Language of document : ECLI:EU:T:2020:580

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

2 décembre 2020 (*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises à l’encontre de la Syrie – Gel des fonds – Droits de la défense – Obligation de motivation – Erreur d’appréciation – Proportionnalité – Droit de propriété »

Dans l’affaire T‑178/19,

Nader Kalai, demeurant à Halifax, Nouvelle-Écosse (Canada), représenté par Me G. Karouni, avocat,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. V. Piessevaux et Mme P. Plaza García, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d’une part, une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision d’exécution (PESC) 2019/87 du Conseil, du 21 janvier 2019, mettant en œuvre la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2019, L 18 I, p. 13), du règlement d’exécution (UE) 2019/85 du Conseil, du 21 janvier 2019, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2019, L 18 I, p. 4), de la décision (PESC) 2019/806 du Conseil, du 17 mai 2019, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2019, L 132, p. 36), du règlement d’exécution (UE) 2019/798 du Conseil, du 17 mai 2019, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2019, L 132, p. 1), de la décision (PESC) 2020/719 du Conseil, du 28 mai 2020, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2020, L 168, p. 66), et du règlement d’exécution (UE) 2020/716 du Conseil, du 28 mai 2020, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2020, L 168, p. 1), en tant que ces actes visent le requérant, et, d’autre part, une demande fondée sur l’article 268 TFUE et tendant à obtenir réparation du préjudice que le requérant aurait prétendument subi du fait de ces actes,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. S. Gervasoni, président, L. Madise et J. Martín y Pérez de Nanclares (rapporteur), juges,

greffier : Mme M. Marescaux, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 24 juin 2020,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le requérant, M. Nader Kalai, est un homme d’affaires de nationalité syrienne qui développe une activité commerciale dans le domaine de l’industrie du bâtiment.

2        Condamnant fermement la répression violente des manifestations pacifiques en divers endroits dans toute la Syrie et lançant un appel aux autorités syriennes pour qu’elles s’abstiennent de recourir à la force, le Conseil de l’Union européenne a adopté, sur le fondement de l’article 29 TUE, la décision 2011/273/PESC, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2011, L 121, p. 11). Compte tenu de la gravité de la situation, le Conseil a institué un embargo sur les armes, une interdiction des exportations de matériel susceptible d’être utilisé à des fins de répression interne, des restrictions à l’admission dans l’Union européenne ainsi que le gel des fonds et des ressources économiques de certaines personnes et entités responsables de la répression violente exercée contre la population civile syrienne.

3        Les noms des personnes responsables de la répression violente exercée contre la population civile en Syrie ainsi que ceux des personnes, physiques ou morales, et des entités qui leur sont liées sont mentionnés dans l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 5, paragraphe 1, de cette décision, le Conseil, statuant sur proposition d’un État membre ou du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, peut modifier ladite annexe. Le nom du requérant n’y figurait pas lors de l’adoption de ladite décision.

4        Étant donné que certaines des mesures restrictives prises à l’encontre de la République arabe syrienne entrent dans le champ d’application du traité FUE, le Conseil a adopté, sur le fondement de l’article 215, paragraphe 2, TFUE, le règlement (UE) no 442/2011, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2011, L 121, p. 1). Ce règlement est, pour l’essentiel, identique à la décision 2011/273, mais il prévoit des possibilités de déblocage des fonds gelés. La liste des personnes, des entités et des organismes reconnus comme étant soit responsables de la répression en cause, soit associés auxdits responsables, figurant à l’annexe II dudit règlement, est identique à celle figurant à l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 14, paragraphes 1 et 4, du règlement no 442/2011, lorsque le Conseil décide d’appliquer à une personne physique ou morale, à une entité ou à un organisme les mesures restrictives visées, il modifie l’annexe II en conséquence et, par ailleurs, examine la liste qui y figure à intervalles réguliers et au moins tous les douze mois.

5        Par la décision 2011/782/PESC, du 1er décembre 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/273 (JO 2011, L 319, p. 56), le Conseil a estimé, compte tenu de la gravité de la situation en Syrie, qu’il était nécessaire d’instituer des mesures restrictives supplémentaires. Par souci de clarté, les mesures imposées par la décision 2011/273 et les mesures supplémentaires ont été regroupées dans un instrument juridique unique. La décision 2011/782 prévoit, à son article 18, des restrictions en matière d’admission sur le territoire de l’Union et, à son article 19, le gel des fonds et des ressources économiques des personnes et entités dont le nom figure à son annexe I.

6        Le règlement no 442/2011 a été remplacé par le règlement (UE) no 36/2012 du Conseil, du 18 janvier 2012, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie et abrogeant le règlement no 442/2011 (JO 2012, L 16, p. 1).

7        La décision 2011/782 a été remplacée par la décision 2012/739/PESC du Conseil, du 29 novembre 2012, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/782 (JO 2012, L 330, p. 21), elle-même remplacée par la décision 2013/255/PESC du Conseil, du 31 mai 2013, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2013, L 147, p. 14).

8        Le 12 octobre 2015, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2015/1836, modifiant la décision 2013/255 (JO 2015, L 266, p. 75). Le même jour, il a adopté le règlement (UE) 2015/1828, modifiant le règlement no 36/2012 (JO 2015, L 266, p. 1).

9        Aux termes du considérant 6 de la décision 2015/1836, « [l]e Conseil a estimé que, en raison du contrôle étroit exercé sur l’économie par le régime syrien, un cercle restreint de femmes et [d’]hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie n’[était] en mesure de maintenir son statut que grâce à des liens étroits avec le régime et au soutien de celui-ci, ainsi qu’à l’influence exercée en son sein », et « le Conseil estime qu’il devrait prévoir des mesures restrictives pour imposer des restrictions à l’admission des femmes et des hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie, identifiés par l[ui] et dont la liste figure à l’annexe I, ainsi que pour geler tous les fonds et ressources économiques qui leur appartiennent, qui sont en leur possession, ou qui sont détenus ou contrôlés par eux, afin de [les] empêcher de fournir un soutien matériel ou financier au régime et, par l’influence qu’ils exercent, d’accroître la pression sur le régime lui-même afin qu’il modifie sa politique de répression ».

10      La rédaction des articles 27 et 28 de la décision 2013/255 a été modifiée par la décision 2015/1836. Ces articles prévoient désormais des restrictions à l’entrée ou au passage en transit sur le territoire des États membres ainsi que le gel des fonds des « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » sauf « informations suffisantes indiquant [que ces personnes] ne sont pas, ou ne sont plus, lié[e]s au régime ou qu’[elles] n’exercent aucune influence sur celui-ci ou qu’[elles] ne sont pas associé[e]s à un risque réel de contournement ».

11      Le règlement 2015/1828 a modifié, notamment, la rédaction de l’article 15 du règlement no 36/2012 afin d’y intégrer les nouveaux critères d’inscription définis par la décision 2015/1836 et introduits dans la décision 2013/255.

12      Par la décision d’exécution (PESC) 2019/87 du Conseil, du 21 janvier 2019, mettant en œuvre la décision 2013/255 (JO 2019, L 18 I, p. 13), et par le règlement d’exécution (UE) 2019/85, du 21 janvier 2019, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2019, L 18 I, p. 4), le nom du requérant a été inséré à la ligne 274 du tableau A des listes des personnes, entités et organismes visés par les mesures restrictives qui figurent à l’annexe I de la décision 2013/255 et à l’annexe II du règlement no 36/2012 (ci-après, prises ensemble, les « listes en cause »).

13      Dans ces actes, le Conseil a justifié l’adoption des mesures restrictives visant le requérant en l’identifiant comme l’« actionnaire majoritaire de Castle Investment Holding, [le] copropriétaire de Zub[e]di et [Kalai] LLC, [et le] président de Kalai Industries Management » et par la mention des motifs suivants :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant réalisé d’importants investissements dans l’industrie du bâtiment, y compris une participation de 50 % dans Zub[e]di et [Kalai] LLC, qui construit la cité touristique de luxe “Grand Town” et avec qui le régime a passé une convention sur 45 ans en échange de 19-21 % de ses recettes. Il a, à ce titre, des liens avec Khaled al-Zub[e]di. Nader [Kalai] tire avantage du régime et/ou le soutient, par ses activités commerciales, notamment sa participation à la construction de Grand Town. »

14      Le 22 janvier 2019, le Conseil a procédé à la publication au Journal officiel de l’Union européenne de l’avis à l’attention des personnes qui faisaient l’objet des mesures restrictives prévues par la décision 2013/255 et par le règlement no 36/2012 (JO 2019, C 27, p. 3).

15      Par lettre du 27 février 2019, le représentant du requérant s’est opposé à l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause et a demandé au Conseil de lui communiquer les documents étayant ladite inscription.

16      Par lettre du 21 mars 2019, d’une part, le Conseil a indiqué au représentant du requérant que, en substance, ses observations n’étaient pas de nature à remettre en cause la décision d’inscrire le nom du requérant sur les listes en cause. D’autre part, le Conseil lui a communiqué le document portant la référence WK 60/2019 INIT, du 10 janvier 2019, comprenant les éléments de preuve venant au soutien des motifs de ladite inscription.

 Procédure et conclusions des parties

17      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 mars 2019, le requérant a introduit le présent recours.

18      Dans le cadre de la phase écrite de la procédure, par acte du 12 juin 2019, le Conseil a déposé un mémoire en défense.

19      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 1er juillet 2019, le requérant a, sur le fondement de l’article 86 du règlement de procédure du Tribunal, adapté la requête, de sorte que celle-ci vise également l’annulation de la décision (PESC) 2019/806 du Conseil, du 17 mai 2019, modifiant la décision 2013/255 (JO 2019, L 132, p. 36), et du règlement d’exécution (UE) 2019/798 du Conseil, du 17 mai 2019, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2019, L 132, p. 1), en tant que ces actes le concernent. Le requérant a également réitéré les chefs de conclusions qui figuraient dans la requête. Le Conseil a répondu au mémoire en adaptation le 11 juillet 2019.

20      La réplique et la duplique ont été déposées, respectivement, par le requérant, le 3 septembre 2019 et, par le Conseil, le 17 octobre 2019.

21      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée en application de l’article 27, paragraphe 5, du règlement de procédure, le juge rapporteur a été affecté à la quatrième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée, ce dont les parties ont été informées par lettres du greffe du Tribunal du 16 octobre 2019.

22      La procédure écrite a été clôturée le 17 octobre 2019.

23      Par lettre du 15 novembre 2019, le requérant a déposé une série d’éléments de preuve. Le Conseil a pris position sur ces éléments de preuve par lettre déposée au greffe du Tribunal le 12 décembre 2019.

24      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 17 juin 2020 (ci-après le « second mémoire en adaptation »), le requérant a, sur le fondement de l’article 86 du règlement de procédure, adapté une seconde fois la requête, de sorte que celle-ci vise également l’annulation de la décision (PESC) 2020/719 du Conseil, du 28 mai 2020, modifiant la décision 2013/255 (JO 2020, L 168, p. 66), et du règlement d’exécution (UE) 2020/716 du Conseil, du 28 mai 2020, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 concernant les mesures restrictives en Syrie (JO 2020, L 168, p. 1), en tant que ces actes le concernent (la décision d’exécution 2019/87 et le règlement d’exécution 2019/85, d’une part, la décision 2019/806 et le règlement d’exécution 2019/798, d’autre part, la décision 2020/719 et le règlement d’exécution 2020/716, enfin, étant ci-après dénommés ensemble les « actes attaqués »). Le requérant a réitéré les chefs de conclusions qui figuraient dans la requête. Le Conseil a répondu à ce mémoire en adaptation durant l’audience qui s’est tenue le 24 juin 2020.

25      Par lettre du 25 octobre 2019, le requérant a demandé à pouvoir déposer des observations sur la duplique. Dès lors qu’un tel dépôt n’est pas prévu par le règlement de procédure, il n’a pas été fait droit à cette demande.

26      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89, paragraphe 3, sous a) et d), du règlement de procédure, le Tribunal a, le 6 mars 2020, demandé aux parties de répondre à une série de questions et de produire certains documents. Les parties ont répondu aux questions et ont déféré à la demande de production de documents dans le délai imparti.

27      Par lettre du 14 novembre 2019, le requérant a demandé au Tribunal d’ordonner une mesure d’instruction, consistant à citer en qualité de témoin Me Manfred Schlögl, avocat au barreau de Vienne (Autriche), à propos de l’abandon en Autriche des poursuites pénales engagées contre lui pour violation des sanctions décidées par l’Union. Le Conseil a pris position sur cette demande le 12 décembre 2019.

28      Par lettre du 27 mai 2020, le requérant a également demandé l’établissement, par le Tribunal, d’une convocation à l’audience du 24 juin 2020 afin de lui permettre d’obtenir un visa Schengen à titre dérogatoire et d’assister à l’audience. Cette demande a été rejetée par le président de la quatrième chambre du Tribunal le 8 juin 2020.

