Language of document : ECLI:EU:T:2023:33

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

1er février 2023 (*) 

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale DUUUVAL – Marque de l’Union européenne figurative antérieure GROUPE DUVAL – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑671/21,

NFL Properties Europe GmbH, établie à Eschborn (Allemagne), représentée par Mes M. Kloth, R. Briske, D. Habel et M. Tillwich, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. I. Harrington, J. Ivanauskas et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Groupe Duval, établie à Boulogne-Billancourt (France),

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé, lors des délibérations, de MM. D. Spielmann, président, R. Mastroianni (rapporteur) et I. Gâlea, juges,

greffier : M. G. Mitrev, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 9 novembre 2022,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, NFL Properties Europe GmbH, demande l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 4 août 2021 (affaire R 243/2021-5) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 16 mai 2019, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal DUUUVAL.

3        La marque demandée désignait les services relevant de la classe 41 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, à la description suivante : « Services éducatifs et de divertissement sous forme de rencontres et de démonstrations de football professionnel ; fourniture d’informations sportives et récréatives par le biais d’un réseau informatique mondial ou d’un service informatique commercial en ligne ou par le biais du câble, de satellites, de la télévision et de la radio ; organisation et conduite de compétitions d’athlétisme, à savoir rencontres et démonstrations de football professionnel ; services de fan club de football ; services de divertissement, à savoir spectacles musicaux et de danse fournis durant les entractes lors d’événements sportifs ; services éducatifs, à savoir programmes d’éducation physique ; montage de programmes radiophoniques et de télévision ; spectacles en direct présentant des rencontres de football, expositions, compétitions et spectacles de musique et de danse ; services d’activités sportives et culturelles, services de divertissement ; publication de textes autres que textes publicitaires ; organisation d’une association professionnelle de sports d’équipe ; exploitation d’une ligue de clubs de football ;programmation de calendriers de matchs pour jeux sportifs ; fourniture d’informations sur le football ».

4        Le 17 septembre 2019, Imfined SARL, dont l’autre partie devant la chambre de recours, Groupe Duval, est l’ayant droit, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les services visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était, notamment, fondée sur la marque de l’Union européenne figurative, déposée le 13 janvier 2017 et enregistrée le 3 août 2017, désignant les services relevant de la classe 41 et correspondant à la description suivante : « Formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; organisation et conduite de colloques, conférences, séminaires ; services de camps de vacances [divertissement] ; camps [stages] de perfectionnement sportif ; services de clubs [divertissement ou éducation] ; clubs de santé [mise en forme physique] ; organisation de concours [éducation ou divertissement] ; exploitation de salles de sport ; exploitation de parcours de golf ; location d’ustensiles pour la pratique du golf ; mise à disposition de parcours de golf ; organisation de tournois de golf ; location de courts de tennis ; planification de réceptions [divertissement] ; édition de publication et de revues », reproduite ci-après :

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6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 7 décembre 2020, la division d’opposition a fait droit à l’opposition.

8        Le 5 février 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours dans son intégralité. En substance, la chambre de recours, tenant compte du caractère identique des services en cause, d’une similitude visuelle supérieure à la moyenne, d’un degré élevé de similitude phonétique et conceptuelle ainsi que du caractère distinctif de la marque antérieure, a conclu, même en ce qui concerne les services pour lesquels le public pertinent était susceptible de faire preuve d’un niveau d’attention élevé, à l’existence d’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens, y compris ceux qui ont été exposés au cours de la procédure devant la chambre de recours.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

12      La requérante invoque en substance un moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

13      Dans le cadre de son moyen unique, elle conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il existe, en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent en l’espèce. En particulier, elle remet en cause les appréciations de la chambre de recours relatives au caractère distinctif de la marque de l’Union européenne figurative antérieure ainsi qu’à l’identité des services en cause et à la comparaison des marques en conflit.

14      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

15      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

16      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

17      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

18      La chambre de recours a considéré que le public pertinent était composé à la fois de professionnels et du grand public. Elle a ajouté que, à l’égard des services de formation compris dans la classe 41, son niveau d’attention était élevé, et que s’agissant des autres services compris dans la classe 41, qui faisaient référence à l’« organisation de compétitions sportives ; organisation d’expositions à des fins culturelles ou éducatives ; organisation et présentation de colloques », le niveau d’attention pouvait varier de moyen à élevé, en fonction du prix, du degré de sophistication ou des conditions générales des services achetés. En outre, la chambre de recours a concentré son analyse sur le public francophone de l’Union européenne, étant donné que la marque antérieure contenait deux mots dont la compréhension était claire en français : « groupe » et « duval ».

