Language of document : ECLI:EU:T:1998:99

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre élargie)

14 mai 1998 (1)

«Concurrence — Article 85, paragraphe 1, du traité CE — Échange d'informations — Injonction — Amende — Détermination du montant — Motivation — Coopération durant la procédure administrative»

Dans l'affaire T-338/94,

Finnish Board Mills Association — Finnboard, association professionnelle de droit finlandais, établie à Helsinki, représentée initialement par Mes Hans Hellmann et Hans-Joachim Voges, avocats à Cologne, puis uniquement par Me Hellmann, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Mes Loesch et Wolter, 11, rue Goethe,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. Bernd Langeheine et Richard Lyal, membres du service juridique, en qualité d'agents, assistés de Me Dirk Schroeder, avocat à Cologne, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision 94/601/CE de la Commission, du 13 juillet 1994, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CE (IV/C/33.833 — Carton) (JO L 243, p. 1),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre élargie),

composé de MM. B. Vesterdorf, président, C. P. Briët, Mme P. Lindh, MM. A. Potocki et J. D. Cooke, juges,

greffier: M. J. Palacio González, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale qui s'est déroulée du 25 juin au 8 juillet 1997,

rend le présent

Arrêt

Faits à l'origine du litige

1.
    La présente affaire concerne la décision 94/601/CE de la Commission, du 13 juillet 1994, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CE (IV/C/33.833 — Carton) (JO L 243, p. 1), rectifiée avant sa publication par une décision de la Commission du 26 juillet 1994 [C(94) 2135 final] (ci-après «décision»). La décision a infligé des amendes à 19 fabricants fournisseurs de carton dans la Communauté, du chef de violations de l'article 85, paragraphe 1, du traité.

2.
    Le produit faisant l'objet de la décision est le carton. Trois types de carton, désignés comme relevant des qualités «GC», «GD» et «SBS», sont mentionnés dans la décision.

3.
    Le carton de qualité GD (ci-après «carton GD») est un carton à intérieur gris (papiers recyclés) qui sert habituellement à l'emballage de produits non alimentaires.

4.
    Le carton de qualité GC (ci-après «carton GC») est un carton présentant une couche extérieure blanche et servant habituellement à l'emballage de produits alimentaires. Le carton GC est d'une qualité supérieure à celle du carton GD. Dans la période couverte par la décision, il a généralement existé entre ces deux

produits un écart de prix d'environ 30 %. Dans une moindre mesure, le carton GC de haute qualité sert également à des utilisations graphiques.

5.
    SBS est le sigle utilisé pour désigner le carton entièrement blanc (ci-après «carton SBS»). Ce carton est un produit dont le prix est d'environ 20 % supérieur à celui du carton GC. Il sert à l'emballage des aliments, des produits cosmétiques, des médicaments et des cigarettes, mais il est destiné principalement à des utilisations graphiques.

6.
    Par lettre du 22 novembre 1990, la British Printing Industries Federation, organisation professionnelle qui représente la majorité des fabricants de boîtes imprimées du Royaume-Uni (ci-après «BPIF»), a déposé une plainte informelle auprès de la Commission. Elle a fait valoir que les fabricants de carton approvisionnant le Royaume-Uni avaient introduit une série de hausses de prix simultanées et uniformes et demandé à la Commission de vérifier l'existence d'une éventuelle infraction aux règles communautaires de la concurrence. Afin d'assurer la publicité de son initiative, la BPIF a publié un communiqué de presse. Le contenu de ce communiqué a été relaté par la presse professionnelle spécialisée dans le courant du mois de décembre 1990.

7.
    Le 12 décembre 1990, la Fédération française du cartonnage a également déposé une plainte informelle auprès de la Commission, dans laquelle elle présentait des observations relatives au marché français du carton en des termes analogues à ceux de la plainte déposée par la BPIF.

8.
    Les 23 et 24 avril 1991, des agents de la Commission, agissant au titre de l'article 14, paragraphe 3, du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962, 13, p. 204, ci-après «règlement n° 17»), ont procédé à des vérifications simultanées sans avertissement préalable dans les locaux de plusieurs entreprises et associations professionnelles du secteur du carton.

9.
    A la suite de ces vérifications, la Commission a adressé des demandes de renseignements et de documents au titre de l'article 11 du règlement n° 17 à tous les destinataires de la décision.

10.
    Les éléments obtenus dans le cadre de ces vérifications et demandes de renseignements et de documents ont amené la Commission à conclure que les entreprises concernées avaient, du milieu de l'année 1986 à avril 1991 au moins (dans la plupart des cas), participé à une infraction à l'article 85, paragraphe 1, du traité.

11.
    En conséquence, elle a décidé d'engager une procédure en application de cette dernière disposition. Par lettre du 21 décembre 1992, elle a adressé une communication des griefs à chacune des entreprises concernées. Toutes les

entreprises destinataires y ont répondu par écrit. Neuf entreprises ont demandé à être entendues oralement. Leur audition a eu lieu du 7 au 9 juin 1993.

12.
    Au terme de la procédure, la Commission a adopté la décision, qui comprend les dispositions suivantes:

«Article premier

Buchmann GmbH, Cascades SA, Enso-Gutzeit Oy, Europa Carton AG, Finnboard — the Finnish Board Mills Association, Fiskeby Board AB, Gruber & Weber GmbH & Co KG, Kartonfabriek De Eendracht NV (dont le nom commercial est BPB de Eendracht NV), NV Koninklijke KNP BT NV (anciennement Koninklijke Nederlandse Papierfabrieken NV), Laakmann Karton GmbH & Co KG, Mo Och Domsjö AB (MoDo), Mayr-Melnhof Gesellschaft mbH, Papeteries de Lancey SA, Rena Kartonfabrik AS, Sarrió SpA, SCA Holding Ltd [anciennement Reed Paper & Board (UK) Ltd], Stora Kopparbergs Bergslags AB, Enso Española SA (anciennement Tampella Española SA) et Moritz J. Weig GmbH & Co KG ont enfreint l'article 85 paragraphe 1 du traité CE en participant:

—    dans le cas de Buchmann et de Rena, de mars 1988 environ jusqu'à fin 1990 au moins,

—    dans le cas de Enso Española, de mars 1988 au moins jusqu'à fin avril 1991 au moins,

—    dans le cas de Gruber & Weber, de 1988 au moins jusqu'à fin 1990,

—    dans les autres cas, à compter de mi-1986 jusqu'à avril 1991 au moins,

à un accord et une pratique concertée remontant au milieu de 1986, en vertu desquels les fournisseurs de carton de la Communauté européenne:

—    se sont rencontrés régulièrement dans le cadre de réunions secrètes et institutionnalisées, afin de négocier et d'adopter un plan sectoriel commun de restriction de la concurrence,

—    ont décidé d'un commun accord des augmentations régulières des prix pour chaque qualité de produit dans chaque monnaie nationale,

—    ont planifié et mis en oeuvre des augmentations de prix simultanées et uniformes dans l'ensemble de la Communauté européenne,

—    se sont entendus pour maintenir les parts de marché des principaux fabricants à des niveaux constants, avec des modifications occasionnelles,

—    ont pris, de plus en plus fréquemment à partir de début 1990, des mesures concertées de contrôle de l'approvisionnement du marché communautaire, afin d'assurer la mise en oeuvre desdites augmentations de prix concertées,

—    ont échangé des informations commerciales sur les livraisons, les prix, les arrêts de production, les commandes en carnet et les taux d'utilisation des machines, afin de soutenir les mesures mentionnées ci-dessus.

[...]

Article 3

Les amendes suivantes sont infligées aux entreprises suivantes pour les infractions constatées à l'article 1er:

[...]

v)    Finnboard — the Finnish Board Mills Association, une amende de 20 000 000 d'écus, pour laquelle Oy Kyro AB est solidairement responsable avec Finnboard à concurrence de 3 000 000 d'écus, Metsä-Serla Oy à concurrence de 7 000 000 d'écus, Tampella Corp. à concurrence de 5 000 000 d'écus et United Paper Mills à concurrence de 5 000 000 d'écus;

[...]»

13.
    Selon la décision, l'infraction s'est déroulée au sein d'un organisme dénommé «Groupe d'étude de produit Carton» (ci-après «GEP Carton»), composé de plusieurs groupes ou comités.

14.
    Cet organisme a été doté, au milieu de l'année 1986, d'un «Presidents Working Group» (ci-après «PWG») réunissant des représentants de haut niveau des principaux fournisseurs de carton de la Communauté (environ huit).

15.
    Le PWG avait notamment pour activités la discussion et la concertation concernant les marchés, les parts du marché, les prix et les capacités. En particulier, il a pris des décisions d'ordre général concernant le calendrier et le niveau des augmentations de prix à mettre en oeuvre par les fabricants.

16.
    Le PWG faisait rapport à la «President Conference» (ci-après «PC») à laquelle participait (plus ou moins régulièrement) la quasi-totalité des directeurs généraux des entreprises concernées. La PC s'est réunie deux fois par an pendant la période en cause.

17.
    A la fin de l'année 1987 a été créé le «Joint Marketing Committee» (ci-après «JMC»). Son objet principal consistait, d'une part, à déterminer si, et, dans

l'affirmative, comment des augmentations de prix pouvaient être mises en oeuvre et, d'autre part, à définir les modalités des initiatives en matière de prix décidées par le PWG pays par pays et pour les principaux clients en vue d'établir un système de prix équivalent en Europe.

18.
    Enfin, le comité économique (ci-après «COE») débattait, notamment, des fluctuations de prix sur les marchés nationaux et des commandes en carnet et faisait rapport sur ses conclusions au JMC ou, jusqu'à la fin de l'année 1987, au prédécesseur du JMC, le Marketing Committee. Le COE était composé de directeurs commerciaux de la plupart des entreprises en cause et se réunissait plusieurs fois par an.

19.
    Il ressort, en outre, de la décision que la Commission a considéré que les activités du GEP Carton étaient soutenues par un échange d'informations par l'intermédiaire de la société fiduciaire Fides, dont le siège est à Zurich (Suisse). Selon la décision, la plupart des membres du GEP Carton fournissaient à la Fides des rapports périodiques sur les commandes, la production, les ventes et l'utilisation des capacités. Ces rapports étaient traités dans le cadre du système Fides et les données agrégées étaient envoyées aux participants.

20.
    La requérante Finnish Board Mills Association — Finnboard (ci-après «Finnboard») est une association professionnelle de droit finlandais qui, en 1991, comptait six sociétés membres, parmi lesquelles figuraient les producteurs de carton Oy Kiro AB, Metsä-Serla Oy, Tampella Corporation et United Paper Mills. Finnboard commercialise dans l'ensemble de la Communauté, dans une certaine mesure par l'intermédiaire de ses propres filiales, le carton produit par ces quatre sociétés membres.

21.
    Selon la décision, elle a, du milieu de l'année 1986 jusqu'à avril 1991 au moins, participé aux réunions de l'ensemble des organes du GEP Carton. Un représentant de Finnboard a assuré, pendant environ deux ans, la présidence du PWG et de la PC.

Procédure

22.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 14 octobre 1994, la requérante a introduit le présent recours.

23.
    Seize des dix-huit autres entreprises tenues pour responsables de l'infraction ont également introduit un recours contre la décision (affaires T-295/94, T-301/94, T-304/94, T-308/94, T-309/94, T-310/94, T-311/94, T-317/94, T-319/94, T-327/94, T-334/94, T-337/94, T-347/94, T-348/94, T-352/94 et T-354/94).

24.
    La requérante dans l'affaire T-301/94, Laakmann Karton GmbH, s'est désistée de son recours par lettre déposée au greffe du Tribunal le 10 juin 1996, et l'affaire a

été radiée du registre du Tribunal par ordonnance du 18 juillet 1996, Laakmann Karton/Commission (T-301/94, non publiée au Recueil).

25.
    Les quatre sociétés finlandaises susvisées, membres de la requérante et, à ce titre, tenues pour solidairement responsables du paiement de l'amende infligée à celle-ci, ont également introduit des recours contre la décision (affaires jointes T-339/94, T-340/94, T-341/94 et T-342/94).

26.
    Enfin, un recours a été introduit par une association CEPI-Cartonboard, non destinataire de la décision. Cependant, celle-ci s'est désistée par lettre déposée au greffe du Tribunal le 8 janvier 1997, et l'affaire a été radiée du registre du Tribunal par ordonnance du 6 mars 1997, CEPI-Cartonboard/Commission (T-312/94, non publiée au Recueil).

27.
    Par lettre du 5 février 1997, le Tribunal a invité les parties à participer à une réunion informelle, notamment en vue de présenter leurs observations sur la jonction éventuelle des affaires T-295/94, T-304/94, T-308/94, T-309/94, T-310/94, T-311/94, T-317/94, T-319/94, T-327/94, T-334/94, T-337/94, T-338/94, T-347/94, T-348/94, T-352/94 et T-354/94 aux fins de la procédure orale. Lors de cette réunion, qui a eu lieu le 29 avril 1997, les parties ont accepté une telle jonction.

28.
    Par ordonnance du 4 juin 1997, le président de la troisième chambre élargie du Tribunal a joint les affaires précitées aux fins de la procédure orale, en raison de leur connexité, conformément à l'article 50 du règlement de procédure, et a accueilli une demande de traitement confidentiel introduite par la requérante dans l'affaire T-334/94.

29.
    Par ordonnance du 20 juin 1997, il a accueilli une demande de traitement confidentiel introduite par la requérante dans l'affaire T-337/94 relativement à un document produit en réponse à une question par écrit du Tribunal.

30.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre élargie) a décidé d'ouvrir la procédure orale et a pris des mesures d'organisation de la procédure en demandant aux parties de répondre à certaines questions écrites et de produire certains documents. Les parties ont déféré à ces demandes.

31.
    Les parties dans les affaires mentionnées au point 27 ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience qui s'est déroulée du 25 juin au 8 juillet 1997.

32.
    En ce qui concerne spécifiquement la présente affaire, la partie requérante a, par lettre du 19 juillet 1995, déclaré renoncer au dépôt d'un mémoire en réplique. Elle a toutefois fait valoir, dans ladite lettre, des arguments tirés de l'inexactitude des données sur lesquelles la Commission s'est fondée pour calculer l'amende.

33.
    Le 6 octobre 1995, la Commission a présenté ses observations à propos de la lettre de la partie requérante.

Conclusions des parties

34.
    La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    annuler la décision en tant qu'elle la concerne;

—    à titre subsidiaire, réduire le montant de l'amende;

—    condamner la partie défenderesse aux dépens.

35.
    La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    rejeter le recours;

—    condamner la partie requérante aux dépens.

Sur la demande d'annulation de la décision

Sur le moyen tiré d'une violation du régime linguistique

Arguments des parties

36.
    Ce moyen se compose de trois branches.

37.
         Dans une première branche, la requérante souligne qu'elle ne relevait pas, à l'époque de l'adoption de la décision, de la juridiction d'un État membre. La décision n'aurait donc pu faire foi à son égard, au sens de l'article 16 du règlement intérieur de la Commission du 17 février 1993 (JO L 230, p. 15, ci-après «règlement intérieur de la Commission»), que dans la langue de son mandataire, à savoir l'allemand. A l'appui de cette thèse, elle invoque le règlement n° 99/63/CEE de la Commission, du 25 juillet 1963, relatif aux auditions prévues à l'article 19, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 17 du Conseil (JO 1963, 127, p. 2268, ci-après «règlement n° 99/63»), dont l'article 2, paragraphe 1, prévoit que la communication des griefs peut être adressée à l'entreprise ou à son mandataire. Dans une situation comme celle de l'espèce où le mandataire choisi relève de la juridiction d'un État membre, ladite disposition exigerait que la langue du mandataire soit choisie comme langue de procédure. Cette langue serait également la seule dans laquelle la décision pourrait faire foi.

38.
    La requérante fait valoir, en outre, que l'article 2 du règlement n° 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne (JO 1958, 17, p. 385, ci-après «règlement n° 1»), s'applique par analogie et que, la réponse aux demandes de renseignements de la

Commission ayant été rédigée en allemand, cette langue a été choisie comme langue de procédure. Cependant, malgré les plaintes qui lui auraient été adressées à plusieurs reprises par le mandataire de la requérante, la Commission aurait continué à transmettre des documents rédigés en anglais.

39.
    Enfin, le choix de l'anglais comme langue de la décision constituerait une violation de l'article 6, paragraphe 3, sous a), de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du 4 novembre 1950 (ci-après «CEDH»).

40.
    Dans une deuxième branche du moyen, la requérante fait valoir que le régime linguistique a été violé lors de la notification de la décision. En effet, selon l'article 191, paragraphe 3, du traité, les décisions devraient être notifiées dans la langue des destinataires. Or, en l'espèce, la décision lui aurait été notifiée dans une version rédigée en anglais.

41.
    Enfin, dans une troisième branche du moyen, la requérante fait valoir que son droit d'être entendue a été violé du fait de la rédaction en anglais de la communication officielle des griefs retenus contre elle, de la lettre d'accompagnement ainsi que de nombreux moyens de preuve annexés à la communication. Se référant à la première branche du moyen, elle soutient que ces documents auraient dû être rédigés en allemand et conteste donc la validité de la communication des griefs retenus.

42.
    Elle ajoute que compte tenu, d'une part, de l'ampleur de la communication des griefs et de ses annexes et, d'autre part, du fait qu'un grand nombre de ces documents étaient rédigés dans une langue étrangère, un délai insuffisant lui a été imparti pour y répondre.

43.
    La Commission fait valoir qu'elle n'a aucunement violé les dispositions relatives au régime linguistique.

44.
    En ce qui concerne la première branche du moyen, la Commission souligne que le règlement n° 1 ne vise que la correspondance adressée à des personnes relevant de la juridiction d'un État membre, alors que la décision a été adoptée avant l'adhésion de la Finlande à la Communauté. De plus, la décision ne constituerait pas une «réponse» au sens de l'article 2 du règlement n° 1.

45.
    Elle aurait donc pu choisir librement la langue de la procédure en tenant compte, toutefois, des éventuels rapports entre la requérante et les États membres de la Communauté (voir arrêt de la Cour du 21 février 1973, Europemballage et Continental Can/Commission, 6/72, Rec. p. 215, point 12). En l'espèce, l'anglais aurait été choisi comme langue de procédure en tenant compte de ce qu'il est la langue de travail de l'Association européenne de libre échange (AELE) et la langue de procédure de la Cour de justice AELE, que la requérante a utilisé

l'anglais dans sa correspondance avec ses filiales de vente dans la Communauté et que, enfin, elle a une dénomination anglaise.

46.
    En ce qui concerne la deuxième branche du moyen, la Commission souligne que les éventuels vices entachant la notification d'une décision n'affectent pas la légalité de celle-ci. En effet, de tels vices ne pourraient qu'empêcher, dans certaines circonstances, le délai de recours de commencer à courir, effet sans pertinence en l'espèce (voir arrêt de la Cour du 14 juillet 1972, Geigy/Commission, 52/69, Rec. p. 787, point 11).

47.
    Enfin, en ce qui concerne la troisième branche du moyen, la Commission rappelle que la requérante et son mandataire ont également obtenu la version en allemand de la communication des griefs. En tout état de cause, la réponse de la requérante à la communication des griefs, déposée sans qu'elle eût demandé une prolongation du délai, constituerait la preuve qu'elle a été parfaitement en mesure de prendre connaissance des griefs retenus contre elle. Il n'y aurait donc pas lieu de considérer que son droit d'être entendue a été méconnu (arrêt de la Cour du 15 juillet 1970, ACF Chemiefarma/Commission, 41/69, Rec. p. 661, points 48, 52 et 53).

Appréciation du Tribunal

48.
    Il est constant que la Commission a envoyé la communication des griefs et la décision au siège de la requérante en Finlande et que, à la date de l'adoption de la décision, la requérante ne relevait pas encore de la juridiction d'un État membre de la Communauté. A cette époque, aucune langue officielle de la Communauté n'était expressément applicable, en vertu de la réglementation communautaire, dans les relations entre la Commission et une entreprise établie dans un pays tiers.

49.
    En effet, le règlement n° 1, tel que modifié, dont se prévaut la requérante, ne prévoit que les règles relatives au régime linguistique applicable entre la Communauté et un État membre ou une personne relevant de la juridiction de l'un des États membres.

50.
    En l'espèce, il ressort du dossier que la Commission n'a adressé aucun document officiel au mandataire allemand de la requérante, puisque les documents qu'il a reçus étaient des copies des documents officiels adressés directement à la requérante.

51.
    En outre, ni l'article 2 du règlement n° 99/63 ni l'article 6 de la CEDH, à supposer même que cette dernière disposition puisse être invoquée par une entreprise objet d'une enquête en matière de droit de la concurrence, n'imposent d'adresser des documents dans la langue de l'État membre dans lequel réside le mandataire.

