Language of document : ECLI:EU:T:2006:388

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

12 décembre 2006(*)

« Clause compromissoire – Quatrième programme-cadre pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration – Recouvrement des sommes avancées »

Dans l’affaire T‑7/05,

Commission des Communautés européennes, représentée par M. D. Triantafyllou, en qualité d’agent, assisté de Me N. Korogiannakis, avocat,

partie requérante,

contre

Parthenon AE Oikodomikon – Technikon – Touristikon – Viomichanikon – Emporikon kai Exagogikon Ergasion, établie à Aigion (Grèce), représentée par Me A. Masoulas, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé en vertu de l’article 238 CE en vue d’obtenir le recouvrement des sommes avancées dans le cadre du contrat FAIR‑CT98‑9544, résilié par la Commission pour inexécution par la défenderesse de ses obligations contractuelles,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),

composé de MM. J. Pirrung, président, N. J. Forwood et S. Papasavvas, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 21 juin 2006,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

 Cadre contractuel

1        Le 6 août 1998, la Communauté européenne, représentée par la Commission, a conclu avec sept cocontractants un contrat portant sur la contribution financière accordée à ces dernières pour la réalisation d’un projet intitulé « Mise au point d’une nouvelle méthode de nettoyage et d’épluchage des fruits » (ci-après le « projet »). Ledit contrat était conclu dans le contexte de la décision n° 1110/94/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 avril 1994, relative au quatrième programme-cadre de la Communauté européenne pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration (1994-1998) (JO L 126, p. 1).

2        Le contrat a été signé par la défenderesse, en son propre nom et comme représentant et coordinateur des autres cocontractants, et par la Commission.

3        Aux termes de l’article 10 du contrat, celui-ci est régi par la loi grecque. Il est entré en vigueur le 6 août 1998.

4        Les cocontractants étaient, en vertu du point 1.1 du contrat, tenus d’exécuter le contrat « conjointement et solidairement envers la Commission pour ce qui concerne les travaux énoncés à l’annexe I ».

5        Le point 1.2 du contrat dispose :

« Sous réserve des cas de force majeure (y compris en cas de grève, de lock-out et d’autres événements qui échappent normalement à la maîtrise des cocontractants), les cocontractants déploieront des efforts raisonnables pour atteindre les résultats visés par le projet et remplir les obligations d’un cocontractant défaillant. Un cocontractant ne sera pas tenu de prendre des mesures au-delà des éléments qu’il peut raisonnablement maîtriser ou de rembourser les montants dus par un cocontractant défaillant à moins qu’il n’ait lui-même contribué à cette défaillance. Les mesures à prendre en cas de force majeure seront convenues entre les parties contractantes. »

6        Selon le point 2.1 du contrat, le délai d’exécution du projet était de 24 mois à compter du premier jour du mois suivant celui de la dernière signature des parties contractantes, à savoir du 1er septembre 1998 au 31 août 2000.

7        En vertu de l’article 3 du contrat, la Commission s’engageait à contribuer financièrement à la bonne exécution du projet dont les coûts éligibles totaux avaient été estimés à 866 000 écus. Le point 3.2 de ce même article prévoyait que la Commission financerait jusqu’à 50 % des coûts éligibles à concurrence d’un montant maximal de 433 000 écus.

8        S’agissant particulièrement des fonctions du coordinateur dans le domaine des paiements, le point 2.1, sous b), des conditions générales du contrat prévoit :

« Le coordinateur recevra et répartira, sous réserve des conditions spéciales stipulées à l’article 9 du présent contrat, tous les paiements qui seront effectués au coordinateur en qualité de dépositaire pour les cocontractants. Le coordinateur transférera immédiatement le montant adéquat sur chaque paiement à chacun des cocontractants. Le coordinateur ne sera pas le bénéficiaire des différents paiements, sauf accord entre les cocontractants qui conviendront des dispositions appropriées relatives à tout transfert sur le compte personnel du coordinateur. »

9        Aux termes du point 4.1 du contrat, une avance initiale de 259 800 écus devait être versée par la Commission dans les deux mois suivant la dernière signature des parties contractantes. Le point 4.2 du contrat prévoyait que la Commission devait effectuer tous les paiements à la défenderesse, qui était tenue de transférer immédiatement le montant approprié à chaque cocontractant.

10      En vertu de l’article 5 du contrat, deux relevés des coûts signés devaient être soumis à la Commission, par le biais du coordinateur, tous les douze mois à partir du 1er septembre 1998 ainsi que deux relevés des coûts pour la période finale dans les trois mois qui suivent l’approbation du dernier rapport, document ou élément livrable. La partie D des conditions générales prévoyait un formulaire type à cet effet. Les relevés des coûts récapitulaient les dépenses auxquelles chaque cocontractant avait été soumis aux fins de l’exécution du projet.

11      L’article 6 du contrat et l’article 10 des conditions générales prévoyaient l’obligation des cocontractants de soumettre, par le biais du coordinateur, en deux copies, des rapports d’avancement rédigés en anglais tous les douze mois à partir du 1er septembre 1998, et ce dans le délai d’un mois à compter de la fin de la période couverte par le rapport. Le point 10.3 des conditions générales prévoyait que, à défaut d’observations de la Commission dans les deux mois suivant la réception du rapport final, celui-ci était censé être approuvé. S’agissant des autres rapports, ce délai avait été fixé à un mois à partir de leur réception.

12      Le point 5.3, sous a), des conditions générales prévoyait que la Commission pouvait résilier le contrat au cas où un cocontractant n’avait pas fait le nécessaire pour remédier à la violation d’une obligation contractuelle dans un délai d’un mois au minimum, à condition que la Commission l’ait mis en demeure par écrit.

13      Conformément au point 21.2 des conditions générales, les relevés des coûts, rédigés dans la forme spécifiée dans la partie D de celles-ci, devaient être annexés aux rapports périodiques d’avancement correspondants (point 11 ci-dessus). En cas de non-soumission d’un relevé des coûts, la Commission était en droit, selon le point 21.3 des conditions générales, de retenir une partie ou (exceptionnellement) l’intégralité de sa contribution au projet jusqu’à la période couverte par le rapport suivant.

14      Tous les versements effectués par la Commission étaient considérés, en vertu de l’article 23 des conditions générales, comme des avances jusqu’à l’approbation des éléments livrables ou du dernier rapport du projet. Selon le point 23.3 des conditions générales, les cocontractants s’engageaient, pour le cas où la contribution financière totale due par la Commission pour le projet serait inférieure au montant total des versements effectués par celle-ci, à lui rembourser immédiatement la différence.

15      S’agissant des intérêts, le point 5.4 des conditions générales prévoyait que, en cas de résiliation conformément au point 5.3, sous a), tout montant remboursable pouvait être majoré d’intérêts, à la suite d’une demande écrite, au taux appliqué par l’Institut monétaire européen pour les opérations en écus, lui-même majoré de 2 %, pour la période écoulée entre la réception des fonds et leur remboursement.

16      L’article 7 des conditions générales contient la clause compromissoire suivante :

« Le Tribunal de première instance des Communautés européennes et, en cas de pourvoi, la Cour de justice des Communautés européennes seront seuls compétents pour connaître des litiges entre la Commission et les cocontractants quant à la validité, l’application et l’interprétation du présent contrat. »

 Droit grec

17      Aux termes de l’article 211, premier alinéa, du Astikos Kodikas (code civil grec, ci-après le « code civil ») :

« La déclaration de volonté faite par une personne (représentant) au nom d’une autre personne (représenté), dans les limites du pouvoir de représentation, produit directement effet au profit du représenté ou contre lui. Ce résultat se produit soit que la déclaration ait été expressément faite au nom du représenté soit qu’il résulte des circonstances qu’elle a été faite en son nom. »

18      Selon l’article 480 du code civil, « [s]i plusieurs personnes doivent une prestation divisible, ou si plusieurs personnes ont droit à une prestation divisible, dans le doute, chaque débiteur est tenu et chaque créancier a droit à parts égales ».

