Language of document : ECLI:EU:C:2022:369

ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

6 mai 2022 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non‑admission du pourvoi »

Dans l’affaire C‑65/22 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 1er février 2022,

Industria de Diseño Textil SA (Inditex), établie à Arteixo (Espagne), représentée par Mes C. Duch Fonoll et S. Sáenz de Ormijana Rico, abogadas,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

Ffauf Italia SpA, établie à Riese Pio X (Italie),

partie intervenante en première instance,

LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

composée de M. L. Bay Larsen, vice‑président de la Cour, MM. N. Jääskinen et M. Gavalec (rapporteur), juges,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la proposition du juge rapporteur et l’avocate générale, Mme L. Medina, entendue,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Industria de Diseño Textil SA (Inditex) demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 1er décembre 2021, Inditex/EUIPO – Ffauf Italia (ZARA) (T‑467/20, non publié, ci‑après l’« arrêt attaqué », EU:T:2021:842), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation partielle de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 8 mai 2020 (affaire R 2040/2019-4), relative à une procédure d’opposition entre Ffauf Italia SpA et Inditex.

 Sur la demande d’admission du pourvoi

2        En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonné à leur admission préalable par la Cour.

3        Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

4        Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.

5        Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, dudit règlement, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.

6        À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la partie requérante présente des arguments par lesquels elle fait valoir que le moyen unique de son pourvoi tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1) soulève une question importante pour l’unité, la cohérence et le développement du droit de l’Union.

7        En premier lieu, la partie requérante reproche, en substance, au Tribunal d’avoir méconnu, lors de l’appréciation de la comparaison sur le plan conceptuel des signes en cause, l’importance de la renommée exceptionnelle de la marque demandée et le contenu sémantique clair et déterminé du signe ZARA, à savoir la société très bien connue de vente au détail, notamment en considérant au point 143 de l’arrêt attaqué que l’élément verbal « ZARA », présent dans les signes en conflit, pouvait être perçu comme un prénom féminin.

8        En deuxième lieu, la partie requérante fait valoir que le Tribunal a méconnu la jurisprudence de la Cour ainsi que celle du Tribunal issue notamment des arrêts du 12 janvier 2006, Ruiz-Picasso e.a./OHMI, (C‑361/04 P, EU:C:2006:25), du 17 septembre 2020, EUIPO/Messi Cuccittini, (C‑449/18 P et C‑474/18 P, non publié, EU:C:2020:722), ainsi que du 16 juin 2021, Smiley Miley/EUIPO – Cyrus Trademarks (MILEY CYRUS) (T‑368/20, non publié, EU:T:2021:372), dont il ressort, selon elle, que la renommée de l’une des marques concernées peut donner lieu à des différences conceptuelles entre les marques en cause de nature à neutraliser leurs similitudes visuelles et phonétiques et écarter ainsi tout risque de confusion. Plus particulièrement, au point 145 de l’arrêt attaqué, en estimant que le caractère distinctif élevé d’un signe joue un rôle par rapport à la marque antérieure et non par rapport à la marque postérieure, le Tribunal aurait, à tort, enfreint cette jurisprudence.

9        En troisième lieu, la partie requérante allègue que le Tribunal, en omettant de prendre en considération la notoriété du signe ZARA, a manqué à son obligation de motivation et a dénaturé les éléments de preuve relatifs à ladite notoriété, dont une décision du Tribunale di Genova (tribunal de Gênes, Italie) du 19 juin 2019, qui démontrent que le public pertinent attribue une signification particulière au signe ZARA comme étant le nom utilisé pour identifier l’une des entreprises de vente au détail les plus connues au monde. Dès lors, selon la partie requérante, le Tribunal n’a pas analysé correctement la manière dont la signification conceptuelle que le public pertinent attribue au signe ZARA influence la perception du public concerné et l’impact de cette perception sur l’appréciation globale du risque de confusion.

10      En quatrième et dernier lieu, la partie requérante soutient que les erreurs de droit commises par le Tribunal ont abouti à une appréciation erronée de la comparaison conceptuelle entre les marques en cause, qui aurait entraîné la violation du principe de neutralisation et, en définitive, la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 tel qu’interprété par la Cour et le Tribunal.

11      À titre liminaire, il convient de rappeler que c’est à la requérante qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 20 et jurisprudence citée).

12      En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut vise à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par la partie requérante doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (voir, notamment, ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 21 et jurisprudence citée).

13      Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et la même clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été méconnue par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi. Lorsque l’erreur de droit invoquée résulte de la méconnaissance de la jurisprudence, la demande d’admission du pourvoi doit exposer, de façon succincte mais claire et précise, premièrement, où se situe la contradiction alléguée, en identifiant tant les points de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi que la partie requérante met en cause que ceux de la décision de la Cour ou du Tribunal qui auraient été méconnus, et, deuxièmement, les raisons concrètes pour lesquelles une telle contradiction soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 22 et jurisprudence citée).

14      En effet, une demande d’admission du pourvoi ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent de la présente ordonnance ne saurait, d’emblée, être susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C‑613/19 P, EU:C:2019:905, point 16 et jurisprudence citée).

15      En l’occurrence, s’agissant de l’argumentation résumée aux points 7 à 10 de la présente ordonnance, il convient de relever que, si la partie requérante identifie les erreurs de droit prétendument commises par le Tribunal, elle n’a ni expliqué à suffisance de droit et, en tout état de cause, ni démontré par cette argumentation en quoi la prétendue violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 soulèverait une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union qui justifierait l’admission du pourvoi.

16      En effet, conformément à la charge de la preuve qui pèse sur l’auteur d’une demande d’admission d’un pourvoi, la partie requérante au pourvoi doit démontrer que, indépendamment des questions de droit qu’elle invoque dans son pourvoi, ce dernier soulève une ou plusieurs questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, la portée de ce critère dépassant le cadre de l’arrêt sous pourvoi et, en définitive, celui de son pourvoi (voir, en ce sens, ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 27 et jurisprudence citée).

17      Cette démonstration implique elle-même d’établir tant l’existence que l’importance de telles questions, au moyen d’éléments concrets et propres au cas d’espèce, et non pas simplement des arguments d’ordre général (ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 28 et jurisprudence citée).

18      Or, à l’appui de ses arguments, la partie requérante se limite à indiquer, d’une manière générale, que la Cour devrait apporter des éclaircissements sur les contradictions exposées dans l’arrêt attaqué, sans pour autant fournir des éléments concrets, précis et propres au cas d’espèce de nature à démontrer en quoi ces contradictions, à les supposer établies, soulèveraient une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

19      Dans ces conditions, il convient de constater que la demande présentée par la partie requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

20      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.

 Sur les dépens

21      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

22      La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié aux autres parties à la procédure et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il convient de décider que la partie requérante supportera ses propres dépens.


Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :

1)      Le pourvoi n’est pas admis.

2)      Industria de Diseño Textil SA (Inditex) supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.