19      La requérante ne conteste pas ces appréciations.

 Sur la comparaison des services

20      Pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire [voir arrêt du 14 mai 2013, Sanco/OHMI – Marsalman (Représentation d’un poulet), T‑249/11, EU:T:2013:238, point 21 et jurisprudence citée].

21      Il ressort d’une jurisprudence constante que, lorsque les services visés par la marque antérieure incluent les services visés par la demande de marque, ces services sont considérés comme identiques [voir arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 34 et jurisprudence citée].

22      La requérante fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur en considérant que tous les services couverts par la marque demandée étaient identiques à ceux visés par la marque antérieure. Selon elle, les services en cause sont totalement différents et, tout au plus, faiblement similaires.

23      En particulier, la requérante soutient, premièrement, que les « services éducatifs et de divertissement sous forme de rencontres et de démonstrations de football professionnel » et les « services éducatifs, à savoir les programmes d’éducation physique » couverts par la marque demandée ne sont pas identiques aux services couverts par la marque antérieure de « formation » et de « divertissement » compris dans la même classe. Selon elle, ces derniers services ne peuvent pas être interprétés de manière si large qu’ils couvrent également les « services éducatifs » spécifiques de la requérante de rencontres de football professionnel et de programmes d’éducation physique. Elle ajoute que le système de la classification de Nice distingue fondamentalement les services éducatifs des services de formation et de divertissement et affirme que ces services en conflit sont, tout au plus, similaires, si tant est qu’ils le soient, à un faible degré.

24      À cet égard, il convient tout d’abord de relever, à l’instar de l’EUIPO, que, même si l’« éducation » et la « formation » sont des termes distincts dans l’intitulé de la classe 41 des produits et des services au titre de l’arrangement de Nice, cette dernière classification n’est elle-même effectuée qu’à des fins exclusivement administratives. Le champ de la protection du droit des marques n’est donc pas défini par la situation d’un terme dans une arborescence taxonomique, mais par la signification usuelle de ce terme. La classification de Nice ne vise qu’à faciliter la rédaction et le traitement des demandes de marque, en proposant certaines classes et catégories de produits et de services [voir arrêt du 30 septembre 2015, Gat Microencapsulation/OHMI – BASF (KARIS), T‑720/13, non publié, EU:T:2015:735, point 44 et jurisprudence citée].

25      En outre, il y a lieu de relever, ainsi qu’il est indiqué à juste titre au point 54 de la décision attaquée, que les « services éducatifs sous forme de rencontres et de démonstrations de football professionnel » et les « services éducatifs, à savoir programmes d’éducation physique » couverts par la marque demandée s’inscrivent dans la vaste catégorie des services de « formation » désignés par la marque antérieure ou, à tout le moins, se recoupent avec cette dernière. En effet, ces services sont organisés dans le but de partager des connaissances, de l’expérience et des informations. En outre, selon la jurisprudence, les services liés, notamment, à l’organisation d’expositions à but éducatif sont considérés comme étant identiques aux services de « formation » [voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2016, Polo Club/EUIPO – Lifestyle Equities (POLO CLUB SAINT-TROPEZ HARAS DE GASSIN), T‑67/15, non publié, EU:T:2016:657, point 39]. Par conséquent, ces services peuvent être considérés comme étant identiques.

26      Deuxièmement, la requérante fait valoir que les services d’« organisation et [de] conduite de compétitions d’athlétisme, à savoir [des] rencontres de football professionnel » sont différents des « activités sportives et culturelles» couverts par la marque antérieure, en ce que les premiers seraient des services fournis par des associations et des clubs professionnels et exécutés pour le grand public, tandis que les seconds concerneraient des activités auxquelles les consommateurs participent activement.

27      Cet argument ne saurait non plus prospérer. En effet, il convient de relever que les compétitions sportives sous forme de rencontres de football professionnel sont des événements sportifs, et l’organisation et la conduite des premières constituent des « activités sportives», de sorte que, comme la chambre de recours l’a relevé à juste titre, ces services sont identiques.