29      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l’audience qui s’est déroulée le 24 juin 2020.

30      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les actes attaqués pour autant qu’ils le concernent ;

–        condamner le Conseil aux dépens ;

–        condamner le Conseil au paiement de la somme de 2 000 000 euros au titre de dommages et intérêts pour les préjudices matériel et moral qu’il estime avoir subis.

31      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours dans son intégralité ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur les conclusions en annulation

32      Au soutien de ses conclusions en annulation des actes attaqués, le requérant invoque cinq moyens, tirés, le premier, d’une violation des droits de la défense et du droit à un procès équitable, le deuxième, d’une violation de l’obligation de motivation, le troisième, d’une erreur d’appréciation du Conseil, le quatrième, d’une violation du principe de proportionnalité et, enfin, le cinquième, de la violation du droit de propriété.

33      Le Tribunal estime opportun de se prononcer, à titre liminaire, sur la recevabilité de certaines preuves déposées par les parties. Par la suite, il examinera le bien-fondé des cinq moyens invoqués, en commençant par le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation.

 Sur la recevabilité des preuves déposées par les parties

–       Sur la recevabilité des preuves déposées par le requérant le 15 novembre 2019

34      Il y a lieu d’examiner la question de la recevabilité des preuves déposées par le requérant, le 15 novembre 2019.

35      Le Conseil fait valoir que l’ensemble de ces pièces doit être déclaré irrecevable en raison de la tardiveté de leur présentation et de l’absence de justification de ce retard par le requérant.

36      En l’espèce, le requérant a présenté treize documents, à savoir :

–        une copie de sa carte de résidence permanente au Canada ainsi que la lettre des services de l’immigration canadiens, du 9 mai 2019, l’invitant à se présenter à ces services afin de présenter la documentation nécessaire pour se voir remettre la carte de résidence permanente ;

–        un rapport d’expertise foncière du 6 novembre 2019 établi par un ingénieur, A, dans lequel il est fait état de l’absence de travaux de construction sur le site du projet Grand Town autour de l’hôtel Ebla, qui a été construit sur un terrain appartenant au ministère du Tourisme syrien ;

–        une photographie en noir et blanc du site sur lequel se situe l’hôtel Ebla provenant du site Internet Google Earth qui comporte la mention « Ebla Al Sham » ;

–        une copie, établie le 12 février 2019, du certificat d’immatriculation de Kalai Industries Management du 22 janvier 2002 ;

–        deux attestations établies par des associations caritatives, à savoir une attestation, non datée, signée par le président de l’association « Alkiswa pour la charité » et une lettre, du 4 novembre 2019, écrite par le chef de la section du Croissant-Rouge arabe syrien située dans la ville d’Al-Kiswah (région de Damas, Syrie) ;

–        une lettre du 4 novembre 2019, portant le sceau du ministère de l’Administration locale et de l’Environnement syrien et signée par le chef du conseil de la ville d’Al-Kiswah ;

–        une attestation, du 7 novembre 2019, du directeur général des ports du ministère du Transport syrien indiquant que le club nautique « Syrian Yacht Club » n’a organisé aucune activité touristique depuis 2011 ;

–        une lettre écrite par Me M. Schlögl, avocat au barreau de Vienne, adressée au Tribunal et datant du mois de novembre 2019, dans laquelle il informe le Tribunal de l’abandon, en juillet 2019, des poursuites pénales engagées en 2017 contre le requérant par le parquet de Vienne pour des faits susceptibles de constituer une violation des sanctions adoptées par l’Union contre la Syrie et à laquelle a été annexé un extrait du Bundesgesetz über die Durchführung internationaler Sanktionsmaßnahmen (loi fédérale sur la mise en œuvre des sanctions internationales) du 24 juin 1993 (BGBl. 406/1993), tel que modifié le 15 juin 2010 (BGBl. I, 36/2010) ;

–        un certificat établi le 5 novembre 2019, par B, avocat, agissant en qualité de secrétaire du registre de Castle Investment Holding, et qui concerne la cession de 69,5 % des parts du requérant dans cette société au profit de la société ATAA ;

–        une lettre du ministère du Commerce intérieur et de la Protection du consommateur syrien, du 3 juillet 2016, dans laquelle il est pris acte de la cession par le requérant, le 23 juin 2016, de 3 500 000 actions de Castle Investment Holding au profit de la société ATAA.

37      À titre liminaire, il convient de relever que la recevabilité des preuves énumérées au point 36 ci-dessus se pose uniquement dans le cadre de la demande d’annulation en ce qu’elle vise la décision d’exécution 2019/87, le règlement d’exécution 2019/85, la décision 2019/806 et le règlement d’exécution 2019/798, en tant qu’ils concernent le requérant. En effet, celles-ci ayant été déposées au greffe du Tribunal le 15 novembre 2019, elles l’ont été après la clôture de la phase écrite de la procédure, le 17 octobre 2019, dans le cadre de laquelle la demande d’annulation de ces actes s’inscrit, mais antérieurement au dépôt du second mémoire en adaptation, réalisé le 17 juin 2020, et visant à demander l’annulation de la décision 2020/719 et du règlement d’exécution 2020/716, en tant qu’ils visent le requérant. Ainsi, ces preuves sont, en tout état de cause, recevables dans le cadre de l’analyse du bien-fondé de la demande d’annulation de la décision 2020/719 et du règlement d’exécution 2020/716, en tant qu’ils visent le requérant.

38      S’agissant de la recevabilité des preuves énumérées au point 36 ci-dessus dans le cadre de l’analyse de la demande d’annulation de la décision d’exécution 2019/87, du règlement d’exécution 2019/85, de la décision 2019/806 et du règlement d’exécution 2019/798, en tant qu’ils concernent le requérant, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure, les parties principales peuvent encore, à titre exceptionnel, produire des preuves ou faire des offres de preuve avant la clôture de la phase orale de la procédure ou avant la décision du Tribunal de statuer sans phase orale de la procédure, à condition que le retard dans la présentation de celles-ci soit justifié. À défaut d’une telle motivation ou si celle-ci est jugée insuffisante, les preuves ou les offres de preuve présentées sont écartées comme tardives.

39      En premier lieu, en ce qui concerne la présentation des éléments de preuve énumérés au point 36 ci-dessus et portant une date antérieure à celle de la clôture de la procédure écrite, le 17 octobre 2019, celle-ci doit être considérée comme étant intervenue tardivement au sens de l’article 85, paragraphes 1 et 3, du règlement de procédure. Or, le requérant ayant omis d’avancer une justification pour la présentation tardive de ces éléments de preuve, il convient de les écarter comme irrecevables, en vertu de l’article 85, paragraphes 1 et 3, du règlement de procédure [voir, en ce sens, arrêt du 12 octobre 2017, Moravia Consulting/EUIPO – Citizen Systems Europe (SDC‑554S), T‑316/16, EU:T:2017:717, point 63]. Il en va de même en ce qui concerne les éléments de preuve non datés, à savoir la photographie en noir et blanc provenant du site Internet Google Earth qui comporte la mention « Ebla Al Sham » ainsi que l’attestation signée par le président de l’association « Alkiswa pour la charité ».

40      En deuxième lieu, s’agissant des éléments de preuve énumérés au point 36 ci-dessus et portant une date postérieure au 17 octobre 2019, il convient de rappeler que le Tribunal n’admet le dépôt de preuves postérieurement à la clôture de la phase écrite de la procédure que dans des circonstances exceptionnelles, à savoir si l’auteur des preuves ne pouvait, avant la clôture de la phase écrite de la procédure, disposer des preuves en question (voir, en ce sens, arrêt du 18 novembre 2015, Einhell Germany e.a./Commission, T‑73/12, EU:T:2015:865, point 27 et jurisprudence citée).

41      Or, premièrement, il y a lieu de relever que, s’agissant du rapport d’expertise foncière du 6 novembre 2019, celui-ci fait état de l’absence de travaux de construction sur le site du projet « Grand Town » à la date de son établissement. Deuxièmement, les deux lettres du 4 novembre 2019 ont été envoyées en réponse à des lettres adressées par le requérant le 24 et le 25 juillet 2019, respectivement, à la section du Croissant-Rouge arabe syrien et au ministère de l’Administration locale et de l’Environnement syrien afin de faire attester de l’hébergement de familles par Kalai Industries Management. Troisièmement, l’attestation du 7 novembre 2019 du directeur général des ports du ministère du Transport syrien vise à démontrer que le club nautique « Syrian Yacht Club » n’avait aucune activité touristique depuis 2011. Quatrièmement, la lettre de Me M. Schlögl, du mois de novembre 2019, indique que les poursuites pénales engagées en 2017 contre le requérant par le parquet de Vienne ont été définitivement abandonnées en juillet 2019. Cinquièmement, le certificat du 5 novembre 2019 est relatif à la cession de 69,5 % des parts que le requérant possédait dans Castle Investment Holding et qui a eu lieu le 23 juin 2016, ainsi qu’il ressort de la lettre du ministère du Commerce intérieur et de la Protection du consommateur syrien du 3 juillet 2016.

42      Partant, ces éléments de preuve relayent des éléments d’information dont le requérant avait nécessairement connaissance avant la clôture de la phase écrite de la procédure dans le cadre de laquelle s’inscrit la demande d’annulation de la décision d’exécution 2019/87, du règlement d’exécution 2019/85, de la décision 2019/806 et du règlement d’exécution 2019/798, en tant qu’ils concernent le requérant. Le requérant n’a pas expliqué si et pourquoi il n’était pas en mesure d’en obtenir la production avant la clôture de ladite phase écrite, de sorte que leur production tardive ne saurait être justifiée.

43      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que les éléments de preuve énumérés au point 36 ci-dessus sont irrecevables dans le cadre de l’analyse de la demande d’annulation de la décision d’exécution 2019/87, du règlement d’exécution 2019/85, de la décision 2019/806 et du règlement d’exécution 2019/798, en tant qu’ils concernent le requérant, mais qu’ils sont recevables dans celle de la décision 2020/719 et du règlement d’exécution 2020/716, en tant qu’ils visent le requérant.

–       Sur la recevabilité de la preuve déposée par le Conseil

44      Il y a lieu d’examiner la recevabilité de la preuve apportée par le Conseil, le 24 juin 2020, soit durant l’audience de plaidoiries, à savoir la lettre du 20 mai 2019 adressée par le Conseil au représentant du requérant pour l’informer, notamment, de la décision de maintenir le nom du requérant sur les listes en cause.

45      Le requérant fait valoir que la pièce doit être déclarée irrecevable en raison de la tardiveté de sa présentation et de l’absence de justification de ce retard par le Conseil.

46      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

47      À cet égard, il convient de relever que, contrairement à ce qu’allègue le requérant, la preuve produite par le Conseil lors de l’audience ne saurait être considérée comme ayant été déposée tardivement. En effet, cette pièce s’inscrit dans le cadre des observations que le Conseil a été amené à présenter, lors de l’audience, en réponse au second mémoire en adaptation. Par conséquent, elle est recevable.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

48      Le requérant soutient que la motivation fournie par le Conseil ne satisfait pas à l’obligation qui incombe aux institutions de l’Union en vertu de l’article 296 TFUE. Plus précisément, le requérant fait valoir que la motivation retenue dans les actes attaqués est vague et générale, puisqu’elle n’indique pas les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles le Conseil aurait considéré que le requérant devait faire l’objet des mesures restrictives en cause. En outre, il ajoute que la motivation retenue par le Conseil serait une simple reprise des critères généraux d’inscription figurant dans la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836.

49      Par ailleurs, le requérant fait valoir que la motivation retenue par le Conseil présume abstraitement que le requérant tire profit ou soutient le régime syrien, sans aucune précision concrète.

50      Enfin, le requérant fait valoir l’existence d’erreurs dans les motifs d’inscription dans la mesure où, premièrement, il ne serait pas lui-même actionnaire de la société Zubedi et Kalai. L’actionnaire serait, en réalité, Castle Investment Holding ; deuxièmement, il n’aurait pas réalisé d’importants investissements dans l’industrie du bâtiment et, troisièmement, ni Kalai Industries Management ni Castle Investment Holding n’auraient eu d’activités dans le secteur du bâtiment.

51      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

52      À titre liminaire, le Tribunal considère que, dans la mesure où les arguments résumés au point 50 ci-dessus et soulevés à l’appui du deuxième moyen visent en réalité une erreur d’appréciation et non une violation de l’obligation de motivation, ils seront examinés dans le cadre de l’analyse du troisième moyen, dont l’objet est l’erreur d’appréciation. En effet, il convient de rappeler que l’obligation de motiver un acte constitue une forme substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. En effet, la motivation d’un acte consiste à exprimer formellement les motifs sur lesquels repose cet acte. Si ces motifs sont entachés d’erreurs, celles-ci entachent la légalité au fond dudit acte, mais non la motivation de celui-ci, qui peut être suffisante tout en exprimant des motifs erronés (voir arrêt du 5 novembre 2014, Mayaleh/Conseil, T‑307/12 et T‑408/13, EU:T:2014:926, point 96 et jurisprudence citée).

