Language of document : ECLI:EU:C:2021:352

ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

29 avril 2021 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non-admission du pourvoi »

Dans l’affaire C‑41/21 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 26 janvier 2021,

Allergan Holdings France, établie à Courbevoie (France), représentée par Me T. de Haan, avocat, et M. J. Day, solicitor,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

Dermavita Co. Ltd, établie à Beirut (Liban), représentée par Me D. Todorov, advokat,

partie intervenante en première instance,

LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, vice‑présidente de la Cour, MM. N. Piçarra et D. Šváby (rapporteur), juges,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la proposition du juge rapporteur et l’avocat général, M. P. Pikamäe, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Allergan Holdings France demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 18 novembre 2020, Allergan Holdings France/EUIPO – Dermavita (JUVEDERM ULTRA) (T‑664/19, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2020:547), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation partielle de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 18 juillet 2019 (affaires jointes R 1655/2018‑4 et R 1723/2018‑4), relative à une procédure de déchéance entre Dermavita Co. et Allergan Holdings France.

 Sur l’admission du pourvoi

2        En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonné à leur admission préalable par la Cour.

3        Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

4        Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.

5        Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, dudit règlement, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.

6        À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la partie requérante fait valoir que son pourvoi soulève des questions importantes pour l’unité, la cohérence et le développement du droit de l’Union, justifiant, selon elle, son admission.

7        De manière générale, la partie requérante allègue que les deux moyens du pourvoi dépassent le cadre de pourvoi en raison de prétendue existence, dans la jurisprudence récente du Tribunal, d’une tendance accrue à violer des règles de procédure et des droits fondamentaux des parties depuis l’entrée en vigueur de l’article 58 bis du statut de la Cour de justice de l’Union européenne.

8        En particulier, la requérante soutient, en premier lieu, que le Tribunal a violé l’article 296 TFUE, les articles 36 et 53, premier alinéa, du statut de la Cour, et l’article 117, sous m), du règlement de procédure du Tribunal en ce qu’il a manqué à son obligation de motivation. À cet égard, la partie requérante fait valoir que le Tribunal n’a pas examiné ses arguments et des éléments de preuve présentés qui démontrent que les produits, pour lesquels sa marque de l’Union européenne JUVEDERM ULTRA a été utilisée, fonctionnent comme un « implant dermique » et qu’il a jugé de manière arbitraire et sans justification, au point 19 de l’arrêt attaqué, que les produits en cause sont des produits de comblement dermique injectables relevant de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié (ci‑après l’« arrangement de Nice»), et ne peuvent constituer, en même temps, un implant relevant de la classe 10 de l’arrangement de Nice.

9        Selon la partie requérante, une telle erreur de droit a eu une incidence directe sur l’issue du recours. En effet, en tenant compte des arguments et éléments de preuve présentés par la partie requérante, le Tribunal aurait conclu que les produits en cause relèvent également de la catégorie des implants dermiques dans la classe 10 de l’arrangement de Nice.

10      En second lieu, la partie requérante reproche au Tribunal d’avoir violé l’article 65 du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque [de l’Union européenne] (JO 2009, L 78, p. 1). En particulier, elle fait valoir qu’en manquant à son obligation de motiver l’arrêt attaqué et en n’ayant pas pris en considération ses arguments et éléments de preuve présentés, le Tribunal a manqué à son obligation de contrôler la légalité de la décision de la chambre de recours de l’EUIPO.

11      Afin d’examiner la demande d’admission du pourvoi présentée par la partie requérante, il convient de relever, à titre liminaire, que c’est à celle‑ci qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 26 novembre 2020, Scorify/EUIPO, C‑418/20 P, non publiée, EU:C:2020:968, point 17 et jurisprudence citée).

12      En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure de la Cour, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut tend à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (ordonnance du 26 novembre 2020, Scorify/EUIPO, C‑418/20 P, non publiée, EU:C:2020:968, point 18 et jurisprudence citée).