28      Troisièmement, la requérante fait valoir que les services couverts par la marque demandée de « fourniture d’informations sportives et de divertissement par le biais d’un réseau informatique mondial ou d’un service informatique commercial en ligne ou par le biais du câble, de satellites, de la télévision et de la radio ; fourniture d’informations sur le football » ne sont pas identiques aux services de « divertissement » et d’« activités sportives » couverts par la marque antérieure, mais qu’ils présentent tout au plus un degré de similitude faible à moyen.

29      À cet égard, il suffit de relever, ainsi qu’il est indiqué à juste titre au point 61 de la décision attaquée, que les services contestés en l’espèce sont tous inclus dans les catégories générales des services de « divertissement, activités sportives et culturelles » de la marque antérieure. En effet, les services en conflit peuvent relever de la même grande catégorie générale, de sorte qu’ils sont identiques, même si la dénomination des services couverts par la marque antérieure ne précisait pas exactement quelles informations constituaient leur objet. Cet argument ne saurait donc prospérer.

30      Quatrièmement, la requérante considère que les services d’« organisation d’une association professionnelle de sports d’équipe, [l’]exploitation d’une ligue de clubs de football et [la] programmation de calendrier de matchs pour jeux sportifs » ne sont pas identiques aux services d’« activités sportives et culturelles » couverts par la marque antérieure.

31      Cet argument doit lui aussi être rejeté. En effet, il convient de relever, à l’instar de l’EUIPO, que le fait qu’il existe une grande variété d’activités sportives ne remet pas en cause le fait que les services couverts par la marque demandée concernent les « activités sportives » dans leur ensemble. En effet, la prestation d’« activités sportives » implique nécessairement l’organisation et l’exploitation de ces activités. Par conséquent, les services visés par la marque demandée sont des exemples spécifiques plus restreints relevant de la catégorie générale des « activités sportives », visées par la marque antérieure. Partant, ces services sont identiques. En outre, contrairement à ce qu’affirme la requérante, ces services sont tous destinés au grand public, qui est le consommateur final de ces services.

32      À la lumière de ce qui précède, il convient de relever que la chambre de recours a, à juste titre, conclu que les services en cause étaient identiques.

 Sur la comparaison des signes 

33      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

34      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

35      En outre, afin d’apprécier le degré de similitude existant entre les marques concernées, il faut déterminer leur degré de similitude visuelle, phonétique et conceptuelle et, le cas échéant, évaluer l’importance qu’il convient d’attacher à ces différents éléments, en tenant compte de la catégorie de produits ou de services en cause et des conditions dans lesquelles ils sont commercialisés (voir, en ce sens, arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 27).

36      En l’espèce, avant de traiter la question de la similitude des signes en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, il y a lieu d’examiner l’appréciation des éléments distinctifs et dominants des signes en conflit effectuée par la chambre de recours.

 Sur les éléments distinctifs et dominants des signes en conflit

37      Selon la jurisprudence, pour déterminer le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’apprécier l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée [voir ordonnance du 3 mai 2018, Siberian Vodka/EUIPO – Schwarze und Schlichte (DIAMOND ICE), T‑234/17, non publiée, EU:T:2018:259, point 38 et jurisprudence citée].

38      Quant à l’appréciation du caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe [arrêt du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 35].

39      À cet égard, la chambre de recours a indiqué que la marque demandée était une marque verbale composée d’une succession de sept lettres « d », « u », « u », « u », « v », « a », « l » et qu’il n’était pas contesté qu’il s’agissait du cri lancé par les supporters de l’équipe de football des Jacksonville Jaguars. S’agissant de la marque antérieure, la chambre de recours a considéré ce qui suit. D’une part, l’élément verbal « duval » serait l’élément dominant de cette marque en raison de sa taille et de sa position. D’autre part, l’élément figuratif aurait une valeur essentiellement ornementale et le mot « groupe », qui serait un terme générique relatif à l’ensemble des produits et des services couverts par la marque antérieure, serait dépourvu de caractère distinctif. Elle a précisé, en outre, que l’élément « duval » pouvait être reconnu comme étant un nom de famille français très courant, notamment en Normandie.

40      En l’espèce, la requérante fait, tout d’abord, valoir que l’expression « groupe duval » du signe antérieur sera perçue comme une référence à un groupe commercial associé à un nom de famille relativement courant, de sorte que l’élément « groupe » façonne l’impression d’ensemble et l’expression sera comprise comme une seule unité. Elle affirme que l’élément figuratif de la marque antérieure peut servir à identifier l’origine commerciale des produits et des services. Elle fait valoir qu’il s’agit d’une illustration rare qui confère à la marque antérieure une touche noble qui fait défaut dans le signe contesté, qu’elle participe à l’impression d’ensemble produite par cette marque sur le public pertinent. En revanche, la marque demandée contestée serait un mot unique, à savoir « duuuval », qui serait un néologisme représentant l’exclamation de supporters d’une équipe de la National Football League (NFL) (Ligue nationale de football américain) établie dans le comté de Duval (Floride, États-Unis d’Amérique).