52.
    Le choix de la langue de la communication des griefs et de la décision devait, par conséquent, être effectué en tenant compte du rapport établi par la requérante, à l'intérieur de la Communauté, avec un État membre (voir, en ce sens, arrêt

Europemballage et Continental Can/Commission, précité, point 12). Or, à cet égard, il est constant que l'anglais était la langue utilisée par la requérante dans sa correspondance avec ses propres filiales de vente dans les États membres de la Communauté. Dans ces conditions, la Commission était en droit de choisir l'anglais comme langue de la communication des griefs et de la décision.

53.
    Enfin, les annexes à la communication des griefs qui n'émanent pas de la Commission doivent être considérées comme des pièces à conviction sur lesquelles la Commission s'appuie et, partant, doivent être portées à la connaissance du destinataire telles qu'elles sont (voir, notamment, arrêt du Tribunal du 6 avril 1995, Tréfilunion/Commission, T-148/89, Rec. p. II-1063, point 21).

54.
    Quant à la prétendue insuffisance du délai accordé à la requérante pour répondre à la communication des griefs, il suffit de relever que la requérante n'a pas contesté l'allégation de la Commission selon laquelle aucune prorogation de délai n'a été demandée pour le dépôt de la réponse à la communication des griefs.

55.
    Au vu de ce qui précède, le moyen doit être rejeté comme non fondé.

Sur le moyen tiré d'irrégularités ayant affecté la procédure d'adoption, d'authentification et de notification des décisions de la Commission

Arguments des parties

56.
    La requérante fait valoir que, afin de garantir la force probante de la décision et la protection juridique des destinataires, la décision aurait dû être authentifiée dans un acte unique, les différentes feuilles étant, le cas échéant, réunies par une attache matérielle. Telle serait, en effet, la seule manière d'empêcher la suppression ou le changement de certaines parties de la décision. Or, en l'espèce, la décision n'aurait pas été authentifiée dans un acte unique. Le contenu que l'on aurait entendu lui donner n'apparaîtrait que lorsque la décision du 13 juillet 1994 est lue en combinaison avec la décision rectificative du 26 juillet 1994. Ces deux décisions auraient été signifiées séparément à la requérante, ce qui affecterait leur force probante.

57.
    La requérante demande au Tribunal d'ordonner à la Commission de produire l'original des deux décisions en cause pour vérifier, d'une part, si elles ont été ainsi attachées et, d'autre part, si la décision initiale porte mention de la modification postérieure.

58.
    Elle relève en outre que l'article 15, deuxième alinéa, du traité CECA prévoit, dans sa version en allemand, que des actes individuels obligent l'intéressé «durch die Zustellung» qui lui en est faite, alors que l'article 191, paragraphe 3, du traité CE utilise, dans sa version en allemand, l'expression «bekannt werden». Or, la version en français des deux traités confirmerait, par l'utilisation de la notion de

«notification», qu'il n'existe pas de différences matérielles entre ces deux dispositions. Fondant son analyse sur l'article 4 de la décision n° 22/60 de la Haute Autorité, du 7 septembre 1960, relative à l'exécution de l'article 15 du traité (JO 1960, 61, p. 1248), la requérante en déduit que seule la notification formelle, soit de la décision originale, soit d'une expédition de celle-ci, peut être regardée comme une notification valide. Par conséquent, la notification, comme en l'espèce, d'une copie certifiée conforme entraînerait l'invalidité de la décision.

59.
    Enfin, la requérante fait valoir que la décision n'a pas été authentifiée, conformément à l'article 16 du règlement intérieur de la Commission, par les signatures du président et du secrétaire général de la Commission. A cet égard, elle rappelle que la décision notifiée ne portait que la signature du membre de la Commission en charge des questions de concurrence. Elle demande au Tribunal d'ordonner à la Commission le dépôt de l'original de la décision pour vérifier l'authentification de celle-ci.

60.
    A supposer même que la décision originale ait été dûment authentifiée, la décision resterait invalide, faute de notification d'un texte identique à la décision originale.

61.
    La Commission souligne à titre liminaire que l'article 191, paragraphe 3, du traité CE n'exige pas une notification formelle. En effet, il suffirait que la décision parvienne au destinataire, sous la forme d'une simple communication écrite, et que celui-ci puisse en prendre connaissance (arrêts de la Cour du 10 décembre 1957, ALMA/Haute Autorité, 8/56, Rec. p. 179, 190, et du 15 décembre 1994, Bayer/Commission, C-195/91 P, Rec. p. I-5619, points 7 et 20). Ces conditions étant remplies dans le cas d'espèce, les arguments de la requérante tirés de vices dans la procédure de notification seraient donc dénués de fondement.

62.
    En outre, une copie conforme de la décision serait considérée comme une version authentique de celle-ci (arrêt de la Cour du 17 octobre 1989, Dow Chemical Ibérica e.a./Commission, 97/87, 98/87 et 99/87, Rec. p. 3165, point 59, et arrêts du Tribunal du 7 juillet 1994, Dunlop Slazenger/Commission, T-43/92, Rec. p. II-441, points 24 et 25, et du 27 octobre 1994, Fiatagri et New Holland Ford/Commission, T-34/92, Rec. p. II-905, point 27).

63.
    En l'espèce, la décision aurait été authentifiée conformément aux prescriptions de l'article 16 du règlement intérieur de la Commission. La requérante n'aurait d'ailleurs avancé aucun indice d'irrégularités dans la procédure d'adoption de la décision. A cet égard, la Commission soutient que la décision du 26 juillet 1994 n'a modifié en rien la décision en tant qu'elle concerne la requérante et que, en tout état de cause, le renvoi, dans la décision du 26 juillet 1994, à la décision constitue un lien suffisant entre les deux décisions en cause.

64.
    Dans ces conditions, il n'y aurait pas lieu d'ordonner à la Commission de produire l'original de la décision (voir arrêts Bayer/Commission, Fiatagri et New Holland Ford/Commission, et Dunlop Slazenger/Commission, précités).

Appréciation du Tribunal

65.
    Au soutien de sa contestation de la régularité de la procédure d'adoption et d'authentification de la décision, la requérante ne peut faire valoir utilement que la copie «certifiée conforme à l'original» qui lui a été envoyée ne fait pas apparaître les signatures du président et du secrétaire général de la Commission. En effet, l'article 16, premier alinéa, du règlement intérieur de la Commission en vigueur à la date d'adoption de la décision prévoit: «Les actes adoptés en réunion [...] sont annexés, dans la ou les langues dans lesquelles ils font foi, au procès-verbal de la réunion de la Commission au cours de laquelle ils ont été adoptés [...]. Ces actes sont authentifiés par les signatures du président et du secrétaire général apposées à la première page de ce procès-verbal.» La formalité de l'authentification d'une décision adoptée en réunion par le collège des membres de la Commission ne requiert donc pas l'apposition des signatures du président et du secrétaire général de la Commission sur la décision elle-même, mais sur le procès-verbal de la réunion au cours de laquelle cet acte a été adopté. Il s'ensuit que l'absence des signatures du président et du secrétaire général de la Commission sur la copie de la décision «certifiée conforme à l'original» ne constitue pas un indice que la décision n'a pas été dûment authentifiée.

66.
    La requérante n'invoque aucun autre indice, non plus qu'aucune circonstance précise, de nature à écarter la présomption de validité dont bénéficient les actes communautaires (voir, notamment, arrêt Dunlop Slazenger/Commission, précité, point 24).

67.
    En l'absence d'un tel indice, il n'appartient pas au Tribunal d'ordonner les mesures d'instruction sollicitées.

68.
    S'agissant de la régularité de la notification, aucune disposition du droit communautaire n'exclut que la décision soit notifiée sous la forme d'une copie certifiée conforme, ni qu'une décision rectificative soit notifiée séparément.

69.
    En l'espèce, la copie de la décision adressée à la requérante porte le nom du membre de la Commission en charge de la politique de la concurrence ainsi que la mention «copie certifiée conforme à l'original» («certified copy»). Elle est également signée par le secrétaire général de la Commission. Une telle copie est régulière. Elle est dotée de la même force juridique que l'acte original adopté par le collège des membres et authentifié selon les formes prescrites par le règlement intérieur de la Commission.

70.
    En ce qui concerne les modalités de la notification, il ressort d'une jurisprudence constante qu'une décision est dûment notifiée, au sens du traité, dès lors qu'elle est communiquée à son destinataire et que celui-ci est en mesure d'en prendre connaissance (arrêt Europemballage et Continental Can/Commission, précité, point 10). En l'espèce, ainsi que cela résulte des termes mêmes du recours, la requérante

a été en mesure de prendre pleinement connaissance de la décision et de faire valoir la plénitude de ses droits devant le Tribunal.

71.
    Le moyen doit donc être rejeté comme dépourvu de fondement.

Sur le moyen tiré d'une violation des droits de la défense et d'une violation des règles de forme relatives à la communication des griefs

Arguments des parties

72.
    Ce moyen s'articule en deux branches.

73.
    Dans une première branche, la requérante affirme que la communication des griefs n'a pas été adoptée et communiquée aux destinataires par l'organe compétent en vertu de l'article 2 du règlement n° 99/63, à savoir la Commission.

74.
    La communication des griefs lui aurait été transmise sous la forme d'un document non signé, annexé à une lettre du directeur général de la concurrence. En l'absence de signature, ce document ne pourrait être considéré comme un «acte» de la Commission. Par conséquent, il ne pourrait servir de base à la décision.

75.
    En outre, à supposer même que ledit document, ensemble avec sa lettre d'accompagnement, puisse être regardé comme la «communication des griefs» au sens du règlement n° 99/63, celle-ci ne lui aurait pas été communiquée par la Commission. Or, l'article 19, paragraphe 1, du règlement n° 17 attribuerait à cette fin à la Commission une compétence exclusive, dont le règlement intérieurn'autoriserait pas la délégation. En tout état de cause, ni la détermination du contenu de la communication des griefs ni la communication de celle-ci aux destinataires ne pourraient, en vertu du règlement intérieur, être déléguées aux tiers (arrêts de la Cour Geigy/Commission, précité, et du 17 octobre 1972, Cementhandelaren/Commission, 8/72, Rec. p. 977). De même, la compétence pour fixer le délai de réponse à la communication des griefs ne pourrait être déléguée aux tiers.

76.
    Dans une seconde branche du moyen, la requérante fait valoir que, en ne liant pas au moyen d'une attache matérielle la communication des griefs et ses annexes, la Commission a commis une violation de l'exigence d'une forme écrite de la communication des griefs prévue à l'article 2, paragraphe 1, du règlement n° 99/63, dont le but serait d'assurer les mêmes garanties que celles résultant de l'exigence d'une authentification des décisions finales. La communication des griefs ne pourrait donc servir de fondement à la décision.

77.
    L'exigence d'une forme écrite nécessiterait en outre que la communication des griefs soit signée au bas de la dernière page. La signature du directeur général sur la lettre d'accompagnement ne pourrait pas remplacer la signature requise.

78.
    La Commission rappelle, en ce qui concerne la première branche du moyen, qu'il ressort des documents soumis à la requérante que les griefs retenus contre elle ont été adoptés par la Commission. En outre, le directeur général de la Commission aurait signé la communication des griefs en vertu d'une simple délégation de signature, et l'argument tiré de l'incompétence de celui-ci ne serait donc pas fondé (arrêts de la Cour du 17 janvier 1984, VBVB et VBBB/Commission, 43/82 et 63/82, Rec. p. 19, point 14, et Geigy/Commission, précité, point 5).

79.
    La Commission souligne que la manière dont doit être envoyée la communication des griefs, en vertu de l'article 10 du règlement n° 99/63, vise avant tout à conserver la preuve de la date de la communication. En effet, la communication des griefs aurait dûment lieu si le destinataire est en mesure de prendre pleinement connaissance de la teneur des griefs retenus (arrêts Geigy/Commission, précité, point 11, et Bayer/Commission, précité, points 7 et 20).

80.
    En ce qui concerne la seconde branche du moyen, la Commission soutient que la requérante méconnaît la portée de l'article 2 du règlement n° 99/63. Cet article n'exigerait pas que la communication des griefs porte une signature manuscrite, ni que la communication consiste en un acte unique. La désignation des annexes et la numérotation de toutes les pages des documents transmis seraient, de plus, suffisantes pour établir les liens entre ceux-ci.

Appréciation du Tribunal

81.
    En ce qui concerne la première branche du moyen, il ressort des pièces du dossier que la communication des griefs adressée à la requérante était accompagnée d'une lettre signée par le directeur général de la direction générale de la concurrence (DG IV) de la Commission.

82.
    Or, en signant ladite lettre, le directeur général a agi dans le cadre non pas d'une délégation de pouvoirs, mais d'une simple délégation de signature qu'il avait reçue du membre compétent de la Commission (arrêt Geigy/Commission, précité, point 5). Une telle délégation constitue le moyen normal par lequel la Commission exerce sa compétence (arrêt VBVB et VBBB/Commission, précité, point 14).

83.
    Dans la mesure où la requérante n'a apporté aucune indication qui permette de croire que, en l'occurrence, l'administration communautaire se serait départie de l'observation des règles applicables en la matière (arrêt VBVB et VBBB/Commission, précité, point 14), le grief doit être rejeté.

84.
    La requérante soutient, en second lieu, que la communication des griefs n'a pas été adoptée par la Commission. A cet égard, il suffit de relever que la requérante ne produit aucun indice de nature à mettre en cause la présomption de validité qui s'attache aux actes communautaires. Il n'y a donc pas lieu de vérifier l'éventuelle

existence de la violation alléguée (par analogie, arrêt Fiatagri et New Holland Ford/Commission, précité, point 27).

85.
    La première branche du moyen doit donc être rejetée.

86.
    Quant à la seconde branche du moyen, elle ne saurait davantage être accueillie.

87.
    Aux termes de l'article 2, paragraphe 1, du règlement n° 99/63, «[l]a Commission communique par écrit aux entreprises et associations d'entreprises les griefs retenus contre elles». Cette disposition n'exige pas que la communication des griefs porte une signature manuscrite apposée sur le document lui-même, ni que la communication des griefs soit constituée par un acte formellement unique.

88.
    En tout état de cause, les griefs retenus à l'encontre de la requérante ont été communiqués sous forme écrite d'une manière telle que les divers documents sur lesquels la Commission a fondé l'existence de ces griefs ont pu être identifiés avec précision.

89.
    Au vu de ce qui précède, le moyen doit être rejeté.

Sur le moyen tiré d'une violation de l'article 190 du traité

Arguments des parties

90.
    Exposant de manière détaillée les objectifs de l'obligation de motivation prévue à l'article 190 du traité, la requérante fait valoir en premier lieu que la Commission aurait dû, pour chaque action qualifiée d'infraction, indiquer la disposition violée et préciser si l'infraction avait été commise sous forme d'accord ou de pratique concertée. En effet, ces indications seraient indispensables pour vérifier si chacune des actions en cause remplit les conditions constitutives du délit, à savoir le fait générateur, l'illégalité et la faute. Dès lors, l'indication selon laquelle l'infraction a consisté dans la participation à un accord ou à une pratique concertée ne suffirait pas, une seule et même action ne pouvant pas être qualifiée à la fois d'accord et de pratique concertée.

91.
    Si plusieurs actions peuvent être qualifiées d'infraction continue, cette possibilité ne dispenserait pas la Commission d'indiquer, pour chaque action individuelle, les éléments constitutifs du délit. Ce ne serait que si chacune des actions individuelles constitue un délit que l'intégralité de ces actions pourrait, le cas échéant, être qualifiée d'infraction continue.

92.
    En second lieu, la requérante fait valoir que la décision aurait également dû contenir, pour chaque acte qualifié de délit, une indication précise des circonstances concrètes des faits, telles que l'endroit où ils se sont déroulés, les participants concernés et le rôle précis de chacun d'eux.

93.
    Enfin, en troisième lieu, la décision aurait dû contenir, pour chaque action en cause, une indication des personnes physiques ayant agi. A cet égard, l'article 15 du règlement n° 17 présupposerait une action de propos délibéré ou par négligence d'une personne physique, mais imputable à une entreprise.

94.
    La Commission estime que la décision contient une description suffisante des éléments de fait justifiant l'imposition de l'amende. S'agissant d'une entente complexe et de longue durée, les comportements individuels se seraient inscrits dans un système unique visant à entraver le libre jeu de la concurrence sur le marché, de sorte qu'il n'aurait pas été nécessaire de qualifier chaque comportement individuel d'accord ou de pratique concertée (arrêt du Tribunal du 17 décembre 1991, Hercules Chemicals/Commission, T-7/89, Rec. p. II-1711, points 262 à 264). En tout état de cause, la Commission aurait précisé, aux points 131 et 132 des considérants de la décision, que, à partir de la fin de l'année 1987, le comportement des entreprises présentait tous les éléments d'un véritable accord au sens de l'article 85, paragraphe 1, du traité et que, jusqu'à ce moment-là, le comportement des entreprises était constitutif d'une pratique concertée. Au surplus, elle aurait même pu qualifier une action d'accord à titre principal et de pratique concertée à titre subsidiaire (arrêt du Tribunal du 10 mars 1992, ICI/Commission, T-13/89, Rec. p. II-1021, points 251 et 252).

95.
    S'agissant d'une infraction unique, la Commission ne serait pas tenue de démontrer que chaque action individuelle de l'entente remplit les critères prévus à l'article 85 (même arrêt, points 259 et 260).

96.
    Il ne serait pas non plus nécessaire de prouver la participation de chaque entreprise à chaque manifestation de l'entente. Comme exposé aux points 116 et 117 des considérants de la décision, il suffirait que la Commission démontre l'existence de l'entente globale, d'une part, et la participation de chaque entreprise à certains actes entrant dans le plan global commun, d'autre part (voir arrêts précités ICI/Commission, points 256 à 261 et 305, et Hercules Chemicals/Commission, point 272).

97.
    Enfin, la Commission soutient qu'elle n'avait pas à indiquer, dans la décision, le nom des personnes ayant agi, l'article 85 du traité s'adressant expressément aux entreprises. Il serait uniquement nécessaire de démontrer que des personnes autorisées à agir pour le compte des entreprises ont participé à l'entente, les actions de ces personnes étant imputables aux entreprises concernées (arrêt de la Cour du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission, 100/80, 101/80, 102/80 et 103/80, Rec. p. 1825, point 97). Or, sur ce point, la communication des griefs contiendrait un exposé détaillé des preuves retenues à l'encontre de la requérante, et les annexes de cette communication révéleraient l'identité des personnes ayant agi.

Appréciation du Tribunal

98.
    Il ressort d'une jurisprudence constante que l'obligation de motiver une décision individuelle a pour but de permettre au juge communautaire d'exercer son contrôle sur la légalité de la décision et de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est éventuellement entachée d'un vice permettant d'en contester la validité, étant précisé que la portée de cette obligation dépend de la nature de l'acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté (voir, notamment, arrêt du Tribunal du 11 décembre 1996, Van Megen Sports/Commission, T-49/95, Rec. p. II-1799, point 51). Si, en vertu de l'article 190 du traité, la Commission est tenue de mentionner les éléments de fait et de droit dont dépend la justification légale de la décision et les considérations qui l'ont amenée à prendre celle-ci, il n'est pas exigé qu'elle discute tous les points de fait et de droit qui ont été soulevés au cours de la procédure administrative (voir, notamment, arrêt de la Cour du 29 octobre 1980, Van Landewyck e.a./Commission, 209/78 à 215/78 et 218/78, Rec. p. 3125, point 66).

99.
    En l'espèce, la décision expose de manière détaillée les motifs pour lesquels la Commission a considéré que l'infraction constatée dans le chef des entreprises mentionnées à l'article 1er de la décision devait être qualifiée d'accord et de pratique concertée (points 129 à 132 des considérants). En particulier, il ressort du point 131, premier alinéa, des considérants que «à partir de fin 1987, avec la concrétisation de la collusion progressive des fabricants adhérant à la politique du 'prix avant le tonnage‘, l'infraction a présenté toutes les caractéristiques d'un véritable accord au sens de l'article 85». De plus, il est précisé que les «initiatives semestrielles en matière de prix qui ont été prises pour réaliser le plan ne doiventpas être considérées comme un ensemble d'accords ou de pratiques concertées distincts, mais comme un seul et même accord continu» (même point des considérants, deuxième alinéa).

100.
    Or, lorsque, comme en l'espèce, une décision contient une motivation suffisante permettant de comprendre les motifs pour lesquels les agissements constatés ont été qualifiés d'accord et de pratique concertée, la Commission n'est pas tenue de qualifier séparément d'accord ou de pratique concertée chacun des agissements concernés (voir, dans le même sens, arrêt Hercules Chemicals/Commission, précité, point 264).

101.
    La décision contient également une motivation détaillée en ce qui concerne la participation de la requérante à l'infraction. A cet égard, elle contient des références directes à la requérante en ce qui concerne les augmentations de prix concertées (points 74, 76, 78, 79, 81, 85 et 87 des considérants). En outre, sans préjudice de l'exactitude des motifs qu'ils énoncent, dont le contrôle relève de l'examen du bien-fondé de la décision, les points de celle-ci décrivant les discussions à objet anticoncurrentiel menées au sein du PWG (notamment points 37, 51 et 52 des considérants) visent nécessairement la requérante, puisque, selon la décision, la requérante a participé aux réunions de cet organe (point 36, deuxième alinéa,

des considérants). De même, les points de la décision décrivant les discussions à objet anticoncurrentiel menées au sein du JMC concernent aussi la requérante (points 44 à 46, 58, 71, 73, 84, 85 et 87 des considérants), dans la mesure où la Commission a considéré que cette dernière avait pris part aux réunions de cet organe (tableau 7 annexé à la décision et point 46, premier alinéa, des considérants).