19      L’article 481 du code civil se lit comme suit :

« Il y a obligation solidaire lorsque, en cas de pluralité de débiteurs de la même prestation, chacun d’eux est tenu de la fournir en totalité, alors que le créancier ne peut l’exiger qu’une seule fois. »

20      L’enrichissement sans cause est régi par les articles 904 à 913 du code civil. L’article 904, premier alinéa, dispose :

« Celui qui s’est enrichi sans cause légitime au moyen ou aux dépens du patrimoine d’autrui est tenu à la restitution de l’indu. Cette obligation existe notamment en cas de prestation de l’indu ou de prestation pour une cause qui ne s’est pas réalisée ou a cessé d’exister ou qui est illicite ou immorale. »

21      Conformément à l’article 909 du code civil, « [l’]obligation de restitution visée à l’article [908] est éteinte dans la mesure où le bénéficiaire ne se trouve plus enrichi au moment de la signification du recours ».

 Cadre factuel

22      Les cocontractants représentés par la défenderesse étaient Dried Fruit Nederland, le Consorzio interprofessionale cooperative agricole, Valle Verde et Stratelis. Le contrat mentionne également en tant que parties contractantes Integrated Environmental Management Ltd (ci-après « IEM ») et l’université polytechnique d’Athènes. Le rôle d’IEM est indiqué dans les lettres des 17 décembre 1998 et 29 janvier 1999 envoyées par la défenderesse à la Commission en réponse aux demandes que cette dernière avait formulées par lettres des 14 décembre 1998 et 5 janvier 1999. IEM figure par ailleurs dans plusieurs points de l’annexe I du contrat en tant que chef de certaines tâches (task leader) ou partenaire pour d’autres tâches, ainsi que dans les deux lettres susmentionnées de la Commission en tant que partenaire et participant. Il est constant entre les parties que cette société était également représentée par la défenderesse.

23      Le 7 août 1998, la Commission a versé à la défenderesse l’avance initiale de 259 800 écus.

24      La défenderesse a soumis à la Commission le 12 octobre 1999 un document intitulé « Premier rapport d’avancement ». Dans ce document, la défenderesse faisait état, notamment, d’un retard quant à la délivrance du permis de construire relatif au projet et sollicitait un délai supplémentaire de dix à douze mois pour l’achèvement de celui-ci.

25      Par lettre du 24 janvier 2001, adressée à la défenderesse, la Commission a indiqué ne pas avoir reçu de rapport d’avancement ni de relevés des coûts en soulignant que les délais prévus au contrat pour la communication de ces documents étaient expirés. Elle a accordé un délai d’un mois à la défenderesse pour procéder à cette communication en avisant celle-ci qu’elle commettrait, à défaut, une violation de ses obligations contractuelles en tant que coordinateur.

26      Par lettre du 3 septembre 2001, la défenderesse a soumis à la Commission un document intitulé « Premier rapport d’avancement (septembre 1998-septembre 2000) ».

27      Par lettre du 7 novembre 2001, la Commission a, en application du point 5.3 des conditions générales, prononcé la résiliation du contrat avec effet rétroactif au 24 février 2001. Les motifs de la résiliation résidaient, selon cette lettre, dans l’absence de relevés des coûts signés pour quatre cocontractants et dans le fait que la recherche effectuée ne correspondait pas aux travaux énoncés dans l’annexe I du contrat. De surcroît, les résultats décrits dans le rapport étaient identiques à ceux figurant dans un rapport soumis dans le cadre d’un ancien projet déjà financé par la Commission (le programme FAIR-CT95-9502).

28      Le 20 juin 2002, la Commission a procédé à l’émission d’une note de débit pour le montant de 259 800 euros. Par lettre du 22 octobre 2002, la défenderesse a exprimé sa surprise à l’égard de la réaction de la Commission en soulignant qu’elle avait déjà fourni des explications par lettre en date du 26 novembre 2001.

29      Considérant que les explications de la défenderesse étaient insuffisantes, la Commission lui a adressé deux rappels datés des 8 novembre 2002 et 8 octobre 2003, demandant le paiement dudit montant.

 Procédure et conclusions des parties

30      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 janvier 2005, la Commission a introduit le présent recours.

31      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, les parties ont été invitées à produire certains documents et à répondre par écrit à plusieurs questions.

32      Par lettres reçues respectivement les 6 et 7 mai 2006, la défenderesse et la requérante ont déféré aux mesures d’organisation de la procédure prises par le Tribunal. Dans sa lettre, la Commission a procédé à un nouveau calcul des intérêts jusqu’au 25 avril 2006 et a réduit sa demande initiale quant au taux des intérêts.

33      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal à l’audience du 21 juin 2006.

34      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        condamner la défenderesse à lui payer la somme de 323 155,61 euros, soit 259 800 euros en capital et 63 355,61 euros au titre des intérêts calculés jusqu’au 25 avril 2006 ;

–        condamner la défenderesse à lui payer des intérêts supplémentaires de 48,04 euros pour chaque jour de retard jusqu’à parfait acquittement ;

–        condamner la défenderesse aux dépens.

35      La défenderesse conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la Commission aux dépens.

 En droit

 Arguments des parties

 Arguments de la Commission

36      Selon la Commission, le projet n’aurait pas été achevé au 31 août 2000 et la défenderesse n’aurait soumis aucun rapport scientifique et aucun relevé des coûts.

37      S’agissant du document du 12 octobre 1999 (point 24 ci-dessus), la Commission fait valoir que celui-ci ne peut en aucun cas être qualifié de rapport périodique d’avancement au sens du contrat. En effet, les rapports périodiques devraient, premièrement, être rédigés selon un formulaire particulier fourni préalablement aux cocontractants, deuxièmement, contenir tous les éléments permettant à la Commission d’évaluer la qualité des travaux et, troisièmement, être accompagnés de relevés des coûts pour l’ensemble des travaux réalisés au cours de la période concernée. Le document du 12 octobre 1999 ne constituerait qu’un texte succinct décrivant quelques actions et ne contiendrait ni les informations ni les annexes ou les relevés des coûts nécessaires. Partant, il ne s’agit pas, selon la Commission, d’un rapport d’avancement, mais d’une simple information préliminaire, indiquant, notamment, qu’une série d’informations (concernant une présentation des résultats obtenus et une présentation de l’unité de flottation de l’air) aurait été envoyée à la Commission par la poste. Toutefois, la Commission affirme n’avoir jamais reçu ces informations. De surcroît, selon ce même document, les autres éléments mécaniques et hydrauliques de l’unité de contrôle et des senseurs de mesure seraient présentés dans sa partie intitulée « Plan de l’usine à pleine échelle », mais le document en cause ne contiendrait cependant pas une telle partie. L’absence de relevés des coûts constituerait, en outre, une violation du point 21.2 des conditions générales (point 13 ci-dessus).

38      Ce serait donc à juste titre que la Commission n’aurait pas perçu ce document comme un véritable rapport d’avancement et aurait attendu le rapport complet, comportant les informations qui, selon la défenderesse, avaient été envoyées par la poste, mais qui ne lui sont jamais parvenues.

39      La défenderesse aurait elle-même admis cela en qualifiant le document du 3 septembre 2001 (point 26 ci-dessus) de premier rapport d’avancement, couvrant tant la première que la deuxième année du projet (septembre 1998-août 2000).

40      Même à considérer que le document du 12 octobre 1999 constituait un rapport d’avancement au sens du contrat, celui-ci aurait été déposé après le 30 septembre 1999, date limite pour son dépôt selon l’article 6 du contrat. Dans ces circonstances, la défenderesse ne saurait invoquer l’approbation implicite prévue par le point 10.3 des conditions générales (point 11 ci-dessus).

41      L’article 8 du contrat, selon lequel toute modification de celui-ci requiert un accord écrit, exclurait une modification implicite, de sorte que l’absence de réponse de la Commission à la demande de prorogation (point 24 ci-dessus) ne saurait valoir acceptation de celle-ci. Partant, le délai pour l’achèvement du contrat n’aurait jamais été prorogé.