41      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

42      Contrairement à ce que fait valoir la requérante, ces considérations de la chambre de recours sont exemptes d’erreur d’appréciation. En effet, ainsi que le souligne l’EUIPO, le public pertinent n’attribuera aucune importance majeure à la police de caractères et aux couleurs de la marque antérieure en raison de leur nature décorative. À cet égard, l’élément figuratif sera perçu comme purement décoratif dans le contexte du signe dans son ensemble et le mot « groupe », considérablement plus petit que le mot « duval », sera compris comme un terme générique non distinctif indiquant simplement que la société en cause appartient à un plus grand groupe d’entreprises. En effet, c’est cet élément verbal de très grande taille qui constitue l’élément dominant et le plus distinctif du signe antérieur, compte tenu notamment du fait que la marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs. Il convient de rappeler, à cet égard, que, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [arrêt du 14 juillet 2005, Wassen International/OHMI – Stroschein Gesundkost (SELENIUM-ACE), T‑312/03, EU:T:2005:289, point 37].

43      Il s’ensuit que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’élément verbal « duval » était l’élément dominant de la marque antérieure.

 Sur la similitude visuelle

44      En ce qui concerne la comparaison des signes en conflit sur le plan visuel, la chambre de recours a relevé que les signes en conflit coïncidaient par les groupes de lettres « du » et « val », lesquelles, juxtaposées, constituaient l’élément dominant de la marque antérieure. Elle a ajouté que ces signes se distinguaient par la répétition de la lettre « u » dans la marque demandée ainsi que par les autres éléments verbaux et figuratifs de la marque antérieure. En outre, tout en reconnaissant que la série de lettres « uu » au milieu de la marque demandée était clairement étonnante pour le public francophone, elle a, considéré que les groupes de lettres « du » et « val » auraient une incidence considérable et plus forte sur la perception des consommateurs, étant donné notamment que ces lettres n’empêchaient pas la reconnaissance immédiate du nom de famille « duval », ou une allusion à ce dernier, compte tenu du fait que les lettres qui coïncident étaient également placées dans le même ordre et dans les parties initiale et finale des marques en conflit. Elle en a conclu qu’elles présentaient un degré de similitude visuelle supérieur à la moyenne.

45      Cette appréciation est exempte d’erreur. En effet, bien que les marques en conflit diffèrent sur le plan visuel en raison des lettres « uuu », dont la répétition est très inhabituelle pour le public pertinent, il n’en demeure pas moins qu’elles coïncident par les groupes de lettres « du » et « val », présentes dans la marque demandée et constitutives de l’élément dominant de la marque antérieure. Or, le fait que l’élément dominant de la marque antérieure soit entièrement inclus dans la marque demandée est de nature à créer une forte ressemblance tant visuelle que phonétique entre les marques en conflit [voir, en ce sens, arrêt du 14 juin 2018, Lion’s Head Global Partners/EUIPO – Lion Capital (LION’S HEAD global partners), T‑310/17, non publié, EU:T:2018:344, point 31 et jurisprudence citée], et ce même lorsque le public pertinent est doté d’un niveau d’attention élevé [voir, en ce sens, arrêt du 20 février 2018, Kwang Yang Motor/EUIPO – Schmidt (CK1), T‑45/17, non publié, EU:T:2018:85, points 45 à 47].

46      Il en découle que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu que les signes en conflit présentaient un degré de similitude visuelle supérieur à la moyenne.

47      Aucun des autres arguments de la requérante n’est de nature à remettre en cause ce constat. En effet, contrairement à ce que soutient la requérante, le groupe de lettres « duval » de la marque demandée n’occupe nullement une position subordonnée et marginalisée dans ladite marque. En outre, en ce qui concerne l’argument selon lequel le groupe de lettres « uuu » est « vivant et ludique » et indique qu’il s’agit d’une exclamation prononcée, il suffit de relever que cette circonstance, même à la supposer avérée, n’est pas de nature à empêcher la reconnaissance immédiate du nom de famille Duval par le public pertinent.

