevait à 1,6 million d’euros et que certains contrôles spécifiques aux produits hors annexe I du traité CE ont été évoqués lors de la mission d’audit (voir points 1, 1.2, 5.2.1 et 9.1 de cette lettre).

43      Il apparaît donc que les résultats des vérifications figurant dans la lettre précitée, à savoir la constatation de graves carences dans les contrôles de la production et du stockage du sucre, et ce en violation des dispositions du règlement n° 314/2002, ont été formulés de manière suffisamment précise pour donner à la République hellénique une parfaite connaissance des réserves de la Commission portant sur l’ensemble des contrôles devant être opérés dans le secteur du sucre, y compris s’agissant du sucre incorporé dans les produits hors annexe I du traité CE, qui ont justifié l’application de la correction financière contestée.

44      Contrairement à ce que la République hellénique suggère, il ne saurait être exigé, à ce stade de la procédure, que le gouvernement concerné ait une parfaite connaissance des résultats définitifs des vérifications de la Commission. En effet, les conclusions définitives de cette dernière et l’évaluation subséquente de leurs conséquences financières sont largement tributaires des précisions apportées par les autorités nationales aux demandes d’information formulées par la Commission dans sa première communication écrite.

45      Il ressort en effet de la jurisprudence que les décisions en matière d’apurement des comptes du FEOGA sont prises à l’issue d’une procédure contradictoire, de sorte que les résultats des vérifications figurant dans la première communication ne sont pas définitifs et qu’ils sont susceptibles d’être précisés et revus à la lumière des réponses fournies par l’État membre lors de la procédure administrative ultérieure. Il importe sur ce point de préciser que, à la suite de la modification introduite par le règlement n° 2245/1999, il n’est plus exigé que la Commission fasse une évaluation des dépenses à écarter dans sa communication au titre de l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1663/95 (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 7 octobre 2004, Suède/Commission, C‑312/02, Rec. p. I‑9247, point 14 ; arrêts du Tribunal du 12 septembre 2007, Grèce/Commission, T‑243/05, Rec. p. II‑3475, point 38, et du 9 avril 2008, Grèce/Commission, T‑364/04, non publié au Recueil, point 101).

46      S’agissant du second aspect, il est incontesté que la Commission a convoqué une discussion bilatérale au cours de laquelle ont été débattus tous les points en litige. La circonstance que la Commission ait finalement proposé une correction différente de celle envisagée initialement ne saurait être censurée sous l’angle du respect des garanties procédurales (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 18 septembre 2003, Royaume-Uni/Commission, C‑346/00, Rec. p. I‑9293, point 70).

47      Ainsi que la Cour l’a souligné, il ressort du libellé même de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95, tel que modifié par le règlement n° 2245/1999, qu’il appartient à la Commission de communiquer à l’État membre concerné une évaluation des dépenses qu’elle envisage d’exclure postérieurement à la communication du résultat de ses vérifications et aux discussions bilatérales qu’elle conduit avec ledit État membre. À cet égard, un État membre n’est pas fondé à soutenir que la Commission est tenue de procéder à une telle communication préalablement à toute discussion sous peine de violer les droits de la défense. En effet, ainsi qu’il ressort du troisième considérant du règlement n° 2245/1999, c’est précisément dans un souci d’opportunité et d’équité que la procédure de communication a été modifiée. En particulier, le déroulement de la procédure, tel que modifié par ledit règlement, permet notamment à la Commission de recueillir les explications de l’État membre sur les irrégularités constatées et éventuellement de prendre en compte ces explications dans le cadre de la fixation du montant des dépenses qu’elle envisage d’exclure (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 11 octobre 2007, Grèce/Commission, C‑332/06 P, non publié au Recueil, points 46 et 47).

48      Partant, la Commission n’était pas tenue d’indiquer un montant à écarter pendant la discussion bilatérale avec l’État membre, mais seulement de le faire au stade de la communication formelle visée à l’article 8, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement n° 1663/95, c’est-à-dire après la discussion bilatérale (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 26 novembre 2008, Grèce/Commission, T‑263/06, non publié au Recueil, point 67, et la jurisprudence citée).

