Language of document : ECLI:EU:T:2019:887

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

19 décembre 2019 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative MIM NATURA – Enregistrements internationaux verbal et figuratif et marque nationale verbale antérieurs MM, MM et MUMM – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑589/18,

Vins el Cep, SL, établie à Sant Sadurní d’Anoia (Espagne), représentée par Mes J. Vázquez Salleras et G. Ferrer Gonzalvez, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. E. Markakis et H. O’Neill, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Rotkäppchen-Mumm Sektkellereien GmbH, établie à Eltville (Allemagne), représentée par Me W. Berlit, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 12 juillet 2018 (affaire R 2270/2017‑1), relative à une procédure d’opposition entre Rotkäppchen-Mumm Sektkellereien et Vins el Cep, SL,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme V. Tomljenović, présidente, MM. F. Schalin (rapporteur) et I. Nõmm, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 1er octobre 2018,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 25 janvier 2019,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 26 avril 2019,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 11 avril 2016, la requérante, Vins el Cep, SL, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Boissons alcoolisées à l’exception des bières ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 71/2016, du 18 avril 2016.

5        Le 27 avril 2016, l’intervenante, Rotkäppchen-Mumm Sektkellereien GmbH, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les droits antérieurs suivants :

–        l’enregistrement international de la marque verbale MM désignant l’Union européenne, effectué le 4 juillet 2008 sous le numéro 976438, pour les produits relevant de la classe 33 et correspondant à la description suivante : « Boissons alcoolisées (à l’exception des bières) » ;

–        l’enregistrement international de la marque figurative reproduite ci-après, désignant l’Union, effectué le 23 juillet 2008 sous le numéro 979082, pour les produits relevant de la classe 33 et correspondant à la description suivante : « Boissons alcoolisées (à l’exception des bières) » :

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–        la marque verbale allemande MUMM, enregistrée le 16 avril 2014 sous le numéro 302014042199, pour les produits relevant de la classe 33 et correspondant à la description suivante : « Boissons alcoolisées à l’exception des bières et du champagne ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

8        Le 24 août 2017, la division d’opposition a fait droit à l’opposition au motif de l’existence d’un risque de confusion avec l’enregistrement international antérieur de la marque verbale MM.

9        Le 23 octobre 2017, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 12 juillet 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours.

11      La chambre de recours, à l’instar de la division d’opposition, a commencé par effectuer une comparaison de la marque demandée avec l’enregistrement international antérieur de la marque verbale MM. À ce titre, elle a procédé à une analyse de la marque demandée. Elle a considéré, au point 25 de la décision attaquée, que l’élément figuratif de ladite marque était limité à la stylisation des lettres et à la présence du symbole constitué d’une couronne, ce dernier étant relativement usuel dans le contexte des produits demandés. De même, elle a estimé, au point 26 de la décision attaquée, qu’une partie du public pertinent, composé de consommateurs moyens dotés d’un niveau d’attention moyen, ne prêterait que peu d’attention au mot « natura » composant la marque demandée, en raison de sa petite taille, de sa position secondaire et de sa proximité avec les mots « natural » en anglais, espagnol et portugais, « naturel » en français, « naturlig » en danois et « naturale » en italien. Enfin, au point 27 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que le terme « mim », qui occupait une position centrale, constituait l’élément le plus susceptible d’attirer l’attention du consommateur moyen.

12      Au terme de l’évaluation du risque de confusion, la chambre de recours a considéré, aux point 37 et 38 de la décision attaquée, que, compte tenu de la similitude du signe demandé avec l’enregistrement international antérieur de la marque verbale MM et de l’identité des produits qu’ils désignaient, le risque de confusion était réel dans une partie importante de l’Union.