 Sur la similitude phonétique

48      Sur le plan phonétique, selon la chambre de recours, la prononciation des marques coïnciderait par la prononciation de l’élément « duval ». En effet, la triple lettre « u » de la marque demandée ne sera pas prononcée par le public francophone, puisqu’il n’existe aucun son en français qui contienne trois lettres « u ». En tout état de cause, elle a considéré que les éléments « duval » et « duuuval » seront prononcés de la même manière en deux syllabes « du » et « val ». La chambre de recours a considéré, en outre, que le mot « groupe » de la marque antérieure n’avait pas d’équivalent dans le signe contesté, mais que cet élément était dépourvu de caractère distinctif. Enfin, elle a relevé que l’élément purement figuratif de la marque antérieure ne pouvait pas être apprécié sur le plan phonétique. Elle en a conclu que les signes en conflit étaient très similaires sur le plan phonétique.

49      La requérante remet en cause cette appréciation de la chambre de recours et s’appuie, d’une part, sur la différence du nombre de syllabes des marques en conflit, à savoir deux syllabes « duuu » et « val » pour la marque demandée et trois syllabes « groupe », « du » et « val » pour la marque antérieure et, d’autre part, sur la manière dont celles-ci seront accentuées lorsqu’elles seront prononcées. À cet égard, la première syllabe « duuu » de la marque demandée serait prolongée et accentuée, et la seconde syllabe « val » serait à peine perçue, avec un rôle phonétique mineur. À l’inverse, dans la marque antérieure, le second élément verbal ferait l’objet d’une légère accentuation sur la seconde syllabe.

50      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

51      À cet égard, il convient, tout d’abord, de rappeler, à l’instar de la chambre de recours, que le mot « groupe » de la marque antérieure était dépourvu de caractère distinctif. Par conséquent, il est peu probable que cet élément de la marque antérieure soit prononcé.

52      De plus, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus, le fait que l’élément dominant de la marque antérieure soit entièrement inclus dans la marque demandée est de nature à créer une forte ressemblance tant visuelle que phonétique entre les marques en conflit (voir, en ce sens, arrêt du 14 juin 2018, LION’S HEAD global partners, T‑310/17, non publié, EU:T:2018:344, point 31 et jurisprudence citée).

53      En outre, comme l’a, en substance, relevé à juste titre la chambre de recours, la triple lettre « u » de la marque demandée ne conduira pas le public pertinent à prononcer cette marque différemment de l’élément « duval » de la marque antérieure, et ce même en admettant que le public pertinent perçoive la marque demandée comme une exclamation et la prononce donc de manière plus emphatique. Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que les signes en conflit étaient très similaires sur le plan phonétique.

 Sur la similitude conceptuelle

54      Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a considéré que la marque antérieure sera perçue comme faisant référence au nom de famille français  Duval. S’agissant de la marque demandée, la chambre de recours a douté que le public pertinent y reconnaisse le cri des supporters de l’équipe de football des Jacksonville Jaguars. Il est notoire, selon elle, que les consommateurs français ne suivent pas les équipes de football américain. S’agissant du triplement de la voyelle « u » dans la marque demandée, la chambre de recours a considéré qu’il n’avait aucune influence sur la perception du signe par le public pertinent. En conséquence, selon la chambre de recours, les signes présentent une forte similitude sur le plan conceptuel, étant donné que les éléments qui les différenciaient comprenaient un élément dépourvu de caractère distinctif et un élément figuratif dépourvu de signification.

55      La requérante fait valoir que c’est à tort que la chambre de recours a conclu que les signes en conflit étaient similaires sur le plan conceptuel. Elle soutient que le public percevra la marque antérieure comme une marque d’un groupe de sociétés, tandis qu’il percevra la marque demandée comme un cri de reconnaissance sportif. Cela montrerait que les marques en conflit se distinguent considérablement sur le plan conceptuel.

56      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

57      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, même si le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’en reste pas moins que, en percevant un signe verbal, il décomposera celui-ci en des éléments verbaux qui, pour lui, suggèrent une signification concrète et immédiatement compréhensible ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît [voir arrêt du 15 septembre 2021, Freshly Cosmetics/EUIPO – Misiego Blázquez (IDENTY BEAUTY), T‑688/20, non publié, EU:T:2021:567, point 56 et jurisprudence citée].