49      En l’occurrence, la Commission a respecté cette obligation en communiquant les montants à écarter du financement communautaire dans sa lettre du 2 juillet 2008, qui constitue la communication formelle précitée. Ainsi que la République hellénique l’a elle-même mentionné, cette communication formelle indique expressément, en son point 1.4, que les « corrections financières doivent être envisagées non seulement pour les restitutions à l’exportation de sucre – ainsi qu’il a été indiqué dans la correspondance avec les autorités grecques – mais doivent également inclure les restitutions versées lors de l’exportation de sucre incorporé dans des produits hors annexe I [du traité CE] ». Le point 2 de cette lettre, qui porte spécifiquement sur les conséquences financières des carences constatées dans la mise en place des contrôles de la production et du stockage du sucre, mentionne que « l’évaluation [effectuée dans la lettre du 27 février 2007] des conséquences financières n’a pas inclus les dépenses encourues dans le cadre du sucre utilisé dans les produits ‘hors annexe I’, ce qui nécessite dans cette lettre la notification d’une correction supplémentaire ».

50      Cette interprétation ne méconnaît pas les droits de la défense de l’État membre concerné dès lors que, ainsi que la Commission l’a souligné, celui-ci pouvait encore demander l’ouverture d’une procédure de conciliation (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2007, Grèce/Commission, point 45 supra, point 44), ce qu’il n’a pas fait alors même que la lettre du 2 juillet 2008 évoquait cette possibilité.

51      En outre, c’est à tort que la République hellénique se prévaut de ce que les restitutions à l’exportation pour le sucre commercialisé en tant que tel et celles pour le sucre introduit dans des produits hors annexe I du traité CE ne sont pas financées au titre de la même rubrique budgétaire et ne bénéficient pas aux mêmes entités. Dans ce contexte, il importe de rappeler que l’enquête EX/2005/03/GR et la procédure d’apurement qui s’en est suivie portaient sur la mise en place et sur l’effectivité des contrôles dans le cadre de l’organisation commune des marchés dans le secteur du sucre pris dans son ensemble, sans qu’il y ait lieu à cet égard d’opérer une distinction entre les types de produits en fonction de nomenclatures officielles ou entre les catégories des bénéficiaires finaux potentiels des restitutions à l’exportation litigieuses.

52      Il découle de l’ensemble de ces considérations que la Commission n’a pas méconnu, en l’espèce, les exigences procédurales découlant de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95.

53      Le présent moyen doit donc être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une appréciation erronée des faits ainsi que d’une méconnaissance par la Commission de son obligation de motivation et des limites de son pouvoir d’appréciation s’agissant de l’évaluation du risque pour le FEOGA

 Arguments des parties

54      La République hellénique soutient que la Commission a surestimé le risque financier pour le FEOGA. Elle précise qu’aucune irrégularité n’a été constatée que ce soit lors de la mission de contrôle menée par la Commission ou à l’occasion des contrôles occasionnels effectués par les autorités nationales. Par ailleurs, le risque, évoqué dans le rapport de synthèse, que du sucre produit, mais non déclaré, ait pu être exporté et qu’il ait ainsi pu bénéficier de restitutions par d’autres États membres, supposerait la violation concomitante des règles de contrôle par lesdits États. Ce risque serait hypothétique ainsi qu’en attesterait l’absence d’indice d’un transit de sucre serbe à partir de la Grèce vers un autre État membre.

55      La Commission conteste les griefs soulevés par la République hellénique.

 Appréciation du Tribunal

56      Tout d’abord, s’agissant du grief pris d’une méconnaissance de l’obligation de motivation, il est de jurisprudence constante que, dans le contexte de l’élaboration des décisions relatives à l’apurement des comptes, la motivation d’une décision doit être considérée comme suffisante dès lors que l’État destinataire a été étroitement associé au processus d’élaboration de cette décision et qu’il connaissait les raisons pour lesquelles la Commission estimait ne pas devoir mettre à la charge du FEOGA la somme litigieuse (voir arrêt de la Cour du 14 avril 2005, Portugal/Commission, C‑335/03, Rec. p. I‑2955, point 84, et la jurisprudence citée).