102.
    Dans ces conditions, la motivation de la décision a donné à la requérante une indication suffisante pour connaître les principaux éléments de fait et de droit qui étaient à la base du raisonnement ayant conduit la Commission à la tenir pour responsable d'une infraction à l'article 85, paragraphe 1, du traité.

103.
    Enfin, les actes d'une personne physique étant imputables à l'entreprise, au sens de l'article 85 du traité, lorsque cette personne est autorisée à agir pour le compte de l'entreprise (par analogie, arrêt Musique Diffusion française e.a./Commission, précité, point 97), il s'ensuit que la Commission a suffisamment motivé la décision en se référant à la dénomination de la requérante.

104.
    En tout état de cause, les renseignements individuels joints à la communication des griefs font apparaître l'identité des représentants de la requérante dont la Commission a estimé qu'ils avaient participé aux réunions des organes du GEP Carton.

105.
    Aucun des griefs formulés par la requérante n'ayant été accueilli, le moyen doit être rejeté.

Sur le moyen tiré d'une violation de l'article 85, paragraphe 1, du traité en ce que la Commission n'aurait pas démontré la participation de la requérante à une entente quelconque

106.
    Ce moyen se compose de trois branches. Chacune d'elles fera l'objet d'un examen distinct.

Sur le moyen pris en sa première branche tirée de l'absence de preuve de la participation de la requérante à une entente quelconque

— Arguments des parties

107.
    La requérante fait valoir qu'elle n'a jamais participé aux réunions des différents organes du GEP Carton et qu'elle n'a eu aucune connaissance des discussions à objet anticoncurrentiel qui auraient été menées, selon la décision, lors de ces réunions.

108.
    En effet, les personnes qui l'auraient, selon la décision, représentée au sein des organes du GEP Carton n'y auraient participé qu'en tant que représentants du

Nordic Paperboard Institute (ci-après «NPI»), association scandinave regroupant des producteurs de carton. Les déclarations faites par d'autres producteurs (voir tableau 5 annexé à la décision), selon lesquelles elle aurait été considérée comme l'un des membres du JMC, seraient fondées sur des erreurs.

109.
    En ce qui concerne les accords et/ou pratiques concertées entre les participants aux réunions des organes du GEP Carton, la décision ne contiendrait aucune indication précise permettant de déterminer les réunions au cours desquelles ces discussions auraient eu lieu, le contenu précis des discussions, les participants aux réunions et, enfin, les participants aux concertations. En particulier, la décision, en de nombreux points, ne mentionnerait aucunement la requérante ou ses sociétés membres.

110.
    La requérante, relevant que ses prétendus représentants n'auraient, même selon la décision, participé qu'à un nombre réduit de réunions du PWG et du JMC, soutient que la décision ne contient aucun élément de nature à établir sa participation à une concertation quelconque. En effet, à supposer même que des concertations aient eu lieu au cours de certaines réunions et qu'elle ait été représentée au sein des organes concernés, il ne serait pas établi que les concertations ont eu lieu lors des réunions auxquelles ses prétendus représentants ont assisté.

111.
    Quant au PWG, la requérante conteste les affirmations relatives à la communication des résultats obtenus lors des réunions de cet organe aux entreprises non membres du PWG (point 38 des considérants de la décision). En particulier, l'affirmation selon laquelle «les producteurs scandinaves (tous membres du NPI) étaient généralement renseignés sur le résultat des réunions par Finnboard» (point 38, quatrième alinéa, des considérants de la décision) ne serait fondée sur aucun élément de preuve.

112.
    L'affirmation selon laquelle les entreprises non membres du PWG auraient été informées des résultats des réunions de cet organe au cours des réunions de la PC (point 38 des considérants de la décision) ne serait que pure supposition.

113.
    Quant aux réunions de la PC, l'indication contenue dans la décision selon laquelle la requérante et, dans une certaine mesure, ses sociétés membres auraient participé aux réunions de cet organe serait une affirmation sans fondement.

114.
    S'agissant du JMC, la déclaration de Fiskeby selon laquelle elle aurait été, à quelques occasions, informée des résultats des réunions par un représentant du NPI (point 46 de la décision), déclaration d'ailleurs inconnue de la requérante, confirmerait que les représentants du NPI, mais non ceux de la requérante, participaient aux réunions de ce comité.

115.
    Enfin, les discussions menées lors des réunions du COE auraient, selon la décision même, porté sur la situation générale du marché.

116.
    La Commission affirme que la requérante était l'un des membres à part entière du GEP Carton. Elle se réfère, à cet égard, à la déclaration de Stora du 23 décembre 1991 (annexe 43 à la communication des griefs) dans laquelle la requérante est désignée comme l'une des entreprises représentées au sein du PWG. De plus, les procès-verbaux des réunions de la PC désigneraient les directeurs généraux de Finnboard en tant que représentants de la Finlande, à côté des représentants d'autres pays scandinaves.

117.
    L'argumentation de la requérante, selon laquelle elle n'aurait pas participé aux réunions du PWG, serait en tout état de cause inopérante. En effet, à supposer même que les directeurs généraux de Finnboard aient agi en tant que représentants du NPI, cela signifierait uniquement qu'ils ont représenté les intérêts de la quasi-totalité des producteurs scandinaves. Ils auraient nécessairement pris en considération les intérêts de la requérante, compte tenu de leurs fonctions au sein de cette entreprise.

118.
    La requérante aurait également été représentée aux réunions du JMC et du COE. Plusieurs producteurs de carton l'auraient désignée comme l'un des membres du JMC.

119.
    Pour le surplus, la Commission fonde son argumentation sur l'exposé des fonctions principales des organes contenu dans la décision.

— Appréciation du Tribunal

120.
    Selon la décision, la requérante et les autres entreprises mentionnées à l'article 1er de la décision ont enfreint l'article 85, paragraphe 1, du traité en participant à un accord et une pratique concertée. La Commission a considéré que la requérante a participé à cette infraction du milieu de l'année 1986 jusqu'à avril 1991 au moins.

121.
    D'après le tableau 7 annexé à la décision, la requérante a participé aux réunions du PWG, de la PC, du JMC et du COE.

122.
    A cet égard, la Commission considère que la requérante a pris part aux réunions du PWG à titre individuel et en tant que représentant du NPI (point 38, quatrième alinéa, et point 79, quatrième alinéa, des considérants). De plus, il est relaté que le «directeur général [de Finnboard] était aussi le président du GEP Carton et présidait le PWG à partir de mai 1988» (point 79, quatrième alinéa, des considérants).

123.
    S'agissant de la participation de la requérante au JMC, il est précisé qu'il semble que «Finnboard ait représenté le NPI ainsi que ses quatre propres membres, Kyro, Metsä-Serla, Tampella et United Paper Mills» (point 32, premier alinéa, des considérants).

124.
    Enfin, quant à la participation de la requérante à des réunions de la PC, «[d]es représentants de Finnboard (qui avaient également assisté aux réunions du PWG tenues juste avant) ont pris part à toutes les réunions de la 'President Conference‘ séparément du NPI» (point 42, second alinéa, des considérants).

125.
    Les pièces du dossier attestent que des dirigeants de la requérante ont été impliqués dans les structures du GEP Carton durant la période couverte par la décision. Ainsi, les renseignements individuels joints à la communication des griefs relatent que la vice-présidence du GEP Carton a été occupée, pendant la période couverte par la décision, par un directeur («managing director») de la requérante, à savoir M. de la Chapelle du milieu de l'année 1986 à 1987, M. Sommar de 1987 à 1988, et M. Lindahl à partir de 1990.

126.
    Concernant M. Sommar, il a été élu vice-président du GEP Carton lors de l'assemblée générale de 1987 et, à cette occasion, a été proposé pour occuper cette nouvelle fonction en étant expressément présenté comme «le nouveau président du Finnboard Executive Committee» («the new Chairman of the Finnboard Executive Committee») (annexe 97 à la communication des griefs).

127.
    De plus, il est constant que la présidence du GEP Carton a été occupée par M. Köhler à partir de mai 1988 jusqu'à l'automne de 1990. Le compte rendu de la réunion du PWG du 6 avril 1990 (produit en annexe au mémoire en défense) indique à cet égard:

«Mr Köhler nous rappelle qu'il assumera d'autres fonctions dans l'industrie forestrière finlandaise dès l'automne prochain. Il quittera donc Finnboard et devradémissionner en tant que président du GEP Carton.»

128.
    Selon les déclarations de Stora, la requérante a participé aux réunions du PWG [annexes 35 (p. 14), 37 (p. 2) et 43 (p. 3) à la communication des griefs].

129.
    Enfin, plusieurs entreprises ont identifié la requérante comme ayant participé aux réunions du JMC (voir tableau 5 annexé à la décision).

130.
    Compte tenu des déclarations de Stora et de la participation effective aux réunions des organes du GEP Carton de plusieurs personnes employées par la requérante, l'affirmation de celle-ci selon laquelle ces personnes n'y auraient participé qu'en leur qualité de représentants du NPI ne peut donc être retenue.

131.
    En outre, la requérante n'a pas fourni le moindre élément de preuve, tel qu'un mandat de représentation exclusive du NPI, à l'appui de sa contestation des preuves concordantes démontrant sa participation, à titre individuel, aux réunions des organes du GEP Carton. Lors de l'audience, elle a même admis qu'elle avait supporté les frais de voyage occasionnés par la participation de ses employés aux réunions concernées, circonstance factuelle qui ne peut que confirmer l'exactitude des constatations opérées par la Commission.

132.
    En considération de ces éléments, la participation à titre individuel de la requérante aux réunions des organes du GEP Carton doit être considérée comme établie.

133.
    Pour autant que la requérante vise, par la présente branche du moyen, à contester le bien-fondé des allégations de la Commission relatives à l'objet anticoncurrentiel des réunions en cause, il s'agit d'arguments devant être examinés dans le cadre des deux autres branches du moyen.

134.
    Au vu des éléments qui précèdent, la première branche du moyen ne saurait être accueillie.

Sur le moyen pris en sa deuxième branche tirée de l'absence de preuve de la participation de la requérante aux initiatives en matière de prix

— Arguments des parties

135.
    La requérante relève que la décision ne contient aucune indication précise permettant d'établir sa participation à des initiatives en matière de prix. Les motifs généraux de la décision n'établiraient pas un lien éventuel entre les différentes initiatives en matière de prix mises en oeuvre et le comportement des entreprises individuelles. En particulier, la motivation de la décision ne permettrait pas d'exclure que des concertations aient eu lieu en marge des réunions ou lors des réunions auxquelles aucune personne liée à la requérante n'a participé.

136.
    Les annonces systématiques des augmentations de prix ne démontreraient pas l'existence d'une concertation, car elles ne seraient qu'une conséquence directe des conditions du marché.

137.
    Se référant aux annexes à la communication des griefs invoquées dans la décision, la requérante relève que de nombreux documents ne mentionnent même pas, directement ou indirectement, son nom et que les documents qui la mentionnent se réfèrent généralement à des indications insignifiantes dont la source n'est pas indiquée. De plus, certains documents auraient été rédigés dans des circonstances démontrant l'absence de liens entre les documents et les réunions des organes du GEP Carton. De tels documents ne pourraient donc être regardés comme démontrant sa participation à des initiatives en matière de prix.

138.
    Sur la base de ces considérations, la requérante conteste la valeur probante d'une partie importante des documents invoqués par la Commission. En outre, elle soutient que les documents faisant l'objet des annexes 44, 109, 130 et 131 à la communication des griefs, documents invoqués dans la décision, n'ont pas la valeur probante que la Commission leur attribue. Au contraire, ils témoigneraient plutôt de l'absence de participation de la requérante à une collusion quelconque.

139.
    La liste des prix trouvée dans les locaux de la société Finnboard (UK) Ltd. (voir point 79 des considérants de la décision, ci-après «liste Finnboard») ne mentionnerait pas la requérante. Ce document ne présenterait pas des similarités telles avec les deux listes de prix trouvées chez Rena (annexes 110 et 111 à la communication des griefs) que l'on puisse en tirer des conclusions concernant la requérante. En effet, celle-ci ne serait pas mentionnée non plus dans les listes de prix de Rena, et la liste Finnboard ne contiendrait que des informations accessibles à tous et se rapporterait apparemment, par l'utilisation du mot suédois «höjs» (verbe qui, dans sa forme de base, signifie «augmenter»), à un événement passé. De plus, les listes de prix trouvées chez Rena contiendraient des données relatives à l'Irlande, mais la Finlande n'y serait pas indiquée. Dans la liste Finnboard, le cas serait inverse.

140.
    La note obtenue de Rena, portant, selon la décision, sur la réunion du JMC du 6 septembre 1989 (annexe 117 à la communication des griefs), indiquerait seulement: «[...] 10,5 % de différence entre GC I et GC sur les prix les plus bas pratiqués par Finnboard [...]» Cette remarque ne révélerait aucune participation de la requérante à une concertation quelconque, l'auteur de la note ayant simplement constaté une différence de prix entre deux produits. D'ailleurs, selon la lettre de couverture de Rena (annexe 116 à la communication des griefs), les indications contenues dans cette note seraient fondées sur des conversations individuelles tenues en marge de la réunion du JMC, conversations auxquelles les collaborateurs de la requérante n'auraient pas participé.

141.
    La note de Rena portant, selon la décision, sur la réunion du JMC du 6 septembre 1990 (annexe 118 à la communication des griefs), ne concernerait même pas une réunion du JMC (voir lettre de couverture de Rena, annexe 116 à la communication des griefs), mais se référerait uniquement à des discussions internes. La seule mention de la requérante («Finnboard a lot down in USSR [...]») ne constituerait pas un élément révélateur d'une concertation quelconque.

142.
    En ce qui concerne la déclaration de Stora décrivant le rôle du JMC dans la mise en oeuvre des initiatives en matière de prix (annexe 35 à la communication des griefs, p. 17), la requérante souligne que, à supposer même qu'elle soit considérée comme ayant participé, quod non, aux réunions de cet organe, elle-même et Stora n'ont, selon la décision, participé en commun qu'à sept réunions du JMC. Il serait donc parfaitement possible que d'éventuelles discussions à objet anticoncurrentiel n'aient eu lieu qu'au cours des réunions auxquelles la requérante n'a pas participé et que des discussions anodines aient été menées lors des sept réunions du JMC auxquelles Stora et la requérante ont participé en commun.

143.
    La Commission estime qu'elle a démontré l'existence des initiatives en matière de prix, d'une part, et la participation de la requérante à ces initiatives, d'autre part.

144.
    En ce qui concerne l'existence des initiatives en matière de prix, elle se réfère, pour l'essentiel, aux points 74 à 90 des considérants de la décision. En outre, elle met

en exergue certains éléments de preuve invoqués dans la décision (annexes 44 et 70 à la communication des griefs).

145.
    Enfin, elle se réfère aux deux listes d'augmentations de prix découvertes chez Rena (annexes 110 et 111 à la communication des griefs, respectivement mentionnées aux points 80 et 83 des considérants de la décision). Ces listes, d'une même origine, confirmeraient les déclarations de Stora relatives aux arrangements en matière d'augmentations de prix conclus au sein du GEP Carton. Elles ne feraient mention du nom d'aucune société déterminée, mais feraient état des augmentations applicables dans chaque pays européen. Dès lors, l'absence de mention expresse de la requérante serait sans pertinence.

146.
    Pour ce qui est de la participation de la requérante aux initiatives en matière de prix, la Commission conteste que les augmentations de prix aient été le résultat des conditions générales du marché. D'une part, elle aurait apporté la preuve des concertations en cette matière, ce qui n'aurait même pas été contesté par plusieurs des producteurs concernés. D'autre part, la participation à des réunions au cours desquelles des discussions à objet anticoncurrentiel ont eu lieu suffirait pour satisfaire les critères d'application de l'article 85 du traité (arrêt du Tribunal du 24 octobre 1991, Rhône-Poulenc/Commission, T-1/89, Rec. p. II-867, point 66).

147.
    La liste Finnboard contiendrait des données relatives aux qualités GD révélant qu'il ne s'agissait pas d'un document interne, la requérante ne produisant pas ces qualités. La similitude entre la liste Finnboard et les listes trouvées chez Rena démontrerait en outre que la première était relative aux augmentations de prix sur lesquelles s'étaient entendus les producteurs de carton. Les données contenues dans la liste Finnboard permettraient d'affirmer qu'elle concernait l'augmentation de prix du deuxième trimestre de 1989 et ne se référait pas, contrairement à ce qu'affirme la partie requérante, à des données anciennes.

148.
    Enfin, la participation de la requérante serait démontrée par les notes manuscrites découvertes chez FS-Karton et Rena (annexes 113 et 117 à la communication des griefs), ces documents désignant certains producteurs de carton, parmi lesquels Finnboard.

— Appréciation du Tribunal

149.
    Aux termes de l'article 1er de la décision, les entreprises visées par cette disposition ont enfreint l'article 85, paragraphe 1, du traité en participant, durant la période de référence, à un accord et une pratique concertée en vertu desquels les fournisseurs de carton de la Communauté ont notamment «décidé d'un commun accord des augmentations régulières des prix pour chaque qualité de produit dans chaque monnaie nationale» et «ont planifié et mis en oeuvre des augmentations de prix simultanées et uniformes dans l'ensemble de la Communauté».

150.
    Il a déjà été retenu que la requérante a participé aux réunions du PWG et du JMC au cours de la période allant du milieu de l'année 1986 à avril 1991 au moins. Il y a donc lieu d'examiner si la Commission a établi que les réunions de ces deux organes ont eu pour objet, notamment, une collusion sur les prix, avant d'examiner la situation individuelle de la requérante par rapport à l'objet de ces réunions.

151.
    S'agissant du PWG, la décision indique que la véritable tâche du PWG «consistait notamment dans 'la discussion et la concertation concernant les marchés, les parts du marché, les prix ainsi que les hausses de prix et les capacités‘» (point 37, troisième alinéa, des considérants), et que, «[d]ès après sa création, le PWG 'est parvenu à un accord et a pris des décisions d'ordre général concernant le calendrier et le niveau des augmentations de prix à mettre en oeuvre par les fabricants de carton‘» (point 37, quatrième alinéa, des considérants).

152.
    Ces indications sont reprises des déclarations de Stora (annexe 39 à la communication des griefs), laquelle précise d'ailleurs que «le PWG s'est réuni à partir de 1986 afin de contribuer à réguler le marché». Elles sont étayées par l'annexe 73 à la communication des griefs, note confidentielle datée du 28 décembre 1988, adressée par le directeur commercial responsable des ventes du groupe Mayr-Melnhof en Allemagne (M. Katzner) au directeur général de Mayr-Melnhof en Autriche (M. Gröller) et ayant pour objet la situation du marché.

153.
    Selon ce document, une coopération plus étroite au sein du «cercle des présidents» («Präsidentenkreis»), décidée en 1987, avait produit deux résultats significatifs:

«—    PRO-Carton

—    Discipline en matière de prix.

Dans ces deux domaines, on peut signaler à la fois des éléments positifs et des éléments négatifs:

[...]

—    En matière de prix: des gagnants et des perdants.»

154.
    L'auteur de la note poursuit en précisant que «[t]ous les participants ont été (et restent) gagnants dans la mesure où la tendance permanente, jusqu'en automne 1987, à la baisse des prix a été stoppée, et a pu être remplacée par des hausses de prix en deux étapes (jusqu'ici) clairement perceptibles et visibles».

155.
    Il convient de relever que l'expression «cercle des présidents» a été interprétée par Mayr-Melnhof comme visant à la fois le PWG et la PC dans un contexte général, c'est-à-dire sans référence à un événement ou à une réunion particulière (annexe 75 à la communication des griefs, point 2.a), interprétation qu'il n'y a pas lieu de discuter dans le présent contexte.

156.
    Au vu de ces éléments, il doit être considéré que la Commission a établi le rôle joué par le PWG dans la collusion sur les prix.

157.
    S'agissant du JMC, il ressort de la décision que son objet principal était, dès le départ, le suivant:

«—    déterminer si, et, dans l'affirmative, comment, des augmentations de prix pouvaient être mises en oeuvre, et faire part de ses conclusions au PWG,

—    définir les modalités des initiatives en matière de prix décidées par le PWG pays par pays et pour les principaux clients en vue d'établir un système de prix équivalent (c'est-à-dire uniforme) en Europe [...]» (point 44, dernier alinéa, des considérants de la décision).

158.
    Plus particulièrement, la Commission soutient, au point 45, premier et deuxième alinéas, des considérants de la décision:

«Ce comité examinait marché par marché la manière dont les augmentations de prix décidées par le PWG devaient être mises en oeuvre par chaque producteur. Les aspects pratiques de l'application des augmentations envisagées étaient traités au cours de 'tables rondes‘, où chaque participant avait l'occasion de commenter l'augmentation proposée.