13      La chambre de recours a ensuite examiné le risque de confusion avec la marque allemande verbale antérieure MUMM.

14      Elle a tout d’abord estimé, au point 42 de la décision attaquée, qu’il existait une similitude des signes en cause sur le plan visuel, liée notamment à la présence de la lettre « m » dans chacun d’eux, sans que la présence, dans le signe demandé, de la lettre « i », du symbole de la couronne, du mot « natura » et, dans le signe antérieur, d’une lettre « m » supplémentaire n’estompe cette similitude. Ensuite, au point 43 de la décision attaquée, elle a conclu à l’existence d’une similitude sur le plan phonétique, nonobstant en particulier la différence tenant à la présence de la voyelle « i » dans le signe demandé et de la voyelle « u » dans le signe antérieur. Enfin, au point 44 de la décision attaquée, elle a considéré qu’il n’était pas possible de procéder à une comparaison sur le plan conceptuel, car les signes dans leur ensemble étaient dépourvus de signification dans toutes les langues.

15      Après avoir constaté que les produits visés par les marques en cause étaient identiques, dans la mesure où la marque demandée incluait les produits désignés par la marque antérieure, la chambre de recours a conclu, aux points 47 à 49 de la décision attaquée, que l’identité des produits atténuait toute différence entre lesdites marques et que, dès lors, la similitude de celles-ci révélait un risque de confusion en Allemagne.

 Conclusions des parties

16      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

17      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

18      La requérante invoque un moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 en ce que, d’une part, la chambre de recours aurait considéré à tort que la marque demandée était semblable à l’enregistrement international antérieur de la marque verbale MM et à la marque verbale allemande antérieure MUMM et en ce que, d’autre part, elle aurait concentré à tort son analyse sur la présence de la lettre « m » dans les signes à comparer.

19      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii) du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement 2017/1001], il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.

20      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

21      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

22      La perception des marques qu’a le consommateur moyen de la catégorie de produits ou services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale du risque de confusion (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

23      C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il convient d’examiner les arguments de la requérante.

24      Pour des raisons d’économie de procédure, le Tribunal estime opportun d’apprécier la légalité de la décision attaquée en commençant par examiner si la chambre de recours a conclu, à bon droit, à l’existence d’un risque de confusion entre la marque demandée et la marque verbale allemande antérieure MUMM [voir, en ce sens, arrêt du 25 janvier 2017, Sun System Kereskedelmi és Szolgáltató/EUIPO – Hollandimpex Kereskedelmi és Szolgáltató (Choco Love), T‑325/15, non publié, EU:T:2017:29, point 26].

 Sur le public pertinent et la comparaison des produits

25      La chambre de recours, après avoir préalablement rappelé qu’il suffisait pour faire droit à l’opposition qu’un motif relatif de refus existât dans une partie de l’Union, a également rappelé, au point 41 de la décision attaquée, que la marque antérieure MUMM était protégée en Allemagne. Ainsi, elle a procédé à l’évaluation d’un risque de confusion sur le territoire de cet État membre, en prenant en compte le public pertinent constitué des consommateurs moyens du grand public, faisant preuve d’un niveau d’attention moyen lors de l’achat des produits en cause, en l’occurrence des boissons alcoolisées. Enfin, la chambre de recours a constaté, au point 46 de la décision attaquée, que les produits couverts par les marques en conflit étaient identiques.

26      Il y a lieu de relever que ces constatations de la chambre de recours ne sont pas contestées dans le cadre du présent recours et que, au demeurant, aucun motif ne permet de les remettre en cause. C’est dès lors au regard de ces constatations que le bien-fondé des différents griefs articulés par la requérante dans le cadre du présent moyen doit être apprécié. Il convient également de relever, à l’instar de la chambre de recours, que, en présence de produits destinés à la fois à des consommateurs faisant preuve d’un niveau d’attention moyen et à des consommateurs manifestant un niveau élevé d’attention, le niveau d’attention le moins élevé de ces deux groupes doit être pris en considération [voir arrêt du 15 juillet 2011, Ergo Versicherungsgruppe/OHMI – Société de développement et de recherche industrielle (ERGO), T‑220/09, non publié, EU:T:2011:392, point 21 et jurisprudence citée].