42      S’agissant du document du 3 septembre 2001, la Commission indique que celui-ci est conforme au modèle imposé pour la présentation des rapports. Toutefois, les annexes dudit document auraient été rédigées en grec, en violation de l’article 6 du contrat. De surcroît, ce document couvrirait une période de 24 mois, alors que, conformément au même article, un rapport aurait dû être soumis à la Commission tous les douze mois.

43      En outre, les relevés des coûts concernant trois cocontractants ne porteraient aucune signature et aucun relevé signé ne serait parvenu à la Commission, malgré les promesses de la défenderesse. La faillite d’un de ces trois cocontractants survenue en 1999 poserait également la question de savoir sur quelle base la défenderesse a pu présenter un relevé des coûts en 2001 pour une société se trouvant déjà depuis deux ans en faillite, et ce alors que la défenderesse n’en est pas le syndic.

44      La Commission aurait donc considéré à juste titre que le document du 3 septembre 2001 ne pouvait pas non plus constituer un rapport d’avancement. Elle fait également remarquer que la transmission du document du 3 septembre 2001 a eu lieu à l’issue de plusieurs mois d’efforts pour se rapprocher de la défenderesse et après des menaces de résiliation du contrat et d’imposition du remboursement des avances. La défenderesse n’aurait donc réagi que plus de six mois après l’expiration du délai octroyé par la lettre du 24 janvier 2001 (point 25 ci-dessus), et ce en envoyant une copie du rapport déjà soumis dans le cadre du programme FAIR-CT95-9502. L’argument de la défenderesse selon lequel il était souhaitable que les résultats des deux projets soient identiques ne saurait, du point de vue de la Commission, prospérer, puisque les contrats ainsi que les éléments livrables de chaque projet étaient complètement différents. Le document du 3 septembre 2001 correspondrait au contenu et aux résultats du programme FAIR-CT95-9502 et non à celui du projet.

45      La Commission ajoute que ce document a été soumis un an après la fin de la période à laquelle il se réfère (septembre 1998-août 2000), deux ans après la fin du délai pour la soumission du premier rapport et six mois après la fin du délai qu’elle avait octroyé par la lettre du 24 janvier 2001.

46      En tout état de cause, un rapport périodique ne saurait porter sur l’ensemble de la période du projet, ce qui amène la Commission à considérer que le document du 3 septembre 2001 ne pourrait, s’il remplissait les conditions du contrat relatives aux rapports, être qu’un rapport final.

47      S’agissant du retard de la préfecture de Patras (Grèce) pour la délivrance du permis de construire, la Commission conteste son caractère de force majeure. La défenderesse n’aurait pas fourni d’éléments concernant la raison de ce retard, la date de dépôt de sa demande de permis de construire, les démarches éventuellement entreprises pour surmonter les problèmes et le moment où les travaux ont effectivement commencé. Le délai habituel pour la délivrance d’un permis de construire ne constituerait pas un cas de force majeure au sens de l’article 1er du contrat (point 5 ci-dessus). La défenderesse aurait d’ailleurs fait allusion ultérieurement à d’autres raisons pour justifier le retard, ce qui démontrerait que ce retard ne trouve pas son origine dans la délivrance tardive du permis de construire, mais dans le mode de gestion du programme par la défenderesse, laquelle n’aurait jamais respecté les délais contractuels. Enfin, la défenderesse n’offrirait aucune explication quant au fait de ne pas avoir fourni à la Commission, dans sa lettre du 12 octobre 1999, les plans et les études du projet, dont l’élaboration ne nécessitait aucune autorisation administrative.

48      S’agissant de l’obligation de rembourser le montant avancé, la Commission fait valoir que, la défenderesse n’ayant soumis aucun rapport périodique conforme aux spécifications du contrat, la totalité des avances doit être remboursée. Elle souligne que le contrat n’avait pas comme objet la construction d’une quelconque unité industrielle de transformation de fruits, mais la preuve scientifique, par le biais de la construction de ladite unité, que la méthode utilisée pouvait donner, à l’échelle industrielle, les résultats obtenus au niveau expérimental.

49      La Commission fait observer que la soumission des rapports constitue une obligation substantielle pour la bonne exécution des contrats signés dans le cadre des programmes de recherche et de développement technologique en ce qu’elle permet la mise en valeur des résultats s’y rapportant au profit du progrès technologique. La violation de cette obligation pourrait donc donner lieu à la résiliation du contrat et au remboursement du concours financier communautaire en application du point 23.3 des conditions générales et non pas sur le fondement des dispositions du code civil concernant les obligations contractuelles ou l’enrichissement sans cause.

50      S’agissant de la lettre prétendument envoyée par la défenderesse le 26 novembre 2001 (point 28 ci-dessus), la Commission affirme ne l’avoir reçue qu’en juin 2003, après en avoir demandé la retransmission par lettre du 18 mars 2003. La défenderesse ne préciserait pas la voie par laquelle elle l’aurait envoyée en 2001. De plus, la Commission aurait systématiquement essayé d’obtenir des informations sur l’utilisation du concours financier mais n’aurait reçu que des réponses imprécises.

51      En réponse à une question écrite du Tribunal, la Commission a précisé, dans sa lettre accompagnant la réplique, que l’obligation de la défenderesse de rembourser la totalité des avances, alors qu’il existe plusieurs cocontractants, réside dans le fait qu’elle est le représentant des autres cocontractants, agissant en leur nom et pour leur compte au sens de l’article 211 du code civil. Dans ses réponses aux questions du Tribunal, la Commission a affirmé à nouveau que la défenderesse avait agi en tant que représentant de tous les participants au projet.

52      La Commission conteste également dans ses réponses écrites que la défenderesse ait transféré des fonds aux autres cocontractants, en invoquant l’absence de preuves de tels transferts et, surtout, de relevés des coûts dûment signés. Les factures émises par IEM (dont la contribution serait douteuse) à l’attention de la défenderesse ne prouveraient pas le paiement des montants correspondants.

 Arguments de la défenderesse

53      La défenderesse affirme qu’elle a agi en tant que représentant direct des autres cocontractants au sens de l’article 211 du code civil. Dans ses réponses aux questions écrites du Tribunal, elle a affirmé qu’elle représentait Dried Fruit Nederland, le Consorzio interprofessionale cooperative agricole, Valle Verde, Stratelis, l’université polytechnique d’Athènes et IEM selon les précisions contenues dans les lettres des 17 décembre 1998 et 29 janvier 1999 (point 22 ci-dessus).

54      La défenderesse considère que la Commission confond la notion de représentation au sens de l’article 211 du code civil et celle d’obligation solidaire prévue par l’article 480 du même code. En effet, il résulterait de ces articles, ainsi que de la jurisprudence s’y rapportant, que la représentation n’implique pas à l’encontre du représentant une obligation solidaire de rembourser les dettes du représenté. Cette thèse serait confirmée par le point 1.2 du contrat (point 5 ci-dessus). Partant, chaque cocontractant serait tenu de rembourser les montants qu’il a effectivement perçus.

55      Dans ses réponses aux questions écrites du Tribunal, la défenderesse précise avoir versé 143 789,77 euros à IEM. Elle allègue également le versement de 27 613,42 euros à Dried Fruit Nederland in natura sous forme d’équipements (en l’occurrence une chaîne de production que la défenderesse avait obtenue et envoyée à Dried Fruit Nederland).

56      S’agissant de l’exécution du contrat, la défenderesse fait valoir que l’objectif du projet en question était précisément d’atteindre, à l’échelle industrielle, des résultats analogues à ceux obtenus au niveau expérimental dans le cadre du programme FAIR-CT95-9502. Partant, le fait que le document du 12 septembre 2001 expose les mêmes résultats que ceux présentés dans le rapport soumis dans le cadre du programme susvisé ne constituerait pas une violation des obligations contractuelles, mais prouverait, en revanche, la réussite du projet.