53      Ensuite, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver un acte faisant grief, telle que prévue à l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si l’acte est bien fondé ou s’il est éventuellement entaché d’un vice permettant d’en contester la validité devant le juge de l’Union et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte (voir arrêt du 7 décembre 2011, HTTS/Conseil, T‑562/10, EU:T:2011:716, point 32 et jurisprudence citée).

54      En ce qui concerne les mesures restrictives adoptées dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), il y a lieu de souligner que, dans la mesure où la personne concernée ne dispose pas d’un droit d’audition préalable à l’adoption d’une décision initiale d’inscription, le respect de l’obligation de motivation est d’autant plus important, puisqu’il constitue l’unique garantie permettant à l’intéressé, à tout le moins après l’adoption de cette décision, de se prévaloir utilement des voies de recours à sa disposition pour contester la légalité de ladite décision (arrêt du 15 novembre 2012, Conseil/Bamba, C‑417/11 P, EU:C:2012:718, point 51).

55      Partant, à moins que des considérations impérieuses touchant à la sûreté de l’Union ou de ses États membres ou à la conduite de leurs relations internationales ne s’opposent à la communication de certains éléments, le Conseil est tenu de porter à la connaissance d’une personne ou d’une entité visées par des mesures restrictives les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles il considère qu’elles devaient être adoptées. Il doit ainsi énoncer les éléments de fait et de droit dont dépend la justification légale des mesures concernées et les considérations qui l’ont amené à les prendre (arrêt du 9 juillet 2009, Melli Bank/Conseil, T‑246/08 et T‑332/08, EU:T:2009:266, point 144).

56      Cependant, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et au contexte dans lequel il a été adopté. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où le caractère suffisant d’une motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir, en ce sens, arrêt du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, points 139 et 140, et du 15 novembre 2012, Conseil/Bamba, C‑417/11 P, EU:C:2012:718, point 53).

57      En particulier, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir, en ce sens, arrêt du 16 novembre 2011, Bank Melli Iran/Conseil, C‑548/09 P, EU:C:2011:735, points 76, 86 et 87).

58      Il s’ensuit que, afin de déterminer si les actes en cause satisfont à l’obligation de motivation, il y a lieu de vérifier si le Conseil a exposé de manière compréhensible et suffisamment précise, dans les motifs énoncés dans ces actes, les raisons l’ayant conduit à considérer que l’inscription et le maintien du nom du requérant sur les listes en cause étaient justifiés au regard des critères juridiques applicables.

59      Tout d’abord, il y a lieu de considérer que le contexte dans lequel s’inscrivent les mesures restrictives prises à l’encontre du requérant était connu de celui-ci, ce que, d’ailleurs, il ne conteste pas. Il suffit de relever à cet égard que, dans la requête, le requérant expose avec précision l’évolution législative qui a conduit à sanctionner, dans un premier temps, les personnes responsables de la répression violente exercée sur la population civile en Syrie et les personnes qui leur sont liées puis, dans un second temps, les personnes bénéficiant des politiques menées par le régime ou soutenant celui-ci et, enfin, la catégorie des hommes et femmes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie.

60      Ensuite, en ce qui concerne les raisons pour lesquelles des mesures restrictives visant le requérant ont été adoptées et maintenues, il convient de relever que les motifs d’inscription du nom du requérant sont restés inchangés depuis l’adoption de la décision d’exécution 2019/87 et du règlement d’exécution 2019/85, puisqu’ils n’ont pas été modifiés lors de l’adoption de la décision 2019/806 et du règlement d’exécution 2019/798, ni lors de celle de la décision 2020/719 et du règlement d’exécution 2020/716. Ainsi, le Conseil a motivé l’inscription et le maintien de son nom sur les listes en cause de la manière suivante :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant réalisé d’importants investissements dans l’industrie du bâtiment, y compris une participation de 50 % dans Zubedi et Kalai LLC, qui construit la cité touristique de luxe “Grand Town” et avec qui le régime a passé une convention sur 45 ans en échange de 19-21 % de ses recettes. Il a, à ce titre, des liens avec Khaled al-Zubedi. Nader Kalai tire avantage du régime et/ou le soutient, par ses activités commerciales, notamment sa participation à la construction de Grand Town. »

61      Il convient de constater que, à la date d’adoption de la décision d’exécution 2019/87 et du règlement d’exécution 2019/85, il ressortait des articles 27 et 28 de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, que les personnes et entités visées par des mesures restrictives étaient, d’une part, les personnes et entités bénéficiant des politiques menées par le régime ou soutenant celui-ci et les personnes et entités qui leurs sont liées et, d’autre part, les femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie.

62      Compte tenu des critères d’inscription mentionnés au point 61 ci-dessus, il y a lieu de considérer que la motivation citée au point 60 ci-dessus permettait au requérant de comprendre à suffisance que son nom était inscrit sur les listes en cause au motif, d’une part, qu’il est un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie et au motif, d’autre part, qu’il bénéficie du régime syrien et le soutient.

63      En outre, la motivation citée au point 60 ci-dessus a permis au requérant de comprendre qu’il avait été inscrit et maintenu sur les listes en cause en raison, d’une part, des investissements importants qu’il a réalisés dans l’industrie du bâtiment, y compris sa participation dans le projet de construction de la cité touristique de luxe « Grand Town » ayant donné lieu à une convention passée avec le régime syrien et, à ce titre, de ses liens avec M. Khaled al-Zubedi ainsi que, d’autre part, du soutien au régime. Dès lors, il ne saurait soutenir que la motivation apportée par le Conseil est une simple reprise des critères généraux d’inscription figurant dans la décision 2013/255.

64      Il y a donc lieu de relever que les considérations figurant dans la motivation retenue par le Conseil à l’égard du requérant visent à décrire la situation concrète de ce dernier et sont dès lors suffisantes (voir, en ce sens, arrêt du 15 septembre 2016, Yanukovych/Conseil, T‑346/14, EU:T:2016:497, point 82 et jurisprudence citée). D’ailleurs, il ressort de la requête que le requérant a compris ce qui lui était reproché, puisqu’il indique lui-même que son nom a été ajouté aux listes en cause au motif qu’il aurait réalisé d’importants investissements dans l’industrie du bâtiment, qu’il apporterait son soutien au régime en le finançant en contrepartie de participation dans des sociétés sous contrôle du régime et permettant l’exploitation de terres expropriées.

65      Il convient d’ajouter que, les raisons du choix du Conseil ayant été clairement indiquées dans les actes attaqués, le Tribunal est en mesure d’en évaluer le bien-fondé.

66      Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que les actes attaqués sont motivés à suffisance de droit et qu’il convient d’écarter comme non fondé le deuxième moyen.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation des droits de la défense et du droit à un procès équitable

67      Le requérant soutient, en substance, que les actes attaqués violent ses droits de la défense et son droit à un procès équitable, tels que prévus à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») et aux articles 6 et 13 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »).

68      À cet égard, premièrement, il fait valoir que les mesures restrictives prévues par les actes attaqués constituent des sanctions pénales qui justifieraient, en tant que telles, l’application des garanties prévues en matière pénale par l’article 6 de la CEDH. Deuxièmement, il soutient, en substance, que, compte tenu du fait qu’il n’a pas été entendu avant l’adoption des actes attaqués, ses droits de la défense n’ont pu être exercés utilement. À cet égard, le requérant prétend que le droit d’être entendu équitablement requiert qu’il soit entendu avant l’adoption des actes attaqués. En outre, il évoque, dans ce contexte, l’existence d’enquêtes de nature pénale le concernant tant au Canada, où il réside, qu’en Autriche, où se trouve le centre de ses activités, pour des violations des sanctions adoptées par le Canada et l’Union contre la Syrie. En ce sens, il fait valoir qu’il a pu être entendu dans le cadre de ces enquêtes et que le Conseil aurait dû en faire de même avant d’adopter les actes attaqués. Troisièmement, il soutient que le Conseil aurait dû faire une appréciation in concreto des risques compromettant l’efficacité de la mesure au moment de son adoption. En effet, selon le requérant, il n’existait aucun risque qu’il compromette l’efficacité de la mesure en étant auditionné préalablement à son adoption, puisqu’il réside en dehors du territoire syrien.

69      Le Conseil conteste le bien-fondé des arguments du requérant.

70      S’agissant, en premier lieu, de l’argument tiré de ce que les mesures restrictives constituent des sanctions pénales, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les mesures restrictives de gel de fonds ne sont pas de nature pénale. En effet, les avoirs des intéressés n’étant pas confisqués en tant que produits d’un crime, mais gelés à titre conservatoire, ces mesures ne constituent pas une sanction pénale et elles n’impliquent, par ailleurs, aucune accusation de cette nature (voir arrêt du 9 décembre 2014, Sport-pari/Conseil, T‑439/11, non publié, EU:T:2014:1043, point 89 et jurisprudence citée).

71      Le requérant ne saurait donc soutenir que les mesures restrictives dont il fait l’objet constituent des sanctions pénales qui, en tant que telles, justifieraient le respect des garanties prévues en matière pénale par l’article 6 de la CEDH.

72      Le premier argument du requérant doit donc être rejeté.

73      S’agissant, en deuxième lieu, de l’argument tiré de ce que le requérant n’a pas été entendu avant l’adoption des actes attaqués, il y a lieu de rappeler que le respect des droits de la défense, qui est consacré à l’article 41, paragraphe 2, de la Charte, comporte le droit d’être entendu et le droit d’accès au dossier dans le respect des intérêts légitimes de la confidentialité (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 99 et jurisprudence citée).

74      L’article 52, paragraphe 1, de la Charte admet toutefois des limitations à l’exercice des droits consacrés par celle-ci, pour autant que la limitation concernée respecte le contenu essentiel du droit fondamental en cause et que, dans le respect du principe de proportionnalité, elle soit nécessaire et réponde effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 101 et jurisprudence citée).

75      Enfin, l’existence d’une violation des droits de la défense doit être appréciée en fonction des circonstances spécifiques de chaque cas d’espèce, notamment de la nature de l’acte en cause, du contexte de son adoption et des règles juridiques régissant la matière concernée (voir, en ce sens, arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 102 et jurisprudence citée).

76      C’est à la lumière de ces règles jurisprudentielles qu’il convient d’analyser le premier moyen.

77      Il convient encore de rappeler que le juge de l’Union distingue, d’une part, l’inscription initiale du nom d’une personne sur les listes en cause et, d’autre part, le maintien du nom de cette personne sur lesdites listes (arrêt du 30 avril 2015, Al-Chihabi/Conseil, T‑593/11, EU:T:2015:249, point 40).

78      Premièrement, en ce qui concerne la décision d’exécution 2019/87 et le règlement d’exécution 2019/85, inscrivant pour la première fois le nom du requérant sur les listes en cause, il convient de rappeler que, dans le cadre d’une procédure portant sur l’adoption de la décision d’inscrire ou de maintenir le nom d’une personne sur une liste figurant à l’annexe d’un acte portant mesures restrictives, le respect des droits de la défense et du droit à une protection juridictionnelle effective exige que l’autorité compétente de l’Union communique à la personne concernée les éléments dont dispose cette autorité à l’encontre de ladite personne pour fonder sa décision, afin que cette personne puisse défendre ses droits dans les meilleures conditions possibles et décider en pleine connaissance de cause s’il est utile de saisir le juge de l’Union. Lors de cette communication, l’autorité compétente de l’Union doit permettre à cette personne de faire connaître utilement son point de vue à l’égard des motifs retenus à son égard (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, points 111 et 112 ; voir également, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2006, Organisation des Modjahedines du peuple d’Iran/Conseil, T‑228/02, EU:T:2006:384, point 93).

79      Toutefois, le Conseil n’est pas tenu de communiquer au préalable à la personne ou à l’entité concernées les motifs sur lesquels cette institution entend fonder l’inclusion initiale de son nom dans les listes en cause. En effet, une telle mesure, afin de ne pas compromettre son efficacité, doit, par sa nature même, pouvoir bénéficier d’un effet de surprise et s’appliquer immédiatement. Dans un tel cas, il suffit, en principe, que l’institution procède à la communication des motifs à la personne ou à l’entité concernées et ouvre le droit à l’audition de celle-ci concomitamment avec ou immédiatement après l’adoption de la décision (arrêt du 21 décembre 2011, France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, EU:C:2011:853, point 61).

80      En l’espèce, la communication des motifs de l’inscription du requérant sur les listes en cause a fait l’objet d’un avis publié au Journal officiel de l’Union européenne du 22 janvier 2019.

81      En outre, par lettre du 27 février 2019, le représentant du requérant s’est opposé à l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause et a demandé au Conseil de lui communiquer les documents étayant ladite inscription, ce que le Conseil a fait par lettre du 21 mars 2019.