Les difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre des augmentations de prix décidées par le PWG ou les éventuels refus de coopérer étaient rapportés au PWG, qui s'efforçait alors (comme l'a déclaré Stora) 'd'obtenir le degré de coopération jugé nécessaire‘. Le JMC faisait des rapports distincts pour les qualités GC et GD. Lorsque le PWG modifiait une décision en matière de prix en se fondant sur les rapports transmis par le JMC, les mesures à prendre pour appliquer la décision en cause étaient discutées à la réunion suivante du JMC.»

159.
    Il doit être constaté que la Commission se réfère à bon droit, à l'appui de ces indications relatives à l'objet des réunions du JMC, aux déclarations de Stora (annexes 35 et 39 à la communication des griefs).

160.
    En outre, même si elle ne dispose d'aucun compte rendu officiel d'une réunion du JMC, elle a obtenu auprès de Mayr-Melnhof et de Rena certaines notes internes portant sur les réunions des 6 septembre 1989, 16 octobre 1989 et 6 septembre 1990 (annexes 117, 109 et 118 à la communication des griefs). Ces notes, dont le contenu est décrit aux points 80, 82 et 87 des considérants de la décision, relatent les discussions détaillées menées au cours de ces réunions sur les initiatives concertées en matière de prix. Elles constituent donc des éléments de preuve corroborant clairement la description des fonctions du JMC donnée par Stora.

161.
    A cet égard, il suffit de renvoyer, à titre d'exemple, à la note obtenue de Rena sur la réunion du JMC du 6 septembre 1990 (annexe 118 à la communication des griefs) et dans laquelle il est notamment indiqué:

«Une augmentation de prix sera annoncée la semaine prochaine, en septembre.

France        40 FF

Pays-Bas        14

Allemagne        12 DM

Italie            80 LIT

Belgique         2,50 BFR

Suisse              9 FS

Royaume-Uni    40 UKL

Irlande        45 IRL

Toutes les qualités devraient faire l'objet de la même augmentation, GD, UD, GT, GC, etc.

Une seule augmentation de prix par an.

Pour les livraisons à partir du 7 janvier.

Au plus tard le 31 janvier.

Lettre du 14 septembre avec augmentation de prix (Mayr-Melnhof).

19 septembre, envoi par Feldmühle de sa lettre.

Cascades avant fin septembre.

Tous doivent avoir envoyé leur lettre avant le 8 octobre.»

162.
    Comme la Commission l'explique aux points 88 à 90 des considérants de la décision, elle a en outre été en mesure d'obtenir des documents internes permettant de conclure que les entreprises, et notamment celles nommément citées dans l'annexe 118 à la communication des griefs, ont effectivement annoncé et mis en oeuvre les augmentations de prix convenues (voir également le tableau G annexé à la décision).

163.
    Il convient de rejeter, dans ce contexte, l'argument de la requérante selon lequel il ne serait pas prouvé que l'annexe 118 à la communication des griefs concerne une réunion du JMC. En effet, ce document est établi sur des feuilles de papier portant l'en-tête «Schweizerischer Bankverein» («Société de Banque Suisse») et il porte la date du 6 septembre 1990, soit celle d'une réunion du JMC tenue à Zürich. Il relate très clairement des discussions à objet anticoncurrentiel entre les producteurs qui y sont mentionnés. Dès lors, il est établi qu'il concerne la réunion du JMC tenue à la date considérée.

164.
    Même si les documents invoqués par la Commission ne concernent qu'un petit nombre des réunions du JMC tenues au cours de la période couverte par la décision, toutes les preuves documentaires disponibles corroborent l'indication de Stora selon laquelle l'objet principal du JMC était de déterminer et de planifier la mise en oeuvre des augmentations de prix concertées. A cet égard, l'absence

presque totale de comptes rendus, officiels ou internes, des réunions du JMC doit être considérée comme une preuve suffisante de l'allégation de la Commission selon laquelle les entreprises ayant participé aux réunions se sont efforcées de dissimuler la véritable nature des discussions au sein de cet organe (voir, notamment, point 45 des considérants de la décision). Dans ces circonstances, la charge de la preuve a été renversée et il incombait aux entreprises destinataires de la décision ayant participé aux réunions de cet organe de prouver qu'il avait un objet licite. Une telle preuve n'ayant pas été apportée par ces entreprises, la Commission a considéré à bon droit que les discussions auxquelles les entreprises se sont livrées au cours des réunions de cet organe avaient un objet principalement anticoncurrentiel.

165.
    Quant à la situation individuelle de la requérante, le Tribunal considère que la participation de celle-ci aux réunions du PWG et du JMC constitue une preuve suffisante de sa participation à une collusion sur les prix.

166.
    Il doit d'abord être souligné que les dirigeants de la requérante ont occupé des fonctions de direction au sein du GEP Carton pendant la période allant du milieu de l'année 1986 jusqu'à l'automne 1990 (voir ci-dessus points 122 à 127). En outre, l'annexe 118 à la communication des griefs relate des discussions menées lors d'une réunion du JMC à laquelle il est constant qu'un employé de la requérante a pris part.

167.
    La participation de la requérante à la collusion sur les prix est par ailleurs corroborée par des preuves documentaires de ladite collusion, exposées dans la décision. En particulier, la liste Finnboard, décrite au point 79 des considérants de la décision, présente des similitudes formelles frappantes avec deux autres listes de prix mentionnées aux points 80 et 83 des considérants de la décision, à savoir les listes obtenues par la Commission auprès de Rena (annexes 110 et 111 à la communication des griefs). Les trois listes contiennent des indications, pour plusieurs types de carton et pour plusieurs pays communautaires, sur les dates et les montants précis des augmentations de prix mises en oeuvre par les entreprises en cause respectivement en avril 1989, en septembre/octobre 1989 et en avril 1990. Ces indications correspondent, quant aux montants des augmentations de prix et quant aux dates de leur mise en oeuvre, aux comportements effectifs constatés des entreprises concernées sur le marché, et notamment à celui de la requérante (voir les tableaux D, E et F annexés à la décision).

168.
    Étant donné les similitudes formelles frappantes existant entre ces trois listes de prix, il y a lieu de considérer qu'elles ont une origine commune. De plus, l'annexe 110 est datée du 3 décembre 1989, date antérieure à l'annonce des augmentations de prix qu'elle indique. Par conséquent, la Commission a pu inférer à bon droit que les deux autres listes de prix, non datées, devaient être considérées comme ayant également été établies à une date antérieure à celles des annonces effectives des augmentations de prix mentionnées.

169.
    S'agissant plus particulièrement de la liste Finnboard, l'argument de la requérante, selon lequel le mot suédois «höjs» atteste que le document en cause vise une augmentation antérieure des prix du carton graphique, doit être rejeté comme dénué de fondement. Ce mot «höjs» peut en effet se référer à un événement présent («augmente») ou futur («sera augmenté»).

170.
    Enfin, en ce qui concerne la même liste, la Commission a relevé à juste titre dans la décision (point 79, quatrième alinéa, des considérants):

«Comme Finnboard ne produit pas de qualités UD ou GD, la liste ne pouvait être purement interne ou se rapporter uniquement aux activités de Finnboard.»

171.
    Au vu de ce qui précède, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner les contestations de la requérante concernant d'autres documents (annexes 44, 130 et 131 à la communication des griefs), il y a lieu de conclure que la Commission a établi la participation de la requérante à une collusion sur les prix.

Sur le moyen pris en sa troisième branche tirée de l'absence de preuve de la participation de la requérante à la régulation des volumes

— Arguments des parties

172.
    La requérante soutient que la décision ne contient aucun élément permettant de conclure qu'elle a violé l'article 85 du traité en ce qui concerne la régulation des volumes. L'annexe 73 à la communication des griefs (voir point 53 des considérants de la décision), pièce revêtant une importance particulière dans la motivation de la décision, ne mentionnerait pas une seule fois le nom de la requérante.

173.
    Le point 61 des considérants de la décision relatif au système de surveillance et de contrôle des capacités de production et des volumes de production et des ventes ne comporterait aucun reproche à l'égard de la requérante, celle-ci n'ayant pas fourni de renseignements à la Fides et n'ayant reçu aucun rapport de capacités.

174.
    La motivation de la décision relative aux commandes en carnet et aux arrêts de production serait purement théorique. Elle ne ferait même pas allusion à un éventuel accord ayant cet objet, puisque, selon elle, il n'aurait existé qu'un systèmerelâché d'encouragement.

175.
    Enfin, s'agissant de l'accord prétendument conclu au sein du PWG sur le gel des parts de marché détenues par les principaux producteurs, la requérante répète qu'elle n'a pas participé à ces réunions. En outre, ni la déclaration de Stora (annexe 43 à la communication des griefs) ni la note de Rena concernant une réunion du NPI (annexe 102 à la communication des griefs, voir point 58 des considérants de la décision) ne contiendraient d'indications permettant de conclure que la requérante a participé à une concertation. En particulier, la déclaration de

Stora révélerait que les discussions concernant les parts de marché étaient extrêmement vagues et ne concernaient pas les entreprises individuelles.

176.
    La Commission soutient que l'existence des collusions en matière de régulation des volumes est démontrée (points 51 à 71 des considérants de la décision).

177.
    La politique du prix avant le tonnage aurait été décrite dans le détail par Stora (annexe 39 à la communication des griefs). L'application de cette politique aurait impliqué le contrôle des volumes de production et leur adaptation à la demande. Les producteurs auraient, pour cette raison, échangé des informations relatives à l'état des commandes en carnet, aux entrées de commandes et à l'utilisation des capacités. En outre, ils se seraient mutuellement informés sur l'ampleur des temps d'arrêt envisagés ou réalisés afin de planifier des temps d'arrêt à l'échelle du secteur.

178.
    Cette description de la politique du prix avant le tonnage serait corroborée par une note de Mayr-Melnhof relative à la réunion du COE du 3 octobre 1989 (annexe 70 à la communication des griefs), par une note confidentielle du 28 décembre 1988, rédigée par le directeur des ventes de Mayr-Melnhof (annexe 73 à la communication des griefs), ainsi que par les annexes 113, 130 et 131 à la communication des griefs.

179.
    En ce qui concerne la participation de la requérante aux discussions concernées, la Commission souligne que sa participation est démontrée par le fait qu'elle a assuré, pendant longtemps, la présidence du PWG au sein duquel lesdites discussions ont eu lieu.

180.
    En outre, le rôle joué par la requérante serait confirmé par de nombreux documents, en particulier les annexes 70, 130 et 131 à la communication des griefs, qui mentionnent à plusieurs reprises la requérante.

— Appréciation du Tribunal

181.
    Aux termes de l'article 1er de la décision, les entreprises visées par cette disposition ont enfreint l'article 85, paragraphe 1, du traité en participant, durant la période de référence, à un accord et une pratique concertée en vertu desquels les fournisseurs de carton de la Communauté «se sont entendus pour maintenir les parts de marché des principaux fabricants à des niveaux constants, avec des modifications occasionnelles», et «ont pris, de plus en plus fréquemment à partir de début 1990, des mesures concertées de contrôle de l'approvisionnement du marché communautaire, afin d'assurer la mise en oeuvre desdites augmentations de prix concertées».

182.
    D'après la Commission, ces deux catégories de collusion, appréhendées dans la décision sous le titre «régulation des volumes», ont été initiées durant la période

de référence par les participants aux réunions du PWG. En effet, il ressort du point 37, troisième alinéa, des considérants de la décision que la véritable tâche du PWG, telle que décrite par Stora, «consistait notamment dans 'la discussion et la concertation concernant les marchés, les parts du marché, les prix ainsi que les hausses de prix et les capacités‘».

183.
    Quant au rôle du PWG en ce qui concerne la collusion sur les parts de marché, la décision (point 37, cinquième alinéa, des considérants) relève: «En corrélation avec les mesures relatives aux augmentations de prix, le PWG a débattu de manière approfondie des parts du marché d'Europe occidentale détenues par les groupements nationaux et les groupes de fabricants individuels. Il en est résulté certains 'arrangements‘ entre les participants concernant leurs parts respectives du marché, l'objectif étant d'éviter que les initiatives concertées en matière de prix soient compromises par un excédent d'offre. En fait, les grands groupes de fabricants ont convenu de maintenir leur part du marché au niveau correspondant aux chiffres de vente et de production communiqués chaque année et publiés sous leur forme définitive par la Fides au mois de mars de l'année suivante. Les évolutions des parts du marché étaient analysées à chaque réunion du PWG sur la base des résultats mensuels de la Fides et, en cas de variations importantes, des explications étaient demandées à l'entreprise présumée responsable.»

184.
    Selon le point 52 des considérants, «l'accord conclu au sein du PWG en 1987 prévoyait le 'gel‘ au niveau existant des parts de marché détenues par les principaux producteurs en Europe occidentale, ainsi que l'absence de toute tentative d'acquérir de nouveaux clients ou d'améliorer leur position existante par une politique agressive en matière de prix».

185.
    Le point 56, premier alinéa, des considérants souligne: «L'accord de base conclu entre les principaux producteurs pour le maintien de leurs parts respectives de marché a continué d'être appliqué pendant toute la période couverte par la présente décision.» Selon le point 57, «'l'évolution des parts de marché‘ était examinée à chaque réunion du PWG sur la base des statistiques provisoires». Enfin, le point 56, dernier alinéa, souligne: «Les entreprises qui participaient aux discussions sur les parts du marché étaient les membres du PWG, à savoir: Cascades, Finnboard, KNP (jusqu'en 1988), [Mayr-Melnhof], MoDo, Sarrió, les deux producteurs du groupe Stora, CBC et Feldmühle, et (à partir de 1988) Weig.»

186.
    Il y a lieu de considérer que la Commission a correctement établi l'existence d'une collusion sur les parts de marché entre les participants aux réunions du PWG.

187.
    En effet, l'analyse de la Commission repose essentiellement sur les déclarations de Stora (annexes 39 et 43 à la communication des griefs) et se trouve confortée par l'annexe 73 à la communication des griefs.

188.
    Dans l'annexe 39 à la communication des griefs, Stora explique: «Le PWG s'est réuni à partir de 1986 afin de contribuer à réguler le marché. [...] Entre autres

activités (légitimes), il avait pour objet la discussion et la concertation concernant les marchés, les parts du marché, les prix ainsi que les hausses de prix, la demande et les capacités. Son rôle consistait notamment à évaluer l'état précis de l'offre et de la demande sur le marché ainsi que les mesures à prendre pour le réguler, et à présenter cette évaluation à la President Conference.»

189.
    S'agissant plus spécifiquement de la collusion sur les parts de marché, Stora indique que «les parts acquises par les groupes nationaux de la Communauté européenne, de l'AELE et d'autres pays fournis par les membres du GEP Carton étaient examinées au sein du PWG» et que le PWG «discutait de la possibilité de maintenir les parts de marché à leur niveau de l'année précédente» (annexe 39 à la communication des griefs, point 19). Elle signale par ailleurs (même document, point 6) que des «discussions relatives aux parts de marché des fabricants en Europe ont également eu lieu au cours de cette période, la première période de référence étant les niveaux de 1987».

190.
    Dans sa réponse à une demande de la Commission du 23 décembre 1991 envoyée le 14 février 1992 (annexe 43 à la communication des griefs), Stora précise encore: «Les ententes sur les niveaux de part de marché conclues par les membres du PWG concernaient l'Europe dans son ensemble. Ces ententes étaient basées sur les chiffres annuels totaux de l'année antérieure, lesquels étaient habituellement disponibles de façon définitive dès le mois de mars de l'année suivante.» (Point 1.1.)

191.
    Cette affirmation est confirmée dans le même document en ces termes: «[...] les discussions débouchaient sur des ententes, conclues en règle générale en mars de chaque année, entre les membres du PWG avec pour objectif le maintien de leurs parts de marché au niveau de l'année précédente.» (Point 1.4.) Stora révèle que «aucune mesure n'était prise pour assurer le respect des ententes» et que les participants aux réunions du PWG «étaient conscients que, s'ils prenaient des positions exceptionnelles sur certains marchés fournis par d'autres, ces derniers feraient la même chose sur d'autres marchés» (même point).

192.
    Enfin, elle déclare que Finnboard a pris part aux discussions relatives aux parts de marché (point 1.2).

193.
    Les affirmations de Stora concernant la collusion sur les parts de marché sont étayées par l'annexe 73 à la communication des griefs (voir ci-dessus points 152 et 178).

194.
    Selon ce document, cité aux points 53 à 55 des considérants de la décision, la coopération plus étroite au sein du «cercle des présidents» («Präsidentenkreis»), décidée en 1987, a fait des «gagnants» et des «perdants». L'auteur de la note classe Mayr-Melnhof dans la catégorie des perdants pour diverses raisons, notamment les suivantes:

«2)    Un accord n'a pu être conclu qu'en nous infligeant une 'sanction‘ — on a exigé de nous que nous fassions des 'sacrifices‘.

3)    Les parts de marché de 1987 devaient être 'gelées‘, les contacts existants devaient être maintenus et aucune activité ou qualité nouvelles ne devaient être conquises en pratiquant des prix promotionnels (le résultat sera visible en janvier 1989 — si toutes les parties prenantes sont loyales).»

195.
    Ces phrases doivent être lues dans le contexte plus général de la note.

196.
    A cet égard, il y a lieu de rappeler (voir ci-dessus point 155) que la référence au «cercle des présidents» a été interprétée par Mayr-Melnhof comme visant à la fois le PWG et la PC dans un contexte général, c'est-à-dire sans référence à un événement ou à une réunion particulière (annexe 75 à la communication des griefs, point 2.a).

197.
    L'auteur indique ensuite que cette coopération a conduit à la «discipline des prix», laquelle a fait des «gagnants» et des «perdants».

198.
    C'est donc dans le contexte de cette discipline décidée par le «cercle des présidents» qu'il y a lieu de comprendre l'expression se rapportant aux parts de marché devant être gelées aux niveaux de 1987.

199.
    En outre, le renvoi à 1987 comme année de référence est conforme à la deuxième déclaration de Stora (annexe 39 à la communication des griefs; voir point 188 ci-dessus).

200.
    Quant au rôle joué par le PWG dans la collusion sur le contrôle de l'approvisionnement, que caractérisait l'examen des temps d'arrêt des machines, la décision énonce que le PWG a joué un rôle déterminant dans la mise en oeuvre des temps d'arrêt lorsque, à partir de 1990, la capacité de production s'est accrue et que la demande a décliné: «[...] au début de 1990, les principaux fabricants [...] ont jugé utile de se concerter dans le cadre du PWG sur la nécessité d'appliquer des temps d'arrêt. Les grands producteurs ont reconnu qu'ils ne pouvaient accroîtrela demande en réduisant les prix et que maintenir la production à pleine capacité ne ferait que faire baisser les prix. En théorie, les temps d'arrêt nécessaires pour rétablir l'équilibre entre l'offre et la demande pouvaient être calculés sur la base des rapports concernant les capacités [...]» (Point 70 des considérants de la décision.)

201.
    La décision relève en outre: «Le PWG n'indiquait cependant pas formellement le temps d'arrêt à respecter par chaque producteur. Selon Stora, l'établissement d'un plan coordonné d'arrêt des machines couvrant tous les producteurs soulevait des difficultés d'ordre pratique. Stora indique que c'est la raison pour laquelle il n'existait qu''un système relâché d'encouragement‘.» (Point 71 des considérants de la décision.)

202.
    Il y a lieu de considérer que la Commission a suffisamment établi l'existence d'une collusion sur les temps d'arrêt de la production entre les participants aux réunions du PWG.

203.
    Les pièces qu'elle produit soutiennent son analyse.

204.
    Dans sa deuxième déclaration (annexe 39 à la communication des griefs, point 24), Stora explique: «Avec l'adoption, par le PWG, de la politique du prix avant le tonnage et la mise en oeuvre progressive d'un système de prix équivalents à partir de 1988, les membres du PWG ont reconnu qu'il était nécessaire de respecter des temps d'arrêt en vue de maintenir ces prix face à une croissance réduite de la demande. Faute pour les fabricants d'appliquer des temps d'arrêt, il leur aurait été impossible de maintenir les niveaux de prix convenus face à une capacité excédentaire croissante.»

205.
    Au point suivant de sa déclaration, elle ajoute: «En 1988 et 1989, l'industrie pouvait fonctionner pratiquement à pleine capacité. Les temps d'arrêt autres que la fermeture normale pour les réparations et les vacances sont devenus nécessaires à partir de 1990. [...] Par la suite, il s'est avéré nécessaire de pratiquer des temps d'arrêt lorsque le flot de commandes s'arrêtait afin de maintenir la politique du prix avant le tonnage. Les temps d'arrêt à respecter par les producteurs (pour assurer le maintien de l'équilibre entre la production et la consommation) pouvaient être calculés sur la base des rapports concernant les capacités. Le PWG n'indiquait pas formellement le temps d'arrêt à respecter, bien qu'il existât un système relâché d'encouragement [...]»