57      Les tâches 1.2, 2.1 et 2.2, décrites dans le chapitre 3 dudit document, seraient entièrement nouvelles et concerneraient l’application des résultats du programme FAIR-CT95-9502. De plus, le document du 3 septembre 2001 serait accompagné d’une étude intitulée « Unité de traitement et de recyclage des déchets de l’usine de raisins secs de la société Parthenon SA », comprenant les schémas complets qui auraient été appliqués pour que l’unité fonctionne.

58      S’agissant de la soumission des rapports périodiques, la défenderesse conteste les allégations de la Commission en faisant valoir qu’elle n’a commis aucune violation du contrat à cet égard et que, dès lors, la déclaration de résiliation est nulle. Plus précisément, le document envoyé le 12 octobre 1999 constituerait le premier rapport périodique qui aurait été implicitement approuvé par la Commission, en l’absence d’observations dans le délai d’un mois prévu par le point 10.3 des conditions générales (point 11 ci-dessus). Ce délai serait prévu afin de protéger les cocontractants d’un refus abusif de la Commission d’approuver des rapports qui lui sont soumis. La Commission ayant manqué à ses obligations depuis novembre 1999, elle ne pouvait valablement, selon la défenderesse, et ce après deux ans d’inaction, lui reprocher d’avoir violé ses obligations contractuelles, même si ledit document a été envoyé avec un retard négligeable de douze jours. Elle affirme en outre avoir envoyé par la poste les éléments mentionnés dans le document du 12 octobre 1999, mais la Commission les aurait apparemment perdus.

59      S’agissant de la demande de prorogation du délai pour l’achèvement du projet en raison du retard quant à la délivrance du permis de construire, la défenderesse soutient que, nonobstant la diligence dont elle a fait preuve, la préfecture compétente n’a délivré ledit permis qu’en juillet 2003, soit 20 mois après le dépôt de la demande, alors que le délai normal est de trois mois. Ce retard, n’étant pas imputable à la défenderesse qui aurait entre-temps épuisé toutes les solutions alternatives et acquis un nouveau terrain pour la construction en cause, constituerait un cas de force majeure, lequel serait défini par le point 1.2 du contrat comme un événement hors du contrôle raisonnable des cocontractants. La défenderesse aurait sollicité une prorogation mais n’aurait pas reçu de réponse de la Commission. Toutefois, en application du point 10.3 des conditions générales, cette prorogation devrait être considérée comme implicitement octroyée, en l’absence d’observations de la Commission dans le délai contractuel d’un mois. La Commission n’aurait rejeté la demande de prorogation que dans sa lettre du 22 janvier 2001, soit quatorze mois après l’introduction de la demande, sans tenir compte des éléments factuels invoqués par la défenderesse, dont notamment la nécessité de construire les installations fixes afin d’effectuer les travaux électromécaniques et de faire fonctionner l’unité. Eu égard à l’approbation de la demande de prorogation, le rapport du 3 septembre 2001 devrait également être considéré comme ayant été soumis à la Commission dans le délai. Ces deux rapports ne sauraient être examinés séparément mais conjointement, puisque l’un constituerait la suite de l’autre.

60      La défenderesse aurait envoyé le rapport du 3 septembre 2001, relatif à la période du 1er septembre 1998 au 31 août 2000, accompagné des pièces justificatives des dépenses pour un montant de 261 260,89 euros. Le rapport aurait été reçu par la Commission le 12 septembre 2001. La lettre l’accompagnant aurait exposé les raisons du retard (force majeure, modification de la législation communautaire, problèmes avec d’autres cocontractants). La Commission aurait dû, également, formuler d’éventuelles observations à l’égard dudit rapport dans le délai d’un mois à compter de sa réception, étant donné qu’il s’agissait d’un rapport périodique et non d’un rapport final. La Commission n’ayant répondu que le 7 novembre 2001, soit 55 jours après la réception du rapport, celui-ci devrait être considéré comme ayant été approuvé. Le rapport en question se référerait à une période de deux ans (septembre 1998-septembre 2000) du fait que la Commission n’aurait pas donné suite au rapport du 12 octobre 1999 ni à la demande de prorogation du délai pour l’achèvement du projet. L’intitulé dudit rapport (premier rapport d’avancement) résulterait d’une erreur de frappe du secrétariat de la défenderesse qui serait sans conséquences juridiques, puisque la Commission n’aurait pas fait d’observations quant à une violation du contrat dans le délai d’un mois. Le fait que la Commission considère qu’un document ne constitue pas un rapport au sens du contrat ne la dispenserait pas de l’obligation de formuler ses observations dans ledit délai, à l’expiration duquel ce rapport est censé être approuvé.

61      De surcroît, la Commission n’aurait pas octroyé, dans sa lettre de résiliation du 7 novembre 2001, un délai d’un mois à la défenderesse pour remédier à ses omissions. Partant, la déclaration de résiliation en question serait invalide en ce qu’elle a été faite en violation du point 5.3 des conditions générales (point 12 ci-dessus).

62      Outre le fait que la Commission n’aurait pas respecté le délai d’un mois pour la présentation de ses observations, les griefs invoqués par celle-ci seraient infondés. En effet, la qualité de représentant aurait conféré à la défenderesse le droit de signer les relevés des coûts pour le compte des autres cocontractants, ce d’autant que la plupart des frais auraient été réglés par elle et qu’un cocontractant (Dried Fruit Nederland) avait été mis en faillite le 30 septembre 1999. Ce fait aurait été porté, par lettre du 26 novembre 2001, à la connaissance de la Commission, qui aurait manqué à cet égard à son obligation d’assistance. De plus, les sociétés Consorzio interprofessionale cooperative agricole et Valle Verde auraient fourni des relevés des coûts en omettant de les signer, malgré les demandes de la défenderesse. Dans ces circonstances, cette dernière aurait été fondée à utiliser son pouvoir de représentation afin de signer les relevés des coûts des autres cocontractants. La défenderesse souligne que les coûts afférents à Dried Fruit Nederland concernent les années 1998 et 1999, soit une période antérieure à la faillite de celle-ci. De surcroît, le point 21.3 des conditions générales (point 13 ci-dessus) ne donnerait pas à la Commission le droit de résilier le contrat en cas de non-soumission d’un relevé des coûts, mais uniquement de retenir une partie ou la totalité des montants à verser aux cocontractants jusqu’à la période couverte par le rapport suivant.

63      La défenderesse fait également valoir que le recours est imprécis en ce qu’il ne répond pas aux exigences de l’article 383 du code civil selon lequel :

« Si l’une des parties se trouve en demeure de fournir la prestation due par elle, l’autre partie peut lui fixer un délai raisonnable en lui déclarant en même temps que, passé ce délai, elle refusera la prestation. À défaut d’exécution à l’expiration de ce délai, ladite partie a le droit soit de réclamer des dommages et intérêts pour cause d’inexécution soit de résilier le contrat, sans pouvoir exiger la prestation. »

64      En l’espèce, la Commission n’aurait pas indiqué laquelle de ces options elle avait choisie. Dans l’hypothèse d’un recours en indemnité, la Commission devrait établir le fait générateur du dommage allégué, l’existence de ce dommage et le lien de causalité existant entre les deux. En cas de résiliation du contrat, les prestations respectives seraient réclamées conformément aux dispositions régissant l’enrichissement sans cause. Dans ce cas, la défenderesse estime être en mesure d’exciper de la disparition de l’enrichissement. La Commission ne clarifiant pas sa position à cet égard, il serait impossible à la défenderesse d’organiser sa défense, ce qui priverait le recours de la possibilité de faire l’objet d’un examen juridictionnel.

65      Dans le cas où le Tribunal considérerait que la Commission est en droit de réclamer la restitution des avances sur le fondement de l’enrichissement sans cause, la défenderesse souligne que le recours est imprécis en ce qu’il ne comporte pas les éléments requis par l’article 904 du code civil.