82      Dès lors, il y a lieu de constater que, en l’espèce, l’absence d’audition du requérant par le Conseil préalablement à l’inscription initiale de son nom sur les listes en cause n’a pas porté atteinte à ses droits de la défense.

83      Deuxièmement, en ce qui concerne, d’une part, la décision 2019/806 et le règlement d’exécution 2019/798 ainsi que, d’autre part, la décision 2020/719 et le règlement d’exécution 2020/716, ayant maintenu le nom du requérant sur les listes en cause, il convient de rappeler que, dans le cas d’une décision et d’un règlement d’exécution subséquents de gel de fonds par lesquels le nom d’une personne ou d’une entité figurant déjà dans les listes en cause est maintenu, un effet de surprise n’est plus nécessaire afin d’assurer l’efficacité de la mesure, de sorte que l’adoption d’une telle décision et d’un tel règlement d’exécution doit, en principe, être précédée d’une communication des éléments retenus à charge ainsi que de l’opportunité conférée à la personne ou à l’entité concernées d’être entendues (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2011, France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, EU:C:2011:853, point 62).

84      À cet égard, la Cour a souligné que l’élément de protection qu’offraient l’exigence de communication des éléments à charge et le droit de présenter des observations avant l’adoption de tels actes était fondamental et essentiel aux droits de la défense. Cela est d’autant plus vrai que les mesures restrictives en question ont une importante incidence sur les droits et les libertés des personnes et des groupes visés (arrêt du 21 décembre 2011, France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, EU:C:2011:853, point 64).

85      Toutefois, lorsque le maintien du nom de la personne ou de l’entité concernées sur une liste de personnes ou d’entités visées par des mesures restrictives est fondé sur les mêmes motifs que ceux qui ont justifié l’adoption de l’acte initial sans que de nouveaux éléments aient été retenus à son égard, le Conseil n’est pas tenu, pour respecter son droit d’être entendu, de lui communiquer les éléments retenus à charge (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 7 avril 2016, Central Bank of Iran/Conseil, C‑266/15 P, EU:C:2016:208, point 33 et jurisprudence citée).

86      En l’espèce, d’une part, il convient de constater que la décision 2019/806, le règlement d’exécution 2019/798, la décision 2020/719 et le règlement d’exécution 2020/716 n’ont pas modifié la motivation contenue dans les annexes de la décision d’exécution 2019/87 et du règlement d’exécution 2019/85 inscrivant le nom du requérant sur les listes en cause.

87      D’autre part, il n’a pas été allégué par le requérant que le Conseil s’est fondé sur de nouveaux éléments de preuve, lors de l’adoption de la décision 2019/806 et du règlement d’exécution 2019/798 ainsi que de la décision 2020/719 et du règlement d’exécution 2020/716. En outre, interrogé à l’audience à cet égard, le Conseil a déclaré qu’aucun nouvel élément de preuve n’avait été utilisé afin de fonder les quatre actes susmentionnés.

88      Dès lors, il ressort de ce qui précède que le Conseil, en ne communiquant pas au requérant, préalablement à l’adoption de la décision 2019/806 et du règlement d’exécution 2019/798, d’une part, ainsi que de la décision 2020/719 et du règlement d’exécution 2020/716, d’autre part, les éléments retenus à charge, n’a pas porté aux droits de la défense du requérant une atteinte qui justifierait l’annulation de ces actes pour autant qu’ils le concernent (voir, en ce sens, arrêt du 21 janvier 2015, Makhlouf/Conseil, T‑509/11, non publié, EU:T:2015:33, point 43 et jurisprudence citée). Le deuxième argument du requérant doit donc être rejeté.

89      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument du requérant selon lequel il aurait été entendu dans le cadre d’enquêtes pénales diligentées par les autorités canadiennes et les autorités autrichiennes pour des violations des sanctions adoptées par le Canada et l’Union contre la Syrie. En effet, il suffit de constater qu’une violation des sanctions adoptées à l’encontre de la Syrie relève d’un régime procédural qui diffère de celui d’une décision d’inscription ou d’une décision de maintien sur les listes de l’Union relatives à des mesures restrictives. L’argument du requérant est donc inopérant.

90      S’agissant, en troisième lieu, de l’argument tiré de ce que le Conseil aurait dû faire une appréciation in concreto des risques que le requérant puisse compromettre l’efficacité de la mesure restrictive au moment de son adoption, il suffit de constater que la circonstance que le requérant habite en dehors du territoire syrien n’est, en tout état de cause, aucunement une garantie que ce dernier ne compromettra pas l’efficacité de la mesure adoptée.

91      Le troisième argument du requérant doit donc être rejeté.

92      Dès lors, il y a lieu d’écarter comme non fondé le premier moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur d’appréciation

93      Ce moyen comprend un unique grief, dans le cadre duquel le requérant conteste être un homme d’affaires exerçant ses activités en Syrie. En outre, il estime qu’il n’est pas un homme d’affaires « influent » dans la mesure où il n’est pas impliqué dans le projet de construction de grande envergure « Grand Town » et n’a pas réalisé d’importants investissements. En tout état de cause, il soutient que le Conseil aurait dû démontrer qu’il soutenait ou qu’il tirait un avantage du régime syrien, ce qui n’est pas le cas.

94      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

95      À titre liminaire, il convient de rappeler que l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte exige notamment que le juge de l’Union s’assure que la décision par laquelle des mesures restrictives ont été adoptées ou maintenues, qui revêt une portée individuelle pour la personne ou l’entité concernées, repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui sous-tend ladite décision, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur la question de savoir si ces motifs, ou, à tout le moins, l’un d’eux considéré comme suffisant en soi pour soutenir cette même décision, sont étayés (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 119 et jurisprudence citée).

96      À cette fin, il incombe au juge de l’Union de procéder à cet examen en demandant, le cas échéant, à l’autorité compétente de l’Union de produire des informations ou des éléments de preuve, confidentiels ou non, pertinents aux fins d’un tel examen (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 120 et jurisprudence citée).

97      C’est en effet à l’autorité compétente de l’Union qu’il appartient, en cas de contestation, d’établir le bien-fondé des motifs retenus à l’encontre de la personne ou de l’entité concernées, et non à cette dernière d’apporter la preuve négative de l’absence de bien-fondé desdits motifs (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 121).

98      À cette fin, il n’est pas requis que ladite autorité produise devant le juge de l’Union l’ensemble des informations et des éléments de preuve inhérents aux motifs allégués dans l’acte dont il est demandé l’annulation. Il importe toutefois que les informations ou les éléments produits étayent les motifs retenus à l’encontre de la personne ou de l’entité concernées (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 122).

99      Si l’autorité compétente de l’Union fournit des informations ou des éléments de preuve pertinents, le juge de l’Union doit vérifier l’exactitude matérielle des faits allégués au regard de ces informations ou éléments et apprécier la force probante de ces derniers en fonction des circonstances de l’espèce et à la lumière des éventuelles observations présentées, notamment, par la personne ou l’entité concernées à leur sujet (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 124).

100    Conformément à la jurisprudence de la Cour, l’appréciation du bien-fondé d’une inscription doit être effectuée en examinant les éléments de preuve non de manière isolée, mais dans le contexte dans lequel ils s’insèrent (voir, en ce sens, arrêts du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑630/13 P, EU:C:2015:247, point 51, et du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 50).

101    Il convient de rappeler que les critères généraux d’inscription énoncés à l’article 27, paragraphe 1, et à l’article 28, paragraphe 1, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et repris, en ce qui concerne le gel des fonds, à l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828, prévoient que les personnes et entités bénéficiant des politiques menées par le régime ou soutenant celui-ci font l’objet de mesures restrictives. De même, l’article 27, paragraphe 2, sous a), et paragraphe 3, et l’article 28, paragraphe 2, sous a), et paragraphe 3, de ladite décision, repris, en ce qui concerne le gel des fonds, à l’article 15, paragraphe 1 bis, sous a), et paragraphe 1 ter, dudit règlement, disposent que les « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » font l’objet de mesures restrictives, sauf s’il existe des informations suffisantes indiquant qu’ils ne sont pas, ou ne sont plus, liés au régime ou qu’ils n’exercent aucune influence sur celui-ci ou qu’ils ne sont pas associés à un risque réel de contournement.

102    Par ailleurs, ainsi qu’il a été mentionné aux points 13 et 60 ci-dessus, les motifs suivants ont été retenus par le Conseil à l’égard du requérant :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant réalisé d’importants investissements dans l’industrie du bâtiment, y compris une participation de 50 % dans Zubedi et Kalai LLC, qui construit la cité touristique de luxe “Grand Town” et avec qui le régime a passé une convention sur 45 ans en échange de 19-21 % de ses recettes. Il a, à ce titre, des liens avec Khaled al- Zubedi. Nader Kalai tire avantage du régime et/ou le soutient, par ses activités commerciales, notamment sa participation à la construction de Grand Town. »

103    Il y a lieu d’en déduire que le requérant a été inscrit sur les listes en cause en raison, premièrement, de son statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie et, deuxièmement, de son lien avec le régime syrien. Autrement dit, l’inscription est fondée, d’une part, sur le critère défini au paragraphe 2, sous a), de l’article 27 et de l’article 28 de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et au paragraphe 1 bis, sous a), de l’article 15 du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828 (critère de l’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie), et, d’autre part, sur le critère défini au paragraphe 1 de l’article 27 et de l’article 28 de ladite décision et au paragraphe 1, sous a), de l’article 15 dudit règlement (critère d’association avec le régime).

104    À cet égard, il convient d’observer que, si le Conseil a affirmé, dans le cadre de ses écritures, que le requérant avait été inscrit sur les listes en cause sur la base du seul critère d’inscription énoncé à l’article 27, paragraphe 2, sous a), et à l’article 28, paragraphe 2, sous a), de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, il a, en revanche, déclaré, lors de l’audience, que le requérant avait été inscrit sur la base de trois critères d’inscription. En effet, outre les deux critères mentionnés au point 103 ci-dessus, le Conseil a indiqué que le requérant avait été inscrit en raison de ses liens avec M. al-Zubedi. Par conséquent, son inscription serait aussi fondée sur le critère défini à l’article 27, paragraphe 2, dernière phrase, et à l’article 28, paragraphe 2, dernière phrase, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et à l’article 15, paragraphe 1 bis, sous a), du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828 (personnes et entités qui sont liées aux personnes et entités relevant de l’un des critères d’inscription sur les listes de l’Union). Toutefois, dans le contexte des motifs d’inscription présentés par le Conseil dans les actes attaqués, la seconde phrase desdits motifs, selon laquelle le requérant « a, à ce titre, des liens avec Khaled al- Zubedi », ne peut être comprise qu’en référence à la première phrase qui, quant à elle, renvoie au critère de l’homme d’affaires influent. Par conséquent, le nom du requérant a bien été inscrit et maintenu sur les listes en cause sur le fondement des deux critères mentionnés au point 103 ci-dessus.

105    C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les arguments du requérant contestant sa qualification d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie.

106    Ainsi qu’il a été rappelé aux points 13 et 60 ci-dessus, le Conseil a identifié le requérant dans les actes attaqués comme étant l’« actionnaire majoritaire de Castle Investment Holding, [le] copropriétaire de Zubedi et [Kalai] LLC, [et le] président de Kalai Industries Management ».