206.
    Quant à l'annexe 73 à la communication des griefs, les raisons fournies par l'auteur pour expliquer qu'il considère Mayr-Melnhof comme «perdant» à l'époque de sa rédaction constituent des éléments de preuve importants de l'existence d'une collusion entre les participants aux réunions du PWG sur les temps d'arrêt.

207.
    En effet, l'auteur constate:

«4)    C'est sur ce point que la conception des parties intéressées quant à l'objectif poursuivi commence à diverger.

[...]

    c) Toutes les forces de vente et agents européens ont été libérés de leur budget en termes de volume et une politique de prix rigide, ne souffrant quasiment aucune exception, a été suivie (nos collaborateurs n'ont souvent pas compris notre changement d'attitude à l'égard du marché — auparavant, la seule exigence était celle du tonnage, alors que, désormais, seule compte la discipline en matière de prix avec le risque d'un arrêt des machines).»

208.
    Mayr-Melnhof soutient (annexe 75 à la communication des griefs) que le passage ci-dessus reproduit vise une situation interne à l'entreprise. Cependant, analysé à la lumière du contexte plus général de la note, cet extrait traduit la mise en oeuvre, au niveau des équipes commerciales, d'une politique rigoureuse arrêtée au sein du «cercle des présidents». Le document doit donc être interprété comme signifiant que les participants à l'accord de 1987, c'est-à-dire au moins les participants aux réunions du PWG, ont indéniablement mesuré les conséquences de la politique arrêtée, dans l'hypothèse où celle-ci serait appliquée avec rigueur.

209.
         Le fait que des discussions relatives à l'examen des temps d'arrêt ont eu lieu entre les fabricants lors de la préparation des augmentations de prix est corroboré, notamment, par une note de Rena datée du 6 septembre 1990 (annexe 118 à la communication des griefs), qui mentionne les montants des augmentations de prix dans plusieurs pays, les dates des futures annonces de ces augmentations ainsi que l'état des commandes en carnet exprimé en jours de travail pour plusieurs fabricants.

210.
    L'auteur du document note que certains fabricants prévoyaient des temps d'arrêt, ce qu'il exprime par exemple de la manière suivante:

«Kyro        36 days    1 week

Simpele    28 days    1 week     September

Ta        27 days

Ingerois    24 days    23/september stop

[...]

Kopparfors    5-15 days

            5/9 will stop for five days.»

211.
    Il doit être souligné que la requérante a participé à la réunion du JMC concernée par ladite note (tableau 4 annexé à la décision). A cet égard, il est constant que les noms susmentionnés «Kyro», «Simpele», «Ta» pour Tako et «Ingerois» se réfèrent aux lieux de production du carton de sociétés membres de Finnboard, à savoir Oy Kyro AB, United Paper Mills Ltd, Metsä-Serla Oy et Tampella Corporation.

212.
    Sur la base de ce qui précède, il doit être conclu que la Commission a prouvé à suffisance de droit l'existence d'une collusion sur les parts de marché entre les participants aux réunions du PWG ainsi que celle d'une collusion sur les temps d'arrêt entre ces mêmes entreprises. Dans la mesure où il est établi que la requérante a participé aux réunions du PWG et où cette entreprise est expressément mentionnée dans les principales preuves à charge (déclarations de Stora), la Commission a tenu à bon droit la requérante pour responsable d'une participation à ces deux collusions.

213.
    Les critiques de la requérante formulées à l'encontre des déclarations de Stora, qui visent à en contester la valeur probante, ne sont pas de nature à affaiblir cette constatation.

214.
    En effet, il est constant que les déclarations de Stora émanent de l'une des entreprises censées avoir participé à l'infraction alléguée et qu'elles comportent une description détaillée de la nature des discussions menées au sein des organes du GEP Carton, du but poursuivi par les entreprises regroupées au sein de celui-ci, ainsi que de la participation desdites entreprises aux réunions de ses différents organes. Or, dans la mesure où cet élément de preuve central est corroboré par d'autres pièces du dossier, il constitue le soutien pertinent des affirmations de la Commission.

215.
    Dès lors que la Commission a établi l'existence des deux collusions en cause, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres pièces critiquées par la partie requérante.

216.
    Aucune des branches du moyen n'ayant été accueillie, le moyen doit être rejeté dans son ensemble.

Sur le moyen tiré d'une violation de l'article 85, paragraphe 1, du traité, en ce que la Commission n'aurait pas dûment pris en considération les conditions de concurrence et la situation sur le marché

Arguments des parties

217.
    Ce moyen s'articule en deux branches.

218.
    Dans une première branche, la requérante affirme que, en raison des conditions du marché, elle n'a pas eu d'intérêt à participer à une concertation visant à restreindre la concurrence.

219.
    A cet égard, il ressortirait de la décision que, en 1990, les exportations des pays scandinaves ont très principalement été constituées des cartons GC et SBS et que 80 % du carton produit par les Finlandais étaient de qualité GC. En outre, les exportations des États membres de l'AELE auraient couvert environ la moitié de la consommation du carton GC dans la Communauté. Dès lors, le seul intérêt de la requérante au développement du marché communautaire du carton aurait concerné le carton GC.

220.
    Les producteurs de carton GC n'auraient presque pas été touchés par les difficultés d'écoulement rencontrées par les producteurs de carton GD, car la demande de carton GC aurait augmenté, pendant la deuxième moitié des années 80, trois fois plus vite que la demande du carton GD, et les producteurs scandinaves du carton GC auraient réussi à accroître continuellement leurs parts du marché. En revanche, les producteurs de carton GD auraient subi une concurrence vive. Les effets de

cette situation de concurrence avantageuse pour les producteurs de carton GC auraient été renforcés, d'une part, par l'intégration verticale de leurs chaînes de production, les cartonneries étant établies dans le voisinage direct des forêts et des usines de pâte et, d'autre part, par le fait que les producteurs finlandais possédaient les installations industrielles les plus modernes. Dans ce contexte, la requérante conteste que la marge d'exploitation moyenne des producteurs de carton se soit élevée à 20 % pendant la période couverte par la décision (point 16 des considérants).

221.
    En raison des conditions du marché et de la situation de concurrence dans laquelle la requérante se trouvait à l'époque, elle n'aurait donc eu aucun intérêt à participer à une entente visant à restreindre la concurrence. La Commission ayant omis de prendre en considération ces circonstances particulières, son analyse des conditions du marché serait insuffisante et erronée.

222.
    Dans une seconde branche du moyen, la requérante soutient que la décision se fonde sur une analyse insuffisante des conditions du marché, en ce qu'elle ne contient aucune constatation relative à l'existence d'une concurrence effective durant la période en cause. La Commission aurait dû prendre en considération, au moins lors du calcul des amendes, le fait qu'une éventuelle concertation n'a eu, en tout état de cause, aucune influence sur la concurrence effective.

223.
    S'agissant de la première branche du moyen, la Commission fait valoir que, dès lors que la participation de la requérante à l'entente est démontrée, il n'est pas nécessaire d'examiner si elle avait un intérêt à participer à celle-ci. En tout état de cause, la requérante aurait eu un intérêt évident au maintien des prix artificiellement élevés. En effet, à supposer même que ses affirmations relatives à la situation concurrentielle avantageuse des producteurs de carton GC soient fondées, le maintien des prix élevés lui aurait conféré un avantage encore plus grand par rapport aux producteurs de carton GD.

224.
    Enfin, la marge d'exploitation moyenne se serait effectivement élevée à 20 % (point 16 des considérants de la décision).

225.
    S'agissant de la seconde branche du moyen, la Commission fait valoir que l'étude rédigée par London Economics (ci-après «rapport LE»), invoquée par la requérante, ne contredit ni l'existence de l'entente ni l'effet de celle-ci sur le libre jeu de la concurrence.

226.
    En tout état de cause, en raison de l'objectif manifestement anticoncurrentiel de l'entente, il ne serait pas nécessaire de démontrer l'existence d'effets concrets sur le marché (arrêt de la Cour du 13 juillet 1966, Consten et Grundig/Commission, 56/64 et 58/64, Rec. p. 429, 496).

Appréciation du Tribunal

227.
    Comme cela a déjà été constaté, la Commission a établi que la requérante a participé depuis le milieu de l'année 1986 à une collusion sur les prix et, à compter de la fin de 1987, à une collusion sur les parts de marché ainsi qu'à une collusion sur les temps d'arrêt, soit les trois éléments constitutifs de l'infraction constatée à l'article 1er de la décision.

228.
    En outre, la Commission a conclu, sans être contredite par la requérante, que les collusions susmentionnées avaient eu pour objet de restreindre la concurrence à l'intérieur du marché commun et qu'elles avaient affecté le commerce entre États membres (points 133 à 138 des considérants de la décision).

229.
    Dans ces conditions, les arguments de la requérante tirés de l'absence d'intérêt à participer à une entente quelconque, d'une part, et de l'absence d'effets de la concertation sur la concurrence effective, d'autre part, sont inopérants. En effet, à supposer même que les affirmations factuelles avancées par la requérante dans le cadre de son argumentation soient fondées, cela ne serait pas de nature à mettre en cause la constatation de la Commission relative à la violation de l'article 85, paragraphe 1, du traité.

230.
    Le présent moyen ne saurait donc être accueilli.

Sur la demande d'annulation de l'article 2 de la décision

Arguments des parties

231.
    La requérante allègue que l'injonction énoncée à l'article 2 de la décision est totalement imprécise et ne permet pas de déterminer les informations dont l'échange est interdit. Il ne serait pas admissible que l'article 2 de la décision fasse reposer sur les entreprises le risque de la détermination de l'étendue de l'injonction. Par ailleurs, le manque de précision de l'article 2 priverait la décision de son caractère exécutoire.

232.
    En outre, l'injonction ne serait pas justifiée, dans la mesure où elle interdit l'échange d'informations agrégées sur l'état des entrées de commandes et des commandes en carnet. L'échange de telles données serait tout à fait anodin, et le seul fait qu'il soit possible d'utiliser les informations échangées dans un but anticoncurrentiel ne pourrait justifier que leur échange soit interdit.

233.
    Enfin, un système d'échange de telles informations agrégées aurait été notifié à la Commission par l'association CEPI-Cartonboard. L'article 2 de la décision interdisant, en réalité, ce système, la Commission aurait dû, avant d'adopter la décision, vérifier si les conditions d'une exemption au titre de l'article 85, paragraphe 3, du traité étaient remplies, et la décision aurait dû être motivée sur

ce point. Les droits de la défense de la requérante auraient donc été violés, faute pour la Commission d'avoir entendu l'association CEPI-Cartonboard avant d'adopter la décision.

234.
    La Commission conteste que l'interdiction contenue à l'article 2 de la décision soit trop abstraite ou imprécise. Le dispositif de la décision devrait être lu à la lumière de ses motifs, et une telle lecture permettrait aux destinataires de constater l'étendue précise de l'interdiction (arrêt de la Cour du 16 décembre 1975, Suiker Unie e.a./Commission, 40/73 à 48/73, 50/73, 54/73, 55/73, 56/73, 111/73, 113/73 et 114/73, Rec. p. 1663, points 122 à 124). En l'espèce, les motifs de la décision exposeraient en détail les éléments de fait sur lesquels l'interdiction se fonde.

235.
    Les interdictions mentionnées à l'article 2, premier et quatrième alinéas, viseraient la cessation et l'interdiction de la reprise de l'infraction, telle qu'elle a été décrite dans les motifs de la décision. De plus, les deuxième et troisième alinéas de l'article 2 de la décision ne contiendraient qu'une description, destinée à aider les fabricants à organiser leur comportement futur, de la manière dont un échange d'informations licite peut être organisé. Cela résulterait des formules positives utilisées dans le texte de ces alinéas.

236.
    S'agissant de l'interdiction portant sur l'échange d'informations, sous une forme agrégée, relatives à l'état des entrées de commandes et des commandes en carnet, la Commission fait valoir que, sur le marché du carton, cette interdiction se justifie en raison de la grande concentration de l'industrie et de l'homogénéité des produits. Se référant aux points 68 à 70 des considérants de la décision, elle soutient que l'échange régulier de telles informations entraîne une transparence des conditions du marché de nature à permettre, à l'échelle de toute la branche, d'une part, de planifier des temps d'arrêt prévenant une chute des prix et, d'autre part, d'apprécier la possibilité d'augmenter les prix. D'ailleurs, les producteurs de carton auraient déjà utilisé les informations échangées pour faciliter une politique commerciale commune.

237.
    Dès lors, la Commission aurait considéré à bon droit que l'échange des informations en cause constituerait, sur le marché concerné, une restriction de la concurrence interdite en vertu de l'article 85, paragraphe 1, du traité.

238.
    Enfin, l'article 2 de la décision ne concernerait pas le système d'échange d'informations notifié par l'association CEPI-Cartonboard.

Appréciation du Tribunal

239.
    Il y a lieu de rappeler que l'article 2 de la décision dispose:

«Les entreprises mentionnées à l'article 1er mettent fin immédiatement aux infractions précitées, si elles ne l'ont pas déjà fait. Elles s'abstiennent à l'avenir, dans le cadre de leurs activités dans le secteur du carton, de tout accord ou

pratique concertée susceptible d'avoir un objet ou un effet identique ou similaire, y compris tout échange d'informations commerciales:

a)    par lequel les participants seraient informés directement ou indirectement de la production, des ventes, des commandes en carnet, des taux d'utilisation des machines, des prix de vente, des coûts ou des plans de commercialisation d'autres fabricants;

b)    par lequel, même si aucune information individuelle n'est communiquée, une réaction commune du secteur dans le domaine des prix ou un contrôle de la production seraient promus, facilités ou encouragés

    ou

c)    qui permettrait aux entreprises concernées de suivre l'exécution ou le respect de tout accord exprès ou tacite sur les prix ou le partage des marchés dans la Communauté.

Tout système d'échange de données générales auquel elles seraient abonnées, tel que le système Fides ou son successeur, sera géré de manière à exclure non seulement toutes données permettant d'identifier le comportement de fabricants déterminés, mais aussi toutes données relatives à l'état des entrées de commandes et des commandes en carnet, au taux prévu d'utilisation des capacités de production (dans les deux cas, même si elles sont agrégées) ou à la capacité de production de chaque machine.

Tout système d'échange de ce type sera limité à la collecte et à la diffusion, sous une forme agrégée, de statistiques sur la production et les ventes qui ne puissent être utilisées pour promouvoir ou faciliter un comportement commun du secteur.

Les entreprises s'abstiendront également de tout échange d'informations intéressant la concurrence autre que les échanges admis, ainsi que de toute réunion ou contact en vue d'examiner l'importance des informations échangées ou la réaction possible ou probable du secteur ou de fabricants individuels à ces informations.

Un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision est accordé pour procéder aux modifications nécessaires de tout système éventuel d'échange d'informations.»

240.
    Ainsi que cela ressort du point 165 des considérants, l'article 2 de la décision a été adopté en application de l'article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17. En vertu de cette disposition, la Commission, lorsqu'elle constate une infraction, notamment, aux dispositions de l'article 85 du traité, peut obliger par voie de décision les entreprises intéressées à mettre fin à l'infraction constatée.

241.
    Il est de jurisprudence constante que l'application de l'article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17 peut comporter l'interdiction de continuer certaines activités, pratiques ou situations, dont l'illégalité a été constatée (arrêts de la Cour du 6 mars 1974, Istituto Chemioterapico Italiano et Commercial Solvents/Commission, 6/73 et 7/73, Rec. p. 223, point 45, et du 6 avril 1995, RTE et ITP/Commission, C-241/91 P et C-242/91 P, Rec. p. I-743, point 90), mais aussi celle d'adopter un comportement futur similaire (arrêt du Tribunal du 6 octobre 1994, Tetra Pak/Commission, T-83/91, Rec. p. II-755, point 220).

242.
    De plus, dans la mesure où l'application de l'article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17 doit se faire en fonction de l'infraction constatée, la Commission a le pouvoir de préciser l'étendue des obligations qui incombent aux entreprises concernées afin qu'il soit mis fin à ladite infraction. De telles obligations pesant sur les entreprises ne doivent toutefois pas dépasser les limites de ce qui est approprié et nécessaire pour atteindre le but recherché, à savoir le rétablissement de la légalité au regard des règles qui ont été méconnues (arrêt RTE et ITP/Commission, précité, point 93; dans le même sens, voir arrêts du Tribunal du 8 juin 1995, Langnese-Iglo/Commission, T-7/93, Rec. p. II-1533, point 209, et Schöller/Commission, T-9/93, Rec. p. II-1611, point 163).

243.
    En ce qui concerne d'abord l'argument de la requérante selon lequel la Commission aurait commis une erreur de droit en adoptant l'article 2 de la décision sans avoir pris position sur la compatibilité avec l'article 85 du système d'échange d'informations notifié par l'association CEPI-Cartonboard, il convient de relever que la notification faite par cette association le 6 décembre 1993 concernait un nouveau système d'échange d'informations, distinct de celui examiné par la Commission dans la décision. La Commission, en adoptant l'article 2 de la décision attaquée, n'a par conséquent pas pu apprécier la légalité du nouveau système dans le cadre de cette décision. Elle était dès lors en droit de se borner à examiner l'ancien système d'échange d'informations et à prendre position sur celui-ci en adoptant l'article 2 de la décision.

244.
    Afin de vérifier ensuite si, comme le prétend la requérante, l'injonction contenue à l'article 2 de la décision a une portée trop large, il convient d'examiner l'étendue des diverses interdictions qu'il impose aux entreprises.

245.
    Quant à l'interdiction édictée à l'article 2, premier alinéa, deuxième phrase, consistant pour les entreprises à s'abstenir à l'avenir de tout accord ou pratique concertée susceptible d'avoir un objet ou un effet identique ou analogue à ceux des infractions constatées à l'article 1er de la décision, elle vise uniquement à ce que les entreprises soient empêchées de répéter les comportements dont l'illégalité a été constatée. Par conséquent, la Commission, en adoptant une telle interdiction, n'a pas outrepassé les pouvoirs que lui confère l'article 3 du règlement n° 17.

246.
    Quant à l'article 2, premier alinéa, sous a), sous b) et sous c), ses dispositions visent plus spécifiquement des interdictions de futurs échanges d'informations commerciales.

247.
    L'injonction contenue dans l'article 2, premier alinéa, sous a), qui interdit à l'avenir tout échange d'informations commerciales permettant aux participants d'obtenir directement ou indirectement des informations individuelles sur des entreprises concurrentes, suppose que l'illégalité d'un échange d'informations d'une telle natureau regard de l'article 85, paragraphe 1, du traité ait été constatée par la Commission dans la décision.

248.
    A cet égard, il y a lieu de constater que l'article 1er de la décision n'énonce pas que l'échange d'informations commerciales individuelles constitue en soi une violation de l'article 85, paragraphe 1, du traité.

249.
    Il dispose de manière plus générale que les entreprises ont enfreint cet article du traité en participant à un accord et une pratique concertée en vertu desquels les entreprises ont, notamment, «échangé des informations commerciales sur les livraisons, les prix, les arrêts de production, les commandes en carnet et les taux d'utilisation des machines, afin de soutenir les mesures mentionnées ci-dessus».

250.
    Cependant, le dispositif de la décision devant être interprété à la lumière de ses motifs (arrêt Suiker Unie e.a./Commission, précité, point 122), il convient de relever que le point 134, deuxième alinéa, des considérants de la décision indique:

«L'échange par les fabricants, lors de réunions du GEP Carton (essentiellement celles du JMC), d'informations commerciales individuelles normalement confidentielles et sensibles sur les commandes en carnet, les arrêts de machines et les rythmes de production était à l'évidence contraire aux règles de concurrence, puisqu'il avait pour but de rendre les conditions aussi propices que possible à la mise en oeuvre des augmentations de prix [...]»

251.
    Dès lors, la Commission ayant dûment considéré dans la décision que l'échange d'informations commerciales individuelles constituait, en soi, une violation de l'article 85, paragraphe 1, du traité, l'interdiction future d'un tel échange d'informations satisfait aux conditions requises pour l'application de l'article 3, paragraphe 1, du règlement n° 17.

252.
    S'agissant des interdictions relatives aux échanges d'informations commerciales visés à l'article 2, premier alinéa, sous b) et sous c), de la décision, elles doivent être examinées à la lumière des deuxième, troisième et quatrième alinéas de ce même article, qui en étayent le contenu. C'est en effet dans ce contexte qu'il convient de déterminer si, et, dans l'affirmative, dans quelle mesure la Commission a considéré comme illégaux les échanges en cause, dès lors que l'étendue des obligations pesant

sur les entreprises doit être limitée à ce qui est nécessaire pour rétablir la légalité de leurs comportements au regard de l'article 85, paragraphe 1, du traité.

253.
    La décision doit être interprétée en ce sens que la Commission a considéré le système Fides comme contraire à l'article 85, paragraphe 1, du traité, en tant que support de l'entente constatée (point 134, troisième alinéa, des considérants de la décision). Une telle interprétation est corroborée par le libellé de l'article 1er de la décision, duquel il ressort que les informations commerciales ont été échangées entre les entreprises «afin de soutenir les mesures» considérées comme contraires à l'article 85, paragraphe 1, du traité.