13      Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été violée par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C-613/19 P, EU:C:2019:905, point 15 et jurisprudence citée).

14      En effet, une demande d’admission du pourvoi ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent de la présente ordonnance ne saurait être, d’emblée, susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C-613/19 P, EU:C:2019:905, point 16 et jurisprudence citée).

15      En outre, conformément à la charge de la preuve qui pèse sur l’auteur d’une demande d’admission d’un pourvoi, la requérante au pourvoi doit démontrer que, indépendamment des questions de droit qu’elle invoque dans son pourvoi, ce dernier soulève une ou plusieurs questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, la portée de ce critère dépassant le cadre de l’arrêt sous pourvoi et, en définitive, celui de son pourvoi (ordonnance du 19 janvier 2021 Leinfelder Uhren München/EUIPO, C‑401/20 P, non publiée, EU:C:2021:31, point 17 et jurisprudence citée).

16      En l’occurrence, s’agissant des arguments figurant aux points 7 à 10 de la présente ordonnance qui, étant étroitement liés, peuvent être examinés conjointement, la partie requérante reproche au Tribunal, en substance, d’avoir violé son obligation de motivation en ce qu’il n’a examiné aucun de ses arguments étayés par des éléments de preuve concrets et conclu d’une manière arbitraire au point 19 de l’arrêt attaqué que les produits en cause étant des produits de comblement dermique injectables ne peuvent constituer, au même temps, un implant. Dans le même contexte, elle allègue également que le Tribunal a manqué à son obligation de contrôle de légalité de la décision de la chambre de recours de l’EUIPO.

17      Il convient de constater que la partie requérante identifie deux erreurs de droit prétendument commises par le Tribunal, consistant en une violation de l’obligation de motivation et en une violation de l’obligation de contrôle de légalité des décisions de la chambre de recours de l’EUIPO, et fait valoir que ces erreurs s’insèrent dans une tendance accrue de violation des règles de procédure et des droits fondamentaux dans la jurisprudence récente du Tribunal, depuis l’entrée en vigueur du mécanisme d’admission des pourvois. Or, il importe de souligner que, conformément à la charge de la preuve qui pèse sur l’auteur de la demande d’admission d’un pourvoi, une telle argumentation n’est pas, en soi, suffisante pour établir que le présent pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, le demandeur devant respecter, à cette fin, l’ensemble des exigences énoncées aux points 13 et 15 de la présente ordonnance. En outre, une référence par la partie requérante à des erreurs prétendument commises par le Tribunal dans d’autres affaires ne constitue pas une question qui peut être soulevée afin de justifier l’admission d’un pourvoi.

18      À titre surabondant, il convient de relever que, en se référant également aux allégations de l’EUIPO, le Tribunal a expliqué, au point 19 de l’arrêt attaqué, les raisons pour lesquelles il considère qu’un implant relevant de la classe 10 de l’arrangement de Nice est généralement associé à une intervention chirurgicale, élément absent, ainsi que le fait valoir la partie requérante, dans la description des produits en cause. Le Tribunal a précisé au point 19 de l’arrêt attaqué que la seule fonction des produits en cause était de combler les rides de la peau et qu’une telle fonction est propre des produits pharmaceutiques qui relèvent de la classe 5 de l’arrangement de Nice. À cet égard, le Tribunal a souligné que la partie requérante n’avait pas démontré que les produits en cause constituaient au même temps un implant relevant de la classe 10 de l’arrangement de Nice. Ainsi, il n’y a pas lieu de considérer, contrairement à ce que soutient la partie requérante, que le Tribunal est parvenu à ses conclusions sans fournir aucune motivation à cet égard.

19      Dans ces conditions, il convient de conclure que la demande présentée par la partie requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

20      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.

 Sur les dépens

21      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

22      La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié aux autres parties à la procédure et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il convient de décider que la partie requérante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (chambre d’admissions des pourvois) ordonne :

1)      Le pourvoi n’est pas admis.

2)      Allergan Holdings France supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.