58      En l’espèce, il convient de constater que, à l’instar de l’EUIPO, pour le public pertinent qui comprend l’élément « duval » comme un nom de famille français courant, la marque demandée sera simplement perçue comme faisant référence à ce nom de famille. Cette affirmation n’est pas remise en cause par l’allégation selon laquelle la marque demandée est un cri de reconnaissance sportif émis par des supporters, étant donné que ce cri concernerait le même mot « duval ». De plus, il convient de relever, d’une part, que l’élément figuratif de la marque antérieure, qui sera perçu comme purement décoratif, ne véhicule aucun concept et, d’autre part, que l’élément « groupe » étant dépourvu de caractère distinctif, il aura un impact moindre sur le public pertinent par rapport à l’élément « duval ». Dans ces conditions, les marques en conflit concernent le même nom de famille et elles peuvent être considérées comme similaires sur le plan conceptuel.

59      En tout état de cause, il y a lieu de relever, à l’instar de l’EUIPO, que, même si un nom de famille n’était pas un concept en tant que tel et, par conséquent, si une comparaison conceptuelle n’était pas possible, compte tenu de la similitude visuelle et phonétique entre les signes en cause, cela n’affecterait pas la conclusion à laquelle la chambre de recours est parvenue dans la décision attaquée selon laquelle les signes sont globalement similaires.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

60      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

61      En l’espèce, la chambre de recours a conclu, au point 79 de la décision attaquée, à l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, même en ce qui concerne les services pour lesquels le public pertinent est susceptible de faire preuve d’un niveau d’attention élevé. Elle a fondé cette conclusion sur l’identité des services en cause, sur le degré de similitude visuelle supérieur à la moyenne, sur le degré élevé de similitude phonétique et conceptuelle des marques en conflit ainsi que sur le caractère distinctif moyen de la marque antérieure par rapport aux services en cause malgré la présence de l’élément « groupe », qui présente un caractère distinctif faible.

62      La requérante soutient qu’il n’existe pas de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent. Elle fait valoir que la plupart des services couverts par les deux marques en conflit sont partiellement différents, ou seulement similaires à un degré tout au plus moyen. De plus les signes en conflit seraient différents ou tout au plus similaires à un faible degré, en raison des lettres partiellement identiques qui les composent. S’agissant du caractère distinctif de la marque antérieure, elle fait valoir que, si l’élément « duval » est compris par le public pertinent comme un nom de famille français courant, seul un faible caractère distinctif peut être reconnu à cette marque, étant donné que le public pertinent y verra l’indication d’un nom largement utilisé, qui n’est pas particulièrement apte à identifier les services pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée, et donc à distinguer ces services de ceux d’autres entreprises.

63      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

64      En l’espèce, il convient de rappeler l’existence d’une identité entre les services en cause (voir points 20 à 32 ci-dessus), d’une similitude supérieure à la moyenne des marques en conflit sur le plan visuel, du degré élevé de similitude sur le plan phonétique et d’une similitude sur le plan conceptuel (voir points 44 à 58 ci-dessus) et du caractère distinctif moyen de la marque antérieure (voir points 60 à 62 ci-dessus).

65      S’agissant du caractère distinctif de la marque antérieure, il y a lieu de relever, à l’instar de l’EUIPO, que, même si la marque antérieure est comprise par le public pertinent comme un nom de famille, il est suffisamment distinctif pour indiquer l’origine commerciale des services en cause, en particulier lorsque, comme en l’espèce, il n’est ni descriptif ni laudatif et qu’il n’a aucune signification pertinente à cet égard. Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en jugeant en substance que la marque antérieure possédait un caractère distinctif moyen.

66      Compte tenu de ce qui précède, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, conformément à la jurisprudence citée au point 60 ci-dessus, qu’il existait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, malgré le niveau d’attention supérieur à la moyenne de celui-ci à l’égard de certains de ces services.

67      En effet, dans la mesure où le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différents signes et doit se fier à l’image non parfaite qu’il a gardée en mémoire (voir arrêt du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 60 et jurisprudence citée), les différences entre les signes en conflit ne sont pas en mesure de détourner l’attention du public pertinent de la similitude globale créée par les groupes de lettres identiques « du » et « val », qui constituent, juxtaposés, l’élément dominant de la marque antérieure. De ce fait, il est très probable que le public pertinent puisse être amené à croire que les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement.

68      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le moyen unique invoqué par la requérante au soutien de ses conclusions ne devant pas être accueilli, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

69      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

70      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      NFL Properties Europe GmbH est condamnée aux dépens.

Spielmann

Mastroianni

Gâlea

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 1er février 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.