 Sur la comparaison des signes en conflit

 Sur la prise en compte des éléments figuratifs de la marque demandée

27      La requérante reproche en substance à la chambre de recours de ne pas avoir comparé les signes en conflit considérés dans leur ensemble et d’avoir négligé les éléments figuratifs de la marque demandée. La marque demandée serait une marque figurative composée des mots « mim » et « natura » dont la police de caractères serait originale et elle comprendrait également des éléments graphiques, tels qu’une couronne placée sur la lettre majuscule « I », qui lui confèreraient un caractère distinctif évident.

28      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

29      Ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

30      Il y a également lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, l’élément verbal de la marque est, en principe, plus distinctif que l’élément figuratif, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif [voir arrêts du 9 septembre 2008, Honda Motor Europe/OHMI – Seat (MAGIC SEAT), T‑363/06, EU:T:2008:319, point 30 et jurisprudence citée, et du 6 septembre 2013, Leiner/OHMI – Recaro (REVARO), T‑349/12, non publié, EU:T:2013:412, point 23 et jurisprudence citée].

31      En l’espèce, s’agissant, premièrement, de l’élément figuratif constitué d’une couronne, il y a lieu de constater, à l’instar de la chambre de recours, que cet élément figuratif sera perçu par le consommateur comme étant un élément essentiellement décoratif, voire laudatif [voir, en ce sens, arrêt du 19 janvier 2017, Stock Polska/EUIPO – Lass & Steffen (LUBELSKA), T‑701/15, non publié, EU:T:2017:16, point 33 et jurisprudence citée]. De même, ainsi que l’a relevé la chambre de recours au point 25 de la décision attaquée, sans que la requérante ne le conteste, la couronne est un élément figuratif communément utilisé dans le secteur des boissons, notamment alcoolisées, excluant, pour ce motif également, qu’elle puisse influencer de manière décisive la perception d’ensemble de la marque demandée et distinguer les produits visés par ladite marque de ceux d’autres entreprises.

32      S’agissant, deuxièmement, de l’élément « natura » dans la marque demandée, outre que ce terme est couramment utilisé pour décrire des aliments et des boissons ayant subi le moins de transformation possible et ne contenant aucun conservateur ou additif dans le contexte des produits revendiqués et qu’il est donc faiblement distinctif à l’égard des produits en cause compte tenu de son caractère allusif, il est composé de caractères de petite taille et occupe une position secondaire dans la marque demandée en étant placé directement sous l’élément « mim », de sorte que le consommateur ne lui prêtera qu’une faible attention.

33      S’agissant, troisièmement, de la police de caractères utilisée, la requérante prétend qu’elle présenterait un caractère original. Or, il convient de constater que cette police de caractères, qui ne concerne au demeurant que l’élément « mim », puisque le terme « natura » est écrit dans une police de caractères standard, est relativement simple et ne comprend pas d’éléments graphiques marquants en dehors des pieds des lettres majuscules « M » dont la calligraphie est très légèrement stylisée, de sorte que le consommateur n’y accordera pas une attention particulière.

34      En outre, il convient de rappeler que, même si l’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque, ce principe n’exclut cependant pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée).

35      À cet égard, il apparaît que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur dans son appréciation des éléments figuratifs composant la marque demandée, lorsque, en substance, elle a considéré que les éléments verbaux composant ladite marque étaient plus distinctifs que les éléments figuratifs, en particulier la représentation d’une couronne, et que le terme « mim », en ce qu’il occupait une place centrale dans la marque demandée, constituait l’élément le plus susceptible d’attirer l’attention des consommateurs.

 Sur la comparaison sur le plan visuel

36      Sur le plan visuel, la chambre de recours a estimé, au point 42 de la décision attaquée, qu’il existait une similitude visuelle des signes en cause. À cet égard, d’une part, elle a relevé que la marque demandée reproduisait la lettre « m » de la marque antérieure et que l’attention du public serait attirée par cette lettre étant donné qu’elle était placée tant au début qu’à la fin de l’élément verbal dominant qui composait la marque demandée alors qu’elle figurait également au début et à la fin de la marque antérieure. D’autre part, la chambre de recours a relevé que les différences tenant à la présence dans la marque demandée de la lettre majuscule « I » et du symbole de la couronne, au caractère descriptif du mot « natura » et à la présence de la lettre supplémentaire « m » dans le signe antérieur, n’étaient pas significatives sur le plan visuel.