66      En tout état de cause, la Commission n’aurait subi aucun préjudice, puisqu’elle aurait reçu les deux rapports en bonne et due forme, tant celui d’octobre 1999 que celui de septembre 2001, et la valeur de ceux-ci serait supérieure à l’avance versée. Ces rapports apporteraient la preuve que le programme pilote FAIR-CT95-9502 peut être appliqué à l’échelle industrielle. Le montant total investi à cet effet s’élèverait à 445 573,40 euros, soit 185 773,41 euros de plus que le montant de l’avance.

67      À titre subsidiaire, la défenderesse invoque la disparition de l’enrichissement au sens de l’article 909 du code civil. Selon la défenderesse, il ressort d’une série de pièces justificatives soumises au Tribunal que l’avance versée a été entièrement utilisée selon la ventilation suivante :

–        183 724,22 euros pour les études ;

–        35 216,43 euros pour les constructions ;

–        2 424,06 euros pour les déplacements nécessaires ;

–        190 576,78 euros pour les salaires du personnel ;

–        29 347,02 euros pour l’achat d’équipements mécaniques envoyés à Dried Fruit Nederland, déjà en faillite.

68      S’agissant des intérêts, la défenderesse fait valoir que, à supposer qu’elle soit tenue de restituer des sommes, leur calcul doit se faire conformément au point 5.4 des conditions générales (point 15 ci-dessus). De surcroît, l’article 296 du code civil interdirait l’anatocisme à défaut d’un accord à cet égard, accord qui ne serait pas intervenu en l’espèce.

69      La défenderesse affirme en conclusion que le projet est achevé et que l’installation s’y rapportant est totalement opérationnelle, ce qui prouve la bonne exécution du projet. Elle sollicite, à cet égard, une descente du Tribunal sur les lieux aux frais de la Commission afin de constater ce fait important aux fins de la résolution du litige.

 Appréciation du Tribunal

 Observations liminaires

70      Il y a lieu de relever que, aux fins de la résolution du litige, le Tribunal doit vérifier, en premier lieu, si la défenderesse a effectivement violé les obligations contractuelles invoquées par la Commission. En cas de réponse affirmative, il y aura lieu de définir l’étendue de l’obligation de remboursement pesant sur la défenderesse, eu égard, notamment, aux règles applicables quant au caractère solidaire ou non de cette obligation.

71      En effet, une situation dans laquelle les cocontractants n’exécutent pas le projet faisant l’objet du contrat ni ne soumettent des rapports d’avancement conformément aux stipulations contractuelles s’y rapportant constitue, de toute évidence, un cas où la contribution financière due au titre du projet peut s’avérer inférieure aux versements effectués à ce titre. Partant, les conditions d’application du point 23.3 des conditions générales (point 14 ci-dessus) sont, dans un tel cas, réunies, ce qui implique la possibilité que les cocontractants soient tenus de rembourser une partie, voire la totalité, des avances perçues.

 Sur la violation alléguée des obligations contractuelles

72      Il convient de rappeler que le droit applicable au contrat est, ainsi que cela est d’ailleurs constant entre les parties, le droit grec.

73      S’agissant de l’achèvement du projet dans les délais contractuels, il convient de souligner que le respect de la durée d’exécution prévue dans les contrats d’aide aux projets de recherche et de développement est essentiel. En effet, ces projets atteignent leur objectif s’ils sont menés dans un certain délai, après lequel leur valeur est susceptible de décliner en raison du progrès technologique. À cela s’ajoute le fait que les moyens budgétaires mis en œuvre par la Commission ne sont disponibles que dans des périodes déterminées (conclusions de l’avocat général Mme Kokott sous l’arrêt de la Cour du 17 mars 2005, Commission/AMI Semiconductor Belgium e.a., C‑294/02, Rec. p. I‑2175, I‑2178, ci-après l’« arrêt AMI Semiconductor », point 155).

74      Ces constatations n’excluent pas qu’un opérateur puisse invoquer un cas de force majeure, en particulier lorsque le contrat lui-même prévoit, comme en l’espèce, un tel cas (point 5 ci-dessus). Toutefois, en l’occurrence, la défenderesse n’a pas précisé à suffisance de droit les raisons ayant provoqué le retard dans la réalisation du projet. Ainsi, dans le document du 12 octobre 1999, elle a fait état de « raisons de nature administrative » sans identifier les problèmes spécifiques rencontrés et leur origine, la date du dépôt de la demande du permis de construire ni la date à laquelle les problèmes ont été surmontés. En outre, selon une lettre datée du 17 janvier 2001 adressée par la défenderesse à la Commission et le plan d’épannelage produit par la défenderesse, cette dernière a acheté, au mois de décembre 1999, un terrain comprenant un bâtiment industriel qui devait être agrandi aux fins de l’exécution du projet. Pourtant, le plan d’épannelage en question date du mois de juillet 2003, à savoir du mois au cours duquel le permis de construire a finalement été délivré selon la défenderesse. Or, la soumission préalable d’un plan d’épannelage est nécessaire pour obtenir un permis de construire selon l’article 3 du décret présidentiel du 13 juillet 1993 (FEK D’ 795/13.07.1993), ce qui implique que la raison du retard quant à la délivrance du permis de construire de l’extension n’est pas imputable (ou, à tout le moins, pas exclusivement) à l’administration. En outre, si le permis en question a été effectivement octroyé 20 mois après le dépôt de la demande, comme l’allègue la défenderesse (point 59 ci-dessus), il convient de constater que cette demande avait été formulée au mois de novembre 2001, c’est-à-dire plus d’un an après l’expiration du délai d’achèvement du projet et bien après le mois d’octobre 1999, mois au cours duquel elle a sollicité la prorogation du délai. Dans ces circonstances, l’argumentation de la défenderesse tenant à l’existence d’un cas de force majeure ne saurait être retenue.

75      S’agissant de la demande de prorogation introduite dans le document du 12 octobre 1999 (point 24 ci-dessus), il est vrai que la Commission n’y a jamais répondu. Cependant, c’est à tort que la défenderesse invoque le point 10.3 des conditions générales afin d’établir que la Commission a implicitement accepté cette prorogation. Même à supposer que le document du 12 octobre 1999 constituait effectivement un rapport d’avancement, le point 10.3 des conditions générales doit être interprété en ce sens qu’il prévoit l’approbation implicite du contenu usuel d’un rapport d’avancement. Or, une demande de prorogation du délai pour l’achèvement du projet ne peut être considérée comme contenu usuel d’un rapport d’avancement, puisqu’elle vise à une modification d’une condition substantielle du contrat prévue à l’article 2 de celui-ci. Elle ne peut donc faire l’objet d’une approbation implicite, à supposer même que le rapport ait été approuvé de cette façon. Admettre une telle approbation implicite reviendrait à interpréter le point 10.3 des conditions générales de façon contraire à l’article 8 du contrat, qui soumet toute modification de celui-ci à un accord écrit. En tout état de cause, force est de constater que la défenderesse n’avait pas réalisé le projet à la date du 1er septembre 2001, qui aurait constitué la date limite si la prorogation sollicitée avait été accordée. Partant, son argumentation ne saurait être retenue.

76      S’agissant des affirmations générales et non étayées de la défenderesse concernant la mise en place d’une unité opérationnelle (point 69 ci-dessus), elles ne suffisent pas à prouver la bonne exécution du contrat. En effet, force est de constater que la défenderesse n’a produit aucun élément de preuve concernant l’existence, les caractéristiques techniques et l’état actuel de l’unité ainsi que la date à laquelle celle-ci a été opérationnelle, afin de démontrer sa conformité avec les prévisions de l’annexe I au contrat. Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu d’accueillir la demande visant à une descente sur les lieux.