254.
    C'est à la lumière de cette interprétation par la Commission de la compatibilité, en l'espèce, du système Fides avec l'article 85 du traité que doit être appréciée l'étendue des interdictions futures contenues à l'article 2, premier alinéa, sous b) et sous c), de la décision.

255.
    A cet égard, d'une part, les interdictions en cause ne sont pas limitées aux échanges d'informations commerciales individuelles mais concernent aussi ceux de certaines données statistiques agrégées [article 2, premier alinéa, sous b), et deuxième alinéa, de la décision]. D'autre part, l'article 2, premier alinéa, sous b) et sous c), de la décision interdit l'échange de certaines informations statistiques afin de prévenir la constitution d'un possible support de comportements anticoncurrentiels potentiels.

256.
    Une telle interdiction, en ce qu'elle vise à empêcher l'échange d'informations purement statistiques n'ayant pas le caractère d'informations individuelles ou individualisables, au motif que les informations échangées pourraient être utilisées à des fins anticoncurrentielles, excède ce qui est nécessaire pour rétablir la légalité des comportements constatés. En effet, d'une part, il ne ressort pas de la décision que la Commission ait considéré l'échange de données statistiques comme étant en soi une infraction à l'article 85, paragraphe 1, du traité. D'autre part, le seul fait qu'un système d'échange d'informations statistiques puisse être utilisé à des fins anticoncurrentielles ne le rend pas contraire à l'article 85, paragraphe 1, du traité, puisqu'il convient, dans de telles circonstances, d'en constater in concreto les effets anticoncurrentiels.

257.
    En conséquence, l'article 2, premier à quatrième alinéa, de la décision doit être annulé, sauf en ce qui concerne les passages suivants:

«Les entreprises mentionnées à l'article 1er mettent fin immédiatement aux infractions précitées, si elles ne l'ont pas déjà fait. Elles s'abstiennent à l'avenir, dans le cadre de leurs activités dans le secteur du carton, de tout accord ou pratique concertée susceptible d'avoir un objet ou un effet identique ou similaire, y compris tout échange d'informations commerciales:

a)    par lequel les participants seraient informés directement ou indirectement de la production, des ventes, des commandes en carnet, des taux

d'utilisation des machines, des prix de vente, des coûts ou des plans de commercialisation d'autres fabricants.

Tout système d'échange de données générales auquel elles seraient abonnées, tel que le système Fides ou son successeur, sera géré de manière à exclure toutes données permettant d'identifier le comportement de fabricants déterminés.»

Sur la demande d'annulation de l'amende ou de réduction de son montant

Sur le moyen tiré d'un calcul de l'amende sur la base d'un chiffre d'affaires non pertinent

Arguments des parties

258.
    Ce moyen s'articule en deux branches.

259.
    Dans une première branche, la requérante fait valoir que l'amende a été calculée, à tort, sur la base des chiffres d'affaires de quatre de ses sociétés membres produisant du carton, à savoir Kyro, Metsä-Serla, Tampella et United Paper Mills. En effet, le chiffre d'affaires de la requérante de 1990 serait d'un montant bien inférieur aux chiffres d'affaires de ces sociétés. Au sens de l'article 15 du règlement n° 17, il serait constitué par les commissions facturées aux sociétés membres pour les ventes qu'elle a réalisées.

260.
    Elle souligne que, à l'occasion des ventes effectuées pour le compte de ses sociétés membres, elle n'acquiert pas la propriété de la marchandise, le droit de propriété passant directement de la société membre au client. Elle ne serait pas davantage créancière des clients finaux, puisque les créances entrent directement dans le patrimoine des sociétés membres. Les clients désireraient toujours que la marchandise soit livrée par une cartonnerie déterminée. En effet, la requérante mènerait les négociations avec les clients sur la base de contrats déjà conclus et elle ne pourrait agir que dans le cadre des conditions de vente déjà fixées dans ces contrats. Pour ce qui est des éventuels nouveaux clients, le personnel de vente serait tenu de s'adresser au directeur local des ventes de Finnboard, lequel s'informerait à son tour auprès de la cartonnerie désirée par le client afin que soient déterminées les conditions de vente. Enfin, lorsque la commande d'un client est acceptée par la cartonnerie en cause, la facture serait envoyée par la requérante pour le compte de ladite cartonnerie.

261.
    Son rôle serait également celui d'un intermédiaire en ce qui concerne les négociations relatives au transport et aux financements.

262.
    Elle soutient que, selon la décision, Finnboard et ses sociétés membres ne doivent pas être considérées comme une seule entreprise au sens de l'article 85 du traité.

Cette approche confirmerait que le chiffre d'affaires pertinent pour le calcul de l'amende est seulement constitué par les commissions que perçoit la requérante.

263.
    Dans une seconde branche du moyen, exposée dans la lettre du 19 juillet 1995 adressée au Tribunal, la requérante relève que, selon le mémoire en défense, la Commission a calculé l'amende à partir d'un chiffre d'affaires erroné. En effet, elle aurait calculé l'amende sur la base d'une commercialisation par la requérante de 250 000 tonnes de carton pour l'année 1990, alors que la commercialisation effective ne se serait élevée qu'à 219 364 tonnes. Une telle différence s'expliquerait par la prise en compte erronée de la production de papier peint de Metsä-Serla. Exposant son calcul du chiffre d'affaires pour l'année 1990, la requérante soutient que le chiffre d'affaires a été surestimé de 17 %.

264.
    La Commission affirme, s'agissant de la première branche du moyen, que la requérante ne peut pas être assimilée à un agent commercial indépendant. Elle devrait être traitée comme un organisme de vente et de distribution de ses sociétés membres, pour lesquelles elle effectue toutes les ventes, par l'intermédiaire de ses propres filiales de vente. Les contrats d'achat et de livraison seraient conclus directement entre la requérante et ses clients, et les livraisons seraient facturées en son propre nom. De plus, la requérante disposerait, dans une certaine mesure, du pouvoir de négocier avec les clients les conditions spécifiques de vente. Quant aux montants correspondant aux ventes, ils seraient comptabilisés dans la partie du bilan relative au capital de roulement, comme des sommes à percevoir par la requérante.

265.
    Enfin, la Commission soutient que l'objectif de l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 ne pourrait pas être atteint si les fabricants pouvaient, par la création d'un organisme de vente commun, limiter leur responsabilité à 10 % des dépenses courantes de cet organisme.

266.
    En ce qui concerne la seconde branche du moyen, la Commission, dans sa lettre du 6 octobre 1995, estime qu'il n'y a pas lieu d'en tenir compte, dans la mesure où la requérante a renoncé à la possibilité de déposer un mémoire en réplique dans sa lettre du 19 juillet 1995.

267.
    Répondant néanmoins à l'argumentation en cause, elle admet avoir commis une erreur en indiquant, dans le mémoire en défense, que l'amende avait été calculée sur la base d'une commercialisation de 250 000 tonnes pour l'année 1990. En réalité, elle aurait, à partir des chiffres de commercialisation communiqués par la requérante, retenu pour base de calcul du chiffre d'affaires une commercialisation de 221 000 tonnes. La différence existante par rapport au chiffre d'affaires calculé par la requérante s'expliquerait par le fait que la Commission aurait considéré que le prix par tonne utilisé par la requérante était trop bas. En effet, la requérante aurait retenu un prix moyen de vente de 833 écus par tonne, alors qu'il ressortirait d'un procès-verbal confidentiel découvert dans les locaux de sa filiale britannique que même les prix proposés aux clients importants en 1990 s'élevaient en moyenne

largement au-dessus du seuil des 1 000 écus par tonne. De plus, malgré les demandes d'éclaircissements formulées par la Commission, la requérante n'aurait jamais expliqué les éléments retenus pour parvenir aux chiffres d'affaires de ses sociétés membres.

Appréciation du Tribunal

268.
    S'agissant de la première branche du moyen, il ressort de l'examen des moyens invoqués par la requérante au soutien de sa demande d'annulation de la décision que la Commission a établi la participation de la requérante aux réunions desorganes du GEP Carton et aux concertations à objet anticoncurrentiel qui ont eu lieu lors de ces réunions. La requérante n'a pas contesté que, si une telle preuve était apportée, elle pourrait être tenue pour responsable de l'infraction constatée à l'article 1er de la décision et se voir, à ce titre, infliger une amende sur le fondement de l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17.

269.
    Cette disposition prévoit:

«La Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises et associations d'entreprises des amendes de mille unités de compte au moins et d'un million d'unités de compte au plus, ce dernier montant pouvant être porté à dix pour cent du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice social précédent par chacune des entreprises ayant participé à l'infraction, lorsque, de propos délibéré ou par négligence:

a) elles commettent une infraction aux dispositions de l'article 85, paragraphe 1 [...]»

270.
    Selon une jurisprudence constante, l'utilisation du terme générique «infraction» à l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, en ce qu'il couvre sans distinction les accords, les pratiques concertées et les décisions d'associations d'entreprises, indique que les plafonds prévus par cette disposition s'appliquent de la même manière aux accords et pratiques concertées, ainsi qu'aux décisions d'associations d'entreprises. Il s'ensuit que le plafond de 10 % du chiffre d'affaires doit être calculé par rapport au chiffre d'affaires réalisé par chacune des entreprises parties auxdits accords et pratiques concertées ou par l'ensemble des entreprises membres desdites associations d'entreprises, à tout le moins lorsque, en vertu de ses règles internes, l'association peut engager ses membres. Le bien-fondé de cette analyse est corroboré par le fait que l'influence qu'a pu exercer sur le marché une association d'entreprises ne dépend pas de son propre «chiffre d'affaires», qui ne révèle ni sa taille ni sa puissance économique, mais bien du chiffre d'affaires de ses membres qui constitue une indication de sa taille et de sa puissance économique (arrêts du Tribunal du 23 février 1994, CB et Europay/Commission, T-39/92 et T-40/92, Rec. p. II-49, points 136 et 137, et du 21 février 1995, SPO e.a./Commission, T-29/92, Rec. p. II-289, point 385).

271.
    En l'espèce, bien que la requérante ait été qualifiée d'«entreprise» (point 173, premier alinéa, des considérants de la décision), l'amende qui lui a été infligée n'a pas été fixée sur la base du chiffre d'affaires figurant dans ses rapports annuels et comptes publiés, lequel correspond au montant des commissions perçues par la requérante sur les ventes de carton effectuées pour le compte de ses sociétés membres. En effet, le chiffre d'affaires retenu pour le calcul de l'amende est constitué par la valeur facturée totale des ventes que la requérante a réalisées pour ses membres (voir point 173, troisième alinéa, et point 174, premier alinéa, des considérants).

272.
    Pour apprécier si la Commission était en droit de tenir compte d'un tel chiffre d'affaires, il convient de prendre en considération les principaux renseignements, tels qu'ils ressortent du dossier et, notamment, de la réponse de la requérante aux questions écrites du Tribunal, relatifs aux modalités de fonctionnement de la requérante et aux relations juridiques et factuelles qu'elle entretenait avec ses sociétés membres.

273.
    Selon ses statuts du 1er janvier 1987, la requérante est une association qui commercialise le carton produit par certains de ses membres, ainsi que des produits du secteur papetier produits par d'autres membres.

274.
    Selon les paragraphes 10 et 11 desdits statuts, chacun des membres nomme un représentant au sein du «Board of Directors», chargé notamment d'adopter les règles de conduite des opérations de l'association, de confirmer le budget, le plan de financement et les principes de la répartition des dépenses entre les sociétés membres et de nommer le «Managing Director».

275.
    Le paragraphe 20 des statuts précise:

«Les membres sont conjointement et solidairement responsables des engagements pris au nom de l'association comme s'ils les avaient contractés à titre personnel.

L'obligation aux dettes et aux engagements est répartie au prorata des facturations nettes des membres pour l'exercice en cours et les deux exercices précédents.»

276.
    S'agissant de la vente des produits de carton, il ressort de la réponse de la requérante aux questions écrites du Tribunal que ses sociétés membres lui avaient, à l'époque des faits, donné mandat pour effectuer l'ensemble de leurs ventes de carton, à l'unique exception des ventes internes au groupe de chaque société membre et des ventes de faibles volumes à des clients occasionnels en Finlande (voir également paragraphe 14 des statuts). De plus, la requérante fixait et annonçait des tarifs identiques pour ses membres producteurs de carton.

277.
    La requérante explique également que, lors des ventes individuelles, les clients passaient leurs ordres auprès d'elle en indiquant généralement l'usine préférée, de telles préférences s'expliquant, notamment, par des différences de qualité entre les

produits de chacune des sociétés membres de la requérante. Dans l'hypothèse où aucune préférence n'était exprimée, les ordres étaient répartis entre ses membres, conformément au paragraphe 15 de ses statuts, aux termes duquel:

«Les entrées de commandes doivent être réparties de manière juste et égale aux fins de la production par les membres, compte tenu de la capacité de production de chacun d'eux ainsi que des principes de répartition fixés par le conseil d'administration.»

278.
    La requérante était autorisée à négocier les conditions de vente, y compris le prix, avec chaque client potentiel, ses société membres ayant établi des lignes directrices générales relatives à ces négociations individuelles. Chaque commande devait toutefois être soumise à la société membre concernée qui décidait de l'accepter ou non.

279.
    Le déroulement des ventes individuelles et les principes comptables appliqués pour lesdites ventes sont décrits dans une déclaration du 4 juin 1997 de l'expert-comptable de la requérante:

«Finnboard agit en tant que commissionnaire pour ses commettants, en facturant 'en son nom propre pour le compte de chaque commettant‘.

1.    Chaque commande est confirmée par l'usine du commettant.

2.    Au moment de l'expédition, l'usine envoie une facture initiale à Finnboard ('Mill invoice‘). La facture est inscrite dans le compte commettants en tant que créance et dans le registre des achats de Finnboard en tant que dette envers l'usine.

3.    La facture émise par l'usine (déduction faite des coûts estimés de transport, de stockage, de livraison et de financement) est prépayée par Finnboard dans le délai convenu (10 jours en 1990/1991). Finnboard finance ainsi les stocks étrangers et les créances clients de l'usine sans devenir propriétaire des marchandises expédiées.

4.    Lors de la livraison au client, Finnboard émet une facture client pour le compte de l'usine. La facture est enregistrée en tant que vente dans le compte commettants, et en tant que créance dans le registre des ventes de Finnboard.

5.    Les paiements effectués par les clients sont inscrits dans les comptes commettants, et les écarts éventuels entre les prix et les coûts estimés et les prix et les coûts réels (voir point 3) sont soldés par le compte commettants.»

280.
    Il apparaît ainsi en premier lieu que, bien que la requérante ait été tenue de présenter chaque ordre individuel à la société membre concernée afin d'obtenir son approbation définitive, les contrats de vente conclus par elle pour le compte de ses sociétés membres étaient susceptibles de les lier, lesdites sociétés devant couvrir, conformément au paragraphe 20 des statuts de la requérante, les obligations assumées par celle-ci.

281.
    En second lieu, le Tribunal constate que les commissions perçues par la requérante, qui figurent en tant que chiffre d'affaires dans ses rapports annuels, ne couvrent que les frais liés aux ventes qu'elle a effectuées pour le compte de ses sociétés membres, tels que les frais de transport ou de financement. Il s'ensuit que la requérante n'a eu aucun intérêt économique propre à prendre part à la collusion sur les prix, car les augmentations de prix annoncées et mises en oeuvre par les entreprises réunies au sein des organes du GEP Carton n'ont pu engendrer aucun profit pour elle. En revanche, la participation de la requérante à cette collusion revêtait un intérêt économique direct pour ses sociétés membres produisant du carton.

282.
    En conséquence, le chiffre d'affaires comptable de la requérante ne révèle ni sa taille ni sa puissance économique sur le marché. Il ne saurait, par conséquent, constituer la base de calcul de la limite supérieure d'une amende dépassant un million d'écus, prévue par l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17. Dans ces conditions, la Commission a pu se fonder à bon droit, pour établir cette limite supérieure, sur la valeur totale des ventes de carton facturées aux clients, que la requérante a effectuées en son nom et pour le compte de ses sociétés membres. En effet, la valeur de ces ventes constituait une indication de la véritable taille et de la puissance économique de la requérante (voir, par analogie, arrêt CB et Europay/Commission, précité, points 136 et 137).

283.
    Dans les circonstances particulières de l'espèce, ce raisonnement ne saurait être infirmé par le simple fait que la Commission a formellement qualifié la requérante d'entreprise et non pas d'association d'entreprises.

284.
    La première branche du moyen doit donc être rejetée.

285.
    S'agissant de la seconde branche, il suffit de constater que la Commission a expliqué, dans sa lettre du 6 octobre 1995, que cette indication contenue dans son mémoire en défense constituait une erreur. Elle s'est, en effet, fondée sur une commercialisation par la requérante de 221 000 tonnes de carton au cours de l'année 1990, donnée qui correspond au chiffre fourni par la requérante elle-même dans une lettre du 27 septembre 1991. Cette explication est confirmée par une lettre de la Commission du 28 mars 1994 adressée à la requérante, dans laquelle est exposé le mode de calcul du chiffre d'affaires retenu aux fins de la détermination du montant de l'amende. Le montant du chiffre d'affaires ainsi calculé se retrouve dans un tableau relatif à la détermination du montant des

amendes individuelles, que la Commission a fourni en réponse à une question écrite du Tribunal.

286.
    Par conséquent, la seconde branche du moyen ne saurait être accueillie.

287.
    Au vu des considérations qui précèdent, le moyen dans son ensemble doit être rejeté.

Sur les moyens de forme et de fond relatifs à la détermination du montant des amendes

Arguments des parties

288.
    La requérante souligne que la décision contient la liste des critères retenus par la Commission aux fins du calcul des amendes (points 168 et 169 des considérants). Toutefois, selon elle, la manière dont ces critères ont été concrètement appliqués aurait dû être exposée.

289.
    Plus particulièrement, la Commission aurait dû indiquer le chiffre d'affaires de chaque entreprise ainsi que le pourcentage de ce chiffre utilisé pour le calcul de l'amende. A défaut de telles indications, le juge communautaire ne pourrait pas exercer son contrôle sur les amendes infligées, et il serait impossible de contrôler si l'amende infligée à une entreprise spécifique est proportionnelle aux amendes infligées aux autres entreprises destinataires de la décision.

290.
    En l'absence de telles indications, il devrait être conclu que ces critères n'ont, en réalité, pas été appliqués.

291.
    A supposer même que ces critères aient été effectivement appliqués, il s'agirait de critères illégaux. En effet, plusieurs de ces critères auraient déjà été pris en considération, dans la mesure où les amendes ont été calculées à partir du chiffre d'affaires de chaque entreprise. Cela s'appliquerait pour les critères concernant le territoire sur lequel l'infraction aurait été commise, l'importance relative de chaque entreprise dans le secteur et la valeur globale du secteur économique en cause. Ces critères ne pourraient, dès lors, être de nouveau utilisés afin d'élever le montant de l'amende.

292.
    La Commission n'aurait pas dû non plus se fonder sur le fait que les entreprises avaient pris des mesures afin de cacher l'entente. Les accords de fixation des prix et des parts du marché étant des accords classiques couverts par l'article 85 du traité, il serait normal que les entreprises ne révèlent pas leur participation à de tels accords.

293.
    La requérante soutient que, contrairement à ce qu'allègue la Commission, rien ne permet d'établir que l'entente a été couronnée de succès. Le rapport LE

démontrerait, au contraire, que l'éventuelle entente n'a eu aucun effet sur les prix. D'ailleurs, la Commission se serait fondée à tort sur la constatation selon laquelle les entreprises auraient réalisé une marge bénéficiaire moyenne de 20 % pendant la durée de l'entente (point 16 des considérants de la décision).

294.
    La Commission aurait dû prendre en considération le fait que l'entente n'avait pas couvert certaines régions de la Communauté, dans lesquelles la requérante aurait réalisé une partie importante de son chiffre d'affaires, à savoir l'Espagne, le Portugal, la Grèce, l'Irlande et le Danemark.

295.
    Enfin, la réduction inhabituelle de l'amende accordée à Stora susciterait des doutes quant à la question de savoir si le niveau général des amendes est justifié. L'entente alléguée n'aurait pas revêtu un caractère particulièrement grave, et le niveau général des amendes aurait donc dû être fixé à un montant bien en deçà de 5 % du chiffre d'affaires de chaque entreprise.

296.
    La Commission estime que les critères figurant aux points 168 et 169 des considérants de la décision sont pertinents et suffisants afin de déterminer le montant des amendes. Ces critères devraient être appréciés à la lumière des motifs de la décision, lesquels détailleraient les considérations individuelles prises en compte lors de la détermination du montant de l'amende infligée à la requérante.