107    Pour justifier l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause, le Conseil a fourni le document portant la référence WK 60/2019 INIT, du 10 janvier 2019, comportant des éléments d’information publiquement accessibles, à savoir des liens vers des sites Internet, des articles de presse et des captures d’écran provenant :

–        du site Internet de Kalai Industries Management, qui décrit, sur deux pages, consultées respectivement le 18 septembre et le 2 novembre 2018, le requérant comme étant le directeur de Kalai Industries Management et ladite société comme étant une société d’ingénieurs fondée en 1992 comprenant 400 employés ; en outre, cette société fonctionne en dehors de Damas et a des filiales au Moyen-Orient ;

–        du site Internet du Syrian Yacht Club, qui décrit, sur deux pages, consultées respectivement le 18 septembre et le 2 novembre 2018, le requérant comme étant le président du club de yacht syrien et ledit club comme étant le premier club nautique à avoir été inauguré en Syrie, en 2000 ;

–        du site Internet « Canadian Broadcasting Company News », qui mentionne que le requérant faisait l’objet d’une enquête pénale au Canada, où il réside, pour la violation des sanctions adoptées par ce pays contre la Syrie et qu’il aurait été vu en train de faire des affaires en Syrie ;

–        du site Internet « The Syria Report », qui mentionne, sur une page consultée le 2 novembre 2018, que le requérant est poursuivi au Canada pour avoir violé les sanctions adoptées par ce pays à l’encontre de la Syrie ; sur une autre page consultée le 2 novembre 2018, que le requérant détient 95 % des parts de Castle Investment Holding ; sur une autre page consultée le 4 octobre 2018, que la société Zubedi et Kalai a été créée le 17 décembre 2015 à Damas avec un capital de 3 millions de livres syriennes (SYP). En outre, cette société est détenue à 50 % par Castle Investment Holding et à 50 % par M. al-Zubedi ; dans un article du 7 mars 2017 disponible sur le même site Internet, que le requérant est l’ancien directeur général et membre du conseil d’administration de la compagnie de téléphonie Syriatel, qui est la plus grande société du pays et dont le propriétaire est M. Rami Makhlouf, le cousin de M. Bashar Al-Assad ; cet article indique également qu’il a quitté le conseil d’administration de la société en 2009 à la suite d’un conflit avec M. Makhlouf et a depuis lors investi dans le domaine de la construction et du tourisme ; enfin, il ressort de l’article que la société Zubedi et Kalai détient 40 % d’une coentreprise publique-privée de promotion immobilière dotée d’un capital de 50 milliards de SYP, soit 92 millions de dollars des États-Unis (USD), les autres partenaires étant l’entreprise étatique General Housing Establishment et Real Estate Bank, société du secteur public ; sur une page consultée le 9 novembre 2018, que le requérant détient 35 % de Salam Malls LLC par l’intermédiaire de Castle Investment Holding ; sur une page consultée le 4 octobre 2018, que la société Zubedi et Kalai s’est vu concéder un contrat par le gouvernement syrien pour la gestion de l’hôtel Ebla, situé dans la banlieue de Damas ;

–        du site Internet de Castle Investment Holding, consulté le 9 novembre 2018, qui présente le projet « Salam Mall » comme l’un de ses projets situé dans la banlieue de Damas ;

–        du site Internet « ATHR Press News », qui mentionne, dans un article du 27 septembre 2018, le projet « Grand Town » auquel M. al-Zubedi et le ministère du Tourisme syrien prennent part, le fait que M. al-Zubedi est le directeur général de Ibdaa Co. LLC et de ZK Development Company et que les premières fondations devaient être posées en octobre 2018 ;

–        du site Internet de ZK Holding, à savoir la société Zubedi et Kalai, consulté les 5 et 8 octobre 2018, qui présente le projet immobilier entourant l’hôtel Ebla, l’envergure du projet « Grand Town » ainsi que le projet résidentiel « EBDA’A Al Ghasula », décrit comme comportant aussi différentes structures de services, telles qu’un hôpital, une école et un centre commercial ;

–        de la chaîne Youtube de « ZK Grand Town », consultée le 5 octobre 2018, qui diffuse des vidéos détaillant les nombreuses installations du projet « Grand Town », telles qu’un terrain de golf, des villas de luxe, de multiples hôtels, un centre commercial ou encore un parc d’attractions ;

–        du site Internet « Open Democracy », qui, dans un article du 4 octobre 2018, fait référence aux liens existant entre le requérant et le régime et, dans un autre article du 4 octobre 2018, précise que la société Zubedi et Kalai est détenue par M. al-Zubedi et par le requérant, décrits comme deux hommes d’affaires disposant de connections au sein du régime ;

–        du site Internet « 11.11.11 », de Broederlijk delen et de Pax Christi Flanders, qui, dans un rapport intitulé « Syria : Reconstruction Calling ? » (Syrie : l’appel de la reconstruction ?), du 28 mars 2018, expose la stratégie de reconstruction du gouvernement syrien impliquant quelques hommes d’affaires, dont le requérant ;

–        du site Internet « Brookings Institution », qui a publié un rapport en date de juin 2018, intitulé « Beyond Fragility : Syria and the challenges of reconstruction in fierce states » (Au-delà de la fragilité : la Syrie et les défis de la reconstruction dans les États violents), qui mentionne les actes législatifs adoptés par le régime syrien afin de faire profiter certains hommes d’affaires de terrains expropriés ; le requérant est mentionné comme étant un proche du régime et comme participant au projet Marota City.

108    Dans un premier temps, le requérant conteste la fiabilité des éléments de preuve soumis par le Conseil.

109    Il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, l’activité de la Cour et du Tribunal est régie par le principe de libre appréciation des preuves et que le seul critère pour apprécier la valeur des preuves produites réside dans leur crédibilité. En outre, pour apprécier la valeur probante d’un document, il faut vérifier la vraisemblance de l’information qui y est contenue et tenir compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration, de son destinataire, et se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable (voir, en ce sens, arrêts du 27 septembre 2012, Shell Petroleum e.a./Commission, T‑343/06, EU:T:2012:478, point 161 et jurisprudence citée, et du 26 octobre 2016, Kaddour/Conseil, T‑155/15, non publié, EU:T:2016:628, point 85).

110    En l’espèce, il y a lieu de constater que le requérant se contente d’affirmer que le Conseil s’est fondé sur de « fausses preuves », de sorte que son argument n’est pas étayé.

111    En outre, lors de l’audience, le requérant a contesté que le site Internet de ZK Holding ait fait référence au site Internet de la société Zubedi et Kalai. À cet égard, il a fait valoir que le sigle ZK renvoyait à Zubedi Khaled. Cependant, cette affirmation, au demeurant non étayée, manque en fait. Au contraire, le Conseil a démontré, de manière circonstanciée, que ZK Holding faisait référence à la société Zubedi et Kalai.

112    En tout état de cause, s’agissant des articles de presse, il convient de relever qu’ils émanent de sources d’informations numériques d’origines variées, non seulement locales comme « The Syria Report », première source d’informations économiques, d’affaires et financières sur la Syrie, mais également étrangères comme « Open Democracy », site Internet politique établi au Royaume-Uni qui cherche à encourager le débat démocratique à travers le monde, la Broederlijk delen, agence belge d’aide au développement en Afrique et en Amérique latine, et la Pax Christi Flanders, section belge néerlandophone du mouvement catholique international pour la paix Pax Christi, « Canadian Broadcast Company News », département en langue anglaise de la Canadian Broadcasting Corporation, qui est le plus grand producteur d’émissions d’information au Canada et « Brookings Institution », groupe de réflexion réputé aux États-Unis. En outre, le Conseil a produit des pages provenant du site Internet de la société Zubedi et Kalai. Or, ces différentes sources relayent des éléments d’information qui se corroborent de sorte que, en l’absence d’élément dans le dossier susceptible de remettre en cause la fiabilité desdites sources, le Tribunal estime qu’il convient de leur reconnaître un caractère sensé et fiable, au sens de la jurisprudence rappelée au point 109 ci-dessus.

113    Dans un deuxième temps, le requérant reproche au Conseil de ne pas avoir fourni des éléments de preuve fiables et suffisamment précis alors que le contexte syrien aurait évolué. En ce sens, il affirme que, le conflit armé en Syrie ayant pris fin en 2017, le Conseil n’aurait plus rencontré de difficultés à se procurer des éléments de preuve fiables tels que, notamment, le contrat qui aurait été signé entre la société Zubedi et Kalai et les autorités syriennes dans le cadre du projet « Grand Town ».

114    À cet égard, il convient de relever que, selon la jurisprudence, l’appréciation du bien-fondé de l’inscription doit être effectuée en examinant les éléments de preuve non de manière isolée, mais dans le contexte dans lequel ils s’insèrent (voir, en ce sens, arrêts du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 102, et du 28 novembre 2013, Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft, C‑348/12 P, EU:C:2013:776, point 70). Dans le cadre de l’appréciation de la gravité de l’enjeu, qui fait partie du contrôle de proportionnalité des mesures restrictives en cause, il peut être tenu compte du contexte dans lequel s’inscrivent ces mesures, du fait qu’il était urgent d’adopter de telles mesures ayant pour objet de faire pression sur le régime syrien afin qu’il arrête la répression violente dirigée contre la population et de la difficulté d’obtenir des preuves plus précises dans un État en situation de guerre civile doté d’un régime de nature autoritaire (voir, en ce sens, arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑630/13 P, EU:C:2015:247, point 47).

115    En outre, il a été jugé que, compte tenu de la situation en Syrie, le Conseil satisfait à la charge de la preuve qui lui incombe s’il fait état devant le juge de l’Union d’un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants permettant d’établir l’existence d’un lien suffisant entre la personne sujette à une mesure de gel de ses fonds et le régime combattu (voir, en ce sens, arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑630/13 P, EU:C:2015:247, point 53).

116    En l’occurrence, le requérant allègue que l’organisation d’un forum international au mois d’août 2019, le « Damascus International Business Forum », réunissant des hommes d’affaires étrangers et, notamment, en provenance des Émirats Arabes unis, serait le signe que la situation en Syrie aurait évolué favorablement de sorte qu’il pourrait être considéré que la situation de guerre civile avait cessé.

117    À cet égard, il y a lieu de relever que, cet élément de preuve relayant un événement ayant eu lieu postérieurement à l’adoption de la décision d’exécution 2019/87, du règlement d’exécution 2019/85, de la décision 2019/806 et du règlement d’exécution 2019/798, il ne saurait être pris en compte par le Tribunal pour l’appréciation de leur légalité dès lors que, selon une jurisprudence constante, la légalité d’un acte de l’Union doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date où l’acte a été adopté (voir arrêts du 3 septembre 2015, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Commission, C‑398/13 P, EU:C:2015:535, point 22 et jurisprudence citée, et du 4 septembre 2015, NIOC e.a./Conseil, T‑577/12, non publié, EU:T:2015:596, point 112 et jurisprudence citée).

118    En revanche, étant antérieur à l’adoption de la décision 2020/719 et du règlement d’exécution 2020/716, le Tribunal doit en tenir compte pour l’appréciation de la légalité de ces actes. Il convient de remarquer que, au soutien de cette allégation, le requérant produit un unique document qui contient seulement une série de liens, rédigés en anglais et en arabe, vers des sites Internet. Néanmoins, il ressort de l’un de ces sites, à savoir la page du site Internet du « Syrian Observer », que ce forum a eu lieu le 30 août 2019 et qu’il a réuni des hommes d’affaires ainsi que des diplomates de nombreux pays, dont un pays de l’Union. Toutefois, même à reconnaître à cet élément de preuve un caractère sensé et fiable, il convient de constater que l’organisation ponctuelle d’un seul forum n’est pas à même de démontrer que le contexte syrien aurait changé d’une manière telle que le type de preuves apportées par le Conseil ne serait plus suffisant pour démontrer le bien-fondé des motifs d’inscription.

119    Dans un troisième temps, il convient donc de vérifier si l’ensemble des éléments de preuve soumis par le Conseil constitue un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants pour étayer le premier motif d’inscription. Les éléments de preuve soumis par le Conseil permettent de dresser les constats suivants.

120    En premier lieu, il ressort des éléments d’information provenant des sites Internet « Open Democracy », « The Syria Report », « ATHR Press News », « 11.11.11 » et « Kalai Industries Management » que le requérant est le propriétaire de Castle Investment Holding, le copropriétaire de la société Zubedi et Kalai, par l’intermédiaire de Castle Investment Holding, et le directeur de Kalai Industries Management. À cet égard, le requérant confirme être le directeur de Kalai Industries Management et le fait que Castle Investment Holding a investi la somme de 3 000 USD, soit 1 million et demi de SYP, dans la société Zubedi et Kalai. De ce fait, Castle Investment Holding détient 50 % des parts de cette société.

121    En revanche, le requérant conteste être un actionnaire de la société Zubedi et Kalai. En effet, l’investissement dans cette société aurait été réalisé par l’intermédiaire de Castle Investment Holding, qui est une entité juridique distincte de ses actionnaires.

122    Il convient effectivement de constater qu’il ressort de certains éléments de preuve produits par le Conseil que le requérant est le copropriétaire de la société Zubedi et Kalai, tandis que, selon d’autres, il aurait investi dans cette société par le biais de Castle Investment Holding. Il n’en demeure pas moins qu’il a été démontré que le requérant possédait 95 % des parts de Castle Investment Holding qui, elle-même, possède 50 % de la société Zubedi et Kalai, de sorte que, dans les faits, le Conseil pouvait considérer le requérant comme étant le copropriétaire de la société Zubedi et Kalai.

123    Néanmoins, lors de l’audience, le requérant a affirmé avoir cédé, en 2016, une grande partie des actions qu’il détenait dans Castle Investment Holding à ATAA, de sorte que sa participation serait passée de 95 à 30 %.

124    À cet égard, il convient de relever que l’argument du requérant relatif à la cession de ses actions dans Castle Investment Holding n’a été présenté que lors de l’audience et ne figure ni dans la requête, ni dans la réplique, ni dans les mémoires en adaptation mentionnés aux points 19 et 24 ci-dessus, ni même dans la lettre du 15 novembre 2019 par laquelle le requérant a, notamment, transmis, en annexes, le certificat établi le 5 novembre 2019 par B et la lettre du ministère du Commerce intérieur et de la Protection du consommateur syrien du 3 juillet 2016, desquels il ressort que le requérant a procédé à la cession dont il entend se prévaloir.