57      En l’espèce, il ressort de l’examen du premier moyen et des pièces du dossier pertinentes dans ce contexte (voir, notamment, les lettres de la Commission du 19 octobre 2005 et du 2 juillet 2008) que la République hellénique a été associée au processus d’élaboration de la décision attaquée et que les incertitudes que la Commission éprouvait quant aux modalités d’application, en Grèce, du système de contrôle de la production et du stockage du sucre ont été portées à plusieurs reprises à la connaissance des autorités nationales, qui ont eu dès lors la possibilité de faire valoir leurs observations sur les irrégularités reprochées (voir également les lettres des autorités grecques du 21 décembre 2005 et du 30 avril 2007). Par ailleurs, les griefs de la Commission ont été exposés au point 2.3.1 du rapport de synthèse de manière suffisante pour permettre à la République hellénique de connaître les raisons qui ont conduit à adopter la décision attaquée.

58      Il en résulte que le grief pris d’une violation de l’obligation de motivation ne saurait être retenu.

59      Ensuite, s’agissant de l’évaluation du risque de pertes financières pour le FEOGA, il importe de rappeler que, en l’espèce, ce n’est pas la constatation de fausses déclarations ou de détournements qui a conduit la Commission à appliquer une correction, mais l’absence totale de systèmes de contrôle des données relatives au stockage et à la production de sucre conformes aux dispositions des articles 4 et 10 du règlement n° 314/2002.

60      Or, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, dans l’hypothèse où un ou plusieurs contrôles clés n’ont pas été effectués ou l’ont été si mal ou si rarement qu’ils étaient inefficaces pour déterminer l’éligibilité d’une demande ou prévenir les irrégularités, la Commission est en droit de considérer qu’il existait un risque élevé de pertes importantes pour le FEOGA (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 27 octobre 2005, Grèce/Commission, C‑387/03, non publié au Recueil, point 105).

61      À cet égard, il est fait observer que, au cours de la procédure contradictoire ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée, les autorités grecques n’ont pas mis en cause le fait que lesdits systèmes n’avaient pas été mis en place depuis 2002, allant jusqu’à admettre, dans la lettre qu’elles ont envoyée à la Commission en date du 30 avril 2007, que, compte tenu de l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation dans le secteur du sucre à la suite, notamment, de l’adoption du règlement n° 318/2006, elles avaient estimé que le moment était mal choisi pour se conformer aux dispositions de l’ancien régime régi notamment pas le règlement n° 314/2002.

62      Lors de l’audience, la République hellénique a confirmé, en réponse à une question du Tribunal, qu’elle ne contestait pas l’absence, pendant la période concernée, de mise en place de systèmes de contrôle de la production et du stockage de sucre conformes à la réglementation communautaire applicable. Elle a toutefois précisé que, ainsi qu’il ressortait des éléments exposés dans ses écritures, les autorités grecques avaient instauré un certain nombre de contrôles transitoires, notamment de nature comptable, afin de garantir une application correcte de la réglementation communautaire et, par conséquent, qu’elles avaient évité tout risque de perte financière pour le FEOGA.

63      Or, force est de constater que les éléments avancés à cet égard ne sont pas de nature à établir qu’il existait, pendant la période considérée, un système fiable et opérationnel de contrôle de la production et du stockage conforme aux dispositions des articles 4 et 10 du règlement n° 314/2002. En particulier, la République hellénique n’est pas parvenue à établir que les données transmises par les opérateurs économiques du secteur visé avaient fait l’objet de vérifications par les autorités nationales compétentes avant leur transmission à la Commission en vue de l’établissement du montant des restitutions à l’exportation du sucre.