297.
    Afin de renforcer l'effet dissuasif des amendes, la Commission serait autorisée à élever, à tout moment, le niveau des amendes (voir arrêt ICI/Commission, précité, point 385). En effet, les infractions constatées en l'espèce seraient expressément mentionnées à l'article 85, paragraphe 1, du traité, et elles devraient donc être considérées comme des infractions patentes et graves. Le caractère patent et grave des infractions commises serait, par ailleurs, renforcé par les mesures de dissimulation adoptées par les destinataires de la décision.

298.
    Enfin, la Commission affirme avoir correctement tenu compte du fait que l'entente a été largement couronnée de succès. En effet, le rapport LE mettrait en évidence, pour les années 1988 et 1989, l'existence d'une relation linéaire entre les augmentations de prix annoncées et les augmentations de prix pratiquées à l'égard des clients. Cette relation aurait même été reconnue par l'auteur du rapport lors de l'audition devant la Commission (procès-verbal de l'audition devant la Commission, p. 21 et 28).

Appréciation du Tribunal

299.
    Les arguments de la requérante sont présentés, dans ses écritures, dans le cadre d'un seul moyen tiré du caractère non pertinent des critères relatifs à la détermination du montant des amendes. Toutefois, ils comprennent en réalité plusieurs moyens distincts, qui seront examinés successivement.

— Sur la motivation relative au montant des amendes

300.
    Il ressort d'une jurisprudence constante que l'obligation de motiver une décision individuelle a pour but de permettre au juge communautaire d'exercer son contrôle sur la légalité de la décision et de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est éventuellement entachée d'un vice permettant d'en contester la validité, étant précisé que la portée de cette obligation dépend de la nature de l'acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté (voir, notamment, arrêt Van Megen Sports/Commission, précité, point 51).

301.
    Pour ce qui est d'une décision infligeant, comme en l'espèce, des amendes à plusieurs entreprises pour une infraction aux règles communautaires de la concurrence, la portée de l'obligation de motivation doit être notamment déterminée à la lumière du fait que la gravité des infractions doit être établie en fonction d'un grand nombre d'éléments tels que, notamment, les circonstances particulières de l'affaire, son contexte et la portée dissuasive des amendes, et ce sans qu'ait été établie une liste contraignante ou exhaustive de critères devant obligatoirement être pris en compte (ordonnance de la Cour du 25 mars 1996, SPO e.a./Commission, C-137/95 P, Rec. p. I-1611, point 54).

302.
    De plus, lors de la fixation du montant de chaque amende, la Commission dispose d'un pouvoir d'appréciation, et elle ne saurait être considérée comme tenue d'appliquer, à cet effet, une formule mathématique précise (voir, dans le même sens, arrêt du Tribunal du 6 avril 1995, Martinelli/Commission, T-150/89, Rec. p. II-1165, point 59).

303.
    Dans la décision, les critères pris en compte pour déterminer le niveau général des amendes et le montant des amendes individuelles figurent, respectivement, aux points 168 et 169 des considérants. En outre, pour ce qui est des amendes individuelles, la Commission explique au point 170 des considérants que les entreprises ayant participé aux réunions du PWG ont, en principe, été considérées comme des «chefs de file» de l'entente, alors que les autres entreprises ont été considérées comme des «membres ordinaires» de celle-ci. Enfin, aux points 171 et 172 des considérants, elle indique que les montants des amendes infligées à Rena et à Stora doivent être considérablement réduits pour tenir compte de leur coopération active avec la Commission et que huit autres entreprises, dont la requérante, peuvent également bénéficier d'une réduction dans une proportion moindre, du fait qu'elles n'ont pas, dans leurs réponses à la communication des griefs, nié les principales allégations de fait sur lesquelles la Commission fondait ses griefs.

304.
    Dans ses écritures devant le Tribunal ainsi que dans sa réponse à une question écrite de celui-ci, la Commission a expliqué que les amendes ont été calculées sur la base du chiffre d'affaires réalisé par chacune des entreprises destinataires de la

décision sur le marché communautaire du carton en 1990. Des amendes d'un niveau de base de 9 ou de 7,5 % de ce chiffre d'affaires individuel ont ainsi été infligées, respectivement, aux entreprises considérées comme les «chefs de file» de l'entente et aux autres entreprises. Enfin, la Commission a tenu compte de l'éventuelle attitude coopérative de certaines entreprises au cours de la procédure devant elle. Deux entreprises ont bénéficié à ce titre d'une réduction des deux tiers du montant de leurs amendes, tandis que d'autres entreprises ont bénéficié d'une réduction d'un tiers.

305.
    Il ressort, par ailleurs, d'un tableau fourni par la Commission et contenant des indications quant à la fixation du montant de chacune des amendes individuelles que, si celles-ci n'ont pas été déterminées en appliquant de manière strictement mathématique les seules données chiffrées susmentionnées, lesdites données ont cependant été systématiquement prises en compte aux fins du calcul des amendes.

306.
    Or, la décision ne précise pas que les amendes ont été calculées sur la base du chiffre d'affaires réalisé par chacune des entreprises sur le marché communautaire du carton en 1990. De plus, les taux de base appliqués de 9 et de 7,5 % pour calculer les amendes infligées, respectivement, aux entreprises considérées comme des «chefs de file» et à celles considérées comme des «membres ordinaires» ne figurent pas dans la décision. N'y figurent pas davantage les taux des réductions accordées à Rena et à Stora, d'une part, et à huit autres entreprises, d'autre part.

307.
    En l'espèce, il y a lieu de considérer, en premier lieu, que, interprétés à la lumière de l'exposé détaillé, dans la décision, des allégations factuelles formulées à l'égard de chaque destinataire de la décision, les points 169 à 172 des considérants de celle-ci contiennent une indication suffisante et pertinente des éléments d'appréciation pris en considération pour déterminer la gravité et la durée de l'infraction commise par chacune des entreprises en cause (voir, dans le même sens, arrêt du Tribunal du 24 octobre 1991, Petrofina/Commission, T-2/89, Rec. p. II-1087, point 264). De même, le point 168 des considérants, qui doit être lu à la lumière des considérations générales sur les amendes figurant au point 167 des considérants, contient une indication suffisante des éléments d'appréciation pris en considération pour déterminer le niveau général des amendes.

308.
    En second lieu, lorsque le montant de chaque amende est, comme en l'espèce, déterminé sur la base de la prise en compte systématique de certaines données précises, l'indication, dans la décision, de chacun de ces facteurs permettrait aux entreprises de mieux apprécier, d'une part, si la Commission a commis des erreurs lors de la fixation du montant de l'amende individuelle et, d'autre part, si le montant de chaque amende individuelle est justifié par rapport aux critères généraux appliqués. En l'espèce, l'indication dans la décision des facteurs en cause, soit le chiffre d'affaires de référence, l'année de référence, les taux de base retenus et les taux de réduction du montant des amendes, n'aurait comporté aucune divulgation implicite du chiffre d'affaires précis des entreprises destinataires de la décision, divulgation qui aurait pu constituer une violation de l'article 214 du traité.

En effet, le montant final de chaque amende individuelle ne résulte pas, comme la Commission l'a elle-même souligné, d'une application strictement mathématique desdits facteurs.

309.
    La Commission a d'ailleurs reconnu, lors de l'audience, que rien ne l'aurait empêchée d'indiquer, dans la décision, les facteurs qui avaient été pris systématiquement en compte et qui avaient été divulgués pendant une conférence de presse tenue le jour même de l'adoption de cette décision. A cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation d'une décision doit figurer dans le corps même de celle-ci et que des explications postérieures fournies par la Commission ne sauraient, sauf circonstances particulières, être prises en compte (voir arrêt du Tribunal du 2 juillet 1992, Dansk Pelsdyravlerforening/Commission, T-61/89, Rec. p. II-1931, point 131, et, dans le même sens, arrêt du Tribunal du 12 décembre 1991, Hilti/Commission, T-30/89, Rec. p. II-1439, point 136).

310.
    Malgré ces constatations, il doit être relevé que la motivation relative à la fixation du montant des amendes contenue aux points 167 à 172 des considérants de la décision est, au moins, aussi détaillée que celles contenues dans les décisionsantérieures de la Commission portant sur des infractions similaires. Or, bien que le moyen tiré d'un vice de motivation soit d'ordre public, aucune critique n'avait, au moment de l'adoption de la décision, été soulevée par le juge communautaire quant à la pratique suivie par la Commission en matière de motivation des amendes infligées. Ce n'est que dans l'arrêt du 6 avril 1995, Tréfilunion/Commission, précité (point 142), et dans deux autres arrêts rendus le même jour, Société métallurgique de Normandie/Commission (T-147/89, Rec. p. II-1057, publication sommaire) et Société des treillis et panneaux soudés/Commission (T-151/89, Rec. p. II-1191, publication sommaire), que le Tribunal a, pour la première fois, souligné qu'il est souhaitable que les entreprises puissent connaître en détail le mode de calcul de l'amende qui leur est infligée, sans être obligées, pour ce faire, d'introduire un recours juridictionnel contre la décision de la Commission.

311.
    Il s'ensuit que lorsqu'elle constate, dans une décision, une infraction aux règles de la concurrence et inflige des amendes aux entreprises ayant participé à celle-ci la Commission doit, si elle a systématiquement pris en compte certains éléments de base pour fixer le montant des amendes, indiquer ces éléments dans le corps de la décision afin de permettre aux destinataires de celle-ci de vérifier le bien-fondé du niveau de l'amende et d'apprécier l'existence d'une éventuelle discrimination.

312.
    Dans les circonstances particulières relevées au point 310 ci-dessus, et compte tenu du fait que la Commission s'est montrée disposée à fournir, lors de la procédure contentieuse, tout renseignement pertinent relatif au mode de calcul des amendes, l'absence de motivation spécifique dans la décision sur le mode de calcul des amendes ne doit pas, en l'espèce, être considérée comme constitutive d'une

violation de l'obligation de motivation justifiant l'annulation totale ou partielle des amendes infligées.

— Sur les effets de l'infraction

313.
    Selon le point 168, septième tiret, des considérants de la décision, la Commission a déterminé le montant général des amendes en prenant notamment en considération le fait que l'entente a «largement réussi à atteindre ses objectifs». Il est constant qu'une telle considération se réfère aux effets sur le marché de l'infraction constatée à l'article 1er de la décision.

314.
    Aux fins du contrôle de l'appréciation portée par la Commission sur les effets de l'infraction, le Tribunal estime qu'il suffit d'examiner celle portée sur les effets de la collusion sur les prix. En effet, l'examen des effets de la collusion sur les prix, seuls effets contestés par la requérante, permet d'apprécier, de façon générale, le succès de l'entente, car les collusions sur les temps d'arrêt et sur les parts de marché ont eu pour objectif d'assurer la réussite des initiatives concertées en matière de prix.

315.
    S'agissant de la collusion sur les prix, la Commission en a apprécié les effets généraux. Dès lors, à supposer même que les données individuelles fournies par la requérante démontrent, comme elle l'affirme, que la collusion sur les prix n'a eu pour elle que des effets moins importants que ceux constatés sur le marché européen du carton, pris globalement, de telles données individuelles ne sauraient suffire en soi pour mettre en cause l'appréciation de la Commission. En outre, l'affirmation de la requérante selon laquelle la Commission se serait fondée, au point 16 des considérants de la décision, sur une définition erronée de la marge d'exploitation moyenne réalisée par les producteurs de carton est également dénuée de pertinence. En effet, rien ne permet de considérer que la Commission ait pris en compte la marge d'exploitation ainsi définie lors de son appréciation des effets sur le marché de la collusion sur les prix, ni d'ailleurs que la marge d'exploitation réalisée aurait dû être prise en compte aux fins de cette appréciation.

316.
    Il ressort de la décision, ainsi que la Commission l'a confirmé lors de l'audience, qu'une distinction a été établie entre trois types d'effets. De plus, la Commission s'est fondée sur le fait que les initiatives en matière de prix ont été globalement considérées comme une réussite par les producteurs eux-mêmes.

317.
    Le premier type d'effets pris en compte par la Commission, et non contesté par la requérante, consiste dans le fait que les augmentations de prix convenues ont été effectivement annoncées aux clients. Les nouveaux prix ont ainsi servi de référence en cas de négociations individuelles des prix de transaction avec les clients (voir, notamment, points 100 et 101, cinquième et sixième alinéas, des considérants de la décision).

318.
    Le deuxième type d'effets consiste dans le fait que l'évolution des prix de transaction a suivi celle des prix annoncés. A cet égard, la Commission soutient que «les producteurs ne se contentaient pas d'annoncer les augmentations de prix convenues mais, à quelques exceptions près, [qu']ils prenaient également des mesures concrètes pour faire en sorte qu'elles soient effectivement imposées aux clients» (point 101, premier alinéa, des considérants de la décision). Elle admet que les clients ont parfois obtenu des concessions sur la date d'entrée en vigueur des augmentations ou des rabais ou réductions individuelles, notamment en cas de grosse commande, et que «l'augmentation nette perçue en moyenne après déduction des réductions, rabais et autres concessions était donc toujours inférieure au montant total de l'augmentation annoncée» (point 102, dernier alinéa, des considérants). Cependant, se référant à des graphiques contenus dans le rapport LE, étude économique réalisée, aux fins de la procédure devant la Commission, pour le compte de plusieurs entreprises destinataires de la décision, elle affirme qu'il existait, au cours de la période visée par la décision, une «étroite relation linéaire» entre l'évolution des prix annoncés et celle des prix de transaction exprimés en monnaies nationales ou convertis en écus. Elle en conclut: «Les augmentations nettes des prix obtenues suivaient étroitement les augmentations annoncées, fût-ce avec un certain retard. L'auteur du rapport a lui-même reconnu pendant l'audition qu'il en a été ainsi en 1988 et 1989.» (Point 115, deuxième alinéa, des considérants.)

319.
    Il doit être admis que, dans l'appréciation de ce deuxième type d'effets, la Commission a pu à bon droit considérer que l'existence d'une relation linéaire entre l'évolution des prix annoncés et celle des prix de transaction constituait la preuve d'un effet produit sur ces derniers par les initiatives en matière de prix, conformément à l'objectif poursuivi par les producteurs. En fait, il est constant que, sur le marché en cause, la pratique de négociations individuelles avec les clients implique que les prix de transaction ne sont, en général, pas identiques aux prix annoncés. Il ne saurait donc être escompté que les augmentations des prix de transaction soient identiques aux augmentations de prix annoncées.

320.
    En ce qui concerne l'existence même d'une corrélation entre les augmentations de prix annoncées et celles des prix de transaction, la Commission s'est référée à juste titre au rapport LE, celui-ci constituant une analyse de l'évolution des prix du carton pendant la période visée par la décision, fondée sur des données fournies par plusieurs producteurs, dont la requérante elle-même.

321.
    Toutefois, ce rapport ne confirme que partiellement, dans le temps, l'existence d'une «étroite relation linéaire». En effet, l'examen de la période de 1987 à 1991 révèle trois sous-périodes distinctes. A cet égard, lors de l'audition devant la Commission, l'auteur du rapport LE a résumé ses conclusions de la manière suivante: «Il n'y a pas de corrélation étroite, même avec un décalage, entre l'augmentation de prix annoncée et les prix du marché, pendant le début de la période considérée, de 1987 à 1988. En revanche, une telle corrélation existe en

1988/1989, puis cette corrélation se détériore pour se comporter de façon plutôt singulière [oddly] sur la période 1990/1991.» (Procès-verbal de l'audition, p. 28.) Il a relevé, en outre, que ces variations dans le temps étaient étroitement liées à des variations de la demande (voir, notamment, procès-verbal de l'audition, p. 20).

322.
    Ces conclusions orales de l'auteur sont conformes à l'analyse développée dans son rapport, et notamment aux graphiques comparant l'évolution des prix annoncés et l'évolution des prix de transaction (rapport LE, graphiques 10 et 11, p. 29). Force est donc de constater que la Commission n'a que partiellement prouvé l'existence de l'«étroite relation linéaire» qu'elle invoque.

323.
    Lors de l'audience, la Commission a indiqué avoir également pris en compte un troisième type d'effets de la collusion sur les prix consistant dans le fait que le niveau des prix de transaction a été supérieur au niveau qui aurait été atteint en l'absence de toute collusion. A cet égard, la Commission, soulignant que les dates et l'ordre des annonces des augmentations de prix avaient été programmés par le PWG, estime dans la décision qu'«il est inconcevable que, dans ces conditions, ces annonces concertées n'aient eu aucun effet sur le niveau réel des prix» (point 136, troisième alinéa, des considérants de la décision). Toutefois, le rapport LE (section 3) a établi un modèle permettant de prévoir le niveau de prix résultant des conditions objectives du marché. Selon ce rapport, le niveau des prix, tels que déterminés par des facteurs économiques objectifs durant la période de 1975 à 1991, aurait évolué, avec des variations négligeables, de manière identique à celui des prix de transaction pratiqués, y compris pendant la période retenue par la décision.

324.
    Malgré ces conclusions, l'analyse faite dans le rapport ne permet pas de constater que les initiatives concertées en matière de prix n'ont pas permis aux producteurs d'atteindre un niveau des prix de transaction supérieur à celui qui aurait résulté du libre jeu de la concurrence. A cet égard, comme l'a souligné la Commission lors de l'audience, il est possible que les facteurs pris en compte dans ladite analyse aient été influencés par l'existence de la collusion. Ainsi, la Commission a fait valoir à bon droit que le comportement collusoire a, par exemple, pu limiter l'incitation pour les entreprises à réduire leurs coûts. Or, elle n'a invoqué l'existence d'aucune erreur directe dans l'analyse contenue dans le rapport LE et n'a pas davantage présenté ses propres analyses économiques de l'hypothétique évolution des prix de transaction en l'absence de toute concertation. Dans ces conditions, son affirmation selon laquelle le niveau des prix de transaction aurait été inférieur en l'absence de collusion entre les producteurs ne saurait être entérinée.

325.
    Il s'ensuit que l'existence de ce troisième type d'effets de la collusion sur les prix n'est pas prouvée.

326.
    Les constatations qui précèdent ne sont en rien modifiées par l'appréciation subjective des producteurs sur laquelle la Commission s'est fondée pour considérer que l'entente avait largement réussi à atteindre ses objectifs. Sur ce point, la

Commission s'est reportée à une liste de documents qu'elle a fournie lors de l'audience. Or, à supposer même qu'elle ait pu fonder son appréciation de l'éventuelle réussite des initiatives en matière de prix sur des documents faisant état des sentiments subjectifs de certains producteurs, force est de constater que plusieurs entreprises, dont la requérante, ont à juste titre fait référence à l'audience à de nombreux autres documents du dossier faisant état des problèmes rencontrés par les producteurs dans la mise en oeuvre des augmentations de prix convenues. Dans ces conditions, la référence faite par la Commission aux déclarations des producteurs eux-mêmes n'est pas suffisante pour conclure que l'entente a largement réussi à atteindre ses objectifs.

327.
    Au vu des considérations qui précèdent, les effets de l'infraction relevés par la Commission ne sont que partiellement prouvés. Le Tribunal analysera la portée de cette conclusion dans le cadre de sa compétence de pleine juridiction en matière d'amendes, lors de l'appréciation du niveau général des amendes retenu en l'espèce (voir ci-après point 342).

— Sur la prétendue illégalité de certains critères pris en compte pour déterminer le montant des amendes

328.
    En premier lieu, il y a lieu de rejeter l'argumentation de la requérante selon laquelle le fait que le montant des amendes a été déterminé à partir du chiffre d'affaires de chaque entreprise signifie que la Commission n'était pas autorisée à tenir compte du territoire sur lequel l'infraction avait été commise (point 168, deuxième tiret, des considérants de la décision), de la valeur globale du secteur économique en cause (point 168, troisième tiret, des considérants) et de l'importance relative de chaque entreprise dans le secteur (point 169, premier alinéa, troisième tiret, des considérants).

329.
    En effet, ces critères sont pertinents pour apprécier la gravité de l'infraction constatée et, par conséquent, pour déterminer, conformément à l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, le montant des amendes. Si le montant des amendes a, certes, été déterminé à partir du chiffre d'affaires réalisé par chaque entreprise, la prise en compte des critères en cause a permis à la Commission de déterminer la partie du chiffre d'affaires dont il conviendrait de tenir compte à l'égard de chacune des entreprises concernées ainsi que le taux de ce chiffre devant être appliqué afin de déterminer le montant des amendes individuelles.

330.
    S'agissant, en second lieu, de l'argument de la requérante selon lequel la Commission aurait dû tenir compte du fait que l'entente n'a pas couvert certains États membres dans lesquels elle a réalisé une partie importante de son chiffre d'affaires (Espagne, Portugal, Grèce, Irlande et Danemark), il ressort de l'article 1er de la décision que les augmentations de prix simultanées et uniformes ont été planifiées et mises en oeuvre dans l'ensemble de la Communauté européenne. En outre, la requérante ne soulève aucun argument de nature à permettre de

déterminer la base sur laquelle elle conteste, apparemment, cette constatation. L'argument de la requérante doit, dans ces conditions, être rejeté.

331.
    Enfin, en troisième lieu, il convient de rejeter l'argumentation de la requérante selon laquelle la Commission n'aurait pas dû tenir compte des mesures adoptées pour cacher l'infraction.