77      En ce qui concerne les griefs de la Commission tirés de la non-soumission des rapports d’avancement, il convient de relever que ceux-ci ont pour objet de donner à la Commission un aperçu du bon déroulement du projet afin de décider, notamment, si de nouvelles avances peuvent être débloquées (article 4 du contrat et article 10 des conditions générales). Partant, l’approbation éventuelle d’un rapport n’implique aucune approbation des éléments livrables (conclusions de l’avocat général Mme Kokott sous l’arrêt AMI Semiconductor, précitées, point 166).

78      S’agissant du document du 12 octobre 1999 (point 24 ci-dessus), la défenderesse n’est pas fondée à prétendre que celui-ci constitue un rapport d’avancement approuvé implicitement conformément au point 10.3 des conditions générales. En effet, la Commission ne pouvait avoir une connaissance complète de ce document lui permettant d’exposer ses observations dans le délai contractuel, puisque la défenderesse lui avait indiqué qu’il serait accompagné d’annexes contenant des informations critiques. Or, les annexes en question ne sont pas parvenues à la Commission. La défenderesse n’a présenté à cet égard que l’explication, peu convaincante et non étayée par des pièces justificatives, selon laquelle elle aurait envoyé les documents mentionnés dans le rapport du 12 octobre 1999, mais la Commission les aurait perdus. Il convient d’observer que la défenderesse n’a même pas produit une copie des documents prétendument envoyés. Le Tribunal ne saurait donc accueillir ses arguments.

79      En outre, comme le fait observer la Commission, le document du 3 septembre 2001 (point 26 ci-dessus) est intitulé « Premier rapport d’avancement », titre qui figure sur ses deux premières pages. La lettre accompagnant ledit document indique clairement qu’il s’agit du « premier rapport d’avancement scientifique complet » pour le projet. De plus, ce rapport couvre la période du 1er septembre 1998 au 31 août 2000 et inclut donc la période censée être couverte par le document du 12 octobre 1999 (1er septembre 1998-31 août 1999), ce qui n’aurait pas été le cas si la défenderesse avait considéré que le document du 12 octobre 1999 était un rapport d’avancement au sens du contrat. L’argument de la défenderesse selon lequel le rapport du 3 septembre 2001 couvre une période de deux ans parce que la Commission n’avait pas réagi au document du 12 octobre 1999 ni à la demande de prolongation qui y était formulée (point 60 ci-dessus) ne saurait prospérer. En effet, cet argument n’est pas cohérent avec la position de la défenderesse selon laquelle le document du 12 octobre 1999 constituait un rapport qui avait été implicitement approuvé et la prorogation demandée avait été implicitement octroyée.

80      Partant, c’est à juste titre que la Commission considère que le premier rapport d’avancement ne lui est jamais parvenu.

81      Les allégations de la défenderesse ne sauraient non plus prospérer en ce qui concerne le document du 3 septembre 2001. Pour les raisons déjà mentionnées, les délais contractuels n’ont jamais été prorogés. Partant, ledit document a été déposé hors délai contractuel, mais aussi six mois et demi après la fin du délai octroyé par la lettre de la Commission du 24 janvier 2001 (point 25 ci-dessus).

82      S’agissant du contenu de ce document, il y a lieu d’observer qu’il s’agit effectivement d’une copie du rapport soumis par la défenderesse au sein du programme FAIR-CT95-9502. Même s’il était concevable que ces deux rapports contiennent des résultats identiques, si le projet ne constituait qu’une application industrielle du projet expérimental, la défenderesse n’a cependant avancé aucun argument convaincant pour expliquer la similitude parfaite du contenu et même de la numérotation des chapitres et des paragraphes des deux rapports. En effet, un rapport d’ « avancement » concernant un projet mettant en œuvre les résultats d’une recherche déjà menée ne saurait être identique au rapport soumis à l’issue de cette même recherche.

83      De plus, l’allégation de la défenderesse selon laquelle les tâches 1.2, 2.1 et 2.2 du chapitre 3 du rapport du 3 septembre 2001 seraient nouvelles et concerneraient l’application du programme FAIR-CT95-9502 (point 57 ci-dessus) est inexacte, les points susmentionnés étant identiques dans les deux rapports. La phrase introductive du rapport, selon laquelle, « en accord avec les exigences du projet, les tâches de recherche [citées] ont été effectuées et achevées », ne permet d’ailleurs pas de considérer que ces tâches constituaient l’application des résultats du programme FAIR-CT95-9502. En effet, le chapitre 3 du rapport soumis dans le cadre de ce programme contenait une phrase introductive identique, ce qui indique que cette phrase vise à préciser les travaux effectués et non que ceux-ci constituent une exécution du programme FAIR-CT95-9502.

84      L’argument de la défenderesse concernant le non-octroi du délai d’un mois prévu par le point 5.3 des conditions générales (point 61 ci-dessus) n’est pas davantage fondé. En effet, la Commission a octroyé ce délai par la lettre du 24 janvier 2001 et n’a résilié le contrat que par la lettre du 7 novembre 2001, avec effet rétroactif au 24 février 2001, à savoir après l’expiration dudit délai, la défenderesse n’ayant pas remédié à ses omissions.

85      En ce qui concerne les relevés des coûts annexés au rapport du 3 septembre 2001, il suffit d’observer que ceux du Consorzio interprofessionale cooperative agricole, de Valle Verde et de Dried Fruit Nederland ne portaient aucune signature. Il n’y a donc pas besoin de trancher la question de savoir si la défenderesse était, en tant que coordinateur et représentant des autres cocontractants, habilitée à les signer pour leur compte (point 62 ci-dessus).

86      Dans ces circonstances, la faillite de Dried Fruit Nederland et la défaillance du Consorzio interprofessionale cooperative agricole et de Valle Verde (point 62 ci-dessus) n’enlèvent rien aux propres manquements de la défenderesse. Par ailleurs, le caractère non solidaire de l’obligation de rembourser les avances perçues (voir points 93 à 102 ci-après) assure qu’un cocontractant ne sera pas tenu de rembourser les montants dus par un autre cocontractant défaillant.

87      Pour ce qui est de l’étude qui accompagne le rapport du 3 septembre 2001 (point 57 ci-dessus), il suffit de relever que les deux schémas qui y sont annexés portent la date du 15 octobre 1998 et ont donc été établis juste un mois et demi après le début de l’exécution du contrat. Partant, il y a lieu de considérer que cette étude ne présente pas l’état des travaux au mois de septembre 2001 (date du rapport) et ne fait que répéter la solution théorique à mettre en œuvre dans le cadre du projet. Elle ne constitue donc pas un rapport d’avancement.

88      S’agissant de la prétendue violation du point 21.3 des conditions générales (point 62 ci-dessus), il convient de relever que le droit, donné à la Commission, en cas de non-soumission d’un relevé des coûts, de retenir une partie ou la totalité des montants à verser aux cocontractants jusqu’à la période couverte par le rapport suivant n’exclut pas le droit de résilier le contrat et de demander le remboursement des avances. Or, comme il a été considéré précédemment, la défenderesse a enfreint plusieurs obligations contractuelles, ce qui justifiait la résiliation du contrat.

89      Il en résulte que la défenderesse, n’ayant pas pu présenter dans les délais un rapport d’avancement répondant aux exigences contractuelles, ne saurait se prévaloir d’une approbation implicite des documents qu’elle a soumis, en application du point 10.3 des conditions générales.

90      En ce qui concerne l’argument tiré de l’article 383 du code civil et visant l’imprécision du recours (points 63 et 64 ci-dessus), il y a lieu de préciser que cet article édicte une règle supplétive, c’est-à-dire une règle à laquelle les parties peuvent déroger par un accord [arrêt de l’Areios Pagos (Cour de cassation hellénique) n° 348/1994, arrêts de l’Efeteio Peiraios (cour d’appel du Pirée) n° 426/1997, Elliniki Dikaiosyni 1998.669, et de l’Efeteio Athinon (cour d’appel d’Athènes) n° 106/1998, Armenopoulos 1998.1482]. Le point 23.3 des conditions générales constituant le fondement de la demande de la Commission tendant au remboursement des avances, motif pris de la violation des obligations contractuelles par un ou plusieurs de ses cocontractants, l’article 383 du code civil ne s’applique pas. L’argumentation de la défenderesse doit, par conséquent, être rejetée comme inopérante.