37      La requérante conteste l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle les marques en cause seraient similaires et considère que, sur le plan visuel, il existe des différences évidentes. La marque demandée serait, en effet, une marque figurative composée des mots « mim » et « natura », dont la police de caractères serait originale, et qui comprendrait également des éléments graphiques, tels qu’une couronne placée sur la lettre majuscule « I », qui lui confèreraient un caractère distinctif évident alors que la marque verbale allemande antérieure MUMM serait totalement dépourvue d’élément visuel distinctif ressemblant au signe demandé.

38      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

39      En ce qui concerne la comparaison sur le plan visuel, il convient de rappeler que rien ne s’oppose à ce que soit vérifiée l’existence d’une similitude visuelle entre une marque verbale et une marque figurative, étant donné que ces deux types de marques ont une configuration graphique capable de donner lieu à une impression visuelle [voir arrêt du 4 mai 2005, Chum/OHMI – Star TV (STAR TV), T‑359/02, EU:T:2005:156, point 43 et jurisprudence citée].

40      En l’espèce, il convient de constater que, sur le plan visuel, le signe antérieur MUMM et l’élément verbal dominant du signe demandé, à savoir l’élément en lettres majuscules « MIM », commencent et se terminent par la lettre majuscule « M ». Ils ne se distinguent que par la présence de la lettre majuscule centrale « I » dans l’élément « MIM » et par celle de la lettre majuscule « U » et de la lettre majuscule finale supplémentaire « M » dans le signe antérieur MUMM. Cette dissemblance, de même que la présence d’éléments figuratifs et de l’élément « natura » dans le seul signe demandé, eu égard aux considérations figurant aux points 29 à 35 ci-dessus, ne sauraient l’emporter sur les similitudes susvisées entre les signes en cause.

41      Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que, au point 42 de la décision attaquée, la chambre de recours a conclu à bon droit que les signes en conflit présentaient une similitude sur le plan visuel.

 Sur la comparaison sur le plan phonétique

42      Au point 43 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré qu’il existait une similitude phonétique en raison en particulier de la coïncidence du son commun de la lettre « m », placée au début et à la fin des marques en cause, tandis que la présence du mot « natura » dans la marque demandée n’emportait pas de conséquence, puisque ce mot ne serait pas prononcé par les consommateurs pour décrire le vin lorsqu’ils le commanderont. La différence tenant à la présence de la lettre « u » dans la marque antérieure et de la lettre « i » dans la marque demandée ne neutraliserait pas la similitude phonétique produite par le son commun de la lettre « m ».

43      La requérante soutient que la comparaison sur le plan phonétique entre les signes MUMM et MIM NATURA doit aboutir au constat que lesdits signes seront prononcés différemment, notamment parce que le second est composé de deux mots distincts. De plus, la requérante conteste l’affirmation de la chambre de recours, telle qu’elle figure dans la comparaison des signes en cause sur le plan phonétique, selon laquelle la différence au niveau de la voyelle « i » dans la marque MIM NATURA et de la voyelle « u » dans la marque antérieure MUMM pourrait ne pas être entendue dans l’atmosphère bruyante des bars et restaurants. En effet, elle considère, d’une part, que cette comparaison entre les signes en cause n’est pas fondée sur des facteurs objectifs et, d’autre part, que, dans les faits, le client d’un restaurant peut consulter la liste des vins proposés et poser des questions au serveur à leur sujet.

44      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

45      Concernant la comparaison des signes en cause sur le plan phonétique, il convient de constater que, dans la mesure où, ainsi que cela est mentionné au point 32 ci-dessus, l’élément « natura » ne saurait tout au plus être pris en considération qu’en tant qu’élément secondaire, l’élément verbal dominant du signe demandé, à savoir « mim », et le signe antérieur MUMM coïncident par la prononciation de la lettre « m » au début et à la fin de chacun d’eux. À cet égard, la présence de la lettre supplémentaire « m » à la fin de la marque antérieure MUMM n’emporte pas de conséquence, dans la mesure où, comme l’a relevé la chambre de recours au point 43 de la décision attaquée, elle ne modifie pas la prononciation de cette marque.