125    Or, il y a lieu de rappeler la jurisprudence selon laquelle la production de moyens, de griefs ou d’arguments nouveaux en cours d’instance est interdite à moins qu’ils ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure (voir arrêt du 11 juin 2015, McCullough/Cedefop, T‑496/13, non publié, EU:T:2015:374, point 76 et jurisprudence citée). Force est de constater que la cession ayant eu lieu, selon les propres dires du requérant, en 2016, elle ne saurait être considérée comme un élément de fait s’étant révélé pendant la procédure justifiant la production d’un argument nouveau.

126    En outre, le certificat établi le 5 novembre 2019 par B et la lettre du ministère du Commerce intérieur et de la Protection du consommateur syrien du 3 juillet 2016 ont été jugés irrecevables dans le cadre de la demande d’annulation de la décision d’exécution 2019/87, du règlement d’exécution 2019/85, de la décision 2019/806 et du règlement d’exécution 2019/798, en tant qu’ils visent le requérant (voir point 46 ci-dessus). Par conséquent, au regard de ces actes, l’argument, en plus d’être nouveau, doit être considéré comme étant non étayé et ne saurait, dès lors, prospérer.

127    Enfin, il convient de rappeler qu’il n’appartient normalement pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (voir, en ce sens, arrêts du 7 novembre 1997, Cipeke/Commission, T‑84/96, EU:T:1997:174, point 34 ; du 21 mars 2002, Joynson/Commission, T‑231/99, EU:T:2002:84, point 154, et du 14 décembre 2005, Honeywell/Commission, T‑209/01, EU:T:2005:455, point 57). Or, dès lors que l’information relative à la cession des parts du requérant dans Castle Investment Holding ne ressortait que d’annexes, l’argument qui y est relatif doit également être rejeté dans le cadre de l’analyse de la demande d’annulation de la décision 2020/719 et du règlement d’exécution 2020/716, en tant qu’ils visent le requérant, comme étant nouveau, car il a été présenté seulement lors de l’audience.

128    Ainsi, en ne soutenant pas, dès le stade de la requête ou dans le cadre des mémoires en adaptation, avoir cédé ses parts dans Castle Investment Holding et en n’ayant pas produit les éléments de preuve adéquats au soutien de son allégation en temps voulu, le requérant s’est privé de la possibilité de se prévaloir de ladite cession aux fins de contester les constats dressés aux points 120 et 122 ci-dessus. En tout état de cause, il y a lieu de remarquer que le requérant ne nie pas détenir des actions dans Castle Investment Holding.

129    Aussi, même à admettre que le Conseil a erronément considéré que le requérant avait directement investi dans la société Zubedi et Kalai, il n’en demeure pas moins que le requérant a, par le biais de Castle Investment Holding, société dans laquelle il est actionnaire, acquis 50 % des parts de la société Zubedi et Kalai.

130    En deuxième lieu, les éléments de preuve produits par le Conseil et provenant des sites Internet « The Syria Report », « ATHR Press News », « Open Democracy » et de la société Zubedi et Kalai démontrent que cette dernière a conclu un accord d’une durée de 45 ans avec le gouvernement syrien afin d’exploiter une superficie de 80 hectares située autour de l’hôtel Ebla, qui a été construit sur un terrain appartenant au ministère du Tourisme syrien. Ce projet, dénommé « Grand Town », est mené notamment par la société Zubedi et Kalai. Suivant cet accord, le gouvernement percevrait 19 % des revenus au cours des cinq premières années et 21 % au cours des années suivantes. En outre, cet accord comprend la gestion de l’hôtel Ebla. D’autres éléments, tels qu’une description des infrastructures qu’il est prévu de construire sur le site ainsi que la date envisagée de pose de la première pierre (octobre 2018), y sont mentionnés. Dès lors, il peut être déduit que le projet est concret. Or, ces éléments d’information n’ont pas été contestés à suffisance de droit par le requérant dans le cadre de ses écritures. Tout au plus ce dernier a-t-il fourni un rapport, du 27 août 2019, établi par un ingénieur, C, attestant de l’absence de travaux de construction sur le site du projet « Grand Town » à la date à laquelle ce rapport a été établi. Dans le cadre de la demande d’annulation de la décision 2020/719 et du règlement d’exécution 2020/716, en tant qu’ils visent le requérant, il convient également de mentionner le rapport d’expertise foncière, du 6 novembre 2019, établi par un autre ingénieur, A, duquel l’absence de travaux de construction à la date d’établissement dudit rapport ressort également. Cependant, ces deux éléments de preuve n’affectent pas les conclusions exposées ci-dessus, puisqu’ils ne remettent pas en cause l’existence du projet, même si sa mise en œuvre a pu être différée dans le temps. En tout état de cause, il n’est nullement requis que les travaux aient débuté pour satisfaire au critère d’inscription de la « femme ou homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie » qui est prévu à l’article 27, paragraphe 2, sous a), et à l’article 28 de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et à l’article 15, paragraphe 1 bis, sous a), du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828.

131    En troisième lieu, il découle des pages extraites des sites Internet « The Syria Report » et « ATHR Press News », mais également du site Internet de la société Zubedi et Kalai et de sa chaîne Youtube, que le requérant est impliqué dans d’importants projets de constructions résidentielles, dans la région de Damas, comme en témoignent le projet « EBDA’A Al Ghasula » et la participation à 40 % dans une coentreprise publique-privée de promotion immobilière.

132    En quatrième lieu, des preuves provenant des sites Internet « The Syria Report », de Castle Investment Holding et de la société Zubedi et Kalai, il ressort que le requérant est copropriétaire du centre commercial « Salam Mall », sa société Castle Investment Holding détenant 35 % des parts. Ce centre commercial fait partie intégrante du projet « Grand Town ».

133    Or, s’agissant plus précisément du projet « Grand Town », mentionné dans les motifs d’inscription du requérant sur les listes en cause, il ressort des éléments de preuve produits par le Conseil que ce projet, auquel participe le requérant notamment par le biais de la société Zubedi et Kalai, est de grande ampleur, puisqu'il vise, notamment, la construction de complexes hôteliers, de bâtiments résidentiels, de parcs d’attractions et d’un parcours de golf.

134    Le requérant avance plusieurs éléments pour contester sa participation au projet « Grand Town ».

135    Premièrement, le requérant nie exercer ses activités en Syrie. En ce sens, il fait valoir qu’il vit au Canada depuis 2009 et qu’il y a établi le centre de ses intérêts. Il ajoute qu’il n’aurait pas pu liquider son patrimoine existant avant son départ. Cette seule circonstance ne saurait cependant suffire à démontrer qu’il n’exerce aucune activité en Syrie. Le requérant reconnaît d’ailleurs avoir rencontré M. al-Zubedi, qui fait également l’objet de mesures restrictives de la part de l’Union, au Canada, dans la perspective d’investir dans des projets immobiliers tels que le centre commercial « Salam Mall » ainsi que dans des projets de réhabilitation de résidences touristiques. Cette rencontre a d’ailleurs, selon ses propres termes, donné lieu à la création de la société Zubedi et Kalai, dans laquelle M. al-Zubedi et le requérant sont impliqués.

136    Deuxièmement, le requérant affirme n’avoir aucun rôle décisionnel dans la société Zubedi et Kalai, M. al-Zubedi en assurant la direction ainsi que la communication en sa qualité de représentant. Force est toutefois de constater que cette allégation n’est aucunement étayée. En tout état de cause, le requérant est un actionnaire de Castle Investment Holding et a investi, par l’intermédiaire de cette dernière, dans la société Zubedi et Kalai, qui est chargée de mener à bien un projet immobilier de grande envergure, à savoir le projet « Grand Town ».

137    À cet égard, il ressort des éléments du dossier que la société Zubedi et Kalai s’est vu confier la réalisation du projet de construction « Grand Town ». À ce titre, il peut être conclu que le requérant est engagé dans ce projet. La circonstance que le requérant n’assure pas la direction de la société, à la supposer avérée, n’est pas de nature à modifier ce constat. En tout état de cause, il convient de relever, à l’instar du Conseil, qu’un investissement direct et personnel n’est pas requis pour qu’il soit satisfait au critère d’inscription de la « femme ou [de l’]homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie » qui est prévu à l’article 27, paragraphe 2, sous a), et à l’article 28, paragraphe 2, sous a), de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et à l’article 15, paragraphe 1 bis, sous a), du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828.

138    Troisièmement, le requérant soutient qu’il ne saurait être considéré comme un homme d’affaires influent dans la mesure où il n’aurait pas réalisé d’importants investissements. En effet, la somme de 3 000 USD investie dans la société Zubedi et Kalai par l’intermédiaire de Castle Investment Holding représenterait un faible montant. Cet argument doit être rejeté. En effet, il y a lieu de constater que le requérant percevra, en sa qualité d’actionnaire de Castle Investment Holding, une partie des gains générés par les activités de la société Zubedi et Kalai, dans le cadre d’un projet de grande ampleur.

139    Au vu de tout ce qui précède, il convient de rejeter, d’une part, l’argument du requérant selon lequel Castle Investment Holding n’aurait « aucun historique » dans l’industrie du bâtiment et, d’autre part, l’argument tiré de ce que le partenariat entre Castle Investment Holding et M. al-Zubedi avait seulement pour objet l’exploitation du centre commercial « Salam Mall », propriété privée appartenant au requérant, qui existait déjà en 2008 et qui n’aurait aucun lien avec les autorités syriennes.

140    Dès lors, il ressort de l’ensemble des preuves produites par le Conseil que le requérant est effectivement engagé dans divers projets de construction de grande ampleur, détient d’importantes participations et joue un rôle au sein de plusieurs sociétés. En particulier, la justification avancée au soutien du premier motif d’inscription, à savoir que le requérant est un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie dans la mesure où il a réalisé d’importants investissements dans l’industrie du bâtiment, y compris une participation indirecte de 50 % dans la société Zubedi et Kalai, qui construit la cité touristique de luxe « Grand Town » et avec qui le régime a passé une convention sur 45 ans en échange de 19 à 21 % de ses recettes, est corroborée dans sa totalité par les preuves soumises par le Conseil et n’a pas été valablement remise en cause par le requérant.

141    Il convient donc de conclure que le Conseil a apporté un faisceau d’indices, précis et concordants, susceptible de mettre en évidence le fait que le requérant est un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie.

142    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les autres arguments du requérant.

143    Premièrement, le requérant affirme, d’une part, que Kalai Industries Management, dont il est le directeur, n’a jamais exercé d’activités dans l’industrie du bâtiment et, d’autre part, qu’elle n’a exercé aucune activité pendant la guerre civile ayant eu lieu en Syrie, selon ses termes, de 2011 à 2017. Bien au contraire, sa société aurait abrité des personnes déplacées en raison du conflit, dans les bâtiments qu’elle occupe. Au soutien de cet argument, il produit des lettres de remerciement établies par diverses associations caritatives. Plus précisément, parmi les éléments de preuve fournis par le requérant figurent, d’une part, une lettre de remerciements, non datée, écrite par le chef de la section du Croissant-Rouge arabe syrien située dans la ville d’Al-Kiswah, d’autre part, une lettre datée du 1er juin 2019, portant le sceau de la République arabe syrienne et signée par le président de l’association caritative pour la santé de la ville d’Al-Kiswah et, enfin, deux attestations datant, respectivement, du 23 juin 2014 et du 16 juillet 2019, signées par le président de l’association « Alkiswa pour la charité ». Dans le cadre de la demande d’annulation de la décision 2020/719 et du règlement d’exécution 2020/716, il convient également de tenir compte des deux attestations établies par des associations caritatives, à savoir une attestation, non datée, signée par le président de l’association « Alkiswa pour la charité » et une lettre, du 4 novembre 2019, écrite par le chef de la section du Croissant-Rouge arabe syrien située dans la ville d’Al-Kiswah, ainsi que de la lettre du 4 novembre 2019, portant le sceau du ministère de l’Administration locale et de l’Environnement syrien et signée par le chef du conseil de la ville d’Al-Kiswah.

144    Ces arguments doivent être rejetés. En effet, en premier lieu, il convient de relever que le requérant se contente d’affirmer que sa société n’a aucune activité dans le domaine de l’industrie du bâtiment. Cependant, il ressort des éléments du dossier que Kalai Industries Management est une firme d’ingénierie qui fournit notamment des services dans le domaine de la construction. L’argument du requérant est donc privé de base factuelle.

145    En deuxième lieu, il convient de rappeler que le Conseil a inscrit pour la première fois le nom du requérant sur les listes en cause par la décision d’exécution 2019/87, du 21 janvier 2019, et par le règlement d’exécution 2019/85, de la même date. Force est de constater que le requérant se contente d’affirmer que Kalai Industries Management n’a pas exercé ses activités de 2011 à 2017. Partant, cet argument est sans incidence sur la décision du Conseil d’inscrire, en date du 21 janvier 2019, le nom du requérant en sa qualité de directeur de Kalai Industries Management, puisqu’il ne peut être exclu que sa société a pu reprendre ses activités entre 2017 et le 21 janvier 2019. Cela vaut, a fortiori, pour les actes maintenant l’inscription de son nom, à savoir la décision 2019/806, le règlement d’exécution 2019/798, la décision 2020/719 et le règlement d’exécution 2020/716. Or, le requérant n’apporte aucun élément de preuve ni aucun commencement de preuve visant à établir que Kalai Industries Management n’a exercé aucune activité durant cette période. En tout état de cause, il doit être relevé que le requérant ne conteste pas être le propriétaire de Kalai Industries Management et que cette société existe bien, ce qui ressort d’ailleurs des éléments de preuve pris en considération par le Conseil au moment de l’adoption des actes attaqués.