64      Dans de telles circonstances, caractérisées par le fait que les autorités grecques ont omis de mettre en place des contrôles clés au sens du document n° VI/5330/97, il est établi qu’il existait un risque financier pour le FEOGA.

65      À cet égard, il y a lieu de rappeler, à la lumière du document n° VI/5330/97, que, lorsqu’il n’est pas possible d’évaluer précisément les pertes subies par la Communauté, une correction forfaitaire peut être envisagée par la Commission (arrêts de la Cour Royaume-Uni/Commission, point 46 supra, point 53, et du 24 avril 2008, Belgique/Commission, C‑418/06 P, Rec. p. I‑3047, point 136).

66      En l’espèce, tel était précisément le cas. Le taux de correction forfaitaire de 10 % retenu par la Commission correspond d’ailleurs à celui qui est envisageable aux termes du document n° VI/5330/97 dans le cas où, comme en l’espèce, un ou plusieurs contrôles clés n’ont pas ou ont mal été effectués. Il est en effet indéniable que l’omission de se conformer aux obligations de contrôle de la production et du stockage dans le secteur visé comportait les risques décrits dans le rapport de synthèse.

67      Le deuxième moyen ne saurait donc être accueilli.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du principe de proportionnalité

 Arguments des parties

68      La République hellénique soutient que c’est à tort que la Commission a considéré que la totalité de la quantité de sucre importée de Serbie au cours de la période litigieuse l’avait été par l’EVZ. Il ressortirait en effet des informations fournies par l’Opekepe (agence grecque de paiement et de contrôle des aides communautaires d’orientation et de garantie) que, au cours de cette période, d’autres entreprises auraient importé du sucre à partir de la Serbie. Les quantités de sucre réellement importées par l’EVZ auraient donc été inférieures à celles qui ont été prises en compte par la Commission. Le risque pour le FEOGA déterminé par cette dernière serait ainsi plus élevé qu’il ne l’était en réalité. Par conséquent, en appliquant une correction financière de 10 %, la Commission aurait violé le principe de proportionnalité. De l’avis de la République hellénique, il conviendrait de réduire de 5 % le montant de la correction financière ou, à défaut, de calculer la correction de 10 % uniquement sur le montant correspondant à la quantité de sucre importée par l’EVZ au cours de la période litigieuse.

69      La Commission conclut au rejet du moyen.

 Appréciation du Tribunal

70      Il importe de rappeler que le principe de proportionnalité exige que les actes des institutions de l’Union européenne ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire pour atteindre le but recherché (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 17 mai 1984, Denkavit Nederland, 15/83, Rec. p. 2171, point 25 ; arrêts du Tribunal du 19 juin 1997, Air Inter/Commission, T‑260/94, Rec. p. II‑997, point 144, et du 30 avril 2009, Espagne/Commission, T‑281/06, non publié au Recueil, point 64).

71      Or, il est de jurisprudence constante que la Commission peut refuser la prise en charge de l’intégralité des dépenses exposées si elle constate qu’il n’existe pas de mécanismes de contrôle suffisants (arrêt de la Cour du 18 mai 2000, Belgique/Commission, C‑242/97, Rec. p. I‑3421, point 122).

72      Il s’ensuit que, en imposant, en l’espèce, une correction forfaitaire ne s’élevant qu’à 10 % des dépenses déclarées par la République hellénique au titre du financement des aides dans le secteur du sucre, alors que les contrôles effectués par les autorités helléniques méconnaissaient les exigences de la réglementation communautaire, la Commission n’a pas violé le principe de proportionnalité (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 14 septembre 1995, Irlande/Commission, C‑49/94, Rec. p. I‑2683, point 22).

73      Il convient donc de rejeter le troisième moyen ainsi que le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

74      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La République hellénique ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La République hellénique est condamnée aux dépens.

Moavero Milanesi

Wahl

Soldevila Fragoso

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 mars 2011.

Signatures


* Langue de procédure : le grec.