46      La seule différence dans la prononciation de l’élément « mim » et de la marque antérieure MUMM réside en définitive dans la prononciation de la voyelle « i » pour le premier et de la voyelle « u » pour la seconde. Or, cette différence apparaît secondaire par rapport à la similitude induite par la présence commune de la lettre « m » dans les marques en cause.

47      Par ailleurs, la chambre de recours a également pu considérer sans commettre d’erreur que cette différence serait peu pertinente dans la mesure où, en particulier, elle serait atténuée dans un environnement bruyant tel qu’un bar ou un restaurant, où les produits concernés sont souvent commandés oralement, et que la différence de prononciation des signes en cause ne serait dès lors pas perçue par une partie du public pertinent [voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2014, Aroa Bodegas/OHMI – Bodegas Muga (aroa), T‑536/12, non publié, EU:T:2014:770, points 54 à 56].

48      À cet égard, il y a lieu de relever que l’argument de la requérante selon lequel, dans les faits, le client d’un restaurant pourra également consulter la liste des vins proposés et poser des questions au serveur à leur sujet n’enlève rien à la pertinence des constatations de la chambre de recours selon lesquelles l’environnement d’un bar ou d’un restaurant est généralement bruyant, ce qui, à l’égard de produits du secteur viticole que les consommateurs décrivent et reconnaissent souvent sur la base d’un élément verbal lorsqu’ils les commandent oralement, altère, à l’égard d’une partie importante du public pertinent, la précision de la perception phonétique de la marque qui désigne ces produits.

49      Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que la chambre de recours a conclu à bon droit que les signes en question présentaient une similitude sur le plan phonétique.

 Sur la comparaison sur le plan conceptuel

50      La chambre de recours a relevé, au point 44 de la décision attaquée, qu’il n’était pas possible de procéder à une comparaison des marques en conflit sur le plan conceptuel en raison de leur absence de signification dans toutes les langues.

51      La requérante soutient au contraire que l’expression « mim natura » évoque clairement la signification de « nature » et que le terme « mumm » est un mot allemand pouvant signifier « entrailles, tripes, colonne vertébrale, intestins et courage ». Il en résulterait que les notions différentes qui seraient véhiculées par les marques en cause empêcheraient toute connexion d’ordre conceptuel entre elles et qu’il y aurait par conséquent lieu de conclure à l’absence de similitude et de risque de confusion.

52      Dans le mémoire en réponse, l’EUIPO ne s’exprime pas en ce qui concerne la comparaison sur le plan conceptuel.

53      L’intervenante conteste quant à elle l’argumentation de la requérante.

54      S’agissant de la comparaison sur le plan conceptuel, il convient de relever, à l’instar de la chambre de recours au point 26 de la décision attaquée que, dans le signe demandé, l’élément « natura » est secondaire et présente tout au plus une signification banale pour décrire des boissons tandis que l’élément figuratif consistant en une couronne ne véhicule qu’un vague message laudatif. Ainsi, la chambre de recours s’est fondée à bon droit sur l’élément dominant, à savoir le terme « mim », pour procéder à l’analyse conceptuel de la marque demandée. À cet égard, elle n’a pas commis d’erreur en estimant que cette dernière était dépourvue de signification dans toutes les langues.

55      En revanche, en ce qui concerne la signification du signe antérieur MUMM, ainsi que le fait valoir la requérante, il y a lieu de relever que, contrairement à ce que la chambre de recours a considéré au point 44 de la décision attaquée, ledit signe n’est pas dépourvu de toute signification en allemand, puisque, dans cette langue, il signifie notamment « courage » ou « cran ». Cela n’est pas contesté par l’EUIPO dans le mémoire en réponse. L’intervenante, sans se prévaloir d’une absence totale de signification du terme « mumm », se contente quant à elle d’affirmer qu’il serait dépourvu de sens pour les produits en cause. Au demeurant, la signification du terme « mumm » telle qu’elle est invoquée par la requérante est confirmée par les indications figurant dans le dictionnaire de langue allemande Duden Online.