146    En troisième lieu, il convient de relever que, même s’il ressort de l’ensemble de ces documents que le requérant a effectivement apporté son soutien à l’activité humanitaire des associations susmentionnées, il ne peut en être déduit que sa société n’a exercé aucune activité durant la période en cause. En effet, d’une part, des éléments de preuve fournis par le requérant et recevables dans le cadre de l’analyse de la demande d’annulation de la décision d’exécution 2019/87, du règlement d’exécution 2019/85, de la décision 2019/806 et du règlement d’exécution 2019/798, seule la lettre écrite par le chef de la section du Croissant-Rouge arabe syrien fait état de l’accueil de 450 familles réfugiées sur des « terrains » appartenant à Kalai Industries Management et non dans les bâtiments qu’elle occupe, ce qui n’empêchait donc pas la société d’exercer son activité. D’autre part, il ressort de deux attestations établies respectivement par le chef de la section du Croissant-Rouge arabe syrien, susmentionné, et par le chef du conseil de la ville d’Al-Kiswa, recevables dans le cadre de l’analyse de la demande d’annulation de la décision 2020/719 et du règlement d’exécution 2020/716, que, d’une part, les 450 familles susmentionnées et, d’autre part, 1 000 personnes auraient été hébergées au siège de Kalai Industries Management. À cet égard, le Tribunal relève, tout d’abord, une contradiction entre les deux attestations établies par le chef du Croissant-Rouge arabe syrien qui mentionnent tantôt l’hébergement de 450 familles sur des « terrains », tantôt au siège de la société. En outre et, en tout état de cause, le Tribunal ne peut déduire de tous ces documents que l’ensemble des structures détenues par Kalai Industries Management a été occupé durant la période en cause.

147    Les auteurs de trois autres lettres présentées par le requérant adressent soit un remerciement individuel au requérant pour le soutien qu’il leur aurait apporté, soit un remerciement à Kalai Industries Management pour avoir fourni des logements et de la nourriture aux réfugiés des banlieues de Damas jusqu’en 2017. Toutefois, il ne peut être déduit de ces éléments de preuve que Kalai industries Management aurait cessé ses activités pendant la période en cause.

148    En quatrième lieu, le Tribunal constate, à l’instar du Conseil, que l’exercice d’une activité caritative par le requérant est sans incidence sur sa qualité d’homme d’affaires influent (voir, en ce sens, arrêt du 18 mai 2017, Makhlouf/Conseil, T‑410/16, non publié, EU:T:2017:349, points 89 à 92). Du reste, le requérant ne fait pas valoir qu’il se serait retiré du monde des affaires pour se consacrer à des activités caritatives.

149    En cinquième lieu, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, il suffit qu’au moins un des motifs retenus par le Conseil pour maintenir le nom de la partie requérante dans la liste litigieuse soit valable pour que ce maintien soit légalement justifié (voir, en ce sens, arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑630/13 P, EU:C:2015:247, point 46 et jurisprudence citée). Or, même à considérer que c’est à tort que le Conseil a estimé que Kalai Industries Management avait exercé ses activités durant la période considérée, le reste des éléments de preuve est suffisant pour étayer la conclusion selon laquelle le requérant est un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie.

150    Deuxièmement, le requérant prétend que le Syrian Yacht Club, situé dans la ville de Lattaquié (Syrie), n’aurait plus bénéficié d’une concession pour l’exploitation du site du port de cette ville depuis 2011. Il produit, au soutien de cette allégation, un arrêt de la Cour administrative de justice du 21 août 2016 et un arrêt du Conseil d’État de la République arabe syrienne du 23 juillet 2018 dont il ressort que la concession octroyée au Syrian Yacht Club de Lattaquié a été annulée. En outre, le requérant a présenté, le 15 novembre 2019, une attestation établie par le directeur général des ports du ministère du Transport syrien dont il ressort que le Syrian Yacht Club n’a plus exercé aucune activité touristique depuis l’année 2011. Toutefois, et en tout état de cause, même à supposer que ces allégations soient fondées, cela n’empêcherait pas que le requérant soit considéré comme étant un homme d’affaires influent.

151    Troisièmement, le requérant soutient que la société Zubedi et Kalai ne bénéficie d’aucune concession pour la construction du projet Marota City. Il ajoute que le Conseil ne se serait basé que sur les informations découlant d’un seul document, à savoir l’article publié sur le site Internet « Open Democracy ». Il est certes vrai que la mention de la participation du requérant dans le projet de construction Marota City ne ressort que d’un seul des documents produits par le Conseil, à savoir l’article publié sur le site Internet « Brookings Institution », de sorte que cela n’est pas suffisant pour confirmer ce fait. Néanmoins, même à considérer que c’est à tort que le Conseil aurait pu estimer que le requérant était impliqué dans ce projet, le reste des éléments de preuve est suffisant pour étayer la conclusion selon laquelle le requérant est un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie. En tout état de cause, il convient de constater que les motifs d’inscription du nom du requérant sur les listes en cause ne mentionnent pas que la société Zubedi et Kalai bénéficie d’une concession pour la construction du projet Marota City.

152    Enfin, quatrièmement, le requérant soutient, en substance, que le Conseil était tenu de démontrer l’existence d’un lien entre lui et le régime syrien.

153    À cet égard, il convient de relever que la jurisprudence a pu évoluer en fonction du contexte législatif existant au moment de l’adoption des actes attaqués. En particulier, l’arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil (C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 52), qui faisait obligation au Conseil d’apporter devant le juge de l’Union un faisceau d’indices précis et concordants permettant d’établir l’existence d’un lien suffisant entre la personne sujette à une mesure de gel de ses fonds et le régime combattu s’inscrivait dans un contexte législatif spécifique, à savoir celui résultant de la décision 2013/255 avant sa modification par la décision 2015/1836, où les seuls critères qui existaient pour l’inscription du nom d’une personne sur les listes en cause étaient, précisément, les liens étroits entretenus avec le régime syrien, le soutien à ce dernier ou le bénéfice tiré de celui-ci.

154    Toutefois, en l’espèce, l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause a eu lieu dans un contexte législatif différent, à savoir celui résultant de la décision 2013/255 telle que modifiée par la décision 2015/1836. À ce titre, la décision 2015/1836 a notamment introduit comme critère d’inscription objectif, autonome et suffisant celui des « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie », de sorte que le Conseil n’est plus tenu de démontrer l’existence d’un lien entre cette catégorie de personnes et le régime syrien, au sens où l’entendait la décision 2013/255 avant sa modification, ni entre cette catégorie de personnes et le soutien apporté à ce régime ou le bénéfice tiré de ce dernier, étant donné qu’être une femme ou un homme d’affaires influents exerçant ses activités en Syrie suffit pour l’application des mesures restrictives en cause à une personne [voir, en ce sens, arrêts du 11 septembre 2019, HX/Conseil, C‑540/18 P, non publié, EU:C:2019:707, point 38 ; du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, points 55 et 56 (non publiés), et ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil, T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589, point 56].

155    En ce sens, le Tribunal a considéré qu’il pouvait être déduit du critère relatif à la qualité de « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » une présomption réfragable de lien avec le régime syrien (voir, en ce sens, arrêt du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, point 106, et ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil, T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589, point 60). Cette présomption trouve à s’appliquer dès lors que le Conseil est en mesure de démontrer que non seulement la personne est une femme ou un homme d’affaires exerçant ses activités en Syrie, mais aussi qu’elle peut être qualifiée d’influente. En effet, ainsi qu’il ressort des termes du considérant 6 de la décision 2015/1836, tels que rappelés au point 9 ci-dessus, c’est l’influence que cette catégorie de personnes est susceptible d’exercer sur le régime syrien que le Conseil vise à exploiter en les poussant, par l’intermédiaire des mesures restrictives qu’il adopte à leur égard, à faire pression sur le régime syrien pour qu’il modifie sa politique de répression. Ainsi, dès lors que le Conseil est parvenu à démontrer l’influence qu’une femme ou un homme d’affaires est susceptible d’exercer sur ledit régime, le lien entre ladite personne et le régime syrien est présumé.

156    En outre, il y a lieu de rappeler que le respect des règles relatives à la charge et à l’administration de la preuve en matière de mesures restrictives par le Tribunal implique que ce dernier respecte le principe énoncé par une jurisprudence constante, mentionnée au point 109 ci-dessus, et rappelé par la Cour, en dernier lieu, dans l’arrêt du 11 septembre 2019, HX/Conseil (C‑540/18 P, non publié, EU:C:2019:707, points 48 à 50), selon lequel, en substance, la charge de la preuve incombe à l’institution en cas de contestation du bien-fondé des motifs d’inscription. La Cour a ainsi jugé que la charge de la preuve de l’existence d’informations suffisantes, au sens de l’article 27, paragraphe 3, et de l’article 28, paragraphe 3, de la décision 2013/255, indiquant que le requérant n’était pas, ou n’était plus, lié au régime syrien, qu’il n’exerçait aucune influence sur celui-ci et qu’il n’était pas associé à un risque réel de contournement des mesures restrictives adoptées à l’égard de ce régime n’incombait pas au requérant (voir, en ce sens, arrêts du 14 juin 2018, Makhlouf/Conseil, C‑458/17 P, non publié, EU:C:2018:441, point 86, et du 11 septembre 2019, HX/Conseil, C‑540/18 P, non publié, EU:C:2019:707, points 50 et 51).

157    Par conséquent, il ne saurait être imposé à la partie requérante un niveau de preuve excessif aux fins de renverser la présomption de lien avec le régime syrien. Ainsi, celle-ci doit être considéré comme ayant réussi à renverser la présomption de lien au régime syrien si elle fait valoir des arguments ou des éléments susceptibles de remettre sérieusement en cause la fiabilité des éléments de preuve soumis par le Conseil ou leur appréciation, notamment au regard des conditions posées par l’article 27, paragraphe 3, et l’article 28, paragraphe 3, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, ou si elle produit devant le juge de l’Union un faisceau d’indices de l’inexistence ou de la disparition du lien avec le régime syrien, ou de l’absence d’influence sur ledit régime, ou de l’absence d’association avec un risque réel de contournement des mesures restrictives, conformément à l’article 27, paragraphe 3, et à l’article 28, paragraphe 3, de cette décision.

158    En l’espèce, force est de constater que le requérant nie l’existence de son lien avec le régime syrien et son influence sur celui-ci. Il n’est toutefois pas parvenu à renverser ladite présomption.

159    Tout d’abord, il y a lieu de rappeler que les parties s’accordent sur le fait que le requérant était le partenaire en affaires de M. Makhlouf, qui est un homme d’affaires de nationalité syrienne, assurant notamment la fonction de président de la société Syriatel, principal opérateur de téléphonie mobile en Syrie. M. Makhlouf est également le cousin du président Bashar Al-Assad. À ce titre, il fait l’objet de mesures restrictives de l’Union. Il ressort des éléments du dossier que, en 2009, un conflit a éclaté entre les deux hommes, à la suite duquel le requérant s’est établi au Canada avec sa famille.

160    Par ailleurs, le Tribunal observe que le requérant cherche à se prévaloir de ce conflit afin de renverser la présomption de lien avec le régime syrien Néanmoins, dans la mesure où il a été établi que la justification avancée au soutien du premier motif d’inscription, à savoir que le requérant est un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie dans la mesure où il a réalisé d’importants investissements dans l’industrie du bâtiment, est fondée, il peut être conclu que le conflit avéré entre MM. Kalai et Makhlouf n’influence pas la capacité du requérant de faire du commerce dans ce secteur. En outre, les motifs d’inscription du nom du requérant sur les listes en cause mentionnent ses liens avec M. al-Zubedi, qui est copropriétaire de la société Zubedi et Kalai, et non avec M. Makhlouf. Dès lors, il résulte de ce qui précède que cet élément factuel ne peut avoir d’incidence sur la présomption de lien avec le régime syrien et donc sur la légalité des actes attaqués.

161    Il convient donc de relever que le requérant n’a présenté aucun argument ni élément permettant de douter de la fiabilité des éléments de preuve soumis par le Conseil ou de l’appréciation qu’il convenait d’en faire, ni n’a fait état d’aucun indice concret permettant au Tribunal de considérer qu’il n’existait pas, ou plus, de lien entre lui et le régime syrien, qu’il n’exerçait aucune influence sur ce régime, ni qu’il était étranger à tout risque réel de contournement des mesures restrictives.