91      L’argumentation développée par la défenderesse sur le fondement de l’enrichissement sans cause (points 65 à 67 ci-dessus) doit, de même, être écartée comme étant inopérante, la Commission ne fondant pas son recours sur les articles 904 et suivants du code civil mais directement sur l’article 23 des conditions générales. En effet, selon une jurisprudence constante, le fondement légal de l’enrichissement sans cause n’a qu’un caractère subsidiaire, en ce sens que le créancier ne peut y avoir recours qu’en l’absence d’un fondement contractuel ou délictuel [arrêt de l’Areios Pagos n° 222/2003, Elliniki Dikaiosyni 2004.475, et arrêt de l’Efeteio Dodekanisou (cour d’appel du Dodécanèse) n° 193/2004].

92      En conclusion, il ressort des éléments soumis par les parties à l’appréciation du Tribunal que le projet n’a pas été réalisé dans le délai contractuel et que la défenderesse n’a soumis aucun rapport d’avancement périodique à la Commission, en violation des stipulations du contrat. De surcroît, il n’a été produit aucun élément attestant de l’existence, des caractéristiques techniques et de l’état actuel de l’unité que la défenderesse prétend avoir construite afin d’atteindre l’objectif du projet. Dans ces circonstances, le Tribunal considère que la Commission est bien fondée à réclamer le remboursement de l’avance. Il reste cependant à définir l’étendue de l’obligation de remboursement pesant sur la défenderesse en fonction, notamment, du caractère solidaire ou conjoint de cette obligation.

 Sur l’étendue de l’obligation de remboursement

93      Ainsi qu’il a été relevé (point 14 ci-dessus), le point 23.3 des conditions générales prévoit que, si les paiements effectués au titre du projet excèdent la contribution financière totale due par la Commission, les cocontractants sont tenus de rembourser la différence entre ces paiements et cette contribution.

94      Il est constant entre les parties que la défenderesse a conclu le contrat en question en son propre nom mais aussi comme représentant, au sens de l’article 211 du code civil, des autres entités mentionnées au contrat, auxquelles elle était tenue de transférer les montants appropriés selon le point 4.2 du contrat. Partant, toutes ces entités constituent, en l’espèce, les cocontractants de la Commission (arrêt de l’Areios Pagos n° 1272/1999, Elliniki Dikaiosyni 2001.430).

95      Il résulte de la jurisprudence des juridictions helléniques se rapportant aux obligations solidaires que l’article 480 du code civil édicte deux principes établissant des présomptions simples. Selon le premier, une prestation divisible due par plusieurs personnes n’est pas, sauf stipulation contraire, solidaire. Chaque débiteur est donc tenu de verser une partie de celle-ci. Selon le second, une telle obligation est, sauf stipulation contraire, divisée à parts égales (arrêt de l’Areios Pagos n° 890/2005). S’il ne résulte pas du contrat, d’une façon claire, que les parties ont stipulé, explicitement ou implicitement, une obligation solidaire, l’obligation est censée ne pas l’être (arrêt de l’Areios Pagos n° 935/1999).

96      Il en découle que, selon le droit grec, s’il y a plusieurs débiteurs, le créancier ne peut que demander à chacun de rembourser la partie de la dette qui lui incombe en vertu du contrat qui régit leur relation juridique, sauf s’il est clairement stipulé dans ce contrat que les débiteurs sont solidairement obligés vis-à-vis du créancier, circonstance que le demandeur doit invoquer et prouver, afin de renverser la présomption légale.

97      Le fait qu’un des débiteurs ait conclu le contrat en son propre nom et en tant que représentant des autres n’affecte pas le caractère non solidaire de l’obligation, de sorte que ce représentant n’est obligé de verser que la somme qui lui incombe (arrêt de l’Areios Pagos n° 1792/2002).

98      Il en résulte que la thèse de la Commission selon laquelle l’obligation de la défenderesse de rembourser la totalité de l’avance réside dans le fait qu’elle est le représentant des autres cocontractants, agissant en leur nom et pour leur compte au sens de l’article 211 du code civil, ne saurait être retenue.

99      Il y a donc lieu d’examiner si le contrat contient des stipulations instaurant une obligation solidaire à la charge de la défenderesse. Par son arrêt AMI Semiconductor, portant sur des stipulations contractuelles identiques, la Cour a jugé que le point 1.1 du contrat impose aux parties l’obligation d’exécuter le contrat « conjointement et solidairement » (jointly and severally), mais que cette obligation, qui en tout état de cause ne concerne, selon le libellé de cette disposition, que l’exécution des travaux et non le remboursement d’avances, est ensuite strictement limitée par le point 1.2 du même article (arrêt AMI Semiconductor, point 86).

100    Ainsi, le point 1.2, deuxième phrase, du contrat infirme toute responsabilité solidaire pour le remboursement d’avances en prévoyant qu’un cocontractant « ne sera pas tenu [...] de rembourser les montants dus par un cocontractant défaillant à moins qu’il n’ait lui-même contribué à cette défaillance » (arrêt AMI Semiconductor, point 87).

101    Il ressort de cette analyse que le point 23.3 des conditions générales, interprété à la lumière du point 1.2 du contrat, n’impose à un cocontractant que le remboursement d’avances qu’il a effectivement perçues, à moins qu’il ne soit démontré que le même cocontractant a contribué à une défaillance ayant fait naître au profit de la Commission un droit au remboursement d’une avance versée à un autre cocontractant. La charge de la preuve de la contribution d’un cocontractant à une telle défaillance incombe nécessairement à la Commission en sa qualité de demanderesse invoquant cette défaillance (arrêt AMI Semiconductor, point 88).

102    Le fait que la défenderesse ait perçu la totalité de l’avance, en sa qualité de coordinateur, ne l’oblige donc pas, à condition qu’elle ait versé des montants aux autres contractants, à rembourser la totalité de celle-ci mais uniquement le montant qu’elle a gardé pour son compte. En effet, il résulte du point 2.1 des conditions générales (point 8 ci-dessus) que le coordinateur reçoit les paiements en qualité de dépositaire et qu’il doit les transférer aux cocontractants, sans devenir lui-même propriétaire des fonds. Le coordinateur n’a qu’une fonction d’intermédiaire qui décharge la Commission de la tâche d’effectuer le paiement au profit d’un nombre plus élevé de bénéficiaires (conclusions de l’avocat général Mme Kokott sous l’arrêt AMI Semiconductor, précitées, point 124). Partant, aucun cocontractant ne peut être tenu de rembourser au titre du point 23.3 des conditions générales des sommes allant au-delà de ce qu’il a lui-même perçu (arrêt AMI Semiconductor, point 90).

103    La Commission n’a pas fondé son recours sur le point 1.2 du contrat. En effet, elle n’a ni allégué ni prouvé que la défenderesse avait contribué d’une manière quelconque à une défaillance d’un autre cocontractant. En revanche, ce n’est qu’au stade de la réplique qu’elle a expliqué son point de vue quant à l’étendue de l’obligation de la défenderesse en invoquant uniquement sa qualité de représentant des autres parties contractantes (point 51 ci-dessus). De surcroît, ce n’est que dans ses réponses aux questions écrites du Tribunal que la Commission a fait valoir pour la première fois que la défenderesse n’avait versé aucun montant aux autres cocontractants (point 52 ci-dessus).