56      Dans ces conditions, si un seul des signes en conflit, en l’occurrence MUMM, véhicule un ou des concepts, il y a lieu de conclure à une absence de similitude desdits signes sur le plan conceptuel [voir, en ce sens, arrêt du 12 juin 2019, EOS Deutscher Inkasso-Dienst/EUIPO – IOS Finance EFC (IOS FINANCE), T‑583/17, non publié, EU:T:2019:403, point 87].

57      Il résulte de ce qui précède que les signes en conflit présentent une similitude sur les plans visuel et phonétique. En revanche, ils ne sont pas similaires sur le plan conceptuel, contrairement à ce qu’a retenu la chambre de recours qui a estimé, au point 44 de la décision attaquée, qu’il n’était pas possible de procéder à une comparaison sur le plan conceptuel.

 Sur le risque de confusion

58      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

59      En l’espèce, la chambre de recours a conclu au point 47 de la décision attaquée, lors de l’appréciation globale du risque de confusion, que, compte tenu de la coïncidence de la lettre « m » au début et à la fin des marques en cause, lesdites marques étaient similaires sur les plans visuel et phonétique. Elle a considéré que les éléments figuratifs de la marque demandée étaient purement décoratifs et que l’élément verbal supplémentaire « natura » était descriptif et peu distinctif. De même, elle a relevé que les produits en cause étaient des boissons qui seraient fréquemment commandées dans des établissements bruyants et que la différence phonétique tenant à la présence respectivement des lettres « i » et « u » au milieu desdites marques n’était pas pertinente. En raison de la similitude des marques en cause et de l’identité des produits qu’elles désignaient, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion en Allemagne.

60      Selon la requérante, la chambre de recours, en se fondant sur une prétendue similitude des signes en conflit, a conclu à tort à l’existence d’un risque de confusion alors qu’un tel risque n’existe pas et qu’une coexistence desdits signes sur le marché est parfaitement possible, et ce, indépendamment de la renommée de la marque antérieure.

61      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

62      Au vu des appréciations qui précèdent en ce qui concerne la comparaison des marques en conflit et des produits que ces dernières désignent, il y a lieu d’approuver l’appréciation globale du risque de confusion telle qu’elle a été effectuée par la chambre de recours, nonobstant le fait que cette dernière a estimé qu’il n’était pas possible de procéder à une comparaison sur le plan conceptuel alors qu’elle aurait dû considérer que les marques en conflit n’étaient pas similaires sur ce plan.

63      En effet, si, selon la jurisprudence, des différences conceptuelles peuvent neutraliser, dans certaines circonstances, les similitudes visuelles et phonétiques entre des signes en conflit, une telle neutralisation requiert qu’au moins l’un de ces signes ait, dans la perspective du public pertinent, une signification claire et déterminée, de sorte que ce public est susceptible de la saisir immédiatement [voir arrêt du 27 octobre 2005, Éditions Albert René/OHMI – Orange (MOBILIX), T‑336/03, EU:T:2005:379, point 80 et jurisprudence citée].

64      Or, il y a lieu de constater que la différence existant sur le plan conceptuel entre les signes en conflit n’est pas, dans les circonstances de l’espèce, de nature à neutraliser les similitudes constatées.

65      En effet, si le consommateur allemand perçoit le terme « mumm » comme signifiant « courage » ou « cran », ce mot relève de notions abstraites qui n’impliquent pas, dans le contexte des produits désignés par les marques en conflit, d’associations susceptibles de faciliter la mémorisation du signe à partir de la signification de l’élément verbal qui le compose [voir, en ce sens, arrêt du 13 avril 2005, Duarte y Beltrán/OHMI – Mirato (INTEA), T‑353/02, non publié, EU:T:2005:124, point 34].