332.
    Il y a lieu de rappeler à cet égard que, aux termes du point 167, troisième alinéa, des considérants de la décision, «l'un des aspects les plus graves de [l'infraction] est que, pour tenter de dissimuler l'existence de l'entente, les entreprises ont été jusqu'à orchestrer à l'avance la date et la séquence des différentes annonces de nouvelles augmentations de prix par chacun des principaux fabricants». La décision relève en outre que «les fabricants auraient pu, grâce à cette duperie élaborée, attribuer les séries d'augmentations des prix uniformes, régulières et touchant l'ensemble du secteur au phénomène du 'comportement en situation oligopolistique‘» (point 73, troisième alinéa, des considérants). Enfin, selon le point 168, sixième tiret, des considérants, la Commission a déterminé le niveau général des amendes en tenant compte du fait que «des mesures complexes ont été prises pour cacher la véritable nature et la portée de la collusion (absence de compte rendu officiel ou de documentation concernant les réunions du PWG et du JMC; les participants étaient dissuadés de prendre des notes; la date et l'ordre des lettres annonçant les augmentations de prix étaient orchestrés de façon à pouvoir proclamer que ces augmentations 'faisaient suite à d'autres‘, etc.)».

333.
    La requérante ne conteste pas que les entreprises ont effectivement programmé les dates et l'ordre d'envoi des lettres annonçant les augmentations de prix afin de tenter de dissimuler l'existence de la concertation sur les prix.

334.
    Quant à l'absence de comptes rendus officiels et à l'absence presque absolue de notes internes portant sur les réunions du PWG et du JMC, elles constituent, eu égard à leur nombre, à leur durée dans le temps et à la nature des discussions en cause, une preuve suffisante de l'allégation de la Commission selon laquelle les participants étaient dissuadés de prendre des notes.

335.
    Il ressort de ce qui précède que les entreprises ayant participé aux réunions de ces organes ont non seulement été conscientes de l'illégalité de leur comportement mais ont aussi adopté des mesures de dissimulation de la collusion. Partant, c'est à bon droit que la Commission a retenu ces mesures comme circonstances aggravantes lors de l'appréciation de la gravité de l'infraction.

— Sur le niveau général des amendes

336.
    Selon l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, la Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises ayant commis, de propos délibéré ou par négligence, une infraction aux dispositions de l'article 85, paragraphe 1, du traité des amendes de 1 000 écus au moins et de 1 000 000 écus au plus, ce dernier

montant pouvant être porté à 10 % du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice précédent par chacune des entreprises ayant participé à l'infraction. Le montant de l'amende est déterminé en considération à la fois de la gravité de l'infraction et de sa durée. Ainsi que cela ressort de la jurisprudence de la Cour, la gravité des infractions doit être établie en fonction d'un grand nombre d'éléments tels que, notamment, les circonstances particulières de l'affaire, son contexte et la portée dissuasive des amendes, et ce sans qu'ait été établie une liste contraignante ou exhaustive de critères devant obligatoirement être pris en compte (ordonnance SPO e.a./Commission, précitée, point 54).

337.
    En l'espèce, la Commission a déterminé le niveau général des amendes en tenant compte de la durée de l'infraction (point 167 des considérants de la décision), ainsi que des considérations suivantes (point 168 des considérants):

«—     la collusion en matière de fixation des prix et la répartition des marchés constituent en soi des restrictions graves de la concurrence,

—     l'entente couvrait quasiment tout le territoire de la Communauté,

—     le marché communautaire du carton est un secteur économique important qui totalise chaque année quelque 2,5 milliards d'écus,

—     les entreprises participant à l'infraction couvrent pratiquement tout le marché,

—     l'entente a fonctionné sous la forme d'un système de réunions périodiques institutionnalisées ayant pour objet de réguler dans le détail le marché du carton dans la Communauté,

—     des mesures complexes ont été prises pour cacher la véritable nature et la portée de la collusion (absence de compte rendu officiel ou de documentation concernant les réunions du PWG et du JMC; les participants étaient dissuadés de prendre des notes; la date et l'ordre des lettres annonçant les augmentations de prix étaient orchestrés de façon à pouvoir proclamer que ces augmentations 'faisaient suite à d'autres‘, etc.),

—     l'entente a largement réussi à atteindre ses objectifs».

338.
    De plus, le Tribunal rappelle qu'il est constant que des amendes d'un niveau de base de 9 ou de 7,5 % du chiffre d'affaires réalisé par chacune des entreprises destinataires de la décision sur le marché communautaire du carton en 1990 ont été infligées, respectivement, aux entreprises considérées comme les «chefs de file» de l'entente et aux autres entreprises.

339.
    Il y a lieu de souligner, en premier lieu, que, dans son appréciation du niveau général des amendes, la Commission est fondée à tenir compte du fait que des infractions patentes aux règles communautaires de la concurrence sont encore relativement fréquentes et que, partant, il lui est loisible d'élever le niveau des amendes en vue de renforcer leur effet dissuasif. Par conséquent, le fait que la Commission a appliqué dans le passé des amendes d'un certain niveau à certains types d'infractions ne saurait la priver de la possibilité d'élever ce niveau, dans les limites indiquées dans le règlement n° 17, si cela s'avère nécessaire pour assurer la mise en oeuvre de la politique communautaire de la concurrence (voir, notamment, arrêts précités Musique Diffusion française e.a./Commission, points 105 à 108, et ICI/Commission, point 385).

340.
    En second lieu, la Commission a soutenu à bon droit que, en raison des circonstances propres à l'espèce, aucune comparaison directe ne saurait être opérée entre le niveau général des amendes retenu dans la présente décision et ceux retenus dans la pratique décisionnelle antérieure de la Commission, en particulier, dans la décision 86/398/CEE de la Commission, du 23 avril 1986, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CEE (IV/31.149 — Polypropylène) (JO L 230, p. 1, ci-après «décision Polypropylène»), considérée par la Commission elle-même comme la plus comparable à celle du cas d'espèce. En effet, contrairement à l'affaire à l'origine de la décision Polypropylène, aucune circonstance atténuante générale n'a été prise en compte en l'espèce pour déterminer le niveau général des amendes. Par ailleurs, comme le Tribunal l'a déjà constaté, les mesures complexes adoptées par les entreprises pour dissimuler l'existence de l'infraction constituent un aspect particulièrement grave de celle-ci, qui la caractérise par rapport aux infractions antérieurement constatées par la Commission.

341.
    En troisième lieu, il convient de souligner la longue durée et le caractère patent de l'infraction à l'article 85, paragraphe 1, du traité qui a été commise malgré l'avertissement qu'aurait dû constituer la pratique décisionnelle antérieure de la Commission, et notamment la décision Polypropylène.

342.
    Sur la base de ces éléments, il convient de considérer que les critères repris au point 168 des considérants de la décision justifient le niveau général des amendes fixé par la Commission. Le Tribunal a certes déjà constaté que les effets de la collusion sur les prix retenus par la Commission pour la détermination du niveau général des amendes ne sont que partiellement prouvés. Toutefois, à la lumière des considérations qui précèdent, cette conclusion ne saurait affecter sensiblement l'appréciation de la gravité de l'infraction constatée. A cet égard, le fait que les entreprises ont effectivement annoncé les augmentations de prix convenues et que les prix ainsi annoncés ont servi de base pour la fixation des prix de transaction individuels suffit, en soi, pour constater que la collusion sur les prix a eu tant pour objet que pour effet une grave restriction de la concurrence. Partant, dans le cadre de sa compétence de pleine juridiction, le Tribunal considère que les constatations

opérées au sujet des effets de l'infraction ne justifient aucune réduction du niveau général des amendes fixé par la Commission.

343.
    Au vu de l'ensemble des considérations qui précèdent, les moyens de forme et de fond relatifs à la détermination du montant des amendes doivent être rejetés.

Sur le moyen tiré d'une appréciation erronée du rôle joué par la requérante

Arguments des parties

344.
    La requérante conteste qu'elle ait été l'un des «chefs de file» de l'entente. En effet, à supposer même que le comportement des représentants du NPI soitimputable à la requérante, ces personnes n'auraient participé qu'à environ la moitié des réunions du PWG.

345.
    La requérante aurait constamment subi des pressions de la part des autres producteurs, ce que révéleraient plusieurs annexes à la communication des griefs (voir point 76 des considérants de la décision).

346.
    Enfin, l'origine de l'entente aurait été la volonté des producteurs communautaires de protéger leur marché contre les exportations, notamment, des producteurs des pays de l'AELE. Ce ne serait qu'à la suite d'acquisitions, par ces derniers, d'installations dans la Communauté qu'il se serait agi de maintenir un équilibre entre les principaux groupes de producteurs européens afin de ne pas compromettre les initiatives en matière de prix (point 56 des considérants de la décision). N'ayant acquis aucune installation dans la Communauté, la requérante ne pourrait donc être considérée comme l'un des «chefs de file» de l'entente.

347.
    La Commission estime avoir, à bon droit, considéré la requérante comme l'un des chefs de file de l'entente. Elle souligne en particulier que la requérante a assuré, pendant une période de deux ans, la présidence du PWG, organe central de décision de l'entente, et de la PC. En outre, la requérante aurait pris part à l'ensemble des initiatives d'augmentation des prix et elle aurait même lancé trois de ces initiatives.

348.
    Le compte rendu d'une réunion tenue par Iggesund Board Sales Ltd les 28 et 29 janvier 1988 (annexe 72 à la communication des griefs, citée au point 76 des considérants de la décision) confirmerait le rôle central joué par la requérante, car il en ressortirait que les autres producteurs ont attendu l'initiative de la requérante avant d'appliquer leurs propres augmentations de prix.

349.
    Les remarques de la requérante relatives à l'objectif poursuivi par les participants à l'entente ne feraient que confirmer le caractère anticoncurrentiel de cet objectif.

Appréciation du Tribunal

350.
    Il ressort des constatations relatives aux moyens invoqués par la requérante à l'appui de sa demande d'annulation totale ou partielle de l'article 1er de la décision que la nature des fonctions du PWG, telles que décrites dans la décision, a été établie par la Commission.

351.
    Dans ces conditions, la Commission a pu conclure à bon droit que les entreprises, dont la requérante, ayant participé aux réunions de cet organe devaient être considérées comme des «chefs de file» de l'infraction constatée et qu'elles devaient, de ce fait, porter une responsabilité particulière (voir point 170, premier alinéa, des considérants de la décision).

352.
    S'agissant de la requérante, la participation de ses dirigeants à environ la moitié des réunions du PWG est admise. Dans ces conditions, la requérante ne saurait valablement affirmer avoir joué un rôle moins important dans la détermination de l'entente que les autres entreprises ayant participé auxdites réunions, d'autant que ses représentants ont occupé des positions clefs au sein du PWG pendant presque toute la période couverte par la décision (voir ci-dessus points 125 et suivants).

353.
    L'affirmation de la requérante selon laquelle elle a constamment subi des pressions de la part des autres producteurs n'est pas de nature à affecter cette constatation. D'abord, la requérante n'a pas avancé le moindre élément de preuve permettant d'établir qu'elle a participé à l'infraction sous la contrainte. De plus, la référence faite par la requérante au point 76 des considérants de la décision ne met pas en cause son rôle de «chef de file» de l'entente.

354.
    Le document cité dans ce point (annexe 72 à la communication des griefs) indique:

«Des pressions ont été exercées de toutes parts en Europe sur les Finlandais pour qu'ils augmentent leurs prix. Finnboard a été averti que nous ne bougerons pas tant qu'il n'aura pas publié une augmentation de prix.»

355.
    Ce passage indique uniquement que les autres entreprises attendaient de la requérante l'annonce d'une augmentation de ses prix avant de procéder elles-mêmes à une augmentation de leurs propres prix. Dès lors, il ne fait que confirmer le rôle de «chef de file» de l'entente joué par la requérante, les autres entreprises ayant accordé une importance particulière à sa participation aux augmentations de prix concertées.

356.
    Enfin, l'argument de la requérante tiré de l'objectif poursuivi par l'accord de base entre les principaux producteurs ne saurait non plus être retenu. En effet, s'il est vrai que Stora a expliqué que la préoccupation initiale du PWG était de restreindre l'accroissement des parts de marché des producteurs de l'AELE, il n'en reste pas moins que cette préoccupation s'expliquait par le fait qu'un tel accroissement risquait de faire obstacle aux efforts déployés pour augmenter les prix (voir point

56, deuxième alinéa, des considérants de la décision, avec référence à la déclaration de Stora faisant l'objet de l'annexe 43 à la communication des griefs). La poursuite d'un tel objectif ne fait, en réalité, que confirmer le caractère patent de l'infraction constatée.

357.
    Au vu de ces considérations, le moyen doit être rejeté.

Sur le moyen tiré d'erreurs commises par la Commission lors des réductions des amendes

Arguments des parties

358.
    La requérante soutient qu'elle aurait dû bénéficier d'une réduction du montant de l'amende pour ne pas avoir contesté les principales allégations de fait sur lesquelles la Commission fondait ses griefs à son égard. Dans sa réponse à la communication des griefs, elle se serait limitée à faire valoir des violations de règles de procédure et à souligner que les éléments de fait avancés par la Commission n'étaient pas probants.

359.
    Par ailleurs, la réduction du montant de l'amende accordée à Stora serait injustifiée et aboutirait, en raison du montant élevé des amendes, à des distorsions de concurrence. A défaut des révélations faites par Stora, la Commission n'aurait pas disposé d'éléments suffisants pour prouver une quelconque entente. Des indices montreraient que les révélations de Stora visaient à affaiblir ses principaux concurrents. Pour cette raison, la requérante invite le Tribunal à demander à la Commission si des entretiens ont eu lieu avec Stora relativement au niveau d'amende et/ou aux réductions possibles des amendes.

360.
    La Commission estime que la requérante n'a droit à aucune réduction de l'amende. La requête attesterait clairement qu'elle conteste les principales allégations de fait avancées par la Commission.

361.
    En outre, une éventuelle violation du principe de proportionnalité lors de la fixation du montant de l'amende infligée à Stora n'affecterait en rien la légalité de l'amende imposée à la requérante.

Appréciation du Tribunal

362.
    Dans sa réponse à la communication des griefs, la requérante a contesté, ainsi qu'elle l'a fait devant le Tribunal, toute participation à une infraction quelconque à l'article 85, paragraphe 1, du traité.

363.
    Dès lors, la Commission a estimé à bon droit que, en répondant de la sorte, la requérante ne s'est pas comportée d'une manière justifiant une réduction de l'amende au titre d'une coopération lors de la procédure administrative. En effet,

une réduction à ce titre n'est justifiée que si le comportement a permis à la Commission de constater une infraction avec moins de difficulté et, le cas échéant, d'y mettre fin (voir arrêt ICI/Commission, précité, point 393).

364.
    Pour autant que la requérante soutient que la réduction de l'amende accordée à Stora est excessive, il y a lieu de relever que Stora a fourni à la Commission des déclarations comportant une description très détaillée de la nature et de l'objet de l'infraction, du fonctionnement des divers organes du GEP Carton, et de la participation à l'infraction des différents producteurs. Par ces déclarations, Stora a fourni des renseignements allant bien au-delà de ceux dont la production peut être exigée par la Commission en vertu de l'article 11 du règlement n° 17. Bien que la Commission déclare, dans la décision, qu'elle a obtenu des éléments de preuve corroborant les renseignements contenus dans les déclarations de Stora (points 112 et 113 des considérants), il apparaît clairement que les déclarations de Stora ont constitué le principal élément de preuve de l'existence de l'infraction. Sans ces déclarations, il aurait donc été, à tout le moins, beaucoup plus difficile pour la Commission de constater et, le cas échéant, de mettre fin à l'infraction faisant l'objet de la décision.

365.
    Dans ces conditions, la Commission n'a pas, en réduisant des deux tiers le montant de l'amende infligée à Stora, dépassé la marge d'appréciation dont elle dispose lors de la détermination du montant des amendes. La requérante ne saurait donc valablement prétendre que l'amende qui lui a été infligée est excessive par rapport à celle infligée à Stora.

366.
    Il n'y a donc pas lieu d'inviter la Commission à indiquer si des entretiens ont eu lieu avec Stora relativement au niveau d'amende et/ou aux réductions possibles des amendes.

367.
    Ce moyen doit donc également être rejeté.

368.
    Il ressort de l'ensemble de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler partiellement l'article 2 de la décision. Pour le surplus, le recours doit être rejeté.

Sur les dépens

369.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La partie requérante ayant succombé en l'essentiel de ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions en ce sens de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre élargie)

déclare et arrête:

1)    L'article 2, premier à quatrième alinéa, de la décision 94/601/CE de la Commission, du 13 juillet 1994, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CE (IV/C/33.833 — Carton), est annulé à l'égard de la requérante, sauf en ce qui concerne les passages suivants:

    «Les entreprises mentionnées à l'article 1er mettent fin immédiatement aux infractions précitées, si elles ne l'ont pas déjà fait. Elles s'abstiennent à l'avenir, dans le cadre de leurs activités dans le secteur du carton, de tout accord ou pratique concertée susceptible d'avoir un objet ou un effet identique ou similaire, y compris tout échange d'informations commerciales:

    a)    par lequel les participants seraient informés directement ou indirectement de la production, des ventes, des commandes en carnet, des taux d'utilisation des machines, des prix de vente, des coûts ou des plans de commercialisation d'autres fabricants.

    Tout système d'échange de données générales auquel elles seraient abonnées, tel que le système Fides ou son successeur, sera géré de manière à exclure toutes données permettant d'identifier le comportement de fabricants déterminés.»

2)    Le recours est rejeté pour le surplus.

3)    La requérante est condamnée aux dépens.

Vesterdorf             Briët     Lindh

     Potocki      Cooke

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 mai 1998.

Le greffier

Le président

H. Jung

B. Vesterdorf

Table des matières

     Faits à l'origine du litige

II - 2

     Procédure

II - 6

     Conclusions des parties

II - 8

     Sur la demande d'annulation de la décision

II - 8

         Sur le moyen tiré d'une violation du régime linguistique

II - 8

             Arguments des parties

II - 8

             Appréciation du Tribunal

II - 10

         Sur le moyen tiré d'irrégularités ayant affecté la procédure d'adoption, d'authentification et de notification des décisions de la Commission

II - 11

             Arguments des parties

II - 11

             Appréciation du Tribunal

II - 13

         Sur le moyen tiré d'une violation des droits de la défense et d'une violation des règles de forme relatives à la communication des griefs

II - 14

             Arguments des parties

II - 14

             Appréciation du Tribunal

II - 15

         Sur le moyen tiré d'une violation de l'article 190 du traité

II - 16

             Arguments des parties

II - 16

             Appréciation du Tribunal

II - 18

         Sur le moyen tiré d'une violation de l'article 85, paragraphe 1, du traité en ce que la Commission n'aurait pas démontré la participation de la requérante à une entente quelconque

II - 19

             Sur le moyen pris en sa première branche tirée de l'absence de preuve de la participation de la requérante à une entente quelconque

II - 19

                 — Arguments des parties

II - 19

                 — Appréciation du Tribunal

II - 21

             Sur le moyen pris en sa deuxième branche tirée de l'absence de preuve de la participation de la requérante aux initiatives en matière de prix

II - 23

                 — Arguments des parties

II - 23

                 — Appréciation du Tribunal

II - 25

             Sur le moyen pris en sa troisième branche tirée de l'absence de preuve de la participation de la requérante à la régulation des volumes

II - 30

                 — Arguments des parties

II - 30

                 — Appréciation du Tribunal

II - 31

         Sur le moyen tiré d'une violation de l'article 85, paragraphe 1, du traité, en ce que la Commission n'aurait pas dûment pris en considération les conditions de concurrence et la situation sur le marché

II - 37

             Arguments des parties

II - 37

             Appréciation du Tribunal

II - 39

     Sur la demande d'annulation de l'article 2 de la décision

II - 39

         Arguments des parties

II - 39

         Appréciation du Tribunal

II - 40

     Sur la demande d'annulation de l'amende ou de réduction de son montant

II - 45

         Sur le moyen tiré d'un calcul de l'amende sur la base d'un chiffre d'affaires non pertinent

II - 45

             Arguments des parties

II - 45

             Appréciation du Tribunal

II - 47

         Sur les moyens de forme et de fond relatifs à la détermination du montant des amendes

II - 51

             Arguments des parties

II - 51

             Appréciation du Tribunal

II - 52

             — Sur la motivation relative au montant des amendes

II - 53

             — Sur les effets de l'infraction

II - 56

             — Sur la prétendue illégalité de certains critères pris en compte pour déterminer le montant des amendes

II - 59

             — Sur le niveau général des amendes

II - 60

         Sur le moyen tiré d'une appréciation erronée du rôle joué par la requérante

II - 63

             Arguments des parties

II - 63

             Appréciation du Tribunal

II - 64

         Sur le moyen tiré d'erreurs commises par la Commission lors des réductions des amendes

II - 65

             Arguments des parties

II - 65

             Appréciation du Tribunal

II - 65

     Sur les dépens

II - 66


1: Langue de procédure: l'allemand.