104    En l’espèce, la Commission a annexé à sa requête une copie d’un relevé des coûts dûment signé par IEM pour un montant de 143 789,77 euros. Ce relevé avait été soumis à la Commission par la défenderesse en annexe du rapport du 3 septembre 2001 (point 26 ci-dessus). La défenderesse a annexé à son mémoire en défense des copies de deux factures émises par IEM pour un montant total de 43 237 333 drachmes grecques (GRD), soit 126 888,72 euros. Ces factures sont enregistrées dans le grand livre de la défenderesse, dont elle a produit des extraits en annexe à ses réponses aux questions écrites du Tribunal. Or, il résulte de ces extraits que la défenderesse avait versé à IEM, au 30 juin 2000, le montant de 105 416,47 euros. Elle devait donc encore 7 316 671 GRD, soit 21 472,25 euros à IEM (comme en témoigne le symbole « – » juxtaposé à ce montant). Cependant, elle affirme avoir également versé à IEM, avant le 1er juillet 1998, le montant de 38 373,31 euros (ce qui équivaudrait au total de 143 789,77 euros déclaré par IEM dans son relevé des coûts), pour lequel elle n’aurait pas pu trouver de justificatifs en raison de l’ancienneté de cette opération. Or, cette explication de la défenderesse quant au montant de 38 373,31 euros est peu convaincante pour deux raisons. Premièrement, il est fort douteux qu’elle ait versé des montants à IEM avant même que l’avance ait été disponible (c’est-à-dire le 7 août 1998, point 23 ci-dessus). Deuxièmement, si elle a effectivement versé ce montant avant le 1er juillet 1998, elle n’a pas expliqué pourquoi son grand livre présentait, le 30 juin 2000, une dette de 7 316 671 GRD envers IEM.

105    En ce qui concerne les doutes que la Commission a vaguement exprimés dans ses réponses écrites, ainsi qu’à l’audience, quant à la relation des factures en question avec le projet et son objectif, il suffit de relever que ces factures font référence explicitement, sous leur rubrique « motivation », au contrat FAIR-CT98-9544 ainsi qu’aux travaux effectués. Le fait qu’une seule des deux factures porte la mention « acquittée » s’explique par l’existence du solde de 7 316 671 GRD dû par la défenderesse à IEM. Force est de constater que la Commission n’a invoqué aucun élément de preuve afin d’étayer ses doutes ni effectué un contrôle du projet, droit qu’elle détient en vertu de l’article 24 des conditions générales. L’intérêt d’un tel contrôle, qui peut prendre la forme d’une demande de production de toutes les pièces justificatives relatives aux paiements effectués par le coordinateur et d’une inspection des travaux effectués, réside notamment dans la collecte d’informations sur le montant que la Commission peut réclamer à chaque cocontractant lorsque l’obligation de remboursement n’est pas solidaire, comme en l’espèce. De surcroît, un tel contrôle aurait permis à la Commission d’identifier le ou les cocontractants n’ayant pas honoré leurs engagements contractuels. À supposer que les travaux accomplis par IEM aient abouti à un résultat ne correspondant pas aux prévisions du contrat, il resterait encore à la Commission à invoquer et à prouver que la défenderesse a contribué à cette défaillance pour que celle-ci soit tenue de rembourser les sommes perçues par IEM. Or, la Commission n’a produit aucun élément démontrant que tel a été le cas.

106    S’agissant des 27 613,42 euros que la défenderesse prétend avoir versé in natura à Dried Fruit Nederland (point 55 ci-dessus), le Tribunal considère que ce paiement n’est pas prouvé à suffisance de droit. En effet, la défenderesse n’a produit aucun élément démontrant le montant qu’elle aurait payé pour obtenir la chaîne de production en question, mais uniquement la facture qu’elle a émise à l’attention de Dried Fruit Nederland ainsi que la lettre de voiture internationale (CMR) s’y rapportant. De surcroît, la défenderesse n’a pas expliqué la raison pour laquelle elle avait facturé cette chaîne de production au prix de 27 613,42 euros à Dried Fruit Nederland alors que, si cette chaîne de production était considérée comme un versement in natura, la facture qui y est relative devrait, normalement, indiquer un montant nul.

107    Dans ces circonstances, le Tribunal considère que seul le versement de 105 416,47 euros à IEM est prouvé. Partant, la Commission est en droit de recouvrer auprès de la défenderesse, conformément au point 23.3 des conditions générales, la totalité de l’avance après déduction du montant de 105 416,47 euros.

 Sur les intérêts

108    La Commission a demandé dans sa requête que la défenderesse soit condamnée au paiement du taux d’intérêt prévu par la loi grecque n° 2842/2000 (FEK A’ 207/27.09.2000), pour la période du 31 juillet 2002 (date d’échéance) au 5 juin 2003, et par la décision du Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne, du 5 juin 2003, fixant la base de calcul du taux d’intérêt à compter du 6 juin 2003, selon les prévisions de l’article 3, paragraphe 2, de la loi susmentionnée.

109    Dans ses réponses aux questions du Tribunal, la Commission a réduit ses prétentions et a demandé que la défenderesse soit condamnée au paiement d’un taux d’intérêt équivalent à celui appliqué par la Banque centrale européenne à ses opérations principales de refinancement majoré d’un point et demi de pourcentage pour la période du 31 juillet au 31 décembre 2002 et de trois points et demi à compter de cette dernière date.

110    La majoration du taux d’intérêt de trois points et demi de pourcentage est prévue par l’article 86 du règlement (CE, Euratom) n° 2342/2002 de la Commission, du 23 décembre 2002, établissant les modalités d’exécution du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 357, p. 1). Ce règlement est entré en vigueur, selon son article 273, le 1er janvier 2003.

111    En ce qui concerne la période expirant le 31 décembre 2002, cette nouvelle demande est recevable en tant qu’elle constitue un désistement partiel de la demande initiale. En revanche, pour ce qui est de l’application du règlement n° 2342/2002, celui-ci ne saurait remettre en cause les stipulations d’un contrat conclu antérieurement à son entrée en vigueur, en l’absence de toute prévision en ce sens. Il s’ensuit que pour la période allant du 1er janvier 2003 jusqu’à l’acquittement complet de la dette, la clause contractuelle, contenue au point 5.4 des conditions générales (point 15 ci-dessus), demeure applicable.

112    S’agissant de l’argument de la défenderesse relatif à l’anatocisme (point 68 ci-dessus), il y a lieu d’observer que la Commission ne formule pas de demande de capitalisation des intérêts. Cet argument est donc inopérant.

113    De l’ensemble des considérations qui précèdent, il résulte que la défenderesse doit être condamnée à payer à la Commission la somme de 154 383,53 euros, augmentée des intérêts au taux fixé par la Banque centrale européenne pour les opérations principales de refinancement, majorés d’un point et demi pour la période du 31 juillet au 31 décembre 2002 et de deux points à compter du 1er janvier 2003 jusqu’à l’acquittement complet de la dette.

 Sur les dépens

114    Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, ce dernier peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de décider que la Commission supporte un tiers de ses propres dépens et un tiers des dépens de la défenderesse, cette dernière devant supporter deux tiers de ses propres dépens ainsi que deux tiers des dépens de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La défenderesse, Parthenon AE Oikodomikon – Technikon – Touristikon – Viomichanikon – Emporikon kai Exagogikon Ergasion, est condamnée à payer à la Commission la somme de 154 383,53 euros, augmentée des intérêts au taux fixé par la Banque centrale européenne pour les opérations principales de refinancement, majorés d’un point et demi pour la période du 31 juillet au 31 décembre 2002 et de deux points à compter du 1er janvier 2003 jusqu’à parfait acquittement.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Commission supportera un tiers de ses propres dépens et un tiers des dépens de la défenderesse, cette dernière devant supporter deux tiers de ses propres dépens ainsi que deux tiers des dépens de la Commission.

Pirrung

Forwood

Papasavvas

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 décembre 2006.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       J. Pirrung

Table des matières

Cadre juridique

Cadre contractuel

Droit grec

Cadre factuel

Procédure et conclusions des parties

En droit

Arguments des parties

Arguments de la Commission

Arguments de la défenderesse

Appréciation du Tribunal

Observations liminaires

Sur la violation alléguée des obligations contractuelles

Sur l’étendue de l’obligation de remboursement

Sur les intérêts

Sur les dépens


* Langue de procédure : le grec.