162    Au vu de tout ce qui précède, le Tribunal considère que le motif d’inscription du nom du requérant sur les listes en cause en raison de son statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie est suffisamment étayé, de sorte que l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause est bien fondée. Le grief unique doit donc être rejeté.

163    Dès lors, il y a lieu de rejeter le troisième moyen comme non fondé.

 Sur les quatrième et cinquième moyens, tirés d’une violation du principe de proportionnalité et du droit de propriété

164    À l’appui de ses quatrième et cinquième moyens, qu’il convient d’examiner ensemble, premièrement, le requérant fait valoir que les mesures adoptées à son égard sont disproportionnées au regard de sa situation personnelle. En effet, compte tenu du fait qu’il réside au Canada, il ne pourrait apporter un soutien au régime syrien. Plus précisément, le requérant observe que le centre de ses intérêts se trouve en dehors de la Syrie et qu’aucun soutien financier ou logistique au régime syrien ne saurait être tiré de la détention de parts dans des sociétés que le requérant détiendrait de longue date.

165    Deuxièmement, il estime que les actes attaqués portent une atteinte injustifiée et disproportionnée à son droit de propriété. En outre, il ajoute que la limitation de l’exercice de son droit de propriété n’est possible que si cette limitation est prévue par la loi, si elle poursuit un objectif d’intérêt général et si elle est nécessaire et proportionnée à cet objectif au sens de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte. Or, selon le requérant, la limitation de son droit de propriété ne serait pas justifiée et proportionnée aux objectifs poursuivis, dans la mesure où il ne pourrait disposer des fonds résultant des activités commerciales qu’il aurait développées en Europe et qui n’auraient aucune incidence sur la situation en Syrie.

166    Le Conseil conteste les arguments du requérant.

167    Il y a lieu de rappeler que le droit de propriété fait partie des principes généraux de droit de l’Union et se trouve consacré à l’article 17 de la Charte [voir arrêt du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, point 75 (non publié) et jurisprudence citée].

168    Or, selon une jurisprudence constante, le droit de propriété ne jouit pas, dans le droit de l’Union, d’une protection absolue, mais doit être pris en considération par rapport à sa fonction dans la société. Par conséquent, des restrictions peuvent être apportées à l’usage de ce droit, à condition que ces restrictions répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union et ne constituent pas, au regard du but poursuivi, une intervention démesurée et intolérable qui porterait atteinte à la substance même du droit ainsi garanti [voir arrêt du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, point 76 (non publié) et jurisprudence citée].

169    En outre, il résulte d’une jurisprudence constante que le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union et qui est repris à l’article 5, paragraphe 4, TUE, exige que les moyens mis en œuvre par une disposition du droit de l’Union soient de nature à réaliser les objectifs légitimes poursuivis par la réglementation concernée et n’aillent pas au‑delà de ce qui est nécessaire pour les atteindre [voir arrêt du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, point 77 (non publié) et jurisprudence citée].

170    En l’espèce, le gel de fonds et de ressources économiques imposé par les actes attaqués constitue une mesure conservatoire qui n’est pas censée priver les personnes concernées de leur propriété. Toutefois, les actes attaqués entraînent incontestablement une restriction de l’usage du droit de propriété [voir, en ce sens, arrêt du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, point 78 (non publié) et jurisprudence citée].

171    En ce qui concerne le caractère adéquat des mesures restrictives, telles que les actes attaqués, au regard d’un objectif d’intérêt général aussi fondamental pour la communauté internationale que la protection des populations civiles, il apparaît que le gel de fonds, d’avoirs financiers et d’autres ressources économiques ainsi que l’interdiction d’entrer sur le territoire de l’Union concernant des personnes identifiées comme étant impliquées dans le soutien du régime syrien ou comme des femmes ou hommes d’affaires influents en Syrie ne sauraient, en tant que tels, passer pour inadéquats [voir, en ce sens, arrêt du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, point 79 (non publié) et jurisprudence citée].

172    En ce qui concerne le caractère nécessaire des mesures restrictives, telles que les actes attaqués, il convient de constater que des mesures alternatives et moins contraignantes, telles qu’un système d’autorisation préalable ou une obligation de justification a posteriori de l’usage des fonds versés, ne permettent pas aussi efficacement d’atteindre l’objectif poursuivi, à savoir l’exercice d’une pression sur les soutiens du régime syrien ou sur les femmes ou hommes d’affaires influents en Syrie, notamment eu égard à la possibilité de contourner les restrictions imposées [voir arrêt du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, point 80 (non publié) et jurisprudence citée].

173    De plus, il doit être rappelé que l’article 28, paragraphes 3 à 11, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et les articles 16 à 18 du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828, prévoient la possibilité, d’une part, d’autoriser l’utilisation de fonds gelés pour faire face à des besoins essentiels ou satisfaire à certains engagements et, d’autre part, d’accorder des autorisations spécifiques permettant de dégeler des fonds, d’autres avoirs financiers ou d’autres ressources économiques.

174    En l’espèce, il y a lieu de remarquer, ainsi qu’il a été relevé aux points 90 et 135 ci-dessus, que la circonstance selon laquelle le requérant habite en dehors de la Syrie ne saurait suffire à démontrer que celui-ci ne peut compromettre l’efficacité des mesures restrictives en cause et qu’il n’exerce aucune activité en Syrie.

175    En ce qui concerne le préjudice causé au requérant, il est vrai que le droit de propriété de celui-ci est restreint par les actes attaqués, dès lors qu’il ne peut notamment pas disposer des fonds lui appartenant qui sont situés sur le territoire de l’Union ou transférer des fonds lui appartenant vers l’Union, sauf en vertu d’une autorisation particulière.

176    Toutefois, les inconvénients causés au requérant ne sont pas démesurés par rapport à l’importance de l’objectif de la protection des populations civiles en Syrie, poursuivi par les actes attaqués. De plus, ces actes prévoient la possibilité d’autoriser l’utilisation de fonds gelés pour faire face à des besoins essentiels ou satisfaire à certains engagements et de réviser l’inscription sur la liste litigieuse périodiquement en vue d’assurer que les noms des personnes et entités ne répondant plus aux critères pour figurer sur cette liste soient radiés.

177    Il s’ensuit que, étant donné l’importance primordiale de la protection des populations civiles en Syrie et les dérogations envisagées par les actes attaqués, les restrictions aux droits de propriété du requérant causées par ces actes ne sont pas disproportionnées.

178    Au vu de tout ce qui précède, il convient de conclure que les quatrième et cinquième moyens doivent être rejetés comme étant non fondés. 

179    Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’aucun des moyens avancés par le requérant n’est fondé, de sorte qu’il y a lieu de rejeter les conclusions en annulation.

 Sur les conclusions en indemnité

180    Le requérant prétend que les mesures restrictives imposées par les actes attaqués lui ont causé de graves préjudices sur le plan tant matériel que moral. En effet, le gel de ses fonds aurait entraîné une indisponibilité et une perte non négligeable de ses revenus issus de ses activités professionnelles exercées en Europe ainsi que la perte d’importants contrats qui étaient en cours de négociation. En outre, son inscription sur les listes en cause nuirait à sa réputation professionnelle à cause de la méfiance qu’elle suscite auprès de ses partenaires d’affaires. En conséquence, le requérant estime que son préjudice s’élève à la somme de 2 000 000 euros. Il ajoute que cette somme est susceptible d’augmenter du fait de la persistance de la cause de ces préjudices.

181    Le Conseil conclut au rejet de la demande. En outre, le Conseil a indiqué que le Tribunal n’était pas compétent pour statuer sur la demande en réparation du requérant, pour autant que cette demande viserait à obtenir la réparation du prétendu dommage découlant de l’adoption de la décision d’exécution 2019/87 et de celle de la décision 2019/806. En effet, il fait valoir, en substance, que le Tribunal n’est pas compétent pour statuer sur une action en indemnité contre l’Union concernant des dommages causés du fait de l’adoption d’une décision relevant de la politique étrangère et de sécurité commune.

182    Dans l’argumentation avancée à l’appui de ses conclusions en indemnité, le requérant se réfère aux « mesures restrictives en cause » adoptées par le Conseil en raison desquelles il aurait subi des faits dommageables.

183    À cet égard, il y a lieu de relever que le préjudice prétendument subi par le requérant, tel qu’il est invoqué dans ses écritures, découle de l’application des mesures litigieuses et trouve, dès lors, son origine dans l’adoption du règlement d’exécution 2019/85, du règlement d’exécution 2019/798 et du règlement d’exécution 2020/716.

184    Il convient ensuite de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union du fait d’un comportement illicite de ses organes, au sens de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué. Dans la mesure où ces trois conditions d’engagement de la responsabilité sont cumulatives, l’absence de l’une d’entre elles suffit pour rejeter un recours indemnitaire, sans qu’il soit dès lors nécessaire d’examiner les autres conditions (arrêt du 7 décembre 2010, Fahas/Conseil, T‑49/07, EU:T:2010:499, points 92 et 93).

185    S’agissant du préjudice prétendument subi en raison de l’adoption des règlements d’exécution 2019/85, 2019/798 et 2020/716, il ressort des constatations exposées en ce qui concerne les conclusions en annulation que l’inscription du nom du requérant sur la liste en question n’est pas entachée d’illégalité. Partant, l’une des conditions mentionnées au point 181 ci‑dessus faisant défaut, les conclusions en indemnité doivent être rejetées.

186    Il résulte de ce qui précède que la demande d’indemnité doit être rejetée comme étant non fondée, sans qu’il y ait lieu de se prononcer sur l’exception d’incompétence soulevée par le Conseil à l’encontre de la demande indemnitaire prétendument fondée sur la décision d’exécution 2019/87 et la décision 2019/806.

 Sur la demande de mesures d’instruction

187    Le requérant demande au Tribunal, à titre de mesure d’instruction, de procéder à l’audition de Me M. Schlögl, avocat au barreau de Vienne, s’agissant de l’abandon des poursuites pénales engagées contre lui par le parquet de Vienne pour violations des sanctions adoptées par l’Union à l’encontre de la Syrie.

188    Le Conseil estime que cette demande doit être rejetée.

189    À cet égard, il convient de relever que, selon une jurisprudence constante, c’est au Tribunal qu’il appartient d’apprécier l’utilité de mesures d’instruction, au sens des articles 88 et suivants du règlement de procédure, aux fins de la solution du litige (voir arrêt du 24 octobre 2018, Nova/Commission, T‑299/15, non publié, EU:T:2018:713, point 194 et jurisprudence citée).

190    Premièrement, le Tribunal observe, ainsi que cela a été rappelé au point 70 ci-dessus, que les mesures restrictives adoptées par l’Union à l’encontre de la Syrie ne sont pas de nature pénale, les avoirs des intéressés étant gelés à titre conservatoire et non confisqués en tant que produit du crime. Deuxièmement, le Tribunal relève que l’inscription du requérant sur les listes en cause est fondée, ainsi que cela a été constaté au point 103 ci-dessus, d’une part, sur le critère défini au paragraphe 2, sous a), de l’article 27 et de l’article 28 de la décision 2013/255 et au paragraphe 1 bis, sous a), de l’article 15 du règlement no 36/2012 (critère de l’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie) et, d’autre part, sur le critère défini au paragraphe 1 de l’article 27 et de l’article 28 de la décision 2013/255 et au paragraphe 1, sous a), de l’article 15 du règlement no 36/2012 (critère d’association avec le régime). Il convient d’en conclure que le requérant n’a pas été inscrit sur les listes en cause au motif qu’il aurait violé les mesures restrictives décidées par l’Union, qui ne constitue d’ailleurs pas un critère d’inscription sur les listes de mesures restrictives de l’Union. Dès lors, il résulte de ce qui précède que la mesure d’instruction sollicitée par le requérant n’est pas nécessaire pour statuer sur le présent litige.

191    Il convient d’ajouter que, compte tenu des informations fournies par les parties dans le cadre de la procédure devant le Tribunal, celui-ci se considère comme suffisamment informé de tous les éléments essentiels et pertinents du cas d’espèce.

192    Il n’y a donc pas lieu de recourir à la mesure d’instruction sollicitée par le requérant. Il convient toutefois de relever que le représentant du requérant était accompagné par Me M. Schlögl à l’audience de plaidoiries. Ce dernier n’a pas été entendu comme témoin, puisque le Tribunal ne l’avait pas convoqué à cet effet. En revanche, le Tribunal a, en vertu du point 196, troisième tiret, des dispositions pratiques d’exécution du règlement de procédure, entendu ce dernier et en a pris acte au procès-verbal de l’audience.

193    Compte tenu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

194    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

195    En l’espèce, dès lors que le requérant a succombé, il convient de le condamner aux dépens, le Conseil ayant conclu en ce sens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Nader Kalai supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le Conseil de l’Union européenne.

Gervasoni

Madise

Martín y Pérez de Nanclares

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 2 décembre 2020.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

M. Van der Woude


*      Langue de procédure : le français.