66      En outre, à supposer même que le degré de similitude entre les marques en conflit soit faible, le risque de confusion auprès des consommateurs allemands est susceptible d’exister, dès lors que les produits couverts par les marques en conflit sont identiques, ce qui est le cas en l’espèce (voir, en ce sens, arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 21).

67      Dans ces conditions, la chambre de recours a conclu à bon droit au point 47 de la décision attaquée que, si le consommateur moyen était capable de détecter certaines différences entre les marques en conflit, le risque qu’il puisse les associer l’une à l’autre était bien réel.

68      À l’instar de la chambre de recours, il y a donc lieu de conclure à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit, compte tenu de l’identité des produits qu’elles désignent, du niveau d’attention moyen du public pertinent et du fait que les signes présentent une similitude sur les plans visuel et phonétique, la similitude phonétique étant d’autant plus importante à l’égard des produits en cause que ces derniers sont souvent consommés sur commande orale ainsi que la chambre de recours l’a relevé (voir point 47 ci-dessus).

69      Par conséquent, il convient de confirmer la décision attaquée en ce qu’elle comporte la constatation de l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

 Sur la prise en compte de la lettre « m » dans les signes à comparer et l’existence de marques antérieures composées de cette lettre et désignant des produits de la classe 33 identiques à ceux couverts par la marque demandée

70      La requérante conteste également l’analyse de la chambre de recours en ce que cette dernière se serait concentrée sur la présence de la lettre « m » dans les marque à comparer alors que la présence de cette lettre ne saurait suffire pour refuser l’enregistrement de la marque demandée. À cet égard, la requérante cite des marques de l’Union européenne ayant été acceptées à l’enregistrement alors qu’elles sont constituées de la seule lettre « m » et qu’elles désignent des produits de la classe 33, ce qui démontrerait la faiblesse du caractère distinctif des marques invoquées en l’espèce à l’appui de l’opposition. Enfin, la requérante soutient que, bien que les décisions antérieures adoptées par l’EUIPO ne soient pas contraignantes, la coexistence pacifique de nombreuses marques consistant uniquement en la lettre « m » et enregistrées pour des produits de la classe 33 viendrait contredire l’argument selon lequel il y aurait un motif de refus à l’enregistrement de la marque demandée.

71      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

72      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours aurait à tort concentré son analyse sur la présence de la lettre « m » dans les marques en conflit, il convient de relever que, en substance, il y a déjà été répondu aux point 35, 40 et 45 ci-dessus. En effet, lorsqu’il a été procédé à l’analyse des marques en conflit, il a été estimé que l’élément « MIM » composant la marque demandée, lui-même composé de la lettre « m » à deux reprises, devait être pris en compte en tant qu’élément dominant de ladite marque aux fins de la comparaison avec la marque antérieure, elle-même composée de la lettre « m » à trois reprises.

73      La prise en compte de la lettre « m » s’impose donc au regard de la composition des marques en conflit, sans qu’il puisse être reproché à la chambre de recours d’avoir commis une erreur d’appréciation à cet égard. L’argument de la requérante n’est pas donc pas fondé.

74      Dans ces conditions, l’argumentation de la requérante, en ce qu’elle repose en outre sur l’existence de marques de l’Union européenne précédemment enregistrées pour des produits de la classe 33 et se composant de la seule lettre « m » et sur leur coexistence pacifique sur le marché présente un caractère inopérant, puisqu’elle est sans conséquence sur l’analyse des marques en conflit en l’espèce et leur comparaison.

75      Dès lors, le moyen unique soulevé par la requérante doit être rejeté comme étant pour partie non fondé et pour partie inopérant ainsi que, partant, le recours dans son intégralité, sans qu’il y ait lieu d’examiner s’il existe également un risque de confusion entre la marque demandée et l’enregistrement international de la marque verbale MM désignant l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 15 février 2017, Morgese e.a./EUIPO – All Star (2 STAR), T‑568/15, non publié, EU:T:2017:78, point 90].

 Sur les dépens

76      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

77      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Vins el Cep, SL, est condamnée aux dépens.

Tomljenović

Schalin

Nõmm

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 décembre 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.